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Charlotte Grosjean Mastere Design Global Design d’espace AnnÊe 2014_2015

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REMERCIEMENTS.

Je tiens à remercier mes professeurs référents Gilles Le Bars et Apolline Torregrosa, pour leur aide, leur soutien et leur suivi constant tout au long de l’année. Je remercie également mes parents, qui ont été un réel soutien pour cette année de constitution de mémoire mais également pendant toutes les années qui ont précédées. Je remercie tout particulièrement mon père qui s’est mobilisé chaque fois que nécessaire dans le seul but de m’alléger de certaines tâches fastidieuses et laborieuses. Je remercie ma famille et mes amis qui m’ont soutenue dans les mauvais moments et m’ont encouragée dans les bons moments.

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Avantpropos.

Lorsque l’on est amené à voyager, la découverte de l’inconnu, de nouvelles cultures ou de modes de vie apportent toute la dimension d’excitation à quitter notre pays pour entrer dans un autre. L’intérêt porté à la notion de frontière est né d’une expérience récente, dans le cadre d’un voyage à l’étranger pour effectuer un stage. Cependant je n’avais jamais autant été confrontée aux difficultés d’entrée dans un pays. Demande de visas, obtention d’un premier accord, visites médicales, obtention du visa, passage à la douane, interrogatoire... Autant d’étapes nécessaires pour pouvoir entrer sur le sol Canadien, dans un cadre autre que celui du tourisme. La frontière entre deux pays n’est qu’une ligne de séparation qui pourtant engendre des changements radicaux, de hautes surveillance et de sécurité. Pourquoi et comment sommes nous arrivés à employer de tels moyens dans le but de séparer, différencier les individus entre eux ? La frontière a ceci de paradoxale qu’elle est devenue un lieu de conflit, de part son existence et qu’elle unie autant qu’elle dissocie.

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Le franchissement de cette frontière est toujours incertain, c’est un espace où l’on est maître de rien, un espace qui semble hors du temps et de l’espace. Le passage à la douane est une expérience incertaine, pleine de tensions, d’angoisses ou même de peurs pour certain. Cette transition d’un territoire à un autre est une expérience personnelle, propre à chaque individu qui est perçue différemment selon différents critères sociaux, politiques ou économiques. La douane est un espace ambigu :nous ne sommes plus dans notre pays mais pas encore rentré dans un autre. Ce sont ces paradoxes entre dedans et dehors, entrer et sortir, distance et proxémie qui ont dirigé ma pensée sur la question de la relation entre le territoire et ses limites, ses ouvertures et ses passages.


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Sommaire.

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03 04 05

Introduction 01 02 03

Contexte Problématiques Enjeux

Frontières territoriales : d’une notion abstraite à une réalité concrète 01

Qu’est-ce qu’une frontière ?

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Représentations et matérialisations de la frontière

Apparition et évolution Disparition des frontières: Espace Schengen Les frontières immatérielles Les frontières naturelles Les frontières humaines

La frontière comme limite, seuil et passage 01

Fonction et symbolique de la frontière

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Les limites des frontières

Herméticité : une limite politique et religieuse Perméabilité : un seuil culturel et social Ouverture : un passage économique et social Les enclaves territoriales Les espaces entre deux

Conclusion

Bibliographie

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01 01

01/ Introduction.

Contexte. La frontière, naturelle ou artificielle, constitue une démarcation entre deux entités. Elle constitue un espace transitoire : à la fois seuil, limite et passage. Cet espace paradoxal, en marge du territoire, délimite et relie deux pays. Tout au long de ces frontières, l’administration douanière possède de nombreux bâtiments, parfois très anciens illustrant une architecture symbolique liée aux servitudes des flux transfrontaliers. A la fois lieu de travail, d’entrée et de sorties, espaces où se mêlent culture et politique, seuil et entre deux, distinction entre le dedans et le dehors du territoire, la douane comme la frontière, constitue un symbole fort de limite conflictuelle ou à l’inverse franchissable. Les accords de Schengen, effectifs depuis 1995, vont avoir pour conséquences directes la disparition des frontières internes en Europe et donc l’abandon progressif des postes de douane sur ces frontières.

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Dans le contexte des douanes européennes abandonnées, comment repenser leurs identités qui ne portent aujourd’hui plus les mêmes valeurs ni les mêmes fonctions ? La notion de frontière, l’environnement direct des postes de douanes, offrent un point de départ à ce questionnement. Nous définirons dans un premier temps ce qu’est une frontière à différentes échelles, ses multiples formes de représentations et de matérialisations dans l’espace. Puis nous nous intéresserons aux notions symboliques d’herméticité, de perméabilité et d’ouverture qu’offrent les frontières ainsi que leurs fonctions associées de limite, de seuil ou de passage. Enfin nous porterons notre attention sur les enclaves territoriales et les espaces entre deux, que constitue le poste de douane.

A travers ce mémoire, je souhaite explorer les diverses moyens de séparation, de limite mais aussi les formes d’ouvertures qui permettent la porosité de ces frontières.


01 02 Enjeux. / ENJEUX SOCIAUX La douane possède une relation particulière avec ses différents usagers. Il me semble donc intéressant de s’interroger sur le rôle de cet espace vis à vis des usagers.

/ ENJEUX POLITIQUES La frontière politique entre deux territoires est une zone de tension, ou chacun tente de matérialiser son pouvoir face à l’autre. Il serait intéressant de se pencher sur les facteurs susceptibles d’améliorer ces relations conflictuelles basées sur le pouvoir. Comment ces espaces politiques peuventils devenir des espaces de compréhension, d’acceptation et d’entente ?

L’architecture douanière peut elle avoir un impact sur l’état d’esprit des usagers lors de leur entrée dans un nouveau territoire ? Est-il possible de trouver une nouvelle relation entre le poste de douane et le passant ? Ainsi, la qualité du passage comme espace social doit devenir l’objet d’attention particulière. Il s’agira de mettre en avant le parcours individuel pour revaloriser le déplacement de l’usager.

01 03 Problématiques. / ENJEUX CULTURELS La langue, les coutumes, le patrimoine, le mode de vie ou encore les habitudes diffèrent d’un pays à l’autre. Cependant, la frontière politique n’est pas toujours une limite culturelle en soit puisque, d’un pays frontalier à l’autre, de fortes similitudes culturelles persistent au delà de leurs frontières.

Dans le contexte des douanes européennes abandonnées, comment repenser leurs identités qui ne portent aujourd’hui plus les mêmes valeurs ni les mêmes fonctions ?

La douane devient alors le point de rencontre entre deux cultures communes et paradoxalement différentes.

Que deviennent donc ces espaces lourds de symbolique, empreints de souvenirs et d’un patrimoine culturel ?

Comment réussir à retranscrire cette unité/ dualité culturelle à travers une architecture douanière ? Faut-il mêler ou délimiter ces deux cultures ? Comment rendre compréhensible et accessible cette identité ?

Comment les espaces de conflits sont-ils devenus des espaces de mémoires ? Comment les réhabiliter en atténuant cette notion de tension ?

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02/ FrontiEres ter ritoriales: D'une notion a bstraite A une rEalitE co ncrEte.

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02 01 Qu'est ce qu' une frontière ?

Comme le souligne l’élève Fabien Guillot, dans sa thèse (2009, France), «Construire, déplacer et maintenir les frontières sont trois registres qui illustrent aujourd’hui encore des conditions et des rapports de force différents, inégaux et changeants, des stratégies fluctuantes et contradictoires». Ces frontières sont aujourd’hui encore source de conflits et ne cessent de se modifier.

01 / APPARITION ET ÉVOLUTION La frontière est un phénomène complexe par son ancrage historique et les multiples sens qui lui sont donnés. La frontière peut être considérée à différentes échelles. Elle est un espace d’épaisseur et de formalisation variable, imaginaire ou matérielle, séparant ou joignant deux territoires. Elle fonctionne comme la limite du pouvoir juridique, plus ou moins distincte, d’un État. Il s’agit de la frontière-ligne ou «Boundary» distingué par les anglo-saxons de la «Frontier» qui revêt plus le sens d’une zone frontière entre la civilisation et le reste. Cette frontière est une limite séparant deux zones, deux régions caractérisées par des phénomènes physiques ou sociaux différents. Enfin, la frontière est utilisée pour délimiter deux notions plus abstraites en opposition.

La frontière est apparue dès l’Antiquité, comme une limite (finie chez les Romains) qui borne l’espace et au delà de laquelle commence l’inconnu. Progressivement, les frontières à l’origine des cité antiques, apparaissent sous forme de bornage. L’apparition du terme frontière est plus tardive et remonte au XIIIe siècle. Le front désigne alors la limite temporaire séparant deux armées en conflit et le mot confins, implique l’idée d’extrémité et de transition entre deux États. La frontière comme délimitation externe d’un territoire caractérise l’apparition des états modernes puisque cette notion est mise en application en 1648 par le traité de paix de Westphalie. Les frontières sont alors pensées comme des tracés immatériels permettant d’assurer la territorialité et la souveraineté des États. Les progrès de la cartographie permettent aux dirigeants de mieux prendre conscience de leur territoire et de mieux le contrôler. De nombreux facteurs comme les rapports de forces, la volonté des citoyens ou la géographie du territoire font aujourd’hui évolués les frontières actuelles.

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1_ Photographie les poste frontières qui restent abandonnés aux frontières des pays européens, Josef Schulz

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02 / DISPARITION DES FRONTIÈRES: ESPACE SCHENGEN En 1995, l’Union Européenne fait le choix de ne plus posséder de frontières communes entre certains de ses pays pour faciliter le déplacement économique et renforcer les frontières extérieures. L’espace Schengen, dont sont membres 26 pays, devient une limite politique et juridique n’obstruant plus la circulation des personnes et des biens.

Finlande

Estonie

Suede

Lettonie Danemark

Lituanie

Irlande Royaume-Unis Pays-Bas Belgique

Pologne

Allemagne

Luxembourg

République Tcheque

France

Autriche Slovenie Italie

Slovaquie Hongrie Roumanie

Bulgarie

Espagne Portugal

Grece

Les frontières étatiques sous toutes leurs formes (aériennes, terrestres, maritimes) et leurs origines (humaines, immatérielles, naturelles) sont les frontières qui vont nous intéresser dans un premier temps.

1_ Pays membres de l’espace Shengen en bleu et pays non membres en gris 16

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02 02 Représentations et matérialisations de la frontière

01 / FRONTIÈRES IMMATÉRIELLES

La cartographie En grec, selon Augustin Berque, (cité dans Levy, 2003) dans «Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés», deux mots signifient lieu : topos et chôra. Le premier désigne le lieu cartographiable et le second, le lieu existentiel. En matière de frontières immatérielles, le topos est le lieu géographique, l’encrage physique et définissable du lieu. C’est le lieu des coordonnées cartésiennes du cartographe, dont la longitude, la latitude et l’altitude s’établissent dans l’espace absolu. Selon Aristote, le lieu topos est un point abstrait, totalement objectif et indissociable du corps : si la chôra bouge, le topos bouge.

