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energymag the energy manager magazine

Bimestriel d’information | Edition française | novembre - décembre 2006 | n° 4 | www.energymag.be

6,50 €

MARCHE Blue Sky Les électro-intensifs haussent le ton!

Interview Electrabel Nous n’avons pas de tabous!

MANAGEMENT La flexibilité Kyoto Des mécanismes complexes mais prometteurs

Profession Le rôle croissant de l’energy manager

DOSSIER CONTRACTING Performance contracting L’euro que vous ne pourrez plus manquer de gagner

Services énergétiques Panorama des acteurs du marché

La finance carbone Vers un nouveau mode de financement

EFFICIENCY Palais de justice d’Anvers

Bureau de depot : Bruxelles X.

Ecrin de luxe et haute performance énergétique

TECHNOLOGY Bâtiments existants Le pilotage intelligent pour une maîtrise durable des énergies

Cogénération biomasse Coup d’oeil sur les technologies autrichiennes

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COVER STORY

L’homme qui veut chauffer et éclairer la Belgique à la biomasse Laurent Minguet, le fondateur d’EVS, dévoile son plan belge de cogénération biomasse

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REDACTION Energymag Rue Coosemans 107 1030 Bruxelles redaction@energymag.be Tél. +32 (0)2 737 91 19 Fax +32 (0)2 735 30 97

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Rédacteur en chef : Jean-François MARCHAND (jfmarchand@energymag.be) Secrétaire de rédaction : Jean HINS (jhins@energymag.be) Journalistes et collaborateurs : Jean CECH, Ismaël DAOUD, Koen MORTELMANS, Didier SEGHIN, Alfons VANBERGEN, Philippe VAN DEN ABEELE, Peter VANSINA, Philipe VERNIN, Laurent van STEENSTEL. Adressez vos communiqués de presse à redaction@energymag.be

PRODUCTION Responsable : Jean HINS (jhins@energymag.be) Graphisme : Florence DEMOLIN (fdemolin@energymag.be) Photogravure : Lithotec Imprimerie : Kliemo

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Tout un symbole “Vous allumez trois ampoules ici et c’est déjà plus cher qu’à Bratislava!”. Ce commentaire n’est pas (directement) celui d’un gros industriel électrointensif, mais d’un ouvrier de VW Forest. Le raccourci n’est sans doute pas très élégant -la situation qui prévaut chez VW n’ayant rien à voir avec ce qui suit-, mais il a le mérite d’être clair. La libéralisation des marchés de l’énergie aurait-elle atteint le contraire de son but? À savoir affaiblir la compétitivité des entreprises? Et mettre à mal l’emploi dans nos pays? À court et moyen terme, on est en droit de le craindre. La hausse continue des prix des énergies, en particulier de l’électricité, risque de provoquer des délocalisations dans l’industrie, qu’elle soit grosse consommatrice ou non. En vérité, le mouvement a déjà commencé. En février 2005, Umicore, l’un des sept fondateurs du consortium Blue Sky (lire notre article Temps Fort) a dégraissé une partie de ses usines de zinc en France. En cause? L’électricité! Cette restructuration, que d’aucuns pourraient juger détestable pour un groupe qui a dégagé 168,3 millions € de bénéfice en 2004, était pourtant inscrite dans les astres. Dans un document daté début 2003, Umicore mettait déjà en garde contre la survie de ses activités de production de zinc face à la croissance des coûts de l’électricité. Un chiffre pour mesurer l’ampleur: en 2002, l’électricité représentait un tiers du total des frais d’exploitation de l’usine belge de Balen. Dans sa note, Umicore prévoyait une hausse de 25% de ces coûts à l’horizon 2006. La réalité a largement dépassé ces estimations. Traduction: ce dégraissage n’a rien d’étonnant et il en appellera d’autres. Ce qui est le plus ahurissant, c’est l’impression que donnent les industriels de s’époumoner depuis 5 ans à rappeler sans cesse que leur compétitivité n’est pas belge, ni européenne mais mondiale. Et que les effets pervers de la libéralisation les frappe durement. En lançant l’initiative Blue Sky, les électro-intensifs jettent un double pavé dans la mare. En substance: ce n’est pas tant la concurrence qui fait baisser les prix d’une énergie fournie en réseau comme l’électricité, mais bien les options retenues pour sa production doublée d’une vision stratégique à long terme. La question dépasse la seule Belgique et vise l’Europe. Gageons que cette fois, ils seront entendus et que le dogmatisme qui prévaut encore aujourd’hui évolue rapidement. C’est urgent!

Photo de couverture : Laurent Minguet Photo par Laurent VAN STEENSTEL

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> 24 DOSSIER CONTRACTING L’EURO QUE VOUS NE POURREZ PLUS MANQUER DE GAGNER

Une des solutions innovatrices au problème de financement de projets d’efficacité énergétique consiste à s’engager dans la voie du Performance Contracting. Ou quand les économies d’énergie financent les investissements énergétiques.

SOMMAIRE MARKET

EFFICIENCY

6 TEMPS FORT

34 BUILDING

Blue Sky: les électro-intensifs haussent le ton!

Palais de justice d’Anvers: un écrin de luxe pour un bâtiment à haute performance énergétique.

9 INTERVIEW

Electrabel: nous n’avons pas de tabous!

TECHNOLOGY

11 ACTEURS

Bâtiments existants: le pilotage intelligent pour une maîtrise durable des énergies.

12 NEWS

Focus: le réseau électrique fait un malaise 14 TRENDS

MANAGEMENT 16 EMISSIONS TRADING

La flexibilité Kyoto: des mécanismes complexes mais prometteurs 20 ORGANISATION

Profession: le rôle croissant de l’energy manager 24 DOSSIER CONTRACTING > Performance contracting L’euro que vous ne pourrez plus manquer de gagner > Services énergétiques Panorama des acteurs du marché > La finance carbone Vers un nouveau mode de financement

> 6 Solvay et six autres électro-intensifs entendent faire baisser les prix de l’électricité.

38 BUILDING

42 COGENERATION

Coup d’œil (autrichien) sur les technologies biomasse les plus avancées RENEWABLE 44 BIOMASSE

Laurent Minguet: l’homme qui veut chauffer et éclaire la Belgique à la biomasse!

> 16 Coup d’œil sur les mécanismes de flexibilité Kyoto.

48 AGENDA 50 ENERGY PARTNERS

> 38 De 15 à 25% d’économies grâce à un pilotage intellin°2 energymag | 5 gent des bâtiments. 5 Sommaire fr.indd 5

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MARKET | TEMPS FORT

Électricité © L. van Steensel

La prochaine centrale EPR en Europe sera-t-elle belge? Fin octobre, les sept plus grands consommateurs d’électricité du pays annonçaient la création du consortium Blue Sky. Le propos: se grouper pour conclure des contrats d’approvisionnement à long terme auprès de producteurs d’électricité. Au besoin, en finançant de nouvelles capacités de production. À des coûts aussi compétitifs que ceux du nucléaire! Philippe Warny, Energy Director chez Solvay: “L’objectif de Blue Sky est de s’assurer un approvisionnement énergique fiable et à faible coût, dans le cadre d’un engagement à long terme, générant la même compétitivité en termes de prix que l’énergie nucléaire. Cet engagement pourrait se concrétiser par des droits de tirage pouvant inclure un paiement d’avance pour une capacité de production équivalente à la consommation du groupe acquise auprès d’un ou plusieurs opérateurs présents ou futurs”. Et de préciser “qu’un tel mécanisme s’avère nécessaire afin de garantir la durabilité et la compétitivité de nos activités en Belgique”.

© L. van Steensel

“En deux ans, les prix de l’électricité ont presque doublés en Belgique, et ce sans justification, car 55% de la production électrique dans le pays est d’origine nucléaire, et n’a donc pas été influencée par la flambée des prix des hydrocarbures”, déplore Philippe Warny, directeur de la cellule énergie du groupe Solvay. Dans cette phrase, tout est dit ou presque. Les prix de l’électricité n’en finissent plus de décrocher mettant à mal les industriels, en particulier les électro-intensifs. Or le décrochage des prix ne reflète pas la structure des coûts de production (voir notre encadré), particulièrement dans un pays comme le nôtre où le nucléaire est la première source de production.

Et les industriels de pointer du doigt le manque criant de capacités à la fois de production et d’interconnexions, des nouveaux investissements concentrés sur des outils à coûts de production élevés (gaz, éolien, etc.) et un marché qui reste local et peu, sinon pas concurrentiel du tout. Bref, pour eux, la libéralisation dérape. Et, sans stimulation (forcée) de la concurrence ni investissements dans des structures de production à bas coûts –lisez nucléaire–, elle dérapera encore plus!

Se grouper pour agir D’où la création du consortium Blue Sky qui regroupe les sept plus grandes entreprises électro-intensives du pays:

deux sidérurgistes (Arcelor Mittal et Duferco), quatre chimistes (Air Liquide, BASF, Solvay et Tessenderlo) et un métallurgiste (Umicore). Des acteurs de poids sur le marché: avec14 TWh par an, ils représentent 15% de la consommation électrique totale du pays. Les intentions de Blue Sky? “S’assurer un approvisionnement énergétique fiable et à faible coût, via des engagements à long terme”, explique Philippe Warny. Soit, mais de quoi parle-t-on? En pratique de conclure avec les fournisseurs d’électricité –Electrabel et d’autres– des contrats commerciaux à long terme (15-20 ans) leur assurant des droits de tirage à prix compétitifs dans de nouvelles capacités de production

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TEMPS FORT | MARKET

À court terme, les prix continueront à grimper à bas coûts qu’ils sont prêts à financer en prépayant ces droits. Ce faisant, l’objectif du consortium est triple: mettre sur la table la question des contrats à long terme –en principe interdits par la Commission Européenne– stimuler la concurrence et “forcer” la question du nucléaire, à les suivre, la seule réponse durable et économique aux besoins énergétiques futurs. Et Thomas Leysen, administrateur délégué d’Umicore, d’enfoncer le clou: “Si l’industrie veut suffisamment d’énergie à un prix acceptable, il faudra investir dans de nouvelles capacités à prix concurrentiels. Sans énergie nucléaire, ce n’est pas possible”, a-t-il déclaré dans les colonnes du Tijd. “Il est dès lors plus logique que les grands consommateurs envisagent un investissement dans une centrale nucléaire”, ajoute-t-il.

Arguments de poids Les arguments de Blue Sky? Ils sont de poids! À commencer par la mise en garde: sans une électricité compétitive, c’est la survie même des activités industrielles qui est en jeu. Deuxième argument choc: l’argent! Les besoins d’investissements dans de nouvelles capacités nécessaires à l’avenir sont colossaux et l’apport des grands industriels peut compter, ce que ne renie par Electrabel (lire notre interview). À la question quel montant le consortium serait prêt à mettre sur la table, la réponse fuse: “Que coûte une centrale nucléaire de troisième génération du type EPR?”, rétorque Philippe Warny. À deux ou trois milliards d’euros, cela donne une idée des montants en jeu. Et d’ajouter “qu’en contribuant à la diversification énergétique et au développement de nouvelles capacités de production plus compétitives, c’est l’ensemble du marché qui verra des effets positifs collatéraux”. Enfin, Blue Sky met les autorités au pied du mur face à la question du mix énergétique capable d’assurer à long terme la sécurité d’approvisionnement du pays et plus largement de l’Europe. En filigrane: les sources d’énergie verte ne permettront pas d’assurer la demande croissante d’électricité alors que l’aprèskyoto sera vraisemblablement plus

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9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 Prix en €/MWh

Ce 21 novembre dernier, Belpex, la bourse d’électricité belge, a démarré ses premières transactions. Un démarrage en fanfare puisque le premier jour d’activité a vu le volume de transactions porter sur 24.000 MWh, soit 8,9% de la consommation totale du lendemain. Une bonne nouvelle donc pour la fluidité du marché belge. Mais un indice ne laisse pas de faire réfléchir: le prix moyen du base load pour le 22 novembre s’est établi à 109,12€/MWh. Pire: si pour les heures creuses, l’indice Belix affiche un raisonnable 44,27€/MWh, il grimpe en flèche pour les heures de pointes: 173,98€/MWh! Le problème est que ce marché de gros dicte largement le prix du marché aux clients finaux alors qu’il ne représente qu’une faible part du volume consommé. Pourquoi? À court terme, la volatilité des prix s’explique par le fait que l’électricité est un bien non stockable, ce qui peut entraîner une forte variation de la demande d’un instant à l’autre. Le marché de gros, en particulier le marché spot, sert principalement à équilibrer ces variations. Or, dans un système libéralisé, la théorie microéconomique enseigne qu’à court terme, le prix d’un bien est égal au coût de fonctionnement de l’unité de production supplémentaire. Soit les centrales les plus coûteuses alimentées en énergies fossiles. Le prix de l’électricité est donc sensible à l’augmentation du prix des combustibles (gaz, pétrole), car c’est l’unité de production marginale qui est prise en compte dans la formation du prix. Cela explique aussi pourquoi il y

Volumes en MWh

a une corrélation entre l’évolution du prix de l’électricité et celle du prix des permis d’émission de CO2, puisque les quotas C02 pénalisent les centrales les moins performantes. Un deuxième facteur renforce cette spirale: l’amenuisement des capacités de production un peu partout en Europe. Aux dernières assises de l’énergie, le directeur de communication d’Electrabel révélait que, pour la première fois de son existence, les centrales de l’opérateur historique avaient tourné à 100% de leurs capacités! Cette saturation de la production tend encore un peu plus les marchés, phénomène renforcé par l’insuffisance des interconnexions aux frontières qui limitent les équilibres transfrontaliers. La mise en œuvre de Belpex devrait permettre une meilleure allocation des interconnexions existantes, mais à terme l’installation de nouvelles interconnexions est indispensable pour fluidifier le marché. Tout comme des investissements dans de nouvelles capacités de production à bas coûts. Sans quoi, les prix du marché ne baisseront pas. Inutile de dire que les besoins sont affolants. Pour faire face à la demande croissante, l’Europe devra, selon certaines estimations, mettre en service dans les 15 ans l’équivalent d’une centrale à cycle combiné de 400 MW chaque semaine ou l’équivalent d’une centrale EPR de 1.600 MW par mois. Bref, les ajustements du marché mettront plusieurs années à se faire sentir: il faut au minimum deux ans pour construire une centrale TGV, cinq pour une centrale nucléaire.

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MARKET | TEMPS FORT

contraignant. Dans ce contexte, est-il raisonnable à long terme de consacrer des ressources fossiles limitées comme le gaz à produire de l’électricité (chère et “polluante” en émission CO2) alors qu’elles seraient plus utiles à d’autres usages et que le nucléaire est plus compétitif et moins polluant? Hasard des calendriers, c’est précisément ce que préconise le rapport de la Commission “Energie 2030” commandé voici deux ans par Marc Verwilghen, Ministre de l’énergie, et présenté au gouvernement à la mi-novembre. Dans les recommandations des experts de la Commission, on peut lire que “l’application de politiques post Kyoto plus rigoureuses en Belgique sans l’énergie nucléaire serait extrêmement coûteuse. Aussi, la Belgique devrait-elle garder l’option nucléaire ouverte et reconsidérer la fermeture des centrales”.

Problème de concurrence Une coïncidence et des arguments qui ne plaisent pas au camp des anti-nucléaire. Ceux-ci fustigent le gouvernement mais aussi Thomas Leysen et

la fédération Agoria qu’il préside de soutenir le lobby nucléaire et partant le monopole d’Electrabel au détriment des efforts d’efficacité énergétique. C’est oublier que depuis le premier choc pétrolier, l’industrie belge a diminué son intensité énergétique d’un facteur de 2,8. Qu’en Flandre, où est concentrée l’industrie lourde, les membres d’Agoria ont réduit de 7% leur consommation d’énergie et de 9% leurs émissions de CO2. Que l’industrie subit de plein fouet les effets pervers de la libéralisation et du manque de concurrence. Sur le fond, la question des contrats à long terme et d’une structure de production à bas prix fait rage un peu partout en Europe. Ainsi l’initiative de Blue Sky n’est pas une première. La Finlande elle a déjà tranché: fin 2003, l’électricien TVO a signé avec le consortium Areva et Siemens un contrat pour la fourniture clé-en-main d’un réacteur EPR sur le site d’Olkiluoto. Particularité: la centrale est financée et détenue en partie par les industriels électro-intensifs du cru qui auront en contrepartie un droit de tirage préférentiel. De son

côté, la France vient de mettre en place un dispositif législatif autorisant les électro-intensifs à se regrouper pour nouer des contrats d’approvisionnement à long terme de 15 ou 20 ans avec les producteurs d’électricité. Baptisé Exeltium, le groupement qui réunit une soixantaine d’entreprises, dont Solvay, Mittal Arcelor et Air Liquide, a lancé son appel d’offre durant l’été. Surprise: sur 15 producteurs européens sollicités, seuls quatre d’entre-eux ont répondu! Et encore, ils ne mettent sur la table de négociation que des capacités “honorables” mais bien en deçà des attentes. Ce qui fait dire à Philippe Warny “qu’il y a un clairement un problème de concurrence”. De la à suggérer une entente entre producteurs, il n’y a qu’un pas. La conclusion vient d’un banquier: “Dans un système libéralisé où la concurrence fonctionne mal, pourquoi voudriez-vous qu’un opérateur économique accepte de vendre au prix le plus faible alors qu’il peut investir lui-même et profiter des prix du marché”. Verdict dans quelques mois. p Jean-François Marchand

AMEC SPIE Belgium devient SPIE Belgium Forte de son histoire et de la compétence de ses équipes, SPIE redevient indépendante et plus SPIE que jamais. Spécialiste du génie électrique, mécanique et climatique, de l’énergie, des réseaux de communication et des infrastructures de transport, SPIE équipe notre cadre de vie et accompagne ceux qui le font changer, collectivités et entreprises, dans la conception, la réalisation, l’exploitation et la maintenance de leurs installations. Avec l’appui de son nouvel actionnaire, SPIE entend renforcer son développement et œuvrer, chaque jour, pour permettre à chacun d’échanger, de communiquer, de se déplacer, de vivre en sécurité et de travailler avec efficacité. SPIE, l’ambition partagée !

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L’INVITE | MARKET

Fernand Grifnée - Electrabel

Nous n’avons pas de tabous!

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Fernand Grifnée, directeur de la communication d’Electrabel réagissait à la création de Blue Sky sur les ondes de BFM. Extraits de l’entretien La création de Blue Sky n’est-il pas le signe que le marché a dépassé le point de non-équilibre entre l’énergéticien que vous êtes et les industriels pris en étau entre une forte croissance des prix et une faible concurrence? C’est surtout le signe que les systèmes changent. On a libéralisé, mais les problèmes des clients restent les mêmes. Il y a longtemps que nous sommes confrontés, particulièrement en Belgique d’ailleurs, à des clients du secteur chimique ou de la sidérurgie qui ont des problèmes particuliers quant à leur approvisionnement en électricité. L’électricité est un élément fondamental de leurs process industriels et ils ont besoin de visibilité à long terme et de prédictibilité. Avec Blue Sky, les industriels entendent faire jouer activement la concurrence. Etes-vous pour une collaboration de ce type et à quelles conditions? Nous sommes pour toute solution qui permette de progresser sur le dossier des contrats à long terme. Cela peut se faire sous la forme d’un consortium, même si on sait qu’in fine, il y aura quand même une dimension bilatérale. Ces clients ont des caractéristiques de consommation tout à fait uniques. Si on veut vraiment, et c’est le souhait d’Electrabel, leur faire une offre adaptée à leurs besoins, il faut un moment que l’on se trouve dans une négociation bilatérale. Mais le choix du client reste sien. S’il préfère commencer à travailler par la forme du consortium, pour Electrabel c’est quelque chose de tout à fait acceptable, évidemment. On pointe du doigt les électriciens qui n’investiraient pas suffisamment dans des capacités de production de base, se contentant de couvrir les besoins de pointe, investissements offrant de meilleurs rendements? Qu’avez-vous à opposer à cela? Le reproche ne doit pas être fait aux électriciens. Il faut s’abstenir de chercher des coupables, le sujet est beaucoup trop important pour le résoudre ainsi. C’est un

vrai problème de politique énergétique au niveau européen. On a beaucoup raisonné en Europe en logique de concurrence. On se rend compte aujourd’hui qu’il y a aussi toute une politique énergétique qui doit être menée. Cela passe par de nouveaux investissements –massifs– et tout ce qui fait qu’il y a de nouveaux investissements dans le système électrique européen est plutôt bon à prendre. Si Blue Sky peut y contribuer, c’est très bien. Mais il faut plus que cela. Tant du côté des opérateurs que des grands clients, le marché doit recevoir des signaux clairs qu’il n’a pas encore reçu aujourd’hui. La question est: y a-t-il de nouveau une place pour investir dans un secteur où le long terme est évidemment crucial? Le retour sur investissement dans notre secteur, ce n’est pas du court terme, mais quinze, vingt ans. C’est dans cette dimension de temps que l’on doit placer les relations contractuelles dont on parle maintenant. À quels signes faites-vous allusion? Pour un opérateur comme Electrabel en Belgique, mais c’est vrai pour tous nos concurrents sur leur marché historique en France, Allemagne ou Pays-Bas, s’engager dans une relation contractuelle à long terme avec un chimiste par exemple, ce n’est pas évident sur le plan juridique. Les formules ne sont pas légions et il faut être particulièrement créatif. La France l’a bien compris, elle a pris une loi qui a essayé d’encadrer cette question. Le Premier Ministre en Belgique en est très soucieux. Récemment nous avons eu

des discussions avec lui dans le cadre du projet de fusion Suez-Gaz de France et le Premier Ministre a mis en avant cette préoccupation d’une vraie politique industrielle qu’il faut encadrer. On doit pouvoir à l’avenir conclure des contrats à long terme et trouver des formules compatibles avec le droit de la concurrence en sachant que le dernier mot reviendra à la Commission Européenne qui –et c’est aussi un signe peut-être intéressant– nous dit qu’elle réfléchit à des “guides lines” qu’elle pourrait nous donner, à nous opérateurs électriques, pour encadrer ce type de relations contractuelles.

