Des fibres végétales marines pour des matériaux biodégradables Laboratoire
LLEE E V U L NO RMU O F
Toute la science en Bretagne
n°250
Co m ch nu me an m nt ge éri le no qu son tre e vie
DU SON NEUF!
JANVIER 2008
Des fibres végétales marines pour des matériaux biodégradables Laboratoire
LLEE E V U L NO RMU O F
Toute la science en Bretagne
n°250
Co m ch nu me an m nt ge éri le no qu son tre e vie
DU SON NEUF!
JANVIER 2008
À propos de science et de laïcité
© NICOLAS GUILLAS
Aujourd’hui, le darwinisme et les théories de l’évolution qui en découlent sont l’objet de nombreuses attaques sournoises de la part des créationnistes. Les arguments avancés dans les ouvrages édités et diffusés largement n’ont rien à voir avec la science et ils entrent en contradiction avec notre conception de la laïcité à l’Espace des sciences. Depuis plus de vingt ans dans la revue Sciences Ouest, nous plaçons la démarche scientifique au
premier rang de nos priorités. Car il résulte de la vérification expérimentale des hypothèses de recherche une évolution permanente de l’état de nos connaissances dans tous les domaines. Dans cette nouvelle formule de Sciences Ouest, que nous avons voulu plus accessible au grand public, nous continuons plus que jamais à travailler avec cette même rigueur et en toute indépendance. PAUL TREHEN PRÉSIDENT DE L’ESPACE DES SCIENCES
n° 250 Janvier 2008
DÉJÀ DEMAIN LES BRÈVES Architecte acousticien
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LES MORDUS DE REQUINS EN CONGRÈS À BREST LA RUBRIQUE LIVRES LA RUBRIQUE INTERNET
4 6 7 © GETTY IMAGES/GIUSEPPE CACACE
LE DOSSIER
CE QUE JE CHERCHE PAR P. WOLOSZYN
DÉJÀ DEMAIN LES ACTUS DES FIBRES MARINES POUR DES MATÉRIAUX BIODÉGRADABLES
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DANS LA CANETTE, UNE THÉRAPIE CONTRE LE CANCER
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L’AGENDA DE LA RÉDACTION Toutes les expositions, conférences, sorties et aventures du mois
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L’ÉPREUVE PAR 7 SAMUEL BLANC, 15 MOIS EN TERRE ADÉLIE Une interview non scientifique
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DU SON NEUF DANS 10 à 18 NOTRE VIE Y.-F. KEMENER : IPOD ET TRADITION
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© DR
COUVERTURE © JUPITER IMAGES
LE SON LIVE DES CONSOLES BRETONNES 12 LES DÉCORTIQUEURS DE SONS
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UNE MICROPUCE À L’OREILLE
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DES SIRÈNES EN MER D’IROISE
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POINTE SÈCHE PAR WILLIAM AUGEL
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Déjà demain CE QUE JE CHERCHE « J’écoute la ville, ses ambiances sonores. J’essaye d’en définir la rumeur. »
Plus d’une centaine de scientifiques se sont réunis fin novembre à Brest pour évoquer le sort des requins et des raies.
PHILIPPE WOLOSZYN
es requins n’ont pas très bonne réputation. Il n’empêche qu’ils sont surveillés de près par les scientifiques, qui s’inquiètent de leur disparition. Une centaine d’entre eux s’étaient donné rendez-vous, fin novembre dernier, au centre océanographique Océanopolis de Brest. Organisé par l’Association pour l’étude et la conservation des sélaciens (Apecs), seul organisme français entièrement dédié à la recherche sur les requins, les raies et à la préservation de leurs espaces, « ce congrès a été très riche puisque une vingtaine de communications y ont été présentées, souligne Armelle Jung, biologiste et chargée de mission de l’Apecs. Il a bien sûr été question de la menace qui pesait sur les requins, dont la population est décimée par une pêche excessive. » Superprédateur, le requin joue un rôle régulateur dans l’écosystème marin. Sa disparition, dans certaines régions du monde, provoque d’ailleurs des dommages collatéraux inattendus comme la multiplication d’autres poissons, tel le mérou, très friand des barrières de coraux aujourd’hui investies par des champs d’algues.
