Yann Moulier-Boutang, rencontres des Ateliers

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Yann Moulier Boutang

yann.moulier.boutang@utc.fr or yann.m.boutang@gmail.com

« Pour un design du design : le design en situa1on» 18 Novembre 2010 18h30 5ème Salle Charlo?e Perriand

ENSCI Les Ateliers 48 Rue St Sabin75011 Paris


ENSCI Conférence de rentrée du 18 novembre 2010 Yann Moulier Boutang

yann.moulier.boutang@utc.fr or yann.m.boutang@gmail.com

« Pour un design du design : le design en situa1on» Le matériau de ce?e conférence est libre d’uIlisaIon sous licence CreaIve Commons de type 2 . Il peut être reproduit si l’on menIonne l’auteur et de la source (conférence à l’ENSCI). Merci de ne pas introduire de modificaIons quand c’est cité et a?ribué à l’auteur. Libre uIlisaIon pour la recherche, la créaIon, l’enseignement, la formaIon, la citaIon, la caricature. En cas de reproducIon du texte à des fins commerciales autorisaIon de l’auteur et de l’ENSCI requise


j’enseigne l’économie à des élèves ingénieurs

Université of Technologie of Compiègne Depuis 2005 , j’ai dirigé et codirige aujourd’hui Un laboratoire le COSTECH EA 22 23 Connaissance, Organisation & Systèmes techniques

yann.moulier-­‐boutang@utc.fr Depuis cet automne, j’enseigne également à des élèves architectes Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Paris Malaquais yann.moulier-­‐boutang@paris-­‐malaquais.archi.fr et depuis 2007 j’enseigne la culture générale à l’ Ecole Supérieure d’Art et Design de Saint-­‐Etienne yann.moulier-­‐boutang@esadse.fr J’ai fondé et codirige la revue Multitudes (depuis 2000) http://multitudes.samizdat.net J’enseigne également depuis 2008dans un Master à l’Université Pablo Olavide et l’Université Internationale de Séville De 2005 à 2007 j’ai été professeur invité au Département de Sociologie et à l’InsItut Fernand Braudel de l’Université de l’Etat de New York à Binghamton(SUNY)


La couverture de ce livre par Enki Bilal « C ’est le couple de l’année ! » dit-­‐il, me dévoilant le dessin préparé pour la couverture. Qui est l’homme à la fleur blanche à la main ? Un trader inquiétant avec ses luneRes noires en plein jour ? Un enfant lointain de Marx ? Un aventurier sorU du film Matrix ? L’économiste d’aujourd’hui ? Celui de demain? Le dessin joue sur l’ambiguïté que le livre dissipera, peut-­‐on espérer. Disons que Enki Bilal est tombé juste comme d’habitude. Et l’abeille ? est-­‐elle sa mouche du coche? Non, c’est vraiment du sérieux entre eux. Elle lui tourne autour et semble le mener vers un autre monde. Est-­‐ce parce qu’elle lui réserve les douceurs de son miel à vendre ? Non, elle le fascine parce qu’elle pollinise. Sans elle, nombre de fruits, de légumes, d’oléagineux meurent, plus de fleurs des champs, ni de vivant. Quel meilleur emblème de la crise écologique, que l’abeille vraiment menacée de dispariUon ? Pourtant elle conduit l’économiste à repenser la mesure de l’acUvité humaine et la véritable richesse, une autre économie déjà au-­‐delà du capitalisme. Serions-­‐nous un 32 décembre de l’économie poliUque ? Yann Moulier Boutang


Quelques livres


h?p://mulItudes.samizdat.net/


En exergue •  « Le design est une ac.vité liée à une pensée (du) complexe et à une logique originale où la recherche esthé.que s'associe aux stratégies industrielles et où la technologie n'est qu'une par.e d'un vaste contexte symbolique. Les rapports entre l'art et le design sont beaucoup plus difficiles à meBre en théorie, en raison de leur caractère spontané et discon.nu. Il fut un temps où l'on considérait que l'art générait de nouveaux langages tandis que le design les u.lisait. Aujourd'hui nous assistons au phénomène inverse... » •  Andrea Branzi