Energymag maintenant sur BFM radio! Fernand Grifnée était le dernier invité de la rédaction d’Energymag dans le cadre de notre nouvelle émission

“Le magazine de l’énergie” sur les ondes de

On peut donc supposer que d’ici quelques mois, le consortium Blue Sky lancera un appel d’offre sur le marché? Nous espérons que l’on va pouvoir progresser sur ce dossier, car c’est notre intention de pouvoir répondre à ces besoins que nos clients font valoir. On a déjà pris différentes initiatives. Maintenant, il ne faut pas se cacher non plus qu’il y a des difficultés évidemment, notamment des questions de modalités contractuelles. Il faudra aménager avec les clients quel pourcentage de leurs besoins sera couvert par ce type de contrat, sous quel type de mécanisme de prix sachant que cette formule doit être un élément parmi d’autres qui font que le système électrique en Europe va recevoir plus d’investissements dans un mix énergétique gaz, charbon et nucléaire qui restera équilibré parce que c’est important pour l’Europe. Blue Sky cite le nucléaire comme choix d’investissement. Une réaction? Nous n’avons pas de tabous sur la question. Blue Sky a raison de dire que le nucléaire est un élément de la solution énergétique liée au problème que l’Europe connaît actuellement. C’est la position d’Electrabel et de Suez de manière générale. Évidemment, nous investirons dans le nucléaire, compte tenu de ce que la législation nous permet de faire dans les pays qui nous permettent de le faire. p Jean-François Marchand

l Retrouvez nos prochains invités chaque troisième jeudi du mois à 7h48 sur: 101.4 ECharleroi 101.9 E Wavre-LLN 104.9 EMons 106.7 ELiège 107.1 ENamur 107.6 EBruxelles

Depuis 1994, BFM est la première radio privée d’information à orientation économique, financière, boursière, culturelle et politique de la Communauté Française Bruxelles -Wallonie.

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“Pour l’actualité économique en direct, tant européenne que belge, BFM est un vecteur incontournable.”

Jean-Claude Daoust, Administrateur délégué Daoust Interim Président de la FEB

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ACTEURS | NEWS

Fusion Suez-GDF: les cartes redistribuées Décidément, le feuilleton Suez-GDF ne manque pas de rebondissements. Synthèse des derniers actes. Les concessions tout d’abord. Pour emporter l’aval des autorités européennes, le couple devrait renoncer à toute participation dans Distrigaz (mise à part la flotte de méthaniers), abandonner sa majorité dans le capital de Fluxys (hormis le terminal de Zeebruges) et GDF fera une croix sur ses 25% dans la SPE. Côté électricité, il a fallu aussi faire quelques gestes au gouvernement belge: des promesses de cession de capacité de production électrique à SPE et à un (encore) hypothétique troisième acteur sur le marché belge via des swaps (de quoi préserver les 58.000 MW de Suez); un engagement de principe à ne pas augmenter ses prix sur le marché belge; le règlement du ‘chèque gaz’ (100 millions €); et un droit de regard du gouvernement sur les 4 milliards € provisionnés pour le démantèlement des centrales nucléaires. Ces quelques plumes perdues auraient dû permettre l’envol de l’oiseau. Et puis patatras. Le coup (de grâce?) vient de France: le Conseil Constitutionnel impose un double calendrier à la privatisation de GDF, oui pour privatiser mais pas avant juillet 2007. Autant dire que les cartes sont solidement redistribuées. En attendant, que restera-t-il des concessions?

Gazprom avance ses pions Gazprom est plus que jamais déterminé à se faire une place sur le marché européen de la fourniture de gaz. Non content de conclure un contrat de fourniture avec GDF dans le cadre du futur gazoduc Nord Stream prévu en 2010, le gazier russe vient de lancer sa filiale commerciale en France. Gazprom Marketing & Trading compte déjà une dizaine de clients et vise à terme 10% du marché français. En Italie, c’est un accord “historique” avec le pétrolier Eni qui lui ouvre le marché italien. Dès 2007, il y vendra directement du gaz pour un volume qui atteindra 3 milliards de m3 à partir de 2010. Chez nous, le groupe n’est pas en reste. D’ici 2011, il construira avec Fluxys un réservoir souterrain de gaz à Poederlee, dans la province d’Anvers. Et en janvier, il boostera ses livraisons belges via Wingas. Cette filiale commune à BASF termine la pose d’un gazoduc reliant le Port d’Anvers aux Pays-Bas qui alimentera directement les industriels locaux dont BASF.

VERS UNE FUSION ENTRE ESSENT ET NUON?

IBERDOLA AVALE SCOTTISH POWER

Selon le quotidien néerlandais Volkskrant, Essent et Nuon seraient arrivés à un accord de fusion, étape inévitable, selon leurs dirigeants, pour s’associer à terme à une entreprise européenne d’énergie d’importance moyenne. Reste que ce rapprochement est soumis à l’approbation du régulateur néerlandais NMa qui ne le voit pas d’un bon œil: les deux électriciens détiendraient ensemble plus de 50% du marché batave. En attendant, les deux entreprises poursuivent leur expansion en Belgique, notamment sur le marché Wallon où Nuon vient d’acquérir un terrain industriel de 5 ha près de Seneffe en vue d’y installer une centrale électrique à cycle combiné.

La consolidation du marché européen de l’énergie se poursuit avec le rachat du britannique Scottish Power par l’espagnol Iberdrola pour 17,1 milliards €. Ce rapprochement crée le numéro trois du secteur, avec une capitalisation de 63,8 milliards €, un chiffre d’affaires de 20 milliards € et une puissance installée de 36.000 MW, dont 6.000 en énergies renouvelables. Signalons que Siemens vient de signer un contrat de 350 millions € avec Scottish Power portant sur la construction du plus grand parc éolien d’Europe au sud de Glasgow (140 éoliennes d’une puissance de 2,3 MW).

THEOLIA POURSUIT SON EXPANSION Theolia, producteur européen d’électricité à partir des énergies renouvelables, vient de racheter le groupe allemand Natenco (construction clé en main et exploitation pour compte de tiers de centrales éoliennes) et confirme son expansion européenne. Theolia qui dispose d’une filiale en Belgique (Theolia Benelux) compte à ce jour 72MW de capacité installée à laquelle s’ajoutent 140MW exploités pour compte de tiers. Le portefeuille de projets en cours de développement atteint les 1.000 MW.

UN PREMIER FABRICANT SOLAIRE EN WALLONIE En partenariat avec l’allemand Q-Cells, la société verviétoise Issol se lance dans la production de panneaux photovoltaïques. Surfant sur la demande européenne en forte croissance, l’entreprise qui débute avec une capacité de production de 1,3 MW entend tripler celle-ci d’ici fin 2007.

HANSSEN INVESTIT 140 MILLIONS € ET CRÉE 300 EMPLOIS Racheté voici peu par l’Indien Suzlon, Hanssen Transmissions passe à la vitesse supérieure. L’entreprise va investir 140 millions € pour l’extension de la capacité de production et des moyens R&D. Cet investissement qui créera 300 emplois vise à répondre à une demande croissante pour les réducteurs de vitesse.

ELECTRAWINDS LÈVE 30 MILLIONS € Le constructeur belge d’éoliennes, Electrawinds, a recueilli 30 millions d’euros après avoir ouvert une partie de son capital aux investisseurs. Cette somme sera consacrée au financement de projets à l’étranger. Luc Desender, l’administrateur délégué du groupe mise sur un doublement de son chiffre d’affaires jusqu’en 2008.

IZEN COMMERCIALISE UNE ÉOLIENNE POUR PME Izen, le fabricant belge de systèmes solaires et de pompes à chaleur complète sa gamme “renouvelable” avec le lancement d’un nouveau type d’éolienne dédiée aux PME. Commercialisée en 2007, cette éolienne de petite capacité (19m de hauteur, 6m de diamètre) permettra de produire un maximum de 15.000 kWh/an. Izen installera une première unité dans ses ateliers de Lille, l’éolienne étant la dernière pièce du puzzle (solaire thermique, photovoltaïque et géothermie) qui lui permettra d’être l’une des premières entreprises zéro énergie en Belgique. Des efforts récompensés par le prix flamand “Energievriendelijke Onderneming” dans la catégorie des plus de 70 MWh/an.

XYLLOWATT INVESTIT 4 MILLIONS € Xyllowatt vient de procéder à une augmentation de capital, doublée par deux aides à l’innovation du gouvernement Wallon. Cette recapitalisation permet au fabricant belge de centrales de cogénération par gazéification de bois d’entamer la seconde phase de son expansion. L’entreprise investira ainsi 4 millions € dans la R&D, notamment la mise sur le marché d’une centrale d’une capacité 5 fois supérieure, et la conquête les marchés allemand et français.

SAINT-GOBAIN ET SHELL S’ASSOCIENT DANS LE SOLAIRE Le Pôle Vitrage de Saint-Gobain et Shell Erneuerbare Energien GmbH vont mettrent en commun leur savoir faire et créer une co-entreprise pour produire et commercialiser des panneaux solaires de nouvelle génération. Cette société, nommée Avancis, va construire une usine à Torgau, en Allemagne (Saxe). L’usine dont la production démarrera en 2008 aura une capacité initiale de 20 MW, qui sera augmentée rapidement.

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en bref [ FLANDRE ]

Du grisou pour faire de l’énergie verte? Même s’il a laissé de très mauvais souvenirs en Belgique, le grisou qui circule dans nos anciennes mines de charbon pourrait reprendre du service. Il intéresserait des investisseurs étrangers qui envisagent de le valoriser en énergie verte. Ils ont approché les gestionnaires chargés de la reconversion des anciennes mines du Limbourg en leur proposant d’extraire le gaz de © Jacques Palut - FOTOLIA mine pour alimenter de petites unités de production d’électricité. Le VITO, laboratoire de référence de la Région flamande a été mandaté pour étudier la question et évaluer les volumes de gaz encore emprisonnés dans le sous-sol des communes flamandes concernées.

[ WALLONIE ] L’industrie du renouvelable peine à décoller en Wallonie Selon l’étude ‘Fierwall’ commandée par la Région wallonne pour faire l’état des lieux de la filière industrielle du renouvelable en Wallonie, le secteur aurait bien du mal à faire son trou chez nous. Actuellement il serait composé dans sa large majorité (67,6%) de PME occupant moins de cinq salariés. Les 241 entreprises du secteur répertoriées par l’étude n’occuperaient ainsi que 280 équivalents temps plein pour un chiffre d’affaires atteignant à peine les 25 millions d’euros. En cause, selon des entreprises concernées, le manque d’incitants publics, d’efforts de recherche, de financements et de sources d’informations fiables. Mais les acteurs du secteur restent optimistes: ils tablent sur un chiffre d’affaires en hausse de 80 à 90% d’ici 2008 et un investissement global dans le secteur qui friserait le milliard d’euros d’ici 2012. Hauts les cœurs! Infos: http://www.fierwall.be

[ FOCUS ]

Vers une multiplication des “black-out”? Le 4 novembre dernier, il n’a fallu que quelques secondes pour que dix millions d’Européens de l’internationale électrique européenne qui interconnecte les réseaux électriques du Maghreb à la Pologne se retrouvent totalement privés d’électricité durant près de deux heures (et parfois plus). Une sacrée leçon de réalisme pour l’Europe libéralisée… La coupure –programmée de longue date– d’une ligne à haute tension pour permettre le passage d’un bateau de croisière norvégien, une demande inhabituelle d’énergie liée aux premiers froids, une production accrue des parcs éoliens du Nord de l’Europe… et voilà une importante ligne de transport d’électricité en surcharge brutale. C’était le 4 novembre dernier à 22h13. Pour freiner le déséquilibre entre l’offre et la demande et éviter le black-out complet, une myriade de systèmes de sécurité automatiques coupent aussitôt 5.200 des 56.000 MW consommés à cet instant. La panne touchera près de dix millions de personnes, principalement dans les zones rurales, en Allemagne, France, Italie, Suisse, Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, Espagne… L’effet château de cartes, comme on dit.

Série noire L’incident, qui rejoint une déjà longue série de pannes intervenues dans divers pays européens depuis la fin des années 90, ne surprend pas les spécialistes. Ceux-ci avaient été nombreux déjà à mettre le doigt sur les dérives de la libéralisation des marchés de l’électricité au niveau des équipements. En tête surtout, les outils de production d’électricité. Malgré l’afflux de liquidités dû à l’augmentation des prix, les capacités de production n’ont pas suivi à la hausse la demande croissante d’électricité (près de 3% l’an). Les opérateurs ont préféré réserver leur trésor de guerre (économique) à quelques fusions et/ou acquisitions garantes de leur propre pérennité

sur le marché libéralisé. Résultat, selon l’Observatoire Européen des Marchés de l’Energie publié par Capgemini, l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité s’est détérioré et la marge de capacité de production est passée de 5,8% à 4,8%, rien qu’entre 2004 et 2005. On est loin des 20% qui faisaient dire, voilà une petite dizaine d’années encore, que l’Europe était en surcapacité.

Investir massivement L’an passé déjà, Capgemini estimait à 700 milliards d’euros les investissements nécessaires d’ici 2030 en moyens de production. Et l’Agence internationale de l’énergie atomique situait dès 2004 à 1.600 milliards d’euros les montants nécessaires pour remplacer en Europe les centrales vétustes et mettre les capacités de production à niveau sur les vingt prochaines années. Pour les spécialistes, il faut faire d’autant plus vite qu’une centrale ne produit pas des MW dès l’année de la décision de son investissement et que l’opinion n’est guère en faveur de l’implantation de nouveaux équipements de production centralisés ou non. Ils relèvent aussi que les réseaux et leur interconnexion n’ont pas été conçus pour les configurations de production telles qu’elles se dessinent dans l’Europe libéralisée. Et ils fixent en prime un seuil critique: 2010. À défaut d’un réveil significatif des investissements dans les équipements, le risque de blackout généralisé sera alors majeur en Europe.

[ BELPEX] Démarrage réussi de la bourse d’électricité belge Journée historique ce 21 novembre, qui a vu la bourse d’électricité belge Belpex démarrer ses premières transactions en étroite collaboration avec les bourses française (Powernext) et néerlandaise (APX), et les gestionnaires de réseau de transport belge, néerlandais et français Elia, TenneT et RTE. Dorénavant, la capacité journalière aux interconnexions entre la Belgique et la France et entre la Belgique et les Pays-Bas sera allouée par le biais du couplage de marché des trois bourses. Un couplage qui permettra une utilisation plus optimale de la capacité journalière disponible aux frontières et constitue un premier pas vers un marché européen unique de l’électricité. Dès la première journée, Belpex a atteint un volume de 24.098,2 MWh, soit 8,9% de la consommation du lendemain. Ce niveau élevé –Belpex ambitionnait d’atteindre 5% au premier jour– s’explique par une offre très limitée sur le marché belge pour le 22 novembre. Les six jours suivants, le volume s’est réduit entre 7.781 et 11.102,1 MWh. Durant la première semaine, l’indice Belix baseload a oscillé entre 24,90 et 109,12 euros par MWh.

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NEWS | MARKET

Photo : Kris Vandamme - Projet : BURO II bvba

La première école passive en Belgique

Inaugurée en septembre dernier, “De Zande school” à Beernem (Flandres) est la première école bâtie selon le concept de bâtiment passif en Belgique! Une gageure car cette école d’enseignement technique abrite nombre de fonctions spécifiques, ce qui a nécessité une adaptation très pointue du concept de bâtiment passif. L’école fait partie d’un projet plus large dans lequel tous les bâtiments seront conçus de façon passive. Les prochaines phases verront la construction d’un hall de sport, d’une salle de réception et des espaces de séjours. Le projet est développé par le bureau d’architectes Buro II, avec le concours du bureau d’études Cenergie qui en assure la conception passive.

Le chiffre du mois

CRÉDITS D’ÉMISSION: LA BELGIQUE FAIT SON MARCHÉ La Belgique qui, dans un premier temps, va devoir honorer pour 12,3 millions de crédits d’émission histoire de compenser ses excès d’émissions de C02, vient de signer lors du Sommet de Nairobi son premier contrat MDP avec la société LaGeo du Salvador, spécialisée dans la production d’électricité géothermique. Il couvrira l’achat de 183.000 à 262.000 tonnes de C02 sur la période 2007-2012. Un premier appel d’offres (10 millions d’euros) avait déjà été lancé en mai 2005 et avait fait remonter pas moins de 36 projets dans une vingtaine de pays différents. Le processus de mise en œuvre des mécanismes de développement propre (MDP) et de mise en œuvre conjointe (MOC) prévus par le Protocole de Kyoto, étant assez long, le gouvernement a également décidé d’acheter un certain nombre de crédits d’émission via les fonds carbone. Une seconde tranche d’une cinquantaine de millions d’euros a donc été provisionnée, dont la moitié seront consacrés à l’achat de crédits à négocier avec trois fonds sélectionnés: Carbon Fund, Carbon Fund for Europe et Asia Pacific Carbon Fund. 3,3 autres millions devraient être consacrés à des projets à l’étranger (MDP ou MOC).

UNE BMW À L’HYDROGÈNE EN LOCATION DÈS 2007

20% du PIB mondial Le changement climatique pourrait coûter cher Commandé par Tony Blair et présenté fin octobre, le rapport Stern a chiffré le coût du changement climatique. Selon l’ancien chef économiste de la Banque mondiale, il ne faudrait que 1% du PIB mondial par an pour maintenir le réchauffement climatique sous contrôle. En revanche, il prévient qu’en l’absence de mesures radicales, le monde connaîtra des tempêtes, des inondations ou des vagues de chaleur qui pourraient coûter à l’économie mondiale “au moins 5%” de son PIB par an, et jusqu’à 20% dans le pire des scénarios. Le rapport conclut que pour maintenir la hausse des températures globales endessous de 2°C, il faudrait ramener les émissions de gaz à effet de serre à plus de 80% en-dessous des niveaux actuels d’ici à 2050.

Si les émissions de C02 des voitures européennes ont baissé de plus de 12% depuis 1995, il reste encore du chemin à faire. Pour sauter d’un cran, le constructeur allemand BMW entend favoriser l’hydrogène liquide comme carburant de l’avenir. Dès l’an prochain, il permettra la location (en Allemagne) de quelques centaines de voitures fonctionnant à la fois à l’essence et à l’hydrogène. Il s’agira de la première voiture à l’hydrogène produite en série, son arrivée sur le marché étant prévue pour le mois d’avril. Les prix de location devraient être semblables à ceux des modèles les plus haut de gamme de BMW, selon un porte-parole de l’entreprise. Ce nouveau modèle offrira des performances de vitesse de pointe et d’accélération comparables aux berlines classiques fonctionnant à l’essence.

SHARP, PRÉCURSEUR DES USINES GÉANTES VERTES

inaugure la vague des usines géantes vertes. Un tiers des besoins en énergie sera fourni par le solaire et la technologie des piles à combustibles. Installées à grande échelle sur l’ensemble des toits, les 1.300 panneaux solaires (47.000 m2, 5.210 kilowatts de puissance) fourniront l’intégralité des besoins en électricité des bureaux. S’y ajoutent une installation de piles à combustibles de 1 000 kilowatts, une des plus puissantes recensées à ce jour associée à un système de stockage de 10 000 kilowatts servant de générateur de secours et d’onduleur. Les émissions de CO2 seront réduites d’environ 40 % par rapport à un établissement conventionnel.

GOOGLE AU SOLAIRE Un tiers du quartier général de Google va être alimenté par des panneaux solaires. C’est ce que le géant des moteurs de recherche a annoncé lors d’une conférence sur l’énergie à la Silicon Valley. “Nous voulons réfuter le mythe selon lequel on ne peut pas être en même temps écolo et profitable” a déclaré David Radcliffe, le vice-président de Google. Cet ambitieux projet exige l’installation de 9.200 panneaux solaires sur le “Googleplex” qui devraient générer dès l’an prochain 1,6 MW d’électricité. C’est le plus grand projet solaire jamais réalisé pour un complexe privé. Selon Google, l’investissement sera remboursé en dix ans. Il est vrai qu’avec plus de 450.000 serveurs, la consommation électrique de Google est astronomique.

DUBAI CONSTRUIT LA PREMIÈRE TOUR AUTOSUFFISANTE On connaissait déjà Dubai pour ses folies architecturales, l’émirat se lance à présent dans les tours autosuffisantes. Le chantier d’un édifice de 250 m de haut totalement autosuffisant en énergie grâce à des éoliennes et des panneaux solaires vient d’être lancé. Chacun des 59 étages sera capable de tourner lentement sur lui-même de façon indépendante. Les éoliennes et les panneaux solaires seront installés dans les espaces entre les étages. La tour sera ainsi capable de produire 190 millions de kWh par an. Le coût: 500 millions de dollars. Toujours à Dubai, le projet d’une tour de 30 étages qui pivotera de 50° chaque 24h (360° par semaine) verra le jour en 2009. Particularité: sa rotation sera assurée par l’énergie solaire.

Une première dans le domaine industriel: l’usine dernier cri de Sharp, Kameyama II,

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MARKET | TRENDS

Overview for November-December 2006 Outlook for 2007 PETROLE Aperçu des marchés du pétrole: Début août, l’incident technique qui a causé la baisse de production du champ de Prudhoed Bay en Alaska (le plus grand champ pétrolier aux USA) en pleine saison de transhumance aux Etats-Unis, doublée de la situation géopolitique au Moyen-Orient ont poussé les prix du brut vers un nouveau record à Londres, à 78,3 $/bbl. Les mois qui ont suivi, la relâche globale des tensions internationales, combinée à des inventaires des réserves US plus élevées qu’espérées ont fait redescendre le brut sous la barre des 60$. Une baisse encore renforcée par des températures plus douces dans l’hémisphère nord qui ont diminué la demande de chauffage et tiré les prix à Crude oil spot prices, 2005 57,9$/bbl. Une trêve de courte durée: les prévisions d’un front froid aux Etats-Unis et les spéculations sur les niveaux de production de l’OPEP ont fait remonter fin novembre les prix au-dessus des 64$/bbl. Outlook sur les marchés du pétrole: L’OPEP pourrait chercher un prix plus élevé du fait de la faiblesse du dollar et décider de réduire à nouveau sa production lors de sa prochaine réunion du 14 décembre. La plupart des membres de l’OPEP veulent maintenir les prix aux niveaux actuels pour les prochains mois.

GAZ Aperçu des marchés de gaz: Un climat plus chaud que la moyenne a conduit à une baisse de la demande au Royaume-Uni et en Europe. Avec comme conséquence un prix du gaz “Mois suivant” à Zeebrugge 57% meilleur marché en décembre 2006 qu’un an auparavant. L’interconnexion entre la Belgique et l’Angleterre explique que les prix de Zeebrugge sont corrélés avec les marchés britanniques de gaz. Les capacités d’importation au Royaume-Uni ont été renforcées par la mise en service de deux nouveaux pipelines reliant l’Angleterre: Langeled de Norvège et BBL line des Pays-Bas. Gas prices at Zeebrugge, 2005: one month ahead, one year

Perspectives sur les marchés de gaz: ahead L’hiver qui s’annonce et le rebond soudain des prix du pétrole pourraient provoquer une tendance à la hausse sur les prix du gaz européens dans les prochains mois. Cependant les marchés britanniques du gaz devraient demeurer en surcapacité d’approvisionnement et la tendance demeura à la baisse pour les prochaines semaines.

