Myriam El Haïk

Page 1

Myriam El Haik REsidence é d'artistes 2012 Coordination générale Anne-Valérie Delval & Maxime Chevillotte

Textes Clémence Agnez

Espace d'art contemporain HEC



entretien


Myriam El Haïk, vous êtes plasticienne

retrouvais par exemple l’écho de certaines

et compositrice. Comment s’articulent

formes radicales comme Vexations d’Erik Satie,

dans votre démarche ces deux pratiques ?

pièce qui répète 840 fois un même motif. De même, dans un autre champ, la rencontre

Au départ, j’ai une formation de musicienne.

avec la danse contemporaine, en particulier

Je suis autodidacte en tant que plasticienne.

Anne Teresa De Keersmaeker (sur la musique

Dans l’apprentissage de la composition,

de Steve Reich et Béla Bartòk) m’a renvoyée

j’ai étudié différentes techniques composition-

à une singularité d’expression du lien entre

nelles et exploré une diversité de formes

musique (rythme) et danse. Cy Twombly m’a

musicales en passant par l’étude de

aussi beaucoup influencée et libérée, avec sa

l’orchestration. La découverte de la musique

posture entre écriture et peinture. La notion de

contemporaine a été pour moi une révélation :

liberté était pour moi en lien avec la faculté,

elle m’est apparue comme une libération,

que présentent ces différentes pratiques, de

un langage nouveau. C’est en particulier

s’abolir des règles et des références de leurs

la musique minimaliste répétitive américaine

champs. En affirmant la possibilité de se

qui m’a beaucoup parlé parce qu’elle a pour

tromper, le droit de subvertir les règles, l’erreur

modèle central la notion de pattern (motif

change de statut : elle devient une proposi-

répété en anglais). Mais dans la recherche de

tion. L’écrit, lui, ne propose pas de possibilité

mon propre langage musical, j’étais partagée

de glissement, tandis que l’oral permet cela :

entre une culture musicale occidentale écrite,

la déformation, l’hésitation, dans lesquelles

notamment par la pratique du piano classique,

émerge une nouvelle musique. Une forme

et une culture musicale orale, marquée par un

neuve d’expression de soi apparaît dans

répertoire de musique traditionnelle marocaine

l’erreur, s’insinue dans la trame très serrée du

percussive, au sein de laquelle les rythmes

code de départ. Le lien entre musique et art

de danse et la répétition sont omniprésents.

plastique se tient dans le geste et dans le

L’idée de rythme m’a passionnée tout en me

rythme : la main restitue le geste corporel, elle

posant problème, parce que s’imposait à moi la

catalyse le rythme du corps et l’organise selon

question délicate de la notation du rythme, en

une certaine logique au sein d’une forme cohé-

particulier pour la polyrythmie. C’est ainsi que

rente. Dans mon travail, ce qui relie les deux,

je suis entrée à l’École normale de musique

c’est, d’une part, l’invisible de l’un et de l’autre

de Paris, avec ces enjeux - là. Entre - temps,

qu’est le rythme et, d’autre part, le visible,

dans cet apprentissage de la langue musicale,

c’est- à-dire la forme.

je me suis mise à dessiner pour pallier le fait que je ne parvenais pas encore à trouver

Votre travail procède le plus souvent

mon rythme et à noter ma musique. Peu à

par répétition. Quelle force opiniâtre

peu, mon langage plastique s’est révélé être

vous pousse à rejouer le même geste ?

aussi marqué par la répétition, ce qui m’a beaucoup éclairée et continue de m’éclairer

Pour qu’il y ait rythme, il faut qu’il y ait répéti-

sur mes choix en tant que compositrice. Je

tion et périodicité d’une structure. Parmi les


signes que j’ai inventés, il y a celui, central,

deux autres, exclus de l’action, semblent

qui reprend l’esthétique de la graphie

occuper le temps de leur impuissance.