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journaliste, mais aussi géographe, témoigne de sa réflexion professionnelles et de ses expériences personnelles à propos des frontières. «La carte géographique est tout au plus une représentation ou une «perception» du territoire et elle n’offre aux yeux du public que ce que le cartographe a voulu montrer. Et il n’existe pas de représentations officielles, admises par tous, du découpage politique du monde.» (2003, Conférence). Pourtant, ces réseaux de lignes apparaissent aux yeux du public comme des représentations admises par tous et donnent l’illusion d’un monde parfaitement découpé en unités de vie, en régions ou en pays.

1_ Cartographie des frontieres de l’Afrique 2_ Cartographie des ethnies africaines

Les frontières de la carte sont des lignes virtuelles dont le tracé peut laisser penser une séparation là où il n’y a parfois rien de concret. C’est le cas de l’Afrique ou les frontières n’ont jamais empêché les déplacements des personnes et des biens d’un pays à l’autre. L’Afrique est aussi représentative de frontières tracées sans tenir compte des limites sociales, traditionnelles ou ethniques puisque les frontières africaines furent tracées à la règle pendant la colonisation en 1884 lors de la conférence de Berlin. Ces limites définitives ne sont alors représentatives que d’un tracé mais pas d’une société.

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Évolution de la cartographie

Depuis 1991


De 1945 Ă 1990


De 1920 Ă 1944


De 1900 Ă 1919


De 1800 Ă 1899


Avant 1800

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«Frontières idéelles» Le mur de Berlin a été érigé d’après les tracés d’une carte afin de séparé l’Allemagne de l’ouest et l’Allemagne de l’est. Le mur représenté en violet est une représentation concrète d’une notion abstraite du véritable mur (la chôra). Après sa chute, en 1989, les limites physiques disparues et la carte réunifiée, «l’ancienne frontière est-elle aussi invisible que la carte le laisse croire ?»

D’après Philippe Rekacewicz, «les frontières mentales perpétuent souvent celles qui se sont évanouies sous la pression de l’histoire. Certains berlinois disent continuer aujourd’hui de circuler dans la ville selon les mêmes itinéraires que lorsque le mur séparait l’Est et l’Ouest ! La barrière physique disparue, c’est le Berlin mental qui continue d’exister.»

Certaines frontières engendrent donc des effets qui perdurent souvent au-delà du temps, et laissent des traces qui subsistent dans les représentations sociales et dans les pratiques. Pour Berlin, duand la ville a été divisée, des lampes au sodium furent installées pour éclairer les rues de Berlin Est. Berlin Ouest n’utilisait pas les mêmes ampoules. La différence est encore visible aujourd’hui.

1_ Représentation du mur de Berlin encerclant Berlin Ouest 2_ Trace du mur de Berlin après sa démolition 3_ La ville de Berlin vue de nuit 32

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Entre réalité et représentation

«Passer une frontière est toujours quelque chose d’un peu émouvant : une limite imaginaire, matérialisée par une barrière de bois qui d’ailleurs n’est jamais vraiment sur la ligne qu’elle est censée représenter, mais quelques dizaines ou quelques centaines de mètres en deçà ou au-delà, suffit pour tout changer, … »

Le langage cartographique ne dispose que de trois dimensions : le point, la ligne et l’aire qui ne tiennent pas compte de l’espace transitionnel. La réalité est très complexe et la limite tracée sur la carte n’est pas une démarcation franche dans l’espace. Nicolas Fussler, photographe strasbourgeois, s’intéresse à nos frontières. Il s’interroge sur la différence entre la représentation graphique (cartographie) et la réalité matérielle de cette frontière. Comme il le dit, « Lorsqu’on se penche sur un planisphère, les États sont souvent représentés par des couleurs distinctes séparées de lignes frontalières. Mais qu’en estil sur le terrain ?» Sur la carte, la frontière est immatérielle, représentée par une ligne mais elle ne nous donne aucune information sur la nature de cette ligne dans la réalité. C’est ce à quoi s’est intéressé Nicolas Fussler «Selon l’endroit où l’on se trouve dans le monde, la frontière n’a pas la même réalité» (2008) « La carte laisse voir des ruptures là où existent des gradients » (Ciattoni A, 2005) tout en simplifiant une réalité beaucoup plus complexe.

Georges Perec – Espèces d’espaces.

1_ Cortina de los Hormigueiros, Espagne/Portugal 2_ Hinter dem Ewent, Belgique/Luxembourg 3_ Borne 494 B1, Espagne/Portugal 4_ Les Moëres, Belgique/France 34

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La sculpture peut d’abord être perçue comme un objet artistique dans le paysage. A l’intérieur de la sculpture, l’horizon infini est cadré par la sculpture, se transformant alors à son tour en oeuvre d’art. L’artiste voulait « donner une limite pour regarder ce qui n’a aucune limite. » (texte tiré de Arte. Individuo y Sociedad, Servicio de Publicaciones de la Universidad Complutense de Madrid, 2002, p. 181)

Lignes invisibles L’horizon est notre propre limite, elle dépend de notre position, de notre situation dans l’espace. Cette frontière n’est pas définie puisqu’elle n’existe que dans notre propre champ de vision. Cette ligne précise ou parfois floue, délimite la terre du ciel ou la mer du ciel. 1_ Seascapes, Hiroshi Sugimoto 2_ Eloge de l’horizon, Edouardo Chilida 36

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Les frontières invisibles Des frontières immatérielles et invisibles associées aux territoires existent. Les frontières maritimes, appelées mers territoriales, s’étendent au delà des côtes terrestres sur 12 miles nautiques et les droits et devoirs de l’État sont donc appliqués de la même façon que sur le territoire terrestre. La frontière aérienne correspond à la projection verticale des frontières terrestres et maritimes.

L’artiste Aï Kitahara créée une topologie de l’invisible à partir de lignes de frontières européennes. Cette ligne imaginaire qu’est le tracé d’une frontière, prend une dimension et devient un volume complexe. Il y a une volonté de mettre en valeur la complexité imaginaire de la ligne frontalière, qui ne correspond pas à la réalité.

D’après Gilles Deleuze dans Milles Plateaux, il existe deux sortent d’espaces en mer, le lisse et le strié qui peuvent s’assimiler à l’espace nomade et l’espace sédentaire. Il explique que «la mer est un espace lisse par excellence, et pourtant celui qui s’est retrouvé confronté aux exigence d’un striage de plus en plus strict.» (1980, p 598). En d’autres termes, il nous explique qu’en pleine mer, on peut naviguer en faisant «intervenir les vents, les bruits, les couleurs...» (1980, p 598), de manière nomade, ou alors on peut choisir de naviguer de manière directionnelle en tenant compte de la géographie, des cartes établissant des frontières, des trajectoires invisibles Des frontières d’ordres numériques comme les télés-surveillances traduisent un pouvoir et instaure une présence invisible et dissuasive au sein des frontières. Cette présence immatérielle complète ainsi la présence matérielle aux frontières.

1_Quinze mètres carrées de frontière francoespagnole, 2007_ Bois et peinture 2_ Quinze kilomètres de frontière franco-italienne, 2004_ Bois et peinture 3_ Quinze kilomètres carrés de frontière franco-allemande, 2004_ Bois et peinture 4_ Quinze kilomètres carrés de frontière franco-belge, 2004_ Bois et peinture

Il arrive même que la délimitation ne soit pas envisagée ou jugée inutile. Le traité franco-marocain de 1845 sur la zone au sud de la ville de Figuig indique que « le fait qu’elle soit inhabitée rend toute délimitation superflue ».

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02 / FRONTIÈRES NATURELLES

Topographie et reliefs Les éléments topographiques suggèrent parfois des limites frontalières. Les frontières naturelles sont plus lisibles dans le paysage et parfois plus faciles à surveiller. Ces frontières physiques, qu’elles soient naturelles ou engendrées par l’homme, relèvent de la chôra. Dans le Timée de Platon, la chôra représente le lieu des choses au sein du monde sensible, par le rapport entre l’être et le lieu. La chôra, dit Berque, est à la fois « empreinte et matrice » ; elle « accueille et engendre » Le changement d’environnement engendre successivement, un obstacle, une adaptabilité et une protection. C’est pourquoi inconsciemment, cette notion de frontière naturelle à toujours été présente et fonctionne comme une véritable barrière de protection permanente. Le Royaume-Uni par la mer ou l’Espagne par les montagnes, possèdent chacun une protection frontalière naturelle à l’inverse de la Pologne par exemple, située dans une immense plaine. Le relief terrestre de la Cordillère des Andes constitue une véritable frontière entre le Chili et l’Argentine tout comme l’Everest entre la Chine et le Népal.

1_ Vue aérienne de la frontière entre le Chili et l’Argentine 2,3_ La frontière Chine/Népal traversant l’Everest en son sommet. 4_Relief de la Pologne

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La distinction entre deux environnements naturels différents créée, par opposition, une séparation, une frontière.

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Frontière témoin d’une vie Des éléments naturels comme la végétation ou la roche peuvent être témoin d’une frontière. Certaines frontières naturelles témoignent des différences culturelles ou politiques entre les pays frontaliers. Par exemple, entre la République dominicaine et Haïti, la même végétation s’est adaptée à chacune des politiques environnementales pour former une distinction claire le long de la frontière.. En République Dominicaine, un plan de préservation de l’environnement est mis en place alors que pour Haiti, l’exploitation des mines de charbon est privilégié. Une limite végétale s’est donc clairement formée en conséquence. Entre l’Allemagne et la République Tchèque, ce sont les conséquences d’un incendie de foret qui crée la frontière.

1_ Frontière entre le Brésil et la Bolivie 2_ Frontière entre l’Allemagne et la République Tchèque 3_ Frontière entre la République Dominicaine et Haïti

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1_ Frontière entre la République dominicaine et Haïti 44

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L’eau comme frontière Océans, mers, fleuves, chutes ou a plus petite échelle rivières, la séparation par l’eau est une frontière naturelle évidente. Elle permet une séparation précise et à la fois protectrice. A l’échelle de la ville, la Seine partage Paris en deux parties : la rive droite et la rive gauche. La Seine a alors un double rôle : elle sépare des quartiers mais unifie les deux rives en une unique ville.

1_ La Seine traversant la ville de Paris 2_ Les chutes du Niagara, frontières entre le Canada et les Etats-Unis 3_ Vue aérienne du Royaume-Unis 4_ Vue aérienne du détroit de Gibraltar 46

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1_ Frontière entre le Brésil, le Paraguay et l’Argentine 2_ Frontière entre l’Angola et la Namibie

Ici, le fleuve délimite des espaces terrestres bien distincts

«Il n’y a rien de “donné tout fait” à l’homme par la nature, rien d’imposé à la politique par la géographie »La (re)construction de la frontière est donc le fait de celui qui la franchit.» Lucien Febvre

Cependant, même naturelle, une frontière reste une construction humaine puisqu’elle est pensée et utilisée comme telle.