ELECTRICITE Aperçu des marchés de l’électricité: Un temps très sec dominant de septembre à octobre dans les pays nordiques a poussé l’Allemagne à accroître ses capacités de production alors que dans le même temps, l’entretien des centrales nucléaires a déporté la production sur les centrales au charbon. Le plus grand marché d’électricité d’Europe a ainsi influencé le reste des marchés électriques européens. Depuis la fin octobre, les mouvements d’achats de crédits carbone pour 2007 ont décliné, poussant à la baisse les prix de l’électricité en cal 07. Néanmoins, les incertitudes quant aux prix du carbone pour 2008 sous-tendent les prix d’électricité en cal 08 et 09.

Belgian electricity prices 2006 one year ahead

Perspectives sur les marchés de l’électricité: Tirés à la hausse par l’anticipation des prix des crédits carbone en phase II, les prix de l’électricité en cal 08 et 09 devraient demeurer tendus jusqu’à l’approbation des nouveaux plans d’allocation 2008-2012.

CARBONE Aperçu des marchés du carbone: Les prix du carbone pour 2007 se sont stabilisés en août autour de 17 €/tonne et ont ensuite diminué de 25% en septembre alors que les producteurs finalisaient leurs ventes d’électricité pour 2007, limitant ainsi leurs besoins de crédits carbone. La douceur du climat a poussé les marchés du pétrole, du gaz et de l’électricité à la baisse, ce qui a fait à son tour baisser les marchés carbone. Les prix pour 2008 restent néanmoins tendus par la politique plus stricte de l’Union Européenne quant aux allocations de permis d’émission pour la phase II 2008-2012 de Kyoto.

Carbon prices 2006

Perspectives sur les marchés de carbone: L’Union Européenne a réduit les allocations de presque 7 % en dessous des niveaux proposés par les plans d’allocation nationaux et de 7% en dessous des émissions de 2005. Le commissaire à l’environnement de l’UE adopte de fait une ligne dure, il y a donc une forte probabilité de voir les prix croître pour les contrats 2008 et 2009.

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TRENDS | MARKET

MARKET FOCUS 2006, année record dans le secteur énergétique. Qu’en sera-t-il en 2007?

Crude oil spot prices, November 2006

C’est peu dire que l’année 2006 a été particulièrement secouée par des hausses de prix historiques sur l’ensemble des marchés. Les chiffres sont éloquents. Le baril de brut tout d’abord: le 7 août, il culminait au plus haut à 78,3$/bbl pour un prix au plus bas à 57,8$/bll le 2 novembre. Le marché du carbone n’est pas en reste: record de 30,5€/tonne le 18 avril. Le même jour, les contrats 2007 sur le marché électrique belge atteignaient leur plus haut niveau à 63,61€/MWh. Ces prix records ont poussé les clients à prendre de nouvelles initiatives afin de diminuer leurs coûts d’énergies. Ainsi en France, un groupe d’industriels électro-intensifs a constitué le consortium “Exeltium”, rapidement suivi en Belgique par la création de “Blue Sky”. Tant Exeltium que Blue Sky ambitionnent de nouer des contrats d’approvisionnement à long terme (15-20 ans) via un mécanisme d’achats de droits de tirage sur des capacités de production qu’ils s’engagent à préfinancer. L’idée est d’ancrer de façon stable et à long terme l’approvisionnement et surtout les prix d’achats sur une structure tarifaire plus compétitive, calquée sur les coûts de production les plus bas possible. Cette initiative –si elle réussit– devrait permettre pour ces grands consommateurs comme Solvay une baisse sensible des coûts d’électricité tout en leur garantissant une sécurité d’approvisionnement. À ce sujet, on lira avec intérêt notre article en page 6.

Gas prices at Zeebrugge, November 2006: one month, one year ahead

Belgian electricity prices November 2006 one year ahead

Une autre initiative favorable sur la scène européenne et belge en particulier est la création de la bourse d’électricité Belpex qui devrait réduire le manque de transparence et de concurrence sur le marché de l’électricité. Le mécanisme de couplage trilatéral des marchés entre Belpex et les bourses Powernext (France) et APX (Pays-Bas) permettra de fait une meilleure fluidité du marché et –toutes conditions étant égales– pourra conduire à une plus grande concurrence et une baisse des prix pour certains consommateurs. Par quel miracle? Tout simplement en favorisant une utilisation optimale des capacités journalières d’interconnexion aux frontières (les flux d’échange d’électricité entre les trois marchés français, belge et néerlandais), qui jusqu’à présent n’étaient pas utilisées de façon efficace et transparente. Sur le marché Day-Ahead –Belpex est actif uniquement sur le marché du lendemain–, l’offre pourra ainsi mieux satisfaire la demande d’une frontière à l’autre et vice-versa, de façon totalement “transparente”. Cette transparence est paradoxalement garantie par l’anonymat des transactions entre les opérateurs actifs sur la plateforme Belpex. Une douzaine de participants étaient actifs les premiers jours. D’autres devraient rejoindre bientôt la plateforme et accroître son efficacité. Reste que malgré ces initiatives, la tendance des prix en 2007 ne sera pas nécessairement meilleure qu’en 2006. Sur le marché du pétrole, les analystes internationaux s’accordent à dire que le baril devrait fluctuer entre 53$/bbl et 72$/bbl l’an prochain. Les prix du brut resteront sensibles aux tensions géopolitiques et il n’y a aucun signe que la volatilité actuelle des prix s’atténuera en 2007. Tenant compte de cette volatilité, les spécialistes des achats d’énergie peuvent néanmoins profiter des occasions du marché. Suivre en permanence les évolutions des prix et mettre en œuvre les outils appropriés de gestion des risques sont les éléments clés qui leur permettent de protéger au mieux leurs clients contre les risques inhérents aux marchés de l’énergie.

Carbon prices November 2006

Ces pages indicateurs et leurs commentaires ont été réalisés avec le concours de GfE Energy Management.

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MANAGEMENT | KYOTO

Février 2005. Le système européen ETS (Emission Trading Scheme) entre officiellement en fonction. Quelque douze mille entreprises européennes grosses émettrices de gaz à effet de serre (GES) sont appelées à comptabiliser leurs émissions de CO2 et à s’inscrire dans les plans d’allocation de quotas d’émission (PNAQ) établis par les Etats membres de l’UE. Ceux-ci leur concèdent un certain nombre de EUAs (European Union Allowances), à charge pour elles de couvrir les dépassements éventuels en payant une amende ou se procurant les quotas manquants via des mécanismes dits “de flexibilité” (voir encadré). Au total, 180,9 millions de tonnes de CO2 ont ainsi été globalement attribuées aux entreprises belges concernées pour la période 2005-2007, avec une réserve de 7,9 Mt CO2 destinée aux nouveaux exploitants ou à l’extension d’installations existantes.

Droits d’émission CO2

Kyoto et la flexibilité Depuis bientôt deux ans, le système européen d’échange de droits d’émission de CO2 est en fonction, assorti de ses mécanismes de flexibilité. Depuis, l’écart se creuse entre ceux qui entendent en tirer le meilleur parti et ceux qui préfèrent voir

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© Foxie_aka_Ashes - FOTALIA

venir…

Sur-allocation Pour la première année (2005), 58.311.087 tonnes de CO2 avaient été allouées à nos entreprises. Les émissions vérifiées pour l’année comptabilisant 55.354.096 tonnes CO2, les recours aux mécanismes de flexibilité ont été plutôt rares. En réalité on peut considérer que la Belgique, comme certains autres pays membres, s’est accordé d’autorité une autre forme de flexibilité non prévue dans le Protocole de Kyoto, en surestimant les EUAs qui lui seraient nécessaires pour maintenir son développement économique. D’où la brutale chute des cours du carbone constatée sur le marché européen en avril dernier. D’où aussi la colère des autorités européennes constatant que la deuxième vague de plans d’allocation des Etats membres (PNAQ2) pour la période 2008-2012 persistait dans la même tendance à la sur-allocation: les 17 premiers plans notifiés à la Commis-

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KYOTO | MANAGEMENT

Les mécanismes de flexibilité Le Protocole de Kyoto a prévu trois mécanismes de flexibilité destinés à permettre aux pays et aux entreprises d’atteindre à meilleur compte leur objectif de réduction. 1. Le système d’échanges de quotas d’émission: il permet à celui qui n’a pas su se limiter à son quota d’émission de racheter directement ou sur une bourse d’échange les quotas excédentaires d’un autre qui n’a pas utilisé tous ses droits. 2. La mise en œuvre conjointe (MOC*): celui qui est à court de quotas investit dans des projets de réduction d’émission dans un autre pays industrialisé, en échange de crédits d’émission (ERUs ou Emission Reduction Units).

sion annoncent en effet des émissions de 15% supérieures à celles constatées en 2005. Cette velléité à ne pas jouer le jeu de Kyoto est révélatrice d’un certain scepticisme ambiant en ce qui concerne le système ETS. Scepticisme qui se manifeste de manière très différenciée selon les entreprises. Alors que, bien avant sa mise en place en Europe, nombre d’entre-elles s’essayaient déjà au système via le Chigago Climate Exchange (CCX) entré en fonctionnement deux ans avant la bourse européenne, d’autres s’en désintéressaient visiblement. C’est ainsi que bien des (petites) entreprises concernées par le système ETS ont perdu sans le savoir pas mal d’argent en restituant simplement les premiers quotas qu’elles avaient reçus, ignorant que, leurs émissions réelles ayant été inférieures à celles qu’elles avaient annoncées, leurs EUAs (European Union Allowances) non utilisés étaient en réalité parfaitement négociables sur le marché. Mais comment s’investir pleinement dans une dynamique nouvelle lorsque, comme en Belgique, l’autorité qui est censée l’animer semble si peu pressée de la mettre en œuvre de manière cohérente sur le plan institutionnel? Car chez nous, régionalisation oblige, ce sont finalement trois systèmes différents qui ont été élaborés (sur le tard) pour assurer la gestion et le reporting des émissions de GES. Documents administratifs, méthodes et planning diffèrent selon les régions, sans compter l’approche fédérale spécifique pour ce qui concerne les sites nucléaires. Et ce n’est que fin 2005 qu’était inauguré le registre belge des gaz à effet de serre (http://www.climateregistry.be) permettant aux quelque 200 entreprises belges impliquées dans le système d’échange des quotas d’émission de les échanger en ligne avec les entreprises des 25 autres Etats membres. En outre, à

l’heure où nous publions ces lignes, la Belgique n’est toujours pas en mesure de participer aux fameux mécanismes de développement propre (MDP) qui sont censés permettre aux entreprises soumises à quotas d’investir dans des projets de réduction des émissions dans des pays en développement, pour compenser un dépassement de quota sur leur territoire. L’Autorité Nationale Désignée (DNA) chargée, aux termes de l’accord de Kyoto, d’approuver ou non les projets MDP selon les critères adoptés et d’en suivre l’application, n’a en effet toujours pas été officiellement instituée chez nous! Simple formalité bien sûr et la nomination d’un DNA fédéral ne saurait tarder, mais en attendant cette situation n’est évidemment pas de nature à simplifier une démarche qui s’avère déjà très longue, lourde administrativement et financièrement et parsemée d’embûches. MDP: le parcours du combattant Car dès lors que vous envisagez de vous lancer dans un projet de Mécanisme de Développement Propre (MDP), c’est à un véritable parcours du combattant qu’il faut vous préparer avant d’espérer encaisser vos premiers CERs (Certified Emission Reductions). À supposer que votre projet soit accepté par le pays hôte, il faudra vous soumettre à ses contraintes administratives et techniques (périodicité des réunions, examen des dossiers,…) et obtenir de la part des autorités compétentes les chiffres nécessaires (données réseau etc.) à la mise en oeuvre de la méthodologie adoptée, ce qui n’est pas toujours évident. L’ensemble de votre démarche sera en outre, après validation du dossier du projet par un organisme agréé, soumise à l’approbation du CDM Executive Board au sein de l’UNFCCC (United Nations Framework Convention on Climate Change) dont les décisions

3. Le mécanisme de développement propre (MDP*): comme dans le cas précédent, l’acteur déficitaire investit dans un projet de réduction d’émission dans un pays en voie de développement ce qui génère des crédits d’émission (CERs ou Certified Emission Reductions). Les ERUs et CERs peuvent être utilisés dans l’EU ETS pour rencontrer ses obligations. Toutefois, à partir de 2008, les plans d’allocations peuvent imposer des limites d’utilisation. * Joint Implementation (JI) et Clean Development Mechanism (CDM) en anglais.

Conseils aux candidats MDP Ne vous lancez pas dans ce type de projet à la légère. Il b importe de connaître à fond les règles du jeu, et elles peuvent évoluer de mois en mois. Mettez en place au plus tôt les éléments techniques qui b vous permettront de bien connaître vos émissions et de planifier la gestion de vos droits d’émission. Commencez par regarder au sein de votre société s’il b n’existe pas, dans l’une de vos filiales, un projet existant susceptible de rentrer dans le cadre MDP. En tout état de cause, faites une soigneuse évaluation b préalable du projet envisagé, détaillant les différentes phases à parcourir pour explorer cette piste et surmonter les obstacles éventuels. Si le projet est d’envergure n’hésitez pas à désigner et à b former une personne spécifique pour piloter le projet jusqu’à son terme. Ou alors faites-vous assister par une société spécialisée sont sans appel. Celui-ci devra valider les procédures et la méthodologie, assurer les contrôles nécessaires avant d’enregistrer officiellement votre projet comme MDP. Et n’allez surtout pas imaginer que le fait qu’un projet identique ait préalablement été accepté implique nécessairement que le nouveau projet le sera également. Bref, tout cela peut prendre plus ou moins de temps (voir graphique) en fonction de la solidité de votre dossier, de l’organisation en place dans le pays concerné et du dynamisme de son DNA. Jusqu’ici au niveau mondial, 315 projets ont été acceptés par le CDM Executive Board. Mais 19 sont en ‘review’. Ce qui revient à dire n°4 energymag | 17

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MANAGEMENT | KYOTO Le cycle d’un projet MDP p

Preparation & review of the Project

3 months

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Baseline Study & Monitoring Plan (MP)

Project Idea Note Project Concept Note Project Concept Document (or equivalent) 2 months

Project Design Document Baseline study and ER projections Monitoring Plan

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Validation process

2 months

Validation protocol and report

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Negotiation of Project Agreements

3 months

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Project Appraisal and related documentation Term sheet Emission Reduction Purchase Agreement

1 to 3 years

Construction & start up Initial verification report

p up to 21 years

Periodic verification & certification Verification report Supervision report

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Project completion

Le cycle d’un projet MDP (CDM en anglais), tel que défini dans les Accords de Marrakech, comprend cinq étapes: la validation, l’enregistrement, la surveillance, la vérification et la certification, qui sont suivies par la délivrance de CERs (Certified Emission Reduction). On trouvera ci-dessus un aperçu de ces étapes et de la méthodologie proposée par Tractebel Engineering.

qu’ils sont provisoirement enregistrés, mais soumis à un dernier examen de six semaines au cours duquel certaines remarques peuvent être faites et correctifs demandés avant validation définitive. Une lourdeur administrative justifiée par le choix de l’UNFCCC d’opter pour une approche bottom-up, de manière à pouvoir profiter de l’expérience de terrain des premiers projets introduits, avant de mettre en place une méthodologie “générique” applicable par catégorie de projets. Projets MDP “clés en main” Cela dit, il existe des voies plus confortables pour bénéficier des mécanismes de flexibilité inscrits dans le Protocole de Kyoto. Outre de reconsidérer l’un ou l’autre projet existant dans une de vos filiales, au Brésil ou ailleurs, sous l’angle de l’approche MDP, on peut aussi opter d’emblée pour un projet dit “unilatéral” mis en place par l’un ou l’autre pays en voie de développement. Une formule “clé en main” qui vous permet d’échapper partiellement à l’essentiel du parcours évoqué plus haut, à charge pour vous d’accepter les conditions parfois draconiennes du pays hôte et la présence d’autres participants intéressés par les mêmes promesses de CERs. Ainsi, la Chine qui compte bien tirer le meilleur parti des quelque 350 milliards de tonnes de GES excédentaires annoncés pour 2012, propose d’ores et déjà un superbe catalogue de près de 200 pages détaillant les projets MDP qu’elle met à votre disposition… pour autant que lesdits projets soient pris

en charge par des sociétés chinoises et que les CERs s’y négocient à un prix minimal (actuellement un peu plus de 8 euros) fixé par la Commission de Planification de l’Etat chinois. Les affaires sont les affaires. Se couvrir en vue de la pénurie annoncée? Reste que selon les spécialistes du Fond Carbone Européen(1), le marché européen des crédits carbone fera face d’ici à 2012 à un déficit annuel de l’ordre de 60 à 120 millions de tonnes de CO2 par an. En cause? Des marges de réduction des émissions GES très limitées pour les acteurs soumis à l’ETS, notamment en raison de la demande croissante d’électricité et du blocage de nouvelles tranches nucléaires à court terme. Aussi, anticipant une hausse des prix pour la période 2008 à 2012, certains acteurs ont choisi de se fournir le plus tôt possible en crédits carbone via les mécanismes de flexibilité comme le MDP ou le MOC (Mise en Œuvre Conjointe). À l’image des Pays-Bas –l’un des plus grands “contributeurs” MDP avec le Japon–, les gouvernements ont été les premiers à se couvrir, suivis rapidement par quelques acteurs privés et les marchés financiers appâtés par les plus values potentielles. Depuis, les fonds d’achat et de financement d’actifs carbone liés aux mécanismes de flexibilité se sont multipliés jusqu’à atteindre aujourd’hui plusieurs milliards d’euros, signe du dynamisme du marché. Dernière en date à se lancer, la banque

L’avis de l’expert

Les émissions sont devenues fongibles

Johan Pype Senior Consultant Carbon Management chez Tractebel engineering

Le temps du reporting volontaire, basé sur la seule approche de l’ingénieur, est définitivement révolu. Les entreprises doivent comprendre qu’il leur faut mettre en place un système de management permettant une bonne articulation entre trois missions essentielles: le management des allocations, le monitoring et le suivi des émissions, et enfin la gestion des quotas. Le monitoring des émissions constitue actuellement LE point crucial. Tout porte à croire que, d’ici peu, les exigences à ce niveau vont se durcir considérablement et qu’une plus grande rigueur sera exigée au niveau européen quant à la vérification des données avancées. Le contrôle cessera d’être une formalité et l’absence d’un système fiable permettant de suivre les émissions et de les rapporter correctement promet d’être beaucoup plus sévèrement sanctionné. Les entreprises ont intérêt à anticiper ce mouvement en veillant conjointement à la traçabilité à la fois des vecteurs d’énergie et des émissions. Car demain cette vigilance, aujourd’hui limitée à quelques secteurs et à un seul GES –le CO2– , s’étendra à d’autres émissions et à l’ensemble des entreprises.

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KYOTO | MANAGEMENT

Morgan Stanley: elle annonce vouloir investir pas moins de 3 milliards $ dans les cinq prochaines années histoire de fixer la barre. La multiplication de ces fonds devrait doper les capacités des entreprises à se lancer dans des projets de flexibilité et en tirer le meilleur parti. Pour ne citer qu’un exemple, lancé en 2005 avec 105 millions € de cash, le Fond Carbone Européen a déjà soutenu une petite dizaine de projets, dont deux pour le chimiste Français Rhodia, dans ses installations au Brésil et en Corée, au passage les deux plus grosses opérations réalisées à ce jour par un opérateur privé. En 2007, Rhodia devrait ainsi disposer de 12 à 13 millions de tonnes de crédit CO2 qui devraient lui rapporter une centaine de millions d’euros! Signalons que l’intervention du Fond Carbone Européen a consisté à préacheter 8 millions de tonnes de crédits CO2, le deal étant complété par la création d’une filiale conjointe entre

Philippe Rosier, Président de Rhodia Energy Services: “L’expertise de Rhodia en matière de réduction des gaz à effet de serre et son engagement dans des projets de Mécanisme de Développement Propre font de notre groupe un des plus importants détenteurs de crédits d’émission”.

Rhodia et la Société Générale pour exploiter le pactole estimé à près de 100 millions de tonnes de crédits CO2 d’ici à 2012. Et bien plus encore si la valeur des crédits carbone est garantie pour l’après 2012(2). Qui a dit que la vertu carbone ne payait pas? p Jean Cech (1)

Fonds d’investissement en actifs carbone regroupant plusieurs grandes banques européennes dont la Fortis. www.europeancarbonfund.com.

(2)

Ce que devrait vraisemblablement confirmer la Conférence de Nairobi sur les changements climatiques qui vient de débuter, vu l’aggravation de la situation du climat et les changements politiques intervenus aux Etats-Unis.

© photothèque Rhodia

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MANAGEMENT | PROFESSION

Profession Energy manager

Le rôle croissant de l’energy manager Explosion des prix des combustibles, libéralisation des marchés du gaz et de l’électricité, extension des domaines d’intervention publique, nouveaux modes de régulation, évolution accélérée des technologies et des concepts de gestion, estompement des perspectives à court et moyen terme,… les entreprises industrielles ont du grain à moudre côté énergie depuis quelques années. Mais comment font-elles?