omme il y a des accordeurs de piano, moi j’accorde les rues. J’étudie les rapports entre son et espace en milieu urbain. J’ai créé un modèle numérique de diffusion du son pour tester l’influence de la géométrie des façades. Lors de ma dernière expérience, j’ai évalué l’impact de ces géométries sur la perception du son dans les rues. Les différences sont inexistantes à l’oreille de tout un chacun, mais des musiciens, des ingénieurs du son peuvent quelquefois les percevoir. Pour valider le modèle - c’est une étape fondamentale en acoustique - j’ai passé quelques matinées sur le terrain, dans des rues privées de piétons et de voitures grâce à des autorisations préfectorales. Là, je diffuse un son et je prends des mesures en des points “stratégiques”. Ce sont des manipulations qu’il faut préparer six mois à l’avance, pour obtenir les autorisations. Lorsque je rentre, les enregistrements d’une matinée vont m’occuper pendant au moins un mois. Aujourd’hui je prépare un nouveau travail pour évaluer la perception du son dans les trois dimensions. C’est un phénomène qui varie beaucoup, selon les hauteurs des immeubles notamment. Il faut que je trouve des tours dans lesquelles je peux poser des microphones à tous les étages... Mon but n’est pas de corriger la géométrie des façades ou de réinventer l’architecture des immeubles. Je me contente de faire avancer la connaissance, afin que d’autres puissent s’en inspirer pour fabriquer des villes plus agréables à vivre. »
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Autre constat des scientifiques : la dégradation inquiétante de l’habitat de ces animaux venus du fond des âges. « Depuis environ dix ans, nous effectuons chaque été des relevés en mer d’Iroise où le requin pèlerin est assez présent, explique Armelle Jung. Cette année, pour la première fois, nous n’en avons observé aucun en surface ! Par contre, nous avons remarqué une dégradation importante de la qualité du zooplancton qui leur sert habituellement de nourriture. » Les dernières recherches menées par les biologistes en mer du Nord sur les nurseries de raies, cousines des requins, mettent aussi en évidence un fort déclin. « Les champs magnétiques des éoliennes installées dans le secteur sont montrés du doigt : ils déstabilisaient le développement de ces animaux. » Rens. : Armelle Jung Tél. 02 98 05 40 38 armelle@asso-apecs.org
© OCÉANOPOLIS
ARCHITECTE ACOUSTICIEN
Les mordus de requins en congrès à Brest
PROPOS RECUEILLIS PAR CÉLINE DUGUEY Rens. : Philippe Woloszyn Tél. 02 99 14 17 73 philippe.woloszyn@univ-rennes2.fr
Philippe Woloszyn travaille au laboratoire rennais de recherche sur l’espace géographique et les sociétés de l’Université Rennes 2.
© CÉLINE DUGUEY
© CÉLINE DUGUEY
Il est l’un des neuf bénéficiaires de l’allocation d’installation 2007 de Rennes Métropole. Elle lui a permis d’investir dans un matériel d’enregistrement portatif.
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LES ÉCHOS DE L’OUEST PÔLES DE COMPÉTITIVITÉ ÉVALUATION EN COURS ● L’État a confié au consortium Boston consulting group/CM international la mission d’examiner la situation et les perspectives de l’ensemble des pôles de compétitivité français, d’ici juin 2008.
ENVIRONNEMENT REPRÉSENTATION BRETONNE À POLLUTEC ● Dix-sept écoentreprises étaient présentes sur le stand de la Chambre régionale de commerce et d’industrie de Bretagne, lors du salon des solutions d’avenir au service des enjeux environnementaux et économiques, du 27 au 30 novembre à Paris-Nord Villepinte.
Rens. : www.ecologie.gouv.fr/ Evaluation-des-poles-de.html
Rens. : Loïc Evain Tél. 02 99 33 63 75 levain@rennes.cci.fr
Depuis juin 2006 des technologies de la mobilité sont testées à Rennes1 dans le cadre d’un projet européen.
