Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

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European Forum for Urban Security

Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations De bonnes relations entre citoyens et policiers sont une condition déterminante pour permettre à la population de se sentir en sécurité et à la police de travailler efficacement et sereinement. Parce qu’elles jouent un rôle central dans la vie locale, les villes peuvent contribuer à les rapprocher, en agissant comme intermédiaires. Cette publication présente un aperçu des enjeux majeurs liés à ce sujet, ainsi que des exemples de pratiques et des recommandations.


Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Cette publication a été produite par le Forum européen pour la sécurité urbaine (Efus) et résulte du projet Improving Police-Population Understanding for Local Security (IMPPULSE), mené de 2014 à 2015. Elle a été réalisée par Carla Napolano, Véronique Ketelaer et Mark Burton-Page, chargés de mission, sous la direction d’Elizabeth Johnston, déléguée générale, et avec les contributions des experts pour le projet, Yves Van de Vloet et Caroline De Man, ainsi que des partenaires. L’usage et la reproduction sont libres de droits s’ils sont effectués à des fins non commerciales et à condition que la source soit spécifiée. Révision : Nathalie Bourgeois, Jean-Pierre Moutereau Mise en page : micheletmichel.com Impression : Cloître Imprimeurs, Saint-Thonan ISBN : 2-913181-47-3 EAN : 9782913181472 Dépôt légal : mars 2016 Forum européen pour la sécurité urbaine 10, rue des Montibœufs 75020 Paris - France Tél. : + 33 (0)1 40 64 49 00 contact@efus.eu - www.efus.eu

Ce projet est cofinancé par la Commission européenne, Direction générale Affaires intérieures - ISEC 2011 Ce document n’engage que ses auteurs et la Commission n’est pas responsable de l’usage qui pourrait être fait des informations qui y sont contenues.


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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations


Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Remerciements

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Le projet IMPPULSE a été mené à bien grâce à l’implication des représentants des villes partenaires – Amiens (France), Aubervilliers (France), Barcelone (Espagne), Lisbonne (Portugal), Milan (Italie), Nantes (France), Toulouse (France) – et de la zone de police Bruxelles Capitale Ixelles (Belgique). Nous remercions les élus et leurs collaborateurs d'avoir partagé leur expérience et leurs connaissances, ainsi que les experts du projet pour leur précieuse contribution. Outre la Commission européenne et son soutien financier, sans qui ce projet et cette publication n’auraient pas pu voir le jour, nous souhaitons également remercier toutes les personnes qui nous ont reçus lors des visites de terrain ou qui sont intervenues lors de la conférence finale à Bruxelles, les 16 et 17 novembre 2015.

Partenaires du projet : Gilles Nicolas, Lionel Edmond (Nantes, France), Clément Stengel, Loïc Résibois (Amiens, France), Jean-François Monino, Patrick Lebas, Lucie Chevalley (Aubervilliers, France), Cécile Lafontan (Toulouse, France), Bettina Merelle (Bruxelles, Belgique), Marco Granelli, Andrea Carobene (Milan, Italie), Josep M. Lahosa, Elena Más (Barcelone, Espagne), Carlos Manuel Castro, Paulo Caldas, Maria Manuel Monteiro, Carmen Ávila (Lisbonne, Portugal).

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Experts : Caroline De Man, Yves Van de Vloet (Belgique), Chris Williams (Royaume-Uni), Roger Vicot, Vanina Hallab, Hibat Tabib (France), Yves Patrick Delachaux (Suisse).

Autres personnes rencontrées : Mauro Carbone, Roberto Cerrato, Antonio Degiacomi, Giancarlo Drocco, Serena Miguel Belo, Cláudia Cruz, Mónica Diniz , Joaquim Gordicho, Cristina Rocha, Ulrich Schiefer (Ville de Lisbonne), Maura Gambarana, Tullio Mastrangelo, Antonio Barbato (Ville de Milan), Dominique Lopez, Gaëlle Lancelot (Ville de Nantes), Philippe Close (Ville de Bruxelles ), Christine Vanriet, Patrick Declerck, Jean-Marc Huart, Christophe Slits (zone de police Bruxelles Capitale Ixelles, Belgique), Noemí Canelles, (Barcelone), Evaldas Visockas (Law Institute of Lithuania), Nicolas Niscemi (AFPAD), Els Enhus (faculté de criminologie, VUB, Belgique), Patrick Charlier (Centre interfédéral belge pour l’égalité des chances), Frank Schoenmakers (association bruxelloise Maison Arc-en-Ciel), Khaled Boutaffala (association Atmosphères, Belgique), François Peybernes (Allô Toulouse), Claude Lizotte (police de Montréal, Canada), Rebekah Delsol (Open Society Justice Initiative), Émile Dejehansart (Comité permanent de contrôle des services de police, Belgique), Sybille Smeets (faculté de criminologie, ULB, Belgique), Arnaud Colombié (secrétariat général du Comité interministériel de prévention de la délinquance, France), ainsi que les agents de la Guardia Urbana de Barcelone, Espagne, et les enseignants et professionnels des centres juvéniles Submari i Martí et Codolar ainsi que les jeunes qui ont participé au projet.

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Sommaire

>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Avant-propos................................................................. p. 8 Introduction.................................................................p. 10 Chapitre 1 : Constats et enjeux ..................................p. 13 I. Agir sur les causes de la criminalité et la prévenir : une approche partagée à l'échelle internationale.......................... p. 14 II. Une police proche des citoyens, polyvalente et responsable ..... p. 19

 Le maillage territorial............................................................... p. 19  Le partenariat........................................................................... p. 20  Le développement de la polyvalence ........................................ p. 22  Responsabilisation et qualité du travail policier ...................... p. 24  La police de proximité : une priorité ? ...................................... p. 26

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Chapitre 2 : Des réponses............................................p. 31 I. Formation des policiers en contact avec les citoyens.................. p. 33 II. Sensibilisation des citoyens au rôle de la police ....................... p. 39

 Améliorer les relations police-population par un travail sur les représentations mutuelles et une meilleure compréhension du rôle de la police par le citoyen ..................... p. 39

 Développer une stratégie de communication spécifique vers le public et les médias................................................................... p. 41 III. L’approche ciblée par groupe de population............................ p. 57

 Projets ciblant un aspect ou groupe spécifique dans les relations police-population.......................................... p. 57

 Relation police-jeunes et autres publics cibles.......................... p. 58  Participation des habitants........................................................ p. 71

Chapitre 3 : Recommandations .................................p. 77

Chapitre 4 : Pistes pour la mise en œuvre et l’évaluation .............................................p. 85 Fiches pays ................................................................. p. 95 Références et bibliographie....................................p. 129

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Avant-propos

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Depuis plus d’une quinzaine d’années, de nombreuses villes européennes réunies au sein du Forum européen pour la sécurité urbaine s’interrogent sur les déterminants des relations entre la population et la police, ainsi que sur les outils et pratiques à leur disposition pour les renforcer. Les relations entre ces deux acteurs clés de la sécurité urbaine sont trop souvent marquées par des tensions au quotidien (accueil dans les commissariats, audition de victimes, etc.), ou parfois même des conflits autour d'événements exceptionnels. Or, l’objectif d’une relation police-population sereine est fondamental pour permettre aux citoyens de se sentir en sécurité et à la police de faire son travail avec sérénité et efficacité. La collectivité dans son ensemble bénéficie ainsi d’un climat apaisé. En tant que tiers, la ville peut jouer le rôle d’intermédiaire pour contribuer à améliorer ces relations. Par la mise en place et l’animation d’instances de concertation représentatives de l'ensemble de la population, et notamment des groupes les plus éloignés des institutions, ainsi que l’encadrement de cette participation, les élus locaux peuvent contribuer à l’apaisement des tensions et faciliter le dialogue entre la police et la population. En tenant compte des différents contextes d’organisation des polices, de la culture et de l’histoire propres à chaque pays, de la diversité des ressources mobilisables et des doctrines de police, nous avons souhaité, par ce projet, répondre aux questions suivantes : quelles sont les clés d’une bonne relation police-population ? Comment des projets portés par des autorités locales peuvent-ils contribuer à renforcer cette relation, voire à la rétablir dans les cas extrêmes ? Nous avons cherché à proposer des réponses concrètes, sans pour autant qu’elles soient exhaustives ou prescriptives.

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Le projet IMPPULSE a démontré que toute initiative visant l’amélioration des relations population-police doit être coconstruite et intégrée dans une stratégie à long terme. Le travail au niveau européen et la prise de distance qu’il implique ont permis une analyse constructive d’un sujet souvent sensible politiquement lorsqu’il est abordé à l’échelle nationale et locale. Cependant, ce projet n’est qu’une étape d’un travail plus large qui doit impliquer de nombreux autres acteurs et institutions. Nous espérons qu’il sera le point de départ de futures collaborations, tant au niveau local que national et européen. Elizabeth Johnston Déléguée générale

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Introduction

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les termes du débat concernant les relations entre la police et la population ne sont pas strictement identiques à travers l’Europe et dépendent des contextes administratifs et politiques, des modes de fonctionnement des institutions policières, des compétences allouées aux forces de police ainsi que des différences culturelles en ce qui concerne l'implication, voire la participation, des habitants aux politiques publiques et notamment celles qui ont trait à la sécurité urbaine. Mais au niveau local, la question du lien police-population en Europe se pose en des termes assez similaires puisque les préoccupations quotidiennes des citoyens sont relativement semblables. Ainsi les autorités locales, au plus proche des problèmes quotidiens, trouvent un intérêt dans la comparaison des initiatives à travers l’Europe. La question du lien entre police et population revient à poser la question de la police de proximité (comment la police agit avec la communauté ?) mais aussi la question de la perception qu’ont les citoyens de leur police (ce qui renvoie à leur confiance dans la capacité de la police à traiter effectivement les problèmes locaux) et enfin celle de l’implication des citoyens dans l’action de la police (ce qui renvoie à la question de l’implication des habitants dans les politiques publiques en général et celles de prévention et sécurité en particulier). La publication Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations résulte des travaux menés entre 2014 et 2015 dans le cadre du projet européen IMPPULSE. À partir de l’expérience des villes partenaires du projet – Amiens, Aubervilliers, Nantes, Toulouse (France), Barcelone (Espagne), la zone de police de Bruxelles Capitale Ixelles (Belgique), Milan (Italie) et Lisbonne (Portugal) – et du point de vue d’experts qui ont accompagné les travaux, elle présente un aperçu des enjeux majeurs liés au rôle des villes dans l’amélioration des relations police-population.

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Cette publication a pour but de présenter des exemples de projets pilotes pouvant contribuer à améliorer ces relations à court et moyen terme. Ces projets pilotes ont été conçus à partir des besoins locaux des villes partenaires et ils ont été réalisés avec l’accompagnement d’experts européens. Elle comprend aussi des pistes et des indicateurs d’évaluation susceptibles d'être utilisés par toute collectivité européenne confrontée à ces enjeux. Enfin, elle présente une série de recommandations établies par les villes européennes ayant participé au projet.

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Chapitre 1

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Constats et enjeux

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I. Agir sur les causes de la criminalité et la prévenir : une approche partagée à l'échelle internationale

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La volonté des gouvernements locaux, nationaux et européens d'améliorer les relations police-population n’est pas nouvelle. Elle répond aux interrogations des citoyens sur le rôle aussi bien préventif que répressif que doit jouer la police, et plus particulièrement celles des membres de la société civile engagés dans des pratiques associatives destinées à renforcer la cohésion sociale et à réaffirmer le droit de vivre dans un espace public convivial et sûr. En effet, on constate que la société civile est de plus en plus vigilante et exigeante envers la police, et surtout, qu'elle se fait entendre. Ces approches préventives se sont traduites depuis une vingtaine d’années par une volonté de développer de nouvelles doctrines, dont celle fondée sur le partenariat police-population, une meilleure connaissance des territoires concernés et une conception nouvelle de l’organisation policière, notamment par la décentralisation dans les quartiers. Le concept anglo-saxon de community policing se fonde sur les principes de la « police par consentement » définis en Grande-Bretagne au xixe siècle par Sir Robert Peel et selon lesquels le policier est un citoyen en uniforme agissant pour et au sein de la population, avec le consentement de cette dernière. Le community policing a contribué, notamment dans les pays anglo-saxons, à l’émergence de dynamiques nouvelles parmi lesquelles « l’élargissement du mandat de police, une meilleure prise en compte des demandes sociales, un partenariat renforcé avec le public et les autres acteurs institutionnels de la sécurité, la territorialisation de l’action et la décentralisation organisationnelle1 ». Dans cette logique, les phénomènes de délinquance sont contextuali1-David Lloyd-Williams, Polices de proximité : les pouvoirs locaux et régionaux garants d'un nouveau partenariat, Rapport de la Commission de la cohésion sociale, 14e session plénière, Congrès des pouvoirs locaux et régionaux

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sés et mis en rapport avec un contexte socio-économique défavorisé et une dégradation des équipements urbains. Ces approches inspireront les politiques de prévention en Europe. En France, la proximité est considérée comme une priorité de la police urbaine dès 1992. En 1997, le colloque de Villepinte abordera la « coproduction de la sécurité au plus près du citoyen2 ». En Belgique, le concept de community policing est emprunté au modèle anglo-saxon et aux expériences néerlandaises. Cinq principes-clés sont préconisés :

 l’orientation externe, c'est-à-dire une meilleure insertion de la police au sein de la population et l’identification des besoins et attentes ;

la résolution de problèmes ; le développement du partenariat ;  l’accountability qui vise la justification de l’action de la police, donc une politique de transparence et l’obligation de rendre des comptes ;

 l’empowerment qui élargit le mandat de la police et la rend responsable de répondre aux demandes du public et de l'orienter vers les services adéquats3. En Italie, le décret du 24 novembre 2000 spécifie le rapprochement entre la police d’État et les habitants. Des expériences d’îlotage seront ainsi menées par diverses polices municipales notamment à Modène, Turin et Milan. L’Espagne, pour sa part, adoptera le Plan Policía 2000 par lequel la police communautaire devient la référence. Cette volonté de déployer une police de proximité se retrouvera aussi dans l’organisation de la police canadienne, notamment la Gendarmerie royale qui assure un rôle de police de proximité dans les zones rurales et les provinces. Le ministère de la Sécurité publique du Québec adoptera un projet de politique ministérielle en décembre 2000 qui résultera d’une large concertation des partenaires municipaux, policiers et communautaires. Ce document est notamment intéressant parce qu'il reprend les quatre grands principes de la police de proximité :

2-Ministère français de l'Intérieur, « Des villes plus sûres pour des citoyens libres », actes du colloque de Villepinte, 24 et 25 octobre 1997 3- Seron V., Smeets S., Smits M., Tange C., Police de proximité : un modèle belge entre questions et pratiques, Politeia, Centre d'études sur la police, 2003

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 Le rapprochement avec les citoyens : « Plus visible, plus proche des habitants dans leur milieu, la police communautaire parvient souvent à réduire le sentiment d’insécurité et à mettre en confiance la population. »

 Le partenariat avec d’autres institutions : « Il s’agit donc d’établir une collaboration fonctionnelle entre les partenaires issus de milieux variés et animés par des préoccupations diverses. Ce partenariat est à construire et situe les services policiers au sein d’un réseau d’organismes et d’institutions capables d’apporter des contributions significatives à la compréhension des phénomènes de criminalité et de l’insécurité à l’échelle locale. »

 L’approche de résolution de problèmes : « Cette approche fait appel à des méthodes d’analyse des délits survenus, afin de produire des diagnostics et des états de sécurité pour les territoires desservis. Ces méthodes consistent à regrouper et analyser minutieusement des problèmes parfois sans rapport apparent, à trouver des causes communes ou des convergences et à mettre en œuvre de façon planifiée, rigoureuse et évaluée des solutions appropriées. »

 Le renforcement des mesures préventives : « Pour prévenir la criminalité, il est admis que les interventions doivent cibler de façon simultanée et complémentaire chacun des facteurs qui en sont à l’origine. Il est aussi admis que la police n’a pas de compétence pour intervenir sur chacun de ces facteurs et de surcroît que son influence est marginale sur des facteurs liés au développement social et économique4. »

>> Au-delà du concept de police de proximité, quelles réalités après quelques années de mise en pratique ? Au cours des vingt dernières années, on a noté une évolution de la police qui, alors qu'elle était avant tout réactive et occupée à arrêter les criminels et les déférer en justice, est devenue plus attentive à prévenir les faits criminels notamment en développant des approches de pré-

4- Vers une police plus communautaire, ministère de la Sécurité publique du Québec, décembre 2000

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vention sociale (initiatives avec les associations de quartier, les écoles, les groupements de victimes) et de prévention situationnelle. La police a ainsi déployé des mesures de technoprévention notamment en matière de prévention du cambriolage, de lutte contre les vols de voiture ou en installant des réseaux de technosurveillance. Les concepts de community policing, de police de proximité, du travail d’îlotier et de police de quartier caractérisent aujourd'hui la plupart des services de police en Europe et en Amérique du Nord. Ils se sont également étendus aux pays qui étaient jusqu'à récemment gouvernés par des régimes autoritaires et ont évolué vers des systèmes plus démocratiques (Europe centrale, Afrique du Nord), ce qui les a amenés à repenser leur organisation policière. Notons ainsi l’édition d’un Guide pour une police démocratique à l’initiative de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE5). Le guide précise : « Une des caractéristiques majeures de l’exercice démocratique de la police réside dans l’idée que le consentement du public est indispensable. Les conditions préalables pour le soutien du public sont :

la transparence des opérations de police ;  le maintien de la communication et une bonne compréhension mutuelle avec la population que la police a la charge de servir et de protéger. » On peut également mentionner la position de l'ONU Femmes à propos de la police communautaire : « Celle-ci est axée sur les collectivités, les communautés ; elle est à la fois un concept et une stratégie organisationnelle selon lesquels les forces de police et les communautés œuvrent de concert pour résoudre les problèmes liés à la criminalité, aux perturbations de l’ordre et à la sécurité pour améliorer la qualité de la vie pour tous les membres de la communauté considérée6. »

5- « Standards internationaux relatifs aux forces de police : Guide pour une police démocratique », Centre pour le contrôle démocratique des forces armées, Genève, 2009 6-« Police communautaire, Centre virtuel de connaissances pour mettre fin à la violence contre les femmes et les filles », ONU Femmes, 2010

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>> Un premier bilan de l’approche des relations police-population Si l'on peut distinguer des tendances communes d'un pays à l'autre, l'exercice consistant à dresser un état des lieux de l'approche relations police-population à l'échelle internationale est limité par deux facteurs : un champ de recherche particulièrement vaste et un manque d’analyse comparée des pratiques initiées à la suite des réformes des services de police. En effet, certains pays ont une police décentralisée, ou organisée à l’échelon local, telle la Belgique, ou bien encore au niveau supracommunal telle l’Allemagne avec ses 16 polices des Länder. Outre-Atlantique, les États-Unis ont des forces de police locales (Local Enforcement Agencies), de même que le Québec. En revanche, d'autres pays ont gardé une tradition de police nationale, bien qu'ouverte à une certaine décentralisation, comme la France, l’Espagne et l’Italie. Ces pays disposent aussi de polices locales et municipales mais dont les compétences restent limitées notamment en matière judiciaire et d’ordre public. Il est donc impossible, au niveau international, d’apporter une analyse commune de l’état des relations que tissent les services de police avec les populations qu’elles sont censées servir. Au travers de contacts avec différents services de police, des groupes de citoyens, des chercheurs et des élus, nous avons repris les principes de police de proximité partagés par les corps de police de plusieurs pays en les confrontant à des pratiques vécues. Ces principes ne sont toutefois pas à considérer comme isolés ou dissociés d’autres tâches de base dont la recherche des auteurs de délit, les enquêtes judiciaires, la lutte contre le crime organisé ou le maintien de l’ordre public. Comme le souligne David Lloyd-Williams, qui a administré pendant dix ans la police locale du comté de North Yorkshire au Royaume-Uni et intervient souvent comme consultant sur ces questions, « la police de proximité ne s’appuie pas sur un mandat précis mais au contraire sur la polyvalence des compétences et des interventions des agents pour leur permettre de répondre de façon complète et adaptée à l’ensemble des sollicitations dont ils sont l’objet. À ce titre, la police de proximité n’est ni préventive, ni dissuasive, ni répressive ; elle est tout à la fois7. »

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Nous avons opté pour comparer diverses pratiques policières en les mettant en relation avec les principes fondateurs de la police de proximité tels que définis par la France, la Belgique et le Québec.

