Sous protection depuis un siècle
Ornithologie
Planétologie
Sur Mars, à la recherche du bon caillou
La revue de l’Espace des sciences
www.sciences-ouest.org
n°302
Télécommunications
OCTOBRE 2012
BESOIN DE SUPER-RÉSEAUX Mobilité
Le très haut débit attendu par les utilisateurs
Performances Les réseaux deviennent intelligents
Énergie
Des antennes qui se parlent pour consommer moins
Sous protection depuis un siècle
Ornithologie
Planétologie
Sur Mars, à la recherche du bon caillou
La revue de l’Espace des sciences
www.sciences-ouest.org
n°302
Télécommunications
OCTOBRE 2012
BESOIN DE SUPER-RÉSEAUX Mobilité
Le très haut débit attendu par les utilisateurs
Performances Les réseaux deviennent intelligents
Énergie
Des antennes qui se parlent pour consommer moins
© CÉLINE DUGUEY
T’as du réseau ? Tu captes ? Regarder des vidéos sur smartphone, de préférence en marchant, filmer un événement pour le partager quelques minutes après sur les réseaux sociaux ou le diffuser en direct sur Internet..., ces nouvelles pratiques de communicants nomades sont extrêmement gourmandes en débit et nécessitent des chemins de transmissions, ou réseaux, de plus en plus complexes car interconnectés. Lorsque l’on est simple usager, on est loin d’imaginer tout ce que
cette immédiateté représente pour les chercheurs et ingénieurs télécoms, ni tous les défis techniques que cela leur demande de relever. C’est ce que nous avons cherché à expliquer dans ce dossier, en nous appuyant sur le savoir-faire et les expérimentations menées en Bretagne. Vous vivrez peut-être votre prochaine panne de réseau avec moins d’impatience ! NATHALIE BLANC RÉDACTRICE EN CHEF
n° 302 OCTOBRE 2012
LE DOSSIER
DÉJÀ DEMAIN LES BRÈVES
4
IL APPREND À LIRE ENTRE LES LIGNES UN GÈNE DE SEXAGE DÉCOUVERT CHEZ LA TRUITE ÇA BOUGE VITE DANS LES MOLÉCULES !
4 5 6
DÉJÀ DEMAIN LES ACTUS DEPUIS UN SIÈCLE, ELLE PREND LES OISEAUX SOUS SON AILE
8
SUR MARS, À LA RECHERCHE DU BON CAILLOU 9
© LI ZHONG / XINHUA
CE QUE JE CHERCHE
Par MÉLANIE DAVRANCHE, géochimiste « Je cherche si l’arsenic peut être transféré dans les eaux souterraines »
BESOIN DE SUPERRÉSEAUX 10 à 18
19
L’AGENDA DE LA RÉDACTION
20
L’ÉPREUVE PAR 7 XAVIER LAGRANGE, professeur de réseaux informatiques Une interview non scientifique
22
© DR
COUVERTURE © STEFAN WERMUTH POOL / AFP
LE HAUT DÉBIT POUR QUOI FAIRE ?
À L’ESPACE DES SCIENCES
12/13
LA MAISON À TRÈS HAUT DÉBIT
14
LE SANS-FIL À L’ABORDAGE !
15
VERS UN RÉSEAU PLUS AUTONOME
16
ILS ÉTEIGNENT LES ANTENNES
17
LA RADIO DEVIENT INTELLIGENTE
18
POINTE SÈCHE PAR WILLIAM AUGEL
Suivez-nous sur Twitter
@sciences_ouest et sur www.sciences-ouest.org
OCTOBRE 2012 N°302 SCIENCES OUEST
3
Déjà demain
MÉLANIE DAVRANCHE GÉOCHIMISTE a principale thématique de recherche est la contamination de l’eau de distribution par l’arsenic. C’est un problème majeur notamment au Bangladesh et au Pakistan. L’arsenic provient des roches, qui le libèrent lorsqu’elles s’altèrent. Il est naturellement repiégé par des oxydes de fer. Mais avec l’intensification du pompage et l’entrée de matière organique dans les nappes, des bactéries prolifèrent, entraînant la dissolution des oxydes, qui relâchent le polluant. Pourtant, ce mécanisme n’explique pas tout. J’essaye de savoir si l’arsenic présent dans les sédiments déposés lors des crues peut être transféré dans les eaux souterraines, une hypothèse émise par une équipe américaine. Pour cela, il doit se lier à de grosses molécules de matière organique, peut-être par l’intermédiaire de particules de fer qui faciliteraient leur liaison. Pour vérifier cette hypothèse, je prélève des échantillons sur le terrain. Pas en Asie, mais dans des zones humides de Bretagne, où l’arsenic, la matière organique, le fer et les conditions physico-chimiques adéquates sont réunis ! Je fais aussi des mélanges au laboratoire et je regarde si les éléments se lient en faisant varier les paramètres. Les échantillons sont ensuite analysés dans les synchrotrons de Paris ou de Grenoble, où la nature des atomes voisins les uns des autres est révélée. J’utilise également l’imagerie à l’échelle nanométrique : les photos montrent l’emplacement de la matière organique, du fer et de l’arsenic. On s’aperçoit qu’ils se superposent ! Dernière technique utilisée, la modélisation géochimique de la matière organique, ce qui est novateur, car ces interactions sont complexes. »
«M
Des chercheurs en psychologie ont créé un logiciel d’aide à la compréhension de l’implicite dans les textes.