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03 / FRONTIÈRES HUMAINES

La borne, vestige romain Les frontières peuvent être matérialisées de diverses façons à travers le monde en fonction des intentions et de leur rôle. La frontière peut être matérialisée pour symboliser ou rappeler une frontière disparue. Dès l’empire romain, l’apparition de bornes militaires assuraient la représentation du pouvoir. Les bornes routières portaient des marques destinées à évaluer les distances des principales voies romaines mais manifestaient surtout l’action du pouvoir. Les bornes frontières peuvent se trouver sous différentes formes : pierre plantée et gravée, rocher gravé, des troncs d’arbres, piliers, poteaux...

1_ Borne de la Via Romana XVIII en Hispanie 2_ Borne romaine In situ sur la « Route des patriarches » en Israël 3_ Croix frontière des Pyrénées numéro 306 4_ Borne frontière des Pyrénées numéro 97 5_ Borne frontière Franco- Suisse 50

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La Trace

1,2,3_ Marquage de la frontière symbolique Pays-Bas/ Belgique 4_ Route Belge / Pays-Bas 5_ Frontière Portugal / Espagne 6_ Frontière Suisse / France

Depuis la mise en place de l’espace Schengen, dans le village de Baarle, situé à la frontière entre la Belgique et les Pays-Bas, des croix blanches au sol coupent des places, des rues et des habitations. Parfois, la frontière se matérialise par un sol discontinu : il reflète le mode de vie du pays. Ainsi, les routes de la Belgique renvoient un manque de moyens financiers face aux routes des Pays-Bas et les routes portugaises pittoresques contrastent avec l’Espagne.

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Élévation verticale La frontière a de paradoxale la notion de proxémie. La proximité spatiale des deux pays frontaliers est contredite par la présence d’une frontière hermétique qui instaure un éloignement. La construction d’une frontière met en oeuvre des dispositifs d’appropriation et de souveraineté qui créée une distance. Dès les premières invasions, la frontière endosse un rôle de protection. Elle prend l’allure de places fortifiées, de murs ou de murailles et s’élève verticalement pour instaurer « une distance de sécurité ». Cette frontière opaque et hermétique délimite un «dedans» et un «dehors» : elle protège ce qui est à l’intérieur et repousse ce qui se trouve à l’extérieur.

1_ Le mur d’Hadrien construit de 122 à 127 après J.C en Grande-Bretagne 2_ La Grande Muraille de Chine, édifiée au IIIème siècle avant J.C. 3_ Remparts de la ville de Carcassonne

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Creuser pour se protéger Une autre conception de la frontière verticale protectrice qui cette fois se creuse pour former un fossé entre le «dedans» et le «dehors» Ces fossés remplis d’eau deviennent des obstacles horizontaux à petite échelle pour un château ou à plus grande échelle pour la ville fortifiée. 1,2_ Vues aériennes des villes de Heusden et Naarden, aux Pays-Bas. 3_ Angkor Vat 4_ Vue aérienne du réseau de tranchée près de Loos, juillet 1917. Les tranchées allemandes sont à droite et les tranchées britanniques sont sur la gauche. 5_ Les tranchées françaises durant la première guerre mondiale.

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Les tranchées véritables lieux de repli et de protection face à l’ennemi, formaient un véritable réseau organisé de lignes parallèles et perpendiculaires.

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Murs et barrières Les espaces du pouvoir se trouvent souvent protégés par des limites infranchissables comme c’est le cas des espaces de souveraineté, de sûreté ou de défense, avec ou sans repérage matériel de ces espaces protégés. Les frontières sont un symbole de séparation fort et doivent être matérialisées comme telles. Que ce soit pour des raisons politiques, religieuses ou économiques, les moyens utilisés pour dissuader les immigrants sont nombreux. Les pays riches, les pays du Nord souvent beaucoup plus développés, construisent des barrières pour se séparer et empêcher les immigrants des pays du Sud qui tentent d’entrer. Les immigrants des pays pauvres prennent chaque jour le risque de franchir ces barrières qui les séparent d’un pays où il n’y a pas de misère ou de pauvreté. La recherche d’une vie meilleure force les pays du Sud à franchir ces murs. Pour empêcher cela et garder le statut de «pays riche et fort», les pays du Nord construisent des murs de plus en plus hauts, épais et surveillés. Pour exemple, le Botswana construit des barrières électrifiées à sa frontière avec le Zimbabwe. Le «mur de l’apartheid», comme le prénomment les Palestiniens, est une «barrière de sécurité» en béton armé ayant pour objectif de protéger la population israélienne en empêchant physiquement toute intrusion palestinienne. Des barbelés sont mis en place pour la barrière de Gaza.

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1,2,3,4_ «Le mur», frontière entre le Mexique et les Etats-Unis 5_ Frontière entre le Botswana et le Zimbabwe 6_ Frontière entre la Palestine et l’Israël 7_ Frontière entre


1_ Frontière entre Chypriote grecs, Chypriote turcs

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«Définir c’est limiter»

Oscar Wilde, Le Portrait de Dorian Gray, 1992.

Frontières artistiques Les frontières disparues sont devenues un support artistique. Elles jouent le rôle commémoratif d’une réunification ( J. Dörflinger ) ou d’une séparation (Dani Karavan).

1_J. Dörflinger, Frontiere Suisse/Allemagne 2,3_ Dani Karavan, Passages, hommage à Walter Benjamin 64

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03/ La frontiere c omme limite, seuil et passage frontalie r.

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03 01 Fonction et symbolique de la frontière.

La frontière est étroitement liée au territoire et en marque la limite. La frontière prend toute sa dimension de limite lorsqu’elle est en relation avec l’État.

01 / HERMÉTICITÉ : UNE LIMITE POLITIQUE Dans ce sens, la frontière donne à l’État une définition frontalière. Le territoire apparaît comme l’un des éléments qui constitue l’État, l’espace dont dispose le pouvoir politique. C’est cette notion de territoire politique qui engendre la nécessité d’une délimitation au moyen de frontières destinée à empêcher tout empiétement d’une souveraineté sur l’autre. Dans ce contexte, les frontières ont donc pour but d’empêcher ou de restreindre les passages d’un pays à un autre. La frontière est à la fois support et outil politique : support d’une volonté politique et outil pour la matérialiser et l’imposer.

La limite exprime une séparation plutôt linéaire, franche et concise. A l’origine, la notion de seuil désigne un objet concret, puis un lieu, et les pratiques humaines qui l’entourent. Le seuil correspond donc à un entre deux, une zone agissant comme une transition entre deux espaces. Enfin, le passage manifeste un espace accompagnant l’action de transition d’un espace à l’autre.

La limite peut se matérialiser par un point (le check-point), une ligne (frontière), une surface (no man’s land).

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Rupture physique : limite Nord / Sud La frontière renvoie à une notion d’opposition et introduit la notion de rupture dans l’organisation de l’espace. C’est la différence visible entre deux entités, l’idée de séparation, de changement de système spatial qui engendre la frontière. Cette rupture est d’autant plus marquée que la séparation est vive. Très clairement, la frontière entre les EtatsUnis et le Mexique témoigne de cette rupture spatiale entre deux mondes. La limite provoque une coupure franche résultante de deux systèmes politiques et économiques différents. La frontière entre le Mexique et les Etats-Unis, est symbolique des rapports géographiques établis entre le Nord et le Sud, entre deux entités que tout oppose malgré leur interdépendance croissante. La limite Nord/Sud est le nom donné à une ligne imaginaire séparant les pays développés du Nord des pays du Sud en développement. Elle ne correspond pas tout à fait à une limite entre l’hémisphère nord et l’hémisphère sud mais plus à une ligne illustrant les inégalités de développement dans le monde.

1_ Carte montrant la fracture Nord / Sud 2,3_ Frontière entre les Etats-Unis et le Mexique 70

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1,2_ Expérimentation sur la rupture linéaire 3,4_ Expérimentation sur la rupture ponctuelle 5_ Expérimentation d’une rupture totale

La rupture se manifeste par une modification du volume initial par la séparation d’un élément de manière franche et ponctuelle La rupture n’existe que par l’association de deux éléments opposés.

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La rupture peut être engendrée par une modification ponctuelle ou totale d’un élément. La rupture est visible sur l’ensemble du volume et ne nécessite pas d’action extérieure.

L’intervention d’une force extérieure peut engendrer une rupture totale du volume initial pour créer un nouveau volume. La rupture se manifeste par une déformation du volume initial.

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Dedans/ Dehors Les conflits d’attribution de territoires porte directement sur des notions de délimitation ou de démarcation (chora et topos ). Ces deux notions liées, expriment un dedans et un dehors, au moyen d’un élément en coupure. Le topos est une frontière économique et politique hors de la réalité physique et culturelle des personnes.

Elle inclut et exclut selon le côté considéré. Elle délimite la fin d’un territoire et désigne l’autre, l’altérité, l’étranger. La frontière à Ceuta, enclave espagnole situé au Maroc, est une petite frontiere surprotéger afin d’interdire l’immigration : miradors, barrière de 6m, barbelés, enchevêtrement de fils de fer souples. Ces limites ne visent plus à empêcher de sortir mais à interdire d’entrer.

1_ Frontière à Ceuta 2_ Murs de la frontière à Ceuta 3_ Vue du mur en 1986 de la partie ouest RFA

A l’inverse, le mur de Berlin visait à empêcher des individus de sortir d’un territoire. La RDA construit un mur pour mettre fin à l’exode croissant de ses habitants vers la RFA.

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Une mise à distance Malgré la proximité spatiale entre deux pays frontalier, la frontière, par la présence de dispositifs, introduit une distance, un éloignement. Par des dispositifs matériels ou invisibles, la mise à distance crée une barrière de protection. La mise en place de panoptique, dans les prisons par exemple, créer un « sentiment d’omniscience invisible » chez les détenus. Cette structure permet au gardien logé dans une tour centrale, d’observer tous les prisonniers, enfermés dans des cellules individuelles autour de la tour, sans que ceux-ci puissent savoir s’ils sont observés. Cette installation implique la notion de pouvoir sur d’autres et l’imposition de certaines règles à respecter.

Une frontière est une construction territoriale qui « met de la distance dans la proximité ». Arbaret-Schulz

Cette mise à distance est le plus souvent interprétée comme un moyen de protection. Pour exemple, la ligne Maginot fut conçue dans le but d’intimider et d’éloigner l’invasion allemande.

1_L’intérieur de la prison Presidio Modelo, à Cuba, construite sur le modèle du panoptique 2_ La ligne Maginot sur la frontière nord-est de la France 76

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La zone de vide entre les deux volumes fonctionne comme un espace à part entière et divise le volume par l’absence de matière.

Les tranchées véritables lieux de repli et de protection face à l’ennemi, formaient un véritable réseau organisé de lignes parallèles et perpendiculaires. Entre ces frontières protectrices, se situe une zone appelée no man’s land et qui constitue une zone non habitée située par exemple entre deux frontières ou deux lignes de front. Le no man’s land, désigne une zone non habitée située par exemple entre deux frontières ou deux lignes de front. Ce sont des « terre sans homme » ou la présence humaine est considérée comme une agression.

