Objet(s) exposé(s)

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Objet(s) exposé(s) Reloaded................................................. 7 Bertrand Lavier, Mathieu Mercier, Kaz Oshiro, Richard Artschwager, John Armleder Dramatically Different................................... 17 Gabriel Orozco, Donald Judd, Sylvie Fleury, Étienne Bossut All of the Above......................................... 25 Haim Steinbach, Didier Marcel, Ronan & Erwan Bouroullec, Giorgio Morandi, Elmgreen & Dragset Pièces montrées.......................................... 35 George Brecht, Marcel Duchamp, Joseph Kosuth, Michael Craig-Martin

TEXTES ....................................................

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Introduction............................................. Reloaded................................................. Dramatically Different................................... All of the Above......................................... Pièces montrées..........................................

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BIBLIOGRAPHIE

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Salle 1

1.1

1.4 Bertrand Lavier Picasso Outremer, 2009 Pigment et bronze vernis sur aile de voiture 90 x 135 x 14 cm

1.2

Richard Artschwager Piano Grande, 2012 Mélaminé sur bois 116,8 x 201,9 x 88,9 cm

1.5 Mathieu Mercier Drum & Bass, 2003 Étagères en métal, coussin, classeur, bidon 230 x 20 x 200 cm

1.3 Kaz Oshiro Dumpster (Yellow with Blue Swoosh), 2010 Acrylique sur toile, roues 121 x 192 x 86,5 cm

John Armleder CRE (Furniture Sculpture) 1986–2006 Acrylique sur toile, chaises 225 x 418 x 76 cm



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Salle 2

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2.3 Gabriel Orozco DS, 1993 Citroën DS modifiée 140,1 x 482,5 x 115,1 cm

2.2

Sylvie Fleury Ladder, 2007 Escabeau plaqué or 23.5 carats, bronze 196 x 150 x 50 cm 2.4

Donald Judd Stack, 1928-1994 (1991) Acier inoxydable, plexiglas rouge 22,8 x 101,6 x 78,7 cm 10 éléments

Étienne Bossut Des pots, 1995 Résine polyester Dimensions variables 12 éléments



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Salle 3

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3.4 Haim Steinbach Charm of Tradition, 1985 Étagère en bois laminé, chaussures en cuir, plastique, métal et lampe avec pied en sabots de cerf 96,5 x 147,3 x 38 cm

3.2

Giorgio Morandi Natura morta, 1941 Peinture à l’huile sur toile 34,5 x 49 cm

3.5 Didier Marcel Sans titre, 2003 Résine polyester, inox ø120 x 300 cm, 4 éléments

3.3 Erwan & Ronan Bouroullec Vases combinatoires, 1998 Polyuréthane Dimensions variables, 8 éléments

Elmgreen & Dragset Prada Marfa, 2005 Brique, plâtre, peinture, verre, aluminium, moquette 760 × 460 cm



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Salle 4

4.1

4.3 George Brecht Three Arrangements, 1962-1973 Bois peint, vinyle, métal, et matériaux divers selon les objets présentés Dimensions variables

4.2

Joseph Kosuth One and Three Chairs, 1965 Bois, épreuve gélatino-argentique 118 x 271 x 44 cm

4.4 Marcel Duchamp Fontaine, 1917 Urinoir en porcelaine 68 x 48 x 35 cm

Michael Craig-Martin An Oak Tree, 1973 Verre d’eau, étagère en verre, supports chromés, texte imprimé Dimensions variables



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4.4






Objet(s) exposé(s) aborde la question de la démarcation entre l’objet usuel et l’objet d’art, en mettant en scène un certain nombre de créations, d’horizons parfois très différents. Les œuvres dialoguent, interfèrent, se complètent ou se confrontent les unes avec les autres. De cette tension émerge de nouvelles perspectives d’interprétation, un nouveau regard, permettant une relecture de l’ensemble. Le choix des œuvres s’est porté sur des pièces qui souvent, en plus d’interroger la frontière entre l’art et le réel, abordaient la question de la pratique de la citation ou de la mise en abîme dans l’art. Ainsi, Drum & Bass de Mathieu Mercier peut renvoyer au display d’Haim Steinbach qui se trouve quelques salles plus loin, tout autant qu’évoquer les reprises que Sylvie Fleury a elle aussi produit en s’inspirant des compositions de Mondrian. Ainsi, cette toile invisible qui se tisse sous nos yeux dans l’espace d’exposition, permet d’interroger la pratique du référencement dans l’art, et de l’autonomie de l’œuvre. Pour jouer encore davantage sur cette question de l’appropriation, de la signature et de l’authenticité, chacune des quatre salles porte le nom d’une exposition contemporaine, faisant le plus souvent référence à un artiste ayant une pratique curatoriale. Le nom de ces salles est volontairement

