FORUM EUROPÉEN POUR LA SÉCURITÉ URBAINE
Prix honorifique décerné par HABITAT, 1998 (Centre des Nations Unies pour les Etablissements Humains)
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L’approche différenciée par sexe est-elle pertinente en matière de sécurité urbaine ?
Séminaire, Francfort, 30 septembre et 1er octobre 1999
Mise en écriture Catherine Vourc’h Chef de projet Gwendoline Mennetrier
Avec le soutien de la Commission Européenne. "Ni la Commission Européenne, ni aucune personne agissant en son nom n'est responsable de l'usage qui pourrait être fait des informations ci-après".
Remerciements
Nous remercions chaleureusement toutes les associations qui ont collaboré au bon déroulement de ce programme : - Initiatives des Femmes Africaines de France et d’Europe, Arcueil (F) - Hammersmith Women’s Aid, Hammersmith & Fulham (UK) - Associazione gruppo di lavoro e ricerca sulla violenza alle donne, Bologne (I) - Fundació Maria Aurelia Capmany, Barcelone (E) - Associação de Mulheres contra a violência, Lisbonne (P) - Ökumesnische Asiengruppe et AGISRA, Francfort (D) ainsi que les expertes qui ont accompagné la démarche : - Anna Bofill Levi, architecte, Barcelone (E) - Jacqueline Coutras, chercheur au Centre National de Recherches Scientifiques (CNRS), Paris (F) - Mary Horkan, Groupe Européen des Femmes Diplômées des Universités, Dublin (IRL) - Soraya Smaoun, Centre des Nations Unies pour les Etablissements Humains, Nairobi (Kenya) - et tout particulièrement, Anne Michaud, Coordinatrice "Femmes et Ville ", Service des sports, des loisirs et du développement social, Ville de Montréal (CAN).
SOMMAIRE 7
Introduction : Contexte et modalités du projet
SécuCitésFemmes. 11 12 13 14 15 16
1- Comment faire fausse route ? 1.1- La victimation cachée des femmes… 1.2- Dans l’espace privé … 1.3- ...Dans l’espace public. 1.4- Des trompe-l’œil qui invalident l’expérience des femmes. 1.5- Que nous apprennent les marches exploratoires ? Six villes répondent.
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2- Quelle approche par genre ? 2.1- Femmes ET hommes. 2.2- Victimes ET auteurs. 2.3- Confiance en soi, conscience de soi (‘empo-
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3- La sécurité, un bien commun 3.1- Un bien fondamentalement lié à la liberté, à l’égalité, à la confiance. 3.2- Partir de l’expérience des hommes et des femmes. 3.3- Tolérance zéro ? 3.4- Un bien commun de la compétence des villes.
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4- Une approche par genre de la sécurité urbaine 4.1- Une approche indispensable pour comprendre l’insécurité des femmes. 4.2- La violence faite aux femmes ne doit pas res ter un " dossier de femmes ". 4.3- Une approche par genre des politiques de sécurité urbaine.
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5- Requalifier l’espace public comme espace de l’échange 5.1- Les femmes et l’espace public : une histoire longtemps asexuée. 5.2- Espace public, espace privé : cette frontière qui les relie. 5.3- Les marches exploratoires, ou l’espace reconnu comme acteur. 5.4- Un lieu est lié à d’autres lieux. 5.5- Les femmes ont à perdre à un simple aménagement fonctionnel des lieux.
werment’).
47 6- Recommandations 48 6.1- Introduire la dimension de genre dans le recueil et le traitement des données codifiées. 49 6.2- Modifier en profondeur les réponses de la justice criminelle à la violence de genre. 50 6.3- Offrir une aide et un accueil aux femmes victimes de violence ou de l’insécurité urbaine. 50 6.4- Accroître la confiance en soi/ conscience de soi (‘empowerment’) des femmes. 51 6.5- Modifier la conception et l’aménagement de l’espace urbain pour contribuer à réduire le sentiment d’insécurité et les occasions d’agressions. 52 6.6- Développer des services urbains propres à mieux garantir pour les femmes la liberté d’aller et venir en sécurité. 52 6.7- Faire progresser les rapports d’égalité entre hommes et femmes en agissant sur les représentations dominantes. 55 ANNEXES 56 Prise en compte de l’approche par genre : le projet SécuCités Femmes montre d’importantes disparités dans les villes. 64 Programme du séminaire (Francfort, 30 septembre et 1er octobre 1999). 68 Liste des participants au séminaire.
Introduction : contexte et modalités du projet SécuCités Femmes " La démarche et la méthode adoptées pour le projet SécuCités Femmes représentent un point de départ pour les politiques de promotion de la liberté des femmes du renforcement de leur autonomie, de leur capacités (empowerment) ". Sylvia Schenk, Conseillère municipale déléguée aux Droits, Sports, Femmes et Logement, Mairie de Francfort (D)
Le séminaire de Francfort, ainsi que la recherche-action du Forum Européen pour la Sécurité Urbaine (FESU) qui l’a précédé, s’inscrivent dans la volonté internationale de garantir aux femmes et aux enfants dont elle a la charge un environnement plus sûr. Patsy Sörensen, Députée européenne, membre de la Commission des libertés publiques du Parlement Européen, a rappelé les actes et décisions qui expriment cette volonté, en particulier : • la Convention des Nations Unies de 1979 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, • la Convention des Nations Unies de 1989 sur les droits de l’enfant, • la Déclaration de Vienne de 1993 sur la suppression de la violence envers les femmes, • la Déclaration et la plate-forme d’action adoptées lors de la IV conférence sur les femmes tenue à Pékin en 1995, • la Déclaration et le plan d’action contre le commerce du sexe et l’exploitation des mineurs, adoptés à la conférence de Stockholm de 1996, • la Déclaration de Lisbonne de 1998 sur les politiques et programmes en faveur de la jeunesse, adoptée par la conférence mondiale des ministres de la jeunesse. La même volonté sous-tend également le programme d’action communautaire (Programme Daphné, 1997-1999) relatif aux mesures préventives pour lutter contre la violence envers les enfants, les adolescents et les femmes adopté par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne. Ce programme vise à contribuer à assurer un niveau élevé de protection de la santé physique et mentale par la protection des enfants, des adolescents et des femmes contre la violence (y compris la violence sous la forme de l’exploitation sexuelle et d’abus sexuels), par la prévention de la violence et par une aide aux victimes d’actes de violence de manière, notamment, à éviter de nouvelles expositions à la violence. C’est dans ce contexte qu’en 1998, avec le soutien de l’Union Européenne, le Forum Européen pour la Sécurité Urbaine a engagé et accompagné une recherche-action dans des villes destinée à tester la pertinence d’un présupposé selon lequel les phénomènes de la violence en milieu urbain, objective et /ou subjective, sont vécus de façon différente par les femmes et par les hommes, et à promouvoir une approche par genre de la sécurité urbaine. Il s’agit en particulier de prendre en compte le vécu des femmes, jusqu’alors mal connu, dans tout nouveau projet/ programme/ politique de prévention de l’insécurité et de gestion des risques. Le Forum Européen a proposé une procédure qui lui est propre : une approche à partir des villes une approche à partir des espaces dans les villes une approche à partir du vécu des personnes et des groupes dans ces espaces Des Organisations Non Gouvernementales (ONG) ont piloté le projet au niveau local, avec la participation de femmes issues de la communauté locale, mais aussi des partenaires institutionnels, associatifs et issus de la société civile. Le Forum Européen a mis à la disposition des ONG un outil de connaissance et de remontée d’information1 relatif à la situation des femmes face à l’insécurité urbaine. La démarche devait permettre de tester l’outil et de poser un diagnostic ; elle s’articulait autour de trois étapes : • le recueil de l’information codifiée disponible sur les femmes et l’insécurité auprès des différents organismes publics, en particulier municipalité, police, justice, services de santé ; • l’organisation de " marches exploratoires " dans certains espaces de la ville choisis par elles, munies d’un questionnaire qui les aide à analyser ces espaces du point de vue de leur expérience, de ce qu’elles ressentent et à désigner les éléments générateurs selon elles d’insécurité réelle, symbolique ou potentielle; • l’organisation d’entretiens semi-directifs et/ou de groupes de paroles avec un échantillon de femmes. L’ensemble des violences subies par les femmes (violences physiques, sexuelles et psychologiques, sentiment d’insécurité) et l’ensemble des lieux d’exercice de ces violences (sphère domestique, lieu de travail, espaces publics) devaient pouvoir être pris en considération. Les marches exploratoires ont sans conteste joué un rôle clé dans cette recherche-action. Qu’est-ce qu’une marche exploratoire2? La marche exploratoire est l’un des moyens permettant de faire une évaluation critique de l’environnement urbain. Cette démarche s’appuie sur le principe suivant : les femmes sont les mieux placées pour identifier les éléments de l’environnement urbain susceptibles d’occasionner des risques d’agression et d’affecter leur sentiment de sécurité. Cette phase de repérage constitue une étape importante de l’appropriation, par les femmes, de l’espace public. Une marche exploratoire est une enquête sur le terrain menée par un groupe de 3 à 6 personnes, en majorité des femmes dont l’une d’elles pourrait être une policière. Munies d’un guide d’enquête et d’une carte géographique du territoire, les participantes identifient, pour un site choisi, les éléments de l’aménagement qui peuvent constituer des risques d’agression et causer un sentiment de sécurité ou d’insécurité. Tout site peut faire l’objet d’une marche exploratoire : garage souterrain, parc de
stationnement, rue, ruelle, édifice public, station de métro, etc. Aussitôt que des femmes se sentent mal à l’aise dans un lieu donné, qu’elles cherchent à l’éviter ou qu’elles se sentent obligées d’avoir “des yeux tout le tour de la tête”, la marche exploratoire est justifiée. Pour dépasser le seuil des impressions générales, des éléments concrets, constitutifs de l’environnement urbain, sont " expertisés " par les femmes, tels : la signalisation, l’éclairage, les cachettes réelles et/ ou potentielles, les prévisions de déplacement, l’achalandage, l’obtention de secours, l’entretien, les aménagements extérieurs et intérieurs. Le concept des marches exploratoires a été développé au Canada par le Metro Action Committee on Public Violence Against Women and Children (METRAC). Cette initiative a été reprise à travers le monde : nombreux sont les groupes de femmes et les municipalités qui ont décidé d’agir pour que l’espace public urbain soit un espace où les femmes se sentent aussi “chez elles”. Il était demandé aux Villes de soutenir cette initiative, notamment dans l’accès aux contacts avec les différents organismes détenant une information sur les violences ou l’insécurité urbaine. Arcueil (F), Barcelone (E), Bologne (I), Francfort (D), Borough of London Hammersmith & Fulham (UK), Lisbonne (P) ont répondu à cette attente. A l’issue des investigations dans les villes, un séminaire devait permettre, avec l’apport de personnalités politiques et scientifiques, de confronter les informations et les expériences. Ce séminaire s’est tenu à Francfort (D). Le présent document en présente la synthèse.
