RENE BURRI
Brésil 1960, Cuba 1963, Mexique 1976… tant de lieux parcourus par le grand photographe reporter de l’agence Magnum Photos. Picasso 1955, Le Corbusier 1959, Giacometti 1960… tant de rencontres célèbres jalonnant sa carrière. De par son métier, René Burri photographie le monde. La tâche de rendre compte de ce qu’il voit, de documenter les sujets à traiter, laisse peu de place à son imagination ou à son interprétation des évènements. Internationalement reconnu, René Burri s’épanouit dans l’art photographique. Il admet volontiers son aisance à construire des images, à révéler la géométrie naturelle des scènes qu’il enregistre. Dans son ouvrage biographique One World, il se confie à Charles-Henri Favrod en justifiant cette facilité par sa formation « initiale et rigoureuse de graphiste zürichois ». À côté des mandats de reportages qu’il honore, René Burri photog raphie pour lui-même. Bien qu’il puisse se détacher des sujets imposés, il ne semble pas trouver dans cette alternative le moyen d’exprimer librement son imagination, limitée par l’intermédiaire de l’appareil photographique. C’est grâce au collage qu’il trouvera une manière de développer son esprit créatif et de dévoiler un œil averti et malicieux sur le monde qui l’entoure. Cette pratique ayant reçu ses lettres de noblesse des avant-gardes et plus particulièrement du mouvement Dada se traduit par l’assemblage de plusieurs supports, de plusieurs matières ou de plusieurs techniques graphiques. En marge de sa capture du monde, René Burri aménage la réalité grâce à cet art. Il raconte qu’il a créé ses premiers collages dans les avions. Pour gérer son angoisse du vol, il avait trouvé ce moyen original de s’occuper les mains et l’esprit. Pourvu d’une imagination débordante et d’un sens inné de la composition, il joue de ses photographies en les décou pant, les déchirant, les assemblant entre elles ou à d’autres références visuelles. Il intègre des photographies de ses proches dans les souvenirs de ses reportages, comme s’il les avait emmenés avec lui. Sa palette d’aquarelle, qui ne le quittait jamais, lui sert de signature lors des dédicaces mais aussi de liant dans ses compositions grap hiques. La peinture accompagne bon nombre de ses collages. Il noircit quotidiennement des cahiers de ses dessins et autres compositions visuelles. René Burri est un artiste complet. Dessinateur, monteur, cinéaste, peintre, photographe, le Zürichois nous offre sa vision du monde, le photocollage n’étant qu’un autre moyen d’y parvenir. Dans ce portfolio, on retrouve des exemples de ses travaux aboutis et des différents matériaux utilisés. Parfois on lui commandait des collages originaux, souvent il en créait pour son propre plaisir. Présentés soigneusement sur des papiers vélin, capturés dans un carnet de dessin, ou quelques fois retravaillés sur des photocopies d’autres montages, ces collages forment aujourd’hui un riche héritage d’œuvres hétéroclites. Des petits morceaux de souvenirs parfaitement orchestrés.
RENÉ BURRI ET LE COLLAGE, ‹ LA COLLECTION ›
René Burri and collage Brazil 1960, Cuba 1963, Mexico 1976… So many places visited by the great Magnum Photos photo reporter. Picasso 1955, Le Corbusier 1959, Giacometti 1960… So many famous encounters punctuating his career. René Burri’s trade is to photograph the world. And reporting what he sees, documenting the issues at stake, leaves little room for his imagination or his interpre tation of events. Internationally renowned, René Burri thrives in the art of photography, readily admitting having an ability to construct images and reveal the natural geometry of the scenes he captures. He explains this ability to Charles-Henri Favrod in his biographical book, One World, as resulting from his “initial and rigorous training as a Zurich graphic designer.” Next to the commissioned work, René Burri also photographs for himself. And while he easily moves away from imposed topics, he can’t seem to find in the alternative a means to freely express his imagination constrained through the camera. His creative mind will finally find its way with collage, through which he sheds a seasoned and mischievous gaze on the world around. The practice, which blossomed with the Avant-Garde, Dada in particular, is a combination of several media, several mate rials, or several graphic techniques. So in addition to capturing the world, René Burri stages reality through his collages. He tells that he first ventured into the prac tice while flying: he had found this original way to keep his hands and mind busy in order to deal with his fear of flying. With a wild imag ination and natural sense of com position, he plays with his photos, cuts them, tears them, reassembles them together or with other visual references, sometimes even associating photographs of his family in the souvenirs of his reports as if he had brought them along with him. His watercolor palette, which he always carried with him, serves both for book signings and as binder in his graphic compositions