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ambivalent. Il joue sur le sens de l’ensemble des œuvres présentées dans l’espace, en orientant le spectateur vers une certaine lecture ou au contraire en l’ouvrant à des interprétations plus personnelles. De plus, l’emprunt de noms d’expositions d’artistes curateurs permet aussi de questionner la frontière entre le commissaire et l’artiste, frontière de plus en plus brouillée, et controversée. Certaines expositions proposent une telle relecture des œuvres qu’elles peuvent elles-mêmes être considérées comme un nouveau degré de création, au travers des choix plastiques et conceptuels du commissaire. Ainsi, ce catalogue de l’exposition Objet(s) exposé(s) offre volontairement différents niveaux de lectures, permettant de s’interroger sur la limite, et donc peut-être l’indiscernabilité, entre l’objet d’art et l’objet du quotidien.

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Le nom de la première salle Reloaded est une référence directe à l’exposition d’Elaine Sturtevant qui a eu lieu en 20142015 à la galerie Thaddaeus Ropac à Paris. Pour cette première exposition posthume, la galerie, qui avait représenté l’artiste les 25 années passées, a choisi de réunir dans un même espace ses plus emblématiques « répétitions », depuis les Flowers et les Marilyn de Warhol, aux Flags de Johns. Au travers de sa pratique appropriationniste, Sturtevant questionnait l’authenticité, et donc la reproductibilité de l’art. « À la plus parfaite reproduction il manquera toujours une chose : le hic et nunc [ici et maintenant – ndlr] de l’œuvre d’art, – l’unicité de son existence au lieu où elle se trouve. […] Le hic et nunc de l’original constitue ce qu’on appelle son authenticité. […] Tout ce qui relève de l’authenticité échappe à la reproduction – et bien entendu pas seulement à la reproduction technique. » 1

1. Walter, Benjamin, L’ uvre d’art

Cette première salle d’exposition interroge, selon les termes de l’artiste, le rapport au « vrai-faux » ou au « faux-vrai ». « Son but était de nous forcer à regarder au-delà de la surface des choses. Elle poursuivait une réflexion sur la production, la diffusion et la consommation de l’art en interrogeant les notions d’authenticité et d’originalité. » 2

à l’époque de sa reproductibilité technique, Gallimard, Paris, 2012, p.12-13.

2. Anonyme, «Sturtevant Reloaded»,

Slash, novembre 2014. http://slash-paris.com/evenements/ sturtevant-reloaded

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Salle 1

La première œuvre, Picasso Outremer de Bertrand Lavier, exploite le principe de signature et d’appropriation dans l’art. Cette pièce de la série des ailes de la Xsara Citroën, signée Picasso comme tous les autres modèles de la gamme automobile, est recouverte par l’artiste d’un bleu outremer, qui évoque le fameux International Klein Blue dont Yves Klein mit la composition au point en 1956. En rajoutant une couche de peinture – dont la facture pourrait s’apparenter à celle de Van Gogh –, Bertrand Lavier crée un glissement de la sculpture vers la peinture, tout en apposant sa propre signature, à la suite des grands noms de l’histoire de l’art, questionnant l’authenticité de l’œuvre, et l’éternel référentialité des artistes à leurs prédécesseurs.3 Cette pratique du court-circuitage des identités est chère à l’artiste qui a réalisé de nombreuses pièces avec cette même technique de recouvrement, comme Charles Eames Chair ou le très connu piano Klein, autant d’œuvres qui s’amusent du jeu de la citation. Face à Lavier, Drum & Bass de Mathieu Mercier, est une composition d’objets ménagers choisis et achetés par l’artiste : une étagère noire et divers produits de couleur bleue, jaune et rouge. Cette œuvre se présente comme un objet utilitaire et décoratif, bien que le motif de la grille, créé par l’agencement des objets colorés sur l’étagère rappelle directement les compositions abstraites de Mondrian. Le titre Drum & Bass fait d’ailleurs écho à la série Boogie-Woogie réalisée par le peintre au début des années 1940. Cet intérêt pour la citation, a été partagé par de nombreux artistes, et ces mêmes peintures de Mondrian ont également été reprises par d’autres, telle que Sylvie Fleury. La série Drum & Bass dont est issue cette pièce du même nom, est ancrée à la fois dans le monde de l’art et dans notre société de consommation, et propose une investigation de notre rapport au réel, et plus particulièrement de ce qui advient dans l’interstice de cette relation.

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3. Cette pièce pourrait d’ailleurs

aussi faire référence à certaines toiles d’Ellsworth Kelly.


Reloaded

Contre le mur, Dumpster (Yellow with blue Swoosh) de Kaz Oshiro. Les pièces de cet artiste japonais ressemblent au premier coup d’œil à de simples objets de la vie courante, ici une benne, que l’on associe davantage au domaine de la rue qu’à celui de la galerie d’art. Ces objets identifiés immédiatement par le visiteur comme de banals produits du quotidien s’avèrent être, face à une observation plus attentive, des toiles délicatement et précisément peintes, tendues sur châssis et assemblées ensuite entre elles pour former ces objets / peintures à trois dimensions, qui une fois de plus, interrogent les frontières de la peinture et de la sculpture, du réel et de l’illusoire 4, du fonctionnel et du décoratif.