II. Une police proche des citoyens, polyvalente et responsable

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> 1. Le maillage territorial >> Territoire social, territoire policier ? La territorialité, espace de rencontre entre la police et la population Le découpage de certains territoires du point de vue policier correspond à des zones administratives qui peuvent, selon les cas, recouper les limites d’une commune, d’une municipalité, des secteurs, des divisions, des îlots définis par une cartographie administrative policière qui ne coïncide pas nécessairement avec les territoires vécus par les citoyens. Par ailleurs, à l’échelon des villes, les territoires sont aussi fonction des déplacements et des pôles d’attraction d'une population en mouvement (zones de commerce, concentration de lieux de loisirs…). Une méconnaissance de la géospatialisation des flux de population peut engendrer une inadaptation de la localisation des activités de police : « Il est essentiel de comprendre les interactions entre la police et les habitants y compris lorsque ceux-ci se déplacent d'un quartier à l'autre8. » Ce manque d'approche sociospatiale est dans le meilleur des cas compensé par les connaissances acquises sur le terrain par les policiers disposant déjà d’une certaine expérience de quartier. Il est toutefois essentiel que la police renforce ses moyens d’analyse pour, non seulement localiser les crimes et délits, mais aussi intégrer

7- David Lloyd-Williams, Polices de proximité : les pouvoirs locaux et régionaux garants d'un nouveau partenariat, rapport de la Commission de la cohésion sociale, 14e session plénière, Congrès des pouvoirs locaux et régionaux 8- Easton M. Multiple community policing, why?, Université de Gand, Academia Press, 2009

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des paramètres pertinents comme l'heure à laquelle les faits sont commis. Ceci permet une analyse stratégique et l’adaptation de la présence policière à la situation réelle, sur le terrain. Il en va de même pour le flux d’informations entre les services de quartier et les services de recherche. Il a été constaté ponctuellement des réticences à échanger des données, ce qui provoque des tensions entre policiers de quartier et collègues affectés aux analyses et recherches. Notons que la police de quartier bien implantée a une bonne connaissance de terrain de son espace d’intervention et sera attentive à certaines anomalies telles que la présence de certains véhicules étrangers au quartier ou les inquiétudes exprimées par des commerçants ou responsables d’association. La réalisation de diagnostics locaux de sécurité reprenant la typologie des quartiers (population, âge, bâti, équipements…) mais aussi les constats effectués par des intervenants non-policiers (les seringues découvertes par les agents de la propreté, les graffitis, les destructions et atteintes au mobilier urbain…) constitueront la base d’outils d’analyse.

2. Le partenariat Il est important que la police ait un contact permanent avec la population : en effet, la police ne se situe pas en face de la société mais en son sein. Les défis à relever pour les services de police mettent en évidence qu’il est illusoire et erroné d’imaginer qu'ils peuvent résoudre des problèmes tels ceux engendrés par l’absentéisme scolaire, les violences intrafamiliales, l’économie parallèle, les conflits interethniques, le trafic de stupéfiants, ou encore les mouvements radicaux. S’il revient aux services de police de prévenir et de lutter contre ces phénomènes, ils ne peuvent être seuls responsables de cette prévention : ils n’en ont ni les moyens ni la légitimité. Un partenariat avec les habitants, usagers de l’espace urbain, est pertinent mais encore faut-il être en mesure de le construire. De plus, cette culture partenariale doit être partagée par l’ensemble des services de police et non pas seulement par les policiers affectés aux quartiers. Enfin, il est tout aussi important que la hiérarchie policière prône ces partenariats comme

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faisant partie intégrante d'une démarche visant à rapprocher la population et la police. Pour être légitime, un tel partenariat doit refléter la diversité des interlocuteurs et ne peut reposer sur les seuls acteurs en demande d’initiative policière. Il est donc important de construire des partenariats qui ne soient pas seulement proposés aux seuls interlocuteurs désireux de travailler avec la police et de reconnaître la diversité de la population en se gardant de stigmatiser certains individus ou groupes qui ont une perception négative de la police. « Une action policière qui s’appuie sur la concertation est difficile là où la population est fragmentée en races, classes et modes de vie différents. Si, au lieu de rechercher des intérêts dans cette diversité, la police travaille avec des individus de son choix, elle ne sera plus neutre. Il est aisé pour les policiers de centrer la police communautaire sur l’assistance aux personnes avec lesquelles ils ont des affinités ou dont ils partagent les vues. Les priorités locales qu’ils signalent alors seront celles d’une partie de la communauté et non de la communauté entière9. » Le partenariat ne naît pas spontanément. Certaines parties de la population ne le souhaitent pas, ayant parfois eu de mauvais rapports avec les services de police, par exemple un accueil inadapté au commissariat ou des contrôles répétés perçus comme stigmatisants. En outre, certaines populations étrangères peuvent éprouver de la méfiance parce qu'elles ont le souvenir d'expériences négatives avec la police de leur pays d’origine, surtout s'il s'agit de zones de conflit ou de pays non démocratiques où la police est plutôt perçue comme une menace. On peut affirmer une volonté de travail partenarial, encore faut-il reconnaître la diversité des populations caractérisées par des valeurs, des statuts sociaux et des droits différents. Sinon, les partenariats seront limités et cosmétiques. Des partenariats police-population ont pu se développer sur des thèmes précis avec l’engagement volontaire des partenaires, les parrainages de classes qui permettent aux policiers de rencontrer les écoliers, de leur expliquer leurs missions, mais aussi de mieux mesurer les problèmes vécus dans les familles. Les policiers

9- Loubet Del Bayle J.L., « Police et proximité ou le paradoxe du policier », Cahiers de la sécurité, n° 4, avril-juin 2008

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peuvent participer à des événements culturels et cultuels qui leur permettent d’approfondir leurs connaissances des différentes communautés. C’est également le cas des expériences associant des jeunes, des familles et la police lors d’activités sportives et de loisirs en période de vacances scolaires. De telles initiatives partenariales contribuent à établir ou renforcer un dialogue police-population. Les policiers peuvent ainsi mieux comprendre les attentes et réticences de la population en matière de sécurité, tandis que les citoyens peuvent mieux appréhender la complexité des missions de la police. 3. Le développement de la polyvalence >> Réinventer une police avec une approche intégrée associant prévention, dissuasion, répression et sanction Les approches préventives, dissuasives et répressives ont souvent été présentées comme séparées, voire contradictoires. Trop souvent encore, le débat sur le rôle de la police est posé en termes antinomiques : soit le tout préventif, soit le tout répressif. Ce débat concerne tout autant ceux chargés de l’organisation interne de la police que les acteurs mandatés pour développer une approche centrée sur la cohésion sociale tels les services de prévention municipaux, les services d’encadrement et d’aide à la jeunesse ou les associations de citoyens. L’émergence de faits délictueux majeurs, d’affrontements avec les services de police, ou la publication de statistiques de criminalité renforcent l’opinion selon laquelle l’approche préventive est secondaire, voire inefficace dans le travail policier. On a pu caricaturer le travail de proximité comme un travail social s’éloignant des missions principales de la police. À l'inverse, d’autres élus attribuent la dégradation du climat dans certains quartiers à l’éloignement des policiers de la population, ce qui, arguent-ils, engendre un climat de défiance propice à la multiplication d’incidents. Dans la réalité, la police doit être polyvalente et répondre aux problèmes par diverses approches, qu’elles soient de type préventif ou ré-

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pressif. Il en va ainsi de la réappropriation de l’espace, de la visibilité des services et de l’anticipation des actes délictueux. Une analyse de la situation vécue dans des polices locales belges laisse apparaître une tension entre les tenants du crime fighting, c'est-à-dire la police centrée sur résultats quantifiables (la mesure des arrestations et des mises à disposition du parquet), et les policiers affectés au travail de proximité. « L’image que les policiers se font de leur travail demeure très nettement celle du crime fighting tandis que les tâches les plus éloignées de ce modèle, et par extension les services et les policiers (de quartier) désignés pour incarner cette police de proximité, sont dévalorisés et considérés comme archaïques10 ». Il apparaît pour certains tenants d’une police plus offensive que le travail de proximité est secondaire, voire peu légitime. Certaines polices voient ainsi se développer un réel fossé entre la police de quartier et les services d’intervention. Il en découle des tensions au sein d’un même corps de police. Il convient ainsi de relever pour exemple que le travail de proximité mené de longue haleine dans certains quartiers sensibles a pu être mis à mal par l’inadéquation de l’approche d'autres services du même corps de police dont la mission est le maintien de l’ordre ou l’engagement de renforts, ceux-ci ayant agi sans concertation avec leurs collègues de la proximité. La volonté de développer la police de proximité se voit de plus en plus souvent mise à mal lorsque sont ponctionnés des effectifs affectés au travail de quartier notamment pour assurer des missions de maintien de l’ordre ou d'autres activités. Tange précise : « La polyvalence est également interprétée comme synonyme de « bon à tout faire » justifiant dès lors de confier à l’inspecteur de quartier les tâches que d’autres ne veulent pas réaliser ou de faire de ce dernier un réserviste pour d’autres services11 ». Cette tendance à invalider le travail de police de proximité a été mise en évidence dans le plan national de sécurité belge qui en a tiré une recommandation : « Il convient de noter que le travail de quartier, qui est essentiel pour le maintien de la sécurité dans les zones de police 10- Smeets C. et Tange C., Le community policing en Belgique : péripéties de la constitution d'un modèle de travail policier, International police executive symposium, 2009 11- Ibid.

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(polices locales), doit être encouragé. Il est en effet souvent encore perçu comme peu valorisant par les agents et parfois sacrifié par l’autorité au profit de tâches jugées plus urgentes ou indispensables. Le contenu de ces missions devrait être mieux défini et faire l’objet de normes précises en vue d’une plus grande harmonisation dans les zones de police12. »

4. Responsabilisation et qualité du travail policier Il revient à la police de garantir à tous les habitants le droit à la sécurité, avec un souci de traitement égal. Le travail policier doit s’inscrire dans l’amélioration des services à la population et intégrer des enjeux sociétaux en constante évolution. Ce travail est d’autant plus complexe que les citoyens en ont une perception qui dépend pour une bonne part de leur expérience vécue dans leurs rapports avec la police. On constate aussi une tendance selon laquelle la police doit être en mesure de répondre à chaque dysfonctionnement ou problème. Il y a donc lieu de mesurer les limites du travail policier et de resituer la place de la police par rapport aux responsabilités de la justice, des élus et des citoyens. Par exemple, l’application des lois et règlements en matière d’absentéisme scolaire ne pourra être efficace sans une réflexion sur le sens de la scolarité et des débouchés professionnels. Dans un tel schéma, la police s’inscrira dans un partenariat avec les écoles, les structures d’accompagnement pédagogique et les parents. Il en va de même en matière de politique d’immigration. Il revient aux services de police, qui sont chargés d’appliquer les lois en matière de permis de séjour et de travail, d’être à l’écoute de tous les citoyens sans distinction de race, de sexe ou de nationalité. Dans le contexte actuel d'afflux massif de réfugiés en Europe, le rôle de la police paraît vertigineux alors que les autorités peinent à gérer ces flux migratoires dans un contexte international incertain. Il en va de même pour les défis liés au droit au logement ou au travail. 12- Plan national de sécurité belge 2012-2015.

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Comment mener un travail de police efficace avec des populations fragilisées, marquées par un chômage massif et susceptibles d'entrer dans des circuits économiques illégaux ou des trafics de main-d’œuvre, sans agir en concertation avec les services non policiers ? Le contexte budgétaire des États, des villes et des entités fédérées confrontés à l’effondrement des ressources publiques conduit à un sous-financement des politiques publiques y compris celles liées à la sécurité. Des choix se posent déjà entre la poursuite des initiatives de prévention et de police de proximité et la lutte contre le crime organisé ou le trafic de main-d’œuvre. Des voix se font entendre pour souligner que les initiatives de la police en matière de police de proximité arrivent à leurs limites notamment avec le redéploiement d’effectifs affectés à la lutte contre le terrorisme, le radicalisme et le crime organisé, au point de mettre en péril le travail de proximité mené depuis plusieurs années. Preuve en est la stagnation, voire le recul, des projets de prévention au niveau européen au profit de la réorientation des fonds vers des initiatives de contrôle aux frontières extérieures de l’Europe, comme l’illustre le programme Frontex. Le développement d’une politique policière centrée sur les liens policehabitants se voit hypothéqué au profit d’approches plus centralisées, coercitives et déconnectées du travail policier de quartier.

>> Les services de police sont-ils aujourd'hui à même de répondre aux attentes des citoyens ? Ne devons-nous pas craindre, étant donné le transfert de nombreuses missions spécialisées, que les services de police ne soient plus en mesure de répondre aux attentes légitimes des citoyens ? Comme le soulignait le commissaire divisionnaire belge Claude Bottamedi, « il semble toutefois que les attentes du citoyen, certes plurielles, voire contradictoires, mais au cœur de la légitimité de l’action policière, ne constituent pas la véritable priorité contrairement à ce qui est souvent dit au public. Les attentes des citoyens concernent les incivilités, les conflits de voisinage, les troubles à l'ordre public, mais elles ne sont pas prioritaires dans les politiques policières locales13 ».

13- « Une police de proximité qui s'éloigne de plus en plus », Claude Bottamedi, La Libre Belgique, 25 mai 2011

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

>> Une police « déresponsabilisée », entre le marteau et l’enclume ? La nature des questions à traiter peut conduire à un repli des politiques policières vers le tout répressif. Dans ce cas, les défaillances des réponses seront attribuées aux politiques, à la justice et aux institutions incapables de faire garantir l’application de la norme. Monjardet illustre cette évolution en ces termes : « En substance, le corps de police revendique des moyens supplémentaires pour faire face à la montée de la délinquance, en obtient et, accroché à une conception purement répressive de son activité, renvoie toute autre responsabilité sur la société en amont (famille et école défaillantes dans leur fonction de socialisation) et la justice en aval (qui sanctionne trop faiblement). Pour une grande majorité des policiers, la prévention consiste à arrêter les délinquants et les remettre à la justice. Pour eux, toute mission qui va au-delà menace de diluer le métier policier dans un travail social indifférencié. Pour les élus au contraire, qui se font l’écho de leurs électeurs, ce qui importe n’est pas que le crime soit élucidé mais qu’il soit prévenu14. »

5. La police de proximité : une priorité ? L’activité de police de proximité apparaît comme tout à fait fondamentale pour permettre de bonnes relations entre la police et la population. Lors de leurs nombreux échanges au cours du projet IMPPULSE, les villes partenaires ont souligné que la qualité des relations police-population concerne toutes les fonctions des services de police, qu'il s'agisse de l'intervention, du travail judiciaire, du maintien de l'ordre ou de missions d'accueil dans les commissariats et de prise en charge des victimes. De plus, les villes ont souligné que la recrudescence du crime organisé, des attentats terroristes et de la radicalisation – dont les manifestations touchent la plupart des villes européennes (Madrid, Londres, Oslo, Copenhague, Paris et Bruxelles notamment) – a entraîné une forte demande de réaffectation des effectifs. Or, s'il est évident que la police doit s'adapter à l'évolution des phénomènes qu’elle est censée prévenir et combattre, on peut s’inquiéter sur les moyens restant dis14- « Réinventer la police urbaine. Le travail policier à la question des quartiers, au risque des espaces publics », Les Annales de la recherche urbaine, n° 83-84

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ponibles pour la bonne mise en œuvre des missions de police de proximité. Il serait erroné de considérer que les effectifs de police doivent être mobilisés en priorité sur la lutte contre le terrorisme et la grande criminalité. En effet, cette option est d'autant plus infondée qu'en matière de terrorisme, les forces de police ne peuvent travailler à l'aveugle et que, justement, le travail de proximité est essentiel pour recueillir des informations, par exemple le relevé de plaques minéralogiques suspectes ou les renseignements obtenus lors de réunions de quartier avec les acteurs locaux ou lors de patrouilles pédestres dans les quartiers. Ces renseignements sont ensuite analysés en profondeur par les services spécialisés, qui les croisent avec d'autres données issues d'autres services de police ou de recherche, notamment en matière de finances ou de logement des suspects. En effet, dans la foulée des attentats de 2015, les investigations policières ont mis à jour des ramifications d'organisations terroristes dans certains quartiers de Paris et de sa banlieue et de la région bruxelloise. Un certain nombre de suspects et d'auteurs étaient issus de ces communes où ils vivaient, se déplaçaient et avaient tissé des réseaux de solidarité négative sur fond de délinquance urbaine Or, les travaux menés lors du projet IMPPULSE ont mis en évidence que, bien que les élus locaux continuent de considérer les relations police-population comme prioritaires, le soutien institutionnel envers la police de proximité est de façon générale moins important aujourd’hui qu’il y a quelques années.

>> Le financement de la police dans ses tâches de police locale Il est intéressant de comparer deux modèles fort différents de financement : le belge et le français. En Belgique, la loi de 1998 sur la fonction de police précise que « le service de police intégré garantit aux autorités et aux citoyens un service minimal sur l'ensemble du territoire du Royaume. »

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

La police belge est organisée selon le concept de police intégrée à deux niveaux : la police fédérale, qui compte près de 16 000 agents, agit sur l'ensemble du territoire pour des missions spécialisées dont la police des frontières, la lutte contre le terrorisme ; la police judiciaire pour sa part agit en appui aux 195 polices locales notamment pour les enquêtes couvrant l'ensemble du territoire. Quant aux forces de police locale qui comptent plus de 33 agents, elles assurent des fonctions telles que l'intervention, la recherche locale, la police de quartier, le maintien de l'ordre et l'assistance aux victimes. Cette police locale mène des missions d'appui à la police fédérale notamment en matière d'ordre public. Les élus locaux disposent ainsi de policiers locaux compétents tant en matière de police administrative que de police judiciaire et peuvent solliciter l'appui de la police fédérale, qui peut à son tour solliciter l'appui des police locales dans certaines circonstances. Ces dernières années, les élus locaux ont exprimé leur préoccupation face au cofinancement des polices locales, assumé à plus de 60 % par les villes et communes, et la mobilisation des effectifs locaux pour des missions d'appui à la police fédérale. Le constat général est que le travail de quartier est le talon d'Achille de la réforme. Aussi, l’Union des villes et communes a-t-elle appelé à une intervention complémentaire de l'État fédéral. Cette situation est d'autant plus complexe que les communes les plus riches peuvent engager des dépenses complémentaires de police alors que les plus fragiles sur le plan socio-économique ne sont plus en mesure d'augmenter leur cofinancement. En France, il n’existe pas de statistiques comptables sur la police locale, mais il est vrai que contrairement à la Belgique, les polices municipales ne sont pas compétentes en matière de police judiciaire ni de maintien de l'ordre. Face à l’évolution de la délinquance et à la demande citoyenne de sécurité, et alors que la police nationale et la gendarmerie ne peuvent couvrir tous les aspects de la police de proximité, de nombreux maires ont choisi de renforcer leur police de proximité ou de s’appuyer sur la vidéosurveillance, ou les deux.

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La part des collectivités locales dans les dépenses de sécurité a progressé au cours de la décennie 2005-2015, une tendance qui est vouée à augmenter face à la demande de sécurité et en fonction des nouvelles missions qui pourraient être allouées aux maires en la matière. Mais l’endettement de nombreuses communes françaises peut les conduire à faire des choix qui ne correspondent pas au besoin de développer un rapport positif entre citoyens et policiers. Ces nouvelles approches qui impliquent plus directement les élus locaux dans les politiques de sécurité ne peuvent dégager la police nationale et la gendarmerie de leur responsabilité en matière de police de proximité. Actuellement, plusieurs pays européens envisagent de confier des missions de police à des sociétés de sécurité privées, ce qui soulève des questions éthiques, ne garantit pas une meilleure qualité de service et ne comble pas, en tout état de cause, le déficit de liens police-population. Sans compter qu’une telle option n’est pas nécessairement plus économique.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

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Chapitre 2 >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

Des rĂŠponses >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Les projets pilotes développés par les partenaires se fondent sur le constat que les relations police-population sont souvent compromises par des causes telles qu’une méconnaissance du rôle et des compétences de la police de la part des citoyens, un manque de formations spécifiques pour les policiers, les difficultés rencontrées par la police pour pouvoir réagir face aux délits mineurs, ou encore de trop rares opportunités de dialogue et de débats entre les citoyens et la police. Les relations entre police et population peuvent aussi se définir à travers le prisme de la confiance. Celle-ci tient notamment au constat que « la population a confiance dans le fait que la police agit de manière à régler les problèmes du territoire ». Ceci pose, par extension, la question de la perception de ces « problèmes ». Comment mettre en cohérence la réalité de la criminalité sur un territoire (l’insécurité de fait) avec le sentiment d’insécurité (l’insécurité vécue ou ressentie) ? Les citoyens posent souvent la question « Que fait la police ? ». De même, la question du manque de suivi et de réponse après une plainte est souvent évoquée et contribue au fait que les citoyens ne perçoivent pas bien la nature du travail de la police. Une autre question est celle de la formation des policiers : comment y sont abordées les relations police-population ? Les policiers sont-ils formés à l’approche de publics divers ? Au dialogue et à la médiation dans diverses situations ? En réponse, les villes européennes partenaires du projet IMPPULSE ont mis en place des projets pilotes visant à produire des résultats à court terme, fondés sur les attentes que les citoyens expriment, dans leur ville, envers le service public de la police. Ces projets ont permis aux partenaires d’innover ou de renforcer des actions existantes dans le cadre d’une approche européenne, avec le regard de leurs pairs et d’experts extérieurs.