arabe, mais qui en réalité ne renvoie à rien

Dans votre propre démarche, quelle place

de connu. Je le répète, je le martèle, j’y

prennent ces rapports actif/passif et

affirme presque l’erreur, dans une logique

libération/aliénation ?

ambivalente : j’invente un système qui interdit l’erreur tout en s’enracinant dans une erreur

La répétition dit l’impossibilité d’être parfait. Elle

inaugurale, dans un signe qui ne renvoie à

ne peut que tendre vers une sorte d’asymptote

rien. Je suis prise dans une double fatalité de

inatteignable. Il y a une volonté de contrôle

l’écart : d’une part à cause d’un motif cardinal

dans la répétition : il s’agit de maitriser le retour

qui s’écarte d’une orthodoxie calligraphique,

du motif. Dans la musique comme dans le

d’autre part parce que je ne peux que me

dessin, je cherche à la fois à maitriser l’outil et

tromper puisque je ne peux pas répéter à

à maitriser le corps. Il y a quelque chose de

l’identique. Cette notion d’imperfection est au

mystique dans cette répétition, quelque chose

cœur de la logique de composition de Changing,

comme le choix de s’abandonner au caractère

la pièce musicale écrite pour la performance

infini de la répétition. C’est le seul endroit qui

Still working... La musique repose sur la répéti-

me permette la passivité sage, l’acceptation du

tion d’un motif à trois intervalles, suivant un

cours des choses. C’est aussi en répétant que

rythme écrit. Pour l’enregistrement de la pièce,

je cherche le sens de ma pratique : comme le

j’ai répété ces motifs, mais à la main. Comme

prisonnier, je note, suivant un rythme particulier

ce n’est plus uniquement la machine qui fait

qui devient une mesure pour soi. Cette nota-

le loop, des choses imprévues apparaissent.

tion m’impose un rythme, mais également

La musique se décale, elle laisse la porte

enregistre mon activité. Elle se double d’un

ouverte à d’autres possibilités : elle permet de

second statut, celui du témoignage, qui reste

« l’entre ». À la fois plastiquement et musicale-

pour après soi. Je tente de mesurer ce temps

ment, je m’intéresse à la manière dont la main

qui m’échappe, et tout à coup j’en prends

répète imparfaitement, en ouvrant l’horizon du

possession par la mise en place d’un rituel : les

retour de l’identique à la possibilité de l’altérité.

lignes deviennent la nouvelle unité du temps

C’est dans cette altérité que se loge pour moi

subjectif de la conscience, leur survivance est

la notion de création.

le document qui atteste ma présence.

Quand on vous voit au travail, on pense au

Dans les Cahiers de punition, vous empilez

dressage du jeune élève de conservatoire

des lignes jusqu’au vertige : vous paraissez

qui répète jusqu’au malaise, à la brodeuse

cependant plus proche d’une sorte de

de la guerre de Cent Ans ou au détenu

transe extatique que de la purge punitive.

qui accumule sur le mur de sa cellule les bâtons de ses jours enfermés. Chez le

Le processus qui fait le lien dans ma pratique

premier, la répétition comme condition

entre la musique, le dessin et la danse, c’est la

du progrès est libératrice, tandis que les

répétition d’un même mouvement, qui en outre


renvoie à l’apprentissage même de ces

marquée par le mythe de la grande école tant

médiums. Le rituel peut au départ s’apparenter

désirée par mon père. J’ai été frappée par les

à une transe, au cours de laquelle on a envie

boîtes aux lettres des élèves qui s’étirent par

de perdre connaissance. Libérateur, ce désir

milliers sous forme de grands meubles en bois.

d’oubli se double de la volonté de laisser

Ce caractère répétitif des boîtes me renvoyait à

une trace, comme pour me justifier de cette

mon propre travail. J’y voyais déjà un immense

jouissance. Contrairement à la danse qui ne

polyptyque répétant le même motif, faisant de

laisse pas de trace, le dessin et l’écriture de

la multitude une unité. J’y ai alors ajouté ma

la musique résistent à ce caractère absolu-

propre identité par le biais de mon signe que

ment éphémère de la transe : cette écriture

je répète et colle sur chaque boîte aux lettres.