Comment faire fausse route ? 1.1 - La victimation cachée des femmes… Les données statistiques telles que les codifient généralement les systèmes de justice criminelle occultent ou déforment la réalité. L’expérience qu’ont les femmes de la violence est mal reconnue pour plusieurs raisons évoquées par les organisations non gouvernementales ainsi que par les personnalités politiques et scientifiques invitées au séminaire de Francfort2. Quatre éléments ont été particulièrement mis en lumière : 1 - l’analyse criminologique de la violence accorde une importance prépondérante à la sphère publique, et néglige encore trop souvent le lien entre sécurité de l’espace public et sécurité de l’espace privé. Cela ne permet pas de comprendre pourquoi les hommes sont plus présents dans les statistiques de la criminalité alors que les femmes éprouvent davantage de sentiment d’insécurité, quel que soit leur statut social, leur âge et leur origine ;
2 - les violences domestiques tant sexuelles que physiques sont fortement associées au secret, à la honte, à la solitude. Les femmes ont de bonnes raisons de craindre représailles et nouvelles violences si elles portent plainte ou résistent. Le groupe des spécialistes rapporteurs devant le Conseil de l’Europe en 1997 avait déjà insisté sur le fait que les statistiques officielles ne peuvent jamais être prises comme estimation fiable du problème, et qu’il est nécessaire de briser le tabou ou le silence caché, et de créer un " climat de confiance " dans lequel les femmes peuvent énoncer leurs peurs et affronter leur agresseur ; 3 - les politiques de prévention et de traitement de la délinquance et de la violence se centrent sur l’agresseur et plus rarement sur la victime (malgré les progrès indéniables en ce domaine dans la plupart des pays de l’Union, notamment du fait de l’action des ONG) ; 4 - la catégorisation " violence instrumentale/ violence expressive " telle que la criminologie la suggère ne rend pas compte du contexte historique et culturel dans lequel s’inscrivent les violences spécifiques contre la femme. Elle néglige la perception liée aux inégalités des rapports hommes/ femmes, et aux éléments des sociétés patriarcales qui nous régissent encore. 1.2 - ... dans l’espace privé... La violence contre les femmes dans l’espace domestique et professionnel commence à être mieux reconnue dans certains pays, notamment par les autorités locales qui ont à régler des problèmes sociaux et sanitaires liés à cette violence. Mais le silence des femmes est encore très épais et la surdité des autorités parfois considérable. En 1996, le ministère de l’intérieur britannique3 établissait que la violence domestique représentait un quart de l’ensemble de la criminalité violente, que 44% (chiffre très vraisemblablement sous-estimé) des agressions contre les femmes concernaient la violence domestique et que neuf fois sur dix l’agresseur est un homme bien connu de la victime – le plus souvent le mari (50-68 % des cas), suivi du partenaire actuel ou passé. Par contraste, seulement 12% des agressions rapportées contre un homme concernaient la violence domestique et 50% des auteurs étaient alors un autre homme de la famille et 6% une femme. Les statistiques du ministère de l’intérieur britannique avaient déjà montré qu’entre 1990 et 1994, près de la moitié des femmes victimes d’homicide en Angleterre et Pays de Galles (environ cent femmes par an) étaient tuées par leur partenaire ou expartenaire, contre 6% des hommes victimes. Cette criminalité domestique reste sous-rapportée et l’intervention de la police est souvent relativement inefficace (une étude en Angleterre et Pays de Galles, publiée en 1997, montre que presque toutes les femmes tuées par leur mari ou partenaires avaient précédemment rapporté à la police des incidents de violence). Les études montrent que le moment où les femmes sont les plus vulnérables est le moment où elles font face à la violence. Plus d’un tiers des femmes qui essaient de se séparer de leur partenaire peuvent faire l’expérience de menaces, filatures et agressions. Ce qui pourrait expliquer que la violence ne se conclut généralement pas par une séparation. La somme des éléments recueillis par l’0bservatoire européen sur la violence contre les femmes (aujourd’hui le Policy Action Center), sous la conduite du Lobby européen des femmes (EWL), montre que les femmes ont de bonnes raisons d’avoir peur d’être victime d’une agression commise par un homme avec lequel elles ont, ou ont eu des relations proches. Puisque une femme sur cinq disait avoir fait elle-même l’objet de cruauté mentale ou avoir été menacée de violence physique, ou avoir réellement connu la violence physique, la violence sexuelle ou une violence contre son animal de compagnie ou ses biens, et que onze femmes sur cent avaient réellement expérimenté la violence physique et/ ou sexuelle. Une analyse des statistiques nationales des quinze pays de l’Union par le EWL en 19994 montre une augmentation de la criminalité rapportée contre les femmes qui indiquerait une progression dans la reconnaissance sociale de la violence domestique. 1.3 - … et dans l’espace public La même analyse des statistiques nationales des pays de l’Union par le EWL montre également que la violence contre les femmes n’est pas confinée à l’espace privé domestique. La violence contre les femmes dans l’espace public reste méconnue, mais des investigations commencent à être menées dans certaines villes où une approche par genre est adoptée. Deux facteurs y contribuent puissamment : les organisations de femmes, et les nouvelles politiques locales de sécurité urbaine centrées sur le sentiment d’insécurité et l’implication des habitants. L’étude SécuCités Femmes du FESU montre en réalité une grande disparité entre les villes quant aux données disponibles sur l’insécurité des femmes5. Les unes ne savent que très peu de choses, d’autres ont accès à des études de victimation et à des données codifiées qui intègrent une approche par genre. Mais les marches exploratoires, ainsi que les groupes de discussion organisés par les ONG dans les six villes de l’étude, soulignent tous les deux mêmes éléments : 1- l’insécurité réelle, redoutée ou potentielle restreint la liberté de mouvement et l’indépendance des femmes ; 2- les besoins de protection des femmes, leur désir d’indépendance et de liberté ainsi que le renforcement de leur " empowerment " doivent être les éléments clés d’une politique de sécurité.
1.4 - Des trompe-l’oeil qui invalident l’expérience des femmes Pour établir les priorités d' action en matière de sécurité urbaine, les villes, tout comme les autres instances concernées, se basent encore principalement sur un certain nombre d' indicateurs qui permettent de savoir quel type de criminalité progresse ou régresse. Ces indicateurs sont principalement liés aux statistiques policières qui consignent, dans la mesure du possible, les faits signalés par les victimes. Or, puisque les faits les plus signalés sont les atteintes aux biens (cambriolages, vols de voiture, etc.), les programmes de prévention du crime mis en place par certaines villes ont d' abord porté sur ces aspects les mieux documentés de la criminalité. Quant aux atteintes contre les personnes, on a considéré que les statistiques reflétaient probablement la réalité. À partir de ces données, on établit des équations qui semblent logiques entre l' évolution du nombre de crimes rapportés et le sentiment d' insécurité des populations, et on se dit que si le nombre de crimes rapportés baisse, le taux d' insécurité devrait lui aussi baisser. Autre exemple : les statistiques et les enquête de victimation montrent que les jeunes hommes sont les premières victimes de la violence dans l’espace public. Mais ces données ne permettent pas d’invalider les craintes des personnes âgées. Seule une enquête auprès de ces dernières permet de comprendre que la construction de la peur de la délinquance relie cette peur à l’impuissance et à la vulnérabilité, caractéristiques des personnes âgées (a fortiori des femmes âgées) qui expriment un haut niveau d’anxiété et pour lesquelles la victimation peut avoir un effet dévastateur. La logique de corrélation statistique entre le nombre de crimes rapportés et le taux d' insécurité est nulle et non avenue pour comprendre l' insécurité des femmes et pour y remédier. Même si le taux de dénonciation a tendance à augmenter à la suite des campagnes de sensibilisation, on sait que globalement, environ 10% seulement des crimes commis contre les femmes, particulièrement les agressions sexuelles, sont rapportés à la police. Or ce sont ces chiffres qui sont souvent utilisés pour démontrer que "les femmes ne devraient pas avoir peur puisque dans tel ou tel quartier le taux d' agressions sexuelles commis dans les lieux publics a chuté de X% au cours des dernières années". Le recours unique aux statistiques policières invalide de fait l' expérience des femmes qui se font dire qu' elles n' ont aucune "raison objective" d' avoir peur. On croit alors que le meilleur moyen de rassurer les femmes est de leur dire qu' elles doivent ajuster leurs perceptions en fonction de la variation du nombre de crimes rapportés, qu' elles doivent se raisonner et que finalement, ce sont elles les responsables de leur insécurité. Cette approche, véhiculée par des agents de prévention animés des meilleures intentions, ne risque-t-elle pas d’aliéner davantage les femmes et de faire de leur insécurité une question de perception individuelle et non de responsabilité collective ? La question a été posée à Francfort (D). 1.5 - Que nous apprennent les marches exploratoires ? Six villes répondent. L’exploration des liens entre urbanisme et sécurité est encore balbutiante. Une partie de l’information est très confidentielle ou difficile d’accès, comme le rappelle Anna Bofill Lévi, architecte : • les statistiques policières ne spécifient pas, généralement, si l’agression a lieu dans un espace public ou privé; • il n’y a pas ou peu d’observatoire de données sur l’ensemble de la ville, à la fois générales et concrètes. On dispose seulement d’informations sur certains quartiers à risque ; • les enquêtes de victimation, comme à Barcelone, établissent une cartographie sophistiquée de la sécurité et de la peur mais sans différenciation par genre ; • les statistiques de la criminalité ne font généralement pas de différenciation par sexe des victimes. Les seules informations sur la sécurité des femmes et l’espace physique sont celles où il y a eu consultation des femmes. C’est le cas des marches exploratoires dont l’idée a été importée du Canada, présentées en introduction de ce rapport. Le cas également des études menées par la Fondation M.A Capmany, notamment dans les dix districts de Barcelone à l’occasion du Congrès des femmes de Barcelone, organisé par le Conseil des Femmes de la Mairie, en 19996 et l’espace urbain avait été abordé au même titre que d’autres thèmes (santé...). Concernant l’espace public, les conclusions de ces travaux sont identiques : le sentiment d’insécurité est toujours plus fort dans les grandes villes et s’affaiblit au fur et à mesure que la taille diminue. Les marches exploratoires des femmes dans les six villes de l’étude SécuCités Femmes désignent les mêmes facteurs d’insécurité liés à l’espace urbain (sans qu’on puisse exclure l’influence du questionnaire d’analyse dans cette analogie), à des nuances près. Ces facteurs ne sont guère surprenants, et la nuit les amplifie tous : • les espaces et rues vides et désertes ou qui se vident le soir • les espaces sales, les jardins et parcs peu entretenus • les passages souterrains, les parkings, la mauvaise configuration et la longueur des couloirs de métro ainsi que des connexions multimodales • les recoins, buissons et autres lieux possibles de cachette, • les petits lieux de transition entre l’espace privé et l’espace public, tels les halls d’entrée d’immeubles
• l’absence de points d’appel ou de cabine téléphonique (le téléphone portable est sécurisant) • les zones où on s’oriente difficilement faute d’affichage clair • les points noirs de la ville où des personnes " inquiétantes" circulent et produisent de la méfiance, les groupes d’hommes, les dealers et les toxicomanes • l’éclairage insuffisant ou inadéquat des espaces publics • les murs en béton de certaines places ou rues • l’absence de taxi, les bus trop rares Les femmes d’Arcueil (F) notent que ces facteurs ne sont sans doute pas très différents pour les femmes et pour les hommes, mais que les femmes n’ont pas peur peut-être de la même chose (peur du viol, de l’agression sexuelle) et que le risque n’est pas le même. Concernant la violence domestique, l’enquête menée par la Fondation M.A Capmany à Barcelone a listé les facteurs pouvant influencer le comportement des personnes qui développent un comportement agressif à l’égard des femmes : ordonnancement des fonctions dans la maison, distribution des espaces, attribution des espaces à des rôles précis, le fait de ne pas avoir une chambre à soi sauf la cuisine. Les données sur ce point sont encore beaucoup trop rares. Il convient d’insister sur un point important et sur lequel les marches exploratoires attirent l’attention : le sentiment d’insécurité est en relation étroite avec la qualité, le confort, la propreté des lieux. Le récit d’une marche exploratoire aux abords d’un pont primé en 1986 pour la qualité de son design et transformé depuis en " zone " illustre bien ce lien : " L’accès au cheminement piétonnier, derrière l’espace vert, est plein de graffitis, de détritus et pas du tout agréable – odeur d’urine. Il est désert et donne l’impression d’être isolé. Il n’y a personne dans les parages. Il y a un éclairage sur la majeure partie du cheminement mais il n’est pas de très bonne qualité. Le cheminement lui-même semble tout à fait désert. Il faudrait le nettoyer, il est très sale sur la partie principale du pont. Le pont a deux côtés et on ne sait pas de quel côté marcher. Ce n’est pas du tout agréable d’être là " (…) " Je suis stupéfaite de voir que ce pont a gagné un premier prix de design en 1986 et qu’on considère qu’il a amélioré cet endroit. Je ne crois pas que nous le ressentions comme ça ". Extrait du rapport de la marche exploratoire à Hammersmith & Fulham (UK)