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I. Formation des policiers en contact avec les citoyens

>>>>>>>>>>>>>>>>> Pour intervenir de façon adéquate, la police doit non seulement être correctement formée à l’intervention d’urgence et à la réactivité face aux problèmes mais également être compétente en matière d’écoute, d’analyse des problèmes, de communication avec le citoyen et de médiation. Souvent, le citoyen estime qu'il manque d’information sur l’action policière ; il connaît peu les réalités du métier de la police et s'adresse à elle le plus souvent en cas de crise, d’appel à l’aide alors qu’il se trouve en situation d’angoisse et de fragilité. Il est donc essentiel que le policier en première ligne puisse appréhender ces situations de façon professionnelle et réagir de façon opportune et adéquate, en montrant qu’il peut répondre à la demande du citoyen, le rassurer et, s’il ne peut directement résoudre le problème, le diriger vers une autre solution pertinente et efficace. Pour ce faire, hormis la formation de base du policier, une formation complémentaire est souvent nécessaire et souvent organisée au niveau interne et local. En effet, dans plusieurs pays européens, on peut constater des carences dans la formation de base du policier en matière de savoir-faire – rédaction correcte des procès-verbaux, connaissance des législations et réglementations de sécurité alors que celles-ci sont complexes et évoluent constamment, convention des droits de l’homme, principes de service public – et de savoir-être – attitude professionnelle, qualité d’écoute, pro-activité. Or, ces éléments sont essentiels pour garantir une bonne relation entre le citoyen et sa police, et lui donner confiance. Des outils pédagogiques et d’information peuvent être utiles pour faciliter la pratique de terrain. En effet, les législations évoluent et le policier doit régulièrement actualiser sa connaissance des réglementations en vigueur et de la réalité du terrain, par exemple les nouveaux services ouverts par la municipalité ou l’évolution sociodémographique des quartiers.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

« Premier contact : et si c’était vous ? », projet développé par la zone de police Bruxelles Capitale Ixelles Contexte et nature du problème Avec ce projet, la zone de police Bruxelles Capitale Ixelles souhaite que les policiers soient les premiers ambassadeurs de la police en offrant un accueil et une prise en charge de qualité, qui doivent être perçus comme tels par les citoyens. Le premier et souvent unique contact que peut avoir tout citoyen avec son corps de police déterminera pour l’avenir son sentiment à son égard. Qu’il s’agisse d’un premier contact au sein d’un commissariat ou lors d’une intervention dans la rue ou chez une victime, les policiers se doivent d’offrir à leur public, auteur, témoin ou victime, un accueil identique et de qualité. Malheureusement, la zone de police fait quotidiennement le constat de défaillances à cet égard malgré les formations déjà mises en place. Objectif Le projet de formation : « Premier contact : et si c’était vous ? » vise à améliorer le premier contact entre le policier et le citoyen et par là l’image que ce public peut avoir de sa police de proximité. Activités et stratégie Ce projet s’inscrit dans un projet global de formation du personnel. Il s’est articulé autour de deux volets : la réalisation de clips vidéo et la mise en place d’une formation interactive. Les situations les plus problématiques ont été identifiées (racisme, viol…) et quatre clips vidéo intitulés « Et si c’était vous ? » ont été réalisés, chacun présentant de façon exagérée les comportements à proscrire.

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À partir de ce support visuel pensé, conçu et joué exclusivement par des membres du personnel de la zone de police, une formation interactive basée sur le principe du dilemma training a été dispensée. Il s’agit d’amener le personnel policier à reconnaître les comportements à éviter, à en explorer les causes et à formuler des solutions heureuses pour, in fine, proposer une intervention policière professionnelle concrètement réalisable et efficace. Pilotage du projet et partenariat Ce projet est le résultat d’une collaboration active de l’ensemble des services de la zone de police, avec le soutien de la direction générale. Résultats et perspectives La formation « Premier contact : et si c’était vous ? » sera intégrée au programme habituel des formations à partir de 2016, qui sera évalué de manière continue.

Le guide de patrouille de proximité, projet développé par la zone de police Bruxelles Capitale Ixelles GUIDE patrouille de proximité CONNAÎTRE E

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Editeur responsable : Guido VAN WYMERSCH - © POLBRU 2015

Couverture du guide de patrouille de proximité

Contexte et nature du problème Ce projet est né du constat que les policiers de terrain manquent de connaissances théoriques dans certaines matières spécifiques et notamment les nuisances, par manque d’intérêt, de pratique, ou en raison d'un trop-plein d’information et de changements législatifs. Or, ils ne peuvent pas patrouiller dans les rues sans avoir toutes ces informations à portée de main.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Objectif Ce projet vise à renforcer le professionnalisme et l’efficacité du policier dans ses missions de répression. Grâce à un petit guide pratique facile à porter sur soi, il pourra consulter chaque fois que nécessaire la procédure à suivre et sera dès lors plus sûr de lui pour passer à l’action et verbaliser les infractions décrites dans le guide. Activités et stratégie Le projet a consisté à créer un guide pratique d'intervention, édité en format de poche, que chaque policier en patrouille ou en intervention emportera avec lui. Également disponible en version numérique directement téléchargeable sur smartphone, ce guide détaille une vingtaine de cas concrets pouvant se présenter aux fonctionnaires de police et leur offre une réponse simple, immédiate et facilement applicable. Disponible dans les deux langues nationales (français et néerlandais), il sera également utilisé dans les formations données en interne sur les nuisances. En cas de modification de la réglementation, les fiches incluses dans le guide seront immédiatement mises à jour. Pilotage du projet et partenariat Ce projet est porté par la direction générale de la zone de police, en collaboration avec des policiers de terrain expérimentés dans leurs domaines de compétence (pour le contenu des fiches) ainsi que le service d’infographie pour la réalisation graphique. Résultats et perspectives Le « guide patrouille » a été distribué aux policiers en fonction et sera remis à tout nouveau patrouilleur.

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« Communication efficace, un pont vers les citoyens », projet développé par la ville de Milan Contexte et nature du problème À Milan, la demande principale de la population est de voir plus de patrouilleurs dans les rues. Le rapport 2013 de l'institut d'enquête Eurispes montre que le niveau de méfiance du public envers les institutions publiques est de 73,2 %. Cependant, le niveau de confiance dans la police de l'État est de 75 %, et de 76,3 % pour les carabiniers, qui constituent le deuxième organisme national de police. La municipalité de Milan travaille à renforcer la relation police-population avec une présence sur le territoire et une série d’initiatives telles que la police de proximité, un centre d'appels et une communication régulière avec le public via Twitter et, par l'intermédiaire de la presse, par des communiqués et conférences de presse ainsi qu'un journal numérique. L'une des initiatives développées dans le cadre du projet IMPPULSE a consisté à mettre en place une formation spécifique adressée aux policiers du centre d’appel d’urgence qui sont confrontés à des requêtes très variées et à un public hétérogène. Chaque année, ce centre reçoit entre 250 000 et 300 000 appels de toutes natures, par exemple de conducteurs ayant subi un accident, de riverains se plaignant d'un véhicule en stationnement abusif, ou pour tapage nocturne. Parfois, les réponses apportées ne sont pas correctes ou satisfaisantes pour l’appelant, ou bien la qualité de la communication entre l'appelant et l'agent de police n'est pas bonne. Ce problème a été identifié grâce aux plaintes envoyées par les habitants à la mairie de Milan, où ils affirment se sentir peu écoutés et mal compris. Les policiers, quant à eux, déplorent leurs conditions de travail stressantes face à des situations qu'ils ne savent pas toujours aborder.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Objectif La formation « Communication efficace, un pont vers les citoyens » vise à améliorer les compétences des policiers du centre d'appel d'urgence en leur fournissant des outils pour répondre de la manière la plus efficace possible aux demandes des citoyens, qui souvent appellent alors qu'ils sont dans un état de panique ou très irrités. Le but du projet est précisément de faire baisser la tension entre la police et les citoyens lors de ces échanges téléphoniques. Activités et stratégie La formation est adressée aux 150 policiers qui travaillent au centre d'appel. Une partie d'entre eux travaille à plein temps dans la salle de contrôle tandis que l'autre partage son temps entre le centre d'appel et le terrain. Il a été décidé de ne pas séparer ces deux groupes car tous les agents travaillent aussi bien au centre d’appel qu'à la coordination par radio des patrouilles qui circulent en voiture. Les cours interactifs ont été mis en place, à partir d'appels réels, par une équipe de psychologues qui est déjà souvent intervenue pour la police locale de Milan. Les participants ont été invités à identifier les forces et les faiblesses dans le traitement des appels afin de distinguer les bonnes pratiques. Ils ont également reçu un enseignement de base en communication proactive et assertive et en technique d’écoute. Les policiers étaient divisés en groupes de 20 afin de faciliter l’échange lors des sessions. Chaque groupe a reçu douze heures de cours et il a été remis à tous les participants une brochure résumant les principales recommandations acquises lors de la formation. Pilotage des deux projets et partenariat Le département de la sécurité urbaine et de la cohésion sociale de la ville de Milan a piloté le projet, qui a été réalisé en partenariat avec la police locale et une équipe de psychologues du Centre de recherche et d'études en psychotraumatologie.

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Résultats et perspectives Au début et à la fin du cours, un questionnaire d’évaluation a été soumis à tous les participants : 79 % (sur un total de 152 réponses) ont estimé que les sujets abordés pendant la formation étaient « très utiles pour leur travail » et leur ont permis d'acquérir de nouvelles compétences professionnelles. Pour 72 %, le cours a été « très utile » alors que seulement 1 % l'ont estimé sans valeur. Ainsi, la quasi-totalité des policiers du centre d'appels ont affirmé que la formation leur avait permis d’améliorer la qualité et la performance de leur travail.

II. Sensibilisation des citoyens au rôle de la police

>>>>>>>>>>>>>>>>>>> 1. Améliorer les relations police-population par un travail sur les représentations mutuelles et une meilleure compréhension du rôle de la police par le citoyen Plusieurs études ont sondé les représentations entre police et population, c'est-à-dire comment la population se représente les policiers et vice versa. On constate généralement chez le citoyen un manque de connaissance des missions et du fonctionnement des services de police. On note également que les policiers ont parfois des représentations biaisées des citoyens, qu'ils soient jeunes ou adultes. Ces problèmes de communication et de représentations engendrent de réelles tensions entre police et citoyens et ont des conséquences néfastes sur le bon fonctionnement de la police. Ils créent une frustration chez les citoyens lorsque leurs attentes restent sans réponse, par exemple lorsqu'ils s’adressent à la police pour des requêtes qui concernent d'autres institutions comme l'administration municipale, l'hôpital, les pompiers ou les bailleurs sociaux. De plus, lorsque les

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

citoyens demandent à la police d'intervenir pour des questions qui ne sont pas de son ressort, cela l'empêche évidemment de consacrer du temps et des ressources à ses propres missions. Voici résumées quelques grandes tendances15 à l'œuvre dans les perceptions mutuelles entre police et population en Europe16.

Opinions des policiers envers la population :

 Les perceptions de l’attitude de la population (favorable ou hostile à la police) sont évaluées par les policiers selon l’âge, le rang social, le quartier, la profession, la provenance, etc. Les jeunes, surtout ceux issus de l’immigration, constituent une catégorie particulière qui concentre, avec une relative constance, des discours dépréciatifs.

 Il existe une large diversité d’opinions au sein de la police, y compris des avis favorables à l’égard de la population dans toutes ses composantes sociodémographiques. Satisfaction et insatisfaction de la population à l’égard de la police17 :

 En Europe, les enquêtes mettent en évidence que la population est majoritairement satisfaite de la police.

 La population, comprise aussi comme un ensemble hétérogène, accorde beaucoup d'importance à l’équité (fairness) des méthodes ou procédures utilisées par les policiers. C’est sur cette base qu'elle fonde la légitimité qu’elle accorde à la police.

 Les plus de soixante ans ont une meilleure image de la police que les jeunes. Ceci s'explique notamment par le fait que les jeunes sont plus souvent en contact avec la police lorsqu'ils sont l'objet d'un contrôle ou d'une sanction.

 Les personnes issues de minorités ethniques ont des perceptions variées, mais on remarque néanmoins une tendance à percevoir la police comme répressive. Cette population aspire à une police plus

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15- Man, C., « Interactions entre policiers et population dans l’espace public. Des ajustements du cadre de l’expérience policière aux routines d’interactions ordinaires », thèse de doctorat en criminologie, sous la direction de Sybille Smeets, défendue le 6 mars 2015. 16- Hendrickx, T., Smeets, S., Strebelle, C., & Tange, C. (2000), « La police de proximité en Belgique. Bilan des connaissances », Les Cahiers de la sécurité, (39), 7-27 17- (Van Roosbroek, 2008, 65), (Easton et al., 2009, 132, (Enhus et al., 1988b, 3 ; Cornet et al., 1987, 3 ; Moniteur de sécurité, 1997, 19)


« douce » dans ses rapports avec elle, mais elle a aussi beaucoup d’attentes d’une police plus « dure » pour les faits dont elle aurait à se plaindre.

 Malgré l’hétérogénéité de sa composition, les attentes de la population se concentrent autour de quelques points communs : la population souhaite être en contact avec des policiers aimables ; elle apprécie les qualités d’objectivité et de neutralité ; elle souhaite une police présente et accessible18. Ce que les jeunes pensent de la police :

 Une méfiance, voire une peur de la police, est parfois exprimée par les jeunes, ce qui les amène à ne pas escompter être protégés par la police s’ils venaient à être victimes.

 Ce sont essentiellement les rencontres avec des policiers qui fondent leurs perceptions négatives, quand celles-ci surviennent dans l’espace public, notamment à l’occasion d’un contrôle d’identité et quand le déroulement de la rencontre est évalué négativement.

 Les jeunes admettent que les policiers interviennent aussi de façon justifiée. Ils formulent des distinctions entre les « bons » et les « mauvais » policiers. Le bon policier est celui qui fait preuve de certaines qualités, se montre respectueux, mais aussi qui se montre malin et prend des initiatives. Les jeunes attendent des policiers un comportement correct sans toutefois espérer un comportement irréprochable.

2. Développer une stratégie de communication spécifique vers le public et les médias Un effort de communication est nécessaire pour créer des espaces de rencontre et de débats entre la police et les citoyens, pour expliquer le rôle de la police et pour informer le public sur le travail et les réussites de la police. Une stratégie de communication des pouvoirs publics travaillée spécifiquement avec les médias permet aussi de mieux faire connaître la police. La relation des médias avec l’insécurité et celle de 18- (Jamoulle et Mazzochetti, 2011, 300 ), (Spaey, 2004, 102) ; (Delens-Ravier et Thibaut, 2003, 34), (Dirikx et al., 2012, 202), (Van Aerschot et De Schrijver, 2008, 70), (Verwee, 2012, 195 ; Easton et al., 2008, 5)

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

la police avec les médias est fondamentale pour l'image de la police auprès des citoyens. Dans ce sens, l’image de la police dans les médias et les œuvres de fiction (romans, films, chansons...) doit mieux correspondre à la réalité quotidienne et valoriser les missions de police de proximité.

Plan de communication auprès des Nantais sur le numéro de secours Appel-17, projet développé par la ville de Nantes, France Contexte et nature du problème Le principal contact entre le service de police de Nantes et les citadins passe par l’appel de secours au numéro 17. Bien que le service fonctionne de façon satisfaisante, certains aspects – manque de temps pouvant être consacré à chaque demande, appels non pertinents et méconnaissance des services vers lesquels les réorienter – sont source de difficultés et de frustrations pour les appelants comme pour les policiers. Pour y remédier, la ville de Nantes a mis en place deux projets pilotes :

 un plan de communication concernant l’action des services de police à partir de l’appel au 17,

 la réorientation des appels non urgents vers les services adaptés grâce à une meilleure connaissance interservices. Le numéro 17 de Police Secours fait l'objet d'environ 200 000 appels chaque année ce qui correspond à la moitié de la population de Nantes. Ce nombre important d'appels n'est pas seulement lié à des situations nécessitant une intervention de la police : cela est aussi dû au fait que ce service est en première ligne en matière d'attention au public car il est facile d'accès et ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre et trois cent soixante-cinq jours par an.

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Le centre d'information et de commandement reçoit et dirige les appels. Il est composé de 31 policiers spécialisés qui assurent la permanence de fonctionnement et occupent plusieurs postes : réception des appels et direction des équipages présents sur la voie publique, interrogation des fichiers de police, communication pour les services d'ordre importants dans le cadre de grands événements. La capacité d'intervention des forces de police est stable et en moyenne de 32 000 à l'année ce qui correspond environ à un appel sur six. Le temps d'intervention moyen est de huit minutes, donc satisfaisant dans l'ensemble, mais en réalité disparate selon la disponibilité des équipages de police et leur positionnement géographique au moment de l'appel. Les réunions partenariales entre le service de la mission prévention de la ville de Nantes et différents services de police du commissariat central ont relevé l'existence de difficultés et de frustrations autant parmi la population que parmi les opérateurs de la salle d’information et de commandement. Les policiers soulignent des difficultés dans l'exécution de leur travail dues principalement au manque de temps à consacrer aux appelants, une connaissance approximative de l’utilisation du 17 de la part des citoyens, et le fait que les partenaires ou interlocuteurs ne savent pas toujours vers où réorienter les demandes non urgentes. Quant aux habitants, ils perçoivent un manque d'écoute et de temps de la part des policiers et estiment que les délais de réponse – intervention ou non – sont longs.

>> Projet pilote 1 : plan de communication concernant l’action des services de police à partir de l’appel au 17 Objectif À travers la mise en place d’un plan de communication concernant l’action des services de police à partir de l’appel au 17, la ville de Nantes a pour objectif d’informer les habitants sur les conditions justifiant l’appel de secours afin de désencombrer le 17. L’effet escompté est de permettre aux policiers de la salle d'information et de commandement de mieux traiter les appels véritablement urgents.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Activités et stratégie Le projet s'inscrit dans la stratégie locale de tranquillité publique, développée conjointement par la municipalité et l’État dans le cadre du Contrat annuel territorialisé de tranquillité publique (CATTP). D’une durée de dix mois, le projet était composé de trois phases : diagnostic, mise en œuvre et dissémination. Afin de répondre au besoin de communication et de clarification de l’utilisation de l'appel d'urgence, les professionnels et élus de la ville de Nantes impliqués dans le projet ont choisi de casser les codes institutionnels pour adopter un ton humoristique à travers les déboires de « Super Héros 17 », un personnage de bande dessinée créé pour l’occasion et décliné sous forme d’affiches. Cette campagne a été initiée et supervisée par la ville en coordination avec le Forum européen pour la sécurité urbaine (Efus), afin d’éviter de mobiliser la police sur ce projet. Afin d’apporter un regard neutre et extérieur, la ville de Nantes a choisi de faire appel à un dessinateur argentin, Sebastian Carceres, qui était déjà intervenu dans des projets éducatifs auprès des jeunes et pour des institutions. Le travail s’est concrétisé en trois planches développées à partir de trois scénarios distincts, et ensuite reproduits en affiche et sur des dépliants distribuables. De jeunes Nantais issus de quartiers connaissant parfois des tensions avec la police ont été associés à la démarche grâce à un partenariat avec une association locale. L’objectif était d’associer au projet des jeunes de quinze à seize ans afin de leur faire découvrir le fonctionnement de la police nationale et de leur permettre de rencontrer des agents du Centre d'information et de commandement de la police. Il s'agissait de permettre aux uns et aux autres de se connaître afin de dépasser certains stéréotypes. À l'issue de ces rencontres, une quatrième planche a été produite par les jeunes avec l’aide du dessinateur. Ce travail a fait l'objet d'articles dans la presse locale.

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La phase de dissémination des supports visuels a visé tous les publics nantais susceptibles d'avoir recours à l'appel 17. La bande dessinée a été diffusée :

 dans les points d’accueil au public : 10 points de la police nationale ou municipale ; 11 points de la mairie et des mairies d’arrondissement ; la boutique de la principale entreprise de transports communs à Nantes, la TAN ; 15 sièges et agences des principaux bailleurs sociaux ; le tribunal de grande instance et les deux Maisons de la justice et du droit de la ville de Nantes ;

 lors de rencontres individuelles entre les trois délégués police-population de la police nationale et l'ensemble des policiers nationaux de voie publique et les 30 médiateurs de quartiers nantais ;

 lors de rencontres collectives : manifestations de la police nationale telles que la Semaine de la sécurité ; quatre réunions publiques policepopulation et réunions avec les habitants dans le cadre de la mise en place du protocole pétition ou rencontres plus informelles et conviviales en pied d'immeuble (environ une vingtaine chaque année).

Dépliant d’information sur l’appel au 17

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Planche réalisée par Sebastian Carceres

Une campagne d'affichage a aussi été réalisée au sein des structures citées précédemment et des centres socioculturels de la ville de Nantes.

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>> Projet pilote 2 : réorientation des appels non urgents vers les services adaptés grâce à une meilleure connaissance interservices Objectif L’objectif de ce deuxième projet pilote est de favoriser la connaissance mutuelle entre différents services compétents en matière de sécurité et de tranquillité publique et le centre d'information et de commandement afin que chacun comprenne mieux le fonctionnement et les contraintes des autres. Activités et stratégie Cette action s'inscrit dans la stratégie locale de sécurité et de tranquillité de la ville de Nantes. Une série de rencontres a été organisée entre les services de la ville et de la métropole. Ces réunions ont aussi permis de jeter des bases de travail et d'anticiper des modalités de fonctionnement conjointes. Ont participé des agents de la police nationale, de la municipalité et de la métropole, notamment les responsables de la brigade de contrôle nocturne, de la mission prévention de la délinquance, des médiateurs de quartier et des agents du service de prévention de l’entreprise des transports communs. Pilotage des deux projets et partenariat La mairie de Nantes, à travers sa mission prévention de la délinquance (service intégré à la direction de la tranquillité publique) a piloté l’action. Le service a associé étroitement la police nationale, tout d'abord la hiérarchie puis les policiers de terrain. Plusieurs réunions partenariales ont été organisées pendant le déroulement du projet. Afin de partager les objectifs des deux projets pilotes, une convention a été signée entre les services de police de l'État et la mairie de Nantes.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Résultats et perspectives L’inscription du projet dans une politique partenariale ancrée sur le territoire depuis plusieurs années permet d'envisager des perspectives sur le long terme. Un travail de renforcement des connaissances interinstitutions a complété le projet pilote. La distribution des documents produits s'échelonnera tout au long de 2015 et 2016. Si les plaquettes sont bien reçues par la population, ce support pourra être décliné pour d'autres problèmes liés à la thématique.