1_No man’s land sur Pyongyang 2,3_Expérimentations sur la distance 78

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Distinction et exclusion

«Nous avons perdu l’essentiel, c’està-dire ce moment où les choses commencent à s’espacer» Pierre Sansot, Poétique de la ville

Que se soit par le langage ou la classe sociale, la frontière culturelle entre deux pays peut agir en véritable limite, opposant spatialement. Une frontière hermétique peut apparaître et s’ancrer profondément dans la culture. Le mythe de la Tour de Babel illustre ce propos. En effet, après le Déluge, alors qu’ils parlent tous la même langue, les hommes décident de bâtir une ville et une tour grimpant jusqu’au ciel dans le but de rassembler tout le monde, d’accéder à Dieu et être aussi puissant que lui. Afin de mettre fin a cette construction jugé trop considérable, Dieu décide de faire tomber la tour et les hommes en brouillant leur langage pour qu’ils ne puisse plus se comprendre, et les disperse sur toute la surface de la terre. Cette légende est l’origine de la confusion des langues et de cette barrière linguistique complexe qui suit les frontières. À plus petite échelle, une « gated community » est un type de résidence aisée fermée particulièrement présente sur le continent nord-américain. Ces quartiers sont totalement impénétrables aux autres classes sociales. La proximité est source de conflits, d’où la distanciation et la fragmentation voulue et imposée à la fois, voulue par les uns, subie par les autres. La discontinuité spatiale conduit à revendiquer l’autonomie.

1_ Tour de Babel 2_ Alphaville, une des communautés fermées de la banlieue de São Paulo 3_ A gated community de Buenos Aires en Argentine 80

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Périmètre

La frontière sociale n’est pas une fracture comme peut l’être une frontière politique ou religieuse. Les parties séparées par la frontière évoluent dans l’interdépendance malgré la distance que la frontière introduit en elle. La limite sépare et unit à la fois selon l’échelle considérée, elle constitue une limite infranchissable ou une liaison, un axe d’articulation.

A travers son action intitulée The Green line, Francis Alÿs, l’artiste retrace physiquement la «ligne verte», une ligne d’armistice dessinée sur les cartes en 1948, séparant Jérusalem-est et Jérusalem-ouest. Avec un pot de peinture percé, il parcours la frontière invisible et la rend visible aux yeux de tous. La notion de contour et de périmètre est mis en avant avec cette performance. L’artiste encadre un territoire, le défini précisément et physiquement.

1,2_ The Green line de Francis Alÿs

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02 / PERMÉABILITÉ : UN SEUIL CULTUREL ET SOCIAL

Les frontières sont avant tout des lieux de rencontre et d’échange. Elles ont ceci de paradoxal qu’elles regroupent autant qu’elles excluent. A l’échelle sociale, certaines frontières se sont instaurées au sein des villes séparant les classes sociales, les identités communes ou les environnements proches. Selon Georg Simmel, elles traduisent le degré de participation de l’individu à la société «une frontière sociale est une limite interne à la société qui tient à la différence de degré de participation à la société des membres de collectivités ou de groupes.» (Sociologie. Etudes sur les formes de la socialisation, 1999) La forme de la frontière sociale est tantôt rigide, tantôt floue, tantôt totalement hermétique, parfois délimitée mais poreuse ou encore imprécise et donc perméable. Par conséquent, la frontière sociale suppose des jeux ambivalents entre liaisons et séparations, fractures et transitions, dehors et dedans, enfermements et protection.

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Une transition entre deux opposés Le seuil est une rupture dans la continuité d’un phénomène qui marque un changement qualitatif et quantitatif à la fois : la forme, le rythme, la direction, le sens, la dimension, la nature, le débit... Prenons la ville de Paris comme exemple et particulièrement le périphérique qui encadre la ville. Ce périphérique fonctionne comme une séparation entre le milieu urbain et le milieu rural, entre la ville et la campagne, entre le dedans et le dehors. Pour autant, cette limite est aussi la zone où se trouvent les ouvertures permettant la jonction entre intérieur et extérieur. Les portes de la ville de Paris sont les uniques passages à travers cette membrane qui délimite Paris. En effet, elles correspondent à la reprise des anciennes murailles de la ville qui à l’origine étaient de véritables frontières. Le périphérique est donc à la fois limite et transition.

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Pte de la Chapelle

Pte de Saint-Ouen

Pte de la Villette

Pte de Clichy Pte de Pantin Pte Maillot Pte des Lilas

Pte Dauphine

Pte d’Auteuil

Pte de Saint-Cloud

Pte de Vincennes

Pte de Sèvres Pte de Vanves

Pte de Bercy

Pte d’Orléans

Pte d’Italie

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Inclusion, exclusion et intégration Les cohabitations sociales créées des quartiers, pourvues d’une identité commune sur le plan architectural, social ou fonctionnel. Ces zones sont délimitées socialement sans précision mais pas limitées physiquement. Ces groupes d’appartenances participent à l’organisation de la ville en incluant, excluant ou intégrant leurs propres espaces. A Paris, de nombreux quartiers se distinguent par leurs architectures, leurs classes sociales ou encore leurs ethnies.

Inclusion

Exclusion

Intégration

1_ La rue Saint-Michel, dans le 6e arrondissement de Paris 2_ La butte Montmartre, dans le 18e arrondissement de Paris 3_ Les arches de la place des Vosges, dans le 3e arrondissement de Paris

Le quartier Latin est le quartier intellectuel de la ville grâce à la Sorbonne ainsi que la présence des premiers bars «intellectuels» (Sartre). Il est également un quartier animé de jour comme de nuit, un quartier à la population plutôt jeune et branchée. Le Marais est un des quartier les plus vivant et les plus cher de Paris du fait des anciens marchés et halles de Paris. Ce quartier regorge de galeries, de musées et de bars. C’est le quartier de la communauté gay et juive à Paris.

La frontière sociale produit des limites spatiales construites par la société et des limites perçues et vécues par les personnes.

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Le quartier de Montmartre est un quartier religieux de Paris avec ses nombreuses églises et sa basilique.

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Fusion du langage Dans un contexte plus lié à la culture, la frontière d’un pays devient poreuse à son voisin et offre des cohabitations multiples. La langue ( et donc l’écrit) d’un pays se mélange à l’autre, les architectures se fusionnent ou encore les coutumes s’échangent et se partagent.

« Cette zone proche de la frontière nous a touchées à la fois par la similitude et la différence qu’on pouvait percevoir lorsqu’on passait d’un pays à l’autre.» Christine Felten et Véronique Massinger, photographes

Au niveau culturel, les similitudes dans l’expression orale, prouvent que la frontière n’arrête pas la propagation de la culture ou des coutumes. La région flamande et la région wallonne, deux régions de la Belgique s’étalent en France au niveau de la frontière et répandent leur expressions et leur culture du langage dans le nord de la France.

Expérimentations montrant que la superposition peut brouiller l’information de départ et lui donner une nouvelle dimension par ajout de matière

1_ Croquis de l’influence Belge en France 2,3,4,5_ Superposition par transparence ou différentes opacités 6_ Superposition de volumes 90

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La réversibilité permet d’engendrer une modification d’un élément tout en lui permettant de revenir à sa forme initiale. Ces expérimentations proposent une réversibilité partielle (qui laisse une trace) ou totale ( seulement visuelle )

Réversibilité d’un échange Certaines institutions, utilisent cette proximité poreuse afin d’établir une cohabitation solide et créer un véritable réseau d’échange culturel. C’est le cas des écoles bicultures présentes à la frontière franco-allemande. Ces écoles prônent l’échange des cultures entre deux pays voisins. On instaure la culture et la langue du pays voisin dans l’apprentissage de l’enfant à travers des traditions, des activités, des cours ou encore des échanges. Cette pratique à pour but d’ouvrir l’enfant au monde avec la découverte d’une nouvelle culture. 1_ Expérimentation sur la réversibilité par le transfert d’une image 2_ Expérimentation sur la réversibilité par le reflet 3_ Expérimentation sur la réversibilité par la trace 4_ Natalia Devos, Graphiste

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Cette sorte de cohabitation renvoie à la notion de réversibilité, un aller retour entre deux choses qui se répondent.

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Cohésion architecturale Au niveau de l’architecture, une véritable continuité architecturale s’établit en marge des frontières. La frontière devient poreuse et les influences communes contribuent à une cohabitation de l’art du bâtiment. Aux frontières françaises par exemple, la Belgique et l’Allemagne ont fortement influencées les constructions alsaciennes ou celles du nord de la France.

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03 / OUVERTURE : UN PASSAGE ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

Les postes de douanes constituent l’unique passage légal d’un territoire à un autre. Ils sont situés à des endroits stratégiques où les passages sont les plus fréquents d’un territoire à un autre. Ces ouvertures permettent la circulation des personnes et les échanges de marchandises tout en gérant les flux entre deux pays. Le cas particulier de l’espace Schengen offre des frontières totalement ouvertes économiquement. Par l’intermédiaire de percées, la frontière devient un passage. Elle est le lieu d’un percement dans une limite, le lieu de son franchissement. A échelle de la ville, la porte constitue un symbole fort d’ouverture : jusqu’à l’époque moderne, les «portes de la ville» étaient le seul moyen de franchir les rempart de la ville. D’autres formes d’ouvertures sur la ville comme les ponts ou les tunnels permettent le franchissement.

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Le franchissement Abordons la notion de frontière au sens de passage en nous appuyant sur les recherches de Phillippe Bonnin, architecte et directeur au CNRS. Ainsi il dit que «dans les limites matérielles et symboliques qui séparent les territoire, ont été ménagés des négations, des trous, des possibilités de passage. Ces opercules, dispositifs à topologie variable -la porte, le portail, la fenêtre même, et bien d’autres dispositifs sont les figures différentes de l’opercule, du percement dans la limite, de sa négation locale.» L’action du franchissement d’une frontière se fait donc par l’intermédiaire d’ouvertures, devenant ainsi un passage dans la limite.

La porte possède une symbolique forte d’ouverture puisqu’elle est le point de passage entre deux espaces. Pierre Sansot dans son ouvrage, La poétique de la ville, nous montre que les portes de la ville apportaient toute son importance à la ville car « en quelque sorte, la ville disparaît puisque nous n’avons pas à franchir le seuil qui nous assure que nous venons de pénétrer en elle.» ( 2004, p 124) «Les portes de la ville» signalent l’entrée dans la ville et accompagnent le franchissement des murs. Aujourd’hui en Allemagne, par exemple, beaucoup de portes de ville sont devenues l’emblème de ces villes, et jouent même un rôle touristique. Au Vatican, Etat enclavé dans la ville de Rome, les uniques points d’entrée sont 5 portes, perçants les épais murs de la souveraineté.