lancinante que l'on retrouve dans les différents

En créant ce grand polyptyque qui relie tous

aspects de ma pratique, c’est pour moi à la fois

les noms, les lisse entre eux, les replie les uns

la transe et la trace de la transe.

sur les autres, j’interroge la dialectique entre appartenance au groupe et identité propre,

Quel a été le point de départ de votre rési-

tout en me collant littéralement sur la propre

dence à l’Espace d’art contemporain HEC ?

individualité de chaque étudiant.

C’est une question de rencontre, de hasard

Pour la première fois, vous passez du mur à

qui n’en est qu’à moitié un. Mon lien avec cette

la vitre pour poursuivre vos punitions dans

école est lointain, puisque j’ai raté le concours

les airs. Qu’a changé pour vous ce support

d’entrée après une année de prépa HEC. Des

transparent ?

années plus tard, on m’offre la possibilité d’y entrer autrement, via l’Espace d’art contem-

Au départ déjà, le passage du cahier au mur

porain HEC, pour y développer mon travail

était comme un passage au tableau, du devoir

plastique.

à la colle : il y a dans ce glissement la notion de dévoilement de l’intime au public. Le dépasse-

À l’occasion de votre résidence à HEC,

ment de l’abstraction par la représentation du

vous reprenez vos Cahiers de punition en

corps dans l’espace public marque le début

les déclinant suivant différents formats et

de la forme « performance ». J’étais très émue

supports pour coller à la morphologie du

de procéder sur les vitres. Au fur et à mesure,

campus. Cette conjonction entre le projet

je voyais les étudiants vivre, se rencontrer...

(dont le référent central est le contexte

tandis que de mon côté j’étais coincée derrière

scolaire) et le lieu de son exposition (une

cette vitre, privée de leur communauté. J’étais

grande école) semble annoncer l’épiphanie

à la fois ici, devant eux, mais seule. Je me sen-

de votre démarche.

tais séparée d’eux sous leurs propres regards. La surface vitrée est une interface qui à la fois

En rencontrant l’espace d’art, j’étais très émue

sépare et relie : c’est une sorte de membrane

de découvrir le campus HEC dont j’avais été

poreuse qui laisse passer un certain nombre

exclue par avance au sortir de l’adolescence

de choses, mais en filtre d’autres.


Dans votre dernière performance dansée,

dans les postures que mon corps adopte et

vous ne procédez plus par répétition, mais

dans la pièce pour piano, Changing, composée

par rupture, en passant brusquement d’une

pour la performance. Le tracé (graphique ou

pose immobile à une autre.

physique, ligne ou mouvement) s’étoile dans des triangulations qui se décalent, et en se

Effectivement, mais la rupture n’est pas brutale.

décalant créent une figure neuve à la mor-

C’est plutôt un changement de direction dans

phologie complexe. Du simple au complexe,

la continuité du mouvement. J’y vois une

mais aussi de l’état d’immobilité à la forme la

invitation au changement : il y est plus question

plus élémentaire du mouvement : la marche.

de transformation que de rupture à proprement

Marcher dans un cercle, comme dans une

parler. Des modifications apparaissent dans la

langue et suivre les lignes tout en créant des

cohérence du mouvement global. Ces trans-

trajets toujours nouveaux.

formations restent prises dans la trame plus générale d’une méta-direction qui est celle de

Une autre vie. Vous êtes un autre artiste.

la performance dansée.

Qui êtes-vous ?