4. Dans le même esprit, l’exposition

Dans l’angle opposé de la salle, le Piano Grande de Richard Artschwager. L’art de Richard Artschwager se situe au confluent de plusieurs techniques et disciplines : ce sont généralement des œuvres à deux dimensions, ni vraiment peintures, ni vraiment sculptures, mais des objets bi ou tridimensionnels qui mixent les deux et se retrouvent le plus souvent entre la sculpture, le meuble ou le morceau d’architecture, le tout avec une rigueur et des esthétiques fonctionnalistes empruntées à la production mobilière en série : formica, bois industriel, faux-bois, plastiques et autres matières synthétiques. Du coup, le réel est comme aliéné, déréalisé et devenu une représentation de lui-même. Ses constructions semblent faire allusion au réel seulement pour mettre en question l’objectivité de l’objet, son appartenance au monde quotidien. Artschwager parle d’ailleurs de ses œuvres comme des « objets inutiles ».5

5. À l’opposé de Robert Stadler,

Enfin, une œuvre issue de la série des Furniture / Sculpture de John Armleder. Comme dans toute la série, un ensemble d’un ou plusieurs objets sont associés à une peinture de l’artiste, sélectionnés et réalisés dans l’optique de fonctionner ensemble. Ici, Armleder ne joue pas de la difficulté à définir s’il s’agit d’une peinture ou d’une sculpture, comme dans la plupart des œuvres précédentes, mais combine dans un

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Le Projet Hyperréaliste au National Academy Museum de New York, par Xavier Veilhan (en 2005), montrait l’envers de toiles américaines hyperréalistes.

qui lui, parle de ses créations comme de «sculptures utiles».


Salle 1

geste simple les deux, formant un nouvel ensemble. Pour cette série, peinture et sculpture sont indissociables. Les objets choisis s’adressent la plupart du temps à un individu dans son environnement public, ici des chaises, qui suggèrent une salle d’attente. La peinture qui y est associée est réalisée par John Armleder, mais s’inspire toujours d’autres artistes, en particulier des grandes figures de la modernité, proposant ainsi une critique de la notion de style original et une mise en cause de l’autonomie de l’œuvre d’art, comme évoqué plus haut avec Picasso Outremer. « Je suis sûrement un artiste sans imagination qui peut profiter de l’imagination des autres. Ainsi, j’utilise un vocabulaire déjà utilisé auparavant. Sur la question de ce que je cite, ce sont toujours des choses qui m’intéressent, pas forcément pour des raisons historiques et qui correspondraient au fondement des œuvres. » 6

6. Citation issue des Entretiens sur

l’art de la Fondation d’Entreprise Ricard, entre John Armleder et Catherine Francblin. http://www.fondation-entreprise-ricard.com/Conferences/ view/156-john-armleder-l-artsans-les-artistes

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La seconde salle est intitulée Dramatically Different, comme l’exposition de 1997 au Centre National d’Art Contemporain, Le Magasin, à Grenoble. Cette exposition par le curateur, mais aussi critique Éric Troncy, empruntait elle-même son nom à une crème de beauté. C’est le seul titre qui n’est pas emprunté à l’exposition d’un artiste. Ce titre permet donc, comme les autres, l’ouverture à différentes interprétations. Le terme Dramatically Different peut renvoyer au fait que chacune des œuvres présentées dans cet espace interroge – d’une manière plus ambigüe encore que dans la salle précédente – la distinction de l’œuvre d’art avec le réel. En effet, chacun des objets exposés pourrait, à un détail près, appartenir à un univers domestique. Ces œuvres font ouvertement référence au monde de l’industrie, et induisent ainsi une éventuelle critique, sans pour autant l’expliciter. Éric Troncy présentait déjà en 1997 une sélection de travaux de Sylvie Fleury. Ces travaux faisaient écho, par l’emprunt du nom de cette crème de beauté, à son travail de critique de la société de consommation, en particulier dans le domaine du luxe féminin.

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Salle 2

La deuxième salle débute par DS de Gabriel Orozco datant de 1993. La voiture, sortie d’une casse automobile par l’artiste, ne représentait déjà plus le confort, la modernité, et la prospérité de l’industrie de l’après-guerre, comme décrite par Roland Barthes dans Mythologies. La « déesse » transformée de Gabriel Orozco est encore plus aérodynamique que l’originale, mais privée de son moteur, elle est contrainte à l’immobilité totale et donc à n’être plus qu’un emblème d’une modernité industrielle désuète, retournée en un artefact absurde empreint du Dadaïsme. Par ce geste l’artiste interroge la frontière entre le réel – ce qui fonctionne et fait partie du quotidien – et l’art, « ce qui suspend et trouble les fonctions de l’ordinaire », « ce qui dys-fonctionne ».7 « L’art consiste simplement à essayer de vivre, de comprendre, de compléter la relation que nous avons avec notre environnement et de se définir par rapport à elle. » 8

7. Barbara, Formis, Esthétique

de la vie ordinaire, Presses universitaires de France, Paris, 2010, p.82.

