Mémento sur les portes de Neuf-Brisach Focus sur la porte de Bâle Dr BALLIET J.M.
Les portes de la place de Neuf-Brisach au XVIIIe siècle. Quatre portes sont, par paires, disposées d’une manière diamétralement opposée et cela selon deux axes : axe nord-est vers sud-ouest et sud-est vers nord-ouest. Elles occupent donc la moitié des huit fronts de la place. 1. Le front sud-ouest [Font 1-2] — Porte de Belfort : La seule dont le pavillon soit bien conservé. Par contre, tous les éléments extérieurs (ponts, etc.) ont disparu après 1870. 2. Le front nord-ouest [Front 3-4] — Porte de Colmar : Un accès important, donnant sur la route de Colmar, se dirige vers cette porte. Louis XIV - Fondation de 3. Le front nord-est [Front 5-6] — Porte de Strasbourg : les routes en pro- Neuf-Brisach (Médaille en bronze par Mauger - 1841) venance de Breisach et de Strasbourg fusionnent à courte distance de la porte de Strasbourg et se dirigent ensuite vers elle. Porte détruite au début du XXe siècle. 4. Le front sud-est [Front 7-8] — Porte de Bâle : Porte détruite sur la demande de la municipalité au début du XXe siècle [1902].
Plan de situation de Neuf-Brisach vers 1860 (Plan de l’auteur d’après Neumann)
www.fortifications.fr & www.artillerie.info
Mémento sur les portes de Neuf-Brisach (Dr Balliet)
Les portes ont été construites à l’épreuve1 et, à l'exception de la porte de Strasbourg, sont surmontées par des pavillons parfaitement visibles de l’extérieur de la place. Si les portes sont initialement richement ornées, l’état actuel des portes de Colmar et de Belfort donne l’illusion d’un style très dépouillé. On note que la porte située sur le réduit de demi-lune, bien que moins imposante que celle du corps de place, était également Novum-Brisacum — Front 3-4, porte de Colmar ornée et disposait d’un pont-levis Gravure sur cuivre d'après Jean-Daniel Schoepflin (1694-1771), in « Alsatia Illustrata 1751-1761 ». (cf. la gravure de Schœpflin montrant l’état de la porte de Colmar au milieu du XVIIIe siècle). Initialement, portes, demi-lunes et réduits comprennent une succession de pont-levis et de ponts en bois2. Ces ponts en bois se révèlent d’un entretien particulièrement coûteux et, très précocement, en 1741, on remplace les piliers en bois par des piliers en pierre. Cela s’avère encore insuffisant et, en 1788, les ponts en bois sont à nouveau fort délabrés. Ils sont alors remplacés par des ponts dormants en pierre3. Certains ponts-levis, tout aussi vétustes, sont supprimés.
Porte de Bâle - Les ponts sont encore en bois mais les piliers en pierre sont venus remplacer ceux en bois au moment de la restauration de 1 782. Neuf-Brisach - Plan-relief construit de 1703 à 1706 sous la direction de l'ingénieur Montaigu. Bois, papier, soie, métal — 5 tables — Échelle 1/600. Restauré en 1782, 1936 (nettoyé 2012). Cliché de l’auteur [2012].
1
! À l’épreuve de la bombe : lourds projectiles explosifs tirés par les mortiers de l’époque.
2
! Ponts à chevalet
3
! Le seul à peu près conservé se trouve porte de Colmar.
2 - 10
www.fortifications.fr & www.artillerie.info
Mémento sur les portes de Neuf-Brisach (Dr Balliet)
Porte de Bâle - La demi-lune 23 & réduit de demi-lune 28 Neuf-Brisach - Plan-relief construit de 1703 à 1706 sous la direction de l'ingénieur Montaigu. Bois, papier, soie, métal — 5 tables — Échelle 1/600. Restauré en 1782, 1936 (nettoyé́ 2012). Cliché de l’auteur [2012].
www.fortifications.fr & www.artillerie.info
3 - 10
Mémento sur les portes de Neuf-Brisach (Dr Balliet)
La porte de Bâle avant sa destruction (1902)
Focus sur la porte de Bâle avant sa destruction4 : Passage couvert de 31,50 mètres de long, 3,72 mètres de large pour une hauteur de 4,06 mètres. Jouxtant cette porte et correspondant au rez-dechaussée du pavillon se trouvent disposées des 11 pièces à l’épreuve de hauteur variée. Aujourd’hui, les accès à la ville ont beaucoup changé… Suite aux destructions volontaires (début du XXe pour les portes de Strasbourg et de Bâle), aux conséquences des conflits et à des reconstructions approximatives, seul le pont de la porte de Colmar jeté sur le premier fossé est resté à peu près intact. Il faut s’appuyer sur d'exceptionnels témoignages photographiques pour pouvoir restituer l’état des ponts de la place pour la période 1788-1875.
