POJAR 20 пожар
Mars 2022 Paris ISSN 2741-5058 les artistes conservent l’intégralité des droits de leurs œuvres revuepojar@gmail.com https://sites.google.com/view/revuepojar/accueil?authuser=0
POJAR ne s’arrête jamais, comme un train dans la nuit, il fonce vers son propre anéantissement pour le plus grand plaisir des gobes-mouches, et autres poupées albinos.
Jean Lacave
L’objet du sujet
Alain Lasverne
Les poèmes peuvent naître de l’air du temps, de toute circonstance fortuite, de sentiments profonds... Parfois, sur le versant joueur de l’esprit vient une espèce de muleta, d’excitation donnée à la fumée créatrice quelque part au fond du poète. Celle-ci est composé de deux termes – un sujet/idée/abstraction et un objet/chose. L’idéel et la concrétude. Entre ces deux termes monteront des sensations comme glisse entre les versants de deux collines, la rivière. C’est le pari.
À mes pieds pied – temps
mes pieds ont voté à l’aube de la grotte ils sont sortis feutrés décidés à prendre le chemin du temps
dix orteils toujours à regarder le ciel ni sandales ni mocassins ni bottes rien ne peut enfermer mes pieds l’horizon est en marche
quelques-uns ont marché à côté de mes pieds quelques-unes ont chatouillé mes orteils il faut dire oui ou non le temps de ralentir les aiguilles je nuage en plein mistral
mes pieds collent la terre à moins que la Terre ne les aime
mes pieds concertent en dissonant parfois ils étirent du nord au sud
ohé mes pieds je suis là-haut ohé mes pieds je suis là-bas la terre l’herbe et les pierres à feu je suis tout ça et l’horloge qui fait tic à droite tic à gauche
ohé mes pieds on arrive bientôt trop
Le rêve de la vache
regret - vache
sur la chaussée lavée à la pluie artificielle une vache rumine le plein de ses estomacs eh madame la vache, trouvez-vous le temps du monde troué d’absences ?
à moins qu’un homme sur un trottoir ne vous déclenche une nostalgie de prés de foin de communs crottins de
depuis que vous touillez ma mémoire l’électricité qui fait apparaître le monde a baissé dit la vache résolument quadrupédique votre pensée plantée sur deux pieds symétriques nous interdit trottoirs mugissement et place au conseil de sécurité
je regarde mes pieds pour la première fois peut-être la seconde vu qu’il y a quand même dix orteils chaque orteil d’ailleurs au pendule de mon œil un pied puis l’autre ma pensée saute sans cesse sans déboucher jusqu’à
la vache et ses taches et ses cornes et grands yeux liquoreux dans l’azur incertain s’éloigne
peut-être un jour incertain de lui-même je croiserai une vache mélancolique enfin sur le trottoir
Traîne des regrets regret - peau
finalement reviennent les regrets une seconde une heure une éternité finalement s’impose le cancer palliatif
j’ai murmuré les contours de l’avenir j’ai ordonné mon présent dans la grâce de la chair j’ai plié des êtres et du temps à mes envies j’ai contemplé dans la glace l’impérial reflet
finalement personne ne s’évade de chez les éphémères finalement une pincée de nuit sur la rosée
je sais prendre comprendre ignorer et rompre je sais la jouissance et l’élévation je sais voir le fantôme du sacré sur les cils d’un enfant j’entends en moi la terre se dissoudre et s’éparpiller
finalement qu’est-ce que cette pierre en plein courant finalement aucun rideau n’occulte le final finalement retour au creuset des regrets
la barque gorgée d’eau là glisse et s’enfonce oubli
Profondeurs torrent – ami.e.s
à l’ubac de la vie convergent vers la mer les torrents tous ensemble
au fond de l’eau glissent les perdus cognent leurs têtes sur les rocs tout en bas emportent et emportent les torrents vers la mer
et crac bouteille chantait un ami celui-là divaguait plutôt neuroleptiques celle-là suffoquait dans un corps distendu et les autres tous les autres à l’envers du temps
ne peuvent que mourir de rire
à l’envers de la vie les galets frissonnent sous l’eau cognent leurs têtes informes emportées emportées là ou la paix menue
Gilbert alors Sylvie alors Chanuc alors Béa alors alors Sylvie alors Gilbert alors Bea alors Chanuc
à l’envers du courant ma mémoire poisson ma mémoire poison
Nuageux
vie - ciel
bleu un bout de bleu creusé sur mon trottoir à moi
au bout du bleu un nuage blanc si on veut même si je voulais je n’écrase pas les nuages