«Il est ainsi de multiples manières d’aborder la ville − par ses portes jadis, par ses gares et ses « entrées de ville » aujourd’hui» Pierre Sansot, Poétique de la ville 1_ La porte d’entrée Nord du Vatican 2_ La Porte de Brandebourg à Berlin, Allemagne

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Marina Abramovitc à travaillé la notion de franchissement d’une manière qui lui est propre. Nue, face à son mari Ulay nu également, les deux artistes se place sur le seuil d’une porte étroite. Pour passer, le spectateur n’a pas d’autre choix que de toucher l’un des deux corps nus. C’est vraiment l’instant même du passage du seuil que l’artiste souhaite modifier, en y apportant une sensation de gène et d’embarras. 1,2,3_ Expérimentations sur la transition 4_Bunker 599, Rietveld Landscape 5_ Impondérables, Marina Abramovic

L’action de franchir un espace peut être accompagnée spatialement par des éléments qui engendrent une manière de traverser différentes : transition saccadée, transition par étape, transition directe.

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Circulation et déplacements La notion de passage implique une circulation, des déplacements d’un espace à un autre. Aux frontières de l’espace Shengen, les circulations sont libres et le passage d’un pays à un autre se fait de manière naturelle. Les déplacements se font sans tenir compte des marquages cartographiques. Cette liberté de circulation, à intéressés de nombreux artistes notamment Dennis Adams et Laurent Malone, deux photographes. En 1997, ils effectuent une marche dans New York, de Manhattan jusqu’à l’aéroport JFK en suivant une ligne droite tracée sur le plan de la ville. Les deux artistes traversent toutes sortes de lieux et de zones hétérogènes sans modifier la géométrie du parcours et leur trajectoire linéaire.

1_Dennis Adams et Laurent Malone Documentation de la marche JFK, 1997. 2_ Walking a line in Peru, Richard Long

Richard Long, travaille cette notion de passage à travers le déplacement et cherche à laisser la trace de sa trajectoire. Il cherche à tracer de nouvelles frontières afin d’insérer sa trajectoire dans un entre-deux.

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L’espacement entre les éléments engendre un rythme, un ralentissement ou une accelration.

Aux frontières, la question du passage comme ouverture engendre une temporalité. Parfois raccourci ou détour, rapide ou lent, direct ou indirect, le passage des marchandises ou des personnes engendre différents rythmes au sein du parcours.

Rythmes C’est souvent la situation géographiques et la taille des ouvertures frontalières qui agit sur la vitesse du passage. Ainsi, suivant la relation économique et sociale que l’on a avec le pays dans lequel on veut entrer, la transition vers le pays peut être très rapide ou peut durer plusieurs jours. La notion de détour s’inscrit dans la démarche de l’artiste Francis Alÿs qui réalise un parcours de 35 jours pour rejoindre San Diego à partir de Tijuana, deux villes frontalières. L’artiste choisit de ne pas franchir la frontière entre les deux pays, mais réalise un périple pour rejoindre l’Amérique via Mexico, le Panama, le Chili, la NouvelleZélande, l’Australie , Singapour, la Thailande, la Birmanie , Hong-Kong, la Chine, la Corée, puis les Etats-Unis pour atteindre San Diego. Francis Alÿs montre ici une nouvelle façon de traverser une frontière, en jouant sur la temporalité et en choisissant de la contourner. Le rythme de déplacement est un facteur auquel s’est intéressé Richard Long en effectuant 4 trajets de plus en plus long mais avec la même durée de temps (1 heure). Sa cadence s’accélère donc de plus en plus afin d’atteindre sa destination : la vitesse est donc un facteur modulable par chacun.

1_ Expérimentation exprimant le ralentissement 2_The Loop, Francis Alÿs 3,4_ A walk of four hours and four circles, Richard Long 104

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1_ Le téléphérique de Medellin, en Colombie 2_ L’arc de Triomphe parisien

Interfaces La frontière est une interface qui met en contact deux espaces juxtaposés permettant la modulation de l’interaction plutôt que sa négation. Elle participe à la constitution et au fonctionnement des espaces qu’elle limite et en constitue une composante intégrante. Les nombreux échanges entres les pays se font par l’intermédiaire d’interfaces permettant les échanges et la régulation des passages. Cet échange peut s’effectuer par un point, une ligne ou une zone. Ainsi, l’interface peut être une ville, un réseau de communication ou une zone frontalière. A l’échelle de la ville, l’arc de Triomphe est une véritable zone d’interface parisienne ou 12 avenues se rejoignent. Ces zones peuvent devenir de véritables carrefours sociaux où les ouvertures, les passages permettent de relier deux espaces différents. C’est le cas du téléphérique de Medellin, en Colombie, qui constitue un vrai projet social reliant physiquement et symboliquement les quartiers les plus pauvres au reste de la ville. Les passages peuvent donc nous aider à relier la ville, à rattacher les quartiers riches aux quartiers pauvres la périphérie au centre de la ville.

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03 02

Les ambassades représentent aussi une sorte d’enclave politique puisqu’il s’agit d’un espace politique d’un état à l’intérieur d’un autre état. Ainsi, au sein d’une ambassade, les lois appliquées sont celle du pays de l’ambassade et non du pays d’accueil. Politiquement et juridiquement, une ambassade est autonome. Lorsque l’on franchit ces espaces, on franchi la frontière politique d’un autre pays, tout en restant physiquement dans le pays accueil.

Limites des frontières.

01 / ENCLAVES TERRITORIALES

Enclaves politiques La frontière est un espace complexe qui possède pourtant ses limites. Qu’ils soient politiques, culturels ou sociaux, certains espaces contournent les règles frontalières et détournent ses limites.

L’exemple de l’ambassade de France au Canada, conçue par Eugène Beaudouin ou l’architecte déclare: «Peut-être plus que partout ailleurs, il importe qu’au Canada, la France soit installée chez elle et dans un immeuble qui en nous faisant honneur, flatte l’amour-propre des Canadiens, qui ont conservé, si vivants en eux, le souvenir et le goût des choses de chez nous».

Ainsi, on trouve des enclaves politiques. Le terme enclave désigne un morceau de terre sous souveraineté d’un pays complètement entouré par un autre. Ces enclaves sont des espaces «hors frontières» en marges de leur pays. La frontière n’est plus une «ligne» mais devient une zone, un espace entier. Par exemple, la République de Saint-Marin, enclavée dans l’Italie ou le Royaume du Lesotho, à l’intérieur de l’Afrique du Sud sont des espaces accessibles uniquement par le franchissement de la frontière du pays enclavé.

1_ La région C est une exclave du pays B, ainsi qu’une enclave dans le pays A qui l’encercle complètement. 2_ Royaume du Lesotho enclavé dans l’Afrique du Sud. 3_ Ambassade de France au Canada, collaboration entre Eugène Beaudouin et Ernst Cormier, architecte canadien 108

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Enclaves culturelles Au niveau culturel, certains espaces dépassent les frontières et entraînent un dialogue constant entre les deux pays. Les centres culturels étrangers, comme l’Institut du Monde Arabe (IMA), diffusent des informations culturelles en lien avec leur pays, dans le pays dans lequel il se trouve. Ces espaces ont la vocation de faire connaître leur culture, à travers des interventions d’artiste, des oeuvres littéraires, artistiques, cinématographiques, ou encore par le biais du design et de l’architecture. Ces centres offrent des liaisons à distance, des connexions culturelles réelles entre des pays avec ou sans frontières communes.

Les pavillons des expositions universelles jouent également un rôle «d’enclave» culturelle et économique. Lors des expositions, ces pavillons permettent à chaque états de mettre en avant ses progrès industriels, culturels et sociaux à travers la construction d’un bâtiment. Ces rassemblements contribuent à présenter l’art et la culture des pays participants et symbolise la spécificité et la vision du monde de chaque nation représentée.

1,2_ L’Institut du Monde Arabe fait la liaison culturelle entre l’orient et l’occident. 110

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La Cité internationale universitaire de Paris est un ensemble de bâtiments créant un pôle majeur dans la politique d’accueil des étudiants étrangers. Ces bâtiments regroupent aussi socialement puisque dans le but de permettre aux étudiants et chercheurs étrangers de mieux connaître la France, sa langue et sa culture, les résidents nationaux admis dans une maison sont ensuite hébergés dans toutes les maisons de la Cité. Chaque bâtiment évoque par l’architecture, la culture et les traditions du pays représenté. Les maisons étudiantes sont en grande majorité construite par des architectes originaires du pays de la maison.

1_ La maison du Japon : édifice tout en hauteur, décor raffiné, représentation du soleil levant sur le porche d’entrée et baies coulissantes à l’intérieure 2_ Collège Franco-Britannique : briques rouges, bow-windows et tourelles. 3_ Maison de l’Italie : loggia à arcades, cheminée baroque de Mantoue et ruines antiques 4_ Maison de l’Inde, dotée d’oeuvres d’art représentatives de la culture traditionnelle indienne 5_Duty Free

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Enclaves économiques Les « commerces hors douane », plus connus sous le terme de « duty free » sont des enclaves douanières spécialisées dans la vente de détail hors taxes douanières. Il s’agit dans ces mini-zones de proposer aux voyageurs un certain nombre d’articles détaxés. Les marchandises qui y sont introduites sont considérées comme ne se trouvant pas sur ce territoire et sont exonérées de droits à l’importation et de taxes. Ces boutiques se retrouve dans les aéroports ou les ports internationaux aux niveau des douanes.

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02 / ESPACE ENTRE DEUX

Territoires indépendants Certains espaces ne sont sous l’autorité d’aucun états et n’appartiennent donc à personne. C’est à dire, comme le signifie «res communis» en latin, ce sont des espaces dont tous peuvent jouir sans se les approprier. Il existe 3 espaces de ce type : ‘Antarctique, l’espace extra atmosphérique et la haute mer.

L’Antarctique, possède un statut spécifique excluant toute forme d’appropriation et d’affirmation de souveraineté territoriale. Aucune revendication territoriale ne peut être faite sur le territoire (elles ne sont ni déniées, ni reconnues). L’espace extra atmosphérique est soumis au même statut que l’Antarctique comme l’instaure la déclaration du 13 décembre 1963 : «L’espace extra-atmosphérique et les corps célestes ne peuvent faire l’objet d’appropriation nationale par proclamation de souveraineté, ni par voie d’utilisation ou d’occupation, ni par tout autre moyen». Enfin en haute mer «aucun Etat ne peut légitimement prétendre soumettre une partie quelconque de la haute mer à sa souveraineté», celle-ci est «ouverte à tous les Etats qu’ils soient côtiers ou sans littoral» selon la Convention de Montego Bay.

«Nul ne dispute qu'au delà des limites de la juridiction nationale existe un espace insusceptible d'appropriation étatique.» Daillet et Pellet, Relations Et Droit International

Ces espaces sont des territoires en marge et échappent, par nature, à l’emprise de la souveraineté pour être ouvertes à l’accès et aux libertés d’usage de tous.

1_ Hautes mers en bleu foncé. 114

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Continuité dans la discontinuité Les discontinuités peuvent donner lieu à la continuité. Elles peuvent conduire à des processus de concentration et de polarisation comme c’est le cas des villesdoublons et des zones franches, les maquiladoras le long de la frontière mexico-américaine. La discontinuité à proximité conduit ainsi à la continuité lointaine.