Espace citoyenneté, projet développé par la ville d’Amiens Contexte et nature du problème Afin de renforcer la notion de service public, la ville d’Amiens a mis en place un espace citoyenneté visant à faciliter l’accès aux droits et à répondre aux besoins d’information des habitants, associations, professionnels et institutions en matière de citoyenneté, ou de les orienter le cas échéant vers les structures et services compétents. Objectif Cet espace a pour but de servir de lieu de rencontres et d’échanges entre les habitants afin d’anticiper les peurs et les tensions par le dialogue et le lien social, en promouvant la tolérance et surtout l’engagement de chacun. Activités et stratégie L'espace citoyenneté dispose de mobilier et de matériels existants qui seront complétés en adéquation avec les missions afin d’assurer le bon fonctionnement de la structure. L’acquisition de nouveaux matériels et

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mobiliers fera l’objet d’une demande de crédits dans le cadre de l’exercice budgétaire 2016. L’accueil et le fonctionnement de l’espace citoyenneté sera assuré, pour la partie municipale, par un agent de la direction de la sécurité et de la prévention des risques urbains, un agent du service de la démocratie locale et un chef de projet. Leurs principales missions sont de programmer les actions à mener, de coordonner les différents acteurs du réseau et d'accueillir les citoyens. L’espace citoyenneté devra offrir aux administrés l'opportunité d'exercer une citoyenneté active et de promouvoir des pistes et des solutions pour favoriser le mieux vivre ensemble. L’information dispensée porte sur tous les champs de la citoyenneté. L’espace citoyenneté assure un service d’accueil, de sensibilisation, d'information et de conseil pour toute personne intéressée par les questions de citoyenneté. Il organise des actions de communication, d’éducation ou de sensibilisation et propose en permanence des dépliants d’information. Cet espace permet aussi de faciliter l’accès aux droits et de répondre aux besoins d’information des habitants, associations, collectifs, professionnels et institutions en matière de citoyenneté, ou les oriente, le cas échéant, vers les structures et services compétents. L’espace citoyenneté est aussi un lieu qui permet de mettre en réseau et de coordonner différents dispositifs de prévention et de partenariat afin de créer des synergies. Ceci se concrétise à travers des ateliers ou des conférences sur site ou à l’extérieur. La maison de la sécurité routière (dispositif partenarial préfecture, conseil départemental, ville d’Amiens), également localisée au sein de l’espace citoyenneté, a pour objectif d’être un lieu de référence et de rencontre affecté à la sécurité routière. Toute personne concernée ou intéressée par cette question peut y trouver une réponse pertinente et adaptée. Pilotage du projet et partenariat Ce projet est piloté par la ville d’Amiens et sa délégation démocratie locale en partenariat avec la délégation sécurité et tranquillité publique.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Pour garantir l’intégration de tous à la vie de la cité, le point d’accès au droit, dispositif municipal (labellisé par le conseil départemental d’accès au droit) est installé au sein de l’espace citoyenneté. Il a pour mission de faire connaître à chacun ses droits et d’assurer d’éventuelles médiations. Résultats et perspectives L’espace citoyenneté devait être inauguré au début de l’année 2016. La création de cet espace illustre la volonté de la ville d’Amiens de renforcer son engagement au service de la population en se dotant d’un lieu dédié à la citoyenneté afin de faciliter et encourager les habitants à s’investir dans la vie de la cité. Encourager la citoyenneté, c’est permettre l’intégration et la participation de tous à la vie de la cité. En ce sens, l’espace citoyenneté vise à créer du lien social en incitant les habitants à travailler en réseau tout en valorisant la place de chacun.

Projet « actions communication », développé par la ville d’Aubervilliers Contexte et nature du problème Avec ce projet, la ville d’Aubervilliers a répondu à la nécessité de créer et de développer une communication municipale afin d’informer la population et les policiers de l’ensemble du travail mis en place pour renforcer et améliorer leur relation. La ville a souhaité impulser une réflexion pour que la population prenne en compte les problèmes quotidiens du commissariat et que la police connaisse le territoire et ses spécificités. Ce projet est fondé sur une série d'observations mises en évidence lors des réunions de sécurité entre le maire et les différents services de la municipalité ainsi que le commissariat de police, mais aussi à partir de rencontres avec les habitants.

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Objectif L’objectif du projet est d’informer la population des contraintes et problèmes quotidiens rencontrés par la police et de permettre aux policiers de mieux appréhender le territoire sur lequel ils travaillent, ainsi que ses caractéristiques. Ces actions sont des outils qui permettent d'améliorer, voire de créer des canaux de communication avec la population dans son ensemble ainsi qu'un plus petit nombre d’habitants intéressés à s’engager dans ces thématiques. Il s’agit également de faire prendre conscience aux habitants qu’ils doivent se réapproprier l’espace public et que cette responsabilité n’incombe pas exclusivement à la police.

Activités et stratégie La ville a organisé cinq réunions sur une période de six mois avec les policiers, les habitants et certains élus locaux afin d’expliquer les missions des deux corps de police (nationale et municipale) et les difficultés qu'elles rencontrent. Environ une centaine d’habitants déjà engagés dans différents comités de quartier et d’autres informés par les articles parus dans le journal municipal ont assisté à ces réunions. L’ensemble des activités menées par la ville sur le sujet a fait l'objet de publications dans le journal municipal Aubermensuel (30 000 exemplaires envoyés aux habitants et 5 000 autres mis à disposition aux points stratégiques de la ville). L'information a aussi été relayée au travers de diverses brochures et sur le site internet de la ville. Le séminaire de clôture du projet avec l’ensemble des participants a permis de mettre en avant le travail de chacun, d’expliquer leurs engagements et de présenter les pistes de travail pour l'avenir.

Pilotage du projet et partenariat Le service prévention aide aux victimes et interventions publiques de la ville d’Aubervilliers a piloté le projet en partenariat avec la police muni-

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

cipale et le commissaire, Aubermensuel, le service de démocratie locale et politique de la ville et la direction de la communication. Résultats et perspectives Le projet IMPPULSE a permis à la ville de travailler sur la thématique police-population. Il s'agit d'un point de départ et cette thématique devrait être incluse dans la nouvelle stratégie locale de prévention de la délinquance 2015-2020. Interrogé sur les réunions de sensibilisation auxquelles il a participé, le groupe d’habitants a estimé que celles-ci étaient intéressantes même si elles n'ont pas toujours apporté de réponses concrètes à leurs questions. Ils ont néanmoins exprimé le souhait de les voir se poursuivre et ont même proposé de monter des projets concrets avec la police. L'idée de créer un site web consacré à l’ensemble des missions et actions de la Direction Prévention Sécurité, incluant la police municipale, a finalement été abandonnée dans le cadre de la refonte globale du site internet de la ville. Cependant, le site municipal comprend un éclairage sur la police et des informations pratiques sur le commissariat.

Vivre en sécurité, guide pour la police locale, projet développé par la ville de Milan Contexte et nature du problème À Milan, le climat des relations police-population est dans l'ensemble positif, marqué par la confiance mutuelle. Cependant, la ville a souhaité mettre en place un projet pour clarifier le rôle de la police locale et pour que les citoyens comprennent mieux les services proposés par la police. En effet, le constat est que la plupart des malentendus entre police et

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Couverture du guide Vivere in sicurezza : Guida alla Polizia Locale (Vivre en sécurité : Guide pour la police locale)


population sont liés à un manque de connaissance des règles et des compétences de la police locale. Objectif L’objectif du guide de la police locale Vivre en sécurité est de permettre aux citoyens de mieux connaître et d'utiliser correctement l'ensemble des services offerts par la police. Activités et stratégie Le guide réalisé par la ville a pour objet d'expliquer ce que les citoyens peuvent demander à la police et comment ils peuvent entrer en contact avec elle. Il rassemble une série de fiches qui présentent toutes les activités menées par la police locale ainsi que tous les numéros de téléphone utiles. Le défi le plus important a été de faire connaître le guide aux habitants. Pour ce faire, la ville a ciblé certaines catégories d’habitants comme les personnes âgées, notamment au travers des « formations » dispensées par la police locale aux seniors sur la prévention des escroqueries et des vols. Le guide a aussi été envoyé à la presse locale et il est disponible en téléchargement gratuit sur le site de la ville. Il est également disponible dans les postes de police et les bureaux des services municipaux, et il est distribué lors des réunions de quartiers. Pilotage du projet et partenariat Le département de la sécurité urbaine et de la cohésion sociale de la ville de Milan a piloté le projet, qui a été réalisé en partenariat avec le département communication de la police locale de Milan. Résultats et perspectives Il est difficile de mesurer précisément les résultats de ce projet, mais il est certain que le guide a permis de clarifier auprès des habitants les compétences de la police et le bon usage des numéros d’urgence.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

« Interagir pour mieux agir », projet développé par la ville de Toulouse Contexte et nature du problème La ville de Toulouse dispose d'une plate-forme téléphonique fonctionnant vingtquatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept, qui a Visuel du service « Allô Toulouse » vocation à répondre aux nombreuses et diverses sollicitations des usagers (250 000 appels par an), notamment en matière d'incivilités, de troubles à la tranquillité et de problèmes de sécurité. En 2015, environ un appel sur six a donné lieu à une orientation vers un service de sécurité (police nationale ou municipale). Dans ce domaine, l'ancien outil (l'office de la tranquillité) avait cristallisé plusieurs insatisfactions. Un travail de réorganisation en profondeur a été mené pour fournir aux Toulousains des réponses de terrain rapides et efficaces. Cet outil a récemment été rebaptisé «  Allô Toulouse ». Dans ce cadre, la ville de Toulouse a pu expérimenter une action axée sur le retour d'information automatisé auprès des usagers d'Allô Toulouse. Objectifs Le projet poursuit plusieurs objectifs :

 améliorer et renforcer la communication auprès des usagers en leur offrant un suivi et un retour d’information individualisé en matière d’insécurité ou de trouble à la tranquillité publique ;

 améliorer les modalités de réponse des opérateurs d’Allô Toulouse en matière de problèmes de sécurité, nuisances, incivilités et troubles à la tranquillité publique ;

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 valoriser l’expertise et le travail des opérateurs et des superviseurs d’Allô Toulouse par la mise en place de démarches participatives collectives (visites de services partenaires, travail autour des argumentaires et des réponses, évolutions des outils techniques, management, formation) ;

 veiller à l’adaptation et à l’évolution des modes d’intervention des services de première ligne de la ville et des réponses existantes. Activités et stratégie À travers la mise en place de modalités de communication modernisées, repensées et renforcées, l'habitant est plus réceptif aux réponses qui sont apportées par la collectivité à ses problèmes au travers d'Allô Toulouse. Sa perception de la réponse, tout comme celle des acteurs ayant participé à sa mise en œuvre, est alors plus positive et lisible. Le projet a consisté à mettre en place un retour d’information systématisé auprès des Toulousains qui ont recours à Allô Toulouse notamment pour des problèmes d’insécurité et de troubles à la tranquillité publique. Pour ce faire, il convenait de faire évoluer la solution logicielle utilisée par la direction d'Allô Toulouse. Celle-ci a élaboré un cahier des charges spécifiant les fonctions attendues du logiciel afin de permettre aux appelants d'avoir un suivi de leur plainte. Le nouveau logiciel a été mis en place en octobre 2015 après une phase de test. Une équipe de quatre opérateurs est désormais spécifiquement chargée, en lien avec les superviseurs, de contacter les appelants dont la requête n’a pu bénéficier d’une solution ou d’une intervention et de leur expliquer les raisons justifiant l’absence d’intervention ou une intervention retardée. En parallèle, plusieurs démarches de travail ont été mises en place, notamment :

 une démarche « coordination interservices » afin de redéfinir les cadres de coopération et de formaliser davantage les modalités de réponse, d’intervention et de retour d’information ;

 une démarche « argumentaires » : à partir de l'expérience des opéra-

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

teurs d’Allô Toulouse rassemblés en groupes de travail, ceux-ci ont identifié un certain nombre de situations récurrentes posant problème et défini, en lien avec la police municipale, de nouvelles modalités de réponse ;

 une démarche « suivi » : au travers de jeux de rôle et de mises en situation, les opérateurs ont pu améliorer leurs modalités de réponse ;

 une renégociation des délais de réponse et d’intervention et la formalisation des procédures de coopération entre la direction d'Allô Toulouse et les autres services et partenaires concernés. Une communication consacrée aux évolutions mises en place par la direction d'Allô Toulouse a aussi été mise en œuvre.

Pilotage du projet et partenariat La ville de Toulouse a mis en place ce projet qui est piloté en interne par la direction d'Allô Toulouse. Toute l’équipe a été mobilisée sur l’ensemble de la démarche : direction, superviseurs, opérateurs, chef de projet informatique, analystes, etc. Les différents services de la collectivité qui répondent aux sollicitations des usagers sont également concernés, notamment la police municipale pour les cas ayant trait à la sécurité et la tranquillité. La police nationale est également concernée de manière plus indirecte. La direction d'Allô Toulouse est en train* de réviser ses modalités de collaboration avec plusieurs partenaires. Il est envisagé de signer une nouvelle convention avec la police nationale pour y inclure notamment un meilleur échange d’informations. Résultats et perspectives Le projet a permis dans un premier temps d’engager une réflexion en interne au sein des services de la collectivité, notamment la direction d'Allô Toulouse, sur la façon d'améliorer la communication auprès des usagers, en particulier en matière de problèmes de sécurité et de tranquillité. Il est rapidement apparu que les habitants avaient des attentes * À l'heure où nous mettons sous presse (janvier 2016)

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fortes, mais également les opérateurs qui souhaitent apporter aux usagers la réponse la plus appropriée et la plus pertinente. Le logiciel qui permet le retour d’information sera probablement intégré à la future application mobile destinée à Allô Toulouse et fera l'objet d’une rubrique spécifique sur le site web de la ville de Toulouse.

III. L’approche ciblée par groupe de population

>>>>>>>>>>>>>>>> 1. Projets ciblant un aspect ou groupe spécifique dans la relation police-population Il est établi que certains groupes spécifiques de la population (jeunes, minorités ethniques, sans-abri, communauté LGBT*) nécessitent un approche particulière car, outre d’autres facteurs d’exclusion, ils n’ont pas accès aux services de police aussi aisément que le reste de la population. Une approche par groupe-cible permet à la police de mieux comprendre les besoins et modes de fonctionnement d’une communauté en particulier, et donc d’adapter son intervention en conséquence. C’est le cas pour la communauté LGBT qui, trop souvent, hésite à porter plainte en cas d’agression par crainte de railleries et de stigmatisation au commissariat, ou encore de jeunes et minorités ethniques qui se plaignent de délits de faciès. Ce peut aussi être le cas pour les touristes (citoyens temporaires) qui nécessitent par exemple que la police améliore ses connaissances en langues étrangères pour communiquer et être capable de leur porter assistance. Une démarche plus proactive et impliquant concrètement le publiccible dans l’activité policière peut également être envisagée pour faciliter le dialogue, ceci en prévoyant les garde-fous nécessaires afin d’éviter les dérives et que le pouvoir de police ne soit exercé par des acteurs non habilités. * Lesbian, gay, bisexual, trangender (lesbienne, homosexuelle, bisexuelle, transsexuelle)

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

2. Relation police-jeunes et autres publics cibles Dans une étude19 sur la perception, les jeunes ressortent comme une catégorie particulière de la population, surmédiatisée quand il est question de leur perception négative de la police et surreprésentée dans le discours des policiers quand ils désignent ceux qui, à leur sens, sont les plus hostiles à leur égard. « L’injonction sécuritaire quelle que soit sa forme a aussi pour conséquence de focaliser les critiques sur les pratiques policières (harcèlement, provocation, violence et « bavures »). Le risque est de réduire la question sociale au « problème » de l’affrontement police-jeunes, alors même que les populations de ces quartiers sont plus fondamentalement soumises à la violence des politiques de l’emploi, du logement, etc. et à la restriction des politiques sociales20. » Les jeunes et la délinquance sont trop souvent généralisés et représentés comme des « jeunes » (spécifiquement les jeunes hommes) issus des « quartiers difficiles », d’un milieu pauvre, « différent », causant des difficultés. Il est difficile pour ces jeunes d’échapper à ce stigmate. Toutefois, les jeunes ne sont pas les seuls à se trouver stigmatisés ; c'est aussi le cas des policiers dans les quartiers sensibles. Cette relation difficile se perpétuera si l’on n’implique pas toute la société et la communauté dans un projet de médiation. Il existe des pratiques prometteuses à tester et expérimenter, avec la pleine coopération des institutions. Comme exposé dans l’avis du Comité économique et social21 européen espaces urbains et violence des jeunes : « La sélection appropriée et la formation spécifique, si possible au niveau de standards européens de référence, des acteurs sociaux, juridiques et des forces de police doivent être garanties et constamment actualisées selon une coopération multi-institutionnelle et multidisciplinaire dans un contexte d’échanges transnationaux. Notamment afin d’établir le dialogue et des relations entre les forces de l’ordre et les jeunes ». Il est en effet évident que les violences des jeunes est un domaine de travail qui implique autant les acteurs locaux qu'européens.

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19- « Vision doctrinale et divisions pratiques : de quelques contradictions structurelles entre proximité et police », Laurence Proteau, Journal des anthropologues, 2007, Paris, n° 108-109, p. 249-277 20- Proteau, 2007, 21- Avis du Comité économique et social européen sur le thème « Espaces urbains et violence des jeunes » (2009/C 317/06)


Alors que les jeunes apparaissent comme une catégorie de la population excessivement dépréciée, d’autres sont « invisibilisées » alors qu'elles sont régulièrement en contact avec la police pour des opérations de contrôle et de sanction. Il s’agit notamment des personnes sans domicile fixe et des gens du voyage, deux figures type de la « clientèle » policière. Celle-ci rassemble des personnes « définies politiquement, selon une représentation réductrice de l’insécurité22, comme des figures menaçantes23 ». Il peut s’agir de personnes qui évoluent dans des groupes économiquement faibles sans qu’il soit nécessairement question de groupes ethniques spécifiques. Les policiers qui sont en contact avec ces groupes leur attribuent des caractéristiques spécifiques, par exemple « des comportements problématiques et sur cette base procèdent par des mécanismes de différenciation24 ». C'est-à-dire que ces personnes, cibles de l’action policière, sont traitées par la police d’une façon spécifique et distincte, ce qui peut s’apparenter à de la discrimination. Il faut toutefois ajouter que les catégories « cibles » de l’activité proactive de la police ne sont pas les seules à subir des attitudes policières défavorables. En effet, les femmes, les personnes âgées et les personnes perçues comme bourgeoises peuvent également être visées par les perceptions négatives de la police et des pratiques peu conciliantes25. Ceci pour dire qu’une vigilance est de mise dans le choix des publics cibles. Retenir un public cible plutôt que d’autres (en place de ou en plus de) pourrait mener à le cibler encore davantage sans pour autant qu'il en bénéficie. Il semble donc pertinent de considérer des catégories de la population qui subissent une superposition des mécanismes d’exclusion, dont celui de ne pas avoir accès à une relation de qualité avec la police.

22- Mary, 2001, 38 23- Smeets, 2003, 39 24- Easton et al. 2008, 5 25- Ericson, 2005 (1982), 228.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Jeunesse et autorité, projet développé par la ville de Barcelone Contexte et nature du problème La crise économique a eu des effets sur la population catalane, en particulier sur les jeunes des quartiers populaires. Le taux de chômage élevé et les mesures d’austérité mises en place par les autorités dans les services sociaux ont eu des conséquences néfastes pour les ressources des familles, ce qui génère des tensions dans ces quartiers. L'un des effets de cette situation est la détérioration croissante des relations entre les jeunes et l’administration publique. Celle-ci se manifeste notamment par la dégradation des relations entre jeunes et les divers représentants de l' « autorité », qui peuvent par exemple être les professeurs de collège ou les policiers présents dans les espaces publics. Le projet développé à Barcelone se concentre sur la notion d'autorité au sens large, car les tensions sont souvent une manifestation de conflits sociaux complexes. Objectif L’objectif du projet est d’améliorer les relations qu’entretiennent les jeunes avec les policiers et les professeurs en travaillant sur la communication et la compréhension mutuelle. Ce projet est destiné à être reproduit dans d’autres quartiers de la ville et dans d’autres villes. L’initiative vise aussi à donner aux professeurs et aux policiers les outils de communication et de formation nécessaires pour les soutenir dans leur travail quotidien avec la population juvénile. Activités et stratégie Le projet utilise la méthodologie des « rencontres critiques » développée à Londres (Grande-Bretagne) et Gouda (Pays-Bas) par le projet My City My World.

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Par le biais d’ateliers d’activités ludiques, adolescents, policiers et professeurs peuvent échanger dans un contexte neutre, sans rapport d’autorité. Un tel environnement permet d’entamer un dialogue constructif entre les trois groupes, de faire émerger les conflits existants et de démonter les stéréotypes et préjugés mutuels. Pendant six mois, des groupes composés d'une quinzaine de jeunes, de quatre policiers et de quatre professeurs se sont réunis régulièrement. Les ateliers sont préparés et animés par deux animateurs (homme et femme) en collaboration avec les jeunes et ont lieu dans un environnement neutre (un centre pour les jeunes). Ils se déroulent en trois moments :

 séance de préparation : avant l’atelier les jeunes se réunissent avec les animateurs pour décider quels sujets y seront traités ;

 échanges entre les jeunes, la police et les professeurs sous la supervision des animateurs ;

 évaluation de la séance : la police et les professeurs se réunissent avec les animateurs afin d’évaluer la séance. Avant la mise en œuvre des « rencontres critiques », une phase de préparation a été nécessaire. Elle a permis de mettre en relation les centres éducatifs ou de jeunes avec les équipes d’éducateurs, d'élaborer un diagnostic préalable grâce à la méthode des groupes de discussion et de mener une courte formation pour les animateurs. Tout au long du projet, une évaluation a été conduite sous forme d’enquêtes, d’entretiens en profondeur et d’observations. Afin de répondre à l’objectif de reproductibilité, le projet a déterminé des conclusions basées sur les résultats des ateliers et de l’évaluation. Celles-ci ont ensuite été présentées publiquement. Pilotage du projet et partenariat Le projet est piloté par la direction des services de prévention de la municipalité de Barcelone, en partenariat avec la Guardia Urbana (police municipale) et les centres pour les jeunes El Submarí (quartier de La Marina) et Martí Codolar (quartier d'Horta).