Il apprend à lire entre les lignes
«R
elis bien, la réponse est dans le texte ! » ! Qui n’a jamais entendu cette phrase ? Au cours de sa thèse puis de ses recherches sur les difficultés d’apprentissage de la lecture à l’IUFM de Bretagne et au CRPCC (1) de l’Université Rennes 2, Fanny de La Haye a pu constater que les enseignants posent souvent des questions dont les réponses sont effectivement dans le texte sans aborder l’implicite. « Ils croient bien faire en protégeant les enfants en difficulté qui, c’est vrai, ont plus de mal que les autres à comprendre ces sous-entendus. Mais cela entraîne aussi une mauvaise compréhension des textes lus », explique-t-elle. De là est partie l’idée de travailler à la conception d’un outil qui aide les élèves à lire entre les lignes. En 2006, Fanny de La Haye et trois de ses collègues du CRPCC(2) se lancent dans l’aventure. La première phase du projet consiste à construire les exercices : des phrases de deux à six lignes accompagnées d’une question portant sur l’implicite. Plus de mille items ont ainsi été créés avec l’aide d’enseignants, d’orthophonistes et d’étudiants en psychologie (plus de cinquante auteurs !). Trois ans après, un informaticien rejoint l’équipe pour donner à l’outil la forme d’un logiciel ergonomique baptisé Tacit. Lors des tests réalisés en 2010, les enseignants ont été séduits par l’écran de contrôle grâce auquel ils peuvent suivre la progression et les résultats de leurs
élèves en direct. 5 000 enfants, en France métropolitaine et d’outre-mer, ont déjà travaillé sur Tacit et un traitement statistique de leurs réponses a permis de calibrer finement les exercices. L’outil permet ainsi aux enseignants d’ajuster aisément la difficulté des exercices proposés à l’hétérogénéité des élèves. Le logiciel est en ligne depuis le 1er septembre dernier. Il est réservé aux enseignants, au prix de 35 € par classe, et vise les élèves du CE1 à la 3e. « Nous avons été bien épaulés par Bretagne Valorisation(3) pour trouver les financements auprès du Conseil régional, de Rennes Métropole, de l’Europe, explique Olivier Le Bohec, le responsable du projet. Aujourd’hui, sans en faire un produit commercial, nous cherchons à pérenniser le poste de Jérémie, l’informaticien du groupe, pour assurer la maintenance et l’évolution du logiciel. » Mais aussi appliquer la méthode à d’autres disciplines : mathématiques, orthographe, vocabulaire... et viser d’autres publics, comme les adultes. Car apprendre n’est pas toujours un jeu d’enfant. (1)
CRPCC : Centre de recherche en psychologie, cognition et communication. (2)Yvonnick Noël, Olivier Le Bohec et Christophe Quaireau ont été accompagnés d’une orthophoniste, Karine Lavandier et d’une développeuse informatique, Inès Nollet. (3)Structure en charge de la valorisation des projets de recherche académique.
Rens. : contact-tacit@univ-rennes2.fr
© NATHALIE BLANC
CE QUE JE CHERCHE « Je cherche si l’arsenic peut être transféré dans les eaux souterraines »
PROPOS RECUEILLIS PAR MARYSE CHABALIER Rens. : Mélanie Davranche Tél. 02 23 23 57 69 melanie.davranche@univ-rennes1.fr
© MARYSE CHABALIER
Elle vient d’être nommée membre junior à l’Institut universitaire de France pour une durée de cinq ans, ce qui lui permet de se consacrer davantage à la recherche.
4 SCIENCES OUEST N°302 OCTOBRE 2012
DÉVELOPPEMENT DURABLE LORIENT RÉCOMPENSÉE ● Lorient Agglomération vient d’obtenir le ruban du développement durable. Ce label, remis pour une durée de deux ans, récompense notamment ses efforts entrepris dans le domaine énergétique, avec un objectif de réduction de 20 % de la consommation, au sein de la collectivité, mais aussi chez les particuliers et dans les entreprises.