“Il n’y a pas si longtemps, les utilités ne constituaient pas a priori de réelles priorités dans les services de production qui étaient d’abord tenues de produire les tonnes nécessaires au niveau de qualité requis, les utilités étant priées de suivre”. Ce constat de Denis Leruth, Responsable énergie du groupe chimique Prayon, résume assez bien le changement de mentalité auquel sont confrontées depuis quelques années les entreprises industrielles dans le contexte énergétique que nous connaissons. Pour faire simple, après avoir été invitées à faire face à la donne sociale au milieu du XXe siècle, puis coup sur coup aux défis du marketing, de la (grande) distribution, des flux tendus, de la qualité et au tournant du siècle à la problématique environnementale, voilà qu’elles se retrouvent aux prises avec une problématique bien plus complexe encore: celle de l’énergie qui est au cœur de leur processus de production. Avec la double difficulté de devoir agir vite –pour ne pas dire ‘dans la précipitation’– tout en préservant leur équilibre économique mis à mal par la flambée des prix. Résultat, la plupart des responsables de première ligne vous le confirmeront, ce qui fait aujourd’hui le quotidien des cadres en charge de l’énergie, leur aurait paru pratiquement inconcevable il y a dix ans à peine. Cela tient bien sûr d’abord à quelques ‘nouveautés’ parfois un rien complexes à appréhender comme le marché des certificats verts, le système d’échange de quotas d’émission ou la certification énergétique des bâtiments, pour ne citer que quelques

exemples évidents. Cela découle aussi de la prise en charge de missions auxquelles ces responsables n’étaient a priori ni préparés ni destinés, comme la négociation avec les fournisseurs, le lobbying auprès des autorités publiques ou le trading de produits virtuels comme les crédits d’émissions. Le process en première ligne C’est que le premier réflexe des sites industriels confrontés à ces nouvelles contingences a été de rechercher dans leur staff, en fonction de l’importance pressentie du phénomène, la personne la plus à même de les affronter. Et dans la plupart des cas, le nœud du problème se situant dans un premier temps au niveau de la performance énergétique du process, on s’est tourné vers un ingénieur directement impliqué dans la maintenance ou la conduite de l’outil de production. “Chez nous, se souvient Philippe Olivy, responsable énergie chez Burgo Ardennes (Virton), cela s’est passé en 2000, à la faveur d’une réorganisation de l’entreprise. J’étais responsable maintenance, on m’a proposé de prendre en plus la responsabilité de l’énergie. Une demi-journée par semaine tout au plus estimait-on. J’ai d’abord pris cela pour une sorte de ‘lot de consolation’ au regard de postes confiés à d’autres…”. Inutile de préciser que, dans cette papeterie industrielle, traditionnellement intensive en énergie, la demi-journée s’est vite muée en troisquarts temps… largement justifiés par les interventions d’Olivy au sein de l’entreprise aujourd’hui à 55% autopro-

ductrice au niveau de son électricité. Mais l’anecdote est surtout révélatrice du scepticisme ambiant, à l’époque, quant à l’importance à accorder à la thématique énergétique. On le constate souvent sur les sites locaux de nombre de multinationales de réputation mondiale, la crise énergétique est souvent sous-estimée ou jugée ponctuelle. Ainsi, dans cette unité wallonne d’un important groupe chimique international, c’est le responsable Environnement qui s’est d’abord proposé de monter au front énergétique. Objectif: dégager des économies d’énergie dans le contexte des accords de branche… “sans perturber le confort de travail des quelque 600 personnes occupées sur le site”, précise avec humour l’intéressé. Car dans la plupart des entreprises du secteur de la chimie où les objectifs de sécurité sont souvent prioritaires, ce sont tout naturellement les aspects financiers qui amènent progressivement le management à revoir quelque peu sa façon de voir en matière d’énergie. Et le contexte de la crise énergétique s’y prête parfaitement. Dans l’exemple cité plus haut, l’intervention du responsable environnement a tout de même permis de réaliser 25% d’économies sur une facture énergétique de plus de l’ordre de deux millions et demi d’euros. Pour mémoire, notre homme a repris depuis ses anciennes fonctions avec le titre de responsable HSE (Hygiène, Sécurité, Environnement). Question de priorités. Cela dit, dès que l’on dépasse le niveau des économies de process, les choses aussi se compliquent sérieusement pour le responsable énergie.

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PROFESSION | MANAGEMENT

Eric Bertrand, Ingénieur Process et Responsable Énergie chez PRS (Groupe Imperbel)

Isabelle Colin, Energy Manager chez Glaverbel

© L. van Steensel

Les achats, un métier en soi Côté négociation avec les fournisseurs des différents vecteurs énergétiques utiles à l’entreprise, les choses sont généralement prises en main par le service achat qui connaît la musique. Car avec l’ouverture du marché et la flambée des prix, les montants en jeu sont devenus trop importants pour que le responsable des achats se contente de venir assister le responsable énergie en fin de réunion, histoire de ‘donner le coup de grâce’. “Quand on en est au stade ou trois jours de retard dans une décision d’achat d’un vecteur énergétique peut se solder par un million d’euros de manque à gagner pour l’entreprise”, explique Denis Leruth, “cela mérite qu’une personne s’y consacre à temps plein, le cas échéant avec l’aide de consultants extérieurs chevronnés pour mettre ses connaissances à jour!”. Dans certains grands groupes industriels intensifs en énergie, comme chez Arcelor Mittal, ces affaires-là se traitent au plus haut niveau, avec éventuellement un œil sur des mégas groupements d’achat comme dans le projet “Blue Sky” annoncé voici quelques semaines. À partir de ce simple exemple, on s’aperçoit bien vite que la gestion énergétique ne se présente forcément pas de la même manière dans une petite unité de production industrielle et dans un groupe d’envergure internationale doté de nombreux sites de production répartis à travers le monde. Ainsi, chez PRS (groupe Imperbel), producteur dans son usine de Perwez du produit Derbigum, Eric Bertrand, ingénieur civil

© L. van Steensel

process et responsable énergie affiche une évidente sérénité face à la problématique énergétique. C’est qu’elle se situe pour lui dans la suite logique d’un intérêt affiché de longue date pour les matières liées à la gestion de la qualité et de l’environnement. Le site est en effet certifié ISO 9002 depuis le début des années 90 ainsi que ISO 14001 et EMAS depuis 1998. Dès 2000, la fonction de responsable énergétique a été créée dans l’entreprise et elle s’est fait les dents à travers les accords de branche de la Chimie et le processus d’audit énergétique qui y est lié. De fil en aiguille, Eric Bertrand a réuni autour de lui une petite équipe de collègues de terrain avec lesquels il se fait fort de gérer un à un l’ensemble des chantiers

ouverts au plan énergétique. Quelques années plus tard, l’énergie qui représentait au départ près de 50% de ses activités, s’intègre désormais sans difficulté à côté de ses autres fonctions de maintenance, process et R&D nouveaux produits. “Nous nous sentons aujourd’hui parfaitement capables de gérer tout cela en interne. C’est possible bien sûr parce que nous sommes une petite entreprise, mais aussi parce que nous avons établi au fil du temps de très bons contacts avec nos fournisseurs et que nous sommes très attentifs depuis le début à l’évolution de ces matières qui resteront prioritaires pendant longtemps encore”. Même si, avec l’énergie, il a vu selon ses termes son horizon s’ouvrir, Philippe Olivy de

EMAB asbl

La profession s’organise en association Voici quelques mois, quelque 25 energy managers se réunissaient dans le cadre de l’Institut de Nayer pour une soirée de discussion autour du thème “Faut-il une association pour la profession?”. Au cours des débats furent dressés les grands contours de la profession –quelles sont les tâches de l’energy manager, les défis et les besoins auxquels il est confronté– ainsi que l’intérêt de fédérer son développement au sein d’une association. Depuis, l’idée s’est concrétisée. Portée par la VIB, la BEMAS et l’IFMA*, l’Energy Managers Association of Belgium (EMAB asbl) vient de voir le jour. Disons le d’emblée, son lancement arrive à point nommé et ses parrains ne manquent pas d’intérêt. En effet, l’EMAB aura pour avantage de grouper la force de trois associations aux profils complémentaires englobant précisément les trois dimensions de la fonction de manager: logistique des achats (VIB), process industriel (BEMAS) et gestion immobilière (IFMA). Nous reviendrons dans notre prochain numéro sur les ambitions de l’EMAB et le programme de ses activités 2007 qui ne manquera pas d’être copieux, tant l’actualité de l’énergie est dense. * Vereniging voor Inkoop en Bedrijfslogistiek (www.bevib.be), Belgian Maintenance Association (www.bemas.be) et International Facility Management Association (www.ifma.be).

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MANAGEMENT | PROFESSION

Une profession à deux piliers E Supply side: optimiser la fourniture/ production d’énergie primaire et secondaire. Cela va de l’achat des énergies (optimiser le mix coûts/sécurité d’approvisionnement) aux processus de transformation en énergie secondaire (chaleur, électricité, air comprimé, froid commercial et tertiaire, etc). E Demand side: maîtriser la demande d’énergie. On entre dans le domaine de l’utilisation rationnelle de l’énergie qui passe en revue l’ensemble des process, équipements, assets et organisation de l’entreprise. Objectif: diminuer la quantité d’énergie par unité produite, stockée, livrée (industrie) ou par

son côté n’affiche pas la même sérénité. Confronté aux mêmes chantiers énergétiques, il souffre pour sa part de la situation très excentrée (Virton) du site de Burgo Ardennes qui limite ses possibilités de contacts avec ses collègues et sa perception des évolutions de terrain. Et, en tant qu’ingénieur industriel, il s’estime mal préparé aussi aux aspects plus politiques de sa fonction qui l’amènent à négocier avec des interlocuteurs plus habitués que lui aux données moins techniques et plus macro-économiques de la problématique énergétique. Vers des stratégies centralisées Changement de décor dans les grands groupes industriels. Là, on fait clairement la différence entre les aspects stratégiques et la gestion quotidienne des sites industriels qui doivent conserver un minimum de flexibilité et d’autonomie de fonctionnement. Au cours des dix dernières années, tous ont mis en place, au niveau corporate, une coordination de la politique énergétique du groupe. Plusieurs postes de direction se sont ainsi vu confier progressivement des responsabilités nouvelles liées à l’énergie, inspirés ou assistés par les différents opérateurs de services énergétiques qui ont émergé ces dernières années (voir Energymag n°3, p.14) dans le sillage du phénomène. On se trouve alors dans

une situation où le management définit en équipe, selon la problématique envisagée, l’orientation globale du groupe, une personne étant chargée d’assurer l’interface avec les différents sites de production sur les différents marchés, faisant remonter les informations de terrain vers le management, puis redescendre les directives de management vers les opérateurs locaux. C’est en gros le rôle d’Isabelle Collin au sein du groupe Glaverbel. De formation à la fois technique (ingénieur) et commerciale (MBA), elle assure la coordination de l’ensemble des intervenants: “Il y a dix ans, cette organisation n’existait pas et tout se réglait pays par pays. Ce que nous avons surtout essayé de faire depuis, c’est d’impliquer chaque pays dans ces problématiques en demandant à chacun d’eux de désigner un correspondant chargé de suivre toutes les évolutions politiques et économiques locales et de les faire remonter jusqu’à nous. Aujourd’hui, chacun garde son rôle, son expertise et ses compétences spécifiques, mais on aborde tous ces problèmes de manière collégiale en bonne entente et en respectant les contraintes de chacun”, assure-t-elle. Mais elle reconnaît que cette organisation relativement légère sur le plan des disponibilités à encore du mal à s’imposer sur tous les fronts où les entreprises ont intérêt à faire du lobbying pour obtenir ou maintenir de

bonnes conditions de marché. On le voit, la principale difficulté pour l’energy management réside dans la formation –comme chez Borealis (voir Energymag n°3 p.38)– d’un bon attelage de compétences, chacune d’elles ayant son rôle à jouer et ses contraintes propres dans la mise en œuvre d’une bonne gestion énergétique englobant l’ensemble des thèmes à aborder, de la performance énergétique des équipements à la gestion fine de la mécanique des droits d’émission, en passant par la sensibilisation du personnel ou la mobilité. La profession d’energy manager reste à inventer. p Jean Cech

m2 occupé (tertiaire).

Gestion des émissions de GES: le choc des métiers La ‘marchandisation’ des émissions de gaz à effet de serre (GES - on parle aujourd’hui du CO2, mais on parlera sans doute bientôt de NOx, de méthane ou de mercure) constitue une tendance lourde de conséquences sur le management des entreprises industrielles. Elle va amener celles-ci à renforcer leurs moyens d’action sur trois métiers différents et complémentaires: E Allocation management: cette fonction suppose une vision stratégique sur la production à moyen terme (cinq ans) associée à une capacité de négociation avec les autorités publiques en vue de l’établissement de quotas avantageux pour l’entreprise. E Monitoring and reporting management: poste éminemment stratégique, il implique, lui, une parfaite maîtrise technique des équipements de mesure et une excellente aptitude à gérer et valider les données sur le long terme. Pour les autorités européennes qui considèrent qu’il est à la base de trop d’approximations dans le système ETS, cette fonction est actuellement dans l’œil du cyclone. E Compliance management: on est ici au cœur du système d’échange des quotas d’émissions, dans des activités de trading qui permettront à l’entreprise de minimiser les coûts du système et d’en tirer parti en anticipant les évolutions de marché. Au carrefour de ces compétences, l’émergence de nouveaux concepts de production prenant en compte conjointement les vecteurs énergies-émissions, à l’instar du Low Carbon Steel actuellement à l’honneur chez Arcelor Mittal…

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PROFESSION | MANAGEMENT

Et dans le tertiaire? Après le facility manager et le property manager, verrons-nous apparaître l’energy manager dans les entreprises tertiaires? La réponse est oui, sans aucun doute! “Depuis quand une entreprise de service serait-elle sourde à la réduction des coûts d’exploitation et à la valorisation de son patrimoine”, fait remarquer avec humour un energy manager d’une grande banque. Ceci pour poser le débat. Même si c’est avec moins de violence que dans l’industrie, la croissance persistante des coûts de l’énergie, les incertitudes liées à l’approvisionnement, les risques environnementaux et les nouvelles donnes réglementaires affectent également le secteur tertiaire.

Quatre missions phares À l’image du groupe Delhaize (voir energymag N°3), les grandes entreprises tertiaires commencent donc tout doucement à prendre le pas et mettent

en place un energy manager dédié. Sa mission? Traiter de manière centralisée et cohérente les enjeux énergétiques de l’entreprise, en lien avec les partenaires et prestataires spécialisés. Une fonction bâtie sur quatre piliers: 1/ Évaluer, à l’échelle du parc de bâtiments, les enjeux pour l’entreprise à court et moyen terme; les quantifier sur les plans financiers et du risque, en termes de coûts d’exploitation et de valorisation du patrimoine. 2/ Définir des objectifs et des stratégies d’action; identifier les gisements d’économies accessibles et les moyens de les réaliser. Cela passe par une analyse croisée coûts d’exploitation/valorisation/risque de l’ensemble du parc, avant de se concentrer, dans un deuxième temps, sur les sites critiques, et de s’intéresser aux énergies utilisées, aux contrats d’externalisation des prestations techniques, aux contrats de fourniture, aux équipements, à l’organisation, etc. 3) Coordonner les différentes équipes opérationnelles, pour veiller à tous les niveaux, à la mise en place de la stratégie. Il veillera en particulier à assurer une forte coordination entre les politiques d’externalisation des prestations techniques, les politiques d’achat d’énergie et les politiques d’investissement. 4) Mettre en place les outils et les méthodes de reporting et de benchmarking des performances. p Jean-François Marchand

© Philip Date - FOTOLIA

Réduire les coûts et les risques Ici aussi, le rôle du gestionnaire immobilier a évolué avec la déréglementation des marchés de l’électricité et du gaz. Les entreprises tertiaires doivent aujourd’hui prendre en compte les facteurs économiques du marché, c’est-àdire, les fluctuations du prix de l’énergie, la concurrence entre les différents fournisseurs, pour réduire le coût d’achat, définir des stratégies d’investissements et réduire la consommation d’énergie. La pression réglementaire et environnementale est également un facteur qui ne pourra pas ou plus être négligé à l’avenir. Tôt ou tard, les rejets CO2 importants du secteur –le tertiaire, résidentiel compris, représente 40% des rejets CO2 en Europe, jusqu’à 70% en région Bruxelloise– seront soumis aux mêmes pénalités que celles qui s’appliquent à l’industrie. Un autre facteur qui tendra à généraliser la fonction d’energy managers dans le tertiaire est l’impact de la dimension “énergie” sur les risques futurs et la valorisation du patrimoine. La question principale est: mon parc immobilier sera-t-il encore exploitable dans de bonnes conditions économiques dans 5 ou 10 ans? Si le prix de l’énergie double? Quadruple? Si les réglementations se durcissent? Si la fréquence d’événements climatiques extrêmes (canicule) s’accroît? Et que vaudra mon patrimoine?

Energy manager: nouveau métier immobilier Reste que mettre en place un energy manager n’est pas chose simple. Aujourd’hui encore, les décisions affectant l’énergie dans les bâtiments sont, souvent, éclatées. La décision d’investissement –et donc les arbitrages y afférents– est confiée à une équipe travaux, voire à une société tierce dont la mission est d’assurer la construction ou la rénovation d’un bâtiment en fonction d’un cahier des charges technique. L’exploitation, elle, est prise en charge par l’équipe de gestion, qui fait en général appel à une ou plusieurs sociétés d’exploitation (prestataire facilitaire, exploitants, intervenants multitechniques…). Quant à l’achat des énergies, il est souvent pris en charge par les acheteurs. Tous ces métiers sont des métiers à part entière, et donc doivent être pris en charge par des équipes dédiées. Leur éclatement, cependant, nuit à la mise en place d’une stratégie énergétique cohérente. La solution? Prendre conscience que l’energy management n’est pas qu’une couche supplémentaire ajoutée aux missions du facility manager ou du responsable technique. Il s’agit d’un autre métier, avec des objectifs qui s’inscrivent tout autant dans le court terme que le long terme.

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DOSSIER | CONTRACTING

L’euro que vous ne pourrez plus manquer de gagner! Le financement est bien souvent la pierre d’achoppement de l’efficacité énergétique. La compétition pour le capital est rude dans les entreprises et celui-ci fait tout simplement défaut dans le secteur public. Conséquence: des temps de retour courts priment la plupart du temps sur la rentabilité dans les choix des projets d’investissements. Bien des mesures de maîtrise des énergies passent ainsi à la trappe ou sont postposées, faute des moyens nécessaires. Et une approche globale de l’efficacité énergétique est rarement appliquée. Or l’expérience nous enseigne que depuis les premiers jours de la libéralisation des marchés de l’énergie, les prix n’ont cessé de croître. Et tout indique que cela sera encore le cas à l’avenir. À ne pas engager aujourd’hui les investissements, on s’expose à une double punition: non seulement on n’aura pas réduit ses KWh, mais ceux-ci coûteront plus cher chaque année. A contrario, un euro épargné aujourd’hui vaudra plus demain. Ce qui pose la question: a-t-on le luxe de rater cette opportunité? Celle de réduire ses coûts d’exploitation par des investissements qui s’autofinancent? De générer de nouvelles ressources sur le long terme? De mettre en place un cercle vertueux, créateur de valeur, à la fois pour l’entreprise (ou l’institution) et la collectivité? C’est en résumé l’argument qu’entendent faire passer les entreprises de services écoénergétiques: elles constituent une des voies disponibles pour

qu’elles sont prêtes aujourd’hui à garantir contractuellement. Et même à financer!

© A. Laufer

valoriser le potentiel d’économies d’énergie dans les entreprises et les institutions. Potentiel

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CONTRACTING | DOSSIER

Une approche intégrée Par rapport à l’approche “traditionnelle” du financement des investissements dans l’efficacité énergétique, le Performance Contracting comme d’autres formules disponibles sur le marché (voir encadré page 26) est une démarche beaucoup plus inté-

grée. Ici, c’est l’ESCO qui prend en charge la réalisation intégrale du projet, fournit la main d’œuvre et le savoir-faire nécessaires à la réalisation des étapes du projet: E étude de faisabilité; E montage du financement; E ingénierie; E achat et installation des équipements; E formation du personnel; E entretien du matériel installé; E gestion énergétique, suivi et contrôle des résultats (“monitoring”). De fait, les ESCO proposent un vaste éventail de services et interviennent comme intermédiaires entre le client et l’ensemble des intervenants, jusqu’y compris dans certains contrats, de l’achat des énergies auprès du fournisseur. L’avantage pour le client est de n’avoir qu’un seul interlocuteur. L’autre avantage est que l’ESCO supporte les risques opérationnels et techniques liés au projet. Mais elle peut aussi supporter les risques liés au financement proprement dit du projet. On entre alors dans le domaine du tiers financement. Ainsi selon l’arrangement contractuel choisit (voir encadré page 28), l’investissement initial est financé soit par le client, soit par l’ESCO, soit par une structure tierce comme une banque. Quand c’est l’ESCO qui finance ou emprunte, le client est protégé des risques financiers liés au crédit puisque seule l’ESCO les assume. Le client bénéficie aussi dans ce cas d’un financement hors bilan qui préserve ses capacités d’endettement. Mais il est clair que cette formule a un coût plus élevé que l’autofinancement.

Le modèle du performance contracting

Économies du client Coûts antérieurs

Un modèle de financement De quoi s’agit-il? D’un contrat passé entre une entreprise de services énergétiques (une ESCO pour Energy Services Company) et un client qui prévoit une modernisation ciblée des infrastructures énergétiques de l’entreprise en vue d’exploiter le potentiel d’économies d’énergie présentes. L’optique est de réduire les consommations et/ou les coûts d’exploitation de façon globale et intégrée. Les investissements nécessaires sont amortis par les économies d’énergie et la réduction des coûts d’exploitation qui sont garantis par l’ESCO pendant toute la durée du contrat. À l’expiration de celuici –les contrats varient généralement entre 5 à 15 ans–, le client bénéficie d’une installation modernisée et profite de l’in-

tégralité des économies produites (voir schéma). “Dans ce type de contrats, les économies réalisées financent l’investissement”, explique Rony Gabriels, Sales office Manager Energy, Environemental and Solutions chez Jonhson Controls. “Grâce à la garantie des économies que nous apportons, le client a l’assurance que son budget d’exploitation normal sera suffisant pour la réussite économique de l’opération”. Mieux même: suivant la portée du contrat, le client pourra bénéficier d’économies immédiates dès les premières années. Le principe est que dans un très grand nombre de cas, il existe un vivier suffisant d’économies réalisables permettant de couvrir à la fois le remboursement de l’investissement et le paiement du prestataire, tout en générant des économies immédiates pour le client. Ce qui pose une des conditions du succès du Performance Contracting: il faut un business case! Autrement dit, les installations ont besoin d’être modernisées et optimisées afin d’offrir un potentiel d’économies suffisant. Une autre condition est de permettre un amortissement des investissements dans un délai raisonnable. Mais au prix de ces deux éléments, le Performance Contracting peut se révéler une option de premier choix.