En guise de Caveat •  Je ne suis pas designer. A quel Itre donc suis-­‐je ici ? •  Avoir écrit mon premier livre Tanin manuel des jardins japonais, mi ficIon, mi traité d’esthéIque à propos de la route Est Ouest, après des études de philosophie et de japonais, peindre, écrire à mes heures perdues, être sociologue et économiste de méIer en quoi cela me donne-­‐t-­‐il une quelconque légiImité de venir vous tenir leçon ? •  Si nous restons dans l’opIque trop souvent disciplinaire de l’académie, alors clairement aucune. Si nous nous plaçons du point de vue pragmaIque, Féyérabendien (pour trouver tous les moyens sont bons) peut-­‐être que les réflexions qui suivent vous servirons. Encore quelques mots d’un grand designer que je vous demande de garder en tête. •  « Le designer est un inventeur de scénarios et stratégies, Ainsi, le projet doit s'exercer sur les territoires de l'imaginaire, créer de nouveaux récits, de nouvelles fic.ons, qui viendront augmenter l'épaisseur du réel » Andrea Branzi, La casa calda, Paris, ÉdiIons de l'Équerre, 1985


« Pour un design du design : le design en situa1on» IntroducIon : crise du design en situaIon 1 Plis de l’époque : capitalisme cogniIf design capitalisme, singularités 2. Puissance du numérique captaIon de force pollinisatrice 3. New Commons, la culture Open source et économie de contribuIon 4. EsthéIque augmentée, Meta design : Le design de processus et le retour vers un métaobjet 5. Envoi : Le?re à un jeune designer


IntroducIon : crise du design (1) A. Triple crise : du design, de l’art, de l’industrie B. Crise veut dire mue, mutaIon, point d’inflexion, de bifurcaIon C. Crise du design comme épuisement de la geste esthéIque, décoraIve, foncIonnaliste, moderniste, postmoderne. Epuisement ne veut pas dire « mort » mais répéIIon/imitaIon non Tardienne, non créaIve, non nouvelle donc re-­‐bifurcaIon d’avec l’art moderne sous l’influence de 2 a?racteurs : le retour vers un néo-­‐arIsanat, le bureau d’étude et de publicité


IntroducIon : crise du design (2)

D. Ce?e crise se traduit par des difficultés de liaison non pas seulement éprouvées subjecIvement mais aussi inscrite dans le plis des choses. E. Ce que l’art moderne avait vécu comme crise du figuraIf, de la séparaIon de l’œuvre, de l’auteur, du public se donne à parIr des années 1990 comme une crise de l’objet du design, comme de l’objet comme ul.ma ra.o et accomplissement du design F. Derrière cet épiphénomène ce sont les liaisons avec le sensible, la connaissance et l’industrie qui sont en jeu.


IntroducIon : crise du design (3)

G. La liaison avec le sensible indique que le sensible a changé (irrupIon du virtuel à côté du possible et du réel). La technologie numérique comme anthropologiquement consItuIve. H. La crise des liaisons avec la connaissance ne concerne pas un classique et récurrent aggiornamento ( aux techniques, aux matériaux, aux « styles » dans les domaines connexe, aux modes de vie, à la mode tout court, aux arts, à l’ architecture) elle concerne le statut de la connaissance en général I. La crise des liaisons avec l’industrie n’est pas non plus la tension créatrice qui a existé quasiment dès le départ entre la contrainte technique répéIIve et l’arIsanat, entre le répéIIf industriel et la variaIon, entre le foncIonnel et la gratuit elle résulte d’une crise de l’industriel en tant que tel. Je ne donne donc pas tort à l’extrême méfiance des jeunes apprenIs designers vis à vis d’une certaine injoncIon à la créaIvité ou d’une rhétorique creuse de l’innovaIon qui n’est trop souvent qu’un verbiage ravalant un fordisme cadavérique.