Quelle approche par genre ? " Il faut se donner la possibilité de lire le monde avec les yeux d’une femme, ou des femmes. Mais aussi la possibilité de lire le monde avec les yeux des hommes ". Lalla Golfarelli, Présidente du Forum Italien pour la Sécurité Urbaine " Les recherches spécifiques sur les femmes ont été commencées à Francfort et sont une bonne chose pour répondre au problème d’insécurité pour les femmes ET pour les hommes de la ville ". Lieve Van den Ameele-Steller, Ökumenische Asiengruppe, Francfort (D) " Pour éviter la violence de genre, il n’est pas suffisant d’articuler des mesures coercitives policières ou judiciaires qui protègent les victimes et qui définissent comme délits toutes formes de violence contre les femmes, il faut aussi un changement de mentalité et d’attitude de toute la société pour avancer vers le respect et la tolérance dans les relations égalitaires ". Pilar Lledo, Fundació Maria Aurelia Capmany, Barcelone (E) L’approche par genre est historiquement liée à la volonté de sortir de la clandestinité les discriminations et violences imposées aux femmes et occultés par les représentations dominantes. Les Nations Unies définissent la violence de genre comme tout acte de violence basé sur l’appartenance au sexe féminin et qui peut avoir comme résultat un dommage physique, sexuel ou psychologique pour la femme, ainsi que la menace de l’acte, la privation de la liberté dans la vie publique et dans la vie privée. Tous les pays ont signé la déclaration reconnaissant que chaque forme de violence contre les femmes entendue comme menace contre la liberté, l’égalité ou la dignité pour des raisons de genre constitue une violation des droits humains. La violence contre les femmes et l’insécurité réelle ou potentielle ou imaginée qui en découle sont reconnues comme une manifestation de rapports sociaux inégalitaires existant entre hommes et femmes et se fondent sur une norme culturelle du pouvoir
de l’homme sur et de contrôle de la femme. Le pouvoir ou le manque de pouvoir des hommes n’est pas la cause directe ; il faut aussi une disposition de certains hommes à faire appel à la violence lorsque le pouvoir et le contrôle auxquels ils ont droit ont été mis en cause ou menacés. Pour que la violence contre les femmes soit établie, il faut qu’il y ait " habilitation " et " consentement " à ce que les hommes choisissent la violence afin de revendiquer ce qu’ils pensent être leur dû7. Prendre conscience des mécanismes qui conduisent à cette insécurité et vouloir les modifier invite à prendre en compte le regard des deux sexes, à introduire " l’autre", l’interlocuteur dans le débat, et à transformer les représentations culturelles. Ceci a été rappelé vigoureusement lors du séminaire de Francfort. 2.1- Femmes ET hommes L’approche par genre est souvent assimilée à l’approche du point de vue des femmes. Ce point de vue des femmes commence à sortir de la clandestinité où la cantonnent une longue domination et discrimination par les hommes. La conférence des Nations Unies à Pékin a apporté cette lecture nécessaire du monde avec les yeux d’une femme, et beaucoup reste à faire en ce sens. Mais il a été rappelé ici l’importance d’intégrer l’approche par genre dans le "mainstream ", d’en faire un facteur structurant de la politique pour toute la ville et pas seulement pour la ville des femmes. Cette démarche est encore très rarement adoptée. 2.2- Victimes ET auteurs L’approche par genre doit prendre en compte le risque particulier et la crainte particulière des femmes de subir la violence, mais sans les enfermer dans une position de victime et sans se contenter de mesures type cours d’auto-défense ou éclairage urbain qui, au demeurant, risquent d’accroître l’anxiété. C’est pourquoi il a été suggéré de développer aussi une approche des auteurs (réels ou symboliques), notamment de s’intéresser aux comportements sexuels masculins non violents et à l’agressivité féminine. Victimes et auteurs doivent être approchés par le genre. Il faut s’intéresser aux mécanismes selon lesquels les représentations se forment et aux mécanismes qui conduisent à la violence ordinaire. Donc s’intéresser à la fois aux femmes et personnes qui subissent la violence ordinaire ; et à ceux qui la génèrent, personnes ou groupes sociaux. Difficile de séparer ceux qui subissent et ceux qui provoquent. Toute violence est une réponse à une autre violence. On ne peut pas isoler d’un côté les ‘seulementvictimes’ et d’un autre les ‘seulement-imposant-la-violence’. 2.3- Confiance en soi, conscience de soi (‘empowerment’) L’approche par genre ne doit pas se replier sur une confrontation femmes-victimes/ hommes-agresseurs (victimes ou agresseurs réels, symboliques ou potentiels). Il est essentiel de développer les capacités des femmes à se défendre, de renforcer le sens de soi, le respect de soi, indispensables à la réduction de leur vulnérabilité. Le corps transmet nos pensées, impressions et perceptions. Il dit aux autres comment nous nous sentons, comment nous les percevons, et comment nous répondons à la situation. Avec le corps nous pouvons transmettre un signal qui dit ‘j’ai confiance en moi, je suis forte’ ou ‘j’ai peur’. Menaces, coups, viol, incestes, abus rituels et autres formes de violence sont utilisés pour faire du mal et montrer à la femme qu’elle n’a pas le pouvoir ultime sur sa vie à chaque minute. Les femmes ont à affirmer qu’elles ont le pouvoir sur leur vie. La participation des femmes aux prises de décision, à la vie politique, à tous les niveaux de gouvernement est en ce sens un objectif majeur de nos démocraties. S’il n’y a pas participation des femmes aux décisions politiques, l’approche par genre elle-même peut devenir un piège qui se refermera sur les femmes en les cantonnant dans des programmes, des services et des actions spécifiques (psychologiques, sociales, urbanistiques). Il y a des similitudes entre accéder au politique et accéder à la ville, cet espace politique complexe, ce lieu de rencontre caractérisé par la compétition et la négociation. Peut-on véritablement accéder à l’un sans l’autre ? Les femmes de l’étude SécuCités Femmes ont répondu ‘non’.
La sécurité, un bien commun " La sécurité est un bien commun. Dire bien commun signifie que la ville est pour tous, partagée, un espace complexe et un espace de tolérance. " Clotilde Tascon-Mennetrier, Directrice des programmes du Forum Européen pour la Sécurité Urbaine " Une ville sûre pour les femmes est sûre pour tous. Une ville sûre pour les hommes n’est pas sûre pour tous " (A city safe for women is safe for everybody. A city safe for men is not safe for everybody) Tamar Pitch, membre du Conseil scientifique de Città Sicure, citée par Bologne (I) " Les politiques de sécurité doivent être présidées par des valeurs de solidarité et de coresponsabilité. Tous les services publics doivent y participer, et tous les collectifs de citoyens doivent être présents dans les territoires où sont dessinés des plans de sécurité. Ce n’est qu’ainsi que l’on peut affronter les inégalités qui créent l’exclusion sociale et génèrent des attitudes violentes ". Pilar Lledo, Fundació Maria Aurelia Capmany, Barcelone (E) " Les femmes ont réuni un consensus sur leur manque de droits. Le fait de ne pas pouvoir aller où on veut la nuit est un manque de droit ". Maria Shearman De Macedo, Associação de Mulheres contra a violência, Lisbonne (P) A quelle sécurité urbaine aspirons-nous ? " Nous voulons une ville de l’échange, de l’activité et de la promenade, des projets et de la création, fluide et désirable, la ville pour tous " (Forum Européen pour la Sécurité Urbaine, Préparation du Manifeste des villes Sécurité & Démocratie 2001). 3.1- Un bien fondamentalement liée à la liberté, à l’égalité, à l’accès à l’espace commun Les femmes de l’étude SécuCités Femmes ont identifié la sécurité en terme d’accès à un bien qui doit être commun à tous et toutes : la liberté d’aller et venir. Et non comme un bien qui se définirait seulement par la négative (moins de criminalité, moins de barbarie, moins de recoins sombres…). Ce sont les espaces de liberté que l’on désire, auxquels on prétend, que l’on considère comme justes et nécessaires. Il faut parler d’un droit égal pour tous et toutes à l’espace public, d’une légitimité de tous et toutes à aller et venir dans la sécurité. Il est plus convaincant, ont-elles noté, de porter la question de la violence contre les femmes au
niveau de ces principes que de s’en tenir à une approche statistique d’incidents et à des mesures d’aménagement urbain, aussi nécessaires soient-elles. 3.2- Partir de l’expérience des hommes et des femmes Il faut pouvoir analyser ce que l’insécurité signifie pour les habitants des villes, hommes et femmes, à partir de leur expérience. Sinon, toute solution d’urgence ou de prévention sera non seulement insuffisante mais produira une vision déformée des problèmes et aura des effets non voulus. Le fait de considérer l’insécurité du point de vue de ce que ressentent les personnes donne de l’insécurité une définition qui intègre des éléments non perçus par les statistiques de la criminalité, en particulier : • la violence psychologique et l’agressivité ordinaire, à peine " déclarable " • des facteurs d’environnement urbain, de qualité et d’entretien des espaces • l’importance de la violence domestique ou commise par des personnes connues des victimes • le rôle des images, des représentations, celles que les personnes projettent sur l’espace, et celles que l’espace impose aux personnes. On l’a dit : à en rester aux statistiques policières, on ne peut pas comprendre pourquoi une baisse du nombre de crimes et délits rapportés ne s’accompagne pas automatiquement d’une diminution de l’insécurité ressentie. 3.3- Tolérance zéro ? Il n’y a pas eu d’échange sur le concept Tolérance zéro et il est vraisemblable qu’il n’y avait pas consensus parmi les participants au séminaire de Francfort. Mais, il était difficile de ne pas interroger la tension entre d’une part l’approche par genre de la sécurité telle que les femmes la revendiquent, attentive à l’expérience des personnes, intégrant l’altérité, et d’autre part une démarche qui en appelle à la justice criminelle au nom d’un continuum de la violence où le pire expliquerait le tout, où toute violence serait (potentiellement au moins) violence du pire. Tolérance zéro est une position qui se traduit en politiques, notait Michel Marcus, Délégué Général du FESU : Tout d’abord, le slogan est repris pour justifier une pénalisation des comportements de la jeunesse dans nos sociétés. Les partisans de Tolérance zéro revendiquent-ils aussi ce risque de voir le jeune comme un ennemi potentiel et traité comme tel dans nos politiques publiques ? Ensuite, Tolérance zéro signifie un droit de regard sur tous nos comportements. Veut-on que la police intervienne chaque fois qu’il y a violence ? Question majeure qui conditionne les schémas de développement et d’organisation de nos villes et de notre société. Enfin Tolérance zéro laisse à penser que la justice criminelle nous donne satisfaction. Or il est établi (grâce notamment aux études de victimation) qu’une infime minorité des violences contre les femmes (3 % environ) ont une sanction judiciaire. 3.4- Un bien commun de la compétence des villes C' est dans le contexte d' une urbanisation galopante et d' une transformation majeure du tissu économique et social des communautés locales que les villes du monde se retrouvent aux prises avec diverses manifestations de criminalité qui attisent l' insécurité des populations. Les systèmes de justice criminelle, responsables de la sécurité publique, axent leurs interventions sur la répression de ces actes criminels. Plusieurs sont conscients des limites de cette approche et reconnaissent aujourd’hui aux villes un rôle d’acteur à part entière dans la prévention de la criminalité et les politiques de sécurité : les villes sont les mieux placées pour mobiliser à la fois les partenaires publics et communautaires et les populations elles-mêmes et prendre en compte l’ensemble des facteurs contribuant au sentiment d’insécurité. En particulier, le rôle premier des villes en matière de planification et d' aménagement urbain leur donne la possibilité d' améliorer l' environnement urbain et de contribuer concrètement à réduire la peur et les occasions d' agressions commises dans les lieux publics. C’est par exemple dans le Conseil de prévention et de sécurité de la ville de Francfort (D) ou dans le Conseil Communal de Prévention de la Délinquance de Saint-Denis de la Réunion (F), que l’insécurité des femmes a été le plus efficacement abordée, ont estimé les élus de ces deux villes.