Coûts d’énergie et d’exploitation

Tout commence avec 1 €. Un euro qui peut être épargné sur les coûts des énergies. Un euro par m2 par an. Un euro par tonne ou par quantité d’unités produites. Pour 10, 15 ou même 20 ans. Imaginez ce que cela représente pour un immeuble de 100.000 m2. En dix ans, cet euro générera un flux de revenus de plus d’un million €. Et dans la plupart des cas, ça ne s’arrête pas là. Le temps durant lequel un investissement paie dépend d’un cas à l’autre, mais la majorité des technologies d’efficacité énergétique ont une durée de vie qui tourne entre 10 et 20 ans. Pour les lampes par exemple, elle n’est que de 5 à 7 ans. Mais les systèmes HVAC et les entraînements à vitesse variable continueront à générer des économies sur 10 à 15 ans. Pour les ballasts, les moteurs, le contrôle de l’éclairage et bien d’autres technologies, cela va de 15 à 20 ans. Ainsi pour la plupart des technologies d’efficacité énergétique, un investissement réalisé aujourd’hui continuera de payer sur plus d’une décennie. Et ce sans risque majeur ou à tabler sur une baisse radicale des prix des énergies dans les 10 à 20 ans à venir. Or, c’est tout le contraire qui s’annonce. Selon les prévisions d’Eurostat, les prix du gaz et de l’électricité auront doublé d’ici 15 à 23 ans par rapport à aujourd’hui. Alors, qui dit mieux? Quel autre investissement que l’efficacité énergétique peut générer une rentrée stable, récurrente, sur plus d’une décennie, sans risque majeur? Et qui aujourd’hui peut être garantie! Voir financée par un tiers! C’est le grand principe du Performance Contracting ou contrat de performance énergétique.

Les économies garanties couvrent la valeur de l’investissement

Nouveaux coûts réduits avec le Contrat de Performance Début de la période de garantie

Expiration du contrat

Années

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DOSSIER | CONTRACTING

L’approche traditionnelle

Entrepreneurs

Bureau d’études

Manufacturiers équipement

Client Fournisseurs d’énergie

Gouvernements

Institutions financières

L’approche ESCO

Entrepreneurs Manufacturiers équipement

Client

ESCO Services • analyse énergétique • installation d’équipements • financement • suivi de résultats • garantie de performance

Gouvernements Bureau d’études Fournisseurs d’énergie Institutions financières

Une démarche globale plus “performante” L’intérêt du Performance Contracting tient aussi dans les niveaux de performance élevés qu’il permet d’atteindre grâce à une démarche globale d’efficacité énergétique. Le point de départ est de comprendre l’énorme gain d’efficacité atteint par les nouveaux équipements mis sur le marché ces dernières années. Des ballasts et des lampes aux unités de réfrigération, en passant par les moteurs ou les systèmes d’entraînement, la performance énergétique des équipements disponibles aujourd’hui est infiniment plus élevée que leurs équivalents d’il y a 20 ou même 10

ans. Ces performances accrues signifient que même la mise à niveau d’un seul composant comme les lampes est susceptible de générer des économies substantielles. Mais l’approche globale de l’efficacité énergétique –qui implique une mise à niveau optimisée et coordonnée de l’ensemble des composants d’une installation ayant un impact sur la consommation énergétique– permet de maximaliser les économies. Un exemple simple montre pourquoi. Supposons un programme de mesures visant à remplacer dans un bâtiment les anciens équipements d’éclairage par des ballasts électroniques et des tubes T8 voire T5 ainsi qu’une unité de climatisation vieille de 20 ans. Ces deux mesures prises isolément généreront leurs lots d’économies respectives, importantes dans les deux cas. Mais dans l’approche globale, les gains seront beaucoup plus importants. La bonne pratique commande en effet de réaliser d’abord la mise à niveau de l’éclairage, ce qui aura pour effet de réduire la charge de chaleur et donc les besoins de refroidissement. Il est alors possible d’installer une climatisation plus petite et moins coûteuse, ce qui réduit le temps de retour tout en accroissant la rentabilité de l’investissement. En somme, ce que justifie l’approche globale, c’est qu’elle permet de consacrer des moyens d’investissement à des mesures qui prises isolément n’auraient pas obtenu l’approbation faute de rentabilité suffisante. L’expérience montre ainsi que les économies initiales que procure le Performance Contracting sont plus importantes que celles générées par une démarche traditionnelle d’efficacité énergétique, car l’investissement réalisé est plus efficace à la fois du point de vue technologique et de l’intégration des différents composants. Par leur expertise et la capacité à stimuler les synergies des mesures possibles, les ESCO comblent ce que les spécialistes appellent le déficit d’innovation. La cohérence des investissements assure aussi au client une mise en œuvre plus rapide des mesures d’économie d’énergie. Ce qui permet d’amortir plus vite les investissements réalisés et de réduire leur temps de récupération. Enfin, le fait que l’ESCO soit contractuellement obligée de mesurer en permanence le résultat de ces investissements l’oblige à une amélio-

ration continue de l’efficacité énergétique des installations. Le processus est donc permanent sur toute la durée du contrat, ce qui garantit aussi qu‘à son terme, le client bénéficiera d’une installation performante. Un processus plus complexe et coûteux Les contrats de performance énergétique s’échelonnent de quelques centaines de milliers d’euros à plusieurs millions. Ceci explique le revers de la médaille: ils sont plus complexes à mener tant d’un point de vue juridique et financier que du processus de mise en œuvre. En outre, ce type de contrat engage l’entreprise ou l’institution au plus haut niveau directionnel et de façon très transversale. La mise en œuvre demande ainsi du temps et le succès dépend en grande partie du soin qui aura été apporté à la phase de préparation et de développement du projet. L’appel d’offre et l’attribution du marché doit faire suite à une solide analyse de la situation et définir clairement les objectifs à atteindre (corrigés des éventuelles variations climatiques ainsi que des variations de prix et de consommation). Tous les participants doivent être impliqués en amont du projet afin d’assurer un meilleur transfert des informations et une plus grande transparence. Il est ainsi recommandé de réaliser son propre audit indépendant de façon à discuter d’égal à égal avec le soumissionnaire. Le client serait avisé également de se faire conseiller par des experts juridiques et financiers indépendants afin de bien comprendre et circonscrire les risques auxquels il s’expose. L’autre revers de la médaille, c’est que ces contrats sont aussi plus coûteux qu’une approche traditionnelle: de 13 à 15% selon l’ICLEI. Un surcoût qui s’explique par des frais de gestion plus élevés et une prime de performance et/ou de garantie qui alourdit la note. Mais ce coût supplémentaire est souvent vite compensé par le fait que le client paie le projet à partir des économies réalisées dans son budget d’exploitation. Le coût n’est donc pas ressenti. Et les banques? Une fois le partenaire sélectionné, il restera toujours à financer proprement dit le projet. Que ce soit par endettement de l’ESCO ou par celui du client. Sur ce

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Contracting De la fourniture d’énergie à la garantie de performance “Dans l’univers des services énergétiques, on distingue trois types de contrats de service relatif à l’investissement et à l’optimisation énergétique d’une installation: l’Energy Supply Contracting pour les infrastructures de production d’énergie,

l’Energy

End-Use

Contracting pour la ges-

Energy Supply Contracting Dans le domaine du supply, l’ESCO planifie, met en place et gère une installation d’approvisionnement en énergie. Le cas typique est la production de chaleur ou de vapeur ainsi que la cogénération. Mais cela peut aussi s’appliquer à la production d’air comprimé ou de froid. Dans ce type de contrat, c’est l’ESCO qui finance l’installation et en supporte les risques d’exploitation. Le client paie un prix unitaire fixe pour l’énergie utile qu’il consomme, prix inférieur aux coûts de fourniture du contrat antérieur ou à la production en compte propre. Les contrats peuvent être plus ou moins complexes, et intégrer la fourniture des énergies primaires, indexées ou non sur des barèmes fixés par les parties.

Au final, le client bénéficie d’une installation de production moderne à un prix déterminé d’avance, ce qui lui permet de planifier efficacement ses budgets. On entre ici pleinement dans le domaine de l’externalisation de la fonction production des énergies. “L’industrie, en particulier, est de plus en plus friande de ce type de contrats, la tendance étant à considérer que la conversion d’énergie ne relève plus de son core business”, explique Marc Begou. Mais le secteur tertiaire ainsi que le secteur public s’y intéresse aussi de plus en plus. Ainsi l’installation d’une unité de cogénération ou d’un réseau de chaleur répond souvent à ce type de montage.

tion finale des énergies

Energy End-use Contracting

et, l’Energy Performance

Dans un contracting centré sur l’utilisation finale de l’énergie, l’ESCO assure essentiellement l’exploitation et la maintenance des installations techniques du client. Ce type de contrat ne vise pas nécessairement à modifier les installations proprement dites, mais d’en optimiser leur exploitation par rapport à des objectifs quantifiés comme le confort. Le client et l’ESCO s’entendent sur le niveau de résultat souhaité (par exemple garantir une gamme de température des locaux pour un nombre d’heures d’occupation donné) et la façon de le mesurer. L’ESCO assure

Contracting centré sur les économies d’énergie, ce dernier étant la version la plus aboutie”, explique Marc Begou, Senior Manager chez Altran Europe. “Le commun dénominateur de ces services est de deux ordres: offrir au client une approche intégrée de l’investissement énergétique et/ou des économies de coûts qui financent en tout ou en partie les investissements réalisés, les deux aspects étant étroitement liés”.

Marc Begou, Senior Manager Altran Europe

alors le risque opérationnel de l’exploitation pour le niveau de résultat fixé. Ce qui est acheté est le niveau de confort, les paiements du client sont dès lors fonction d’un prix unitaire spécifié pour la fourniture de ce “service”. Le contrat est assorti de pénalités en cas de manquements aux résultats. Comme pour le Supply Contracting, le client tire parti d’une facturation budgétisée à l’avance. C’est le type de contrat actuellement le plus répandu étant donné qu’il est une extension des services traditionnels de maintenance multi techniques.

Energy Performance Contracting Dans le Performance Contracting, l’ESCO évalue les économies d’énergie réalisables (diminution des coûts ou de la demande) dans les installations du client et les investissements qui sont nécessaires pour les atteindre. Elle réalise ensuite ces investissements dans une relation contractuelle garantissant au client le niveau d’économies identifiées. C’est cette garantie d’économies qui le distingue fondamentalement des autres formes de contrats.

Ainsi, la facturation du client peut prendre différentes formes (voir encadré page 28) mais est toujours en relation avec les économies d’énergie réalisées par rapport à une ligne des coûts de référence préalablement établie. Le performance contracting inclut donc une relation entre le paiement et la performance du projet. Signalons que les contrats de performance énergétique incluent ou peuvent inclure à la fois le supply et le end-use des énergies.

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Trois types de contrats de performance Trois grand types de contrats de performance énergétique sont pratiqués par les entreprises énergétiques. Dans chaque cas, le risque de performance pèse sur les épaules du prestataire. La variabilité des formules porte sur le mode de financement et le partage effectif des économies garanties.

Contrat de garantie de performance Dans ce type de contrat, l’ESCO prend uniquement le risque de performance: elle se fait rémunérer pour l’ensemble de ses prestations en contrepartie d’une garantie sur les économies annuelles à réaliser.En cas de sous performance, l’ESCO paie une indemnité au client, assurant à ce dernier la rentabilité minimale du projet attendue dans une période donnée. Le client est responsable du financement du projet et doit donc signer deux contrats dont un avec une institution financière. L’obtention d’un prêt est facilitée par la garantie des économies.

Banque Prêt

Remboursement Services, équipements, installations, suivi des économies Client

ESCO Paiement de la réalisation du projet et des services durant le contrat Electricité

Oil Gaz

L’ESE paie une indemnité si les économies prévues ne sont pas réalisées

Utilities

Contrat à économies partagées. Ici, c’est l’ESCO qui s’occupe du financement et prend à la fois les risques de performance et de financement, le client signe donc un contrat unique. L’ESCO est rémunérée selon un pourcentage des économies d’énergie variant de 10% à 90 % selon la nature des investissements et la durée de contrat recherchée par les deux parties. Ce pourcentage peut être variable ou constant sur la durée du contrat. Il est rare que le client conserve sur l’ensemble du contrat plus de 50% des économies d’énergie générées. Mais la propriété des équipements lui est en général cédée à la fin du contrat. C’est le cas classique du tiers financement.

Banque Prêt

Remboursement

Services, équipements, installations, suivi des économies Client

ESCO Part des économies basées sur la performance Electricité

Oil Gaz Utilities

Contrat de prise en charge du budget d’exploitation. L’ESCO prend en charge le budget total d’énergie et l’exploitation/maintenance des systèmes de production et de consommation d’énergie de l’entreprise visée. C’est elle qui assure le financement de l’investissement et l’ensemble des frais opérationnels.Le client paie à l’ESCO, pour toute la durée du contrat, une somme annuelle légèrement réduite par rapport à la facture énergétique initiale (ex.: 10%) et indexée à son budget d’énergie. Le client à la garantie que ses coûts ne dépasseront pas ce pourcentage. L’ESCO implante les mesures d’économie d’énergie et dégage un profit de la différence entre le montant payé par le client et les coûts d’exploitation (énergie, entretien). Si les économies d’énergie sont supérieures à la diminution contractuelle de la facture initiale, garantie par l’ESCO, il y a partage des économies supplémentaires entre le client et le contractant selon une formule prédéterminée.

Banque Prêt

Remboursement

Services, équipements, installations, exploitation et entretien, achat d’énergie Client

ESCO Paiement mensuel fixe pour les services

Electricité

Oil Gaz Utilities

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plan, il faut reconnaître qu’il y a encore un certain manque d’experts techniques et d’institutions financières spécialisées dans le contrat de performance. Mais cela change. Le développement important qu’a connu le secteur du Supply Contracting ces dernières années, souvent pour des projets de grande ampleur, a attiré les acteurs financiers, appâtés par les perspectives de gains et les montants en jeu. Les banquiers comme Dexia ou KBC reconnaissent volontiers que dans ce domaine, la compétition pour le financement est aujourd’hui réelle et que les projets qu’on leur soumet sont plus matures et créatifs qu’auparavant. Sur ce terrain, ce sont principalement les départements corporate des institutions financières ou leur filiale private equity (fonds d’investissement) qui interviennent. Ici, les formules sont diverses quant à la variabilité des remboursements, des garanties ou des mises en gage exigées. Et elles peuvent aller jusqu’à la prise de participation d’une private equity dans une société spécialement constituée pour l’occasion (une Specific Purpose Company) en complément d’un financement bancaire. Ainsi dans le cas d’un projet typique de Supply Contracting comme la société Renogen présenté dans notre précédente édition les 25 millions € d’investissement ont été financés par emprunt bancaire et par une entrée au capital de la KBC Private Equity. En

plus des traditionnelles questions de solvabilité, les trois éléments clés qui entraînent la décision du banquier ou du fonds d’investissement sont résumés par Filip Lesaffer, Senior Investment Manager chez KBC Private Equity: “la qualité des partenaires autour de la table, la consistance et la maîtrise “industrielle” du projet et la contractualisation des engagements respectifs”. Or c’est précisément ce que vise le concept de Performance Contracting: réunir ces trois paramètres. Auquel s’ajoute un quatrième: un remboursement du financement qui trouve sa source dans un compte d’exploitation déjà provisionné à opérations inchangées. De fait, la contractualisation des garanties de performance et le paiement par le compte d’exploitation facilitent la mobilisation du financement. Des atouts que les entreprises de services énergétiques valorisent auprès des acteurs du secteur financier. C’est à ce point vrai que certaines banques ou investisseurs privés nouent des “alliances” de circonstances ou récurrentes avec les sociétés de services énergétiques pour développer les financements. C’est ainsi le cas de la banque Triodos –par ailleurs spécialisée dans le financement des infrastructures d’énergie verte– qui finance régulièrement les projets de Fines (Financing Energy Savings), une société de performance contracting active sur le sec-

teur du relighting en Flandre. Depuis le début de l’année, c’est une quinzaine de projets qui ont ainsi été financés sans demande particulière de garantie par la banque. La formule marche si bien, que les délais décisionnels mis en place par les deux acteurs entre la soumission d’un dossier et l’accord de crédit sont de moins de 10 jours, selon Jan Poppe, Head of Project Finance chez Triodos. D’autres grands acteurs du secteur bancaire se préparent à lancer des formules spécifiques. La Fortis préparerait ainsi pour l’an prochain une offre de crédit labellisée “énergie” destinée aux PME et aux particuliers. Dans un autre registre, plus ambitieux, Dexia, la banque des villes et communes, serait en passe de nouer un partenariat d’importance pour offrir au marché une offre globale incluant dès l’origine le financement. À l’heure de mettre sous presse, nous n’avons pas eu le détail de l’offre, mais on lira avec intérêt dans les pages suivantes l’initiative menée par la maison française de Dexia en partenariat avec Dalkia. En conclusion, on gardera à l’esprit que le Performance Contracting n’est pas la panacée, ne s’applique pas à toutes les situations et que cela coûte cher. Mais il faut convenir que, sans le recours à ce type de partenariat, des résultats ambitieux, rapides et globaux sont des objectifs difficiles à atteindre. p Jean-François Marchand

Les avantages et inconvénients du Performance Contracting Actions d’économie d’énergie

Avantages

Inconvénients

Mise en oeuvre simultanée et intégrée de plusieurs actions rentables.

L’ESCO peut limiter les types d’actions à réaliser et ne conserver que les moins risquées ou les plus rentables.

Concrétisation rapide du potentiel d’économie d’énergie.

Financement et inscription comptable

Transaction réalisable au bilan ou hors bilan. Capacité d’emprunt de l’entreprise non affectée si le financement se fait hors bilan.

Coût de financement souvent plus élevé.

Solution au cloisonnement des budgets d’investissements et de fonctionnement.

Gestion du projet

Limitation du nombre d’interventions pour la réalisation du projet. Transfert de la responsabilité de la gestion à l’ESCO.

Relation entre le client et l’ESCO

Mise en commun d’experts sectoriels pour la réalisation de projet.

Processus d’appel de proposition plus complexe et plus coûteux. Besoin d’un maître d’oeuvre interne indépendant. Possibilité de perte de flexibilité dans l’exploitation ou les choix de mesures d’économie d’énergie. Possibilité de divergence dans l’évaluation des économies d’énergie.

Garantie de performance

Garantie d’atteinte des objectifs techniques et des résultats financiers auprès de performance.

Coût additionnel associé à la garantie de performance.

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Panorama des acteurs du marché

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Les “building” companies Conseils aux candidats EPC Avant le contrat: une analyse stratégique bFaites préalable (estimez les risques et les coûts associés) et mettez en place une structure compétente (juridique, technique et financière). un audit énergétibRéalisez que des installations ou du patrimoine visé en interne ou par un bureau d’études indépendant. Cela vous permettra d’évaluer l’évolution de vos besoins, votre consommation de référence et les économies d’énergie potentielles. Une base indispensable pour discuter avec une ESCO et fixer les objectifs de performance ainsi que le mode de mesure. jouer la concurrence, au bFaites moins dans la phase préliminaire des études. Ensuite négocier les offres retenues pour faire ressortir le meilleur “partenariat”. Pendant le contrat d’un bon maître bDotez-vous d’œuvre interne qui assurera un contrôle régulier des engagements et des réalisations. une démarche enbAdoptez trepreneuriale, le climat de confiance entre le client et le prestataire est essentiel à la maximalisation des bénéfices communs. À la fin du contrat une clause d’audit bPrévoyez final en fin de contrat de façon à vous assurer que les équipements transférés sont dans un état technique correct compte tenu de leur ancienneté.

Johnson Controls International: On ne présente plus JCI, la société tentaculaire de l’outsourcing. Aux Etats-Unis, Johnson Controls est l’un des leaders sur le marché des services énergétiques que ce soit dans le domaine du Supply Contracting ou du Performance Contracting. Le marché européen ne laisse évidemment pas indifférent le géant américain et celui-ci étend sa toile un peu partout en Europe. Les activités Energy Environemental Solutions sont dirigées par un québécois, Gino Gauthier, ayant forgé ses armes sur le marché Nord Américain. Résultat: en France, JCI a engrangé sur les douze premiers mois d’activité (2005) un volume de 30 millions € de contrats. Chez nous, les services de Performance Contracting viennent de démarrer en octobre de cette année. Les ambitions de Rony Gabriels, responsable commercial: réaliser un cinquième du volume français en 2007. La société Rony Gabriels, ne vise dans un premier temps que le marché ter- Johnson Controls International tiaire et industriel d’une certaine taille. Honeywell Building Solutions: Honeywell pratique depuis une bonne vingtaine d’années le Performance Contracting. C’est d’ailleurs l’autre grand leader américain des services énergétiques, présent sur pratiquement tous les segments du marché. En Europe, c’est principalement sa filiale Honeywell Building Solutions qui est active sur le marché du Performance Contracting. Les activités Energy Services européennes sont gérées par le belge Luc Onockx qualifié de Monsieur 100 millions €, Luc Onockx, soit le volume de contrats réalisés en EuHoneywell Building Solutions rope sur une dizaine d’années. HBS Belgique a intensifié son activité sur le segment des services énergétiques depuis le début 2006 et serait en passe de conclure un important contrat dans les quelques semaines à venir. Siemens Building Technologies: Dans cette catégorie, on trouve également Siemens Building Technologies, très active en Allemagne sur le Performance Contracting et qui étend progressivement son offre en Europe. SBT vient ainsi de démarrer ses activités de Performance Contracting sur le marché français. La Belgique devrait suivre dans le second semestre 2007 selon son CEO, René Jungbluth. Schneider Electric: Signalons également un nouveau prétendant dans ce peloton de tête: Schneider Electric qui consolide à grands pas son offre sur le marché du Building Services. Dans le domaine du Performance Contracting, Schneider fait ses armes en France, notamment avec le groupe Carrefour avec qui il est en contrat. Selon nos informations, une offre de ce type devrait suivre en Belgique.

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Qui trouve-t-on sur le marché des services énergétiques et du contracting? De plus en plus de monde! Tour d’horizon de quelques acteurs et de leurs spécificités.