IntroducIon : crise du design (4)

J. Le design travaille la liaison stratégique entre la concepIon ou dessein et le dessin ou traducIon sensible. K. La crise qui l’affecte n’est pas séparable de sa situaIon dans la situaIon générale du sensible, de la connaissance et de l’acIvité de l’homo faber sapiens. L. D’où mon angle d’a?aque : 1) connaissance et valeur économique, 2) sensible, numérique, 3) sujet et économie de contribuIon. M. A parIr de là, penser les topoi stratégiques du nouveau schémaIsme entre formes de la sensibilité et catégories de la raison et quelques suggesIons


1 Plis de l’époque : capitalisme cogniUf design capitalisme, singularités (1) •  La grande crise commencée par la fin de Bre?on Wood (suspension des taux de change fixe et de la converIbilité du dollar en 1971, poursuivie par les deux crises du pétrole, les crises financière à répéIIon jusqu’à la crise des subprimes devenue une guerre des parités monétaires et de crise de la de?e publique) traduit une nouvelle grande transformaIon que j’ai décrite dans mes deux livres de 2007 et 2010. (voir références en fin de conférence) •  Les plis du monde ou les nappes de charriage font apparaître sur les massifs hercyniens usés du socle du capitalisme industriel, de nouveaux plissements massifs alpins, rocheux et himalayens. Les 4 forces à l’œuvre dans ce?e tectonique des plaques.


1 Plis de l’époque : capitalisme cogniUf design capitalisme, singularités (2) A.  ImmatérialisaIon de la producIon B.  La puissance du numérique :Le déplacement sur Immatériels 2 et sur l’intelligence collecIve comme étalon de la valeur. C.  La saut qualitaIf du déplacement sur la sphère de la pollinisaIon D.  Une transformaIon profonde des modèles économiques : Sera transformable en biens ou services commercialisable de plus en plus que ce qui devient un instrument de singularisaIon adossé à une économie de contribuIon E.  Conclusions provisoires en forme de le?re à iun jeune designer


La dématérialisaUon (1)   La montée des immatériels : trois exemples PSA, l’Ipod et une paire de Nike   Déplacement de la valeur sur la sphère de ce qui est produit par l’activité cérébrale (conception, organisation, assemblage, globalisation de l’objet de la transaction)   Du fabriquant de produits, à l’organisateur de procédés, au créateur d’expérience de vie co-produite avec le co-produsommateur   (crowd sourcing, crowd funding, crowd designing,   click worker)


La dématérialisaUon (2)   L’itinéraire d’IBM de 1935 à 2010   Conception/design/transport/   L’exemple du TGV/Siemens et Sinkansen par rapport aux marchés des pays émergents. Les Chinois et la conception globale, la solution globale versus la performance d’un bel objet technologique.   Cela iIlustre de la globalisation qui déconstruit l’objet   Il y a aussi le concept knowledge design qui parvient au contraire à abstraire l’objet de sa fonction ( la chaise liée à la table) pour explorer de nouvelles possibilités.   Les deux péchés mignons : -  le culte de l’objet performant, du jouet technique de l’ingénieur -  Le culte du détournement artistique de l’objet fonctionnel.


2. La puissance du numérique hâte le déplacement sur les Immatériels 2 et sur l’intelligence collecUve comme étalon de la valeur (1)   De la mécanisation musculaire industrielle par la machine à la mécanisation cérébrale par la numérisation et la diffusion massive des TIC.   Le vieux composé : travail/capital remplacé par hardware / software/netware / wetware   Production de connaissances à partir de connaissances conditions amont, du vivant à partir du vivant.