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Le projet a aussi été réalisé en partenariat avec l'Open Society Initiative qui a financé une partie des activités.

Résultats et perspectives Les ateliers ont permis aux policiers, professeurs et jeunes de développer une meilleure connaissance réciproque dans un cadre de respect et de confiance. La ville de Barcelone prévoit d’élargir le projet à trois autres groupes dans trois autres quartiers.

Atelier bande dessinée, projet développé par la ville d’Aubervilliers Contexte et nature du problème La municipalité d’Aubervilliers a fait de la réduction des tensions entre jeunes adultes et policiers l'une de ses priorités. Objectif Le projet avait pour objectif d’instaurer des espaces d’échange entre la jeunesse et les policiers afin de « déconstruire » les représentations existant de part et d’autre. Activités et stratégie La ville a organisé des ateliers de bande dessinée autour de Berthet One, ancien détenu et aujourd’hui dessinateur reconnu, qui ont réuni chacun une vingtaine d’adolescents de onze à dix-sept ans. L'objectif était d'aborder, par le truchement du dessin, les représentations que les jeunes ont de la police. Les ateliers se sont déroulés à la Maison des jeunes pendant les vacances scolaires, afin que les jeunes puissent participer.

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À la fin de chaque session, un échange était organisé autour d'un goûter avec la commissaire de police et son adjointe. Ils ont permis de dissiper certaines idées reçues de part et d'autre. Pilotage du projet et partenariat Le service prévention aide aux victimes et interventions publiques de la ville d’Aubervilliers a piloté le projet en partenariat avec l’office municipal de la jeunesse, le club de prévention et le dessinateur Berthet One. Résultats et perspectives Au total, les jeunes ont créé dix-sept planches qui parlent de situations vécues ou imaginées. Beaucoup de jeunes ont dessiné sur les contrôles sur l'espace public, ceux qu'ils subissent ou dont ils sont témoins. Les jeunes se sont sentis très valorisés par le fait que les plus hauts responsables de la police à Aubervilliers viennent à leur rencontre et beaucoup ont manifesté leur surprise en découvrant qu'il s'agissait de deux femmes. Au-delà, il est évident que le chantier ouvert par cette démarche – contrer les idées reçues entre jeunes et police – est immense. Mais il s'agit d'un premier pas concret.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

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Planches rĂŠalisĂŠes par de jeunes Albertivillariens dans le cadre des ateliers menĂŠs avec Berthet One

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Projet Permis piéton, développé par la ville d’Aubervilliers Contexte et nature du problème Ce projet s’inscrit dans le cadre de l’initiative de la ville d’Aubervilliers de travailler sur les relations police-jeunes dès le plus jeune âge. Les élèves de CE2 commencent à se déplacer seuls ; il apparaît nécessaire de les sensibiliser aux dangers de la rue. Le but de l’action est de responsabiliser l’élève-piéton à travers une méthode participative. Apprendre à se déplacer seul n’est pas inné, cela demande un accompagnement abordant les pièges à éviter face à un environnement changeant ainsi que les règles à respecter lorsque l’on est piéton et usager de l’espace public. Objectif L’objectif de ce projet est de permettre aux jeunes âgés de neuf à onze ans, scolarisés en classe de CE2, d’acquérir sans risque les habitudes et attitudes leur permettant de se déplacer seuls en toute sécurité. Activités et stratégie L’action s’est déroulée en plusieurs temps :

 intervention dans les classes d’un agent de police municipale ;  révisions en classe avec les enseignants ;  animation par un agent de police municipale sur les thèmes des dangers de la rue grâce à la méthode du photolangage ;

 épreuve pratique, dans un parc de la ville, animée par la police municipale et composée de trois ateliers : un parcours à pied, « position latérale de sécurité » et « protéger, alerter, secourir » ;

 épreuve d’évaluation, sous forme de questions à choix multiples en classe, réalisée par les agents de police municipale ;

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 remise officielle du « Permis piéton » à l’hôtel de ville par un élu, suivie d’une collation et de la remise de cadeaux en rapport avec la sécurité des piétons.

Pilotage du projet et partenariat Le projet a été piloté par le service prévention, aide aux victimes et interventions publiques de la ville d’Aubervilliers en partenariat avec l’Éducation nationale et la police municipale. Les médiateurs de jour et les parents d’élèves ont été également sollicités pour accompagner les élèves lors des trajets entre l’école et le lieu de l’épreuve pratique. Une société d'assurances a fourni les kits pédagogiques. Résultats et perspectives Les retours des enseignants et directeurs d’école ont été positifs. Ceux-ci ont souligné que l’action a contribué à améliorer les rapports entre les enfants et les agents de police municipale. En 2015, 460 élèves de 22 classes des écoles d’Aubervilliers ont participé au projet. La municipalité a l'intention de le reconduire après 2015.

Un film sur le rapprochement policejeunes, projet développé par la ville d’Aubervilliers Contexte et nature du problème Ce projet s'inscrit dans la continuité d'une recherche-action, « Dialogue police-jeunes à Aubervilliers », entreprise par l'un des deux chargés de mission jeunesse de la ville en 2011 dans le cadre d'une recherche universitaire. Le conseil local des jeunes participait déjà à une réflexion sur ce thème dans le cadre d'ateliers regroupant des professionnels de la jeunesse, des policiers, des élus de la ville, des sociologues et des jeunes Albertivillariens.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Les chargés de mission jeunesse ont observé que l'image de la police auprès des jeunes était discréditée par les difficultés que les policiers rencontrent dans certains quartiers (notamment la brigade de sécurité des territoires, qui circule à pied sur des territoires précis). De nombreux jeunes ont intériorisé l'idée que leur « territoire » est propice aux dérapages. Ce constat a amené la municipalité à faire participer le conseil local des jeunes au projet. Objectif À travers la mobilisation des jeunes par une action éducative et critique de la citoyenneté, le projet a pour objectif d'interroger les représentations réciproques des jeunes et des policiers et de promouvoir le dialogue afin de sortir de la logique de la confrontation. Il s'agit aussi de favoriser une meilleure cohésion sociale dans les quartiers, notamment grâce à la participation du conseil local des Jeunes. Activités et stratégie Une des idées centrales du projet était de réaliser un film et de créer et animer un média destiné à apaiser les relations entre la police et les jeunes. Par le dialogue, la concertation et les propositions pour la réalisation d’actions concrètes au service de leurs concitoyens, le conseil local des jeunes d’Aubervilliers se veut un laboratoire d'une citoyenneté participative. Les jeunes membres du conseil doivent respecter une charte morale autour de principes communs : le respect de la démocratie et des valeurs républicaines, l'engagement citoyen, la volonté d’influer sur l’image d’une « jeunesse-ressource » responsable et impliquée dans la vie de la cité, le souhait de donner une image de proximité entre les jeunes, les élus et les institutions, dont la police. Des groupes de jeunes motivés ont participé au projet. Le conseil local des jeunes a ainsi organisé plusieurs rencontres entre jeunes et policiers de la police nationale. Ces échanges ont été filmés et ont donné lieu à la réalisation d’une vidéo d’une quinzaine de minutes, mise à disposition de tous les professionnels travaillant sur le thème des rela-

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tions police-population pour servir de support d’échanges et d’outil de médiation. Pilotage du projet et partenariat Le projet a été mis en place par deux chargés de mission jeunesse de la ville d'Aubervilliers, en partenariat avec le conseil local des jeunes d’Aubervilliers (CLJA), le commissariat de la police nationale d’Aubervilliers et le service de prévention, aide aux victimes et interventions publiques de la ville d’Aubervilliers. Résultats et perspectives Le film sera mis à disposition de tous les professionnels qui souhaitent travailler sur la relation entre les jeunes et la police. Il pourra servir de support d’échanges au niveau local pour développer la culture du dialogue et l’image d’une jeunesse-ressource.

« Mets ton casque », projet développé par la ville d’Amiens Contexte et nature du problème Le quartier Amiens Nord a connu des violences urbaines durant l’été 2012 lors desquelles plusieurs jeunes du quartier se sont confrontés aux forces de l’ordre. La mise en place de la zone de sécurité prioritaire (ZSP) sur le quartier s’est traduite par une présence renforcée des services de police suivie par un travail de fond entrepris par l’État et la ville d’Amiens. Parmi les différentes initiatives développées dans ce quartier, la ville d’Amiens a mis en place un projet réunissant des jeunes des quartiers nord et les policiers autour d’une cause commune : le port du casque en deux-roues. En effet, les chiffres nationaux de la Prévention routière indiquent que l’absence de casque est l’un des facteurs d’accidents mortels en deux-roues.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Objectif Ce projet a pour premier objectif l’amélioration des relations entre les jeunes des quartiers réputés difficiles (dont la ZSP) et les services de police (nationale et municipale) en faisant mieux connaître l’action des policiers auprès de la population et surtout des jeunes. Activités et stratégie Face à la difficulté des policiers à prévenir les accidents en deux-roues, la ville a décidé de développer un projet en faisant participer des jeunes de quatorze à vingt-cinq ans et plusieurs policiers nationaux et municipaux à la réalisation d’un clip de sensibilisation. La ville et ses partenaires ont organisé un concours vidéo destiné aux jeunes autour du thème des conduites à risques en deux-roues. Le clip réalisé par six jeunes du quartier nord encadrés par sept policiers municipaux et nationaux met en scène un adolescent circulant en deuxroues de façon irresponsable et sans casque. On le voit manquer de renverser un couple de passants avec une poussette avant d'avoir un accident sans gravité. L'action avait un double avantage puisqu'elle a permis de produire ce clip mais aussi de rassembler des jeunes et des policiers qui ont travaillé ensemble, pendant six mois, sur ce projet. Pilotage du projet et partenariat Le projet est porté par la direction de la sécurité et de la prévention des risques urbains de la ville d’Amiens en partenariat avec la police nationale, la police municipale, le service prévention-médiation, le service jeunesse, le cabinet Deffontaines et l’association picarde d’action préventive (APAP). Résultats et perspectives Le projet a donné l'occasion aux jeunes et aux policiers de mieux se connaître. Il a permis d’avancer des pistes d’action pour diminuer les conduites à risques en deux-roues telles une campagne de prévention

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avec des mères de famille (affiches et bâche sur immeuble), un concours de miniclips détournés et une « performance » associant des graffeurs pour sensibiliser les jeunes aux conduites à risques et à la sécurité routière. Les jeunes et les policiers ayant participé au projet ont manifesté leur désir de continuer le travail et resteront donc associés à la suite du projet. Le clip gagnant a été présenté hors compétition dans le cadre du Festival international du film d’Amiens. Le projet a été salué par le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, comme « un exemple de dialogue entre les jeunes et la police » et fera probablement l’objet d’une diffusion nationale. Capture d’écran issue du clip vidéo de sensibilisation Sortez casqués.

Capture d’écran issue du clip vidéo de sensibilisation Sortez casqués.

3. Participation des habitants >> Convient-il de faire participer les citoyens aux activités et actions de police ? Si l’on accepte le principe d'actions de rapprochement citoyens-police, cela mène à réfléchir à la place des habitants dans la quête de sécurité pour tous. La situation a évolué : les citoyens sont de mieux en mieux organisés ; ils ont des attentes de plus en plus précises en matière de sécurité et disposent d’outils performants pour les communiquer aux autorités, notamment les réseaux sociaux et internet. De plus, ils de-

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

mandent à être consultés et pas seulement informés, et attendent de leurs forces de police qu'elles agissent avec transparence. D'un autre côté, il existe une demande croissante de la part des institutions policières et des gouvernements de voir les citoyens davantage engagés dans les activités de police. L’instauration des « rondes » en Italie, le recrutement de policiers volontaires par la police métropolitaines de Londres, les « citoyens volontaires au sein de la police nationale » en France en sont quelques exemples. Ceci soulève un certain nombre de questions :

 De quelle façon la police est-elle prête à accueillir cette demande d’implication des habitants, notamment le besoin d’être informés sur l’activité policière, de recevoir une suite lors de plaintes ou requêtes, voire de participer à la définition des priorités de l’action policière ?

 Quels sont les types d'activités qui peuvent être déléguées à des habitants volontaires en matière de police de proximité ?

 Comment les habitants voient-ils le rôle qu’ils pourraient jouer ? Ont-ils été invités à définir leurs attentes ? Que signifie pour eux une implication, un engagement au-delà de la récrimination et de la revendication (sachant que celles-ci sont le plus souvent liées à un événement ponctuel) ?

 Qui sont les interlocuteurs représentatifs des habitants ? Quel rôle pour la gouvernance locale dans ce rapprochement entre les citoyens et la police ?

 Quelle est la portée de ce type d’activités et comment peut-on les définir ?

 Comment travaillent les volontaires avec les institutions de police ?  Les autorités locales soutiennent-elles les initiatives visant à engager des citoyens volontaires pour des activités de patrouille, de contrôle et visant à rassurer la population ?

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>> Quelle implication des citoyens dans les activités de la police ? Il s'agit de mettre en place un modèle de police avec la population (police de proximité) plutôt qu'un modèle de police par la population afin d'éviter le « vigilantisme » (c'est-à-dire faire exercer la loi ou un code moral particulier de manière individuelle et en dehors de toute procédure judiciaire légale). Il existe un peu partout en Europe des projets centrés sur l’engagement direct et volontaire des citoyens dans les activités de police. Baixa-Chiado, « Focus on the Street », projet développé par la ville de Lisbonne

Baixa-Chiado, « Focus on the Street », projet développé par la ville de Lisbonne Contexte et nature du problème

Visuel de reconnaissance affiché sur la vitrine des commerçants « points de contact »

Dans le cadre du projet « Community Policing » pour la sécurité dans le quartier de Baixa-Chiado, développé depuis 2007, la police municipale de Lisbonne a souhaité développer un projet local de sécurité urbaine à l’égard des touristes et fondé sur la participation des commerçants.

Situé en centre-ville et très peuplé, le quartier de Baixa-Chiado est aussi le plus commercial de Lisbonne, attirant notamment de nombreux touristes qui arrivent par bateau de croisière. Alors que Lisbonne cherche à renforcer le tourisme de croisière, il est d'autant plus important pour la municipalité de préserver la paix publique et de bonnes relations avec la police dans ce quartier.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Objectif L’ambition du projet est d’améliorer les relations entre la police et les touristes et entre les touristes et la population locale. Activités et stratégie Le projet développé par Lisbonne s'inscrit dans le cadre du plan municipal « Grand Options » pour 2013-2017. Dès le départ, l'évaluation a été considérée comme un aspect méthodologique clé. Lors de la phase de préparation, un diagnostic des problèmes ayant le plus de conséquences sur le quartier Baixa-Chiado a été établi, sur la base des informations recueillies lors de réunions entre l’évaluateur externe, la police municipale, les services municipaux, les commerçants locaux et le port de Lisbonne. Lors de la phase de mise en œuvre, la police locale a reçu une formation en relations interpersonnelles, en techniques de communication et en anglais afin de répondre aux besoins spécifiques des touristes qui fréquentent Baixa-Chiado. Des protocoles d'accord ont été conclus avec les commerçants pour que ceux-ci acceptent d'être « points de contact » avec la police et apposent une affiche en vitrine indiquant aux touristes qu'ils peuvent entrer dans cet établissement demander de l'aide s'ils ont été victimes d'agression ou de vol. Au préalable, un questionnaire avait été envoyé aux commerçants pour déterminer s'ils étaient prêts à participer. Au début du projet, seulement un tiers des commerçants ont manifesté un intérêt mais leur nombre a augmenté par la suite. Dans le questionnaire, il leur était également demandé leur opinion sur le travail de la police municipale et s'ils se sentaient ou non en sécurité dans le quartier. Outre les affiches, des prospectus et une brochure en quatre langues ont été produits pour informer les visiteurs de l'existence des points de contact dans les magasins. L'information est aussi relayée sur les crochets pour sacs à main que l'on trouve dans les cafés et restaurants.

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Pilotage du projet et partenariat Le projet est piloté par la ville de Lisbonne et la police municipale. Il a été réalisé en partenariat avec l’administration locale du quartier (Junta de Freguesia), l'Association de valorisation de Baixa-Pombalina (Associação de Dinamização da Baixa Pombalina) et le port de Lisbonne.

Résultats et perspectives Fin 2015, 48 magasins et restaurants de Baixa-Chiado sont points de contact officiels de la police et affichent l'autocollant les identifiant comme tels. De plus, 163 crochets pour sacs à main ont été distribués auprès de 18 restaurants partenaires du projet. La campagne donne déjà ses fruits. On observe une attitude généralement plus prudente des touristes. De plus, on constate une amélioration de la relation entre la police et les citoyens dans le quartier visé par le projet. Le projet a aussi permis de renforcer la coopération informelle avec d'autres forces de police de la région et une meilleure connaissance du territoire de la part des policiers. La municipalité de Lisbonne prévoit de continuer le projet en augmentant le nombre de commerces participant comme point de contact et en réduisant le temps d’intervention des policiers.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

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Chapitre 3 >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

Recommandations >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Les villes du Forum européen pour la sécurité urbaine ont rappelé dans le Manifeste « Sécurité, Démocratie et Villes » d’Aubervilliers et SaintDenis (2012) que la police doit être considérée comme un acteur à part entière de la chaîne de la prévention et que les villes doivent jouer un rôle d’intermédiaire entre police et société civile dans le but de renforcer les relations police-population. Dans l’esprit de ce manifeste et alors qu'elles ont travaillé ensemble à mettre en place des projets locaux destinés à renforcer les relations police-population, les villes partenaires du projet IMPPULSE tiennent à souligner certains principes fondamentaux régissant la relation entre police et citoyens. En outre, elles proposent une série de recommandations pouvant bénéficier à l’ensemble des villes concernées par cette problématique.

Principes

>>>>>>>>>>>>>> Un certain nombre de principes sous-jacents déterminent la relation police-population :

 Transparence et reddition des comptes : sont à garantir dans l’information donnée par la police au citoyen et la possibilité pour la population de contester l’action de la police auprès d’un médiateur.

 Représentativité : favoriser une diversité de genre et d’origine ethnique dans le recrutement et l’organisation opérationnelle des corps de police.

 Proximité et accessibilité : la police doit être accessible à la population. Il est important de diminuer le plus possible la distance physique entre les policiers et les habitants (par une présence permanente sur le terrain visible grâce aux patrouilles pédestres, équestres ou cyclistes) mais aussi de faciliter l’accès aux services de police grâce aux moyens technologiques actuels (téléphone, internet et réseaux sociaux).

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 Réactivité : la police doit répondre le plus rapidement possible aux attentes et demandes de la population, quels que soient le lieu et l’heure.

 Égalité de traitement : la police doit rester impartiale à la fois dans son approche des individus et dans la gestion des conflits.

 Proportionnalité et subsidiarité : la force ne doit être utilisée qu’en dernier ressort et si possible non pas par les policiers de proximité mais par d’autres équipes.

Recommandations préalables à la mise en œuvre de projets visant au renforcement des relations police-population

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Un cadre global

 Il convient de rappeler le lien avec la justice et toute la chaîne pénale afin que la population ne considère pas que la police est seule responsable de la sécurité ; la police doit s'inscrire parmi l’ensemble des acteurs œuvrant pour la cohésion sociale au sein de la communauté.

La doctrine de l’action policière

 La doctrine de l’action policière doit être fondée sur les principes de police de proximité comme méthode d’intervention. Ceci afin d’anticiper les problèmes au lieu d’uniquement y réagir et d'apporter des réponses aux problèmes quotidiens des citoyens au même titre que les réponses aux urgences ou liées à la grande criminalité.

 S’appuyer sur le principe de coproduction de la sécurité pour instaurer des partenariats avec d’autres institutions qui, à l’échelle locale, peuvent aider à analyser les phénomènes de criminalité, mieux

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

comprendre les attentes et besoins des citoyens en matière de sécurité, et contribuer à y répondre.

 La qualité du service rendu doit motiver l’action des forces de police davantage que la mesure quantitative de l’activité des services.

L’organisation des services de police

 La proximité ne se décrète pas. Elle se construit au terme d’un réel processus d’élaboration collective, sans imposer des projets par une organisation trop centralisée, mais bien plutôt par une approche partant du terrain, en favorisant l’initiative au niveau local, en tenant compte des principes de subsidiarité et de proximité dans une approche partenariale, et en impliquant toute la ligne hiérarchique.

 Elle doit permettre de prendre en compte de façon prioritaire les attentes et besoins des citoyens et de leur rendre des comptes sur la résolution des problèmes. Le recueil et l’analyse des attentes de la population en matière de sécurité doivent être effectués avant d’établir les priorités opérationnelles.

 Elle doit tenir compte des habitants des quartiers excentrés et suburbains, notamment les quartiers défavorisés, en prévoyant une réponse adaptée aux minorités. La police doit être à l’image de la société qu’elle sert et représentative de la population dans toute sa diversité. Lors de l'embauche de nouvelles recrues, la hiérarchie policière devra y être attentive en priorisant, à compétences égales, l’égalité des chances de tous les candidats.