Une approche par genre de la sécurité urbaine
" D' une certaine façon, la sensibilisation publique concernant l' insécurité vécue par les femmes dans les villes précède historiquement le développement du champ même de la sécurité urbaine. En Amérique du Nord et en Europe, à partir de la fin des années 70, les femmes descendent par milliers dans les rues en scandant ‘La rue, la nuit, femmes sans peur’ (version québécoise de Take Back the Night). Elles y clament leur droit à user des espaces publics sans y être victimes particulièrement des agressions sexuelles et des effets de cette menace potentielle : la peur de circuler librement, la peur de vivre pleinement. " Anne Michaud, Coordinatrice du programme "Femmes et Ville ", Ville de Montréal (CAN)
" Et pourtant, malgré tout, les femmes ne renoncent pas à vivre leurs vies, même si elles ont à élaborer des stratégies de sécurité pour elles-mêmes". Silvia Calastri, Associazione gruppo di lavoro e ricerca sulla violenza alle donne, Bologne (I) 4.1- Une approche par genre indispensable pour comprendre l’insécurité des femmes La nécessité d' intégrer une approche de genre à la sécurité urbaine prend tout son sens si l' on veut réellement comprendre le mécanisme de l' insécurité vécu par les femmes et agir sur tous les aspects qui en sont la cause. Toutes les femmes ayant participé aux marches exploratoires, bien que différentes par l’âge, la formation et la situation sociale et familiale, ont dit avoir connu un épisode de violence, certaines dans l’enfance ou l’adolescence, et ont parlé de leur passé et de leur position de femme comme des éléments qu’on ne pouvait mettre de côté pour évaluer le sens de la sécurité/ insécurité urbaine. Toutes étaient conscientes : • qu’être une femme signifiait négocier avec une longue liste de " ne…pas " pour rester en sécurité ; • que l’insécurité ressentie par des femmes, pourtant très différentes l' une de l' autre par l’âge, la condition sociale, le travail…, est fortement intériorisée et témoigne d’une maîtrise difficile du corps des femmes, soumis à plus de menaces réelles, symboliques ou potentielles que les corps des hommes. Deux raisons ont été évoquées par les femmes : d’une part, elles sont socialisées pour jouer un rôle qui les empêche de prendre le contrôle de leur propre espace ; d’autre part, il existe des facteurs réels d’insécurité et de danger qu’une femme doit prendre en compte pour se protéger. Elles ont indiqué quelques caractéristiques fortes de l’insécurité qu’elles éprouvent : • les femmes craignent pour leur corps de femme. Elles sont de fait sur-représentées dans les agressions sexuelles (données à nuancer par une victimation sexuelle cachée également chez les hommes) ; • la violence ne se limite pas à la violence physique (il a été dit par plusieurs que la violence psychologique était crainte autant que la violence physique) ; • les femmes craignent certains lieux (gares, arrêts de bus, lieux sans présence humaine, couloirs, souterrains…) a fortiori la nuit et ne se sentent pas libres d’aller et venir à leur guise. L’environnement urbain (aménagement, et animation) est un facteur essentiel de sécurité/ insécurité (il n’est pas dit qu’il ne le soit pas pour les hommes aussi) ; • la violence domestique, ou la violence commise par un partenaire ou ex-partenaire, occupent une place très importante, et cachée le plus souvent, dans leur vie quotidienne ; • insécurité dans l’espace privé et insécurité dans l’espace public ne sont pas étanches. Elles ont donné de la violence des définitions convergentes qui ne se réfèrent pas directement aux catégories de la justice criminelle : • l’action d’une personne contre votre volonté, • une atteinte à l’intégrité physique et mentale, • une limitation de la liberté personnelle d’aller et venir, • une expérience au quotidien, • une expérience liée au voyage ou trajet, à la nuit, au fait d’être seule. Elles ont précisé que si toutes les peurs et violences ne sont pas le fait des hommes, il est indéniable que les hommes y occupent un rôle central, dans les faits et dans les représentations. Les femmes de Arcueil (F), Francfort (D), Hammersmith & Fulham (UK) et Lisbonne (P) ont insisté, de plus, sur la situation particulièrement difficile des femmes immigrées récemment et de certaines minorités ethniques victimes d’une insécurité alourdie encore par les rapports hommes/ femmes dominants dans leur culture d’appartenance (polygamie qui laisse sans droit les secondes épouses, cantonnement à la maison, mutilations...), ou liées à certaines conditions économiques et sociales de l’immigration (prostitution, esclavage en particulier). Violences que vient aggraver la solitude associée à la langue, à l’illettrisme ou à l’analphabétisme, aux tabous sur les violences domestiques, aux discriminations raciales, voire à la crainte des contrôles policiers et de l’expulsion. Le constat est unanime parmi les femmes de l’étude SécuCités Femmes et les personnalités scientifiques qui ont participé au séminaire de Francfort : l' accès aux données (sociales, judiciaires, policières, sanitaires…) en fonction du sexe des répondants est indispensable si l' on veut obtenir un portrait fidèle de la situation. Traiter ces données en mélangeant les réponses des deux sexes masque des réalités fondamentalement différentes et offre une image tronquée qui ne correspond dans les faits, ni à ce que vivent les femmes, ni à ce que vivent les hommes. Un exemple illustre ce propos : à Montréal (Can.), depuis le début des années 90, un sondage annuel qui porte sur la peur de se promener seul-e le soir dans son quartier, montre que 60% des femmes expriment cette crainte, contre moins de 15% des hommes ; en amalgamant ces deux pourcentages, on dirait que 37,5% des Montréalais (la moitié
de la somme des deux) ont peur de sortir seuls dans leur quartier le soir ; or cette donnée amalgamée ne correspond ni à ce que vivent les femmes, ni à ce que vivent les hommes et elle n' atteint aucune des deux cibles; elle se révèle inutile tant pour comprendre la situation que pour la transformer. Les femmes ont-elles des raisons d’avoir des inquiétudes ? Oui répondent les faits. La violence contre les femmes, indique Mary Horkan, Présidente du Groupe Européen des Femmes Diplômées des Universités, a été reconnue comme l’un des éléments le plus déterminant de l’inégalité des femmes. De nombreuses études mettent en évidence la peur de la criminalité des femmes et montrent que ce qui arrive dans les villes, que ce soit dans des lieux publics ou privés, justifie souvent pleinement les peurs des femmes. C’est une approche par genre du British Crime Survey de 1996, rappelons-le, qui a permis de mettre à jour des éléments clés de l’insécurité des femmes, tels que : • la violence domestique représente un quart de l’ensemble de la criminalité violente • 44% (chiffre très vraisemblablement sous-estimé) des violences contre les femmes concernent la violence domestique • 90 % de ces violences sont le fait d’un homme sur sa partenaire ou ex-partenaire femme. Par contraste, il faut également rappeler que seulement 12% des agressions rapportées sur un homme concernaient la violence domestique et que 50% des auteurs étaient un autre homme de la famille, 6% seulement des auteurs étaient des femmes. Selon les statistiques du ministère de l’intérieur britannique, entre 1990 et 1994, environ 100 femmes en moyenne ont été tuées chaque année entre 1990 et 1994 par leur partenaire ou ex-partenaire en Angleterre et Pays de Galles, soit près de la moitié des femmes victimes d’homicide (contre 6% des hommes victimes d’homicide). 4.2- La violence faite aux femmes ne doit pas rester un " dossier de femmes " " Intégrer l' approche de genre à la sécurité urbaine va aussi au-delà des actions à mener pour accroître la sécurité des femmes. Il faut éviter le piège de la réduction à cette seule dimension afin de ne pas recréer une nouvelle activité qui serait en marge de l' ensemble des autres dimensions de la violence urbaine et qui reposerait encore une fois sur les seules épaules des femmes ". Anne Michaud, coordinatrice " Femmes et Ville ", Ville de Montréal (CAN) Les manifestations de la fin des années 70, où les femmes revendiquaient leur droit de circuler sans peur et librement, ont constitué l' amorce d' une prise de conscience collective qui a donné lieu dans de nombreux pays à la mise en place de politiques sociales et d' allocation de ressources publiques pour tenter de faire face au fléau jusqu' alors occulté de la violence faite aux femmes. Les revendications des premières heures du mouvement des femmes ont fait place au développement de tout un secteur d' activités orienté vers la prévention, la sensibilisation et l' aide aux victimes. Les militantes ont dû assumer le rôle de gestionnaires et d' intervenantes de nombreux services financés par les divers niveaux de gouvernement : centres de femmes, maisons d' hébergement, lignes d' urgence, centres d' aide aux victimes d' agressions sexuelles, etc. Les recherches, sondages, enquêtes et témoignages de femmes violentées ont permis d' étoffer la problématique et d' éveiller la conscience des populations. Parallèlement, le développement de la solidarité internationale et l' existence de forums comme ceux des Nations Unies ont accentué les pressions sur les États membres pour mettre en place les mesures nécessaires à l' éradication de la violence exercée à l' endroit des femmes. Au cours des années 80, plus la problématique de la violence faite aux femmes à travers le monde était documentée, plus on se rendait compte de l' importance de ses manifestations dans la sphère privée sous forme de violence conjugale, agressions sexuelles, inceste, meurtres, etc. Curieusement, même s' il était évident que le problème en était une composante de relations entre hommes et femmes, la problématique de la violence faite aux femmes a donné lieu à l' instauration d' un secteur d' intervention spécifique où les femmes sont encore les principales intervenantes. La sensibilisation des hommes auprès de leurs pairs est encore minime et le processus de responsabilisation des hommes, surtout des jeunes, reste une immense tâche à accomplir. Cette difficulté persistera tant que la violence faite aux femmes sera considérée comme un "dossier de femmes", en faisant ainsi une problématique marginale, hors du "mainstream".
4.3- Une approche par genre des politiques de sécurité urbaine L' accès aux données ventilées selon le sexe et l' âge donne une vue plus juste des problèmes, mais ce sont les contenus mêmes des programmes de sécurité urbaine qui doivent intégrer l' approche de genre et varier en fonction des groupes concernés. L’approche par genre devient une exigence si l' on reconnaît que les femmes sont celles qui souffrent le plus de l' insécurité et que, par conséquent, les solutions qui sont bonnes pour elles le sont aussi pour tous. Mais, pour que cette approche soit viable, il est nécessaire de se baser sur l' expérience des femmes elles-mêmes.
L' intérêt pour les acteurs des politiques locales de sécurité d' être à l' écoute de la réalité des femmes réside aussi dans le fait que les femmes sont particulièrement touchées par les choix d' aménagement urbain, l' organisation des services publics, la mixité des fonctions urbaines, etc. C' est en reconnaissant l' insécurité des usagères en soirée et grâce à l' action conjointe des groupes de femmes et des pouvoirs locaux que le service Entre deux arrêts a été mis en place à Montréal (CAN), qui permet aux femmes de tous âges de descendre de l' autobus là où elles le désirent en soirée pour se rapprocher de leur destination. Cette prise en compte du point de vue qu’expriment les femmes sur l' environnement urbain a aussi donné lieu à des améliorations remarquables lors de la rénovation des sorties du métro montréalais, tels la visibilité accrue depuis les façades vitrées, l' éclairage adéquat, l' accès aux cabines téléphoniques. Le processus des marches exploratoires s' inscrit dans cet esprit et représente une nouvelle façon pour les femmes de s' approprier l' espace urbain en ayant une influence concrète sur son aménagement et l' organisation de ses services. L' intégration de l' approche par genre aux politiques de sécurité urbaine touche au cœur des rapports sociaux de sexe ; elle révèle la forme ultime des inégalités en mettant au jour l' impact chez les femmes de la violence commise à leur endroit. Ainsi les messages à véhiculer auprès des femmes et des filles mettront l' emphase sur le développement de l' autonomie, de l' estime de soi, de l' empowerment, alors que ceux dirigés vers les hommes et les garçons aborderont sans doute la promotion des rapports égalitaires, le respect de l' autre, la responsabilisation face aux comportements de contrôle ou de violence.