2. La puissance du numérique hâte le déplacement sur les Immatériels 2 et sur l’intelligence collecUve comme étalon de la valeur (2)   De la vieille exploitation de la force de travail à la force invention (M. Lazzarato) et à la force vie (bioproduction)(Negri & Hardt)   Dévalorisation du matériel mais aussi d’immatériels 1 (les immatériels codifiés transformés en actifs (brevets, marques, droit d’auteur, appellation d’origine protégée)   Accélération et intensification de l’interaction, de l’interdépendance   D’où le caractère indispensable de la notion d’externalités (simple, complexe)   Voir tableaux annexe 1 si nécessaire sur les externalités


2. La puissance du numérique hâte le déplacement sur les Immatériels 2 et sur l’intelligence collecUve comme étalon de la valeur (3) Immatériels 1 et 2 •  •  •

Une différence fondamentale :

Connaissance explicite / connaissance implicite

Immatériels 1 Connaissance codifiée sur laquelle on peut émettre des droits de propriété intellectuelle (Marques, droit d’auteur, brevet, , dessins et modèles, appellation d’origine contrôlée ou protégée) •

Immatériels 2 ou de halo : non codifiée ou codifiable , liée à la contextualisation , à l’apprentissage.

Exemple : les 3 C confiance, coopération, care (soin) ou bien les trois T de Florida : Technology / talent/cohérence

Que devient l’objet chéri du design quand il cherche à capturer les 3 C ou les 3 T ?


3.1 Le saut qualitaUf du déplacement sur la sphère de la pollinisaUon La comparaison avec la pollinisation Que font vraiment les abeilles Le changement d’échelle de 1 à 350 ou 1000 (voir calcul infra) L’interaction humaine en réseaux numériques ou pas équivalent de la pollinisation: le tournant linguistique de l’économie politique (C. Marazzi, P. Virno) Elle définit l’activité comme beaucoup plus large que ce que la société actuellement considère comme du travail à travers la convention d’emploi. L’activité productive peut être définie désormais comme « la coopération des cerveaux travaillant sur des ordinateurs en réseaux » (M. Lazzarato).


PollinisaUon


La mesure des externalités de pollinisaUon 1.

Cf les chiffres donnés par Bernard Duran dans son peIt livre Les abeilles, la planète, les citoyens citant les équipes CNRS Montpellier/Aix en Provence (153 MM par an) 2.  Nos esImaIons étaient de 1 à 350 pour les Etats-­‐Unis : la producIon de miel vers 2005 étant d’environ 100 millions de us$ 3.  la producIon agro-­‐alimentaire de fruits et légumes directement impactés (29 Milliards de $) + les effets indirects (élevage) + les effets sur la producIon naturelle de la flore 4.  une esImaIon a minima de 35 milliards de $ annuels et fourche?e haute à 100 milliards


La mesure des externalités de pollinisaUon 2 4. 33% de la producIon agricole mondiale dépend de la pollinisaIon en 2010 : producIon mondiale = 60 000 milliards de us$ ProducIon agricole = 4% = 2400 Milliards de dollars Part dépendant directement des abeilles disparaissant en cas d’exIncIon des abeilles 0,33%

= 790 Milliards de us$ 5. La producIon marchande de miel = 1 Milliards de us$ 7. l’économie de pollinisaIon par rapport à l’économie marchande et non marchande comptabilisée

serait alors de 790 à 1. Avec le rôle de la pollinisaIon dans la nature sauvage le raIo le plus restricIf est plus près de 1000 à 1


3.2. Capitalisme cogniUf et pollinisaUon •  Le capitalisme cognitif est donc la forme d’accumulation de moyens matériels et organisationnels qui capture par les dispositifs numériques de type Web 2.0 une partie des externalités positives résultant de l’activité de pollinisation de la multitude humaine et vivante •  Le capital cognitif n’est pas de la rente parasitaire si et seulement s’il s’approprie la force invention de la multitude tout en la reproduisant en lui offrant de plateformes gratuites de pollinisation sinon il est prédateur et retourne au capitalisme industriel (normalisation)