8. Gabriel Orozco cité dans

Au mur, Stack de Donald Judd. Ces œuvres minimalistes sont généralement constituées de dix éléments disposés verticalement au mur selon un protocole très précis. Par ce procédé, Judd entend bannir toute référence de savoir-faire individuel et toute trace de la main de l’artiste. La même forme est répétée et l’intervalle entre chaque forme est identique à l’espace quelle occupe. Ainsi cet « objet spécifique » n’est pas une composition finie mais un système visuel illimité, qui a pour fonction d’englober l’espace qui l’environne, de le saisir en un tout, de le donner à voir. Ces Stacks ou piles, sont d’ailleurs la conséquence directe de son manifeste Specific Object publié en 1965, où il annonce la fin de la distinction entre peinture et sculpture. Plus tard, il étend ce principe à l’architecture et au design, notamment avec l’aménagement de bâtiments qu’il achète au cours des années 1990 dans la petite ville de Marfa au Texas. Il conçoit une architecture et un mobilier dans le prolongement de ses créations plastiques. Toute son œuvre applique ce principe de fusion des arts.

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Dominique, Blanc, «La DS de Gabriel Orozco», Connaissance des arts, 2010. https://www.connaissancedesarts.com/art-contemporain/ la-ds-de-gabriel-orozco-1115025


Dramatically Different

L’œuvre suivante est Ladder de Sylvie Fleury. Cet apparent escabeau est un moulage en bronze, plaqué or. Par son lien avec le milieu industriel, Ladder rappelle la DS de Gabriel Orozco, et la critique de l’industrie que ces deux pièces sous-entendent. Les paliers sont comme des échelons à gravir, pavés d’or, couleur qui renvoie ostensiblement au luxe et à la société de consommation, souvent évoquée par l’artiste suisse dans toute son œuvre. Placée à proximité de l’œuvre de Judd, cette pièce est non sans rappeler l’habitude de l’artiste à se réapproprier les productions des grands noms de l’histoire de l’art, auxquels elle ajoute toujours un caractère grinçant. Dans Eternal Wow on Shelves datant de 2007, elle s’empare du Stack pour en faire dégouliner des formes organiques, interrogeant avec un décalage certain, la rigueur de l’œuvre. La citation qui suit de Donald Judd montre bien l’ironie avec laquelle Sylvie Fleury pervertit son principe : « La qualité essentielle des formes géométriques vient de ce qu’elles ne sont pas organiques, à la différence de toute autre forme dite artistique. » 9 Ce type de perversion est récurrent chez elle. Il suffit de penser à ses reprises de Mondrian, desquelles elle brise la rigueur par l’ajout de carrés de fourrure. Enfin, Des pots d’Étienne Bossut, sont disposés là, comme des objets trouvés, ou peut-être des objets perdus, à la manière de Dumpster de Kaz Oshiro, où seule la décontextualisation de l’objet met le doute quant à sa réelle identité. Ici, la technique d’Étienne Bossut consiste en une empreinte directe, puis un moulage en résine teintée dans la masse que l’artiste décline invariablement depuis plus de trente ans. Cette technique renvoie à une recherche conceptuelle sur le statut de l’objet d’art dans le contexte de la modernité industrielle. Elle permet d’opérer une requalification poétique d’objets issus d’une quotidienneté standard. Ses œuvres, sortes de ready-mades empêchés, se situent entre l’image et l’objet, l’original et le multiple, entre ce qui disqualifie et ce qui requalifie. Des pots prend le contre-pied de Judd, dans son optique tridimensionnel pour sortir de l’illusionnisme de la peinture.

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9. Citation issue d’un entretien entre Lucy Lippard et Donald Judd dans Art in America, juillet-août 1967.


Salle 2

« Les trois dimensions sont l’espace réel. Cela élimine le problème de l’illusionnisme et de l’espace littéral, de l’espace qui entoure ou est contenu dans les signes et les couleurs – ce qui veut dire qu’on est débarrassé de l’un des vestiges les plus marquants, et les plus critiquables, légués par l’art européen. » 10

10. Donald, Judd, «Specific Objects», Arts Yearbook 8, 1965.

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La salle trois emprunte son nom à une exposition de John Armleder au Palais de Tokyo à Paris en 2011. Dans All of the Above, l’artiste qui avait carte blanche pour les choix de scénographie, a choisi de réunir sur une même scène, à la manière d’un théâtre d’images, une accumulation d’œuvres de ses contemporains. Les pièces se juxtaposent, se gênent, se cachent les unes les autres en même temps qu’elles se parlent, et créent un tout nouvel univers. Ce principe d’association entre les objets et leur décor est particulier à Armleder, puisqu’on le retrouve notamment dans les Furniture / Sculpture qu’il réalise depuis 1979, dont l’une est montrée dans la salle 1. Ce nom de salle, au travers de l’exposition à laquelle elle renvoie, oriente donc la compréhension des œuvres autour du principe d’association et de dispositif d’exposition, plus communément appelé display.