Les nouveaux chemins de la communication aviguer sur le net, participer à une visioconférence, consulter ses mails dans le bus et sans coupure : ce sera bientôt possible grâce à un réseau mobile, testé actuellement à Rennes sur le campus de Beaulieu, par une équipe qui réunit, en France, l’École nationale supérieur de télécommunication, l’Institut national de recherche en informatique et automatique, les entreprises Thales et SFR. Baptisée Plateforme anémone, cette expérimentation est opérationnelle depuis avril 2007 et a nécessité, entre autres, l’installation de quarante bornes Wifi dispersées à travers le campus. Cette plate-forme permet à un routeur mobile installé dans un véhicule de capter les différents réseaux disponibles, qu’ils soient Wifi, GSM (celui des téléphones portables) ou 3G (plus performant que GSM) et de choisir le mieux adapté au besoin de l’utilisateur et de son objet communicant. Les différents appareils connectés à la plate-forme peuvent aussi échanger des informations entre eux, sur leur position, par exemple. Le projet doit per-
© CÉLINE DUGUEY
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2008 : UNE ANNÉE CONSACRÉE À LA TERRE ● Le 12 février marquera, au siège de l’Unesco à Paris, le lancement de l’Année internationale de la planète Terre. Cette initiative de l’Unesco et de l’Union internationale des sciences ASA géologiques veut faire prendre ©N conscience du rôle important des géosciences dans nos sociétés. En Bretagne, le Centre armoricain de recherche en environnement coordonne le projet, qui s’adresse autant au grand public via des expositions et des conférences qu’aux scientifiques rassemblés autour des programmes de recherches spécifiques.
mettre aux entreprises et laboratoires travaillant sur la mobilité de tester leurs services dans un environnement proche de la réalité. Rennes est l’une des trois villes européennes couverte par la Plate-forme anémone, avec Oulu en Finlande et Monreale en Italie.
SIMULER LES EFFETS DE L’EAU SUR LES CONSTRUCTIONS ● À Nantes, le Centre scientifique et technique du bâtiment lancera en mars 2008 la construction de la plate-forme Aquasim. Elle permettra une simulation de la collecte, du transport et du traitement des eaux, ainsi qu’une reproduction accélérée des effets de l’eau sur les constructions et leur environnement. L’ouverture est prévue fin 2008.
Rens. : César Viho cesar.viho@irisa.fr
Rens. : Jean-Michel Axès Tél. 02 40 37 20 00 cape@ctsb.fr
Une équipe de recherche de l’Institut d’électronique et télécommunications de Rennes récompensée.
Télédétection : comprendre l’environnement par satellite
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pas besoin de soleil pour produire des images. Un travail reconnu : l’équipe Saphir a reçu trois prix lors du dernier colloque IGARSS07, à Barcelone, qui réunit chaque année les équipes de ce domaine. Elle a également conçu PolsarPro, un outil de travail gratuit et disponible en ligne sur le site de l’agence spatiale européenne (ESA) à destination des chercheurs et des doctorants. Rens. : Éric Pottier Tél. 02 23 23 57 63 Eric.pottier@univ-rennes1.fr
PARTENARIAT MOBILISATION ET INTÉGRATION DES PME ● C’est l’axe essentiel de la convention de partenariat signée le 14 novembre entre le pôle de compétitivité “Images et Réseaux” et le réseau des technopoles de Bretagne.
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© ESA 2002
ne image satellite, c’est un peu comme une photo “vue du ciel”, un paysage. Mais il est possible d’y lire beaucoup plus d’informations grâce à la télédétection. L’équipe Saphir de l’Institut d’électronique et télécommunication de Rennes est spécialiste dans ce domaine. À partir d’une image satellite, elle peut analyser l’environnement : calculer l’épaisseur d’un manteau neigeux, la hauteur ou la densité d’une forêt. Et ce 24h/24 ! Car le satellite n’a
Rens. : Patrick Jezequel Tél. 02 96 05 82 50 patrick.jezequel@technopole-anticipa.com
LABORATOIRE UN CHERCHEUR DE ROSCOFF RÉCOMPENSÉ ● Laurent Meijer, directeur de recherche à la station biologique de Roscoff, recevra officiellement le 24 janvier le prix Jean Valade de la Fondation de France. Ses travaux dans le domaine médical sur les inhibiteurs pharmacologiques de kinases, des enzymes qui interviennent dans la synthèse des acides aminés, concernent la lutte contre la maladie d’Alzheimer.