3.3. Décentrement de perspecUve a) Le changement d’échelle la dévalorisaIon radicale de la sphère marchande actuelle au regard de la richesse de la sphère des externalités posiIves et des forces de producIon de ces dernières marque l’irrupIon irrepressible de l’écologie. b) Le décentrement de l’acIvité humaine de transformaIon entropique matérielle à l’acIvité cogniIve nèguentropique (B. SIegler). RéévaluaIon radicale de la place de l’homme dans la biosphère. Il s’agit de la mutaIon de valeur la plus radicale depuis celle que le ChrisIanisme, la gnose et le platonisme avait opéré sur les dieux de l’AnIquité. C ’est quand même beaucoup plus formidable que le passage de la chaise Louis XV à la chaise Empire !!! c) Ce?e situaIon post humaine (Sloterdijk), « post renaissance » se retrouve dans les thèse sur la colonialité du pouvoir (A. Quijano, W. Mignolo). d) FoncIonnalité, modernité, sont bousculées tout autant que l’objectalité du design.


3.4. PollinisaUon, singularité et design capitalism (1) •  Ce déplacement des formes de la valeur économique vers la captation croissante de la sphère des immatériels de type 2 (non codifiables) et des externalités positives fait apparaître l’importance croissante de la pollinisation comme préalable à la marchandisation et donc le développement amont d’une économie de la contribution au lieu d’une économie d’échange. •  On a donc le développement de deux volets opposés : - d’un côté le développement de l’économie de contribution qui déterritorialise, rend commun, ouvert, gratuit les espaces de pollinisation - De l’autre un espace de ré-encodage qui ramène les immatériels aux by-products pu produits liés à ces immatériels (mouvement de patrimonialisation et de réinscription dans le chosisme hyper industriel ou néo industriel et mouvement de réduction des immatériels 2 à des immatériels 1 par le renforcement des DPI et de leurs mesures d’exécution)


3.4. PollinisaUon, singularité et design capitalism (2) •  Comment représenter, Schématiser, Dessiner Performer Ces mouvements ou leur manque ? Le design comme stratégie doit Camper la tension devenu son objet, son récit S’engager , faire pencher, déséquilibrer l’objet, le procédé, le processus


Annexe 2 : •  Le design capitalisme •  A parIr de nos discussions avec Antoine Rébiscoul disparu prématurément à l’âge de 39 ans le 15 septembre dernier


3.4. PollinisaUon, singularité et design capitalism (2) •  « Une économie du parIculier s’accommode parfaitement de la producIon industrielle de masse et des économies d’échelles qui lui sont inhérentes. Elle produit des catégories de produits, des biens d’équipement disons, avec une assez faible interopérabilité entre ces biens : car leur finalité est de mécaniser un certain nombre de foncIons de maîtrise d’œuvre « élémentaires » (se déplacer, laver, se nourrir etc.), dont le sujet et ses intenIons reste, en dernier ressort, le maître d’ouvrage. •  « Les usages, les enjeux, les paradoxes deviennent bien différents dans une économie de singularités. Les produits ne sont plus des biens d’équipements relaIvement subordonnés : ils se présentent comme autant de « hubs » ou de plate-­‐forme inachevées, dans lesquels la subjecIvité de l’uIlisateur, ses goûts, ses aspiraIons, ses intenIons doit pouvoir trouver une inscripIon. Raison pour laquelle les biens les plus prisés de l’âge de la singularité sont d’emblée intersubjecIfs :


3.4. PollinisaUon, singularité et design capitalism (3) •  « ils produisent autant de codes sociaux, choisis ou subis, me?ant en jeu l’inImité de chacun, et dont la finalité principale est bien la recherche d’assenIment et le partage d’expériences. (…) •  « Internet est un champ d'applicaIon démesuré de ce?e singularisaIon, non qu'aucune mesure n'en rende raison, mais parce que chaque foncIonnalité nouvelle de partage, de mise en réseau, de simplificaIon des tâches, de facilité d'accès, augmente toujours davantage la contextualisaIon et la personnalisaIon des intenIons de l'uIlisateur. Le 2.0 de l'internet de pollinisaIon généralisée laisse peu à peu place à un internet 3.0 de contextualisaIon et de recherche, par chacun, d'une maîtrise et d'une exploitaIon de ses propres courbes d'expériences numériques et personnelles. C'est en ce sens qu'il faut peut-­‐être parler sans doute de design capitalism. » Antoine Rébiscoul Lettre à F. Fourquet •  Groupe des économistes du Forum des Modernités


