Chemin de traverse
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Certains textes et poèmes ont été écrits dans le passé, nous avons souhaité les laisser en l’état pour ne pas les dénaturer.
© Éditions Soleil Blanc – 2018 ISBN 978-2-940605-41-5 Numéro d’édition 141 – Novembre 2018 www.soleil-blanc.ch – info@soleil-blanc.ch Route du Cotar 3, CH-1969 Suen / St-Martin Mise en page : Atelier Imagin’ - Chalais
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CHUN
Chemin de traverse
Éditions Soleil Blanc
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PRÉFACE
Préface Ecrire sans arme pour laisser une trace Ecrire pour évacuer les états d’âme, pour que rien ne s’efface ! Je couche ces mots dans ce livre pour partager une partie de ma vie avec Vous ! De ma naissance jusqu’à aujourd’hui, ma vie n’aura été qu’une fuite face à la réalité ! Maintenant, je me sens prête à affronter une aventure qui est au rendez-vous ! Des rires aux larmes, des peurs à la joie, de la maladie à la guérison, telle est l’éventualité ! Se mettre à nu, partager pour mieux guérir, pour se tourner vers un passé futur ! Expliquer pour mieux comprendre mon parcours, trouver un exutoire pour m’ouvrir ! A une nouvelle route, à une existence plus légère et pouvoir trouver moins dure la suite des années qu’il me reste à vivre sur cette terre ! Vivre Moi sans souffrir ! Merci à Vous de bien vouloir le comprendre !
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ENTRÉE
Entrée Ma vie débute un froid mois de janvier dans un pays lointain, le pays du matin calme, la Corée du Sud, dans une banlieue appelée Kyun In ! En cette année 1965 naît Chun, une petite fille dans une fratrie nombreuse, trop nombreuse ! Mais comme j’aime à le dire : « La vie est un miracle de l’amour et l’amour est un miracle de la vie ! ». Donc me voilà arrivée sur terre, dans des conditions de pauvreté infime, dans un pays déchiré et qui panse ses blessures de la guerre qui oppose les deux Corée, et qui l’oppose toujours plus sournoisement, mais la séparation des familles et des terres est là. De cette vie de petite fille, ni mes yeux ni mon âme n’ont de souvenirs précis. Si ce n’est qu’un sentiment de manque de quelque chose de très fort : le manque d’amour maternel, qui me suit aujourd’hui encore, et ce manque de repères suite au déracinement, une recherche éternelle de soi et de ses origines. Les mots sont durs à lire : « père et mère inconnus » ; se dire que j’ai été parachutée sur cette terre de Suisse sans savoir pourquoi ! Grandir et devenir un être humain, voilà le plus dur ! Semer tout au long du parcours de vie des graines d’amitié, d’amour pour Etre ! Devenir une adolescente humiliée et trahie par sa famille, devenir une femme amoureuse et une maman 7
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pour ressusciter ou créer son propre arbre généalogique, laisser une trace, et arriver à voir ses enfants s’envoler épanouis du nid, quelle fierté et quelle satisfaction ! Mais tant de souffrances cachées, tant de batailles, tant de démons intérieurs qui nous minent et nous empêchent trop souvent d’avancer, la vie est faite d’embûches et de douleurs, intérieures ou exprimées ; peut-on seulement ou ose-t-on les dévoiler ? Tout cela, je voudrais le partager avec Vous au travers de mes écrits, pour aussi aider les personnes qui n’ont pas la force de le faire. Sans jugement aucun, je voudrais aider, m’aider en premier et ensuite Vous ! Non pas par égoïsme, mais pour me soulager par l’écriture qui a toujours été ma fuite, ma meilleure amie et ma confidente. J’ai commencé à écrire en 1983, sous forme de poèmes, c’était au bord d’une plage en Espagne ; et depuis, toutes mes pensées et émotions passent par l’écriture. Ce recueil va m’aider à partager avec Vous les cinquante premières années de ma vie.