Rens. : Alain Vulmière Tél. 02 96 48 31 55 www.images-et-reseaux.com
Rens. : Laurent Meijer Tél. 02 98 29 23 39 meijer@sb-roscoff.fr JANVIER 2008 N°250 SCIENCES OUEST
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Déjà demain
Les herbiers de zostères, ici en mer d’Iroise, abritent une biodiversité importante. © YVES GLADU
LABORATOIRE Pour créer des matériaux biodégradables mais résistants à l’eau, un chercheur de l’Ifremer teste des fibres issues de plantes marines. Et c’est du solide !
Des fibres marines pour des matériaux biodégradables ésistance à l’usure, souplesse, biodégradabilité... depuis 1991 à l’Ifremer de Brest, Peter Davies s’intéresse aux qualités de divers métaux, fibres et polymères. Il est ingénieur matériaux. Son dernier sujet d’étude ? Des fibres de zostères, des plantes à fleurs marines (lire encadré), sur lesquelles il vient de publier un article(1), en collaboration avec Christophe Baley, du Laboratoire polymères, propriétés aux interfaces et com-
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posites (L2PIC), à l’Université de Bretagne sud, et des biologistes du CNRS de Rouen. Ce projet a débuté suite à une demande du Centre de valorisation des algues (Ceva), basé à Pleubian (29), qui cherchait une solution pour utiliser les tonnes de feuilles de zostères qui s’échouent chaque année sur les plages de la mer Baltique. « Nous avons tout de suite adhéré à cette idée, car les fibres d’origine marine possèdent des qualités qui nous intéressent
De la pelouse sous la mer es zostères sont des phanérogames marines, autrement dit des plantes à fleurs comme celles de nos jardins, et non pas des algues. En Bretagne on trouve deux espèces, la grande (Zostera marina) et la petite (Zostera noltii), découvertes lors des grandes marées. Elles abritent une biodiversité importante : c’est une des raisons pour lesquelles ces plantes sont protégées.
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beaucoup. À l’Ifremer, nous cherchons à mettre au point des matériaux résistants à l’eau de mer et en même temps biodégradables », explique Peter Davies.
Plus fines que le verre Et cela s’est révélé payant ! Les premiers travaux ont confirmé l’intérêt de ces nouvelles fibres. Elles sont deux à quatre fois plus fines que celles de lin ou de verre, mais très rigides, une qualité indispensable pour créer des matériaux durs. « Les fibres de zostères se sont aussi révélées résistantes, même si elles le sont moins que celles de lin. Mais ces dernières sont étudiées et améliorées depuis plusieurs années déjà », souligne Peter Davies. Pour simplifier le transport - et diminuer les coûts -, l’idéal serait aussi de travailler sur des zostères des côtes bretonnes, mais les
échouages sont ici beaucoup moins importants qu’en Europe du Nord. Quelques essais ont été effectués sur des plantes récoltées dans le Morbihan. Moins riches en fibres que celles de la mer Baltique, elles seraient moins intéressantes à exploiter. Pour connaître toutes les caractéristiques des fibres de zostères et choisir au mieux leurs applications, Peter Davies envisage de tester leur longévité dans l’eau de mer, leur résistance à l’abrasion... D’autres points restent également à développer : les propriétés étudiées sont variables selon l’âge de la fibre, et donc selon la saison de récolte. Si une exploitation est envisagée, la récolte, la sélection des herbes seront à optimiser. « Lorsqu’on récolte un kilo de zostères, on n’en extrait que quelques grammes de fibres, ajoute Christophe Baley. Pour
obtenir des fibres en grandes quantités, il faudra aussi envisager la culture des zostères, comme on cultive déjà les algues. » Car même si on en est loin, la question des applications est au cœur du sujet. Les chercheurs s’intéressent à la possibilité de coupler les fibres à une matrice de polymères pour créer des matériaux composites. Ces futurs travaux sur les zostères s’intègrent au projet Navecomat du pôle de compétitivité Mer, qui vise à construire des bateaux en matériaux biodégradables. Lancé fin 2007, le projet s’étendra sur trois ans, pour écoconcevoir un prototype de bateau. ALICE VETTORETTI (1)
P. Davies, C. Morvan, O. Sire, C. Baley (2007) Structure and properties of fibres from seagrass (Zostera marina), Journal of materials science, 42 : 4850-4857.
Peter Davies teste la résistance des brins de zostères. © ALICE VETTORETTI
D’un seul brin d’un centimètre, les chercheurs extraient des dizaines de fibres dix fois plus fines qu’un cheveu !