as his collages often include painting. Every day, he fills the pages of his notebooks with drawings and other visual compositions. René Burri is a versatile artist. Sketcher, editor, moviemaker, painter, photographer, he delivers his vision of the world, and photo collage is but one of his means to do so. This portfolio comprises an array of these collages and of the materials used. He was sometimes commissioned for original collages, but would often create them out of sheer pleasure. Care fully presented on Vellum paper, clamped in a sketchbook or reworked on photocopies of other mon tages, these collages constitute a rich heritage of heterogeneous works—small pieces of perfectly orchestrated souvenirs. René Burri und die Collage Brasilien 1960, Kuba 1963, Mexiko 1976… all diese Orte hat der grosse Reportagefotograf der Agentur Magnum Photos bereist. Picasso 1955, Le Corbusier 1959, Giacometti 1960… all diese Berühmtheiten hat er im Laufe seiner Karriere getroffen. René Burri fotografierte die Welt von Berufs wegen. Bei der Aufgabe, über das, was er sah, zu berichten und die zu behan delnden Themen zu dokumentieren, blieb wenig Raum für seine Fan tasie oder seine Deutung des Geschehens. Als international aner kannter Fotograf lebte Burri für seine Kunst. Bereitwillig gestand er sein Geschick für den Aufbau von Bildern, für das Freilegen der natürlichen Geometrie von ihm aufgenommener Szenen. In seinem biographischen Werk One World führte er im Gespräch mit CharlesHenri Favrod als Grund für diese Leichtigkeit seine «ursprüngliche, strenge Züricher Graphikeraus bildung» an. Neben seiner Arbeit an Reportageaufträgen fotografierte René Burri auch für sich selbst. Obwohl er sich dabei von vorgegebenen Themen lösen konnte, scheint ihm diese Spielform nicht dazu geeignet gewesen zu sein, seiner Vorstellungskraft freien Lauf zu lassen, weil der Fotoapparat
PRÉSENTÉ PAR MÉLANIE BÉTRISEY
sie einschränkte. Einen Weg, seinen kreativen Geist zu entfalten und den ihm eigenen Blick auf seine Umwelt zum Vorschein kommen zu lassen – den Blick eines Kenners und Schalks – fand er erst in der Collage. Diese Arbeitsform hatte ihre Weihen bereits durch die Avantgarde und insbesondere die Dada-Bewegung erhalten. Sie besteht in einer Assemblage verschiedener Medien, unterschied licher Materialien und Drucktechniken. Abseits von einer reinen Aufnahme der Welt zimmerte sich René Burri mithilfe dieser Kunst die Realität zurecht. Er berichtete, dass er seine ersten Collagen im Flugzeug zusammenstellte. Er besass eine überbordende Fanta sie und ein angeborenes Kompo sitionsgespür; er spielte mit seinen Fotos, in dem er sie ausschnitt, zerriss, untereinander oder mit anderen Bildverweisen kombinierte. In die Erinnerungsbilder seiner Reportagen baute er Fotografien seiner Freunde und Verwandten ein, als seien sie mit ihm unterwegs gewesen. Auf seine AquarellPalette, die er stets im Gepäck führte, griff er zum Unterschreiben von Widmungen, aber auch als Bindemittel für seine graphischen Kompositionen zurück. Malerei ist in etlichen seiner Collagen gegenwärtig. Er füllte täglich ganze Hefte mit seinen Zeichnungen und sonstigen Bildkompositionen. René Burri war ein kreatives Multi talent. Der Züricher stellte uns seinen Blick auf die Welt als Zeichner, Cutter, Filmemacher, Maler und Fotograf vor – die Fotocollage war nur eines seiner vielen Ausdrucksmittel. In diesem Portfolio finden sich Beispiele für vollendete Arbeiten und die vielfältige Mate rialität des Künstlers. Seine originellen Collagen waren in manchen Fällen Auftragsarbeiten, häufig schuf er sie zu seinem eigenen Vergnügen. Die sorgfältig auf Velin papier präsentierten, auf Zeichenblöcken festgehaltenen oder bisweilen auch auf Fotokopien von früheren Montagen überarbeiteten Collagen bilden heute ein reiches Erbe an abwechlungsreichen Werken. Perfekt koordinierte Erinnerungsschnipsel.
Couverture : Alberto Giacometti, Paris 1961, Rue Hippolyte-Maindron, France, collage signé sur papier vélin d’Arches, 18,3 × 25 cm, New York, MoMA, 1976 Front : 1 Collage réalisé à l’occasion du 700 ème anniversaire de la Confédération helvétique, sur papier vélin d’Arches, image 29 × 29 cm, papier 46 × 32 cm, 1991
Back : 4 Sans titre [collage de la série « La culture à l’étranger », thème Brasilia], collage signé et aquarelle sur papier vélin d’Arches, image 37 × 22 cm, papier 52 × 45 cm, 1997–1998
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Jean Tinguely, « Le Cyclope », Milly-la-Forest, France, collage signé sur papier vélin d’Arches, image 18 × 27 cm, papier 21 × 30 cm, 2013
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Sans titre [collage Picasso], collage et pastel, carnet de dessin, image 9,5 × 13 cm, carnet 10,5 × 15 cm, années 1980
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Carte postale envoyée par René Burri au Musée de l’Elysée, collage inédit, 10,5 × 14,8 cm, 20 juillet 2013
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Tête photographique établi sur un vélocipède, photocollage, autoportrait sur gravure, 18,5 × 9 cm, années 1970
9 772235 043008
ISSN 2235-0438
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