Les “global players”

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Suez Energy Services: La base des services énergétiques dans ce segment est le End-use Contracting. Normal, les sociétés de maintenance et d’exploitation ont une grande expertise de… l’exploitation d’installations techniques tertiaires comme industrielles. Mais, comme l’explique Frédéric Hug, Directeur Environnement et Innovation de Suez Energy Service et par ailleurs porte-parole de l’Effiees (Fédération européenne des Frédéric Hug, entreprises de services en efficacité énergétique), Suez Energy Services “Nous sommes présents sur l’ensemble de la chaîne de valeurs des services techniques liés à l’efficacité énergétique. Cela va de la conception des systèmes à leur installation, en passant par l’exploitation/maintenance et le Facility Management”. Un savoir faire et une offre de services complets donc, qui se traduisent par une forte présence du groupe dans tous les segments du marché, jusque et y compris les Partenariats Publics Privés (PPP). Les porte-drapeaux belges de Suez Energy Services: Tractebel Engineering, Axima et ses diverses filiales, mais aussi Fabricom GTI. Dalkia: L’autre poids lourd du marché, dont les divisions Industrie et Building offrent des formules de contracting de plus en plus élaborées en réponse aux attentes du marché. Ainsi, selon Bart Allaert, Directeur Commercial de Dalkia Industrie, “L’outsourcing de la gestion des utilities est un marché en développement en Belgique, les industriels recherchant une plus grande fiabilité de leur process, une réduction des coûts ainsi qu’une meilleure prédictibilité de ceux-ci”. Conséquence: les formules de Supply Contracting se multiplient chez les industriels.

Les “specialized” companies

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Vanparijs Maes: En une dizaine d’années, Vanparijs Maes est devenu un contractant complet dans le domaine de la cogénération et du stockage d’énergie dans le secteur industriel et tertiaire. L’offre intègre l’ingénierie, l’installation, l’exploitation/maintenance et depuis peu, le montage financier avec tiers investisseurs. La société compte quelques belles références à son actif comme Interbrew, Tech Aerospace ou BP Chemicals. Elle intervient également comme co-contractant sur des projets tiers de Performance Contracting. Fines: Le spécialiste du relighting en Flandre, Fines s’est Joe Vanparijs, taillé une solide réputation dans le domaine de la réno- Vanparijs Maes vation énergétique des installations d’éclairage avec des résultats souvent spectaculaires (au-delà de 50% d’économies dans la plupart des cas). La société est active sur tous les segments du marché du relighting: bâtiments publics, tertiaires, commerciaux et industriels. Green Invest: Nouvelle venue sur le marché, Green Invest, dans laquelle on retrouve comme actionnaire Laurent Minguet, se focalise sur le secteur public et plus spécialement les communes, avec une offre de tiers investisseurs en matière de réseaux de chaleur biomasse. On lira avec intérêt notre article en page 44.

Les “energy” companies

4

Les producteurs et fournisseurs d’énergie sont essentiellement actifs sur leur core business: la transformation d’énergie. Les Electrabel, Essent, Sibelga et autres se sont taillés une part importante du marché du Supply Contracting, surtout dans le haut du panier pour des puissances importantes. Mais ils sont actifs aussi dans la production d’énergie de moyenne et faible puissance, notamment dans le secteur tertiaire. On trouve également d’autres acteurs plus spécifiques, dans l’éolien ou la biomasse, comme Aspiravi, Theolia, Air Energy ou 4EnergyInvest.

La Federal Energy Service Company

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Créé en 2005, Fedesco, la Federal Energy Service Company est dotée d’un capital de 1,5 millions € complété par des apports tiers de 5 millions €. Elle joue le rôle de tiers investisseurs et de facilitateur dans la rénovation énergétique des bâtiments publics. Elle focalise principalement ses efforts sur les mesures les plus rentables, soit celles menant à une réduction de la consommation de 30% au moins. Il s’agit le plus souvent de mesures de régulation ou de remplacement de chaudières, de la ventilation, d’amélioration de l’isolation et de l’éclairage. Après avoir initié une série de projets en 2005 et 2006, la Fedesco a connu un ralentissement de ses activités. La nomination récente d’un nouveau directeur général devrait relancer son programme d’activités.

Les “pure players”

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TPF Econoler: Dans cette catégorie, on peut classer un acteur comme TPF Econoler, l’un des précurseurs du concept de tiers investisseurs dans notre pays.

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La “finance carbone”

Vers un nouveau mode de financement Dans le système des quotas d’émissions, une nouvelle source de financement voit le jour: la finance carbone. Ou comment financer les investissements de réductions d’émissions de gaz à effet de serre grâce à l’effet de levier carbone. Le principe du levier carbone est simple: pour les opérateurs soumis au système des quotas d’émissions de gaz à effet de serre, tout projet d’efficacité énergétique ou d’énergie renouvelable porte en luimême une valeur tangible supplémentaire: les émissions GES que l’investissement permet d’éviter. Ces émissions évitées “libèrent” des quotas équivalents qui deviennent négociables sur le marché des droits d’émissions. D’où l’idée de financer les projets d’investissements en “préachetant” les droits d’émissions susceptibles d’être générés par les réductions d’émission à venir. Les opérateurs financiers y trouvent leur intérêt

soit à titre spéculatif: acheter aujourd’hui (contrats à terme, options) des permis CO2 à bas prix pour les revendre plus cher demain lorsque le marché sera plus serré. Soit à titre commercial: apporter en amont un mode de financement supplémentaire à leurs clients. Comment? Via un montage financier innovant de bonification des intérêts d’emprunt sur base de la valeur des permis d’émission.

T Mise en œuvre d’un financement “bonifié” par la valeur des quotas économisés.

Dalkia, Dexia et CDC associés En France, Dexia est allé un pas plus loin. La banque a formé un partenariat avec Dalkia et la Caisse des Dépôts et Consignation (CDC) pour offrir aux collectivités locales une solution clé en main. En effet, plusieurs collectivités locales françaises (les villes) émargent au système de quotas d’émission principalement pour leurs installations de réseaux de chaleur dont Dalkia assure l’exploitation. On est ici dans une bipartite entre le propriétaire (la collectivité) et l’exploitant (Dalkia). La question qui se pose: qui doit réaliser –et surtout comment financer– les investissements de réduction des émissions nécessaires pour atteindre les quotas? En principe le propriétaire. Mais l’exploitant pourrait également réaliser l’investissement dans le cadre d’un contrat de performance. La formule mise en œuvre par les trois partenaires Dexia/CDC/Dalkia est un mixte où chacune des parties gagne à l’affaire y compris la collectivité. L’offre comprend l’établissement du bilan des émissions de GES de l’installation, un diagnostic d’amélioration de ses émissions, et une proposition d’action avec garantie de résultat complété par un montage financier.

La collectivité locale réalise l’investissement

Bonification des intérêts d’emprunt Dans le montage mis en place, c’est la Caisse des dépôts qui joue le rôle

L’effet de levier “carbone” Dalkia propose une solution technique T Bilan des émissions de CO2 T Proposition d’investissements sur les installations soumises à quotas T Calcul prévisionnel des réductions d’émissions engendrées

La Caisse des Dépôts est l’investisseur carbone T Achat des quotas d’émission économisés grâce au projet T Suivi de la rétrocession de leur valeur financière des économies de CO2 à la collectivité.

Dexia finance le projet

d’investisseur carbone et se porte acquéreur des quotas correspondant aux réductions d’émissions définies dans le contrat de performance. Elle garantit aussi que la valeur monétaire de ces émissions évitées sera bien rétrocédée aux collectivités locales. Ce dispositif prend la forme d’une bonification du taux d’intérêt des prêts consentis par Dexia pour financer les investissements concernés. Dexia assure de son côté le financement des projets et l’ingénierie de l’opération. Selon le montage contractuel, Dexia finance Dalkia ou la collectivité locale, gère les flux financiers générés par la vente des quotas et assure la gestion de la chaîne de traitement des prêts bonifiés consentis à l’emprunteur. Les modalités de rétrocession de la valeur monétaire des réductions d’émissions dépendent de l’économie générale de chaque projet. Au global, la collectivité locale accède ainsi à une source de financement bon marché qui lui permet de réaliser l’investissement. Et c’est Dalkia qui met en œuvre les actions de réduction des émissions dans le cadre du contrat de performance. Bref, tout le monde est gagnant. Des perspectives prometteuses La créativité des montages financiers axés sur la valorisation des réductions d’émissions de CO2 est appelée à se développer. Les partenaires ambitionnent d’ailleurs d’étendre ce dispositif à d’autres opérations portant, notamment, sur des installations qui ne rentrent pas à l’heure actuelle dans le champ d’application du système de quotas d’émission, pourraient également concerner d’autres secteurs comme les transports, les bâtiments ou la gestion des déchets. p Alfons Vanbergen

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EFFICIENCY | BUILDING

Palais de Justice d’Anvers

Inauguré en grandes pompes ce 28 mars dernier, le nouveau Palais de Justice d’Anvers fait dans les superlatifs: 78.000 m2 (dont 24.000 de bureaux), 300m de long, 6 niveaux, 6 ailes agencées autour d’une vaste salle des pas perdus, 6 grandes salles d’audience et 26 autres plus petites, logées en toiture sous d’immenses voiles métalliques pointant vers le ciel… Signée par l’architecte anglais Richard Rogers, la réalisation est de stature internationale. Une parfaite conjonction entre le passé et le futur de la grande ville portuaire qu’est Anvers. Une cathédrale de verre aussi, qui s’ouvre au quidam, affichant la transparence voulue de la justice moderne. Un bâtiment du futur enfin, qui affiche de hautes prétentions sur le plan énergétique et environnemental.

© Katsuhisa Kida

La justice moderne a son palais!

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BUILDING | EFFICIENCY

Une architecture impressionnante, à la fois moderne et transparente, le nouveau Palais de Justice d’Anvers est une réussite. C’est aussi une réussite sur le plan énergétique et environnemental. Le fruit d’une conception élaborée mêlant étroitement la créativité architecturale et l’engineering. À la clé, un bâtiment qui optimise au maximum les apports naturels en éclairage, ventilation et refroidissement. Ses performances le classe parmi les meilleurs de sa catégorie à l’échelle internationale. Un exemple à suivre! Outre les enjeux de santé et de confort, la ventilation et le refroidissement représentent une part importante de la consommation énergétique d’un immeuble. “Ce facteur justifie pleinement la recherche d’alternatives plus performantes et plus saines”, explique Dirk Slabbinck, Director Flanders chez VK Engineering et l’un des concepteurs du Palais de Justice d’Anvers. La question de fond est: peut-on aujourd’hui concevoir un bâtiment rendant superflu les systèmes de conditionnement d’air classique associant ventilation mécanique et installations de refroidissement? Et réduire ainsi drastiquement les coûts d’énergie tout en améliorant le confort climatique et la productivité des occupants? La réponse est oui! La preuve avec le Palais de Justice d’Anvers. Un choix “énergétique” En 1998, un concours international pour la conception d’un nouveau palais de justice à Anvers est lancé par la Régie des Bâtiments. C’est l’association temporaire Richard Rogers Partnership VK Engineering - OVE ARUP & partners qui emporte le contrat. “Pour fixer son choix, le jury s’est basé sur les qualités architecturales du projet, mais aussi sur le concept énergétique mis en avant dont la ventilation naturelle et le refroidissement nocturne furent les éléments déterminants”, explique Dirk Slabbinck. Dans cet immeuble spectaculaire, les bureaux (24.000 m2) sont ainsi ventilés et refroidis sans l’intervention de nombreux systèmes mécaniques tels que ventilateurs et installations de refroidissement. Durant près des deux tiers de l’année (les saisons intermédiaires), les locaux ainsi aérés et rafraîchis grâce à l’air frais exté-

rieur. Et en été, ils sont “climatisés” par refroidissement nocturne. Le tout sans recourir à des installations coûteuses et complexes à gérer. Le projet mettait également en œuvre une architecture entièrement vitrée susceptible d’exploiter au maximum les apports de lumière naturelle. “La démarche répondait aussi au souci de transparence de la justice voulue par le commanditaire du bâtiment”, précise Dirk Slabbinck.

d’une façade à l’autre. C’est ce qu’on appelle la ventilation croisée”, explique Dirk Slabbinck. Celle-ci est appliquée dans les ailes de bureaux paysagers du Palais. “Ceci étant, même de faibles fluctuations au niveau de la direction et de la pression du vent permettent de ventiler les bureaux individuels de manière naturelle”. Le palais de justice d’Anvers exploite ce principe de deux façons: par l’ouverture des fenêtres sur les façades non exposées au traffic et par des dispositifs d’aération motorisés intégrés dans les façades à rue. “Ces dispositifs insonorisés ne laissent passer ni les insectes, ni la poussière ou encore l’eau de pluie”. Par ce système, les 24.000 m2 de bureaux du Palais sont ainsi ventilés sans “énergie” pendant près de 8 mois par an (automne et hiver), ce qui réduit conséquemment les coûts d’exploitation.

Ventilation naturelle La ventilation naturelle de l’immeuble repose sur une façade “intelligente” dont le principe est simple. “La façade exposée au vent subit toujours une pression positive du vent, tandis que la façade opposée subit une pression négative. Par des ouvertures dans la façade, l’air extérieur circule dans le bâtiment par dépressurisation et le ventile

À retenir v Le monitoring des bureaux équipés de ventilation naturelle et de refroidissement nocturne montre que l’on peut réduire de 20 à 30% la consommation liée au chauffage et de 50 à 75% la consommation électrique liée au refroidissement, par rapport à un conditionnement d’air mécanique. v Ventilation naturelle et refroidissement nocturne sont susceptibles d’augmenter la productivité de 15% et diminuer l’absentéisme de 20% (pas de syndrome “Sick Building”).

Une consommation moitié moins élevée en kWh/m2/an 125

63

188

250

32

Tous les locaux Palais de Justice d’Anvers

72

Bureaux Palais de Justice d’Anvers

40

Immeuble de bureaux avec ventilation naturelle UK (Bureaux individuels)

79

33

Immeuble de bureaux avec ventilation naturelle UK (Bureaux paysagers)

79

54

Immeuble de bureaux avec full airco UK

97

Immeuble de bureaux avec full airco BXL

103

41

128 133 Gaz

Électricité (HVAC - Éclairage - Force motrice

Source: VK Engineering

Pas de climatisation, mais une ventilation naturelle et un refroidissement nocturne. Une utilisation maximale de la lumière du jour. Une orientation et une protection solaire optimales. Le nouveau Palais de Justice d’Anvers fixe la barre haut ou plutôt bas: une consommation d’à peine 104 kWh/m2/an, soit moitié moins qu’un immeuble climatisé de taille comparable en Région Bruxelloise.

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EFFICIENCY | BUILDING

Trois stratégies de ventilation Dans le Palais de Justice d’Anvers, l’année est divisée en trois “régimes” de ventilation: hivernal, estival et les saisons intermédiaires. Une ventilation mécanique restreinte est toujours nécessaire pour le pic hivernal, mais le régime des saisons intermédiaires (2/3 de l’année) est assuré par la ventilation naturelle et le régime estival par le refroidissement nocturne. Dans le cas du Palais de Justice d’Anvers, chaque aile de bureaux est équipée d’une centrale de traitement d’air avec échangeur à plaques d’un rendement de 65%, et d’une centrale dite “ventilateur nocturne”.

Hiver - Ventilation mécanique avec récupération de chaleur - Chauffage par convecteur

En hiver, les bureaux sont ventilés mécaniquement, avec un facteur de ventilation égal à 1, la chaleur de l’air aspiré étant récupérée pour le préchauffage de l’air pulsé.

Façade orientée jardin

(< 7°C - ±30% des heures de bureau)

Saisons Intermédiaires - Ventilation naturelle contrôlée par les occupants

Façade orientée jardin

(7°C à 21°C - ±60% des heures de bureau)

Façade à rue Au cours des saisons intermédiaires, les bureaux sont ventilés naturellement via l’ouverture des fenêtres pour les façades orientée côté jardin et via des ouvertures “intelligentes” en façade orientée traffic. En effet, sous les fenêtres se trouvent des dispositifs d’aération motorisés qui permettent la ventilation à sens unique des bureaux exposés au bruit, sans devoir ouvrir les fenêtres. Il s’agit d’ouvertures dans les façades, avec une grande entrée d’air réglable ne laissant passer ni la poussière, ni les insectes tout en absorbant les bruits. La position des clapets dans les dispositifs d’aération peut être réglée par l’utilisateur. Dans les bureaux Façade à rue paysagers s’étendant sur deux façades, les dispositifs d’aération assurent une ventilation croisée. Et sur les façades moins exposées au bruit, l’aération se fait tout simplement en ouvrant les fenêtres.

Eté - Ventilation mécanique avec refroidissement nocturne

En été, pendant la journée, le système passe à une ventilation mécanique. L’air pulsé n’est pas prérefroidi mécaniquement, mais pulsé sous le plancher surélevé, qui est refroidi la nuit par un refroidissement nocturne.

Façade orientée jardin

(>21°C - ±10% des heures de bureau)

Façade à rue

Eté - Refroidissement nocturne De nuit, l’air extérieur frais est amené mécaniquement sous le plancher surélevé, avec un facteur de ventilation égal à 4. Ainsi, les planchers intermédiaires en béton sont refroidis le long du côté supérieur. L’air frais entre dans le bureau, refroidit le plafond en béton sur la face inférieure (pas de faux-plafond) et ressort via les ouvertures en façades.

Façade orientée jardin

(>21°C - ±10% des heures de bureau)

Façade à rue

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BUILDING | EFFICIENCY

Refroidissement nocturne En été, le dispositif est complété par un refroidissement nocturne via l’activation de la masse thermique du béton. “Ce principe est une application particulière de la ventilation naturelle. En effet, en été, les différentiels de température entre l’intérieur et l’extérieur ne permettent pas un rafraîchissement naturel diurne. Par contre, les températures extérieures sont inférieures aux températures intérieures durant la nuit. Le procédé consiste alors à ventiler intensivement les bureaux grâce à l’air extérieur la nuit et de concevoir le bâtiment de sorte qu’il stocke cette fraîcheur dans la masse thermique présente. Toute la chaleur produite le jour (éclairage, bureautique, occupation des locaux, rayonnement solaire) est alors absorbée par ce tampon froid”, explique Dirk Slabbinck. Grâce à cette technique et sans conditionnement d’air, le Palais de Justice d’Anvers est ainsi capable d’assurer en été une température ambiante inférieure de 3 à 4°C par rapport à la température extérieure. Et respecte ainsi la législation en

matière de climat intérieur. “Nos simulations thermodynamiques ont démontré que le système permettait d’obtenir une valeur DTP (nombre pondéré d’heures de dépassement de température) inférieure au maximum autorisé de 150h et que la température maximale après une vague de chaleur de 5 jours ne s’élèverait qu’à 26,7°C”, affirme Dirk Slabbinck. “Mais”, précise-t-il, “deux éléments essentiels doivent être pris en compte dans la phase de conception du bâtiment. Tout d’abord, il doit être conçu de manière à permettre une gestion maximale de l’ensoleillement: l’orientation de l’édifice, la superficie du vitrage, la présence de pare-soleil externes… sont des éléments qui procèdent du contrôle climatique. Ensuite, la présence d’une masse thermique accessible et suffisante est une condition absolue. Ce qui nécessite de concevoir un bâtiment sans faux plafonds”. Une condition qui présente un avantage: la hauteur libre des bureaux est plus importante, ce qui permet de réduire la hauteur des étages et donc les coûts de construction.

Une consommation divisée par deux Au global, le concept offre de nombreux avantages, à commencer par une consommation en gaz et électricité (HVAC, éclairage, force motrice) radicalement réduite: 104 kWh/m2/an! À comparer aux 236 KWh/m2/an d’un immeuble climatisé de taille comparable en Région Bruxelloise. “C’est ±50% de moins!”, s’exclame Dirk Slabbinck. “Le prix de la construction est également moindre: moins d’installations, plus petites et moins complexes, moins de surface et de volume pour les cages et locaux techniques, hauteur d’étages inférieure. Les frais de maintenance sont également allégés. En coût de cycle de vie, la solution est l’une des plus rentables”, précise-t-il. Enfin, la ventilation naturelle et le refroidissement nocturne annihilent tout effet du syndrome du bâtiment malade (Sick Building). Or, l’impact de la qualité de l’air sur la productivité est considérable: selon une étude réalisée aux Pays-Bas, on estime les gains de productivité à 3.600€ par an et par employé. p Jean-François Marchand

Simuler et optimiser les coûts totaux Coûts d’investissement (€/m2/an)

Coûts d’exploitation (€/m2/an)

250

6

188

5

125

3

212

190

150

63

2

77

39

22

Life Cycle Cost (Valeur actualisée nette (€/m /an)) 600

450

300 506

Source: VK Engineering

395

402

416

343

401

358

355

2,62

Énergie

2

479

1,60

1,77

Entretien

Activation du noyau de béton avec ventilation nat. (fenêtres motorisées)

386

3,63 2,65

Réinvestissement

Investissement

150

5,10

421

374

Scénario 2

Scénario 3

Scénario 4

Scénario 1 energy factor = 2,1% inflation = 2%

energy factor = 4,3% inflation = 2%

energy factor = 2,1% inflation = 2%

energy factor = 4,3% inflation = 2%

discount rate = 4%

discount rate = 4%

discount rate = 6%

discount rate = 6%

Ventilo-convecteurs

Plafonds climatisants

«Aujourd’hui, les logiciels de simulation du comportement climatique des bâtiments permettent d’évaluer de façon très fine l’impact financier et l’influence sur la consommation énergétique des multiples options technologiques disponibles», explique Dirk Saelens, project engineer building simulation chez VK Engineering. Ces simulations illustrent toute l’importance d’une réflexion en coûts totaux du cycle de vie, incluant les coûts d’investissement, de remise à niveau, de maintenance et de consommation d’énergie. Ainsi, lorsque l’on compare les différentes options techniques envisagées au Palais de Justice d’Anvers, le refroidissement nocturne via l’activation du noyau de béton combiné à une ventilation naturelle se révèle l’option la plus rentable sur la durée de vie du bâtiment et ce malgré un coût d’investissement sensiblement plus élevé qu’une solution de conditionnement d’air classique comme les ventilo-convecteurs. n°4 energymag | 37

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TECHNOLOGY | BUILDING

Bâtiments existants

© Laurent Vella - FOTOLIA

Quels sont les enjeux énergétiques et comment agir?