Les espaces hors zone Les espaces tels que les douanes dans les aéroports constituent des espaces ambiguës. Ces points de contrôle sont des lieux de franchissement vers un espace sous douane. Ce passage nous fait entrer dans un entre deux, qui n’est ni un pays ni l’autre. Cet espace pourtant situé sur le territoire, est un espace soumis à l’autorité du territoire sur lequel elle se trouve mais n’est pas considéré appartenant au territoire. La douane symbolise cet entre deux. Des «zones d’attentes» existent dans les aéroports et sont des espaces physiques permettant à un étranger d’attendre lorsqu’il n’est pas autorisé à entrer sur le territoire.

Terre d’accueil

Roissy

Le dispositif des zones d'attente en 2006 Dunkerque Calais

Orly

Lille

Cherbourg

Le Havre Rouen

Brest

Strasbourg

Saint Nazaire

Nantes

Clermont Ferrand

Le Verdon

Lyon

Bordeaux

0

100 km

Nice

Toulouse Bayonne

Sète

Marseille

Zone d'attente aéroportuaire Zone d'attente portuaire Zone d'attente ferroviaire

L’artiste Lucy Orta en collaboration avec son mari, Jorge Orta, développe dans Antarctic village, des tentes de survies en plein désert de l’Antarctique. Avec ce projet, elle brise les frontières en accueillant les populations migrantes sur un territoire libre symboliquement situé en Antarctique, un continent neutre.

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Zones d'attente gérées par les douanes Zones d'attente gérées par la Police Aux Frontières Espace frontalier maritime où peut être créee à proximité du lieu de débarquement une zone d'attente, et exposé à l'arrivée massive d'étrangers voyageant sans les documents nécessaires pour entrer en France. Espace frontalier maritime où peut être créee à proximité du lieu de débarquement une zone d'attente, mais peu exposé à l'arrivée massive d'étrangers voyageant sans les documents nécessaires pour entrer en France. Locaux d'hébergement spécifique à l'accueil des étrangers arrivant sur le territoire

1,2_ Antarctic Village, Lucie Orta 3_ Dispositifs des zones d’attente en France

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04/ Conclusion.

La frontière est avant tout une notion abstraite aux valeurs de séparation et de délimitation. Cette notion abstraite, appelée topos, s’est d’abord matérialisée graphiquement avec l’apparition de la cartographie avec la volonté de créer une représentation admises par tous. Ces frontières immatérielles sont parfois les vestiges des frontières résultantes du passé (Mur de Berlin), des frontières invisibles (voies aériennes) ou des frontières qui relèvent de notre propre position dans l’espace (différence de représentation et la réalité de la frontière, horizon).

Symboliquement, la frontière porte autant la valeur de limite que de passage. Elle est limite lorsqu’elle est en relation avec la valeur politique d’un état, entre des pays en conflits, ou persiste une forte inégalité. Pour maintenir un dedans et un dehors, instaurer une mise à distance ou encore Puis, la frontière s’est peu a peu matéria- exclure une communauté, la frontière joue lisée dans le but de répondre à différents un rôle de limite. besoins de séparation, de protection ou d’affirmation. Certaines sont définies par La frontière est paradoxalement passage l’environnement déjà existant (mers, reliefs) puisqu’elle est un lieu de franchissement, ou d’autres se créer par le fossé creusé par une interface continue entre deux pays des modes de vies opposés. frontaliers où les échanges intercommuCes frontières naturelles s’ajoutent aux nautaires sont régis par de nombreuses frontières construites par l’homme. ouvertures. D’abord pour affirmer et délimiter la pré- La frontière se retrouve parfois à jouer le sence concrète d’un pouvoir en place rôle de seuil culturel ou social, en marquant (bornes, murs), ensuite dans le but de se un changement de langue, de mode de vie, protéger des autres pays (murailles, rem- de pensée ou soit d’un point de vu légal en parts, douves). marquant un changement dans les lois et le Ces frontières concrètes sont peu à peu système monétaire.. Parfois, c’est la culture devenues des espaces de conflits où murs elle même qui creuse un fossé et engendre et barrières sont érigés dans le but d’empê- des regroupements communautaires (quarcher le passage et le mélange des commu- tier). nautés (Frontière mexicaine/ Etats-unis). Ces frontières entretiennent les inégalités Certains espaces échappent à ces règles entre pays riches ou pauvres et les diffé- frontalières et s’insère dans un pays comme rentes religions. de véritable enclaves territoriales. C’est les cas des ambassades, des grands centres Aujourd’hui, depuis l’apparition de l’espace culturels étrangers ou encore des cités uniSchengen entre les pays de la communauté versitaires qui fonctionnent comme des européenne, ces frontières matérielles ne «morceaux» de pays à l’intérieur d’un autre. sont plus que des vestiges physiques (traces, D’autres espaces ne sont soumis à aucune autorité et se présentent comme des esanciennes douanes). paces «hors limites» (Antarctique, hautes mers et espace extra atmosphérique). Enfin, le cas de la douane symbolise un entre deux, un espace situé sur un territoire, mais ou tout semble ne dépendre de rien, comme un espace hors du temps et de l’espace.

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LAVENUE, Jean-Jacques, Souveraîneté, territoires, espaces, espace virtuel, Cours actuellement donné en Masters pro Mention Droit des Activités trans-nationales.

05/ Sitographie Bibliographie. 120

QUADEER, Mohammad (2006), Les enclaves ethniques et la cohésion sociale, School of Urban and Regional Planning REKACEWICZ, Philippe (2013), Cartographier la frontière et les espaces frontaliers, Conférence enregistrée au Lycée Claude Fauriel BELHEDI, Amor (2013), Les limites en géographie, Pertinence et limites d’un concept et d’une pratique, Communication au Colloque du Département de Géographie, Faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de manouba ARTICLES BONNIN, Philippe (2000), Dispositifs et rituels du seuil : une topologie sociale. Détour japonais, Communications MOULLE, François (2012), De la frontière aux discontinuités. Regards de géographes, Extrait du Laboratoire Discontinuités SOREL, Jean-Marc (2011), La frontière comme enjeu de droit international, CERISCOPE Frontières,

BERQUE, Augustin (2000), Ecoumène, Introduction à l’étude des milieux humains, Paris, Belin DELEUZE, Gilles (1980), Milles Plateaux,Paris, Edition de Minuit LEVY, Jacques (2003), Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Paris, Belin SANSOT, Pierre (2004), La poétique de la ville, Paris, Petite bibliothèque Payot PEREC, Georges (2000), Espèces d’espaces, Paris, Galilée

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Charlotte Grosjean Mastere Design Global Design d’espace AnnÊe 2014_2015

1


01 02

Sommaire.

03 04

05

Introduction

Un espace représentatif d’une nouvelle identité : relation entre la douane et le passant 01

Une nouvelle approche du lieu

02

Identité et compréhension du lieu

Intégration du piéton dans l’espace Modification des usages du véhicule Réorganisation de l’espace proche de la douane

Relations communes Ouvertures des volumes

Le passage comme espace de transition : relation entre l’environnement et le passant 01

Progression et articulation spatiale

02

Continuité et rupture

Succession d’éléments Évolution séquentielle Décomposition d’un mouvement Prolongement physique et visuel Association et opposition

Le passage comme espace d’échange : relation entre les passants 01

Distance et proxémie

02

Rythmes et temporalités

Hiérarchie topologique Jeux visuels

Répétition d’éléments Raccourcis et parcours augmentés Le vide comme pause

Conclusion 3


01/ Introduction.

Dans un contexte de douanes européennes,la mise en place de l’espace Schengen, à considérablement modifié la fonction, la symbolique et le rôle du bâtiment.

Avant l’apparition de l’espace Schengen, le poste de douane jouait un rôle séparateur entre deux pays, il les délimitaient et les dissociaient tant physiquement que spatialement. Sa situation géographique le long de la douane, en faisait un passage obligatoire et en structurant la frontière. Sa fonction politique de limite et de séparation a fait de la douane une zone de conflit, un espace d’appréhension et d’angoisse pour chaque passager. La douane est un lieu de passage, mais un lieu de passage obligatoire sous l’emprise politique du pays. C’est un passage obligé, où l’on est forcé de s’arrêter. Ces passages à la douane sont alors utilisés pour exclure, séparer et diviser.

5

HIER Séparation Obligation Zone de conflit


AUJOURD'HUI

Aujourd’hui, ces douanes situées dans l’espace Schengen n’ont plus de fonction et sont abandonnées. Seule leur structure persiste et renvoie à toute une symbolique politique et culturelle de la frontière. Ces bâtiments apparaissent comme un patrimoine partagé, lourd d’histoire et empreint d’une double nationalité. Ces douanes sont délaissées, et deviennent des espaces de passages sans incidence, sans intérêt. On y passe sans s’arrêter et sans même forcement y prêter attention.

Neutralité Délaissé Patrimoine

6

Comment redonner de l’importance à ces douanes en facilitant les transitions et en rendant le lieu marquant ? Ces espaces doivent devenir des lieux de passages où l’on fait le choix de s’arrêter, ou l’arrêt est volontaire. Ces espaces doivent relier, unir et non plus exclure et diviser.

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DEMAIN Relier Volonté Fluidité


02/ Un espace reprEsentatif d'une nouvelle identitE.

Relation entre la douane et le passant La douane est un lieu à caractère symbolique évoquant pour chacun un souvenir fortement négatif, d’appréhension, d’inquiétude et parfois même d’angoisse. Cette atmosphère renvoie au passé des douanes et à leur fonctions strictes et exclusives. Ce nouvel espace doit être empreint d’une nouvelle identité mettant en avant la curiosité et l’intérêt des passant à travers une nouvelle expérience urbaine. Cet espace doit mettre en évidence les relations établies entres les pays frontaliers et les faire ressentir par les passants. Le passant doit se sentir impliqué en lui permettant de s’approprier ce nouvel l’espace. Cet espace doit être perçu comme un espace qui nous permet de comprendre où l’on est, ou l’on va et de s’approprier la culture du pays dans lequel on entre. De même que lors du passage à la frontière notre état d’âme se modifie et on s’adapte au pays dans lequel on entre. Cette adaptation mentale fait l’objet d’une transformation éphémère. Lorsque l’on quitte le pays, on retrouve ses habitudes. Comment instaurer une identité dans un espace d’adaptation mentale et physique ? Comment l’appropriation de l’espace permet il de mieux le comprendre ?

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02 01 Une nouvelle approche du lieu. _La réhabilitation d’une douane engendre des modifications de la fonction qui ont une répercussion sur la manière d’appréhender ce nouvel espace. Les douanes étaient uniquement réservées au déplacement en véhicule et l’organisation de l’espace autour de la douane était approprié aux véhicules et non aux piétons. Aujourd’hui, l’espace doit être appréhendé de manière à intégrer à la fois les véhicules et les piétons. Une nouvelle façon de circuler autour et dans cet espace est donc mise en place pour s’adapter aux nouveaux besoins. La présence de nouveaux usagers engendre également une réappropriation du lieu.