ENTREPRISES LA PÉPINIÈRE DE DINAN FÊTE SA PREMIÈRE ANNÉE ● Pour son premier anniversaire, la pépinière d’entreprises de Dinan voit la totalité de ses ateliers et la moitié de ses bureaux occupés. Elle vient par ailleurs d’accueillir deux nouvelles entreprises, l’une spécialisée dans l’import-export de produits à recycler, l’autre dans la gestion des déchets portuaires.
Rens. : www.rubansdudeveloppementdurable.com
Rens. : www.codi.fr
© GILIGONE
LES ÉCHOS DE L’OUEST Mélanie Davranche est enseignant-chercheur en géosciences au sein de l’équipe Géochimie des eaux et des interfaces à l’Observatoire des sciences de l’Univers de Rennes.
Un gène de sexage découvert chez la truite es chercheurs de l’Inra de Rennes ont découvert le gène déterminant majeur du sexe chez la truite. L’acquisition du sexe chez les poissons est aussi variée que méconnue. Dans cette famille, les salmonidés, on savait seulement que les mâles étaient XY et les femelles XX, comme pour les mammifères. Le gène découvert est porté par le chromosome Y et son inactivation suffit à produire des femelles. Les scientifiques ont eu une surprise en analysant la protéine qu’il code : la plus proche connue intervient dans... l’immunité ! « À partir du gène ancestral, il y a eu duplication et réarrangement », explique Yann Guiguen, chercheur à l’Inra. Son évolution reste une énigme, tous les déterminants du sexe connus précédemment dérivent de gènes déjà impliqués dans le développement des organes reproducteurs. Outre son caractère étonnant, cette découverte permet de déterminer de façon fiable le sexe de tous les salmonidés par un simple prélèvement de tissu, et ce même chez les alevins. Ceci était auparavant impossible, car si le chromosome Y est spécifique aux mâles, il n’est pas assez différencié pour être facilement reconnaissable.
DES DRONES PILOTÉS PAR UNE TABLETTE ● Il s’appelle Susie. Le logiciel de pilotage d’un essaim de drones - des petits avions militaires télécommandés - à partir d’une tablette tactile, mis au point par des chercheurs de Télécom Bretagne est efficace… et créatif ! Il s’est vu remettre en mai dernier le prix du démonstrateur le plus innovant de l’Otan, lors de la réunion d’un groupe de travail qui vise à étudier différentes problématiques militaires où le facteur humain est prépondérant. Très intuitif, ce logiciel permet d’allouer tout ou partie d’un essaim de drones à la surveillance d’une zone. Il pourrait également avoir des applications non-militaires, notamment pour de la surveillance environnementale.
Rens. : Yann Guiguen Tél. 02 23 48 50 09 yann.guiguen@inra.fr
© TÉLÉCOM BRETAGNE
D
Rens. : Gilles Coppin Tél. 02 29 00 12 08 gilles.coppin@telecom-bretagne.eu
DU MÉRITE EN MATHÉMATIQUES... ● Valérie Bonnaillie-Noël, chargée de recherche à l’Institut de recherche mathématique de Rennes (lire Sciences Ouest n°263mars 2009), a reçu, le 11 septembre dernier, l’insigne de chevalier de l’ordre national du Mérite, des mains de Cédric Villani, directeur de l’Institut Henri-Poincaré et lauréat de la médaille Fields.
… ET EN SCIENCES DE LA TERRE ! ● Dimitri Lague, chercheur au laboratoire Géosciences de l’Observatoire des sciences de l’Univers de Rennes, vient de recevoir la Gordon Warwick Medal. Cette distinction de la société britannique de géomorphologie récompense la contribution du jeune chercheur dans ce domaine des sciences de la Terre.
UN ANNIVERSAIRE ÉLECTRIQUE ! ● Le 2 octobre dernier, le campus rennais de l’école d’ingénieurs Supelec a fêté ses 40 ans. Créée en 1894, cette école des sciences de l’information, de l’énergie et des systèmes est répartie sur trois campus : Gif-sur-Yvette, Metz et Rennes. Le campus breton compte aujourd’hui plus de 260 étudiants et doctorants, et près de 60 collaborateurs.