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CHAPITRE 1
Chapitre 1 Comme je l’ai dit lors de mon entrée, je suis née en Corée du Sud. Durant ma première année et demie de vie, aucun souvenir n’est gravé aux parois de mon cœur. Tout reste inconnu, un trou noir que jamais je n’arriverai à combler. Même si j’ai pu rester auprès de mes parents biologiques, aucun ressenti, aucune odeur ne me raccroche à ce laps de temps. Dommage ! A dix-huit mois, je suis tombée gravement malade ! Une tuberculose osseuse aura raison de ma séparation avec ma FAMILLE biologique ! Premier arrachement, premier déchirement ! Tant de fois mes pensées s’envolent pour imaginer, rêver ou comprendre la raison de mon abandon. Je m’accroche à la précarité du moment. Me voilà hospitalisée au National médical Center et par la suite au City Hospital pour un traitement lourd : rayons X, chirurgie et médicaments. Tous ces soins sont suivis et financés par la Holt Adoption Program du moment, pour être adoptable ! Hé oui, c’est un terme que je trouve bien « sauvage », mais c’est ainsi. Je suis restée une année dans cet hôpital, puis je me suis retrouvée dans un orphelinat le 16.02.1966 : le Wyatt Baby Home. Le 08.07.1968, j’ai été admise dans un autre orphelinat : le City Baby Home. Pour y être placée, j’ai dû être munie d’un certificat d’orphelin et accompagnée d’un tuteur ! Un simple papier 9
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mais qui, avec les années, devient douloureux à lire. Une attestation qui certifie que je suis orpheline, abandonnée par mes parents au sens légal et n’ayant droit à aucune succession selon le registre de recensement produit par l’état civil. Dans cet orphelinat, j’ai été suivie médicalement et aussi pour ma progression personnelle. Dans chaque rapport, il y avait mes habitudes concernant la nourriture, le sommeil, ma toilette, mon langage, mon habileté, mon bien-être, les traits de ma personnalité... Tous ces rapports étaient demandés par l’association Terre des Hommes qui, dans ces années, s’occupait d’adoptions, ce qui n’est plus le cas à présent ! Mais l’enfant que j’étais est devenue une enfant solitaire et mendiante d’affection, qui s’accrochait à sa nounou et ressentait une jalousie si un autre enfant était aimé par ladite nounou ! Peur d’être à nouveau abandonnée ou mal aimée ? Un trait de caractère qui s’est atténué avec le temps, mais qui existe encore dans ma vie, pas la jalousie mais la PEUR ! Durant tous ces passages dans ces orphelinats, à plusieurs milliers de kilomètres, mon adoption se préparait. Une famille suisse se préparait à adopter cette enfant. Que de démarches administratives furent demandées, un certificat de bonnes mœurs, une demande de situation stable, le pourquoi de l’adoption ! Tant de réponses si faciles à embellir en ce temps ! Il y eut beaucoup de poudre aux 10
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CHAPITRE 1
yeux ; cela me fait sourire avec le temps, lorsque je vois le destin de nombreux enfants adoptés ces années-là. De plus, il était impératif d’avoir un parrain et une marraine pour sécuriser mon adoption dans le cas où il arriverait malheur aux parents adoptifs. Donner de la chance à des enfants de la misère est une idée noble, mais à quel prix pour certains enfants ? A présent, je me demande si cela ne serait pas plus judicieux d’aider financièrement les enfants et les laisser dans leur pays ? La question reste ouverte ! Je ne ferai aucun débat, ni ne poserai vraiment mes opinions … J’en viens à mes parents adoptifs. Ils se marièrent sur le tard : mon père était âgé de quarante-deux ans et ma mère en avait trente-huit ; un mariage d’amour ou de raison, je me le demande toujours en ayant vécu auprès d’eux dix-huit ans durant, mais cela leur appartient à présent. Mon père était un employé fidèle d’une entreprise de la Confédération suisse et ma mère était vendeuse de profession. Elle venait d’une fratrie de quatre enfants. Ma grand-maman eut trois garçons et une fille. Ma mère naquit dans une petite ville, mais était originaire d’une vallée proche, et c’est dans cette ville que ses parents se sont connus et mariés. Ensemble, réunissant leurs biens, ils construisirent une maison, qui existe encore actuellement. C’est dans cette maison familiale que ma mère est née, a grandi et a basé sa vie entière. Elle y tenait comme à la prunelle de ses yeux et disait à qui voulait 11
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bien l’entendre qu’elle était chez elle, point. Mon père était originaire d’un canton du Nord de la Suisse ; devenu orphelin de son père à l’âge de deux ans il a été élevé en grande partie par sa grand-maman maternelle par faute de moyens financiers. Il venait aussi d’une famille de quatre enfants, deux filles et deux garçons. Arrivé à l’âge de dix-huit ans, il quitta le village pour travailler dans cette grande entreprise qu’il ne quittera que lors de sa retraite. Ma mère fit son apprentissage de vendeuse et gravit tous les échelons pour devenir gérante d’une consommation comme on l’appelait en ce temps-là. Lorsqu’elle connut mon père, elle déménagea dans un canton voisin, et ce fut là que je connus mon premier foyer en Suisse. Le 31.10.1968, la tutelle envers moi a été levée et déléguée à l’association Terre des Hommes pour mon départ définitif vers ce pays inconnu, la Suisse ! En novembre 1968, je suis arrivée à la maison de Terre des Hommes et, j’ai été mise en quarantaine à l’hôpital régional : raison sanitaire obligatoire et rassurant mes futurs parents. Le premier souvenir de la Suisse fut la grande maison aux volets verts ! Première découverte, un silence, trois enfants par chambre, un luxe pour moi ! Un émerveillement, des jeux, un parc ! La date du 29.12.1968 restera la date de mon arrivée dans cette nouvelle famille ! Ce jour-là, mes parents sont venus me chercher dans la maison d’accueil pour m’embarquer 12