Pour les Constellations, vous modulez une

Ce serait moi : je ne peux pas échapper à mon

infinité de triangulations dans l’arène close

histoire. Je fais ce que je fais pour m’accepter

d’un cercle. Pour les Cahiers, vous êtes

et me vivre moi-même. On ne peut pas être

bloquée, mais encore une fois à l’infini,

quelqu’un d’autre, ce serait se punir que de

face au même signe. Pour votre perfor-

vouloir être un autre . En revanche, l’autre

mance, vous arpentez inlassablement le

est aussi en soi : dans ce dialogue entre mes

même espace circulaire. Vous construisez

différentes figures, passant du dessin, à la

des protocoles qui dialectisent les notions

musique, à la danse, s’étire la longue quête

d’enfermement et d’infini, matérialisées

d’identité qui questionne et réconcilie mes

dans la figure du cercle.

différents visages.

Les Cahiers de punition racontent l’apprentissage de l’écriture par la répétition. C’est en prenant conscience de la notion d’alphabet que je me suis aperçue que j’y étais enfermée, mais qu’en même temps, celui-ci m’ouvrait à une infinité de combinaisons possibles. Pour le motif « constellations », je construis des triangulations dans un cercle, en reprenant le principe ternaire de la langue arabe. Dans la performance Still working… construite sur le motif « constellations », la forme géométrique du triangle se trouve également transposée




les vitres Dessins au feutre sur les baies vitrées du campus / 2012 Les baies vitrées sont recouvertes de motifs dessinés. Les différentes pièces qui participent du projet global reprennent deux motifs cardinaux dans le travail de Myriam El Haïk. Tous deux déclinés indéfiniment, ils fonctionnent à l’inverse l’un de l’autre, construisant une démarche dont la structure interne est dédoublée suivant deux axes antagonistes. Si le motif « constellations » semble délimiter un ensemble exclusif et borné, le motif « écriture », lui, s’échappe à l’infini. L’un comme l’autre consignés sur la surface transparente des vitres de la salle de classe, ils s’affranchissent de leurs supports habituels, mais révèlent, en s’y collant, la présence d’une clôture invisible. Le motif « écriture » répété à l’infini nous ramène à un sentiment particulier d’exclusion, un isolement oublié qui nous remonte de l’enfance : celui éprouvé par l’élève au travail, perdu dans son effort. L’exercice infligé, pris entre ciel et terre, n’en est pas moins une machine émancipatrice. En ouvrant l’horizon bouché du cahier ou du tableau noir, l’élève suit le mouvement libératoire mais, toujours forcément manqué, initié par le poète qui, malgré ses tentatives d’évasion, adhère indéfectiblement au réel.









les boîtes aux lettres Feutre sur ruban adhésif et collage sur bois / 2012 Myriam El Haïk reprend le motif « écriture » pour le superposer sur les ensembles que constituent les boîtes aux lettres des étudiants HEC. Tout s’enracine dans l’impression singulière éprouvée par l’artiste à la découverte de cet élément de mobilier du campus. Les boîtes individuelles sont regroupées dans des blocs constitués de panneaux de bois vernis, qui renvoient par leur morphologie à celle du grand ensemble urbain, de la barre d’habitation ou, dans ce cas précis, du logement étudiant. La vie sur le campus se livre alors dans une vue fractale, où l’habitat individuel ainsi que le siège des échanges personnels sont pris, chacun à leur échelle, dans une même articulation au groupe. Lissé dans cette métastructure qui fonde une sorte de communauté, l’individu se tient en équilibre entre affirmation de soi et appartenance au groupe. Par son intervention globale sur chaque bloc de boîtes aux lettres, Myriam El Haïk vient souligner cette identité dédoublée, en ajoutant du liant entre toutes les boîtes individuelles sans pour autant y occulter les noms propres.