Avec l’envolée des coûts des énergies et la pression environnementale en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), les gestionnaires des parcs immobiliers doivent faire face à un nouveau défi: la maîtrise durable des énergies. Des solutions performantes voient le jour, que l’on ait affaire à des bâtiments anciens ou modernes. Signataire du protocole de Kyoto, la Belgique s’est engagée à réduire de 7,5% ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2012. Si, jusqu’à présent, ce sont surtout les industriels et les producteurs d’énergie qui sont soumis à des obligations législatives en matière de réduction des émissions GES, l’erreur serait de croire que cet objectif ne va pas concerner tôt ou tard le secteur immobilier. Et d’ignorer que le bâtiment(1) est, avec près de 34% de la consommation énergétique totale du pays, le second producteur d’émissions GES(2), après l’industrie mais

avant la transformation énergétique et le transport. Pire: alors que l’industrie a vu ses émissions baisser de plus de 11% par rapport à 1990, le bâtiment a vu les siennes augmenter de 14,3%. C’est dire l’écart à rattraper lorsque l’on précise que l’objectif de 7,5% de réduction porte sur le niveau de 1990. Les autres facteurs qui pèseront de plus en plus sur les gestionnaires immobiliers sont, bien entendu, la hausse des prix des énergies et les risques quant à leur évolution future. Aujourd’hui, il n’est plus seulement question de réduire ses coûts d’exploitation

Risque environnement Que coûterait une tonne de CO2? Jusqu’à présent le protocole de Kyoto ne touche dans notre pays directement que le secteur industriel, les producteurs d’énergie et quelques sites tertiaires équipés d’unités de production électrique. Ils sont tenus de respecter des quotas d’émissions GES et, en cas de dépassement de ceux-ci, sont soumis à une pénalité de 100¤ la tonne à partir de 2007. Que se passerait-il si le protocole de Kyoto venait à s’appliquer aussi au secteur tertiaire de façon contraignante? En clair quel serait le coût potentiel des émissions GES de mon bâtiment si un système de quotas et de pénalités était appliqué? On retiendra que suivant les performances moyennes d’un immeuble de bureau par exemple (voir figure), chaque m2 émet entre 50 et 220 kg de C02 par an, ce qui correspondrait à une pénalité annuelle potentielle de 5 à 22¤ par m2. Bien sûr, si un tel scénario devait s’appliquer, le secteur tertiaire bénéficierait aussi des mécanismes de flexibilité prévus par le protocole de Kyoto lui permettant d’acquérir sur les marchés CO2 les quotas manquants à un coût plus compétitif que la pénalité (voir notre article en page 16). Il n’en reste pas moins que la possibilité d’une future “taxe” CO2 applicable, quel qu’en soit son mode, au secteur tertiaire fait partie des risques que les gestionnaires immobiliers doivent envisager.

mais aussi de se garantir que le bâtiment pourra faire face efficacement aux fluctuations à venir des coûts des énergies. Deux approches complémentaires Soit, mais comment y parvenir? La directive sur la performance énergétique des bâtiments concerne surtout les nouvelles constructions et les rénovations lourdes. Dans ce domaine, et suite aux divers aménagements des réglementations thermiques des bâtiments, les édifices les plus récents affichent des performances énergétiques excellentes. On lira ainsi avec intérêt notre article sur le nouveau Palais de Justice d’Anvers qui pour une taille de 70.000 m2 consomme moitié moins qu’un bâtiment équivalent classique en Région Bruxelloise. Mais si des améliorations continues sont apportées lors de la construction des bâtiments neufs, la question est, pour le parc de bâtiments existants beaucoup plus épineuse. Deux approchent existent! La première consiste à intervenir sur le bâtiment en revoyant sa conception, notamment l’isolation, ou en le dotant d’équipements plus efficaces sur le plan énergétique en matière d’éclairage, de chauffage, de ventilation

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BUILDING | TECHNOLOGY

Immeubles de bureaux

Des écarts de performance allant jusqu’à 45% Consommation énergétique de 4 types de bureaux bonnes pratiques

bonnes pratiques 63

600

450

300

150

Emissions CO2 de 4 types de bureaux

situation typique

situation typique 125

250

188

32,2

112

56,8

205

43,1

133

72,9

236

85,0

225

151,3

404

143,4

348

226,1

568

cellulaire, ventilé naturellement (100 à 3000 m2)

plan ouvert, ventilé naturellement (500 à 4000 m2)

cellulaire, standard, air conditionné (2000 à 8000 m2)

prestige, air conditionné (4000 à 20000 m2)

En Belgique, l’étude Kantoor 2000 a évalué la consommation moyenne (combustibles + électricité) des immeubles de bureaux à près de 250 KWh/m2 par an. C’est un indicateur important mais ce n’est qu’une moyenne. Une étude réalisée en Angleterre donne une meilleure idée des disparités de consommations entre bâtiments. L’étude a caractérisé quatre types d’immeubles de bureaux et analysé dans chaque cas les niveaux de performance entre les meilleurs pratiques et la situation typique. Résultat: des écarts de consommations qui vont de 39% à 45% suivant la taille et la nature des bâtiments! Source: Energy Consumption Guide 19 (2000) Energy Use in Offices, Best Practice Programme, DETR

et de climatisation, voire de production de chaleur et d’électricité. Il s’agit d’une démarche lourde qui appelle des investissements parfois importants et ne peut procéder que d’un audit au cas par cas. La seconde est d’améliorer les performances de l’exploitation du bâtiment. Or, c’est ici que le bât blesse. Car les immeubles actuels ne sont pas gérés de façon optimale, principalement parce que l’énergie n’est souvent… tout simplement pas gérée. La simple prise en compte de l’intermittence d’occupation, par exemple, est souvent mal faite. Au rang des autres symptômes classiques, citons les réduits de nuits inexistants ou le renouvellement d’air permanent côté ventilation. Résultat des écarts de consommation pouvant aller jusqu’à 45% entre les meilleures pratiques et les moins bonnes (voir notre encadré). En cause, très souvent, l’absence de systèmes d’automatisation ou de gestion technique des installations (GTC). Reste que même lorsque ceux-ci sont présents, les générations anciennes de GTC n’ont pas la capacité d’utiliser intelligemment la grande quantité de données qu’ils recueillent et sont essentiellement orientés détection de panne et

non recherche des meilleurs optimums. Pourtant de nouvelles solutions apparaissent sur le marché. Commissionner les installations À commencer par le commissionnement des immeubles et des installations techniques. De quoi s’agit-il? En pratique, de corriger l’écart entre les performances réelles des installations et leur meilleur optimum. En effet, les performances réelles des bâtiments sont souvent inférieures aux calculs prévisionnels réalisés par les bureaux d’études. En outre, au cours de la vie du bâtiment, la conduite des installations techniques va souvent s’écarter des meilleurs optimums pour de multiples raisons la plupart du temps liées aux interventions humaines. Développé aux Etats-Unis, le concept de commissionnement (commissioning) permet de suivre le niveau de performance des équipements à leur réception et tout au long de leur durée de vie. Appliqué à intervalle régulier (rétro-commissioning, voire ongoing commissioning), il peut constituer l’une des méthodes les plus économiques permettant d’améliorer la performance énergétique dans les grands et moyens immeubles. Initialement centrée

sur le génie climatique (HVAC), la démarche gagne progressivement l’ensemble des équipements techniques, comme l’éclairage. Avec pour objectif ultime de réduire les dépenses énergétiques. On estime que le développement et l’utilisation d’outils adéquats de commissionnement des immeubles permettraient de réduire de 20 % la consommation d’énergie dans les édifices. On se référera pour l’exemple aux 30,6% de réduction des consommations obtenues à l’hôpital ASZ d’Alost (voir energymag N°1) qui a réalisé avec le concours de Siemens Building Technologies une remise en service des installations de sa polyclinique sous l’angle confort climatique/énergie. Il est à noter que ce résultat a été obtenu sans le moindre investissement matériel, mais uniquement par une méthodologie de correction de la régulation des équipements basée sur un audit énergétique de son fonctionnement. Intégration et gestion intelligente Mais on peut aujourd’hui aller plus loin. D’une part, l’intégration progressive des multiples systèmes de gestion technique présents dans les bâtiments (confort climatique, contrôle d’accès, n°4 energymag | 39

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TECHNOLOGY | BUILDING L’architecture d’un système de pilotage intelligent Prix des énergies Prévisions météo

Serveur central

Gestionnaire d’énergie chez le prestataire

Internet

Gestionnaire d’énergie chez le client (en central)

RTC / GSM

Automate intelligent

Bus de terrain standard

Équipements pilotés: • CTA, PAC, rooftop, aérothermes, etc. • Chauffage, climatisation, éclairage, ECS • Groupe électrogène, cogénération • Certains équipements spécifiques (four)

Exploitation client en local

Bâtiment

L’installation et l’exploitation de systèmes de pilotage énergétique “intelligent” dans les bâtiments tertiaires permettent une réduction significative des consommations d’énergie et favorisent l’utilisation des énergies propres en les rendant beaucoup plus compétitives.

détection incendie, éclairage, etc.) sous une même architecture de pilotage centralisée ouvre de nouvelles voies, notamment vers une meilleure exploitation énergétique des bâtiments. La plupart des grands immeubles tendent à rechercher l’intégration de leurs systèmes dans une optique de productivité et de réduction des coûts. Dans ce domaine, la grande tendance est à l’interopérabilité des systèmes et à l’intégration sous architecture IP. D’autre part, des systèmes d’une génération nouvelle, pointus et réactifs, capables de faire de la maintenance préventive et surtout du pilotage intelligent et dynamique des installations voient le jour. Ces systèmes font appel à des contrôleurs de bâtiment intelligents et des logiciels de modélisation qui déterminent en temps réel le scénario de conduite optimal d’un site en s’adaptant aux variations des conditions d’exploitation climatiques et économiques du site. Ils surveillent ainsi les conditions extérieures et les besoins internes et modifient les valeurs de réglage en conséquence. Ils tiennent compte également de différents leviers d’ajustement (arbitrage entre vecteurs énergétiques en fonction de leur disponibilité et de leur prix, utilisation de l’inertie thermique des bâtiments, limitation des appels de

puissance électrique par un étalement dans le temps, etc.) pour atteindre et maintenir le meilleur rendement à la fois opérationnel et économique. Pilotage dynamique à distance Des offres packagées comprenant des services de pilotage à distance (heure par heure) par des équipes experts en gestion d’énergie font également partie de l’offre proposée sur le marché (voir schéma ci-dessus). C’est le cas de la société Ergelis, une jeune start-up française découverte sur le récent salon Eco-Building Performance et dont l’offre a déjà séduit une trentaine de clients de tailles diverses. La société annonce des réductions des consommations d’énergie allant couramment de 15 à 25% et jusqu’à 30% dans certains cas. Ces économies résultent: E de l’adaptation des consommations aux besoins réels d’exploitation du site (optimisation du réduit de chauffage la nuit et le week-end, gestion de l’éclairage, contrôle du renouvellement d’air); E de la gestion optimisée des appels de puissance, obtenue en réduisant la consommation pendant les périodes de pointes pour abaisser la puissance souscrite et en agissant en temps réel sur certains équipements (batteries

électriques, par exemple…) pour éviter les dépassements; E de la gestion dynamique de la production de chaud ou de froid, en fonction des paramètres d’usage, de prix et des conditions météos. Cette nouvelle génération de système convient particulièrement bien aux bâtiments tertiaires existants de taille moyenne (immeubles de bureaux, entrepôts, commerce, soins de santé, etc.) car ils s’adaptent facilement sur les systèmes d’automatisation en place (s’il y en a) à des coûts très compétitifs. Pour un immeuble de 25.000 m2 consommant 13GWh d’électricité et 1GWh de gaz par an (facture totale de 620.000 €), sur un horizon de 3 ans, le coût de l’offre Ergelis (pilotage à distance) est de 113.000 €, installation et mise en service compris pour une économie générée de 211.000 €. On parle ici d’un cas réel d’un organisme financier situé en région parisienne. Optimiser “durablement” Mais ce n’est pas tout! Car le système va bien au-delà des améliorations d’exploitation. En effet, grâce à la connaissance pointue acquise du fonctionnement énergétique du bâtiment et grâce aux outils de simulation, les experts d’Ergelis peuvent modéliser diverses options d’investissements pertinents à réaliser comme l’installation de panneaux solaires, d’une pompe à chaleur, d’un relighting, etc. Et d’en évaluer les impacts en termes de consommations et de factures d’énergie, à court et moyen terme. Mieux: ils peuvent simuler et modéliser par des scénarios prospectifs les arbitrages entre plusieurs vecteurs énergétiques, afin d’évaluer le meilleur mix énergétique du bâtiment lui permettant de faire face aux évolutions futures des prix des énergies et des contraintes environnementales. Pour comprendre tout l’intérêt de la démarche, un exemple. Prenons le cas d’un immeuble de bureaux non-climatisé de 12.000 m2 dont le propriétaire veut apprécier l’investissement dans une pompe à chaleur en complément

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BUILDING | TECHNOLOGY

Commissionnement Garantir les performances tout au long de la vie de l’installation Le concept de commissionnement appliqué aux bâtiments vise à remettre à niveau la performance des installations et à la maintenir dans le temps. On distingue trois niveaux de commissionnement: de son installation de chauffage au gaz. La question est: l’investissement est-il rentable et surtout qu’apporte-t-il de durable (réduction des émissions GES) et de flexible (capacité d’adaptations aux conditions économiques). Dans le cas de cet immeuble (voir notre tableau), les simulations montrent qu’avec des prix du gaz et de l’électricité proches des prix actuels, l’investissement permet de réduire tant la facture totale (-23%) que la consommation énergétique (elle chute de 3332 à 1760 MWh, soit 46% toutes énergies confondues) et les émissions de CO2 (-49%). Tenant compte des conditions climatiques présentes et futures et du comportement thermodynamique du bâtiment, l’arbitrage se traduit ici par un déport de la consommation liée au chauffage au gaz vers la pompe à chaleur (électricité) avec un appoint gaz. La pompe à chaleur sera plus souvent sollicitée pour atteindre le meilleur rendement “économique”. L’investissement est donc rentable, mais en outre il permet de se prémunir contre les hausses envisageables des prix du gaz. Ainsi, si le prix du gaz subissait une hausse de 30%, la facture énergétique du bâtiment dans le scénario “sans pompe à chaleur” subirait une hausse de 15% tandis que celle-ci serait limitée à 2% dans

le scénario “avec pompe à chaleur”. Bref, de telles simulations basées sur le comportement réel du bâtiment sont de précieuses aides à la décision. Ajoutons que si demain, une pénalité CO2 devait être appliquée au secteur tertiaire (voir notre encadré), le système permettrait aussi d’optimiser ce coût. La conclusion coule de source: ces systèmes de pilotage intelligent avec arbitrage en temps réel entre vecteurs énergétiques contribueront au développement dans les bâtiments des énergies renouvelables comme le solaire, la géothermie ou la biomasse en permettant de les exploiter au maximum de leur rentabilité. Ils amélioreront également la flexibilité des installations en permettant de “coller” au plus près à la fluctuation des coûts des énergies en s’adaptant en permanence pour consommer mieux et moins. p Alfons Vanbergen

• Initial commissioning d’un bâtiment ou d’une installation neuve: procédure pour s’assurer que le système est conçu, installé, testé fonctionnellement, et susceptible d’être exploité et maintenu afin de remplir les performances annoncées en phase de conception. • Retro-commissioning: procédure systématique d’amélioration et d’optimisation de la gestion-maintenance d’un bâtiment existant. Le but est d’optimiser les équipements séparément et la façon dont ils fonctionnent dans leur ensemble. Il s’agit d’opérations limitées dans le temps (nombreuses similitudes avec une opération de prise en charge des installations). • On-going commissioning: de la même façon que le retro-commissioning, il s’agit d’une façon systématique d’identifier et de corriger les problèmes d’un bâtiment et d’en optimiser les performances. L’objectif clef est d’assurer le maintien des performances dans le temps. Selon le magazine Energy Power & Management, le coût d’un retrocommissionning tourne suivant la taille du bâtiment et la complexité des installations entre 0,50$ et 2$ par m2. Mais l’investissement est susceptible de générer des économies annuelles de 0,15$ à 1,15$ par m2.

(1)

Bâtiments résidentiels et tertiaires confondus. Le tertiaire représente 10% de la consommation totale du pays. (2) Le chauffage des bâtiments compte pour 22% des émissions GES. Il faut encore rajouter la part des émissions dues à la consommation d’électricité.

www.commissioning-hvac.org www.ecbcs.org www.commissionnement.org

Simuler pour décider Gaz à 23¤/MWh

Gaz à 30¤/MWh

Facture (k¤)

Elec. (MWh)

Gaz (MWh)

CO2 (t)

Facture (k¤)

Elec. (MWh)

Gaz (MWh)

CO2 (t)

Chauffage gaz seul (Situation actuelle)

120

812

2520

796

138

812

2520

796

Chauffage mixte gaz + Pompe à chaleur, avec pilotage optimisé

92

1332

428

404

94

1364

336

392

64%

-83%

-49%

-32%

68%

-87%

-51%

Évolution

-23% 2

Dans un immeuble de bureau de 25.000 m équipé d’un chauffage au gaz, quelle serait la rentabilité de l’installation d’une pompe à chaleur et quelle flexibilité apporte-t-elle sur le plan du mix énergétique? Tel est le genre de questions auquel peuvent répondre les simulations basées sur les systèmes de gestion dynamique des bâtiments. Dans le cas présent, le mix chauffage au gaz + pompe à chaleur (électrique) est rentable sur tous les plans. Il optimise tant les niveaux de consommation, que les coûts et les émissions GES. La simulation permet aussi d’apprécier la flexibilité de l’investissement face aux fluctuations possibles du prix des énergies. Ainsi, si le prix du gaz subissait une hausse de 30%, la facture énergétique du bâtiment dans le scénario “sans pompe à chaleur” subirait une hausse de 15% tandis qu’elle serait limitée à 2% dans le scénario “avec pompe à chaleur”. n°4 energymag | 41

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TECHNOLOGY | COGENERATION

Cogénération biomasse

Coup d’œil (autrichien) sur les technologies les plus avancées Du 21 au 23 novembre 2006, une délégation belge d’une trentaine d’industriels porteurs de projets en cogénération biomasse s’est rendue en Autriche pour y étudier les développements technologiques les plus avancés dans ce domaine. Tour d’horizon des découvertes les plus significatives.

Moteur de 2.000 kWé alimenté en gaz de synthèse issu du gazogène de bois “à lit fluidisé” (Güssing en Autriche).

Largeur de compresseur “inversé” à vapeur développant une puissance de 800 kWé (Artberg en Autriche).

La cogénération biomasse est bien présente en Autriche: 152 installations pour une puissance totale de 424 MWé… alors qu’en Wallonie, pourtant bien pourvue en cette ressource, la cogénération biomasse représente à peine 48 MWé! D’autres part, les Autrichiens sont résolument tournés vers l’avenir. Ces pionniers ont installé des technologies encore inexistantes en Belgique, voire uniques au monde! Le plus spectaculaire est sans doute le cycle organique de Rankine (dit ORC) ou le compresseur “inversé” à vapeur, voire la cogénération par gazéification de grosse puissance avec un système de filtration performant du gaz de synthèse produit qui utilise du biodiesel. Le clou du voyage a été de se retrouver face à une installation de cogénération au bois pilotée automatiquement. Sans aucune présence humaine. Une installation “classique”, pour un autrichien, composée d’une chaudière au bois et d’une turbine-vapeur de 1.500 kWé. La chaleur étant distribuée à travers un réseau de chaleur d’actuellement 6 km au prix de 46 €/MWh thermique tout compris. La délégation de 30 belges partis à la découverte de ces nouveautés technologiques a été comblée: un programme dense de visites intéressantes, dans une ambiance des plus conviviales. Une initiative du Ministre wallon de l’Energie bien appréciée et qui permettra d’initier plusieurs projets de cogénération biomasse, pour des montants d’investissement unitaire de plusieurs millions d’euros… La question n’est plus: installer ou non une cogénération biomasse? Mais elle devient: quelle technologie choisir? Signe d’une évolution progressive des mentalités des

dirigeants d’entreprises et des porteurs de projets. Vers toujours plus d’électricité verte. Surtout quand cela rime avec rentabilité… Comment produire de l’électricité à partir du bois? La technique la plus ancienne est de produire de la vapeur haute pression dans une chaudière à bois (préalablement broyé) pour ensuite la détendre dans une turbine à vapeur couplée à un générateur d’électricité. En sortie de turbine dite “à condensation”, il est nécessaire de condenser cette vapeur basse pression à une température proche de 20°C. Température trop faible que pour chauffer un bâtiment ou un process industriel. Il faudra pour cela effectuer un soutirage de vapeur à plus haute pression (et donc plus haute température). Ou opter pour une turbine dite “à contre-pression” où la pression de la vapeur en sortie de turbine dépend du besoin en chaleur. La gamme de puissance disponible s’étend d’environ quelques centaines de kWé à plusieurs dizaines de MWé. Le rendement électrique oscille entre 10 à 30% sur PCI du bois. Plusieurs installations de ce type fonctionnent en Belgique (Burgo Ardennes, Recybois, Renogen, les Awirs, etc.). Des variantes sont possibles, comme l’utilisation d’un moteur à vapeur, dans la gamme de 200 à 1.500 kWé (Le Saupont à Bertrix), voire d’un compresseur à vis “inversé” (Feldbach en Autriche - 800 kWé). Le prix d’investissement tout compris et hors subsides est généralement compris entre 8.000 €/kWé (pour 200 kWé –référence Le Saupont à Bertrix) à 2.500 €/kWé (pour 3.100 kWé– référence Recybois à Virton).

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COGENERATION | TECHNOLOGY Chaudière vapeur pour sciures de bois à flamme verticale descendante (unique au monde) couplée à une turbine de 1.700 kWé en mode électrique pur ou de 1.400 kWé et 3.500 kWth en mode cogénération (Güssing en Autriche).