11. Maïté, Vissault, «Crise de légi-

timité et logique de réseau. L’inscription géopolitique de l’art contemporain au regard de l’exposition Made in Germany à Hanovre», Arts & Sociétés. http://www.artsetsocietes.org/ seminaireantibes/f/f-vissault.html

« [Le display] désigne une pratique de l’exposition comme installation, l’exposition étant en soi le contenu, le système de référence et production de sens de l’art contemporain. » 11

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Salle 3

Charm of Traditions est une des nombreuses pièces de Haim Steinbach, fonctionnant sur ce même principe de display. Appliqué à une œuvre, ce terme désigne la mise en relation d’éléments par un dispositif d’exposition spécifique, donnant l’ensemble à voir comme un tout, et dont les divergences et similarités font sens, plus que les objets eux-mêmes. Le dispositif de Steinbach consiste à créer une étagère, généralement recouverte de formica coloré, et d’y disposer une série d’objets le plus souvent en ligne. Objets usuels, objets d’art, fétiches ? Des objets métonymiques avant tout auxquels Haim Steinbach confie une charge symbolique, c’est-à-dire aussi bien culturelle qu’affective. L’objet devient un signifiant, témoignage d’une époque, exprimant un mode de vie et de représentation. Au travers des codes auxquels il renvoie, l’artiste exploite à la fois la grammaire minimaliste (pureté des agencements), la nostalgie du pop art (référence à l’objet roi et à la culture populaire), et la ferveur de la critique sociologique de la société consumériste. Quatre troncs d’arbres colorés tournent sur eux-mêmes dans l’espace, sur des socles-miroirs. Cette pièce Sans titre de Didier Marcel investi elle aussi le champ du display. Cette fois, ce sont des artefacts – sortes de représentations sculpturales d’un hyperréalisme imaginaire – qui sont théâtralisés. La couleur monochrome des troncs accuse l’identité des arbres en simplifiant la lisibilité de la texture des écorces. Les miroirs sur lesquels ils sont disposés permettent de modifier, perturber et questionner notre vision de l’espace, fragment sur fragment, angle de vue sur angle de vue. Mais l’œuvre n’est pas tant dans telle ou telle pièce singulière que dans l’intervalle et l’interaction entre les objets usinés et assemblés par l’artiste. La question du mode de présentation est récurrente dans son travail, qu’il s’agisse des socles, des présentoirs ou même du revêtement du sol… Ici, le dispositif de rotation du socle rappelle un type de présentation souvent utilisé dans les vitrines des magasins. L’œuvre joue ainsi d’une tension entre son soclage quasi-commercial,

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All of the Above

le côté industriel des matériaux et la poésie qui émerge de la représentation de cette sorte de forêt imaginaire. Cette forêt animée se meut dans l’espace entrainant avec elle la modification de sa perception. Au mur sont présentés les Vases combinatoires de Ronan et Erwan Bouroullec, disposés sur une étagère. Ils renvoient au dispositif de Haim Steinbach. Les huit éléments ont été pensés pour s’emboiter les uns avec les autres, permettant une multitude de possibilités d’assemblages. Les objets qui en découlent, bien que pensés et produits pour l’usage domestique et à destination de tous, sont autant fonctionnels que sculpturaux. Leur disposition évoque aussi bien les natures mortes d’autrefois, que les displays d’aujourd’hui et la confrontation de ces différents univers dans un même espace d’exposition ouvre à de nouvelles perspectives de réflexion et d’interprétation. Sur le mur opposé, Natura Morta une huile sur toile de Giorgio Morandi. Les natures mortes de Morandi sont des compositions silencieuses, des recherches et non des revendications. L’agencement de la toile rappelle de plus anciennes natures mortes, notamment celles de Francisco de Zurbaran, qui lui aussi peignait des compositions d’objets dans une intention semblable. Chaque élément semble avoir été minutieusement agencé avec les autres, afin de former un tout organisé et équilibré. Les objets s’interpénètrent, fusionnent, chacun ne faisant qu’un avec son voisin. Ce tableau ne cherche en rien à créer l’illusion d’une réalité comme ce fut souvent le cas dans la peinture. Ici, le peintre s’intéresse à l’expérience de l’acte de voir, et à l’ambiguïté des relations spatiales à l’intérieur de la toile. Il choisit et organise ses éléments, pour créer un ensemble qui fait sens, et sa confrontation avec les vases des frères Bouroullec crée une tension qui à la fois lie les œuvres de la salle et fait naître sur elles un nouveau regard.