 Assurer que les apports de services de police extérieurs à ceux des quartiers s’inscrivent dans une logique qui ne conduise pas à invalider le travail de proximité mené quotidiennement sur du long terme.

Le rôle des villes

 Le rôle d’intermédiaire que peut jouer la ville afin de construire et de renforcer la relation police-population doit être accepté aussi bien par les citoyens que par les organisations de police.

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 En tenant compte des différentes réalités vécues dans les pays européens, par exemple en termes d’obligations juridiques et de cultures de police, les villes doivent s’impliquer dans la mise en place et l’animation d’instances de concertation représentatives de l'ensemble de la population et notamment des groupes les plus éloignés des institutions, qui permettront d’établir un dialogue autour des priorités d’actions préventives. Elles peuvent également jouer un rôle dans l’encadrement de la participation des citoyens à l’action préventive des forces de l’ordre.

Le citoyen doit pouvoir :

 dans un contexte général de participation faible des citoyens à la vie publique, exprimer ses attentes en matière de sécurité et être entendu ;

 être informé des suites données aux problèmes de sécurité qui le concernent directement, ainsi que des mesures prises par la police pour la résolution des problèmes de sa ville ;

 participer à l’action policière sans pour autant qu'il lui soit demandé ni permis de suppléer la police. Cette participation doit être encadrée par un certain nombre de principes éthiques et de garde-fous afin d’éviter les dérives.

La question de l’image de la police

 La police doit être visible avec des uniformes et des équipements adaptés aux circonstances ;

 elle doit organiser un accueil qui tienne compte des contraintes géographiques et des composantes sociologiques de la population.

 Il convient de valoriser l’image du policer de quartier et le travail de proximité de la fonction de police auprès des policiers eux-mêmes en les resituant comme prioritaires dans la relation police-population et éviter de ne valoriser que les interventions de force ou le crime fighting.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

 La police doit organiser sa communication avec les médias de façon à ce que son travail y soit mieux représenté et valorisé. L’image de la police véhiculée par la presse, internet, les réseaux sociaux, les fictions, romans, séries ou autres films et documentaires, sans négliger le besoin d’une meilleure connaissance de l’action policière dans toutes ses dimensions, doit aussi être celle d’une police dans ses rapports quotidiens avec la population. Elle ne doit pas être seulement d'ordre émotionnel ni être exclusivement focalisée sur les fait divers.

Formation et évaluation

 La formation de base et la formation continue de la police peuvent permettre une meilleure relation police-population et doit aborder la gestion de la violence, les techniques de médiation et les méthodes de communication lors de rencontres « normales » ou « critiques » avec la population. Il convient de former les policiers, en particulier les nouvelles recrues, sur les représentations mutuelles et de promouvoir la connaissance de chaque territoire et de sa population.

 Il est indispensable de développer des indicateurs et des outils de suivi quantitatifs et qualitatifs de l’évolution de la relation policepopulation afin de mesurer les effets des projets engagés. Ensemble, les villes souhaitent affirmer que la police doit avoir pour principale valeur la qualité de sa relation avec la population. En effet, les villes considèrent que cette relation est la première priorité afin de maintenir la paix publique. Trouver les conditions d’un respect mutuel, d’un dialogue et d’un échange qui garantissent les droits des citoyens en tenant compte des contraintes de la police sera le point d’équilibre de la relation entre la police, la ville et les citoyens.

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Ces orientations sont fondées sur :

 Les recommandations du Manifeste d’Aubervilliers et Saint-Denis « La police comme acteur de la prévention ».

 Le Code européen d’éthique de la police du Conseil de l’Europe (cf. Recommandation Rec (2001) 10 du Comité des ministres aux États membres sur le Code européen d'éthique de la police).

 La résolution du Comité exécutif du Forum français pour la sécurité urbaine (FFSU) de février 2014 « Pour une police nationale au service des citoyens ».

 Les réponses des villes du projet IMPPULSE au questionnaire qui leur a été envoyé.

 Les échanges ayant eu lieu lors des réunions de coordination du projet.  Les échanges ayant eu lieu avec le comité d’accompagnement.  L’ensemble des projets sur les questions de police portés par l’Efus depuis sa création.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

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Chapitre 4 >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

Des pistes pour la mise en œuvre d’un projet et son évaluation >>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Contribution de Caroline De Man, collaborateur scientifique au Centre de recherches criminologiques de l’Université libre de Bruxelles (ULB). Rédigées sur base de l’évaluation des projets pilotes développés dans le cadre du projet IMPPULSE.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Comment définir un projet ? Comment se saisir des phénomènes sociaux présents sur un territoire et les transposer en problèmes à résoudre ? Comment concevoir l’implication de la population ? Comment justifier l’orientation des actions qui donneront corps au projet et seront menées sur le terrain ? Voici quelques questions cruciales auxquelles tout initiateur de projet doit pouvoir répondre avec clarté et pertinence. À défaut, le projet s’expose à une remise en question de son bien-fondé et de sa cohérence, embarquant dans cette confusion l’ensemble des participants. Voici quelques pistes qui, sans prétendre à l’exhaustivité, peuvent guider une réflexion sur la conception et l'évaluation d’un projet. Ces pistes sont présentées comme un tout cohérent ; on ne peut donc les considérer séparément. Il apparaît clairement que la conception d’un projet doit nécessairement définir les termes de son évaluation. Tout projet, pour sa conception et sa mise en œuvre, repose nécessairement sur l’articulation de différentes compétences spécifiques et savoir-faire particuliers.

1. Mobiliser les ressources accessibles et disponibles pour définir le projet à partir de données objectivées

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>  Se fonder sur des outils de type diagnostic local de sécurité qui offrent toute une série d’informations et d’analyses sur les phénomènes sociaux observables sur le territoire.

 Solliciter les services qui produisent ce type d’outil pour avoir accès à leurs connaissances des réalités sur le terrain et être en mesure de dégager des pistes de problèmes sociaux qui pourraient être à la base du projet.

 Accorder de l’importance aux données qualitatives récoltées auprès des acteurs directement concernés par les problèmes retenus. En recourant par exemple à des entretiens avec les professionnels des secteurs concernés et les populations avec lesquelles ils sont en

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contact. L’expérience de ces acteurs et leurs perceptions des phénomènes sociaux qui retiennent l’attention des initiateurs de projet contribueront utilement à la définition des problèmes et des priorités de ce dernier.

 Dès le processus de conception du projet, s’entourer de ressources humaines dont la compétence est établie sur la base d’une expertise professionnelle spécifique dans les problèmes pressentis et d’une maîtrise des méthodes d’analyse. Associer ces compétences au sein de l’équipe de conception du projet est indispensable pour prioriser de façon pertinente l’importance des phénomènes sociaux susceptibles d’être au cœur du projet. Objectif à atteindre : Consolider les axes d’action retenus en les confrontant aux expériences des différents acteurs directement concernés par les problèmes abordés.

2. S’entourer de ressources humaines dont la compétence est établie, sur la base d’une expertise dans les problématiques à traiter

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>  Il est nécessaire de se distancier des réalités locales et de recourir à un apport de connaissances pertinentes pour compléter l’information accumulée jusque là sur les phénomènes sociaux pressentis, les types de projets qui existent par ailleurs, les principales difficultés rencontrées, etc.

 Il est essentiel de faire « rupture » avec les routines professionnelles et le sens commun. Tout métier, quelle que soit sa nature, s’exerce en se reposant sur des logiques et des intérêts professionnels particuliers. Ceux-ci vont naturellement influer sur la compréhension des phénomènes sociaux pressentis pour être au cœur du projet, d'où l'importance d'aborder ces problèmes avec un esprit aussi libre que possible.

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Sécurité et Tourisme : politiques locales concertées

 Les connaissances scientifiques sur les phénomènes sociaux visés sont des ressources essentielles pour parvenir à formuler de façon adéquate les problématiques pressenties. Il convient d'éliminer les jugements de valeurs, présupposés et autres stéréotypes et de s'appuyer sur des données probantes pour formuler ces problématiques.

 Il est important de tenir compte des différents niveaux d’analyse des problématiques pressenties. En effet, toute une série de déterminants pèse sur les phénomènes sociaux retenus et sur l’activité professionnelle des personnes qui vont être impliquées dans le projet. Que ces déterminants soient de nature individuelle, interactionnelle, professionnelle, organisationnelle, institutionnelle ou politique, il est primordial d’en tenir compte pour empêcher qu’ils ne soient des obstacles au projet. Objectif à atteindre : Veiller à la pertinence du projet en s’assurant de la mise en relation adéquate des problématiques retenues et des conditions (institutionnelles, organisationnelles, professionnelles, individuelles…) à prendre en compte pour pouvoir mener le projet.

3. Intégrer un processus d’évaluation dès le début de l’élaboration du projet pour que l’évaluation soit un levier et non une contrainte

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>  Les types d’évaluation26

26- Tange, C., Lacroix, J., 1997, Evaluer les contrats de sécurité. Portefeuille de lecture sur l’évaluation des politiques publiques, Bruxelles, éd. Politeia.

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IMPACT Besoins

PERTINENCE

Besoins Situations intermédiaires

Situation initiale

COHÉRENCE (de l’action)

Résultats

Environnement

Effets

Objectifs---Moyens---Ressources---Intervenants

EFFICIENCE EFFICACITÉ

• Évaluation de l’efficacité : la question centrale à retenir est « L’objectif a-t-il été atteint ? » L’évaluation est centrée sur l’action et son résultat. • Évaluation de l’efficience : il faut répondre à la question de savoir si l’objectif a été atteint en mobilisant au mieux les ressources dégagées. • Évaluation de l’effectivité : il faut s’interroger avant tout sur l’effectivité de la mise en oeuvre des pratiques. Le regard se porte avant tout sur les faits. • Évaluation de la cohérence : elle vise l’étude de l’adéquation des objectifs aux moyens, ressources et intervenants mobilisés par le projet. • Évaluation de l’impact : elle concerne les relations entre le projet et les éventuelles modifications de l’environnement sur lequel il prétend agir et dans lequel il s’insère.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

 Compte tenu du type de projet, il convient d'analyser le type d’évaluation à privilégier et donc l’objet qui sera étudié. L’objet de l’évaluation est défini sur la base des connaissances et informations déjà accumulées par les différentes expertises réunies. Du choix du type d’évaluation dépend le type de compétences demandées à l’évaluateur.

 L’appréciation des moyens à mettre en œuvre pour l’évaluation d’un projet ne peut se résumer à un pourcentage du budget du projet défini arbitrairement. Il faut impérativement faire une projection des ressources humaines et financières nécessaires selon le type d’évaluation pressenti, et adapter le choix selon les moyens à disposition.

 Un processus d’évaluation (objet, moyens, type d’évaluation) intégré dès la conception du projet contribue à l’appréciation des conditions de faisabilité et du type de résultats qui peuvent être attendus du projet. Objectif à atteindre : Définir les limites de faisabilité du projet au regard des problématiques retenues, des objectifs que le projet entend poursuivre et des moyens humains et financiers disponibles.

4. Encourager la participation de la population en sollicitant ses différentes composantes dès la conception du projet

>>>>>>>>>>>>  Il s'agit notamment de récolter l'expérience des habitants des phénomènes sociaux pressentis (aussi évoqué plus haut). Il convient de comprendre et d'appréhender la population comme un ensemble hétérogène. En effet, chacune de ses composantes vit une expérience

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particulière de la ville, du vivre ensemble, et du contact avec les institutions.

 En organisant une concertation dès les premières étapes du projet pilote, l'initiateur pourra mieux prendre en compte la diversité la population visée par le projet. Il s'agit en effet de ne pas présupposer l'adhésion au projet de la part d'une communauté qui serait cohérente et consensuelle, ce qui n'est pas le cas.

 Les différentes composantes de la population ont des attentes parfois distinctes envers les institutions dont il faut tenir compte dans l’élaboration des problématiques et la définition des objectifs du projet.

 L’implication des différentes composantes de la population dans la conception du projet contribue à leur adhésion, alors qu'elles seront amenées à participer à ce projet. Une implication en amont de la population renforce l’effet cohésif du projet. Objectifs à atteindre :

 Définir un intérêt collectif autour des problématiques retenues en tenant compte de la pluralité des attentes de la population et en associant ses différentes composantes à la conception du projet.  Encourager l’adhésion au projet de la population et des différents participants pressentis.

5. Tenir compte de la précarité inhérente aux projets pilotes financés à court terme

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>  Ce type de projet est précaire car ils dépendent d’un cofinancement à court terme. Toute volonté de pérennisation devra reposer sur les ressources humaines, logistiques et financières de l’initiateur du projet.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

 Il est aussi rendu précaire car les activités prévues dans le cadre de tels projets entraînent de nouvelles tâches pour les services chargés de les gérer. Le personnel ne peut pas toujours compter sur l’augmentation des moyens du service. Tous les échelons des participants sont soumis à cette augmentation de charge.

 Outre l’enthousiasme que la mise en œuvre du projet peut susciter, l’accroissement de la charge peut constituer un risque important de découragement et de désistement parmi les participants au projet.

 La précarité de ce type de projet tient aussi aux modalités d’implication des participants, y compris la population. Plus les participants seront sollicités tardivement, moins leur adhésion sera encouragée. Il ne faut pas mésestimer les formes de résistance qui peuvent apparaître en raison de la faible adhésion au projet. L’effet cohésif d’un projet collectif est d’autant plus soutenu que la mobilisation des participants se fait en amont de la réalisation des activités et que leurs points de vue ont contribué à la définition de l’intérêt collectif.

 Des nouvelles pratiques se créent au cours de la mise en œuvre de nouveaux projets. Ces pratiques restent fragiles car elles sont élaborées entre un nombre restreint de personnes. Quand la stabilité de fonction des personnes qui gèrent le projet est variable, les pratiques sont elles-mêmes exposées à la précarité. Le roulement du personnel de certains services risque de fragiliser la bonne gestion de ce type de projet. Objectifs à atteindre :

 Assurer la pérennisation du projet alors qu'il risque d'être fragilisé par des moyens humains et financiers limités, la mise en place de nouvelles pratiques qui demandent un changement dans l'organisation des services impliqués, une charge de travail supplémentaire et une certaine forme de résistance interne.

 Formaliser un ensemble bien établi de mécanismes et de procédés de gestion entre participants pour encourager des processus de passation de la charge de travail entre les personnes qui seront amenées à prendre part au projet.

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En conclusion

>>>>>>>>>>>>>>>> Dans un contexte de précarité de l’action publique, quand elle prend la forme de projets pilotes tels que ceux présentés ici, les quelques pistes formulées ont avant tout pour but d'attirer l’attention sur les enjeux liés à la conception, la mise en œuvre et l'évaluation d'un projet. S’outiller, en confrontant les expertises et les expériences, en associant les différentes composantes de la population, en posant des choix de moyens humains et financiers, de priorités et d’évaluation, apporte du crédit à la démarche de l’initiateur du projet. Cela permet également de définir les objectifs et les activités du projet en concordance avec les réalités locales, sans pour autant négliger les déterminants sociaux qui dépassent les limites du territoire considéré. Un projet qui repose sur un dispositif fondé sur la concertation et s’appuie sur un processus d’évaluation défini au préalable autorise son initiateur à avoir une communication claire sur ses avancées et ses échecs. C’est à cette condition que le projet peut susciter l’engagement des participants, encourager l’implication de nouveaux acteurs et s’inscrire dans la durée.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

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Fiches pays >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Allemagne

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Structure générale de la police et compétences du maire L'Allemagne étant un État fédéral, la police y est principalement organisée au niveau de l’État fédéré, le Land. Il existe toutefois quelques corps importants et spécialisés opérant au niveau fédéral.

Niveau État fédéré (Land) La Loi fondamentale de 1949 confie aux Länder l’organisation de la sécurité et des services de police, réservant en contrepartie à la Fédération la possibilité de créer quelques organes centraux comme la police des frontières ou la police criminelle. Chacun des 16 États fédéraux dispose donc de sa ou ses propres polices – sous le terme général Landespolizei. L’organisation policière des Länder relevant à la fois de chaque Land et de la Fédération, elle peut varier d’un Land à l’autre. Néanmoins, malgré l’autonomie de gestion des Länder qui engendre une situation parfois disparate d'un Land à l'autre, la tendance est à l’homogénéisation, un schéma commun structurant l’ensemble des services de police. Aussi, outre d’éventuelles polices spécialisées (police fluviale et maritime ou des autoroutes), trois polices principales coexistent au sein de chaque Land :

 1. La police de sécurité publique (Schutzpolizei) qui assume l’essentiel des missions policières telles le maintien de l’ordre ou la circulation routière. Elle agit principalement sur la voie publique.

 2. La police judiciaire (Kriminalpolizei) est compétente pour les affaires judiciaires d’un certain niveau de gravité qui requièrent des compétences particulières et ne peuvent donc être prises en charge par la police de sécurité générale.

 3. Les CRS – Compagnies républicaines de sécurité ou Gendarmerie

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mobile (Bereitschaftspolizei) effectuent de manière ponctuelle des missions de maintien de l’ordre, d’assistance ou de renfort. Toutes les trois sont Landerspolizei et sont placées sous l’autorité du ministère de l’Intérieur du Land. Les polices des Länder peuvent collaborer lors d’événements qui débordent la compétence particulière d’un Land (visites de chefs d’État étrangers, transport de déchets nucléaires).

Niveau fédéral Alors qu’il n’existe pas de police nationale globale, le droit fédéral influe fortement sur le caractère de la police des Länder. Quatre principaux services de police existent au niveau fédéral. Premièrement, l’Office fédéral de la police criminelle (Bundeskriminalamt) agit en étroite relation avec les Landeskriminalämter de chaque Land afin de coordonner la coopération entre la Fédération et les polices des Länder en matière de lutte contre la criminalité. À cet égard, il effectue une mission de recueil, de diffusion et d’exploitation des informations et communications liées à la criminalité et il est chargé des enquêtes sur les grandes affaires (terrorisme, extrémisme, espionnage, délits économiques) présentant un caractère international et définies par la loi. L'Office fédéral peut également être requis par le ministère public lors de faits graves. Il est en outre compétent pour les délits à motivation politique visant l’intégrité physique des membres des organes constitutionnels fédéraux ou concernant les atteintes à la sécurité intérieure. Cette institution est subordonnée au ministère fédéral de l’Intérieur. Deuxièmement, la police fédérale (Bundespolizei or BPOL) s’occupe de certaines missions importantes concernant le fonctionnement de l’État. Notamment, elle assure :

 la sécurité aux frontières et du transport national (les services de garde côtière, la surveillance des aéroports internationaux et des lignes ferroviaires) ;

 la protection des bâtiments fédéraux, des ambassades à Berlin et

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Bonn (l'ancienne capitale), et des deux principaux tribunaux du pays – le tribunal constitutionnel fédéral et la Cour suprême fédérale à Karlsruhe ;

 une force mobile pour la sécurité intérieure des événements ;  les forces antiterrorisme (GSG9). Les polices des Länder peuvent aussi faire appel à la police fédérale pour renforcer leurs propres compétences, sur requête du gouvernement régional. Les polices régionales mènent des investigations criminelles uniquement dans leur domaine de juridiction ; tous les autres cas sont renvoyés au service policier national approprié ou à l’organisme national d’enquête criminelle, le Bureau fédéral criminel de la police (Bundeskriminalamt, BKA). Enfin, et c'est une spécificité de l'Allemagne, le Parlement dispose de sa propre force de police (Polizei beim Deutschen Bundestag ou police du Parlement). Sous la responsabilité du président du Parlement, elle est chargée de la sécurité à l'intérieur du Bundestag et sur l'ensemble du site. En effet, en raison de l'immunité des parlementaires, les forces de police n’ont pas le droit d’intervenir au Bundestag.

Niveau local Il n’existe pas de véritable police municipale en Allemagne, mais les lois et règlements des différents Länder peuvent prévoir la mise en place de services spécialisés dans le maintien de l’ordre public dans les collectivités locales. Ces derniers peuvent s’appeler Ordnungsamt, Kommunaler Ordnungsdienst, Städtischer Ordnungsdienst ou Stadtpolizei (police de la ville, présente dans quelques villes de l’État de Hesse). Dans tous les Länder, les agents municipaux des services d'ordre font partie du personnel communal, sans nécessairement appartenir à la fonction publique locale. Ces services assurent la sécurité publique sur le territoire de la collectivité (dont font notamment partie les communes). Alors que c’est le maire de chaque commune qui décide éventuellement des fonctions qui leur sont attribuées, aux termes de la loi du Land sur la police, les

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agents municipaux sont habilités uniquement pour les fonctions suivantes :

relevés d'identité ; arrestations et détentions ;  vérification des documents établissant certains droits lorsque leur production est prévue par un texte ;

 expulsions ;  mise en sûreté et surveillance de marchandises ;  utilisation de la force, mais la seule arme autorisée est la matraque. Les forces de police locales peuvent aussi disposer de menottes et être accompagnées de chiens.