La gazéification de bois Une autre technique, la gazéification, est de transformer le bois en gaz de synthèse, composé essentiellement de monoxyde de carbone et d’hydrogène, pour ensuite l’injecter purifié dans un moteur de cogénération adapté. Le moteur entraîne un alternateur pour la production d’électricité. La chaleur est récupérée à plusieurs niveaux: le refroidissement du bloc-moteur et des gaz d’échappement, ainsi que le refroidissement du gaz de synthèse soigneusement purifié. L’avantage est de profiter du bon rendement électrique apporté par la technologie moteur à gaz. Disponible dès 300 kWé, cette technologie dite “à lit fixe” affiche un rendement électrique de 22% à 25%. Plusieurs installations existent (Mariembourg et Battice) et sont en cours de construction (Gedinne, Tournai, …). Pour les puissances supérieures, on utilisera plutôt la gazéification dite “à lit fluidisé”, comme l’installation de 2 MWé à Güssing (Autriche). La subtilité de l’installation autrichienne est de purifier le gaz de synthèse produit à l’aide de biodiesel. Ce biodiesel “sale” est ensuite réinjecté dans le gazogène. L’investissement d’un projet clé en main se chiffre entre 6.500 €/kWé (pour 300 kWé - référence Seco-Bois) à 3.500 €/kWé (pour 2.000 kWé - référence Güssing en Autriche). Le cycle organique de Rankine Encore inconnue en Belgique, la technique utilisant un cycle organique de Rankine (ORC) consiste à utiliser un fluide organique (huile synthétique

siliconée) qui a l’avantage de s’évaporer à des températures plus faibles que celles requises pour produire de la vapeur d’eau. Ce fluide organique mis à haute pression se détend ensuite dans une turbine couplée à un générateur d’électricité. C’est pourquoi on retrouvera cette technologie dans des applications en géothermie ou en récupération de chaleur résiduelle d’un four industriel, par exemple, où la chaleur “basse” température peut encore valablement servir pour la production d’électricité. La chaudière au bois chauffera une huile thermique à environ 350°C pour ensuite évaporer le

fluide organique. Cette huile retourne dans la chaudière à 250°C et n’a donc pas du passer par l’état vapeur, ce qui facilite la conception et la maintenance de la chaudière au bois. Disponible dès 200 kWé jusqu’à 1.500 kWé, la technologie ORC affiche des rendements légèrement supérieurs à la technologie vapeur. Le montant d’investissement de l’installation visitée à Leoben en Autriche est d’environ 3.500 €/kWé pour une installation de 3 modules totalisant 4.500 kWé. Un éventail technologique qui continue à s’étoffer… p Ismaël Daoud

1 Regenerator and condenser 2 Turbine 3 Electric generator 4 Circulation pump 5 Pre-heater 6 Evaporator 7 Hot water outlet 8 Hot water inlet 9 Thermal oil inlet 10 Thermal oil outlet Système ORC de 3 modules de 1.500 kWé et 4.500 kWth chacun (Léoben en Autriche)

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RENEWABLE | COGEN PLAN

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© L. van Steensel

À 47 ans, l’homme d’affaires Liégeois a déjà un beau palmarès derrière lui. Après quelques années passées comme coopérant au Maroc et un passage éclair de deux ans chez Petrofina, il s’engage comme responsable de développement dans une PME électronique du secteur du broadcast. En 1994, avec son compère Pierre L’Hoest, il rachète la société qui l’emploie, EVS Broadcast Equipement. Et commence alors l’ascension qui conduit à une “succes story” à l’échelle mondiale dont la capitalisation boursière avoisine les 500 millions €. Aujourd’hui, l’avenir est dans XDC, une nouvelle filiale du groupe qu’il dirige et qui se taille une place enviable sur le marché mondial du cinéma numérique. Et demain? “Le durable”, assène-t-il sourire aux lèvres. On n’a pas fini d’entendre parler de Laurent Minguet.

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COGEN PLAN | RENEWABLE

Laurent Minguet

L’homme qui veut chauffer et éclairer la Belgique à la biomasse! Ingénieur et homme d’affaires, le fondateur d’EVS et actuel CEO de XDC, respectivement leaders mondiaux dans le ralenti télévisuel et le cinéma digital, dévoile sa nouvelle passion: l’énergie durable. “La biomasse”, dit-il, “permettrait de couvrir de façon rentable et durable les besoins électriques et 80% des besoins en chauffage des habitants du pays”. Et d’annoncer son “Plan belge de cogénération biomasse”: un réseau de chaleur national de 50.000 km alimenté par 14.000 MWé de capacité électrique de cogénération 100% biomasse. Un projet affichant un taux de rentabilité interne de 22% par an! De quoi bousculer le secteur énergétique. “Pourquoi continuer à brûler des énergies fossiles, par nature limitées? Alors que le soleil nous fournit l’équivalent de 6.000 fois notre consommation mondiale en énergie!” fustige celui qui fut en 2004 élu Manager de l’Année par Trends Tendances. Au rythme actuel de consommation mondiale d’énergie, soit 11 milliards de tonnes d’équivalent pétrole (tep), il ne reste plus que pour 40 ans de pétrole, 65 ans de gaz naturel, 250 ans de charbon et 55 ans d’uranium, selon l’Agence Internationale de l’Energie (2004). Des réserves qui s’épuiseront probablement plus vite, vu la forte croissance de la consommation énergétique mondiale: de 6 milliards de tep en 1973 l’AIE prévoit une consommation de 16.5 milliards de tep d’ici 2030! À politique inchangée… La biomasse tropicale, concentrateur solaire le moins cher C’est bien là l’ambition de Laurent Minguet: changer la politique. Il n’a pas hésité à présenter son “Plan belge de cogénération biomasse” à dif-

férents ministres dont l’un en charge de l’énergie. La biomasse est en effet le concentrateur solaire le moins cher. En Belgique, un hectare de forêt cultivée permet de produire environ 12 tonnes de matière sèche (tms) chaque année soit 60 MWh primaire. Tenant compte d’un rendement électrique de 25%, un hectare fournit ainsi 15 MWh d’électricité au coût unitaire de 55 € le MWhé. Alors qu’un champ belge de panneaux solaires permettrait de produire 1.500 MWh électrique à l’hectare! Mais le coût du MWh électrique est de 500 €… Pour s’assurer un approvisionnement en ressources biomasse, outre celles disponibles à l’échelle mondiale, Laurent Minguet entend aussi planter des eucalyptus et autres variétés d’arbres à rotation rapide (gmelina, leucena, acacia) dans les régions tropicales comprises entre les parallèles 15° Nord et Sud, où pluviosité et ensoleillement abondants permettent de produire 20 tms/ha soit 25 MWhé. “Une plantation pour renforcer la structure des sols, reconstituer l’humus et nourrir

le sol qui servira aussi, à l’ombre des arbres, pour la culture de légumineuses”, explique-t-il, “tout en donnant aux cultivateurs du Sud un rendement financier à l’hectare de 5 à 10 fois supérieur aux rendements actuels (riz, soja, maïs, froment…)”. L’auteur du plan a ainsi déjà planté 38.000 pieds d’arbres sur 25 ha en Casamance (Sénégal), histoire “de se faire la main” et prévoit d’en planter 1,5 million d’ici 2008. De quoi déjà alimenter à partir de 2011-2012 une centrale électrique biomasse de 3 MWé qui devrait fournir 50% de l’électricité de la Casamance. Les sociétés ont déjà leurs noms: la PEC pour Production électrique de Casamance qui sera alimentée par la BES pour Bois Energie du Sénégal. L’idée d’une filière intégrée de production biomasse n’a rien d’utopique: le Groupe Arcelor Mittal exploite au Brésil, via sa filiale Companhia Agricola e Forestal (18.400 employés!), 100.000 ha de plantations d’eucalyptus qu’il transforme en charbon de bois “labellisé vert” pour alimenter les hauts-fourneaux de son usine de Juiz n°4 energymag | 45

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Une plantation d’Eucalyptus cultivée au titre de la biomasse par une filiale d’Arcelor Mittal au Brésil © Arcelor Mittal

Pour assurer un approvisionnement en ressources biomasse, Laurent Minguet entend aussi créer une filière de production intégrée d’exploitation forestière dans les zones tropicales appropriées. L’idée n’a rien d’une utopie: Arcelor Mittal exploite au Brésil 100.000 hectares d’eucalyptus qu’il transforme en charbon de bois pour alimenter ses hauts-fourneaux. Le sidérurgiste couvre déjà 2,5% de ses besoins énergétiques via cette ressource biologique et entend la développer à l’avenir.

de Fora. Arcelor Mittal est ainsi l’un des premiers industriels à avoir obtenu le label FSC (Forest Stewardship Council) qui fait autorité dans le domaine de l’exploitation forestière. Et le sidérurgiste entend développer à l’avenir la production de ce combustible renouvelable qui couvre déjà 2,5% de ses besoins dans le monde. Signalons enfin que par les émissions de CO2 évitées grâce à la biomasse, il devrait tirer avantage des crédits CO2 susceptibles de lui être octroyés dans le cadre des Mécanismes de Développement Propre (lire notre encadré et notre article en page 16). 14.000 MWé de cogénération biomasse en Belgique Alors que la puissance cumulée de toutes les centrales électriques belges avoisine les 16.000 MWé, pour ainsi produire 84 millions de MWh d’électricité chaque année, le financier annonce posément qu’il est possible (et rentable!) d’installer 14.000 MWé de cogénération biomasse en Belgique, en plantant des arbres sur une superficie de 37.500 km2, soit 123% du territoire belge ou encore 1,6% du territoire de la République du Congo. Ces installations produiraient la même quantité d’électricité et 80 millions de MWh de chaleur, distribués à 80% des clients résidentiels belges. La distribution de chaleur est la pierre angulaire sans laquelle le projet s’effondrerait. Elle implique une “miniaturisation” des centrales électriques qui

seraient installées près des consommateurs de chaleur. Alors que la puissance électrique développée par un réacteur nucléaire peut atteindre 1.000 MWé, le Plan belge de cogénération biomasse de Laurent Minguet préconise l’installation d’unités dont la puissance moyenne est de 14 MW électrique et 42 MW thermique. Selon lui, il suffit d’équiper la moitié des voiries avec un réseau de chaleur totalisant 50.000 km de longueur pour couvrir 80% des points de consommation en Belgique. À titre de comparaison, pour couvrir 12% de ses besoins thermiques, l’Allemagne possédait en 2001 environ 18.000 km de réseau de chaleur fournissant 87 millions de MWh de chaleur, dont 81% sont produits par des unités de cogénération “classiques” (gaz naturel et charbon). Une rentabilité exceptionnelle de 22% chaque année! L’audace du patron d’XDC est d’avoir trouvé une solution énergétique renouvelable, propre mais aussi (très!) rentable. Pour une commune de 10.000 habitants, par exemple, en prenant une hypothèse réaliste d’un coût de 2.500.000 € par MWé installé, l’investissement dans l’unité de production de 14 MWé serait d’environ 35 millions €. Pour la distribution, il faudrait en moyenne 50 km de réseau de chaleur, soit un investissement de 15 millions €, raccordement compris. Investissement total: 50 millions €, hors subsides. L’amortissement sur 40

ans à un taux d’emprunt de 3,5% par an conduit à une charge financière de 2,3 millions € chaque année. Pour produire 84.000 MWh d’électricité et 80.000 MWh de chaleur, cette unité va consommer 75.000 tms de bois chaque année soit l’équivalent de 6.250 ha de forêt en Belgique ou 1.875 ha au Congo par exemple. Revendue au réseau à 65 €/MWhé, le gain électrique annuel vaudrait 5,5 millions €. La chaleur, fournie au prix de 50 €/MWhth, rapporterait 4 millions €. L’achat du bois à 65 €/tms, transporté par bateau représenterait une dépense annuelle de 4,5 millions €, à laquelle s’ajoutent les frais d’entretien et de fonctionnement estimés par l’ingénieur à 0,5 millions €. Amortissement déduit, le projet dégagerait un cash flow de 2,2 millions €. Si l’unité était basée en Wallonie, à cela s’ajouteraient environ 100.000 certificats verts “wallons” (lire notre encadré), qui récompensent le producteur électrique pour les 45.600 tonnes de CO2 évitées, pour un montant significatif de 6,5 millions €. Le gain annuel net, amortissement déduit, de 8,7 millions € permet un taux de rentabilité interne du projet de 22% par an. Autrement dit, l’investissement de 50 millions € est rentabilisé endéans les 4,5 ans. C’est assez exceptionnel dans le secteur énergétique. La création de 50.000 emplois durant quinze ans Étendues à toute la Belgique, ces unités de cogénération biomasse totaliseraient une puissance électrique de 14.000 MWé, soit un investissement total de 50 milliards €, réseaux de chaleur compris. Selon l’auteur du Plan, environ 60% du montant de l’investissement serait composé de maind’œuvre locale, soit 30 milliards € ou l’équivalent de 50.000 emplois durant quinze ans! Il s’agirait tant d’emplois qualifiés (étude et conception des centrales de cogénération biomasse), que moyennement qualifiés (installations techniques), voire peu qualifiés (terrassement). “Ne rêvons pas trop vite, un tel projet verra le jour progres-

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sivement”, tempère Laurent Minguet. “Si la volonté politique suit, on peut estimer que le réseau de cogénérations à biomasse s’étendra doucement sur une période de douze à quinze ans”. En croissant ainsi sur plusieurs années, l’offre électrique des unités de cogénération biomasse permettrait aux producteurs actuels de progressivement démanteler leurs centrales électriques les moins rentables, en ce compris les 7 réacteurs nucléaires belges totalisant une puissance électrique de 5.600 MWé. L’autre avantage souligné par le plan de Laurent Minguet est qu’un tel investissement se fera “naturellement”, en fonction de l’attractivité technico-économique intéressante, grâce au soutien financier apporté par les certificats verts et, le cas échéant, de cogénération. Ce seront donc les centrales les plus rentables, mais également les plus faciles à implanter, qui verront le jour en premier lieu. “Il serait souhaitable que la gestion du réseau de chaleur soit contrôlée par le pouvoir public,

à l’instar du réseau électrique, et d’appliquer un prix juste pour la distribution de chaleur”, suggère Laurent Minguet. “Par ailleurs, les réseaux de chaleur permettent de s’adapter à de nouveaux types d’unités de cogénérations”, précise-t-il. “Si le vecteur énergétique du futur devient l’hydrogène, produit de manière renouvelable, les centrales de cogénération pourront aisément s’y adapter”. Objectif Kyoto pour la Belgique atteint quatre fois La Belgique s’est engagée d’ici 2012 à réduire ses émissions de CO2 de 7,5% par rapport aux émissions de 1990. Cela représente un effort de 11 millions de tonnes de CO2 par rapport aux 145,7 millions de tonnes d’équivalent de CO2 émises en 1990. Ou encore de 1,1 tonne par habitant. Or, selon le rapport publié le 27 octobre 2006 par l’Agence européenne de l’Environnement, la Belgique n’y arrivera pas. Ses émissions de gaz à effet de serre devraient augmenter de 1,2%! L’obligeant

ainsi à financer des projets “propres” à l’étranger… Alors que le projet de cogénération biomasse de Laurent Minguet permettrait de réduire les émissions belges de 45,6 millions de tonnes de CO2 chaque année. Une manière élégante et rentable d’atteindre quatre fois notre objectif Kyoto. Et de pousser dans le dos nos gouvernements: pourquoi financer ailleurs ce qui peut l’être ici, se révéler rentable et créateur d’emplois. Certes, le plan Minguet tel qu’annoncé ainsi semble utopique dans sa globalité et suscitera sans doute nombre de réactions. Mais il mérite qu’on mène une étude de faisabilité car il propose une piste intéressante pour l'avenir énergétique du pays. p Ismaël Daoud

Pour en savoir plus: www.nowfuture.org

Une économie en CO2 largement récompensée Dans la foulée des accords de Kyoto et sous l’impulsion de la Commission Européenne, les 25 Etats membres ont mis en place un Plan National d’Allocation de quotas d’émission en CO2. Ce plan prévoit un octroi de permis d’émission en CO2 dégressif en fonction des années. Incitant ainsi les gros consommateurs d’énergie, les seuls pour l’instant concernés, à trouver des solutions pour réduire ces émissions polluantes. Deux options sont possibles: réaliser par soi-même des mesures d’utilisation rationnelle de l’énergie, des investissements dans les énergies renouvelables et la cogénération, voire opter pour un combustible moins polluant en termes de CO2, ou alors acheter les tonnes de CO2 manquantes pour atteindre le quota fixé. La tonne de CO2 a donc un prix sur ce nouveau marché “mondial”, régi par la loi de l’offre (l’entreprise ayant réduit ses émissions en CO2 par des actions concrètes) et la demande (l’entreprise préférant compenser ses émissions en CO2). Actuellement, le prix est d’environ 10 € par tonne de CO2. À l’échelle d’une commune de 10.000 habitants, une cogénération de 14 MWé et de 42 MWth, qui réalise une économie annuelle de 45.600 tonnes de CO2 comparée à une production classique des mêmes quantités de chaleur et d’électricité (référence: gaz naturel), permettrait de générer un gain financier supplémentaire de 0,456 millions d’euros. Par ailleurs, pour soutenir financièrement la filière de la production d’électricité “verte”, les gouvernements des trois régions, ainsi que le gouvernement fédéral, ont mis en place un système de certificats. La Région wallonne et la Région bruxelloise ont choisi, comme unité de calcul, l’économie en CO2. Contrairement à la Flandre, où l’unité de calcul est l’économie d’énergie primaire (pour l’obtention d’un certificat de cogénération) et/ou la production d’un MWh d’électricité renouvelable (pour l’obtention d’un certificat vert). Au niveau fédéral, c’est également le MWh d’électricité renouvelable qui est utilisé comme unité de calcul d’octroi de certificats verts. Ainsi, en Wallonie, économiser 456 kg de CO2 lors de la production d’électricité verte permet de recevoir un certificat vert dont la valeur est de 92 €. La tonne de CO2 sur ce marché spécifique a donc une valeur de 200 €. En Région de Bruxelles-Capitale, où le calcul est différent, le producteur d’électricité verte recevra un certificat vert chaque fois qu’il économise 217 kg en CO2. Au prix actuel de 69 € par certificat vert, la tonne de CO2 sur cet autre marché régional vaut 318 €… Économiser du CO2 est de nos jours largement récompensé! p Ismaël Daoud

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AGENDA

JANUARI p JANVIER u 24/01, Namur Energy pooling Chauffage des ateliers et des grands espaces: Confort de travail et utilisation rationnelle de l’énergie www.energypooling.be

u 18-25/01, Liège Formation Soltherm - Chauffe-eau solaire www.cefortec.be

u 18/01, Bruxelles Soirée d’études Le chauffe-eau solaire www.ibgebim.be

Fair & Exhibitions u 22-23/01, London (UK) 8th annual emissions trading

u 28/02 - 9/03, Antwerpen EasyFairs Maintenance

u 16-20/04, Hanovre (D) Cetex Hannover

www.mefinance.com

www.easyfairs.com

www.messe.de

u 24-25/01, Berlin (D) 4th Clean Energy Power 2007

u 1/03, Wels (A) European Energy Efficiency Conference

u 17-21/04, Vicence, (I) Solarexpo

www.energiemessen.de

u 26/01, Bolzano (I) GreenVillageTechs 2007 irc.cordis.lu

u 29-31/01, Bruxelles European Renewable Energy Policy Conference www.erec-renewables.org

u 6-8/02, Essen (D) E-World of Energy

www.atic.be

u 14-17/02, Lyon (F) Salon des Energies Renouvelables

u 14/02, Eupen Energy Pooling Energieaudit - Was? Warum? Wie? www.energypooling.be

u 2-4/03, Böblingen (D) Erneuerbare Energien

www.messe-essen.de

www.energie-ren.com

u 6-9/03, Bruxelles Worldbiofuelsmarkets Congress & Exhibition

www.nemex-energy.co.uk

ish.messefrankfurt.com

u 7-10/05, Milan, (I) EWEC - European Wind Energy Conference & Exhibition

u 16-19/03, Paris (F) Ecobat: le salon de l’éco-construction

u 14-17/02, Lyon (F) Enéo www.salon-eneo.com/2007

u 2-4/04, Beja, Alentejo (P) European Meeting Point, Energy and Development 2007

u 8-29/03, Liège Formation Les systèmes solaires combinés pour la production d’ECS et le chauffage des locaux

u 28/02 - 2/03, Madrid (E) Genera

u 13-14/04, Bregenz, (D) 11e Conférence Internationale maison passive

www.ifema.es

www.conference-biomass.com

u 21-24/06, Chevetogne ECOnergies - Salon international des énergies renouvelables www.econergies.be

u 19-20/09, Bruxelles EasyFairs ECL: the meeting place for the electrician! www.easyfairs.com

APRIL p AVRIL

u 24/04, Liège Séminaire Mieux comprendre le chauffage à eau chaude

u 15/03, Bruxelles Soirée d’études Le chauffage au bois

u 05/04, Bruxelles Séminaire Les installations de chauffage et la normalisation acoustique

www.ibgebim.be

www.atic.be

JUNI p JUIN

u 15/03, Liège Séminaire Le chauffage à pellets: avantage ou non face aux combustibles traditionnels

u 16/04, Bruxelles Soirée d’études Les installations solaires photovoltaïque

u 05/06, Liège Séminaire Aborder la technique de la pompe à chaleur

www.ibgebim.be

www.cefortec.be

u 17-18/04, Grenoble, France Formation Prix des énergies

u 06-27/06, Formation URE L’isolation, la ventilation, le solaire, le chauffage et l’électricité.

www.cefortec.be

www.cefortec.be

www.cefortec.be

u 7-11/05, Berlin (D) 15th European Biomass Conference and Exhibition

www.passivhaus-institut.de

www.cefortec.be

u 22/03, Liège Séminaire Les “maladies” typiques dans les installations de chauffage

www.ewea.org

www.salon-ecobat.com

www.ifema.es

www.enerdata.fr

www.boisenergie.com

u 6-10/03, Frankfurt am Main (D) ISH 2007

MAART p MARS

u 19-23/03, Grenoble, France Formation Modélisation & Prévision de la demande énergétique

u 19-22/04, Orléans (F) Salon Bois Energie

u 1-3/05, Birmingham, (UK) Nemex

energyanddevelopment-2007.net

www.enerdata.fr

www.easyfairs.com

www.greenpowerconferences.com

u 28/02 - 3/03, Madrid (E) Climatizacion 07

u 12-16/03, Grenoble, France Formation Efficacité énergétique

u 18-19/04, Rotterdam (NL) EasyFairs Industrie & Milieu

www.erneuerbareenergien.com

u 25/01, Bruxelles Séminaire La récupération de chaleur sur l’air de la ventilation

FEBRUARI p FÉVRIER

www.solarexpo.com

www.esv.or.at

www.enerdata.fr

www.cefortec.be

u 18/04, Liège Séminaire La certification verte www.cefortec.be

u 14/06, Bruxelles Séminaire Conception HVAC et énergie: quelle évolution? Quels outils mis au point par les Régions?

European Sustainable Energy Week Du 29 janvier au 2 février 2007, l’Union Européenne organise une semaine complète consacrée à l’énergie, à Bruxelles ainsi que dans d’autres villes d’Europe, durant laquelle les économies d’énergie dans le bâtiment mais aussi les énergies renouvelables, les questions de mobilité, etc. seront mises à l’honneur. La matinée du 31 janvier fera le point sur l’état de la transposition de la Directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments dans les différents Etats-membres. Au total, une cinquantaine de conferences sont prévues. www.managenergy.net/ conference/2007.html

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