Myriam El Haik Au départ, il y a le corps de l’élève : l’apprentissage passe par le dressage de ce corps. Il faut répéter pour savoir, et répéter à l’infini pour être sûr de se souvenir. Dans son cahier de punition, l’écolier se corrige : il prend à sa charge son éducation en imitant le modèle canonique. Il sait que l’enjeu est crucial. L’assimilation du canon par l’élève est la condition de possibilité de l’assimilation de l’élève par le groupe. C’est une affaire de normes : l’individu n’est soluble dans le groupe que si la norme est soluble dans l’individu. En acceptant la contrainte, il parvient d’abord à intégrer la communauté, puis, à s’engager sur le chemin du libre arbitre, entendu comme positionnement relatif à une norme communautaire. Ce point d’inflexion, ce moment de maturité partielle durant lequel coercition acceptée et affirmation de soi se touchent, est le lieu du travail de Myriam El Haïk. À travers la contrainte et malgré la répétition lancinante, un glissement s’est opéré vers la revendication de sa propre singularité : la volonté s’affermit dans le retour opiniâtre du même motif. Ce signe espiègle, qui singe le langage des autres sans pour autant y appartenir, ne renferme d’autre signification que l’expression d’une existence irréductible à toute autre. De signe, il devient signature. Sur le campus HEC, il recouvre les vitres, les écrans, les boîtes aux lettres des étudiants. L’élève docile s’est mué en créateur souverain, sorte de muse Écho mal enchaînée à sa malédiction. Ce que Myriam El Haïk aligne sagement à l’infini, ce ne sont plus les mots des autres, mais le signe qu’elle s’est choisi, expression insolente d’une identité propre. Cette mise en tension entre aliénation et libération est le fruit d’une pratique déviante de la répétition. Elle se retrouve au cœur du travail sur les baies vitrées, dans lequel les piges s’affranchissent du support qui les enferme. Prises entre ciel et terre, les lignes de punition suivent le chemin du cancre, du rêveur, du distrait. Elles s’échappent du cahier et passent par la fenêtre. Nulle école buissonnière pour les performances dansées et les pièces sonores de Myriam El Haïk fermement tenues dans un espace clos et composées de modules inaltérables : nous assistons à l’émergence d’une sorte de langage élémentaire. Les décalages qui s’introduisent dans le retour du même motif perturbent le rythme et nous conduisent à travers une infinité de combinaisons musicales ou spatiales. La naissance du langage se tient ici, dans l’enfermement atomique du nombre fini de ses lettres et dans l’ouverture à l’infini des possibles assemblages de ses blocs. La pratique de Myriam El Haïk relève de ce paradigme : elle procède par langage et parle de ce qu’est la langue. Celle-ci est à la fois la méthode et le sujet de son travail. On y éprouve l’effroi sublime du petit enfant, pour la première fois dépassé par l’idée de la combinatoire. Le langage alphabétique, bien que corseté dans son abécédaire, ne souffre aucune limite. L’échappée immobile de la langue permet de se propulser à l’infini sans pour autant quitter l’arène close de sa base élémentaire. Elle dévoile la part proprement mystique qui loge au cœur de l’alphabet : l’impossible dialectique qui tient ensemble les notions d’enfermement et d’infini, où chaque point de clôture contient en même temps sa propre ligne de fuite.



HEC ID Installation-vidéo pour X écrans / 2012 Dans une salle de classe où des tables en verre sont superposées à des écrans d’ordinateur, Myriam El Haïk commence par inscrire son motif « écriture » sur les surfaces vitrées. Sous les traces manuscrites et par transparence, apparaît et disparaît le logo HEC flottant dans l’écran de veille. Dans une démarche autotélique qui met en abyme les effets d’écrans multiples, l’idée émerge de créer une vidéo qui rendra compte du dispositif premier, tout en le complexifiant par déplacement vers un écran supplémentaire. La vidéo, pour être vue, suppose d’être projetée ou lue, sur ou à travers, un écran de plus. Ces effets de surfaces multiples, ces jeux de transparences, d’appropriation et de retrait, d’apparition et de disparition des deux « signatures », celle de l’artiste et celle de l’école, initient une danse nuptiale ou guerrière qui fait tourner ses protagonistes dans un face-à-face circulaire et interminable.