Dans la canette, une thérapie contre le cancer ENTREPRISE La jeune société Nutrialys produit des aliments pour les patients atteints de cancer. Cette thérapie nutritionnelle concentre plus d’une décennie de recherche médicale à Rennes. epuis quelques mois, 120 patients (1) souffrant de cancer ou de douleurs chroniques consomment des aliments mis au point par la société Nutrialys, à Saint-Grégoire, près de Rennes. Baptisés Castase et Polydol, ces aliments de thérapie nutritionnelle sont des liquides, au goût de biscuit ou de fraise, à boire dans des canettes de 250 ml. Prescrits sur ordonnance médicale et remboursés par la Sécurité sociale, ils sont le fruit de plus d’une décennie d’études scientifiques, au sein du Groupe de recherche en thérapeutique anticancéreuse (Gretac), à l’Université de Rennes 1. « La première idée remonte à 1990, se souvient le professeur Jacques-Philippe Moulinoux, président de Nutrialys. Quand j’ai vu les premières commandes de canettes et les premières ordonnances médicales, j’ai trouvé ça extraordinaire ! » Ces boissons contiennent des protéines, des lipides, des glucides et des sels minéraux. Six canettes remplacent toute l’alimentation quotidienne ! Leur originalité est l’absence de polyamines,
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présentes dans de très nombreux aliments. Ces molécules, ainsi que l’a démontré la recherche hospitalo-universitaire française, et en particulier les scientifiques du Gretac dans plus d’une centaine d’articles scientifiques, sont nocives quand on souffre d’un cancer. « Nous avons démontré que la réduction de l’absorption de polyamines réduit la croissance tumorale et stimule certaines défenses immunitaires contre le cancer. » Ces découvertes, ainsi que celles sur la douleur, sont protégées par des brevets, appartenant à l’Université de Rennes 1. Depuis le 26 novembre 2007, des licences exclusives ont été signées avec Nutrialys.
Pas d’effets secondaires Pour l’instant, les patients sont très satisfaits de leur traitement... sauf que les arômes ne sont pas assez variés. Et leurs médecins ont été séduits, « car ce n’est pas invasif : on change l’alimentation, mais on ne touche pas au traitement lui-même », précise Jacques-Philippe Moulinoux. Il n’y a pas d’effets secondaires, comme des troubles digestifs, et c’est une nou-
veauté. « Plutôt que d’ajouter des médicaments dans l’alimentation, nous en retirons les polyamines, c’est une technologie de rupture, estime Bruno Chevallier, le directeur de Nutrialys. Nous apportons de l’innovation, car c’est le premier aliment capable de lutter contre le cancer et la douleur. » Le caractère novateur de Nutrialys a été reconnu par deux prix. Jacques-Philippe Moulinoux est le lauréat 2005 et 2007 des 7e et 9 e concours nationaux d’aide à la création d’entreprises de technologies innovantes. Créée en février 2006, la société compte aujourd’hui quatre salariés. Les premiers patients ont consommé 20 000 canettes, produites par Coralis, du groupe Agrilait, à Rennes. D’autres programmes nutritionnels sont à l’étude sur des maladies neurodégénératives. Et des partenariats s’établissent pour l’exportation. NICOLAS GUILLAS (1)
Tous les cancers sont concernés, excepté les leucémies. Les deux tiers des patients souffrent d’un cancer, les autres ont des douleurs chroniques.
CONTACT Bruno Chevallier Tél. 06 07 76 49 17 b.chevallier@nutrialys.fr
© L2PIC-UBS
Née d’un laboratoire universitaire, la société Nutrialys est dirigée par Bruno Chevallier (à gauche) et JacquesPhilippe Moulinoux. © NICOLAS GUILLAS
CONTACTS Peter Davies Tél. 02 98 22 47 77 peter.davies@ifremer.fr Christophe Baley Tél. 02 97 87 45 53 christophe.baley@univ-ubs.fr
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LE DOSSIER DE
DU SON NEUF D COPIÉ, BALADÉ, COMPRESSÉ, LE SON NUMÉRIQUE CRÉE LA NOUVELLE BANDE-SON DE NOTRE EXISTENCE. LES SOCIOLOGUES LA DÉCODENT. ui se souvient de son premier baladeur ? Des joies de la cassette à retourner, des piles défaillantes et du casque peu hermétique qui sonorise un bus entier ? L’évolution des technologies a largement contribué à l’amélioration des performances et de la qualité des appareils d’écoute. Mais pas seulement. Elle touche aussi les modes de diffusion, qui se complexifient. Internet démultiplie l’accès aux œuvres, tant en termes de champs que de volumes, et facilite les échanges. Résultat : on écoute plus et différemment. Avant l’ère des bala-
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deurs, les moments dédiés à l’écoute de la musique se passaient le plus souvent dans la sphère privée. Aujourd’hui, ils se superposent à d’autres actions, un trajet à pied ou dans les transports en commun. L’attention n’est pas la même selon que l’on est chez soi ou dehors.