3. New Commons, la culture Open source et l’économie de contribuUon et de pollinisaUon (3)

•  Le capitalisme cogniIf, comme le design capitalisme tendent à s’approprier une parIe des externalités posiIves de réseaux produite par l’interacIon humaine (les click-­‐workers) mais aussi la singularisaIon, l’individualisaIon de chacun. •  Le design de processus construit des plateformes fait d’assemblage complexes qui désarIculent l’objet ou les procédés classiques. •  Apple et le crowd design


3. New Commons, la culture Open source et l’économie de contribuUon et de pollinisaUon (4)

•  L’Ipod,Iphone, Ipad d’Apple sont conçus et dessinés et fabriqués comme des plateformes reliées à des services mais qui ne sont complétés que de façon singulière. L’inachèvement vise à (designs) capturer les immatériels 2 (la société interacIve des goûts singuliers, donc le public en train de se former et pas les immatériels 1 (les droits d’auteurs). Ces derniers se retrouvent subordonnés à l’interacIvité des immatériels 2, exactement comme les biens matériels se trouvent subordonnés aux droits de propriétés codifiés (Immatériels 1)









3. New Commons, la culture Open source et l’économie de contribuUon et de pollinisaUon (2)

•  Ce processus d’ensemble est soumis à de violentes tensions que je nomme avec James Boyle et d’autres, la guerre des nouvelles clôtures. •  C’est le terrain de l’accumulaIon primiIve du capitalisme cogniIf. Les biens informaIons ou biens connaissances, les immatériels 2(compétences, care, confiance, ou les 3 T de Richard Florida) et l’accès lui même à l’Internet et aux bases de données consItuent les principaux champs de bataille. •  Une série de batailles très complexes, car le capitalisme cogniIf y est aux prises avec pour alliés le mouvement open source et celui de la free culture dans uen guerre déclarrée contre les industries culturelles de la réacIon patrimoniale. Voir Google contre la censure étaIque et Microso„ qui jusqu’à peu ne concevait pas de business model sans “produits à vendre”, ou les réseaux sociaux


3. New Commons, la culture Open source et l’économie de contribuUon et de pollinisaUon (3)

•  Mais en même temps le capitalisme cogniIf en tant que design capitalisme est en guerre larvée contre les mulItudes de l’intelligence collecIve et de l’économie de contribuIon sur la quesIon de la protecIon de la vie privée. •  Nous avons résumé ce?e situaIon dans les deux schémas suivants. •  Le premier trace une carte des deux dynamiques en vert et en rouge •  Le deuxième montre que ces tenseurs dynamiques remodèlent complètement les entreprises



Soufflerie de la mondialisaUon et tenseur des entreprises


4. EsthéIque augmentée, Meta design : Le design de processus et le retour vers un métaobjet •  A. Le glissement du produit au capital intellectuel - A.1. Le glissement vers l’immatériel et de ses supports à l’intelligence partagée - A.2. Le glissement désigné •  B. Quel avenir pour le design dans le capitalisme cognitif ? -B.1. Ce que les entreprises vendront de plus en plus - B.2. Ce que les designers vendront de plus en plus


A.Le glissement vers l’immatériel et de ses supports à l’intelligence partagée A.1 Le glissement du produit au capital intellectuel (ce que les entreprises vendent déjà)   Du produit vers le moyen de produire le produit (biens et services)   Du produit au procédé de production   Du procédé de production au moyen de produire les procédés   Des procédés aux procédures   Des procédures au moyen de les produire   Des procédures/programmes à l’intelligence et à l’activité apprenante et connaissante