Three hands Triptyque vidéo / 2012 Durée : 43 s (en boucle)

Trois dessins, des constellations de formes et de durées distinctes, sont animés simultanément et répétés à l’infini. Le principe du motif « constellations » est simple : après avoir tracé un cercle comme on délimite une surface de jeu, la ligne tirée par Myriam El Haïk rebondit à l’intérieur du périmètre circulaire suivant une logique ternaire. Le tracé évolue alors librement et en trois temps dans cet espace dont la borne ne présente aucune aspérité : le dessin se construit patiemment suivant les règles de ce protocole de travail qui, en invitant au décalage intensif des rebonds, permet l’émergence d’une figure complexe aux airs de galaxie. De même que les cycles ternaires de la ligne se déplacent, les trois vidéos, de durées variables mais présentées en boucle et simultanément, se décalent insensiblement au fur et à mesure de leur projection. Malgré leur abstraction géométrique, ces glissements multiples apparaissent comme la métaphore d’une infinité de chemins possibles, en dépit du protocole et du rythme imposés par le groupe.







Still working... Performance / 2012 Musique : Changing pour piano de Myriam El Haïk Son et réalisation musicale : Étienne Graindorge Danse : Myriam El Haïk, avec la complicité chorégraphique de Radhouane El Meddeb Robe : Tina Miyake, tissus originaux de Myriam El Haïk Durée : 20 min

L’artiste se tient immobile au centre d’un cercle tracé au ruban adhésif sur le sol. La surface de cet espace circulaire est criblée de lignes qui reprennent le motif « constellations ». La composition musicale répète des échantillons sonores qui se décalent insensiblement. Tout en suivant la grille imposée par les dessins au sol, l’artiste s’anime d’un coup pour glisser en un instant d’une posture à une autre. À nouveau, c’est l’immobilité avant le prochain bond. De transformations en transformations, le corps cherche sa place dans l’arène blanche. Composée pour la performance Still working…, la pièce pour piano Changing repose sur un jeu de répétition, de superposition et de combinaison, à partir d’un motif à trois points d’appui. Dépliée en trois parties, elle contraint à un déplacement continu du motif. Ce décadrage constant conduit l’auditeur à travers une multitude de points d’écoute, comme autant de perspectives différentes sur l’ensemble de la pièce. Dans le retour inexorable du même pattern, la musique semble rester statique. Pourtant, les notes et les intervalles s’étirent, avancent, tournent et se mêlent, tissant ainsi une trame sonore évolutive. Distillée par moments, la base arpégée, constante et bien distincte, joue le rôle de témoin de ce changement permanent.










L’Espace d’art contemporain HEC remercie la Direction générale du campus, les services techniques et généraux ainsi que les artistes invités. Myriam El Haïk remercie Helmut Bauer (galerie Vincenz Sala Paris / Berlin) et Jonathan Debrouwer Coordination générale Anne-Valérie Delval & Maxime Chevillotte Textes Clémence Agnez Crédits photographiques Elodie Laleuf Nabil Boutros Maquette Arthur Ballay (ballay.arthur@gmail.com) Espace d’art contemporain HEC 1, rue de la Libération 78 350 Jouy-en-Josas + 33 1 39 67 94 55 www.hec.fr/espaceart ISBN 978-2-9543844-2-9 8€

Créé en 1999, l’Espace d’art contemporain HEC expérimente de nouvelles pratiques et des rencontres inédites entre des artistes et une institution d’enseignement supérieur. Il a pour objectif selon Paul Dini, un ancien HEC qui a impulsé sa création, « d’apprendre à regarder ». Situé au cœur du campus, l’Espace d’art contemporain s’adresse aux étudiants et à la communauté HEC au sens le plus large. Il propose des expositions et résidences d’artistes, des conférences, des séminaires de recherche et de réflexion ainsi que des publications.




Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.