Requalifier l’espace public comme espace de l’échange
" La valeur d’échange de l’espace public est centrale pour les femmes. Beaucoup n’ont pas d’autres lieux où la trouver. " Jacqueline Coutras, chercheuse au Centre National de Recherches Scientifiques, Paris (F) Les femmes associées aux marches exploratoires ont dit avoir aimé ce travail, s’impliquer ainsi sur leur ville, leur voisinage, les espaces de proximité qu’elles dominent le mieux. Leur regard sur la ville, déclare avec force l’architecte Anna Bofill Lévi, est indispensable pour établir de nouveaux paramètres, dessiner la ville du XXIème siècle. Il faut absolument faire intervenir les femmes, insiste-t-elle, créer des groupes, des associations pour la participation des femmes au dessin de la ville, enrichir l’ordre des valeurs jusqu’ici essentiellement masculin. La sécurité, le fait de se sentir libre d’aller et venir, est une question assez oubliée par les concepteurs, les promoteurs et les décideurs de l’urbanisme et de l’architecture, constate Anna Bofill Lévi. L’architecture et par extension une partie de l’urbanisme, celle qui s’occupe de dessiner les lieux publics, les places, les parcs etc, privilégie depuis les dix ou quinze dernières années, une approche esthétique qui concerne trop peu le " sens commun ". Une démarche où manqueraient en somme la compréhension des rapports sociaux et le souci des attentes, des usages, des perceptions des citadins. 5.1- Les femmes et l’espace public : une histoire longtemps asexuée Comment, dans nos sociétés occidentales, dans la recherche notamment, a-t-on traité de l’insécurité des femmes dans l’espace public jusque-là ? Jacqueline Coutras répond : la sécurité a toujours été liée prioritairement à l’exclusion sociale, d’ordre économique, ethnique, culturel. Et l’exclusion sociale est pensée en termes asexués ; on fait l’analyse des groupes à risque : chômeurs, habitants des quartiers difficiles… et on propose des mesures d’ordre social, culturel, ethnique… Le fait des
différences entre hommes et femmes n’était pas perçu comme important. L’attention portée aux femmes âgées dans l’espace public et la recherche de solutions adaptées vont grandissant, mais n’est-ce pas le plus souvent en raison de leur supériorité numérique, sans pour autant que la question soit posée en termes sexués (avec des exceptions notables comme dans certaines villes allemandes) ? Les femmes pénètrent massivement dans les espaces publics depuis qu’elles ont commencé à pénétrer massivement dans le monde du travail. Cette évolution se fait dans une insécurité (ou un sentiment d’insécurité) particulièrement grande pour ce groupe social, pour une double raison: d’une part, l’insécurité augmente pour toutes les catégories de populations dans la ville moderne, en particulier pour les femmes qui n’ont pas de tradition en la matière ; et d’autre part, l’espace public n’a pas lui non plus de tradition d’accueil des femmes, sauf dans des cas particuliers. Si depuis une vingtaine d’années la question de l’insécurité des femmes dans l’espace public est posée, si la recherche en parle, ce n’est pas parce que l’insécurité des femmes n’existait pas avant les années 70. C’est parce que les femmes n’étaient pas admises jusque là dans l’espace public. " Parler de violence marque un progrès : on commence à voir les femmes dans l’espace public ", note Jacqueline Coutras. Il est remarquable que le dévoilement de l’insécurité des femmes dans l’espace public accompagne celui, plus ancien mais encore largement incomplet, de la violence dans l’espace privé (le chez soi). L’insécurité y est d’autant plus douloureuse que cet espace privé " moderne " est censé être protecteur (le cocon), l’ultime refuge, et que c’est le seul espace dont on attende cette fonction. En cas de défaillance de l’espace privé, il n’y a pas de remplacement, contrairement à l’espace public d’où l’on peut s’échapper, pense-t-on, vers l’espace privé. Les pouvoirs publics qui imposent des couvre-feux aux enfants savent-ils vers quoi ils les renvoient parfois, et à quoi ils exposent les familles ? … 5.2- Espace public, espace privé : cette frontière qui les relie " Nous apportons une aide principalement aux victimes de la violence domestique, et il était intéressant pour nous de partir de cette perspective de violence contre les femmes dans le contexte de la famille et de la maison pour nous orienter davantage vers la sécurité urbaine. La sécurité urbaine inclut aussi la vie en famille. Nous devons expliquer cela au public. Nous ne pouvons améliorer la sécurité dans l’espace public sans traiter aussi la violence privée ". Maria Shearman De Macedo, Associação de Mulheres contra a violência, Lisbonne (P) " Quand il y a violence à la maison, les femmes et les enfants sont psychologiquement et physiquement à risque. Une violence persistante mine la confiance des femmes, engendre peur et brise leur esprit. " Mary Horkan, Présidente du groupe Européen des Femmes diplômées des Universités, Dublin (IRL) Ne pas reconnaître l' impact de toutes les violences commises à l' endroit des femmes et voir uniquement la violence commise dans les lieux publics comme facteur d' insécurité pour les femmes mènent à des raisonnements fallacieux, tels que : "puisque la majorité des agressions sexuelles sont commises par des hommes que les femmes connaissent, elles ne sont pas justifiées d' avoir peur de se faire agresser par des inconnus et donc de limiter leurs déplacements le soir dans les lieux publics". Comme si le fait pour une femme de subir des violences de la part d’un homme de son entourage dans un lieu privé, la mettait plus en confiance lorsqu' elle rencontre des inconnus, dans un lieu public. Et comme si l’insécurité réelle ou potentielle que vivent les femmes dans l’espace public était une affaire entendue. Le concept d’un " continuum de violence " (les violences sont reliées les unes aux autres dans leur représentation comme dans leurs effets) a été suggéré comme un moyen de décrire à la fois les nombreuses formes de victimation expérimentée par les femmes et leurs impacts qui s’entrecroisent. L' insécurité des femmes, comme de tout un chacun, est reliée non seulement aux agressions physiques dans les lieux publics, mais aussi aux autres formes de violence à leur égard, tant dans la sphère privée que dans la sphère publique, ainsi qu' à l' ensemble des inégalités socio-économiques qui subsistent entre les hommes et les femmes, précise Anne Michaud. La pauvreté, la monoparentalité, l' analphabétisme, l' isolement vécu par les femmes âgées ou les immigrantes, les conditions difficiles de logement et de mobilité font partie des facteurs qui minent la confiance en soi et la conscience de soi, fondement du sentiment de sécurité. Dire " toutes les violences se tiennent " c’est reconnaître que la frontière entre espace privé et espace public n’est pas étanche, comme elle n’est pas étanche pour ces enfants qui ont subi la violence des parents et risquent plus que d’autres de devenir des adultes violents chez eux et au dehors. Mais peut-on pour autant faire des recommandations qui ne distingueraient pas l’espace public de l’espace privé ? La réponse est controversée. Le séminaire de Francfort s’est fait l’écho de deux approches : • une première approche plaide pour une perspective qui, pour réduire la peur du crime et examiner les causes et les conditions de la criminalité contre les femmes, mettra en question la division public/ privé qui aurait été un obstacle par le passé à la reconnaissance de la violence domestique. " La peur du crime que ressentent des femmes ne se cantonne à une seule arène ". Et il faut se garder des déclarations sommaires telles que " les victimes de la criminalité de rue sont plutôt des hommes et les victimes de la violence domestique sont avant tout des femmes " ou " les hommes sont victimes des agressions commises par des inconnus, et les femmes sont victimes d’agressions commises par des personnes de leur entourage " ;
• une seconde approche rappelle que le statut légal des lieux publics et des lieux privés est différent, et que, de ce fait, le statut de la violence qui s’y exerce et de l’insécurité qui s’y vit est différent, " même si ça se termine de la même façon à l’hôpital ". Dans l’espace privé, les pouvoirs publics ne peuvent faire intrusion, sauf exception. Sommes-nous prêts à dissoudre la frontière qui lie et sépare l’espace privé et l’espace public, le seuil entre le " tipi" et la " prairie "8 ? L’espace public, espace de la rencontre et de l’échange, inclut une certaine tension et une certaine insécurité, rappelle Jacqueline Coutras. La possible insécurité fait partie de la définition même de l’espace. N’est-ce pas la raison pour laquelle le " groupe " a toujours eu le souci de la gérer en formalisant des règles qui doivent être partagées, respectées par tous ? L’espace public est l’espace du " bien commun ", les personnes y sont à égalité. Pour en garantir l’accès et l’égalité, il faut se donner les armes du droit : le droit d’être à égalité dans l’espace public. Ni tout à fait publics ni seulement privés, les espaces intermédiaires occupent une place assez spécifique dans l’insécurité des femmes. Les femmes ont désigné deux types d’espaces intermédiaires (sans évoquer la question de leur statut juridique) : • d’une part, les espaces privés ouverts au public comme les grandes surfaces commerciales, les grands équipements culturels, les stades sportifs, ou les transports en commun. Leur dimension, le flux de gens qui y passent, y consomment ou y travaillent, l’interdiction légale de la discrimination à l’entrée, en font, dans l’esprit des citadins, des espaces publics, à cette différence près que la régulation des incidents et la surveillance ne sont pas confiées à l’autorité publique ; • d’autre part, la multitude de petits espaces privés accessibles à tous, telles les entrées d’immeubles, les parties communes des ensembles d’habitation, les cours… trop petits pour être surveillés, trop isolés et éparpillés pour être sous le contrôle informels des flux de la ville. Les marches exploratoires révèlent que ces espaces là sont pour les femmes des niches à peur, à tension, à violence réelle ou potentielle. Or ils sont bien souvent la chaîne du tissu urbain, transition entre l’espace public ou ouvert au public et l’espace domestique, porte vers la prairie, seuil des tipi de la ville, plusieurs fois franchis ou côtoyés par jour. 5.3- Les marches exploratoires, ou l’espace reconnu comme acteur " La sécurité/ insécurité des espaces physiques, qu’elle soit réelle ou ressentie, dépend aussi de la forme physique de l’espace. L’espace peut créer des sensations d’insécurité, de sécurité, de confort. Il peut aussi être dissuasif de la violence réelle ou provoquer toutes sortes de comportements inciviles, violents, même barbares ". Anna Bofill Lévi, architecte, Barcelone (E) On ne peut étudier l’insécurité sans s’intéresser aussi au niveau local et sans emprunter aussi le regard des personnes. La méthode des marches exploratoires confiées à des ONG exprime la volonté de mettre en relation étroite le vécu des femmes et les caractéristiques formelles de l’environnement bâti dans lequel ce vécu se situe et à partir duquel il s’échafaude. Les marcheuses s’interrogent sur ce que l’espace permet, autorise, ou interdit… Elles travaillent sur des valeurs qui font tellement consensus qu’on se dispense de les exprimer. Par exemple : " Les femmes doivent rester à la maison après 8h du soir ". Cet accord tacite, guère remis en cause, fait comme si la réalité respectait l’égalité légale des hommes et des femmes dans l’espace public. " Sauf que dans les faits, observe Jacqueline Coutras, les femmes n’ont pas de tradition de présence dans l’espace public. Elles ont une tradition d’absence, d’exclusion ". Par sa méthode, l’étude SécuCités Femmes adopte un certain positionnement théorique vis-à-vis du statut de l’espace et du lieu. Elle considère que l’espace et le lieu ne sont pas un simple cadre, un contenant, dans lequel s’inscrivent des relations entre groupes sociaux (antagonismes ou liens) ; qu’ils sont un intervenant dans l’élaboration des inégalités sociales et sexuées. Certains travaux - telles les réflexions se fondant sur l’étude des groupes à risques - considèrent que le cadre, l’espace, dans lequel se déroulent les échanges est socialement neutre et que cette neutralité permet de faire porter l’étude et les efforts sur les mécanismes socio-économiques, politiques, scolaires, culturels, historiques de domination d’un sexe sur l’autre ; même chose pour la politique fondée sur les nouveaux métiers et qui traite des questions de délinquance, de violence et d’incivilité comme faisant partie des problèmes économiques, sociaux, pathologiques, ethniques, juvéniles… Une telle position conduit à faire des recommandations sur la structure de la société et peu la structure bâtie à laquelle on ne reconnaît aucun rôle. Ces approches, résume Jacqueline Coutras, considèrent la violence urbaine comme l’expression de la violence liée aux processus d’exclusion de notre société post industrielle, de même qu’autrefois, sur le lieu de production, se produisaient des violences qui témoignaient des rapports d’exploitation et de domination existant dans le travail. Se donner pour priorité, comme le propose le Forum Européen pour la Sécurité Urbaine, de faire le lien entre d’un côté les conditions concrètes (physiques) à partir desquelles naît l’insécurité et de l’autre le vécu des personnes récuse cette neutralité de l’espace. Lorsque les femmes engagées dans les marches exploratoires disent " il faut mettre de la lumière ", par exemple, elles disent que le cadre est partie prenante de la sécurité, qu’il est marqué par les relations de forces entre les groupes sociaux, et qu’en modifiant la construction de l’espace, on contribue à transformer les relations interpersonnelles. L’espace n’est plus seulement une conséquence, il est aussi créateur d’inégalités sociales : ici d’insécurité hommes/ femmes. Cette position est importante parce qu’elle légitime l’action sur l’espace, donc légitime la prise en compte par l’aménageur ou les acteurs institutionnels des relations hommes/ femmes. La stratégie d’action et de prévention qui est proposée s’en trouve renforcée.