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01 / INTÉGRATION DU PIÉTON DANS L’ESPACE

En ouvrant l’espace aux piétons, la mise en place d’installations spécifiques au piéton est nécessaire : les assises.

La présence d’assises indique qu’il s’agit d’un espace pour piéton et elles permettent des instants de repos, de haltes aux usagers.

Modifier l’existant en y intégrant des éléments de repos pour le piéton.

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Exemple de plusieurs assises à la suite formant une ondulation. La déformation du bâtiment existant ( ou greffe) permet de comprendre la nouvelle utilisation / fonction du lieu.

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La présence du piéton nécessite une nouvelle organisation de l’espace autour de la douane.

Exemples de configuration d’espace de douane en intégrant une zone pour les piétons

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01 / MODIFICATION DES USAGES DU VÉHICULE

Usage habituel

Une nouvelle circulation à l’approche de la douane pour casser les anciens codes.

Approche de la douane dans l’usage commun ( avant Schengen) Trajectoire linéaire. Arrêt. Reprise de la trajectoire initiale.

Exemples de circulation différente de l’usage

Usage habituel

Exemples possibles de modification de la trajectoire initiale du véhicule aux abords de la douane.

Exemples de circulation différente de l’usage 16

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01 / RÉORGANISATION DE L’ESPACE PROCHE DE LA DOUANE

Faire cohabiter piétons et véhicules

L’intégration d’une zone dédiée au piéton engendre également une nouvelle place pour la circulation des véhicules. L’espace se partage en zones distinctes.

Des jeux de superposition permettent de faire cohabiter les deux zones de circulation en les gardant bien distinctes.

Le pont de Brooklyn à NYC, possède 3 axes de circulations : 2 axes pour les véhicules en périphérie et un axe central pour la circulation des piétons. Les zones possèdent la même trajectoire mais la zone de piéton surplombe les 2 autres axes.

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Exemples d’organisation de l’espace autour d’une douane existante.

Partager l’espace entre piétons et véhicules

Poste de douane Une circulation piétonne au centre et 2 circulations latérales pour les voitures FRONTIÈRE

Schéma de l’organisation d’une douane existante qui servira d’exemple.

Passage symétrique Passage étroit central pour les véhicules. Les éléments de la douane font partie de l’espace piéton, non accessible en voiture. 20

Voitures 21

Piétons

Voitures


Mettre en lien les éléments existants pour créer de la linéarité

Mettre en relation les éléments existants permet de séparer les espaces et de créer plusieurs espaces distincts

Les espaces de haltes sont traversés par la circulation des véhicules pour les inciter à l’arrêt (envie, intérêt)

Créer un espace central traversé par les circulation. Éléments distincts.

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02 02 Identité et compréhension du lieu. _L’identité du lieu doit se retrouver à travers les différents lieux réhabilités. Un langage commun doit être établit entre chaque espace afin de générer un ensemble reconnaissable et identifiable à travers l’espace Schengen. Ce lieu doit également faire part des nouvelles relations établies entre les pays frontaliers au fil du temps afin de faire prendre conscience au passant de l’espace qu’il traverse. Cette nouvelle identité commune doit permettre la compréhension du lieu c’est à dire la compréhension des relations transfrontalières d’aujourd’hui. Ainsi, l’ouverture les frontières a permis aux pays frontaliers de créer des unions, des relations et même des collaborations. C’est cette nouvelle relation qui doit être perceptible lors du passage de la douane.

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01 / RELATIONS COMMUNES

Instaurer un code couleur.

Instaurer une identité commune à toutes les douanes réhabilitées permet de les mettre en relation à distance et de créer un rappel, un souvenir chez le passant. Créer un code couleur pour relier les douanes entres elles permet également de rendre le lieu reconnaissable. Interventions simples pour pouvoir être appliquées sur n’importe quel poste de douane et être facilement identifiable

Mise en contexte sur quelques douanes abandonnées vue du ciel

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La couleur peut être appliquée au sol pour n’être visible qu’une fois proche du lieu : créer de la surprise

Elle peut être appliquée sur le bâtiment, en touche ponctuelle pour appuyer le regard vers cet espace : créer de la curiosité

Elle peut également être installée dans l’environnement à l’approche de la douane pour prévenir d’un changement : créer de l’anticipation.

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02 / OUVERTURE DES VOLUMES

Symbolisation des relations transfrontalières par l’ouverture de l’espace.

Création de zones de vide : la séparation du volume en plusieurs volumes crée un nouvel espace. Cet espace symbolise la nouvelle relation entre les pays membres de l’espace Schengen;

Agrandissement de la zone d’intervention Cette intervention symbolise l’élargissement des frontières.

Volume initial

Étirement du volume en intégrant des zones de vides pour ouvrir le volume.

Nouvel espace ( rouge ) créé par la décomposition du volume initial.

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Cette ouverture de l’espace apporte une nouvelle façon de traverser le lieu.

Application sur une douane existante. Les circulations sont parallèles au bâtiment.

L’ouverture du bâtiment engendre une nouvelle dynamique. Le bâtiment peut être appréhender de manière parallèle ou perpendiculaire. La percée engendre une visibilité et un contact entre les deux circulation

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03/ Le passage comme espace de transition.

Relation entre l’environnement et le passant. Lors d’un passage d’une frontière la transition est à la fois d’ordre physique et mental et parfois culturel. Bien que séparant deux espaces extérieurs, la frontière implique une relation dedans /dehors, par la notion de franchissement, d’entrée et de sortie d’un espace. Cette transition doit être ressentie de manière naturelle afin d’améliorer la qualité du passage des usagers. La création d’un espace progressif, la qualité de l’articulation ou la conception de deux espaces en continuité permettent de créer une liaison entre les deux et de les faire fusionner, de rendre le franchissement presque imperceptible. C’est cette évolution graduelle et réversible qu’il serait intéressant de retranscrire spatialement. Comment établir la relation entre deux territoires de manière naturelle ? Comment entrer et sortir d’un espace ?

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03 01 Progression et articulations.

_La progression d’un espace vers un autre permet à l’usager une période d’adaptation progressive et proportionnelle à son déplacement dans l’espace. La transition accompagne le passant dans son déplacement et lui fait prendre conscience d’un changement à travers des éléments croissants (de plus en plus grand, de plus en plus haut, de plus en plus étroit...)

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Le franchissement ici est structuré par des angles créant deux orientations et deux trajectoires consécutives. L’usager prend conscience d’un changement par cette rupture dans le passage.

La nature de l’articulation entre les deux espaces joue un rôle dans le ressenti du passant lors de la transition. Une articulation progressive doit être discontinue, pour encadrer la trajectoire et évolutive pour marquer la transition

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Cet type d’articulation souple et fluide accompagne la trajectoire de l’usager. Il n’y a pas d’angle cassant le mouvement et ainsi plus de repères spatiaux : le passage se fait inconsciemment plus naturellement.

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01 / SUCCESSION D’ELEMENTS

La succession d’éléments par étape permet d’appréhender un espace de manière progressive. La succession d’éléments et les percées visuelles favorisent une bonne transition entre dedans et dehors. Ici, une cloison doublement progressive relie deux espaces. Une première progression dans l’ouverture offre des percées visuelles et des passages plus ou moins étroits d’un espace à l’autre. Une seconde progression se trouve en parallèle avec les parois latérales qui s’étirent de plus en plus

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Évolution des ouvertures

DiffĂŠrentes configurations en fonction de la typologie du lieu et de la disposition des postes de douanes

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Mise en contexte de l’expérimentation En rouge la zone réservée aux véhicules

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02 / ÉVOLUTION SÉQUENTIELLE

Faire évoluer un élément spatial en même temps qu’évolue le passant dans l’espace permet de l’accompagner.

Cette évolution étape par étape est très présente dans les musées. Dans les files d’attentes, plusieurs passages se succèdent avant d’arriver à l’exposition. Cette progression spatiale joue un rôle essentiellement moral afin de maîtriser les émotions de l’usager.

La transition est visible par l’évolution d’éléments qui sectionnent l’espace et permettent à l’usager de prendre conscience de son approche dans le lieu. Les éléments sont évolutifs dans la place qu’ils occupent dans l’espace pour amener l’usager progressivement dans le lieu désiré. Le passage laisse une trace au sol, la contre forme des éléments constituant le passage, et fonctionne comme une signalétique. (Forme de flèche )

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Évoluer par paliers visibles permet d’anticiper et de comprendre l’espace vers lequel on s’avance. Les éléments ici ne sont pas évolutifs mais permettent de modifier l’espace d’action du passant par paliers progressifs. Rétrécir un espace à mesure qu’on en approche permet de faire prendre conscience de l’évolution de l’usager dans l’espace. Le rétrécissement de la zone d’action de l’usager l’incite à ralentir et à prendre conscience de ce qui l’entoure.

Rétrécissement progressif de la voie L’espace se précise de plus en plus vers un point précis Ici, la voie reste la même mais la présence d’éléments rétrécissent le passage et lui donne une nouvelle dynamique à chaque passage.

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03 / DECOMPOSITION D’UN MOUVEMENT

La décomposition d’un élément permet l’évolution de celui-ci dans l’espace temps. La chronophotographie est un procédé qui permet de décomposer un mouvement et d’en comprendre toutes les étapes. La compréhension du mouvement est rendue possible par la visualisation des différentes étapes qui compose le mouvement

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La progression s’exprime par l’évolution de l’espace dans le temps Des modules, du plus immatériel au plus matériel, sont placés avant et après le volume principal. Cette construction/ déconstruction du volume permet d’aborder l’espace de manière progressive à la fois visuellement et spatialement. L’esquisse d’un volume inachevé comme point de départ du passage permet à l’usager de reconstruire visuellement le volume avant même d’y être arrivé et de l’anticiper. Une transition progressive permet à la fois visuellement et spatialement un passage plus naturel d’un espace à un autre.

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Créer une circulation qui découle de la décomposition du volume. Les usagers sont interpellés par les éléments extérieurs qui les mènent de manière progressive à l’intérieur du volume.

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03 02 Continuité et rupture.

_Créer de la continuité permet de lier sans rupture et ainsi faciliter la transition d’un espace à l’autre. Une rupture est une perturbation physique ou mentale qui entraîne un changement, une cassure. Cette notion de rupture spatiale est établie par une modification d’un volume ou d’une surface comme peut le faire la frontière lorsqu’elle dissocie deux pays.

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01 / PROLONGEMENT PHYSIQUE ET VISUEL

Le prolongement d’une partie d’un volume dans l’espace permet de l’ancrer et de le fondre à l’environnement Le prolongement du plafond permet une sortie progressive, toujours en accompagnant la trajectoire de l’usager : le bas du corps est à l’extérieur mais le haut du corps semble toujours à l’intérieur par la présence du prolongement du toit. Cette excroissance semble sortir du sol pour petit à petit s’intégrer au volume et créer la liaison. Le prolongement du volume au sol incite à entrer, puisqu’il intègre le déplacement de l’usager dans l’espace. La continuité du sol intérieur en extérieur permet visuellement de lier les deux espaces. La greffe du sol qui se prolonge est un élément distinct appartenant à la fois au volume et à l’extérieur.