Police de proximité Plusieurs Länder (parmi lesquels Bade-Wurtemberg, Bavière, Hesse et Saxonie) ont des programmes de « surveillance de proximité ». Leur objectif principal est la prévention. Pour ce faire, les agents de proximité effectuent divers types de mission :

 patrouilles à pied, pour avoir un effet dissuasif sur la délinquance urbaine,

patrouilles autour des écoles et des maternelles, suivi des victimes potentielles de la jeune délinquance et du crime. L’État de Bavière a établi un système de « patrouilles citoyennes » : des bénévoles patrouillent en binôme afin de réduire le sentiment d’insécurité dans les quartiers. Ils sont armés d’une radio et d’un vaporisateur de poivre. Il existe également des programmes similaires en Bade-Wurtemberg, Hesse et Saxonie, où les citoyens peuvent assister leur police locale. Chaque Länder dispose aussi de son propre conseil de prévention qui mène une action de proximité, focalisée spécifiquement sur la prévention. La doctrine de police de proximité n’est pas considérée en Allemagne comme étant spécifique à la police, mais plutôt comme un

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

système de valeurs qui favorise l’amélioration de la sécurité dans la ville, par les conseils de la police communautaire27.

Contrôle extérieur de la police Il n'existe pas au niveau fédéral d'organisme central de contrôle de la police. Cette fonction revient aux Lands.

27- Donelly, D., Municipal Policing in the European Union: Comparative Perspectives, p.69

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Angleterre et pays de Galles

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Structure générale de la police

Système fortement décentralisé, avec peu de forces spécialisées à l'échelle nationale.

Au niveau régional et local Le maintien de l’ordre au Royaume-Uni est principalement assuré par 43 forces territoriales (dans certains cas appelées « constabularies »), chacune étant responsable d’un territoire bien défini. Ces territoires correspondent généralement aux différents comtés, bien qu'il existe quelques variations, notamment la fusion des comtés du West Sussex et de l'East Sussex. Chaque force territoriale est chargée d'assurer un service de police efficace et performant dans son territoire. Dans cet esprit, elle conserve une bonne marge d'autonomie pour ce qui a trait à son organisation interne et à sa structure. Les membres ont compétence dans l'un des trois systèmes juridiques du Royaume-Uni ; par exemple, un agent de police provenant de l'un des trois systèmes juridiques (Angleterre et pays de Galles, Irlande du Nord ou Écosse) a tous les pouvoirs dans son système, mais ceux-ci sont limités dans les deux autres systèmes. Chacune des forces territoriales est constituée de plusieurs unités de police de différentes tailles. L'unité de commandement de base (Basic Command Unit - BCU), généralement dirigée par un surintendant principal, est la plus grande unité au sein de laquelle les forces territoriales sont partagées. Celles-ci portent parfois le nom d'unité de commandement de base (Basic Command Unit - BCU), ou sont désignées d’une autre manière, telle que division (Division), zone (Area), unité de police locale (Local Policing Unit - LPU), ou équipe de police locale (Local Policing Team - LPT). La majorité des forces du territoire sont au moins

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

divisées en trois BCU, parfois plus. La plupart de ces BCU sont subdivisées en plus petites unités. L’Angleterre et le pays de Galles comptent 228 BCU (ou unités équivalentes). À Londres, la police métropolitaine (Metropolitan Police) utilise le terme unité de commandement opérationnel d’arrondissement (Borough Operational Command Unit - BOCU) pour les unités régionales (qui sont basées dans les 32 arrondissements de Londres, avec une unité affectée à la police de l'aéroport d'Heathrow). Le terme unité de commandement opérationnel (Operational Command Unit - OCU) est utilisé pour les unités spécialisées, notamment l’unité de commandement opérationnel de sécurité aérienne (Aviation Security OCU) qui œuvre dans toute la région londonienne. La police des West Midlands est divisée en 12 unités de police locale (Local Policing Units - LPU). À son tour, chaque LPU est organisée autour de quatre équipes policières principales (Core Policing Teams) qui chacune gère différents domaines essentiels : enquête, voisinage, intervention et équipe d’action communautaire et prioritaire (Community Action and Priority Team - CAPT). La police du Warwickshire est la première force de police britannique à avoir aboli les BCU. Celle-ci est maintenant directement divisée en cinq districts, chacun dirigé par un inspecteur en chef. Chaque force de police territoriale est sous le contrôle direct du chef de police. Le maire est responsable devant le comité de police et du crime (Police and Crime Committee) de l'assemblée de Londres (London Assembly). Les chefs de police sont élus conjointement par le commissaire de police et du crime (Police and Crime Commissioner). Ils peuvent également en être exclus.

Au niveau national Le travail des forces territoriales est complété par celui de plusieurs « organismes nationaux d’application des lois » (National Law Enforcement Bodies), également appelés « forces spéciales de police » (Special police forces), qui ont une compétence particulière dans un certain domaine au niveau national (de par ce fait, sont les seules forces de

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police nationales britanniques). Il existe actuellement cinq forces en service ayant des liens directs avec le gouvernement :

 L'Agence nationale de lutte contre la criminalité (National Crime Agency), qui intervient dans toute la Grande-Bretagne pour la lutte contre le crime organisé. Elle est le point de contact au RoyaumeUni pour les forces étrangères.

 La police des transports britannique (British Transport Agency), qui surveille et effectue des opérations sur certains réseaux ferroviaires (National Rail et Docklands Light Railway), sur le réseau Tramlink à Croydon et dans le métro londonien (London Underground Network), ainsi que sur la ligne vers Sunderland du métro de Tyne et Wear.

 La police de sécurité nucléaire (Civil Nuclear Constabulary) est chargée de la sécurité et de l'application des lois dans un périmètre de cinq kilomètres autour de tout site nucléaire au Royaume-Uni. Elle est également chargée de la sécurité du transport de toutes les matières nucléaires.

 La police du ministère de la Défense (Ministry of Defense Police) est chargée de la sécurité de tous les sites du ministère de la Défense au Royaume-Uni. Il existe également plusieurs autres organismes à l'échelle nationale qui sont gérés soit par l'Association des services de police (Association of Chief Officers), l’Unité nationale pour la prévention des crimes contre la nature (National Wildlife Crime Unit), l’office national de lutte contre le terrorisme (National Counter Terrorism Security Office) et le Service de renseignements sur la criminalité visant les véhicules (Vehicle Crime Intelligence Service) ou par les forces territoriales elles-mêmes. Par exemple, la division des opérations spéciales (Specialist Operations Divisions) de la police métropolitaine gère l’unité de renseignements concernant l’extrémisme et les désordres au sein du pays (National Domestic Extremism and Disorder Intelligence Unit) et le commandement de la protection (Protection Command) qui est chargé de la sécurité du gouvernement, de la famille royale et de la communauté diplomatique. La police de la ville de Londres est chargée du bureau national de renseignements sur la fraude (National Fraud Intelligence Bureau). La force de police de West Midlands dirige le Service national de rensei-

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

gnements balistiques (National Ballistics Intelligence Service). Les organismes nationaux tels que la Police des frontières (Border Force), le Bureau d’exécution des lois sur l’immigration (Immigration Enforcement), les services des douanes (Her Majesty’s Revenue and Customs), l’Agence des normes destinées aux conducteurs et aux véhicules (Driver and Vehicle Standards Agency) et la Commission indépendante des plaintes contre la police (Independent Police Complaints Commission) ont tous des fonctions semblables à celles des officiers de police (à l'exception qu’ils ne sont pas en mesure de procéder à des arrestations).

Police de proximité Le système anglais représente le modèle de police communautaire par excellence. Il s’agit d’une conséquence directe de la structure fortement décentralisée des services de police, dans lequel une équipe locale répond aux priorités du quartier dans lequel elle est basée. En 2012, le Home Office a réaffirmé son engagement à une approche locale de la police qui est accessible au public et qui répond aux besoins et aux priorités des quartiers grâce à :

 la présence de personnes visibles, accessibles et connues localement dans les quartiers, notamment les agents de police et les agents de soutien communautaire de la police (PCSOs) ;

 la participation de la communauté à la fois à l'identification des priorités et à la prise de mesures pour y faire face, et

 l'application de services de police ciblés et la résolution de problèmes permettant d’aborder les préoccupations du public dans les quartiers. Le site internet du Home Office souligne explicitement la nécessité de soutenir une force de police réactive qui travaille pour le service, et est responsable devant ses citoyens.

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Contrôle extérieur de la police Depuis la réforme en 2012, les chefs de police de chaque force territoriale doivent rendre des comptes aux commissaires de la police et du crime. Le groupe d'experts de la police et du crime (Police and Crime Panel PCP), bien qu’indépendant du bureau du commissaire de police et du crime (Office of the Police and Crime Commissioner - PCC), supervise son travail. Les tâches principales du PCC sont tout d'abord, d'examiner la proposition du PCC pour le montant des impôts locaux (Council tax) alloué aux services de police. Il peut également opposer son veto à ces propositions si le montant est considéré comme inapproprié. Ensuite, il examine le plan de police et de lutte contre la criminalité (Police and Crime Plan) ainsi que le rapport annuel du PCC. En outre, il examine les propositions du PCC pour la nomination d'un nouveau chef de la police à nouveau avec la possibilité d'utiliser son veto. Enfin, le PCC enquête sur les plaintes au sujet de la PCC. Le ministre de l'Intérieur (Home Office Minister), assisté des inspecteurs du chef de police, effectuent également les inspections annuelles des forces de police afin d'évaluer la mise en œuvre des directives ministérielles et la relation coût-bénéfice de leurs activités. La commission indépendante des plaintes contre la police (Independent Police Complaints Commission) est un organisme public externe, non ministériel chargé de traiter les plaintes contre la police.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Belgique

>>>>>>>>>>>>>>>>> Structure de la police La police belge a été profondément réformée en 2001, suite à l’affaire Dutroux. Le 23 mai 1998, huit partis démocratiques ont conclu l'accord « Octopus » scellant la réforme des services de police. Cet accord a été traduit dans la loi du 7 décembre 1998, organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux. Aux services de police classiques qu'étaient la gendarmerie (gérée par un général de gendarmerie sous l’autorité des ministres de l’intérieur et de la justice), les polices communales (gérées par les commissaires divisionnaires, chefs de corps sous l’autorité des bourgmestres) et la police judiciaire près des parquets, s'est substituée une nouvelle organisation policière articulée autour de deux niveaux de police : le niveau fédéral et le niveau local. Les deux niveaux sont autonomes et relèvent d'autorités distinctes tout en fonctionnant de manière intégrée, grâce à la mise en place de mécanismes de liaison. L'objectif est d'avoir une police plus proche des citoyens et de ses attentes, travaillant de manière intégrée et coordonnée. Les liens entre les deux entités sont le soutien mutuel, des détachements structurels, la mobilité du personnel, le recrutement et la formation.

Niveau fédéral La police fédérale existe depuis le 1er janvier 2001 et compte environ 15 000 agents. Elle assure la fonction de police spécialisée et soutient la police locale. Elle comporte des services opérationnels (police de la route, police de la navigation, police judiciaire...) et administratifs (gestion des ressources humaines, gestion des moyens matériels...). La police fédérale est gérée par un commissariat général qui dépend directement du ministre de l’Intérieur. Elle est responsable de la gestion et de la stratégie de la police fédérale. Afin d’assurer le fonc-

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tionnement d’un service policier intégré, elle chapeaute une structure composée d’un commissariat général (CG) et de trois directions générales : la direction générale de la police administrative (DGA), la direction générale de la police judiciaire (DGJ) et la direction générale de l'appui et de la gestion (DGR). La police fédérale n’intervient pour les missions de police de base qu’en l’absence de moyens suffisants au niveau local, ou pour fournir un appui spécialisé.

Niveau local La police locale est constituée de 195 « zones de police » locale, issues de la fusion des ex-polices communales et des ex-brigades territoriales de la gendarmerie. Parmi elles, une bonne quarantaine couvrent le territoire d'une seule ville ou commune (zones unicommunales) et 145 couvrent plusieurs villes ou communes (zones pluricommunales). Les effectifs varient d’une cinquantaine de personnes dans les petites zones de police à 2 800 dans les grandes. Chaque corps de police locale est placé sous la direction d'un chef de corps, responsable de l'exécution de la politique policière locale et qui assure la direction, l'organisation et la répartition des tâches au sein de son organisation. Il exerce les activités précitées sous l'autorité du bourgmestre pour les zones unicommunales, ou d'un collège de police pour les zones pluricommunales. Le collège de police est constitué des bourgmestres des différentes villes ou communes de la zone de police. Chaque corps de police se compose d'un cadre opérationnel comptant des fonctionnaires de police et des agents de police et d'un cadre administratif et logistique (CALog), formé de personnel civil. Les effectifs de ces deux cadres sont déterminés par le conseil de police pour les zones pluricommunales et par le conseil communal pour les zones unicommunales. Le conseil de police est proportionnellement composé de conseillers communaux des différentes villes ou communes constituant la zone de police, sur la base de leurs chiffres de population respectifs. Aujourd’hui, 30 000 fonctionnaires de police locaux et environ 900 membres du cadre administratif et logistique travaillent dans les 195 corps de police.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Le bourgmestre est officier de police administrative, au même titre que le chef de corps et les officiers de la police locale. Toutefois, le bourgmestre laissera donc le soin aux services de police d'exercer telle ou telle compétence revenant aux officiers de police administrative (arrestation administrative, saisie d'objets dangereux, contrôle d'identité pour le maintien de l'ordre, etc.). La philosophie de la police locale vise une approche globale et intégrée de la sécurité en se fondant sur une visibilité maximale et en recentrant les activités policières sur un périmètre territorial limité, afin d’optimiser le contact police-population, de restaurer la confiance de la population en la police et d'améliorer la sécurité objective et subjective dans les quartiers. Afin de garantir un service minimum à la population, la loi sur la fonction de police a défini sept missions qui doivent être assurées dans toutes les zones de police. Les règles de fonctionnement et d'organisation des corps de police locale doivent contribuer à l'exercice optimal de ces missions, à savoir : le travail de quartier, l'accueil, l'intervention, l'assistance aux victimes, la recherche et l'enquête locales, le maintien de l'ordre public et la circulation. Le travail de quartier consiste à assurer une présence de proximité visible. Le service de police doit être visible, accessible, joignable et équitablement offert sur le territoire de la zone, tout en tenant compte des circonstances locales et de la densité de population. La norme minimale d'organisation est d'un agent de quartier, ou de proximité, pour 4 000 habitants. La fonction d'accueil consiste à répondre au citoyen qui s'adresse à un service de police en s'y présentant ou en le contactant par téléphone ou par courrier. Selon les cas, la réponse pourra consister à orienter le citoyen vers un service interne ou externe plus approprié. Il va de soi que dans chaque zone, l'accessibilité permanente d'un service est garantie. Dans les zones pluricommunales, chaque commune dispose d'un ou plusieurs postes de police qui, s'ils ne sont pas tous accessibles en permanence, garantissent par des mesures techniques d'infrastructure la possibilité pour le citoyen d'entrer en contact avec un fonctionnaire de police.

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La fonction d'intervention consiste à apporter une réponse, dans un délai approprié, à tout appel qui requiert une intervention policière sur place. Selon les cas et le contexte (gravité, urgence, nature des faits), celle-ci sera immédiate ou différée, et dans ce cas, le requérant sera informé des raisons et des délais. Dans chaque zone, cette fonction est organisée de manière permanente et un officier de police administrative et judiciaire est soit présent sur place, soit joignable autant de fois que nécessaire. L'assistance policière aux victimes consiste à mettre à la disposition des victimes un accueil adéquat et un dispositif d'information et d'assistance. Chaque corps, éventuellement via des programmes de formation, s'organise de façon que chaque policier soit capable d'accomplir cette tâche. En cas d'atteinte grave à une victime, le corps peut faire appel à un collaborateur, membre du personnel des services de police, spécialisé dans l'assistance aux victimes. La norme est d'avoir un collaborateur spécialisé par corps. Des rôles de garde peuvent être organisés par plusieurs zones qui mettent en commun leurs équipes de spécialistes. La fonction de recherche et d'enquête locales consiste en l'exécution des missions qui sont remplies prioritairement par la police locale. Il s'agit essentiellement de missions de recherche et d'enquête découlant d'événements et de phénomènes locaux sur le territoire de la zone ainsi que de quelques missions à caractère fédéral (supralocal) qui doivent être exécutées par la police locale. Dans chaque corps de police locale, 7 à 10 % de l'effectif du cadre opérationnel sont affectés à cette fonctionnalité. Le maintien de l'ordre public, désormais appelé « gestion négociée de l'espace public », consiste à garantir et, le cas échéant, à rétablir la tranquillité, la sécurité et la santé publiques. Cette notion assez large intègre les problèmes de maintien de l'ordre lors d’événements de grande envergure (manifestations, matchs de football, festivités locales) mais aussi les problématiques environnementales et la circulation routière. La fonction circulation comprend la maîtrise de la sécurité routière locale, la lutte contre les infractions routières et la contribution à la

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

fluidité de la circulation sur le territoire de la zone de police. Ceci à l’exception des autoroutes, dont la surveillance incombe à la police fédérale. Ces tâches sont organisées autour de quatre axes : la mise en œuvre d’actions préventives et répressives en matière de circulation ; l’intervention des services de police lors de perturbations importantes et inopinées de la mobilité ; l’établissement de constats d’accidents de la circulation, et la réponse aux demandes émanant des autorités compétentes en matière de mobilité et de sécurité routière. Une commission permanente de la police locale est instituée afin de représenter l'ensemble des corps de police locale. Sur initiative propre ou sur demande des autorités, elle étudie et donne des avis sur tous les problèmes relatifs à la police locale. Les budgets des zones de police sont alimentés par deux sources de financement principales : les autorités fédérales (la dotation fédérale et des dotations complémentaires) et les communes (la dotation communale). La dotation communale s’élève en moyenne à 150 € par an et par habitant.

Police de proximité Le traumatisme national de l’affaire Marc Dutroux en 2001 a entraîné une telle perte de confiance du public dans la police qu'il était indispensable de la restructurer. Le résultat est que la Belgique a intégré la doctrine de la police de proximité comme fondement de sa nouvelle stratégie globale, ce qui a entraîné un élargissement du rôle de la police et son rapprochement avec les services sociaux. La formation des officiers est aussi fortement basée sur le principe de police communautaire.

Contrôle extérieur de la police Le comité permanent du contrôle des services de police est l’organe de contrôle extérieur de tous les agents qui exercent des fonctions policières. Il dépend du Parlement et ne relève donc pas de l’autorité des ministres de l’Intérieur ou de la Justice.

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L’inspection générale de la police assure l’inspection des services de la police fédérale et des polices locales et traite les plaintes des citoyens. Les services de contrôle interne des différents services de police traitent les plaintes à l’égard de policiers et les dysfonctionnements des services de police.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Espagne

>>>>>>>>>>>>>>>>>> Structure générale de la police et compétences du maire L'organisation de la police varie selon les régions autonomes (l'Espagne est divisée en 17 comunidades autonomas qui ont différents niveaux d'autonomie). Elle est généralement assez centralisée au niveau national mais pour certaines villes et régions autonomes, et notamment les quatre29 qui disposent de leur propre force de police, il existe un large degré d'autonomie.

Niveau national Il existe deux forces principales au niveau national : le corps national de la police (Cuerpo Nacional de Policía, CNP) et la Guardia Civil (équivalente à la gendarmerie en France). Les deux forces sont gérées par la direction générale de la police nationale et la direction générale de la guardia civil et relèvent de l’autorité du secrétariat d’État à la Sécurité du ministère de l'Intérieur. Elles sont toutes deux chargées des mêmes missions principales relatives au maintien de l’ordre, à la protection des vies, des effets personnels et des bâtiments, au contrôle des frontières, etc. Il y a deux différences entre les deux forces : une relative à leur statut et aux territoires dans lequel elles exercent leurs missions, et l’autre relative aux compétences exclusives de chaque force sur le territoire. Le CNP est une entité civile armée qui opère dans les capitales de province de Ceuta et Melilla et dans les villes indiquées dans l’ordonnance 2103/2005. Le CNP suit notamment les passeports et cartes d’identité, le contrôle de l’application des lois concernant les étrangers, le réfugiés et les demandeurs d’asile. La Guardia Civil est un corps d'armée qui opère dans le reste du territoire terrestre et maritime (90 % du territoire et 40 % de la population) à partir de casernes (casas cuartel) et des commissariats de police. Elle 29- Canaries, Catalogne, Navarre, Pays basque et Madrid

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est aussi compétente sur tout le territoire pour les autorisations de possession d’armes et d’explosifs, les entrées et sorties de marchandise, la contrebande et la fraude fiscale.

Niveau régional Certaines communautés autonomes disposent d’unités de police nationale, qui dépendent donc de l’État mais qui leur sont directement rattachées. C’est le cas en Aragon, Andalousie, Galice, principauté des Asturies et la communauté de Valence. Les huit autres communautés autonomes ont le pouvoir de coordonner les polices municipales et n’ont pas la possibilité d’avoir des polices autonomes. Quatre d'entre elles, qui sont de fait les communautés les plus largement autonomes parmi les 17, disposent d’une police régionale :

la Policía Canaria dans les îles Canaries ; les Mossos d'Esquadra en Catalogne ; la Policía Foral en Navarre ; l’Ertzaintza au Pays basque ; Le degré d’autonomie est le même pour toutes ces forces régionales à l’exception des Canaries qui ont un système différent.

Niveau local Les corps de police municipale (dénommées selon les cas Policía Municipal, Policía Local ou Guardia Urbana) peuvent être créés par toutes les communes de plus de 5 000 habitants. Elles ont un statut civil et ne peuvent agir que dans le périmètre de compétence de la commune. Dans les municipalités plus petites, ces missions sont exercées par la Guardia Civil où le corps de police régional. Parfois, ils sont assistés par les employés municipaux en uniforme, les vigilantes municipales (dans les villes où il n’y pas de police municipale). Le corps policier local prend en charge la circulation, le stationnement, le contrôle des

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

manifestations publiques et la surveillance des bâtiments municipaux. En général, les agents sont armés de pistolets.