5.4- Un lieu est lié à d’autres lieux Le lieu est ici le niveau d’observation. Dans une politique de sécurité, faut-il tenir compte du seul lieu ou de l’enchaînement des lieux ? La question et la réponse sont importantes pour argumenter les recommandations. La réponse des marches exploratoires est que le lieu n’est pas une entité en soi, qu’on ne peut pas tenir compte du seul lieu. On ne peut pas parler de l’insécurité dans tel parking, passage, quartier pris isolément. Un lieu est lié à d’autres lieux, l’espace n’est pas une somme de lieux. Ce qu’on veut réduire c’est l’insécurité dans un ensemble de lieux, dans l’enchaînement des lieux (les gestionnaires des transports urbains se préoccupent de plus en plus du trajet de porte-à-porte, sachant qu’il ne suffit pas d’un métro propre et sûr pour inciter les gens à l’emprunter s’il leur faut longer une rue perçue comme menaçante). Il nous faut penser le lieu dans sa relation avec l’avant et l’après, et penser les relations entre les lieux, publics et privés, qui constituent l’espace. Au-delà de l’aménagement physique, il faut s’interroger sur ce qui fait que ce lieu ou cet enchaînement autorise des agressions (sous quelque forme que ce soit), fait naître ou accroît le sentiment d’insécurité. Comment les hommes et les femmes reconnaissent ou non, adoptent ou non les codes de conduites, normes, règles (interdits, permissions) qui émanent de l’espace ? Comment l’espace peut-il être porteur de préceptes, de consignes qui s’imposent aux individus ? Questions qu’il faudrait que se posent les maîtres d’ouvrage qui définissent la commande, le cahier des charges de l’aménagement urbain, et les maîtres d’œuvre qui donnent forme à cette commande. 5.5- Les femmes ont à perdre à un simple aménagement fonctionnel des lieux Faut-il proposer des aménagements fonctionnels des lieux et des articulations entre les lieux en tenant compte du regard des femmes ? Répondre oui, c’est vouloir redonner une qualité aux espaces (assemblages de lieux), c’est vouloir agir sur les images, représentations, charges symboliques qui sont attachées aux lieux. Mais cette démarche ne va pas sans danger : le danger du formalisme. A privilégier la configuration spatiale des lieux et leur aménagement physique pour rendre les quartiers plus sûrs, on risque en effet de cloisonner les espaces et de promouvoir une politique de sectorisation (on en a maints exemples), d’affectation des lieux à tels ou tels groupes. Or, à une telle politique sécuritaire, les femmes ont beaucoup à perdre. " Les groupes sociaux qui aujourd’hui ‘dominent’ les lieux, note Jacqueline Coutras, retrouveront d’autres lieux, mais les femmes ? Ne se replieront-elles pas sur la maison ou ne fuiront-elles pas vers d’autres quartiers ?". Il serait nécessaire à cet égard de pouvoir tirer un bilan des aménagements qui ont affecté des places, parcs ou jardins publics (en totalité ou en partie) à certains usages, à la demande ou non des usagers ou des riverains. Une démarche qui mettrait davantage à l’abri du risque de fonctionnalisme, serait d’intégrer la nécessaire amélioration des espaces, leur " requalification ", à une approche plus globale qui prenne garde : • à proposer des nouvelles images qui ne continuent pas à traiter de l’universel, autrement dit du masculin, • et à maintenir la vocation première de l’espace public dans nos sociétés modernes : fluidité et rencontre, ouverture à toutes les catégories de populations. Il faut essayer de donner aux lieux un autre sens, au-delà des recommandations - aussi importantes soient-elles - visant l’éclairage, les matériaux ou les formes. Dans l’espace public la fonction d’échange est une valeur principale : si on supprime la valeur d’échange de l’espace public, où les femmes iront-elles la chercher ?
Recommandations
Le projet SécuCités Femmes, à l’issue de l’examen des données par genre disponibles dans les villes, des marches exploratoires et des groupes d’échange, et à l’issue du séminaire de Francfort où ont été confrontés les résultats, permet au Forum Européen pour la Sécurité Urbaine de soumettre à examen plusieurs recommandations visant à mieux garantir entre les hommes et les femmes une égalité d’accès à la sécurité urbaine. 6.1- Introduire la dimension de genre dans le recueil et le traitement des données codifiées "Il faut mettre à jour ce qui est encore dans le secret", autrement dit les violences et l’insécurité cachées, telle est la revendication centrale des femmes et des organisations de femmes associées à l’étude. Cela ne peut se faire sans une modification du traitement des données codifiées, en premier lieu par les organismes publics (autorités locales, police, justice, santé notamment). Le " Gender Mainstreaming " (la prise en compte de la réalité différenciée homme/ femme comme une donnée centrale, et non plus marginale, des politiques) dans lequel l’Europe s’est engagée et dont le programme SécuCités Femmes participe n’a des chances d’aboutir que si les données de genre sont intégrées au recueil et au traitement des informations statistiques. La nécessité du dévoilement n’a fait l’objet d’aucune réserve au cours de la présente étude de la part des organisations de femmes. Il doit être assorti de conditions : • ne pas générer pour les femmes une nouvelle insécurité. Si une grande partie des violences contre les femmes reste cachée, c’est aussi que le dévoilement est source de risque pour la femme (représailles de la part de l’agresseur qu’elle connaît, rupture d’une relation qu’elle souhaite préserver, séisme pour elle-même et sa famille). Le dévoilement suppose un travail en profondeur sur les représentations sociales de la violence de genre et sur la confiance que les femmes ont en elles, ainsi qu’une évolution en profondeur de la réponse des institutions sociales, policières et judiciaires ; • prendre en compte l’expérience concrète des hommes et des femmes, c’est-à-dire étudier l’insécurité à des niveaux de proximité, d’expérience, en faisant le lien entre le vécu des personnes et les espaces réels, physiques ; • développer une approche interdisciplinaire de la sécurité urbaine. Recommandations 1 - Généraliser l’approche par genre (hommes et femmes) dans les institutions de l’Union Européenne, nationales et locales qui produisent des données codifiées. L’Union fixera les prémisses et les critères en matière de recherche et de codification. Les enquêtes de victimation seront généralisées au niveau des villes. 2 - Prendre en compte les différents espaces et les différents moments de l’insécurité et de la violence : espaces privés, espaces intermédiaires, espaces publics ; jour et nuit. 3 - Prendre en compte les différentes formes de violences: violences physiques ou mentales, réelles ou redoutées, pertinentes ou non au sens judiciaire. 4 - Mettre les informations à la disposition de tous. Produire un document commun aux villes d’Europe sur l’insécurité et la violence dans les villes. 6.2- Modifier en profondeur les réponses de la justice criminelle à la violence de genre La police et la justice, responsables de la sécurité publique, axent leurs interventions sur la répression de la criminalité. Cette approche montre ses limites lorsqu’elle ne s’accompagne pas d’une attention spécifique aux victimes. Recommandations 5 - Améliorer l’accueil des victimes dans les commissariats de police. Former en ce sens le personnel policier et prévoir des dispositifs appropriés pour la déposition de plainte des femmes victimes de violences sexuelles. 6 - Etre en mesure de répondre dès le signalement, par une approche pluridisciplinaire, aux aspects psychologiques et sociaux de la situation. 7- Aménager des réponses judiciaires mieux adaptées aux violences domestiques, telles que : • possibilité pour le juge de se saisir à la fois des éléments civil et pénal d’une situation ; • ne pas porter préjudice à toute la famille par une sanction de l’agresseur telle que l’amende qui la prive elle aussi de ressources ou l’arrêt domiciliaire qui peut infliger à la victime une présence non désirée ;
• informer la victime du suivi de sa plainte ; • donner à la victime accès à l’aide judiciaire ; • améliorer, pour les enfants mineurs en particulier, les conditions du témoignage. 6.3- Offrir une aide et un accueil aux femmes victimes de violence ou de l’insécurité urbaine Les institutions publiques peuvent faire beaucoup et doivent faire plus, mais tout ne doit pas et ne peut pas venir des institutions. Les organisations non gouvernementales, comme celles qui ont participé à l’étude SécuCités Femmes, assurent un accueil et un accompagnement des femmes victimes et deviennent des lieux ressources riches en connaissance sur une victimation mal perçue par les institutions. Recommandations 8- Que toute femme victime de violence puisse bénéficier d’une écoute, d’une aide matérielle et psychologique et d’un accueil en urgence, ainsi que ses enfants. 9- Que les femmes étrangères, avec ou sans papiers, puissent accéder aux services de droit commun. Qu’elles puissent être soutenues et informées avec des moyens appropriés à leur situation, en particulier à leur niveau de compréhension de la langue du pays d’accueil. Qu’à cette fin, les intervenants publics soient formés aux relations interculturelles. 10- Que les ONG reçoivent des pouvoirs publics les moyens financiers suffisants pour offrir aux femmes la possibilité de se rencontrer, de s’entraider et d’échanger des informations. 6.4- Accroître la confiance en soi/ conscience de soi (empowerment) des femmes Les ONG jouent ici un rôle considérable qui doit être soutenu financièrement et développé, sans dispenser les autorités publiques de leurs responsabilités propres. Recommandations 11- Garantir l’existence dans les villes d’une structure où les femmes et les hommes recevront une aide psychologique, une information juridique, un apport logistique à des initiatives qui réduisent leur vulnérabilité, telles que: échange d’expériences, prise de conscience du statut de la violence, formation des femmes à la légitime défense, présence de femmes en groupe dans l’espace public à des moments et dans des lieux qu’elles redoutent … 12- Diffuser par l’intermédiaire des ONG du matériel pédagogique sur la violence, accessible à tous y compris aux femmes et aux hommes étrangers ou/ et illettrés. 6.5- Modifier la conception et l’aménagement de l’espace urbain pour contribuer à réduire le sentiment d’insécurité et les occasions d’agressions Recommandations 13- Introduire l’expertise des habitants, et en particulier des femmes, dans la conception et l’aménagement des espaces urbains. 14- Mener une action concertée entre pouvoirs locaux, organismes publics, organismes privés maître d’ouvrage ou maître d’œuvre, et ONG pour définir des normes de sécurité urbaine dans la planification et l’aménagement de l’espace urbain. Principes communs à ce jour aux ONG de femmes : • accessibilité, y compris clarté de l’itinéraire qui facilite une lecture rapide de celui-ci ; • visibilité qui permet de voir et d’être vue ; • pluri-activité, pluri-fonctionnalité de l’environnement qui stimule le contrôle social informel. 15- Introduire des normes relatives à la prévention de l’insécurité par l’urbanisme et l’architecture dans les espaces et équipements accueillant du public et dans les espaces privés. Veiller à l’application de ces normes, au même titre que les normes anti-incendie. Veiller à la participation de femmes dans le Comité européen de normalisation : " Prevention of Crime. Urban Planning and Building Design ". 6.6- Développer des services urbains propres à mieux garantir pour les femmes la liberté d’aller et venir en sécurité La présence humaine liée aux activités commerciales, sociales, ludiques … est perçue comme la meilleure antidote au sentiment d’insécurité, et le meilleur moyen de contrôle social informel (à noter que le renforcement d’une présence policière reste controversée, même si la rencontre d’une patrouille de police la nuit est toujours rassurante sur le moment). A défaut de cette présence humaine, notamment le soir et la nuit, et dans certains quartiers peu fréquentés, des services doivent pouvoir être proposés qui limitent le risque et la peur.
Recommandations 16- Autoriser, notamment la nuit et dans les lieux peu fréquentés, des arrêts de bus à la demande et un accès plus facile aux taxis. 17- Entretenir et nettoyer les espaces, la saleté et l’abandon accentuant toujours le sentiment d’insécurité. 18- Implanter des dispositifs d’appel à l’aide (téléphone, borne d’appel). 19- Prévoir si nécessaire, dans une phase de transition, des parkings automobiles réservés aux femmes et à proximité d’une surveillance formelle ou informelle. 6.7- Faire progresser les rapports d’égalité entre hommes et femmes en agissant sur les représentations dominantes La Convention des Nations Unies de 1997 sur l’élimination de toute forme de discrimination contre la femme reconnaît la nécessité de changer les attitudes moyennant l’éducation qui concerne non seulement l’école mais la famille et tout l’environnement social. Recommandations 20- Organiser l’échange des pratiques et des connaissances à l’échelle internationale en soutenant les rencontres entre organisations de femmes, réseaux de villes et professionnels de l’aménagement et des services urbains. 21- Sensibiliser les hommes, notamment par leurs pairs, y compris dans les syndicats et les entreprises, aux violences dirigées contre les femmes dans l’espace public et dans l’espace privé, et au sentiment d’insécurité des femmes, cible la plus facile et la plus accessible aux hommes. 22- Agir auprès des jeunes, en particulier au niveau des écoles, perçues comme lieu stratégique pour promouvoir des rapports égalitaires entre hommes et femmes et modifier les représentations dominantes des relations hommes / femmes. Avoir des initiatives en direction des jeunes qui sont plus difficilement accessibles (parce que refusant ou ayant quitté l’école, ou sans domicile fixe). 23- Agir au niveau des médias (presse, publicité). Le traitement médiatique de la femme et de la violence est un élément clé de la transformation des représentations et des comportements. Les médias développent une iconographie et une scénographie qui participent de la forme urbaine (affiches sur les murs, les arrêts de bus, les stations de métro, les gares, les mobiliers urbains) et doivent faire l’objet d’attention au même titre que l’aménagement. On peut envisager la création d’une commission de contrôle sur le traitement médiatique de la femme. 24- Sensibiliser l’opinion publique par des campagnes nationales et transnationales. Renforcer le lobbying via des organisations gouvernementales et non gouvernementales internationales, via des églises et via des événements tels la Marche mondiale des femmes de l’An 2000 lancée par les Québécoises. 25- Exiger de l’Union Européenne la reconnaissance effective de l’égalité hommes/ femmes, en particulier : • que les marchés publics des programmes européens prévoient un " mieux disant " concernant les femmes, comme il existe un "mieux disant social " ; • que la parité soit recherchée à la tête des directions générales de la Commission (comme elle tend à l’être dans le Parlement Européen). 26- Veiller à l’application par les pays des recommandations internationales contre la violence de genre et modifier si nécessaire en ce sens les législations nationales de manière à ce que des recours contre la violence puissent être présentés devant les tribunaux. La loi ne suffit pas à modifier les mentalités collectives des peuples. Mais elle fixe les valeurs de respect, de dignité et d’égalité entre les hommes et les femmes, et permet de spécifier les obligations concernant la non-discrimination à l’encontre des femmes, et de sanctionner les manquements. 6.8- Coordonner les initiatives pour promouvoir l’approche par genre dans la sécurité urbaine au sein des coalitions locales pour la sécurité urbaine ou de coalitions locales spécifiques Recommandation 27- La cohérence, la pluridisciplinarité, la visibilité des réponses pour une plus grande sécurité des femmes dans la ville imposent des initiatives cordonnées, accompagnées et évaluées au sein de coalitions locales qui réunissent les partenaires de la sécurité urbaine. Les autorités locales doivent y jouer un rôle majeur, puisque c’est au niveau local que l’insécurité peut être
perçue et au niveau local que nombre de réponses sont apportées, notamment en termes d’urbanisme, d’aménagement et d’éducation.