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Salle 3

Au mur avant de passer à la dernière salle, une grande photographie de la sculpture Prada Marfa d’Elmgreen et Dragset. L’installation des deux artistes se situe dans le désert texan, à quelques kilomètres de la ville de Marfa évoquée plus tôt. Elle se présente comme une boutique minimaliste sous enseigne Prada. Cette œuvre, souvent définie comme une « boutique-sculpture » se joue à la fois d’être une vitrine, en présentant de véritables produits de la marque, tout en revendiquant le statut d’installation artistique, puisque le lieu n’a jamais été ouvert pour permettre la commercialisation des produits. L’œuvre a d’ailleurs été conçue dans l’optique de se dégrader lentement, jusqu’à devenir ruine et n’être plus que le reflet de ce qu’elle était autrefois, emportant avec elle l’image emblématique de la marque. Bien que l’utilisation de l’enseigne n’ait été qu’un prétexte pour critiquer l’industrie du luxe, cette œuvre a été sujette à de nombreuses controverses, car paradoxalement, elle était considérée par certains comme une forme de publicité, illégale dans cette zone des États-Unis.

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La dernière salle porte le nom d’une exposition organisée par le FRAC Alsace dans le cadre de l’évènement Les Pléiades 12. En effet, lors de cet évènement les différents FRAC de France ont invité un artiste de leur collection (ici Raphaël Zarka) à endosser le rôle de commissaire. Ce dernier avait pour objectif de créer un dispositif novateur permettant d’inviter le spectateur à une relecture d’une sélection d’œuvres de la collection. Les différents projets se sont vus réunis en une « exposition d’expositions » aux Abattoirs de Toulouse. L’expression Pièces montrées peut être comprise de la même façon qu’Objet(s) exposé(s), « pièce » signifiant à la fois la production d’un artiste comme la partie d’un appartement, d’une maison, d’un espace domestique.

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12. Voir le projet sur le site web

FRAC Platform: http://www.frac-platform.com/fr/ les-pleiades/projet


Salle 4

Tout de suite en entrant, l’installation Three Arrangements de George Brecht. Dans un dessin préparatoire de 1962, Brecht donne des indications précises au sujet de ce dispositif. L’installation doit comporter un porte manteau accueillant un imperméable rouge pour femme, une casquette et éventuellement un autre chapeau d’homme, une étagère sur laquelle figurent toutes sortes d’objets ordinaires et enfin, une chaise sur laquelle sera posé un objet noir. Cette association d’objets issus du quotidien est volontairement ouverte à toute interprétation. Depuis 1964, George Brecht constitue The Book of Tumbler on Fire, ouvrage fictif qui regroupe une partie de son travail en chapitres sur le principe d’un classement établi en fonction de relations entre différents éléments. Ces rencontres, lointains souvenirs de celle de la machine à coudre et du parapluie d’Isidore Ducasse – reprise par les surréalistes –, nous plongent dans une banalité du quotidien à réinterpréter. Ces formes de représentations d’un espace domestique minutieusement agencées, expriment toute l’ironie de Brecht à l’égard de la relation entre l’art et la vie. « Notre volonté de classifier le monde voudrait donc qu’il y ai d’un côté les objets qui ont une fonction matérielle, et ceux qui ont une fonction spirituelle, mais ‹ pour reprendre les termes d’Allan Kaprow, l’art se con-fond avec le non-art, ou la vie, dans une tentative d’estompage qui évite tout rapport d’identité ; brouiller les limites, estomper les différences ne permet pas de parler d’une réelle identité, ou d’une identification entre l’art et ce qui n’est pas de l’art, mais uniquement un rapport d’indiscernabilité ou d’hybridation. » 13

13. Barbara, Formis, «Échapper

au réel», Multitudes, n°44, janvier 2011, p.202-208.

Au centre de l’espace trône la Fontaine (1917) de Marcel Duchamp, emblème d’une des grandes fractures de l’histoire de l’art, basculement historique que l’artiste a initié dès 1913 avec ses premiers ready-mades. Cet urinoir renversé signé R. Mutt est le plus célèbre des ready-mades de Marcel Duchamp, et sans doute l’œuvre la plus controversée du XXe siècle. Elle a donné lieu à un grand nombre d’interprétations et