En haut : Porte de Strasbourg Cliché original, nov.-déc. 1870 — Tirage albuminé 16 x 22 À droite : Porte de Colmar. Cliché original, nov.-déc. 1870 — Tirage albuminé 16,5 x 21,5 cm Coll. de l’auteur
4
! NEUMANN (Major) - Die Eroberung von Schettstadt und Neu-Breisach im Jahre 1870. Im Auftrage der Königl. General-Inspection der Artillerie, unter besonderer Berücksichtigung der artilleristischen Verhältnisse und mit Benutzung dienstlicher Quellen bearbeitet. Berlin, Vossische Buchhandlung, 1876 ; Texte & Atlas
4 - 10
www.fortifications.fr & www.artillerie.info
Mémento sur les portes de Neuf-Brisach (Dr Balliet)
Période 1871-1918 Dans les suites immédiates de la guerre de 1870-71, les dégâts aux portes de Colmar et de Strasbourg sont réparés et les tableaux surmontant les portes voient leur symbolique adaptée aux vœux de nouvel occupant, le Reich allemand. À partir de 1875, les accès sont tous aménagés pour répondre, à minima, aux besoins d’une guerre « moderne ». C’est ainsi que les portes disposent d’une succession rapprochée d’éléments défensifs qui rendent leur accès particulièrement difficile et les met à l’abri d’une surprise (i. e. attaque surprise) tentée contre l’une ou l’autre d’entre elle. Les anciens corps de garde du XVIIIe servent de substrat à des corps de garde modernisés puisque casematés. Seul le corps de garde de la porte de Colmar est organisé défensivement, il est d’ailleurs agrémenté d’une poterne qui, passant sous la tenaille, la relie au corps de place. Les corps de garde des autres portes sont construits de manière plus légère et n’ont pas de rôle défensif. Enfin, la porte de Belfort, de peu d’utilité est transformée en porte piétonne 5. Ce n’est qu’au début du XXe siècle que les portes de Strasbourg et de Bäle seront élargies suite aux demandes de la municipalité de l’époque. Il en résulte la disparition du pavillon de la porte de Bâle (la porte de Strasbourg n’en disposait pas) et le réaménagement des anciennes salles et de leurs accès. Les accès étant ainsi renforcés, une telle attaque rencontrerait, à la fin du XIXe les obstacles suivants… 1. Une porte en tôle fermant le tambour établi sur le chemin couvert à l’issue du premier pont reliant le chemin couvert à la demi-lune ; 2. Une grille en fer fermant la demi-lune qui remplace l’ancien pont-levis qui a été démoli et son vide remblayé ; 3. Le pont-levis du réduit de demi-lune ; 4. La porte en tôle fermant le réduit de demi-lune ; 5. Éventuellement, le jeu d’une mine établie près de la tenaille sous la voûte en maçonnerie qui remplace l’ancien pont-levis ; 6. 7. & 8. À forcer la grille défensive établie en avant du pont-levis ; à franchir le pont-levis et à forcer la porte en chêne sous la voûte6. Par ailleurs, porte et accès sont couverts par les feux croisés des éléments de fortification constituant le front 7-8. Savoir : 1. Les tours bastionnées 7 et 8 ainsi que les petits flancs de courtine couvrent le premier fossé au droit de la porte. Pour éviter les tirs fratricides, deux murs-boucliers sont disposés, l’un sous les arches du pont, l’autre, d’une dimension contenue, s’appuie contre la courtine ;
Neuf-Brisach — Reconnaissance aérienne française (11 mai 1917)
5
! Il persiste toutefois encore un doute à ce propos car, au regard des vestiges et dispositions actuels, cet aménagement pourrait être antérieur à 1870… Quelques recherches à ce propos se révèlent encore nécessaires.
6
! Ces dispositions disparaîtront lors de la destruction de la porte de Bâle et son élargissement. Elle sera remplacement par une grille en fer.
www.fortifications.fr & www.artillerie.info
5 - 10
Mémento sur les portes de Neuf-Brisach (Dr Balliet)
2. Le fossé du réduit de demi-lune est couvert par les feux croisés de la tenaille alors que le fossé de la demi-lune est couvert par les contregardes.