Afin de créer une continuité du volume intérieur dans l’espace extérieur, certaines faces sont prolongées dans la continuité du volume permettant ainsi une transition moins brutale.

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Ancrer le passage dans son environnement peut se faire par un rapport visuel permanent.

L’environnement extérieur fonctionne comme la continuité du plafond, il semble appartenir à l’intérieur du bureau. Le jeu graphique de couleurs mêle sol, murs, plafond et environnement.

Percée visuelles sur l’environnement L’articulation entre l’extérieur et le passage se fait sans interruption puisqu’on garde un contact visuel permanent avec l’extérieur.

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02 / ASSOCIATION ET OPPOSITION

L’alternance du plein et du vide permet de les mettre en évidence l’un par rapport à l’autre et de les mettre en lien.

Ce passage offre une transition continue par la constante ligne droite que forment les angles des volumes. L’alternance entre l’intérieur et l’extérieur de l’espace participe à la progression tout en offrant une continuité à la fois visuelle à l’usager ainsi que dans son déplacement.

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La forme associée à sa contreforme souligne la relation entre deux notions opposées pour en créer une continuité.

Deux circulations distinctes sont mises en place : l’une étant la contreforme de l’autre. Les deux espaces fonctionnent simultanément et en continuité l’une de l’autre malgré une opposition évidente. Le rythme est le même pour les deux espaces mais la dynamique est totalement différente. Une des circulations est en volume alors que l’autre est générée uniquement par le sol.

Marcius Galan 62

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Mise en contexte de l’expérimentation. Deux circulations distinctes sont mises en place : une piétonne et une pour les voitures. La circulation piéton dépend de la circulation voiture et inversement. Ainsi, on retrouve le même rythme, mais la circulation pour les piétons est plus encadrée et plus définie.

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04/ Le passage comme espace d'Echange.

Relation entre les passants Le rapport social a une place importante au sein du passage. Il s’agit d’un espace de rassemblement involontaire et éphémère, un espace par lequel on doit passer pour accéder à un autre espace. La pluralité des usagers et de leur modes de transports, incitent à réfléchir à une transition idéale mettant en avant différents déplacements, différentes vitesses et circulations s’adaptant à ces mobilités. Les différents usagers qui franchissent les passages, entraînent des rythmes de parcours et des temporalités différentes selon le moyen de transports. Comment éviter que le passage soit utilisé pour exclure, séparer ou diviser ?

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04 01 Distance et proxémie.

_La frontière est un espace qui instaure de la distance malgré une proximité certaine entre les espaces. Cette distance est une distance politique avant d’être une distance spatiale. Quel rapport de proximité ou d’éloignement l’individu peut-il avoir vis-à-vis d’autres individus ou d’un espace? Edward Hall détermina expérimentalement l'existence de quatre distances chez l'humain, le passage de l'une à l'autre étant marqué par des modifications sensorielles : ce sont les distances intime, personnelle, sociale et publique:distance intime : moins de 40 cm -Distance personnelle : de 45 cm à 125 cm -Distance sociale : de 120 cm à 360 -Distance publique : au-delà de 360 cm Ces distances sont différentes selon les personnes mais aussi selon les cultures, à l'instar de leur approche de l'espace, ce qui permet d'en comparer les proxémies.

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01 / HIÉRARCHIE TOPOLOGIQUE

La distance entre deux personnes peut être provoquée par des jeux de hauteurs. Ici la distance entre les personnages reste la même, la distance est engendrée par le niveau du sol. Les personnages ne sont plus à égale distance du sol et cette différence de niveau instaure de la distance entre eux. La zone de vide entre les personnes s’agrandie. L’éloignement physique et le contact visuel se modifient et instaurent de la distance entre les personnages.

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Jouer sur différentes topologies pour instaurer une hiérarchie dans les circulations.

La circulation se créé par l’alternance de vides et de pleins qui modifie la topologie de l’espace. Ces différences de niveaux séparent et créent des circulations distinctes. Les relations entre les passants sont différentes car les points de vues sont modifiés et apportent une certaines hiérarchie aux espaces. Les plaques terrestres peuvent illustrer cette mise à distance. Lorsqu’elles bougent, elles engendrent des modifications topologiques : éloignement, rapprochement ou décalage des plaques terrestres.

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Mise en situations des différentes circulations et des relations / points de vues entre les différents passants (piétons et voitures)

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02 / JEUX VISUELS

Traduire spatialement une distance entre deux espace proches par des contacts physiques ou visuels.

L’installation d’Arnaud Lapierre, Ring installation, est un mélange de deux espaces entre la réalité et le reflet. L’espace est décomposé par le miroir et propose une nouvelle vision de l’espace.

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L’utilisation d’un miroir prolonge le passage et agrandi l’espace. Les usagers sont en contacts visuels entre eux et également en relation avec l’environnement extérieur. Cette cloison peut servir de séparation entre deux modes de transports. La présence du miroir permet de ne pas cloisonner mais au contraire d’ouvrir l’espace et de créer un prolongement visuel. Ainsi, la valeur de distance entre les passants est modifiée et joue un rôle d’unification plutôt que séparation.

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La perception d’un espace permet d’en déterminer les limites, le volume, la distance.

Une mauvaise perception entraîne une nouvelle vision de la réalité. Ce décalage entre la réalité et notre vision instaure une distance par l’incompréhension. L’anamorphose, la réflexion, le reflet, l’illusion sont des procédés qui peuvent permettre de modifier la perception d’un environnement.

La perception du volume est modifiée par la présence du miroir qui remodèle le volume. Sa dimension, sa taille, son épaisseur sont modulées par le reflet de l’environnement et permet de faire disparaître une partie du volume dans son environnement.

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04 02 Rythmes et temporalité.

_La circulation dans le passage est importante elle doit s’adapter aux différentes mobilités et aux différents moyens utilisés. Le passage peut ainsi être raccourci ou alors à l’inverse augmenté, un labyrinthe. Ce même passage peut donc être envisagé de manière différente par une trajectoire, une direction qui amènent à explorer l’environnement de diverses manières.

Richard Serra est un artiste qui joue sur la manière de faire ressentir un espace par la circulation. Il crée des structures hautes, lourdes et étroites où le visiteur est ainsi invité à déambuler dans l’œuvre. Chaque œuvre de l’artiste créé de l’espace et invite le visiteur à se déplacer autrement, explorant de nouvelles directions et modifiant son corps comme sa perspective. Le visiteur devient le sujet même de l’œuvre, il en est l’acteur principal.

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01 / RÉPÉTITION D’ELEMENTS

La reproduction d’un même élément répété à la suite dans un espace, incite à la vitesse.

La nature des éléments peut influer comme par exemple ici, ou ce sont des ouvertures régulières qui rythment le passage en créant des jeux d’ombres et de lumières.

Un enchaînement d’éléments permet de réguler le passage La répétition apporte a l’usager une sensation d’habitude, il se sent à l’aise et augmente la vitesse. On peut jouer sur cette vitesse en jouant sur la régularité ou l’irrégularité des éléments.

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Un passage composé d’éléments de plus en plus éloignés, provoquera une accélération de la cadence du passant. Dans un passage régulier mais rapproché, l’usager aura tendance à marcher vite et de manière constante. La composition, l’intervalle et la cadence des éléments a donc un impact sur la vitesse de déplacement de l’usager.

Passages multipliant les variations de hauteurs, d’épaisseurs, d’écartement modifiant ainsi la vitesse de l’usager que le traverse.

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Le rapport aux dimensions humaines avec la notion d’échelle permet d’influer sur le rythme de l’usager.

La hauteur ainsi que la largeur sont des paramètres influant sur la vitesse. Plus un espace est proche des dimensions humaines, donc restreint, plus l’espace est restreint, plus le passant aura tendance à ralentir son allure.

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L’adaptation du passage aux dimensions humaines crée une évolution, croissante ou décroissante, qui modifie la progression de l’usager à travers l’espace.

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02 / RACCOURCIS ET PARCOURS AUGMENTES

Le choix du parcours permet d’influencer le temps de passage.

Le temps de parcours entre deux points peut différé selon le parcours choisi. La ligne droite permet d’aller le plus rapidement possible d’un point A à un point B. Il existe ensuite plusieurs façons de modifier la trajectoire afin d’influer sur le temps de parcours

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Proposer plusieurs circulations permet d’offrir plusieurs possibilités aux usagers tout en restant dans la continuité d’un même passage. Les passants s’approprient l’espace en faisant le choix de leur trajectoire. Le temps diffère d’un passage à l’autre par la choix du parcours. Des jeux de hauteur, de superposition, d’alternance permettent une visibilité sur les autres usagers qui créent le liens entre toutes ces circulations et les usagers.

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L’usager a la possibilité de parcourir l’espace en ligne droite ou d’emprunter des voies ondulées influant sur sa vitesse. Ces ondulations peuvent également servir d’assises selon leur taille. L’usager peut donc parcourir un même espace selon plusieurs temporalités.

Mise en situation de l’espace de circulation proposé aux piétons .

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Alternance de plein et de vide pour instaurer des espaces de respiration, de haltes propices aux échanges.

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Créer un passage avec des décalages pour engendrer des espaces de respiration. Ces zones de «pauses» alterne la circulation et son propice aux échanges entres les usagers.

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La présence d’obstacle modifie la trajectoire initiale et créé un rythme différent. Ici, des éléments pleins alternés avec les mêmes éléments vides composent la circulation et modifie le déplacement de l’usager avec des rythmes différents.

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02 / LE VIDE COMME PAUSE

La présence d’obstacles au sein du parcours, entraîne une modification de la trajectoire initiale et donc un ralentissement du passant.

Création d’un obstacle, une zone de vide au niveau du sol pour apporter une modification de la pratique par l’usager. La modification de la topologie créée une rupture dans l’horizontalité du sol.

Marcius Galan

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04/ Conclusion.

La réorganisation du poste de douane et de sa périphérie par l’adaptation aux nouveaux usagers et aux nouvelles fonctions, permet d’établir une relation innovante entre le voyageur et le poste de douane. La création d’une identité commune pour chaque intervention au sein des douanes réhabilitées ainsi que l’évocation de l’évolution des relations frontalières lors du passage à la frontière, permet d’apporter de l’intérêt au lieu en facilitant les transitions et en rendant le lieu caractéristique. Le passage d’un pays à un autre peut se faire de manière progressive et permettre une sorte d’adaptation du passant à son environnement. A l’inverse, la transition peut être soudaine, en rupture avec l’environnement afin de provoquer un intérêt fort chez le passant. Ces espaces de passage unissent et relient les deux pays. Enfin, ce passage, par des jeux de rythmes, de répétitions et d’arrêts, apporte une nouvelle façon de partager l’espace entre les différents usagers, des différents pays. Ces espaces deviennent des espaces d’échanges grâce à la composition de l’espace qui offre le choix de différents parcours et circulations.

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