A.Le glissement vers l’immatériel et vers ses supports A.2. Le glissement désigné   Du méta produit aux apprentissages des méta procédures (solutions)   From learn to work (Johnson City) to work to learn ( IBM Endicott)   Des processus codifiés aux processus cognitifs ouverts et inachevés (solutions inventives, appropriée à un environnement complexe)   Think different (Apple)   Des découvertes assistées par des objets puis par des environnements (formes, schèmes de l’imagination)   Microsoft / IBM / Apple /


B. Quel avenir pour le design dans le capitalisme cognitif ? (1) B.1. Ce que les entreprises vendront de plus en plus Des produits plates formes dont l’achèvement résulte de l’interaction ex ante ou ex post, des produits intégrateurs La valeur des serviciels et produiciels dépend de l’étendue de la captation d’intelligence en réseau qu’ils permettent La valeur de la firme, de l’organisation, de l’institution qui les produit dépend de la captation des publics ( opinion publique, publics des amateurs, marchés idiosyncratiques) Un produiciel ou serviciel est la combinaison de plus en plus indémêlable du Hardware (machine) + Software (logiciels, data basis) + Wetware (activité cerveau vivant) + Netware (réseau numérique)


B. Quel avenir pour le design dans le capitalisme cognitif ? (2) B. Ce que les designers vendront de plus en plus •  Des formes de transition ou de passages mentaux au moyen d’objets •  Des schèmes imaginaires (possible) rendus actifs par le numérique (réalité virtuelle) •  Le passage (schème) qui fait pont (edges) entre des processus codifiés et des processus méta ( = codifiant, constituant) ou implicites. •  Chercher ce qui fait edge et quels nodes y correspondent sachant que les edges l’emportent sur les nodes, les relations sur les nœuds des relations •  Le tournant linguistique (saisie de l’équivoque et du complexe) par le langage plus riche que le code numérique binaire qui permet d’en débarrasser tout ce qui est répétitif, donc industriel, mais en même temps dévalorisé par le numérique •  Le langage de codification, recodification, sur-codification •  Réinvention de la fonctionnalité : les formes ou objets cognitifs engendrant de la variation et différenciation cérébrale et sensitive


4. EsthéUque augmentée, Meta design : Le design de processus et le retour vers un méta objet

•  L’homo ludens, l’homme connecté, l’homme cyborg •  La marée de la réalité augmentée par le virtuel et le numérique découvre le conInent des interacIons •  Le design a pour objet ce?e exploraIon de ce conInent ou 3° dimension. •  A la fois par des invitaIons au voyage (disposiIfs d’expérience, de percepIon)= design procédé •  Par des processus mimant la nouvelle organisaIon du sensible •  Par un retour APRES ce détour méta vers des objets.


Illustration : la désignation des externalités B. Pollinisation et coraillisation (externalités positives) L’interaction est à la base de l’incorporation dans la partie codifiable d’une partie de l’efficacité du halo (externalités positives) Son rôle productif peut être représenté à partir de deux images ou métaphores (translation ayant pour impact de stimuler l’imagination et la représentation de choses complexes : Pollinisation La coraillisation : opération de formation de réseau dont les coûts n’ont pas être supporté par l’entreprise, ni par l’Etat comme base préliminaire à la formation des archipel dans l’Océan.