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dans une nouvelle existence ! Un grand départ, une nouvelle vie, un saut dans le vide avec confiance en ce temps-là ! Je ne garde aucun souvenir de cette journée, aussi réjouissante fut-elle pour cette nouvelle famille, enfin l’arrivée de cette enfant adoptée. La première Asiatique dans cette petite ville, quelle fierté, quel geste de bonté et quelle belle image ! Mais que cherchaient-ils, ces parents d’adoption ? C’est une question à laquelle je répondrai par la suite. Les premières personnes auxquelles j’ai été présentée sont : mon parrain et ma marraine de baptême, des cousines, ma grand-maman, mon oncle. Et voilà le dessin familial se formait. La chose qui m’aura marquée en faisant connaissance avec certains membres de la famille, c’est la couleur de leurs yeux. Un bleu acier, une couleur de regard inconnu pour moi ! Un piège à gueule ouverte s’ouvrait sur mon existence. Pourquoi un piège ? Une vie, un destin commence pour moi. Chaque début est difficile dans la vie, la vie d’une adoptée est doublement à conquérir ! Une conquête d’amour, d’affection et d’acceptation. Lors de mon arrivée en Suisse, j’ai été munie du permis de séjour B et toujours sous l’œil bienveillant d’une assistante sociale de Terre des Hommes, sous forme de visites annoncées et de courriers échangés. Durant une année, la vie était ponctuée de découvertes d’une vie de famille. Je restai une 13
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Toi, mon fils, si tu savais combien j’ai mal de ne rien pouvoir faire, la bouche close, les mains liées, j’aimerais bien lutter. J’aimerais ouvrir ma bouche pour te dire toutes mes pensées, j’aimerais enjamber avec toi tous les obstacles de ta destinée ! Ne baisse pas les bras, mon fils, continue la tête haute, ma bouche pour toi se déliera pour te conseiller et corriger tes fautes ! Je serai à tes côtés pour t’accompagner, pour te tendre mon cœur, je t’aime plus que ma vie, mes bras t’enlaceront de bonheur !
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Personne ne sort indemne de l’enfance, je pense que chacun sort grandi de son passé, heureux ou difficile, mais il faut avancer ! Si je pouvais faire le bilan de mon passé, je relèverais l’incroyable chance d’avoir vécu tous ces aléas ! Je ne suis ni aigrie ni rancunière, au contraire j’apprécie à chaque respiration la joie de vivre libre ! Grâce à ces écrits et à ma mémoire, j’ai pu me libérer de tous ces poids qui m’enchaînaient, qui m’empêchaient de vivre et de scruter le bout du tunnel sans pouvoir le voir ! Telle une esclave du passé, tel un boulet noué au ventre, j’ai pu faire mon deuil de mon premier demi-siècle de vie. J’ai enfin pu vider mon sac de m… et l’abandonner au bord de l’ancienne route ! Une vie d’abstinence et de découvertes ! Je vis ma vie sereine et apaisée, j’ouvre mon cœur et mon esprit à toutes les propositions que m’offre cette vie ! Avec les expériences, j’ai pu découvrir qui sont mes vrais amis, fidèles depuis des décennies, et de nouvelles amitiés qui m’encouragent et que je ne remercierai jamais assez d’avoir cru en moi et espéré pour moi ! Mes promesses et espoirs en dent de scie m’auront fortifiée pour croire en une vie de liberté ! Il y a aussi des traces ineffaçables dans le comportement pour garder la tête hors des courants nuisibles pour moi ! Lorsqu’un problème surgit, je tourne mon esprit vers ce passé et je me dis que j’ai surmonté pire que cela, donc j’y arriverai plus aisément ! Je me mets des barrières, des garde-fous pour ne pas être tentée par les risques de mes faiblesses. Mes amis sont ma force, mes enfants mon courage pour 120
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CONCLUSION
regarder vers le futur plus sereinement ! J’ai aussi appris à écouter les conseils, ne plus foncer tête baissée, accepter que d’autres personnes me connaissent presque mieux que moi-même, que je ne suis pas une superwoman ! Cela a été aussi une leçon de vie : écouter, accepter et suivre les conseils bienveillants ! De savoir que je ne suis pas seule pour me battre, que des professionnels sont là pour me guider, que mes amis sont là pour m’aider et que mes enfants sont la vraie richesse de mon existence ! Oui, l’accouchement du livre fut long et douloureux, mais quelle délivrance ! La dernière page peut être tournée, le livre peut se refermer sans regrets, la vie peut continuer, le futur avec son lot de surprises peut taper à la porte, je l’attends !
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On m’a dit un jour, on vit avec ses cicatrices, Mais pour mon cas, je ne peux oublier les sévices. Perdre son intimité durant douze ans est inguérissable, Exister pour vivre auprès de ces parents est inoubliable. Revivre certains instants, fendre cette carapace épaisse Pour mieux vivre, laisser passer la lumière, Avec le temps, les cicatrices peuvent être un moteur Pour continuer à espérer ce moment de répit, de bonheur.
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REMERCIEMENTS
Remerciements Je dédie ce livre à chaque être qui souffre ou a souffert. Une lueur d’espoir existe pour tous. Il faut juste du temps pour l’apercevoir. Un grand merci à : - Toi, Marie-Bernard, qui m’as aidée à réaliser ce livre - Vous mes enfants, d’exister - Vous mes amis fidèles - Vous qui m’entourez de patience Et à toi la VIE !
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