Son et mobilité Cette écoute ambulante a généré de nouveaux comportements. « Au début des années 90 , les personnes casquées généraient
Écouter de la musique en marchant pour esthétiser des situations de la vie quotidienne.
de l’embarras et les réactions étaient très critiques », se souvient Jean-Paul Thibaud(1), du Centre de recherche sur l’espace sonore et l’environnement urbain (Cresson - UMR CNRS/École nationale supérieure d’architecture de Grenoble). Pour le chercheur cela révèle de nouvelles formes d’échange. « Avoir un casque sur les oreilles permet de gérer notre rapport à autrui ; de n’entendre que ce qui nous intéresse. Cela traduit aussi le désir d’esthétiser des situations ordinaires, voire répétitives, comme le trajet du domicile au travail. En écoutant de la musique, on se place comme dans un film. » Ce mode d’écoute s’est totalement banalisé. On s’attend à croiser des gens avec des casques dans la rue. Le son est associé à la mobilité.
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Le son des concerts Une société bretonne a inventé la console de mixage numérique. © GETTY IMAGES/GIUSEPPE CACACE
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Une onde acoustique Physiciens et informaticiens font parler le son.
© JUPITER IMAGES/PEARLE DAVIDSON
© ALICE VETTORETTI
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Tout ouïe ! L’oreille, un organe fabuleux et fragile. © NICOLAS GUILLAS
ANS NOTRE VIE Les nouvelles technologies offrent aussi des possibilités inédites en termes de création. N’importe qui peut aujourd’hui faire des enregistrements de bonne qualité, créer son propre son, comme la sonnerie de son téléphone portable, par exemple.
La nouvelle place du son Cet élargissement des compétences touche aussi les professionnels. Les savoir-faire sur le son sortent de plus en plus du monde du spectacle, où ils sont nés, pour s’appliquer à d’autres domaines artistiques : des expositions, l’aménagement d’une ville. Les sons de la vie quotidienne sont devenus des objets d’étude à part entière. « Les premiers mouvements de recherche sur les environnements sonores se sont développés au début des années 80, poursuit Jean-Paul Thibaud. Leurs résultats commencent seulement à être utilisés par les urbanistes, qui jusque-là ne parlaient du son qu’en termes
Le chanteur traditionnel, l’iPod à l’oreille es musiciens sont les premiers concernés par les technologies du son. Yann-Fañch Kemener, l’un des meilleurs chanteurs traditionnels bretons, a acheté son premier magnétocassette en 1973, pour enregistrer les vieux chanteurs du Centre-Bretagne. Il a ensuite utilisé des magnétophones à bande, puis un enregistreur numérique. L’iPod, il l’a depuis trois ans.
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« Dans le train vers Paris, quand je vais au studio, j’écoute mes collectages. Je réécoute des textes, des airs, je me dis : tiens, il chantait comme ça ! » Mais c’est la rencontre avec le créateur radiophonique Yann Paranthoën qui l’a marqué. « Il m’a appris la spatialisation du son. Il travaillait comme un peintre, qui plaçait des voix à droite, à gauche, derrière. J’ai alors compris que le
son était aussi un objet de création. » Et les enregistrements de Yann-Fañch Kemener n’ont plus rien à voir avec ses débuts : « On peut traiter séparément la guitare, le violoncelle et la voix, que l’on peut « élargir ». Il y a tellement d’effets possibles ! » Le chanteur aime d’ailleurs travailler avec les gens du son : « Ils ont l’oreille aiguisée ! » NICOLAS GUILLAS
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