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Pièces montrées

d’écrits, parmi lesquels ceux de spécialistes de l’esthétique qui s’interrogent sur la redéfinition de l’art qu’elle implique. Duchamp fait paraître en 1917 de manière anonyme une série d’articles sous le titre The Richard Mutt case. C’est l’occasion pour lui d’écrire des propos parmi les plus révolutionnaires et pertinents sur l’art, et de répondre à l’accusation de plagiat : « Que Richard Mutt ait fabriqué cette fontaine avec ses propres mains, cela n’a aucune importance, il l’a choisie. Il a pris un article ordinaire de la vie, il l’a placé de manière à ce que sa signification d’usage disparaisse sous le nouveau titre et le nouveau point de vue, il a créé une nouvelle pensée pour cet objet. » 14 Selon Duchamp, l’artiste n’est pas un bricoleur et, dans l’art, l’idée prévaut sur la création. Cette conception rejoint celle des grands artistes de la Renaissance qui ont élevé la peinture au rang des arts libéraux – telles l’astronomie et les mathématiques – et en particulier Léonard de Vinci qui définissait l’art comme cosa mentale. Toutefois, Marcel Duchamp s’en différencie en ce qu’il propose un objet qui n’a aucune des qualités intrinsèques que l’on suppose à une œuvre d’art. Son objet n’a que les signes extérieurs d’une œuvre, il obéit à une définition positive, voire à un nominalisme de l’art. « Le« plus grand problème était la sélection. Il fallait queque je je Le plus grand problème était la sélection. Il fallait choisisse un un objet sans queque celui-ci m’impressionne, et le choisisse objet sans celui-ci m’impressionne, et le plusplus éloigné possible du plaisir esthétique sans la moindre éloigné possible du plaisir esthétique sans la moindre intervention d’idée ou de Il était nécessaire de de intervention d’idée ou suggestion. de suggestion. Il était nécessaire 15 à *zéro. à zéro. C’est C’est trèstrès difficile difficile de sélecde sélecréduire monmon propre goûtgoût réduire propre tionner tionner un objet un objet qui qui n’a n’a absolument absolument aucun aucun intérêt intérêt pour pour nous nous et pas et pas seulement seulement le jour le jour où on où le onchoisit le choisit mais mais qui qui n’enn’en aura aura jamais ; jamais ; et qui et qui finalement finalement ne pourra ne pourra jamais jamais êtreêtre beau, beau, joli,joli, 16 * agréable agréable ou laid… » ou laid… » L’artiste reproduira la Fontaine à échelle réduite pour la présenter dans sa Boîte-en-valise (ou Valise), véritable œuvre d’art, conçue comme un musée portatif autour de l’univers condensé de la boîte surréaliste.

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14. Marcel, Duchamp, «The Richard

Mutt Case», The Blind Man, 1917. http://sdrc.lib.uiowa.edu/dada/ blindman/2/images/blindman_ no.2_05.pdf

15. «Le goût est la faculté de juger

et d’apprécier un objet ou un mode de représentation par une satisfaction ou un déplaisir, indépendamment de tout intérêt. On appelle beau l’objet d’une telle satisfaction.» Emmanuel, Kant, Critique de la faculté de juger, Gallimard, p.959-967, 1985.

16. Marcel Duchamp dans Yves, Arman, Marcel Duchamp Plays and Wins, Marval, 1984, p.106.


Salle 4

Plus loin, One and Three Chairs de Joseph Kosuth. Figure majeure de l’art conceptuel, Kosuth est aussi l’un des principaux théoriciens du mouvement. En 1969, dans un article célèbre intitulé L’Art après la philosophie, il explique que Marcel Duchamp est pour lui la charnière entre « la ‹ fin › de la philosophie et le ‹ début › de l’art » : « Avec le ready-made non assisté, l’art cessait de se focaliser sur la forme du langage, pour se concentrer sur ce qui était dit […]. Ce changement – un passage de ‹ l’apparence › à la ‹ conception › – fut le commencement de l’art ‹ moderne › et le début de l’art ‹ conceptuel ›. Tout art (après Duchamp) est conceptuel (par sa nature), parce que l’art n’existe que conceptuellement. » 17 One and Three Chairs, qui met en scène un objet choisi pour sa banalité, reprend le ready-made là où Duchamp l’avait laissé. Il l’enferme dans une démarche tautologique, se référant en partie aux écrits et déclarations d’Ad Reinhardt du début des années 1960 – « L’art-en-tant-qu’art n’est rien d’autre que de l’art. L’art n’est pas ce qui n’est pas l’art » 18. L’objet, présenté entre sa reproduction photographique et sa définition dans le dictionnaire, perd, parmi ses doubles, le formalisme qui était encore le sien, et se voit ainsi efficacement réduit à son seul concept. C’est avec la série des Proto-Investigations, reposant sur ce principe de triptyque, et dont One and Three Chairs est une œuvre emblématique, que Joseph Kosuth apparaît sur la scène artistique. Pour terminer, An Oak Tree de Michael Craig-Martin est accroché sur le dernier mur avant la sortie. Tandis que nous pensons voir un verre d’eau sur une étagère, Michael CraigMartin nous déclare qu’il s’agit en fait d’un chêne. Par cette affirmation, il remet en question notre perception de la réalité, de l’art, voire du crédit que l’on peut accorder à un artiste. Craig-Martin commente et explique les modalités de cette mutation dans un texte rédigé sous forme d’interview, faisant partie intégrante de l’œuvre. Dans ce texte d’accompagnement, l’artiste fournit les questions aussi bien que

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17. Joseph, Kosuth, «L’Art après la philosophie», Studio International, vol.179, n°915-917, Londres, octobrenovembre-décembre 1969.