Tableau allemand ornant le porte de Bâle. Noter la plaque française apposée en novembre 1918.
Porte de Bâle. Entrée des troupes françaises en novembre 1918. Noter les imposantes grilles défensives et le poste de garde à l’épreuve aujourd’hui encore conservé. Coll. de l’auteur
6 - 10
www.fortifications.fr & www.artillerie.info
Mémento sur les portes de Neuf-Brisach (Dr Balliet)
Destructions en 1945… à aujourd’hui. Si Neuf-Brisach est détruite à 80 % par les bombardements américains, les ponts sont quant à eux dynamités par les troupes allemandes. C’est ainsi que les ponts des portes de Strasbourg, de Bâle et de Colmar sont détruits à l’exception notable du pont de la porte de Colmar franchissant le premier fossé.
Porte de Bâle, février1945 - Installation d’un pont de circonstance par les troupes US pour remplacer le pont détruit.
Dès le 6 février 1945, date de la libération de Neuf-Brisach, les troupes du génie américain mettent en place des ponts provisoires et les prisonniers allemands sont mis à contribution pour combler les cratères. C’est ainsi que les ponts sur le deuxième fossé ont été remplacés par un remblai. Il en est peu ou prou même pour les ponts des portes de Strasbourg et de Bâle : dans un premier temps, ils sont partiellement conservés et consolidés puis, plus tardivement, en 1989, le pont de la porte de Strasbourg est reconstruit presque à l’identique.
Porte de Bâle - Cliché 10th TRW
Bibliographie 1. BALLIET (J.M.) - La place forte de Neuf-Brisach au XVIIIe. Archétype de la fortification bastionnée contemporaine. In : Revue de l'Association des Amis du Musée de l'Infanterie, 2012, vol. 60, p. 9-15. 2. BALLIET (J.M.) - Neuf-Brisach 1698 bis 1870. Vom Vauban'schen Meisterwerk zur unbekannten Festung. In : Festungsbaukunst in Europas Mitte, 2011, vol. Festungsforschung vol. 3, p. 151-170, 320-321. 3. BALLIET (J.M.) - Wasser und Festungswesen am Beispiel von Straßburg und Neu-Breisach. In : Schriften der Deutschen Wasser-historischen Gesellschaft (DWhG) e.V., 2008, vol. 10, p. 279-303. 4. [MANUSCRIT - SIÈGES DE SÉLESTAT ET DE NEUF-BRISACH 1870] - BRENET (Cne de gendarmerie Ch.) - Schlestadt - Neuf-Brisach 1814-1870. S.l., s.e., s.d. (vers 1880). 5. NEUMANN (Major) - Die Eroberung von Schettstadt und Neu-Breisach im Jahre 1870. Im Auftrage der Königl. General-Inspection der Artillerie, unter besonderer Berücksichtigung der artilleristischen Verhältnisse und mit Benutzung dienstlicher Quellen bearbeitet. Berlin, Vossische Buchhandlung, 1876.
www.fortifications.fr & www.artillerie.info
7 - 10
Mémento sur les portes de Neuf-Brisach (Dr Balliet)
Compléments… État actuel.
Porte de Bâle - Cliché Bajm 2014
Porte de Bâle, mur-bouclier (vers 1880) - Cliché Bajm 2014
8 - 10
www.fortifications.fr & www.artillerie.info
Mémento sur les portes de Neuf-Brisach (Dr Balliet)
Tour bastionnée 8 & petit-flanc de courtine couvrant la porte de Bâle - Cliché Bajm 2014
Mur-bouclier (vers 1880) sous le pont de la porte de Colmar - Cliché Bajm 2014
www.fortifications.fr & www.artillerie.info
9 - 10
Mémento sur les portes de Neuf-Brisach (Dr Balliet) Passage couvert sous le pont de la porte de Colmar. À partir de cette dernière, on dispose ainsi, en passant par une poterne, d’un passage ) relativement protégé par le tablier et les piles du pont vers les dehors de la place. Les trois autres portes étaient disposées de la même manière. Cliché Bajm 2014
Porte en chêne, époque 19e (porte de Colmar) - Cliché Bajm 2014
10 - 10
www.fortifications.fr & www.artillerie.info