mon trottoir file la rue mienne le trou bleu tremble au solstice fait pour ça à cause du nuage défaillent les signes anciens
qui peut savoir où vont les trottoirs bleuis du ciment un nuage du bleu et moi recette déréglée destination nulle part bleu
À terre terre – nombre
Terre 2 Terre 20 Terre 2000 Terre 2000000 Terre 2000000000 Terr 3000000000 Ter
4000000000
Te
5000000000
T
6000000000 7000000000
Sème
grain - beauté
combien de grains de beauté saupoudrés sur les vallées et les monts la pression de tes doigts irrigue mon cœur combien de fois dire combien le grain élève le nombre à la beauté des tapisseries mentales nous ne savons que l’horizon un grain de beauté sur la Lune signe Armstrong
sous le pli de ta fesse droite un grain perdu appelle son berger serre-moi jusqu’à la fin des nombres inspire le temps féconde l’espace entre nos lèvres je ne pleurerai plus quand je ne tenterai plus tant de grains encore à planter la peau de mémoire frissonne en continu ineffable
La Lune en moi lune - mélancolie
en rêve un ciel sans lune incident mineur en soi disparue la petite boule des rêveurs
au-dessus de Montauban ou de Reykjavík à la verticale de tous ces foyers un ciel nu et noir la Lune les a laissés à la nuit peut-être était-ce un jour de colère pour la petite boule de lumière
elle surgit à Vladivostok puis à Boston on se blottit sous sa clarté on bronze à la lune une imprévisible chance la Lune capricieuse allume certains et tant pis pour les autres qui peut savoir en tous cas pas moi je rêve à la Lune absente
demain soir j’irai au cœur de la nuit
les ombres me diront les humeurs de l’éphémère quelques regrets couleront sans doute qu’importe la Lune brille en mon coeur rond comme la lumière au sein de la nuit
Pompe à lumière espoir - cil
le cœur est un cil qui pompe le sang le cil est un cœur qui s’ouvre à la vie une image coule vers qui sait regarder une trace de fourmi un pointillé de mystère
ils en appellent à des dieux bricolés ils font usage de la peur les cils baissés ils avancent les yeux grands fermés l’apocalypse embrigade même les remords
le cœur sait étrange l’apparition de l’amour le sang cavale sur les vaisseaux qu’il s’invente mes cils palpitent sous la lumière de tes yeux espoir un deux espoir un deux espoir un deux espoir
De l’art avant toute chose….
mais pas que… « Je suis femme artiste / entrepreneuse qui souhaite faire bouger l’art et les mots dans chaque coin de rue » nous dit la poétesse Linart
La Coco….(aussi)
LINART
affiche 1925
Titine rentre avec une tâche T’as donc bavé sur ton corsage . – Oh ! c’est du foutre, ça n’est rien. – Ma fillette, tu n’es pas sage Tu ne tournes vraiment pas bien. – Ah ! là ! là ! pour un jus de couille ! J’ai pompé ça pour rigoler Pour finir un petit arsouille Qui sortait de nous enculer. Il nous avait piné les fesses Mais sans nous décharger dedans. Pour faire tordre les gonzesses J’ai pris sa bite avec mes dents. Pan ! la v’là qui fait toute seul, Mais le cochon m’en pissait trop Et quand j’en ai eu plein la gueule J’ai dégobillé le sirop. Pierre Louÿs (1870-1925)
الظل معلق على الحائط مثل معطف ولكن تقطر من الدم في الغرفة المجاورة ،جثة ملقاة على األرض ،لكنها ليس لها يد شخص ما يأكل ،في المطبخ إنه جسم مقطوع الرأس .فجاة الشقة تصبح صامتة تفتح النافذة وأنت تسقط في الفراغ على حافة الطريق يوجد قفص هناك جمجمة في القفص يد توضع على الطاولة ،تأخذ قل ًما ويكتب قصيدة على قطعة من الورق ال تعني شيًئا آخذ الورقة ،أحاول أن أقرأ ،لكنني ال أفهم شيًئا ال يوجد شيء لفهمه وفمك صراخ محمد سلطان ١٩٧٧-١٩٣٥القاهرة – مصر
L’ombre est accrochée au mur comme un manteau, Mais dégouline de sang. Dans la pièce voisine, un cadavre gît sur le sol, mais il n’a pas de mains. Quelqu’un mange Dans la cuisine, C’est un corps décapité. Soudain, l’appartement devient silencieux. La fenêtre s’ouvre. Et tu tombes dans le vide. Au bord de la route Il y a une cage. Il y a un crâne dans la cage. Une main se pose sur la table, prend un stylo, Et écrit un poème sur un bout de papier qui ne veut rien dire. Je prends le papier, j’essaie de lire, mais je ne comprends rien. Il n’y a rien à comprendre. Et ta bouche est un cri. Mohammed Sultan 1935-1977 Le Caire, Égypte.
Tristan Tzara [extrait]
nu 19e siècle
Saint-Exupery
Montherlant Bestiaire
δὶς ἐς τὸν αὐτὸν ποταμὸν οὐκ ἂν ἐμβαίης. On ne saurait se baigner deux fois dans le même fleuve. Héraclite
l’air de rien
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