18. Ad Reinhardt, «L’Art en tant

que tel», Art International, VI, n°10, Lugano, décembre 1962.


Pièces montrées

les réponses, permettant l’expression simultanée de notre scepticisme et de notre croyance en une réelle puissance transformatrice de l’art. Cette déclaration devient alors un véritable défi de la raison, et la réalité ce que nous voulons bien y voir.19 Comme les autres pièces exposées dans cette salle, An Oak Tree exploite notre façon d’appréhender le réel, en nous mettant face à des objets n’ayant subi aucune transformation, si ce n’est celle d’avoir été désignée – par l’artiste et le contexte dans lequel ils existent – en tant qu’œuvre d’art. […] 7. Choisir : a) Ceci est de l’art et n’est pas un objet b) Ceci est un objet et n’est pas de l’art c) Ceci est un objet d’art d) Ceci est de l’art d’objet e) Ceci est un objet et c’est de l’art f) Ceci est de l’art et c’est un objet g) Aucune h) Toute i) Autre […] 20

19. «L’art questionne la relativité

de la perception.» Xavier Veilhan cité dans Collectif, Cocktail, Les Presses du réel, Dijon, 2008, p.70.

20. Robert Barry cité dans Collectif, Art conceptuel: une entologie, Mix, Paris, 2008, p.107.

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Bibliographie Arman, Yves, Marcel Duchamp Plays and Wins, Marval, Paris, 1984 Barthes, Roland, Mythologies, Éditions du Seuil, Paris, 1957 Benjamin, Walter, L’Œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique, Gallimard, Paris, 2012 Colin, Christine, Design aujourd’hui, Flammarion, Paris, 1992 Danto, Arthur, La Transfiguration du banal, Éditions du Seuil, Paris, 1989 Flusser, Vilém, Petite philosophie du design, Circé, Belval, 2002 Formis, Barbara, Esthétique de la vie ordinaire, Presses universitaires de France, Paris, 2010 Heidegger, Martin, Remarques sur art - sculpture espace, Éditions Payot & Rivages, Paris, 2009 Judd, Donald, Écrits 1963-1990, Daniel Lelong Éditeur, Paris, 1991 Kosuth, Joseph, «L’Art après la philosophie», Studio International, vol.179, n°915-917, Londres, octobre-novembre-décembre, 1969 Naumann, Francis, L’Art à l’ère de la reproduction mécanisée, Hazan, Vanves, 2004 Ordine, Nuccio, L’Utilité de l’inutile, Les Belles Lettres, Paris, 2013 Vial, Stéphane, Court traité du design, Presses universitaires de France, Paris, 2010 Collectif, Marcel Duchamp, L’Arc, Paris, 2000 Collectif, Cocktail, Les Presses du réel, Dijon, 2008 Collectif, Qu’est ce que le design? (aujourd’hui), Beaux Arts magazine, Paris, 2004 Collectif, Michel Delacroix chez-robert, Les Presses du réel, Dijon, 2015

Sitographie Centre Pompidou www.centrepompidou.fr Paris-Art www.paris-art.com Platform www.frac-platform.com Rhizome Sonore rhizomesonore.free.fr Slash slash-paris.com Wikipédia www.wikipedia.org




Commissariat d’exposition: Laurie Delmas.

Remerciements: -

Rédaction et conception éditoriale: Laurie Delmas. Conception graphique: Matthieu Cordier. Textes composés en Akkurat & Akkurat Mono (Laurenz Brunner) et Simple (Norm). Titres composés en Ulys & Stan (Radim Peško). Imprimé sur Munken Lynx Rough 120 g, couché blanc 110 g et Clairefontaine saumon 80 g. Couverture et pages de garde en Canson outremer 270 g et Canson orange 120 g. Imprimé à Besançon, 2015.

Daniele Balit Michel Collet Matthieu Cordier Bertrand Delmas Monique Delmas Stéphanie Jamet Hugo Schüwer-Boss Philippe Terrier-Hermann Séverine Vuillemin



John Armleder Richard Artschwager Étienne Bossut Erwan & Ronan Bouroullec George Brecht Michael Craig-Martin Marcel Duchamp Elmgreen & Dragset Sylvie Fleury Donald Judd Joseph Kosuth Bertrand Lavier Didier Marcel Mathieu Mercier Giorgio Morandi Gabriel Orozco Kaz Oshiro Haim Steinbach


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