Contrôle extérieur de la police Le large degré d'autonomie des différentes régions peut poser problème puisque les pouvoirs de l'État sont de fait limités.

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France

>>>>>>>>>>>>>> Structure générale de la police En France, la police nationale est une police d’État placée sous le contrôle du ministre de l’Intérieur. Le maire possède également des pouvoirs de police. Il dispose ainsi d’une compétence générale pour édicter les mesures de police (arrêtés) nécessaires pour assurer le « bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité » sur le territoire de sa commune mais aussi des pouvoirs de police spéciale (circulation et stationnement, funérailles et lieux de sépulture, baignades et activités nautiques…).

Niveau national La police nationale en France est centralisée et caractérisée par un dualisme au niveau central. Deux grands corps de police forment en effet l’essentiel du système de police étatique : l’un de nature civile, la police nationale, l’autre de nature militaire, la gendarmerie. Ces deux corps partagent la même autorité, le ministre de l’Intérieur et, depuis 2014, un code de déontologie qui subordonne l'exercice de leurs missions au strict respect de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de la Constitution, des conventions internationales et des lois, souligne les devoirs de l’État, les obligations inhérentes au métier de policier ou gendarme et rappelle l'ensemble des sources de contrôle de l'exercice de ces missions régaliennes. La police nationale est compétente en milieu urbain principalement. Elle est divisée en différents services : sécurité publique, police judiciaire, CRS, service de la protection des hautes personnalités. Ayant sa propre organisation territoriale, chaque police spécialisée détient une marge d’autonomie relativement grande. Au niveau territorial, l’organisation policière est articulée autour de la

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

région (associée au préfet de région), du département et de la circonscription de police, à la tête de laquelle on trouve le commissaire de police. La loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité de janvier 1995 (LOPS) a énoncé les trois missions générales de la police nationale, confirmées par la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPPSI) en 2002. La police doit donc assurer :

 la sécurité et la paix publiques, consistant à veiller à l'exécution des lois, à assurer la protection des personnes et des biens, à prévenir les troubles à l'ordre public et à la tranquillité publique ainsi que la délinquance ;

 le contrôle et la surveillance de l'autorité judiciaire, la recherche et le constat des infractions pénales, d'en rassembler les preuves, d'en rechercher les auteurs et leurs complices, de les arrêter et de les déférer aux autorités judiciaires compétentes : c’est le rôle de la police judiciaire.

 Le renseignement et l'information, permettant d'assurer l'information des autorités gouvernementales, de déceler et de prévenir toute menace susceptible de porter atteinte à l'ordre public, aux institutions, aux intérêts fondamentaux de la nation ou à la souveraineté nationale. Ces trois missions générales se complètent de cinq missions plus spécifiques assignées à l’ensemble des corps qui composent la police nationale :

 assurer la sécurité des personnes, des biens et des institutions ; maîtriser les flux migratoires et lutter contre l'immigration illégale ;  lutter contre la criminalité organisée, la grande délinquance et la drogue ;

 protéger le pays contre la menace extérieure et le terrorisme ;  maintenir l'ordre public. La gendarmerie nationale est une institution militaire garante de la sécurité, de la paix et de la protection des biens des citoyens. Elle

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exerce ses fonctions sur les zones périurbaines et les villes petites et moyennes, soit 95 % du territoire. La gendarmerie départementale est une force de proximité au contact de la population, qui assure la sécurité des personnes et des biens vingt-quatre heures sur vingtquatre. Elle constitue la majeure partie des forces de gendarmerie et maille tout le territoire national grâce à une structure composée de plusieurs échelons. La gendarmerie nationale assure des missions de police judiciaire, d’assistance aux personnes, de maintien de l’ordre et participe à la défense de la nation, y compris sur les théâtres d’opérations extérieures. La police administrative concerne plus particulièrement la gendarmerie départementale. Elle recouvre un domaine allant de la prévention de proximité aux missions de police sur la route, en passant par la recherche du renseignement et les missions de secours et d’assistance. Pour remplir les missions de maintien et de rétablissement de l’ordre public, la gendarmerie mobile peut intervenir sur l’ensemble du territoire national. Les officiers et agents de police judiciaire constatent les infractions à la loi pénale, rassemblent les preuves et recherchent les auteurs, sous l’autorité et le contrôle des magistrats. En tant que force militaire, la gendarmerie contribue à la réalisation des cinq fonctions stratégiques définies par le Livre blanc sur la Défense : connaissance et anticipation ; prévention ; dissuasion ; protection ; projection. Elle assure des missions de gestion militaire et civile de crises sur les théâtres d’opérations extérieures ainsi que la prévôté aux armées.

Police de proximité La politique de mise en place des polices de proximité voulue par la réforme de 1999 a été globalement supprimée en 2003 mais il en reste toutefois des éléments, notamment avec le développement des actions de proximité menées par les polices municipales (prévention routière, actions spécifiques à destination des mineurs ou des personnes vulnérables comme les opérations « Ville Vie Vacances » ou « Tranquillité Seniors » par exemple).

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Police municipale La police municipale est considérée comme la troisième force de police du territoire. Elle n’a pas vocation à remplacer la police et la gendarmerie nationales mais à s’inscrire en complémentarité de celles-ci, c'est-à-dire « sans préjudice de la compétence générale de la police nationale et de la gendarmerie nationale ». Il s’agit surtout d’une police de proximité, au contact de la population, instituée par le maire. Les agents de police municipale sont placés sous l’autorité du maire de la commune où ils interviennent. Leur employeur peut être cette commune, une structure intercommunale ou une autre commune avec laquelle une convention a été signée. La loi du 15 avril 1999, qui définit les conditions de nomination et compétences des agents de police municipale, prévoit qu’ils sont chargés d’assurer l’exécution des arrêtés de police du maire et de constater par procès-verbaux les contraventions auxdits arrêtés. Lorsqu’un service de police municipale comporte au moins cinq emplois de policiers, une convention de coordination doit être conclue entre le maire et le représentant de l’État en vue de préciser la nature et le périmètre d’intervention des agents de police municipale et les modalités de coopération entre les deux corps de police. Les agents de police municipale sont investis de missions de police administrative et de missions de police judiciaire (verbalisation des contraventions aux arrêtés de police du maire, des infractions telles que nuisances sonores, chiens dangereux, environnement, et contraventions au Code de la route.) Elles n’ont pas compétence pour assurer le maintien de l’ordre. Les lois du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, et du 15 mars 2011 dite LOPPSI sont venues accroître les compétences des agents de police municipale. Ceux-ci peuvent désormais, si le maire le décide, être armés, relever l'identité des contrevenants (sans pour autant être habilités à contrôler celle-ci), et participer à des contrôles d’alcoolémie sous le contrôle d’un officier de police judiciaire.

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Le cas particulier de la ville de Paris La ville de Paris relève d’un régime particulier avec la présence d’un préfet de Police qui exerce l’ensemble des pouvoirs de police générale d’État (délivrance des passeports, des titres de séjour, des cartes d’identité, des cartes grises, police de la tranquillité publique, police des rassemblements, protection contre les menaces graves à l’ordre public, etc.), mais également des pouvoirs de police municipale. Par conséquent, le maire de Paris ne dispose pas des compétences de police municipale que le droit commun reconnaît aux autres maires de France. La préfecture de Police de Paris, partie intégrante de la police nationale, est une singularité de la police française. Elle est investie de deux missions majeures. D’une part, veiller, à l’instar des autres services de police, à la sécurité des personnes (et leurs effets personnels) qui habitent, séjournent ou travaillent au sein de la capitale. D’autre part, et cette mission est spécifique à la préfecture, assurer la protection du siège des institutions de la République, des représentations diplomatiques ainsi que le maintien de l’ordre.

Contrôle extérieur de la police Le contrôle des forces de police est assuré par l'Inspection générale de la police nationale (IGPN). Ce service est chargé du contrôle des directions et des services de la direction générale de la police nationale et de la préfecture de Police. À ce titre, il exerce des missions de trois ordres :

 des audits points-clés et, depuis 2007, des contrôles inopinés des services de police sur des thématiques ciblées comme l'accueil du public ;

 des études et des recommandations visant à l'amélioration du fonctionnement des services ;

 veiller au respect, par les fonctionnaires de police, des lois et des règlements et du code de déontologie de la police nationale. Dans ce cadre, l’IGPN effectue les enquêtes qui lui sont confiées par les autorités administratives et judiciaires qui seules peuvent la saisir.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Un nouveau mode d'accès à l'inspection a été mis en place par la création d’une plate-forme internet ouverte à toute personne victime ou témoin d’un comportement susceptible de mettre en cause un agent de la police nationale. Il s'agit ainsi de recueillir les signalements de manière rigoureuse et cohérente, de les analyser et d'en tirer toutes les conséquences, que ce soit en termes d'attente des citoyens, de modifications des pratiques ou, le cas échéant, d'enquêtes judiciaires ou administratives. Les policiers municipaux doivent respecter un code de déontologie défini par décret (16 février 2015). Tout manquement aux devoirs définis dans le code de déontologie expose son auteur à une sanction disciplinaire, sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. Le ministre de l’Intérieur peut, sur demande d’un tiers dépositaire de l’autorité (maire, préfet, procureur), contrôler l’organisation d’une police municipale. Une commission consultative des polices municipales (CCPM) existe auprès du ministre de l'Intérieur et a pour mission principale de donner un avis, préalablement à leur édiction, sur les normes techniques que le gouvernement envisagerait d'arrêter en matière d'équipement des polices municipales ainsi qu'en cas de vérification d’un service de police municipale. Enfin, le Défenseur des droits veille au respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité sur le territoire de la République.

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Italie

>>>>>>>>>>>> Structure générale de la police et compétences du maire La structure de la police en Italie est complexe. Les différents corps qui la composent ont des compétences qui doublonnent souvent. Il existe une concentration du pouvoir au niveau national mais aussi une diversité de corps de police.

Niveau national Il existe trois forces principales qui opèrent au niveau national, et deux forces plus spécialisées :

 La police nationale (Polizia di Stato) assure les services généraux de police, tels que les patrouilles sur les autoroutes et certaines voies navigables. Chaque ville importante dispose d’un commissariat principal (Questura) géré par la police nationale qui est responsable de l’ordre public avec les Carabinieri.

 Le corps des carabiniers (Arma dei Carabinieri) est la force la plus nombreuse. Elle a un statut militaire mais des responsabilités et des fonctions policières. Les carabiniers font office de police militaire pour les forces armées italiennes. Ils effectuent aussi des missions de paix à l'étranger (récemment en Bosnie, au Kosovo, en Afghanistan et en Iraq). Ce corps est organisé hiérarchiquement en quatre corps, du carabinier au général d’armée : officiers, inspecteurs, gradés (maréchaux des logis-chefs, etc.) et hommes du rang (caporaux-chefs, etc.). Cette force relève de trois ministères principaux : Défense pour les tâches militaires, Intérieur pour celles d’ordre et de sécurité publics, et Justice pour l’exercice de la police judiciaire. Le partage des compétences s’effectue en principe sur une base territoriale, la police d’État n’étant présente et concentrée que dans les villes, mais à la différence de la gendarmerie française, les carabiniers conti-

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

nuent d’être fortement présents en ville, tout en assurant seuls les missions de police en zone rurale. La coordination de ces deux forces s’exerce dans trois domaines. La direction de la sécurité publique et le préfet de département s’occupent des missions de prévention. Les magistrats sont chargés des missions de police judiciaire. La force saisie pour les domaines spécifiques d’activité (police des frontières, police postale...) est déterminée par un texte de 1992, le décret Scotti. La coordination entre la police d’État et la gendarmerie est assurée par le ministère de l’Intérieur. Elle est d’autant plus importante que les deux forces n’ont pas de compétences territoriales strictement distinctes, ce qui entraîne une concurrence permanente et de fréquents doublons. Ceci a conduit à l'élaboration d'un modèle de « police partagée » et à l'évolution des responsabilités de chacune des deux forces sur le terrain. Le ministère de l’Intérieur est donc responsable de la planification annuelle de l’activité des cinq forces de sécurité, de la coordination des opérations et de la continuité du contrôle du territoire et du service de police. Il donne des directives, fixe les objectifs communs et assure la direction stratégique. Les autres forces de police à l'échelle nationale sont :

 L’unité des enquêtes financières criminelles ou garde financière (Guardia di Finanza) est une police de statut militaire qui relève de l’autorité du ministre de l’Économie et des Finances. Elle est chargée de maintenir la sécurité publique dans le domaine spécifique des affaires financières et économiques. Ainsi, elle est chargée de la prévention et de la répression d'un grand nombre de trafics, en particulier celui de drogue et de devises, la contrebande, la prévention de la fuite de capitaux mais aussi le contrôle du respect des normes d'hygiène dans les établissements alimentaires. La garde financière participe également à la surveillance des côtes et des eaux territoriales en coordination avec les carabiniers, et au contrôle des frontières avec les polices d'État. Des agents de la garde financière sont aussi détachés à Europol et au Bureau européen contre la fraude. Enfin, ce corps intervient également auprès des autres forces de police antiémeute lors de manifestations ou de grands événements.

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Deux corps de juridiction nationale sont plus spécialisés :

 La police pénitentiaire (Polizia Penitenziaria, gardiens de prison) surveille comme son nom l'indique les détenus et se charge de leur transport.

 Le corps forestier de l’État (Corpo Forestale dello Stato) est chargé de l’application des lois dans les parcs nationaux et les forêts.

Niveau local Chaque commune (sauf les très petites) dispose d’un service de police, dont elle fixe l'organisation par règlement et souvent sur la base d’une loi régionale. Lorsque ce service comprend au moins sept agents, la commune a le droit de créer un corps de police, dirigé par un commandant, qui comprend un niveau de commandement intermédiaire chargé du contrôle et de la coordination. Les polices municipales sont chargées des tâches administratives dans les affaires relevant de la compétence des communes. Elles ont aussi certaines fonctions de police de la route, de sécurité publique et de police judiciaire. Dans les communes les plus importantes, certains départements de la police municipale s'occupent de la lutte contre la dégradation en ville, du respect des édifices publics et du transport en commun, du développement de l'activité de la police judiciaire et des contrôles fiscaux. La police municipale de Rome dispose aussi d'un service d'hélicoptères. Dans l'accomplissement de leur devoir, les policiers municipaux ont une fonction à la fois de policier de la route et de policier judiciaire. Chaque commune peut décider d'armer ou non ses policiers. Les polices municipales dépendent directement de l’autorité du maire dans le respect de la loi régionale.

Police de proximité Les deux forces principales (police nationale et carabiniers) déclarent avoir intégré des principes de la doctrine de proximité ces dernières années. Notamment, ils citent la création d’un centre d’appel pour

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

mieux faciliter la signalisation des crimes, particulièrement ceux qui visent les groupes vulnérables comme celui des personnes âgées ; des projets de petits commissariats ; une nouvelle formation axée sur la résolution de problèmes et l’organisation de patrouilles locales dans les zones particulièrement sensibles. Il existe des expériences réussies de police de proximité à Modène, où elle est particulièrement bien établie, Turin et Milan notamment.

Contrôle extérieur de la police Il n'existe pas en Italie d’organe officiel de contrôle externe affecté exclusivement à la police.

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Portugal

>>>>>>>>>>>>>>>> Structure générale de la police Les fonctions de la police sont énoncées dans l'article 272 de la Constitution de 1976 : « La police a pour fonctions de défendre la légalité démocratique et de garantir la sécurité intérieure et les droits des citoyens. » La mission de prévention de la délinquance est énoncée dans la Constitution : « La prévention des crimes, dont ceux contre la sûreté de l'État, doit s'effectuer dans le respect des règles générales de la police et des droits et libertés des citoyens. » Les forces de police ne constituent pas un système unique mais sont au contraire organisées en diverses institutions qui relèvent de trois fonctions principales : la sécurité publique, les enquêtes administratives et les enquêtes criminelles. Par ailleurs, elles sont organisées en deux grandes branches :

 les forces de police générales qui regroupent la police de sûreté publique (PSP selon le sigle en portugais) et la Garde nationale républicaine (GNR) ;

 les différents corps de métier : police judiciaire (PJ), service des étrangers et des frontières (SEF), gardiens de prison (GP), police maritime (PM), autorité pour la sécurité alimentaire (ASAE) et polices municipales.

Niveau national La sécurité et l'ordre public sont assurés dans les zones urbaines par la police de sûreté publique (PSP), et dans les zones périurbaines et rurales par la Garde nationale républicaine (équivalant à la gendarmerie française). Les territoires couverts par la première sont densément peuplés alors que ceux couverts par la seconde sont plus étendus mais moins peuplés. Les deux forces sont compétentes pour mener des enquêtes administratives et criminelles.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

La police judiciaire et le service des étrangers et des frontières ont des compétences spécifiques en matière d'enquête criminelle. La première suit la grande criminalité et la criminalité organisée et le second les affaires de trafic d'êtres humains et d'immigration illégale. Ce dernier a aussi une fonction administrative et est compétent pour émettre et contrôler les documents de voyage et de résidence. La police de sûreté publique et la Garde nationale sont sous la responsabilité du ministère de l'Intérieur. De nature civile, la police de sûreté publique est dirigée par un directeur national. Elle est organisée en unités spéciales et en 20 commandements territoriaux :

Lisbonne et Porto, les Açores et Madère, 16 commandements provinciaux. Outre sa mission de maintien de l'ordre public, la police de sûreté publique met en œuvre un certain nombre de programmes de prévention : « Écoles sûres », « Sécurité des personnes âgées », « Taxis sûrs », « Entreprises sûres », « Vacances sûres », « Prévention de la violence domestique » et Programme intégré de police de proximité. La Garde nationale a un statut militaire et est dirigée par un généralcommandant de l'armée. Elle met également en œuvre des programmes de prévention ciblés.

Niveau régional et local et rôle des élus Les missions de la police municipale, définies dans la quatrième révision constitutionnelle de 1997, sont la coopération au maintien de l'ordre public et la protection des communautés locales. La loi du 28 août 1999 définit comment la police municipale doit être créée et organisée. La création d'une police municipale doit être votée en conseil municipal. Les agents dépendent hiérarchiquement du maire et ne peuvent intervenir que dans les limites géographiques de la municipalité,

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excepté pour les cas de force majeure ou d'urgence et sur demande de l'autorité municipale. Le nombre d'agents de police municipale est fixé par la loi et dépend du nombre d'électeurs inscrits. Les polices municipales des deux plus grandes villes, Lisbonne et Porto, sont un cas à part. Elles existaient avant la loi d'août 1999. Toutes les polices municipales sont compétentes pour garantir l'application des réglementations municipales sur le territoire de la commune ainsi que les intérêts généraux de la municipalité. Le déroulement des carrières au sein de la police municipale est supervisé par les mairies.

Les polices municipales de Lisbonne et Porto Pour Lisbonne et Porto, les officiers de police municipale sont sous le commandement du directeur national de la police nationale (la police de sûreté publique). Si dans ces deux villes, la police municipale a essentiellement un rôle administratif, elle est néanmoins compétente pour arrêter un suspect et le traduire devant les tribunaux. Une autre caractéristique des polices municipales de Lisbonne et Porto est que bien qu'elles dépendent opérationnellement du maire, elles sont disciplinairement sous l'autorité du directeur national de la police de sûreté publique. Les effectifs de police municipale de ces deux villes comprennent des agents qui exercent des fonctions de police (officiers, chefs et officiers de la police de sûreté publique), et des agents qui exercent des fonctions non policières et sont fonctionnaires de la mairie ou de l'autorité régionale. Ils sont néanmoins tous sous l'autorité du commandant, lui-même sous l'autorité du maire adjoint chargé de la sécurité locale. La police municipale de Lisbonne, créée en 1891, est une force armée spécialisée. Elle est intégrée à la structure municipale et composée de commissaires, officiers et chefs de police détachés de la police nationale et rémunérés par la municipalité. Elle comprend également du personnel civil. Au total et à ce jour, elle comprend 325 policiers et 102 civils.

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Relations police-population : enjeux, pratiques locales et recommandations

Ses missions sont de veiller à la stricte application des décrets et réglementations municipales ayant trait à l'urbanisme et aux chantiers publics, au patrimoine immobilier municipal, au logement, au commerce, aux espaces publics, aux situations d'urgence, à la protection de l'environnement, à la santé publique et à la circulation. Elle effectue aussi des missions de police générale et assure une présence sur le terrain dans certains quartiers.

Contrôle extérieur de la police Instaurée en 1995, l'Inspection générale de l'Intérieur (IGAI selon le sigle en portugais) est un service indépendant sous la tutelle du ministère de l'Intérieur. Elle est compétente pour intervenir dans toutes les affaires et auprès de toutes les forces de sécurité dépendant du ministère afin de veiller au respect des droits des citoyens et notamment des droits de l'homme et le maintien de l'ordre public. Elle intervient aussi dans les affaires qui ont un intérêt social particulier. L'IGAI conduit régulièrement des inspections, notamment dans les commissariats de police, pour vérifier la bonne conduite des opérations, le respect des législations et des procédures et les conditions de détention et le traitement des personnes en état d'arrestation. Elle veille ainsi à prévenir les mauvais traitements aux détenus ou autres abus et vérifier que les cellules sont en état adéquat. Dans le cas contraire, elle peut ordonner leur fermeture immédiate et le transfert des détenus dans un autre lieu de détention jusqu'à ce que les conditions d'accueil aient été mises en conformité. Enfin, l'IGAI peut agir sur plainte des citoyens ou sur la base de tout autre élément indiquant une violation de la loi ou une atteinte aux droits fondamentaux.

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