ANNEXES
Annexe 1 La prise en compte de l’approche par genre : le projet SécuCités Femmes montre d’importantes différences dans les villes Les organisations de femmes impliquées dans le projet SécuCités Femmes du Forum Européen pour la Sécurité Urbaine étaient invitées à chercher les données disponibles concernant la sécurité et les femmes dans leur ville. Le résultat de ces investigations montre des différences importantes d’une ville à l’autre, d’un pays à l’autre quant à la reconnaissance de la pertinence d’une approche par genre et quant aux données disponibles. De plus, il n’a pas été toujours facile pour les ONG d’accéder aux données qui sont pourtant censées être publiques. L’appui que leur ont apporté les municipalités a pu être déterminant à cet égard. Arcueil (F). Investigations SécuCités Femmes menées par l’Association " Initiatives des Femmes Africaines de France et d’Europe " . Avec l’aide de la municipalité. La municipalité et le Département (service du droit des femmes) ont soutenu l’ONG chargée de l’étude SécuCités Femmes. Le problème a été principalement l’absence de données fiables par genre. L’ONG a demandé une rencontre avec les élus et les travailleurs sociaux à la suite du séminaire de Francfort. Elle insiste plus que les autres ONG engagées dans l’étude sur la situation des femmes immigrées, notamment du fait de la polygamie qui donne à la première femme accès à tous les droits (notamment accès aux allocations)s au détriment des autres femmes, des mauvais logements, des conflits d’espace… La sécurité des femmes n’est pas identifiée comme problème spécifique par les institutions publiques. La sécurité urbaine est abordée de manière globale, y compris dans le Contrat Local de Sécurité qui lie la Ville à l’Etat. La Ville ne dispose pas d’un diagnostic de sécurité qui prenne en compte la spécificité féminine. Paramètres pris en compte dans les données codifiées : agresseur, nature des violences, moment et lieux de commission des violences. L’accent est mis sur les agresseurs dans la rue et plus particulièrement sur ceux qui ont été identifiés et écroués. Les victimes ne sont pas au centre des investigations. Les groupes d’échange entre femmes organisés dans le cadre du projet SécuCités Femmes ont montré notamment que les femmes résistaient à parler de leur expérience de la violence, demandant l’anonymat et allant jusqu’à refuser de parler (les femmes africaines en particulier) à des femmes qu’elles ne connaissaient pas assez. Leur vécu de la violence est le plus souvent conjugal. Les violences physiques : coups et blessures, gifles, coups de pieds, injures, vols, viols (y compris au sein du couple). Violences psychologiques : menaces, chantage, affichages agressifs, télévision abusive. Sources consultées • une fiche d’observation a été donnée à tous les partenaires, mais tous n’ont pas répondu. Personnes rencontrées par l’IFAFE : Mission départementale aux Droits des femmes (service de l’Etat), la police et la gendarmerie (services d’Etat), le centre médical et social (service municipal), les avocats de permanence à la mairie, des assistantes sociales, les représentants des transports publics régionaux, pompiers, bailleur social, commerçants. Barcelone (E). Investigations SécuCités Femmes menées par la Fundació Maria Aurelia Capmany. Avec l’aide de la municipalité. Les actions pour les femmes rencontrent un certain succès en Espagne. Les ONG reçoivent des aides nombreuses, les institutions offrent de nombreux services aux femmes victimes de violence domestique. Toutes les villes de plus 25000 habitants, surtout en Catalogne, ont des services pour l’aide directe aux femmes qui veulent porter plainte. Une coopération est développée entre associations de femmes et femmes du monde de la justice et de la psychologie. Le gouvernement de Catalogne a créé un comité avec la participation de tous les collèges professionnels impliqués dans ces problèmes (médecins, psychologues, sociologues, avocats), les syndicats et les associations qui aident les femmes, dans le but de préciser les actions à mener et de coordonner les services, l’assistance et l’information. A Barcelone, il existe deux ONG importantes, l’une centrée sur la psychologie, l’autre plus
judiciaire, qui reçoivent une aide municipale. Ces ONG demandent la participation économique des institutions et des personnes dans leurs programmes (et pas seulement de l’argent). Sources consultées • Statistiques policières. Infractions à la liberté sexuelle et mauvais traitements sont ventilées par type de délits, sexe, auteur, victimes, relations entre victime et agresseur, lieux depuis 1998. Autres infractions codifiées classiquement. • Les deux seuls observatoires locaux de sécurité (Alcobendas et Barcelone). Appréhendent la victimation occulte et montrent qu’une grande partie des femmes ne portent pas plainte par peur, pression sociale ou ignorance. A partir d’octobre 1999, l’observatoire de Barcelone introduira des variables de genre qu’il croisera avec des variables de contexte (urbanisme, éducation, informations dans les médias, nouveaux emplois pour les femmes, construction des logements sociaux et des centres pour les ONG sur ces problèmes), afin d’analyser la manière dont ces variables agissent sur la diminution de la violence. Bologne (I). Investigations SécuCités Femmes menées par l’Associazione gruppo di lavoro e ricerca sulla violenza alle donne. Avec l’aide de la municipalité. Il existe de nombreux groupes et initiatives de femmes en Italie concernant la violence contre les femmes. Dans 20 villes, dont Bologne, des centres d’aide et d’information ont été ouverts. A Bologne, le mouvement des femmes dans et hors les institutions est fort. Il est important que la police ainsi que le barreau participent à ces réseaux pour éviter que les femmes ne restent isolées. Le programme municipal " Bologna Sicura " mène une action Tolérance Zéro avec des femmes pour sensibiliser les hommes et la ville à la violence contre les femmes et en faire un sujet culturel pour tous. Bien qu’on ne puisse pas dire que la construction d’une approche par genre de la sécurité urbaine soit complète en Italie, l’attention aux différences hommes/ femmes prend place dans le débat théorique et politique. A partir de 2000, les statistiques de la criminalité (auteurs et victimes) devraient être ventilées par genre, à l’initiative du Ministère de l’intérieur et de l’Institut National de la Statistique (ISTAT). La volonté d’essayer de connaître le "le chiffre noir " de la criminalité a été à l’origine de la première enquête de victimation. La réalité locale à Bologne, tant municipale que régionale, a contribué à ce processus grâce aux initiatives différentes mais assez bien intégrées d’acteurs tels que les associations de femmes, les agences publiques, les experts et les chercheurs. Les instruments adoptés par les différents niveaux territoriaux et institutionnels sont très insuffisants pour développer des analyses et des politiques par genre propres à répondre aux besoins et aux demandes des femmes. Encore trop souvent, la formulation même des instruments pour la collecte de données ne se fixe pas pour objectif ni de réunir les données en fonction du genre, ni de ventiler par genre la criminalité sexuelle qui constitue traditionnellement un enjeu spécifique pour les femmes, telles que les violences domestiques et sexuelles. Sources consultées • Police. Données utiles pour analyser la violence de rue ; mais la violence domestique et la violence sexuelle sont souvent assimilées à d’autres violences (coups, enlèvement…). Pas d’information sur la victime ni sur la relation entre la victime et l’agresseur. • Justice. Données basées sur les catégories pénales et peu explicites sur les circonstances. L’approche par genre ne concerne que l’auteur, à l’exception d’études ponctuelles auprès des tribunaux. • Services socio-sanitaires. Refuges pour femmes : l’expérience directe des femmes montre que les rares femmes qui portent plainte à la police attendent jusqu' à 6-8 ans un jugement. Services sociaux : ne sont tenus qu’au signalement des abus sur mineurs ; ne produisent pas d’autres données codifiées. Services d’urgences : pas de données publiées sur la violence contre les femmes, bien que les informations recueillies auprès des patientes le permettraient. • Le rapport annuel de Città Sicure diffuse régulièrement les statistiques de la criminalité, les résultats des études d’opinion sur les questions de sécurité urbaine et des résumés d’études spécifiques. La première enquête italienne sur les différences de perception par les femmes et par les hommes de la sécurité ou insécurité des espaces publics a été dirigée par deux membres du Comité scientifique de Città Sicure, dans trois villes d’Emilie Romagne : Bologne, Piacenza et Ravenne9. • Première enquête nationale de victimation de 199710 menée par l’Institut National de la Statistique (ISTAT) en collaboration avec le Projet Città Sicure de la région Emilie Romagne. Introduit la dimension de genre mais n’aborde pas la violence domestique. Cherche en particulier les données concernant le harcèlement sexuel et la violence subie par les femmes. Compare la perception de la sécurité chez les hommes et chez les femmes en Emilie Romagne et en Italie. • Une enquête réalisée par le Gruppo di lavoro e ricerca sulla violenza alle donne auprès de 2000 femmes hébergées dans les centres anti-violence de la région Emilie Romagne en 1997. Francfort (D). Investigations SécuCités Femmes menées par Ökumenische Asiengruppe et AGISRA. Avec l’aide de la municipalité.
En matière de sécurité, Francfort a une tradition d’approche à partir du regard des femmes. Des recherches spécifiques sur les femmes ont été initiées et sont pertinentes pour répondre au problème d’insécurité pour les femmes et pour les hommes. Le Conseil de prévention de la ville joue à cet égard un rôle important, ainsi que les conseils de prévention des quartiers. Il apparaît que les femmes jouent un rôle moteur dans les politiques locales de prévention de la violence, alors que les hommes y seraient sous-représentés Actions menées dans la ville concernant la violence contre les femmes : sondages, études, " empowerment ", cours de légitime défense, communication (auto collants, brochures) Sources consultées • Recherches menées à Francfort selon une approche de genre. Montrent que, chez les femmes, le sentiment d’insécurité peut avoir une origine qui n’est pas l’insécurité urbaine, chez les femmes immigrées en particulier. Montrent également que les femmes ne sont pas les seules concernées par l’insécurité en ville : la violence dans l’espace public est n° 1 des citadins depuis l’augmentation de la violence. • Une étude publiée en 1996, dans le cadre du Plan-construction de la ville, expertise les besoins des femmes en matière d’urbanisme. Ces études se sont poursuivies en 1997 sur le sentiment d’insécurité et l’urbanisme. Hammersmith & Fulham, Borough of London (UK). Investigations SécuCités Femmes menées par Hammersmith Women’s Aid. Avec l’aide de la municipalité. Il existe en Angleterre un important réseau de professionnels sur les problèmes de violences aux femmes, essentiellement centrés sur la violence domestique. Mais ces réseaux manquent d’argent et de reconnaissance, bien que l’action des ONG soit reconnue par les médecins et les autorités du logement. L’argent pour l’aide aux mères isolées, pour la formation professionnelle, pour accueillir les victimes de violences, en particulier les femmes étrangères. Les ONG dépendent essentiellement des dons et du bénévolat, et les femmes luttent elles-mêmes tout le temps. Hammersmith Women’s Aid a établi une liste très fournie de recommandations portant sur l’aménagement et l’équipement des lieux publics. Ces recommandations sont portées par la municipalité en partenariat avec la police, et selon les cas, le Métro de Londres, des entreprises locales, le National Car Parks, et British Telecommunications. Ce point traduit des investigations locales en profondeur et dans le cadre d’un partenariat remarquable entre l’autorité locale et des opérateurs-clés de l’espace urbain. Les données recueillies par Hammersmith Womens’ Aid, notamment au cours des marches exploratoires, sont extrêmement précises et fournies et montrent une réelle maîtrise de cette méthode, implantée localement depuis plusieurs années déjà. Sources consultées • Statistiques Police (" Police Crime Report Information " et " Computer Aided Dispatch ") : données ventilées par genre des agresseurs et des victimes (avec une nuance concernant les atteintes aux biens : la police enregistre l’identité de la personne venant déposer plainte, le plus souvent un homme, qui n’est pas toujours la victime directe). Résultats : 1- les atteintes corporelles graves concernent davantage les femmes ; 2- les violences domestiques contre les femmes sont plus fréquentes que les violences contre les femmes dans la rue ; 3- le quart seulement des violences domestiques sont rapportées à la police et 7% de ces signalements donnent lieu à une arrestation. Lisbonne (P). Investigations SécuCités Femmes menées par l’Associação de Mulheres contra a violência. Avec l’aide de la municipalité. L’Association de femmes contre la violence, qui ne bénéficie d’aucune aide gouvernementale, a rencontré des difficultés du fait que la violence contre les femmes, notamment conjugale, est largement taboue au Portugal. Certains responsables ne veulent pas être vus soutenant un projet sur ce thème. L’Association des femmes contre la violence demande l’aide des femmes d’Europe pour faire du lobbying au Portugal. Elle estime que les autorités portugaises ne prêtent pas attention à la violence contre les femmes. Elles signalent que le Portugal est le seul pays de l’Union européenne qui ne dispose d’aucun refuge spécifique pour les femmes victimes de la violence domestique ; que le plan national contre la violence domestique adopté en 1999 prévoit la création non seulement de refuges mais aussi de services et de formations spécifiques, sans que ces dispositions aient encore vu le jour. Un espoir : le Plan INOVAR expérimente à Porto depuis 1998 la présence de femmes policiers pour le recueil des plaintes de femmes contre la violence (notamment domestique ou sexuelle), et devrait être étendu à Lisbonne. Sources consultées
• Statistiques de la criminalité. Indiquent le sexe de la victime, mais sont globalement orientées sur les faits plus que sur les personnes. Les statistiques criminelles font apparaître une seule donnée spécifique " femmes " : le vol sur la voie publique (mugging) qui apparaît donc comme l’agression la plus fréquente contre les femmes en milieu urbain.
