Pour une prise en compte de la dimension relationnelle de la communication

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Workshop Münchenwiler, Commission ICT de l’Académie suisse des sciences techniques (SATW), septembre 2004.

MITIC, état des lieux et intégration dans l’éducation Des compétences pour intégrer les MITIC dans l’éducation ? Pour une prise en compte de la dimension relationnelle de la communication Jean-Claude Domenjoz, formateur MITIC à Genève – jean-claude.domenjoz@edu.ge.ch La question qui nous est posée lors de ce workshop sur l’intégration des médias, de l’image et des technologies de l’information et de la communication (MITIC) dans l’éducation porte sur les aptitudes de base dont les différents acteurs du système éducatif devraient disposer pour assumer au mieux les différents rôles qu’ils sont et seront amenés à jouer. Nous sommes invités à réfléchir, dans une visée prospective, à l’élaboration de référentiels de compétences de base adaptés à la diversité des situations des protagonistes de l’éducation. Projet ambitieux, tant le problème apparaît complexe. En effet, les buts des actions et les situations dans lesquelles les divers acteurs devraient être amenés à mettre en oeuvre leurs aptitudes devront être clairement définis, cela va de soi. Il s’agit aussi de s’accorder sur ce que recouvrent les MITIC et l’idée que l’on a de leur place dans l’éducation, donc de définir un cadre théorique de référence. Les médias, l’image et les technologies de l’information et de la communication peuvent être envisagées selon différentes perspectives : comme domaine du savoir, comme moyen technique d’acquérir, de traiter et de mettre à disposition des informations, comme moyen de communication et comme phénomène conduisant à réviser le rapport au savoir 1. La question de la communication est ainsi au coeur du problème. Ce terme, fortement polysémique, est un des vocables les plus employés de notre époque. Ne parle-t-on pas de « société de la communication » ? Tout le monde s’entendil cependant sur sa signification ? En consultant différents référentiels de compétences, j’ai été frappé par la place et la signification qui est donnée à la notion de communication. Le plus souvent, celle-ci est envisagée exclusivement comme moyen d’effectuer des opérations de transmission. Les MITIC sont alors considérés essentiellement comme des outils qui permettent de se procurer de l’information, de la traiter et de l’échanger. Sont associés à ce vocable l’usage de la messagerie, de forums, d’outils de travail collaboratif. Dans le meilleur des cas, les aspects sociologiques, éthiques, économiques et juridiques de l’usage des moyens de communication sont pris en compte. La réflexion peut être portée à un haut niveau d’élaboration et inclure l’analyse de l’image et du film. Cette approche est en continuité avec l’idéal des Lumières : la communication, associée à la liberté d’expression, est le moyen de faire connaître des pensées nécessaires à la formation éclairée de l’opinion. Les idées doivent être exprimées de la

manière la plus claire de sorte à favoriser les échanges. L’Encyclopédie, dans le discours préliminaire des éditeurs, parle déjà de « science de communication des idées » ou encore d’« art de transmettre ». Aujourd’hui encore, les médias et les TIC sont envisagés comme technologies de mise en forme et de diffusion des idées et renvoient au modèle d’une communication linéaire et unidirectionnelle : le modèle « télégraphique ». Or ne prendre en compte que la fonction de transmission, c’est oublier une dimension fondamentale de la communication, sa dimension relationnelle. Ce vocable, qui nous vient du latin (communicare signifie « mettre en commun », « être en relation avec »), désigne aussi le processus de communication qui consiste à établir une relation avec autrui par le truchement d’un dispositif technique. Cette idée de relation est fondamentale car elle renvoie à la dimension sociale et permet de prendre en compte toutes les formes et modalités qui ont à faire avec la construction du lien social à travers la communication interindividuelle (directe ou médiatisée) aussi bien que par le truchement des mass médias. Dans cette perspective, là aussi, le medium doit être pris en compte car les moyens de communiquer (système technique, interface informatique), par les schémas d’action qu’ils intègrent, participent à l’instrumentation de la relation. Les comportements des individus ne sont pas seulement guidés par leurs besoins mais aussi par l’utilisation de moyens techniques qui incorporent des systèmes de représentation et d’expression (des systèmes de signes). La relation entre les individus est toujours déjà instrumentée par le langage et les formes ritualisées de la vie sociale. La vision « télégraphique » de la communication a été remise en cause déjà bien avant les années soixante (Palo Alto). La dimension relationnelle et interactionnelle de la communication a été mise en évidence par de nombreux théoriciens. Il me semble que la réflexion que nous sommes invités à mener devrait intégrer ce changement de paradigme dans les référentiels d’habiletés et de connaissances sur lesquels nous sommes amenés à réfléchir. Il est indispensable de tenir compte des acquis des sciences de l’information et de la communication, notamment dans les domaines de l’anthropologie, de la psychologie sociale ainsi que de la sémiotique et des sciences cognitives. 1 Voir « Les TIC au DIP » dont nous ne suivons pas tout à fait la typologie proposée, http://wwwedu.ge.ch/cptic/integration/tic-dip.html

Commission ICT de la SATW – Workshop Münchenwiler – septembre 2004

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