Application : l’éco conception L’éco-design comme conception durable (externalités négatives) La valeur économique des productions de connaissances porte surtout maintenant sur la mesure : - non pas des outputs produits à partir d’inputs découpés dans l’environnement, le milieu -  mais de la préservation des outcome (contribution systémique de chacun. -  L’exemple de la pollinisation -  Voir tableau 2


5. Envoi : Le?re à un jeune designer (1) •  La créaIvité n’est pas un impéraIf extérieur. Vous pouvez en rire. •  Contentez vous de vérifier que vous avez un besoin irrépressible de dessiner, de faire des schémas, d’imaginer, de combiner. Si vous pouvez facilement faire autre chose sans souffrir laissez tomber le design. •  Le seul impéraIf technique numérique : praIquez le libre , ne vous fiez pas au programme tout fait •  Dans la firme devenue poreuse organisez vous en réseaux transverses •  Dans les territoires praIquez le crowd design •  Appuyez vous sur les nano technologise pour faire du design d’objets intelligents •  Ne soyez ni idenItaire ( jamais ou faites vous hospitalier d’urgence), ni pluri ou mulIculturel, soyez transculturel et culI-­‐ réel


5. Envoi : Le?re à un jeune designer (2) •  Soyez bo?om up et pas top down •  Soyez hybrides mais comme des somnambules pas comme des méIs alibi. •  CulIvez la fierté d’être minoritaires et méfiez vous dès que vous devenez majoritaires •  Soyez asymétrique, impair, en déséquilibre

•  Préférez le déséquilibre de l’équilibre à l’équilibre dans le déséquilibre •  Oubliez le « mobilier » pour repenser les usages` •  Soyez complexe pas compliqué •  Simplifier le concept compliquez le dessin •  Soyez open source et open culture mais pas terra nullius


5. Envoi : Le?re à un jeune designer (3) •  Last but not least : deux conseils moins poéIques •  1. Contrôlez la technique numérique ne vous bornez pas à la consommer clé de la (re)conquête de la liberté de créaUon. •  Ne consommez pas des foncUonnalités préprogrammée comme lorsque vous achetez des jeux ou des programmes propriétaires. Le code source compilé est votre ennemi. •  Vous avez le temps de conquérir votre liberté vous ne l’aurez plus aspiré dans la vie acUve


5. Envoi : Le?re à un jeune designer (5) •  Deuxième recommandaIon •  Le transfert de la créaUon au niveau des immatériels 2 conUent nécessairement l’incorporaUon et le contrôle singularisé des moyens numériques •  Ce méta niveau représente les nouvelles veines du marbre virtuel. Si vous voulez revenir à l’objet trempé par le détour par les externalités (la clé d’un sens contemporain).


Références Les slides 34 à 40 et 62 à 64 sont extraits de Moulier Boutang Yann & Rébiscoul Antoine (2006) « Penser l’immatériel » Conférence du 5 décembre 2006 à l’Echangeur, Laser, dont on trouve un Compte rendu du 21 décembre 2006 dans les travaux du Groupe des économistes, du Forum des Modernités. Moulier Boutang Yann, (2007 ou 2008 édiIon augmentée) Le capitalisme cogni.f ou la nouvelle grande transforma.on, Paris, EdiIons Amsterdam


Références (2) Moulier Boutang Yann, (oct. 2008)« Du design capitalism au capitalisme cogniIf, art et industrie, nouveaux liens, nouvelles tensions », in Bernard SIegler (direcIon de), Le design de nos existences à l’époque de l’innova.on ascendante, Paris, Centre Pompidou, Centre de recherche et d’innovaIon, Fayard, Mille et une nuits, pp. 43-­‐60. _______________(2008) « L’entrée dans le capitalisme cogniIf », (entreIen) in Esprit, Novembre 2008, 11, p. 123-­‐137 _______________(2008) «Libre culture contemporaine », in Le Garage, Catalogue de la Biennale Interna.onale Design, Saint EIenne, Saint EIenne, Cité du Design EdiIons, pp. 188-­‐189 Moulier Boutang Y. (2010) L’abeille et l’économiste, CarnetsNord, Paris


Annexe 1 Les externalités •  Externalités simple et complexes : définiIons Voir les deux schémas ci-­‐après •  L’iceberg des externalités •  La capture d’externalités par les marques




Product marketing attributes Brand Equity Externalities

Externality capture considered as intangible asset (= goodwill)


technologic quick

omnipower multifunction

C to C


fresh

tasteful

convenient

HEALTH

nourishing


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