Annexe 2 SécuCités Femmes La sécurité urbaine : doit-on avoir une approche par genre ? Séminaire de Francfort (Allemagne), 30 septembre et 1er octobre 1999
PROGRAMME Jeudi 30 septembre 1999
10h00 Accueil des participants Regards sur la politique de sécurité de la Ville de Francfort Madame Sylvia SCHENK, Conseillère municipale déléguée aux Droits, Sports, Femmes et Logement, Mairie de Francfort Le Bureau des femmes de la Ville de Francfort: missions et spécificités
Madame Renate KRAUSS-POETZ, Directrice, Bureau des Femmes, Francfort 10h45 Ouverture des travaux Madame Lalla Golfarelli, Présidente du Forum Italien pour la Sécurité Urbaine Madame Clotilde TASCON-MENNETRIER, Directrice des Programmes, Forum Européen pour la Sécurité Urbaine, Paris 11h00 Les femmes et la sécurité. Quels enjeux pour l’Europe ? Madame Patsy SÖRENSEN, Députée européenne, Parlement européen, Bruxelles 11h30 Pourquoi la question de l’approche par genre se pose-t-elle ? Madame Anne MICHAUD, Coordinatrice "Femmes et Ville ", Service des sports, des loisirs et du développement social, Ville de Montréal 12h00 Débat 12h30 Déjeuner 14h00 Table ronde : Dispose-t-on, à travers les villes, d’un diagnostic de sécurité prenant acte des spécificités féminines? Six villes européennes témoignent. Modérateur : Madame Soraya SMAOUN, Expert de sécurité urbaine, Centre des Nations Unies pour les Etablissements Humains, Nairobi Laureline DAOUST et Damarys MAA (IFAFE, Arcueil), June KATHCHILD (Hammersmith Women’s Aid, Hammersmith & Fulham), Lorenza MALUCCELLI (Bologna Sicura, Bologne), Pilar LLEDO (Fundació Maria Aurelia Capmany, Barcelone), Maria Shearman DE MACEDO (Associação de Mulheres contra a violência, Lisbonne), Lieve VAN DEN AMEELE-STELLER (Ökumesnische Asiengruppe, Francfort) 15h00 Débat 15h30 Pause café 15h45 Aménagement urbain et architecture facteurs de sécurité et de sécurisation. De la conception à l’appropriation par les deux sexes : qu’en est-il ? Madame Anna BOFILL LEVI, Architecte, Barcelone 16h15 Table ronde : Urbanisme et insécurité. Que nous apprennent les marches exploratoires ? Six villes répondent. Modérateur : Madame Ursula BRÜNNER, Service pour le développement local et l’aménagement urbain, Ville de Francfort Laureline DAOUST et Damarys MAA (IFAFE, Arcueil), June KATHCHILD (Hammersmith Women’s Aid, Hammersmith & Fulham), Silvia CALASTRI (Associazione gruppo di lavoro e ricerca sulla violenza alle donne, Bologne), Anna BOFILL LEVI (Fundació Maria Aurelia Capmany, Barcelone), Maria Shearman DE MACEDO (Associação de Mulheres contra a violência, Lisbonne), Gina AGUILA (Ökumesnische Asiengruppe, Francfort) 17h15 Débat 18h00 Fin des travaux 18h30 Réception à l’Hôtel de Ville (Salle des Empereurs) 20h00 Dîner Vendredi 1er octobre 1999
9h00
Violences dans les sphères publique et privée, sentiment d’insécurité. Madame Mary HORKAN, Groupe Européen des Femmes Diplômées des Universités, Dublin
9h30
Table ronde : Quels sont les messages et les attentes des femmes ? Quelles sont les réponses institutionnelles ? Modérateur : Madame Ursula MÜLLER, Ancienne Secrétaire d’Etat au Ministère des Femmes, de la Jeunesse, du Logement et du Développement urbain du Schleswig Holstein Laureline DAOUST et Damarys MAA (IFAFE, Arcueil), June KATHCHILD (Hammersmith Women’s Aid, Hammersmith & Fulham), Anna PRAMSTRAHLER (Associazione gruppo di lavoro e ricerca sulla violenza alle donne, Bologne), Rosa Maria DUMENJO (Fundació Maria Aurelia Capmany, Barcelone), Monica ARAUJO DE ALBUQUERQUE (Associação de Mulheres contra a violência, Lisbonne), Eleonore WIEDENROTH (AGISRA, Francfort)
10h30 Débat 11h00 Pause café 11h15 Les commentaires du chercheur Madame Jacqueline COUTRAS, chercheur au Centre National de Recherches Scientifiques, Paris 11h45 Pour une approche intégrée de la sécurité dans les villes Monsieur Michel MARCUS, Délégué Général, Forum Européen pour la Sécurité Urbaine, Paris 12h15 Vers une intégration de l’approche par genre par le politique ? Monsieur René LAI-HONG-TING, Adjoint au Maire chargé de la Jeunesse, Saint-Denis de la Réunion 12h30 Débat 12h45 De la pertinence de l’approche par genre dans le champ de la sécurité urbaine… Perspectives Madame Clotilde TASCON-MENNETRIER, Directrice des Programmes, Forum Européen pour la Sécurité Urbaine, Paris 13h00 Fin des travaux
Annexe 3 LISTE DES PARTICIPANTS AU SEMINAIRE DE FRANCFORT, 30 SEPTEMBRE ET 1ER OCTOBRE 1999
BELGIQUE Anvers Karin MARTENS, Consultante pour la prostitution, Ville d’Anvers Charleroi Christiane LABARRE, Coordinatrice Médiation de quartier, Ville de Charleroi
Bruxelles Patsy SÖRENSEN, Député européenne, Parlement Européen Inge DE WAARD, Vrouwen Overleg Komitee Laurence CLAEYS, Vrouwen Overleg Komitee Maïti CHAGNY, Assistante de projet, City and Shelter CANADA Montréal Anne MICHAUD, Coordinatrice " Femmes et Ville ", Service des sports, des loisirs et du développement social, Ville de Montréal ESPAGNE Barcelone Josep LAHOSA CANELLAS, Directeur de la Commission technique pour la sécurité urbaine, Ville de Barcelone Anna BOFILL LEVI, Architecte Rosa Maria DUMENJO, Fundació Maria Aurelia Capmany Pilar LLEDO, Fundació Maria Aurelia Capmany Alcobendas Leonardo LAFUENTE VALENTIN, Directeur de la Sécurité urbaine, Ville d’Alcobendas Luis CORTIJO MATESANZ, Conseiller municipal délégué à la sécurité urbaine José CABALLERO DOMINGUEZ, Maire d’Alcobendas KENYA Nairobi Soraya SMAOUN, Expert de sécurité urbaine, Centre des Nations Unies pour les Etablissements Humains (Habitat) PORTUGAL Lisbonne Maria Shaerman DE MACEDO, Associação de Mulheres contra a violência Monica E. Sofia ARAUJO, Associação de Mulheres contra a violência Oeiras Paula Cristina SARAIVA, Technicienne, Ville d’Oeiras Nuno Catarino ANSELMO, Coordinateur police municipale, Ville d’Oeiras ITALIE Bologne Lalla GOLFARELLI, Présidente du Forum Italien pour la Sécurité Urbaine Lorenza MALUCCELLI, Consultante, Ville de Bologne Isabella ORFANO, Consultante, Ville de Bologne Anna PRAMSTRAHLER, Associazione gruppo di lavoro e ricerca sulla violenza alle donne Silvia CALASTRI, Associazione gruppo di lavoro e ricerca sulla violenza alle donne Milena CHIODI, Région Emilie Romagne Rome Danièla MONTEFORTE, Conseillère municipale Turin Rosanna BALBO, Consultante technique secteur jeunesse, Ville de Turin Naples
Maria Fortuna INCOSTANTE, Maire-Adjointe déléguée à la politique sociale Enrico TEDESCO, Consultant, Ville de Naples
ALLEMAGNE Francfort Lieve Van den AMEELE-STELLER, Ökumenische Asiengruppe Eleonore WIEDENROTH, AGISRA Gina AGUILA, Ökumenische Asiengruppe Sylvia SCHENK, Conseillère municipale déléguée aux Droits, Sports, Femmes et Logement Ursula BRÜNNER, Service pour le développement local et l’aménagement urbain, Ville de Francfort Klaus KLIPP, Directeur du Bureau des Affaires Européennes, Ville de Francfort Beate COLIN, Bureau des Affaires Européennes, Ville de Francfort Susanne SCHAPER, Bureau des Affaires Européennes, Ville de Francfort Kiel Ursula MÜLLER, Ancienne Secrétaire d’Etat au Ministère des Femmes, de la Jeunesse, du Logement et du Développement urbain du Schleswig Holstein Ursula SCHELE, Réseau national des centres d’urgence pour les cas de viols
IRLANDE Dublin Mary HORKAN, Groupe Européen des Femmes Diplômées des Universités ROYAUME-UNI Hammersmith & Fulham June KATHCHILD, Hammersmith Women’s Aid Lucy REDLEY, Hammersmith Women’s Aid Bristol Sara LUNDIE BROWN, Consultante, Crime Concern Liverpool Lady Doreen Jones, Conseillère municipale Graham HOWARD, Inspecteur de police, Police de Merseyside Susan SIM, Commissaire de police, Police de Merseyside Carol GUSTAFSON, Direction de la police de Merseyside FRANCE Lyon Jean WERTHEIMER, Conseiller Technique Santé, Ville de Lyon Paris Jacqueline COUTRAS, chercheur au Centre National de Recherches Scientifiques Michel MARCUS, Délégué Général, Forum Européen pour la Sécurité Urbaine Clotilde TASCON-MENNETRIER, Directrice des Programmes, Forum Européen pour la Sécurité Urbaine Gwendoline MENNETRIER, Chargée de Développement, Forum Européen pour la Sécurité Urbaine Mariki ROGNON, Assistante du Délégué Général, Forum Européen pour la Sécurité Urbaine
Arcueil Damarys MAA, IFAFE Laureline DAOUST, IFAFE Villeneuve-Saint-Georges Pascale BALLATORE, Directrice Animation 94 Saint-Denis de la Réunion René LAI-HONG-TING, Maire Adjoint délégué à la Jeunesse Fort-de-France George ARNAULD, Présidente, Union des Femmes pour la Martinique Créteil Ghislaine RAMOLINO, Chargée de mission départementale aux droits des femmes, Préfecture du Val de Marne