Rens. : www.irmar.univ-rennes1.fr
Rens. : www.osur.univ-rennes1.fr
Rens. : www.supelec.fr
© KEVEN LAW
VOTRE ATTENTION, S’IL VOUS PLAÎT ! ● Quand on fait des gestes, on vérifie qu’on nous regarde... Les mangabés à collier aussi ! C’est ce que vient de montrer l’équipe de Catherine Blois-Heulin, du laboratoire Éthos de l’Université de Rennes 1. « Au départ je n’y croyais pas. On s’est rendu compte que nos petits singes sont aussi compétents que les chimpanzés », s’enthousiasme-t-elle. La prise en compte de l’attention de l’interlocuteur était en effet connue chez les grands singes, mais pas chez les autres, qui ne semblent pas communiquer entre eux par gestes. L’équipe a donc entraîné neuf individus à quémander pour obtenir un raisin sec. « Lorsque l’expérimentateur est de face, les gestes sont plus fréquents et amorcés plus rapidement », commente la chercheuse. Ils diminuent quand la personne a la tête tournée ou est de dos. Les mangabés ont donc conscience que leur geste doit être vu pour être suivi d’effet. Par contre, ils ne prennent pas en compte la direction du regard. Une négligence qui pourrait s’expliquer par le fait que, chez cette espèce, regarder dans les yeux est synonyme d’agression. Rens. : Catherine Blois-Heulin Tél. 02 99 61 81 65, Catherine.Blois-Heulin@univ-rennes1.fr
ÉNERGIE UN NOUVEL ESPACE D’INFORMATION ● Le 17e espace Info-Énergie vient d’ouvrir ses portes à Dinan. Animés par l’Ademe, ces lieux informent les particuliers sur les réglementations et les aides disponibles dans le domaine des énergies renouvelables.
SANTÉ UN INSTITUT DE CANCÉROLOGIE VA S’INSTALLER À BREST ● Le ministère de la Santé vient d’acter le projet : l’Institut de cancérologie de Bretagne occidentale verra le jour sur le site Morvan du CHRU de Brest, qui porte le projet avec le centre hospitalier de Quimper et la clinique privée brestoise Pasteur-Lanroze.
FORMATION OSTÉOPATHIE ET STATISTIQUE À KER LANN ● Cette rentrée, le campus bruzois de Ker Lann enrichit son offre. Un nouveau bâtiment accueille désormais l’Institut d’ostéopathie de Rennes. Et l’École nationale de statistique propose depuis le 13 septembre un nouveau master sur la statistique publique, en collaboration avec l’Université de Rennes 1.
Rens. : www.bretagne-energie.fr
Rens. : www.clinique-pasteur-brest.com
Rens. : www.campuskerlann.com OCTOBRE 2012 N°302 SCIENCES OUEST
5
Déjà demain
Depuis un siècle, elle prend les oiseaux sous son aile ORNITHOLOGIE La célèbre Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) fête cette année son centenaire et celui de la réserve des Sept-Îles, située dans les Côtes-d’Armor. orsque du bateau on aperçoit l’île Rouzic, la plus éloignée de la réserve des Sept-Îles, au large de Perros-Guirec, on est d’abord surpris par le dôme blanc recouvrant sa moitié nord. Ce n’est qu’en se rapprochant que l’on se rend compte qu’il est en fait constitué de milliers de fous de Bassan. 20 321 couples ont été comptabilisés cette année. Autant dire que l’endroit est bondé : les nids sont à 60 cm les uns des autres ! « La distance de deux cous, deux becs », précise Gilles Bentz, responsable de la station LPO de l’Île-Grande qui assure les commentaires à bord. Ces oiseaux marins, les plus grands d’Europe, survolent les bateaux remplis de touristes comme s’ils ne les remarquaient pas. Soudain, deux phoques gris
L
© ESPACE DES SCIENCES
L’interview vidéo www.espace-sciences.org/ so/lpo
8 SCIENCES OUEST N°302 OCTOBRE 2012
pointent le bout de leur nez : l’archipel abrite l’une des deux colonies françaises de cette espèce, l’autre ayant élu domicile à l’extrême pointe de la Bretagne. Au détour des autres îles de la réserve, c’est le tour des goélands, huîtriers pie et cormorans huppés de se montrer. Quelques macareux moines se sont attardés en cette fin du mois de juillet, comme pour rappeler que c’est pour eux que la réserve des Sept-Îles a été créée, il y a juste cent ans.
Au secours du macareux La chasse aux “perroquets de mer” de Perros-Guirec était à l’époque un loisir à la mode. Les massacres perpétrés par les chasseurs ont été dénoncés par un adhérent de la toute jeune Ligue française pour la protection des oiseaux, ancêtre de la LPO, créée le 26 janvier 1912. Pour protéger les macareux, l’as-
sociation a alors loué les Sept-Îles, créant ainsi la première réserve de France. Les débuts sont un succès : de 400 couples, la population de macareux monte à 7 000 dans les années 1950. Dans le même temps, d’autres espèces font leur apparition : des goélands marins, bruns et argentés, des fous de Bassan, des cormorans huppés... Les Sept-Îles sont classées réserve naturelle nationale en 1976. Mais les naufrages des pétroliers Torrey Canyon, Amoco Cadiz et Tanio, en 1967, 1978 et 1980, manquent d’exterminer les populations de macareux, pingouins et guillemots. La LPO ouvre donc son premier centre de soins en 1984 sur l’Île-Grande, à quelques kilomètres de là, pour s’occuper des oiseaux mazoutés. Elle crée aussi un musée et organise les visites commentées
de la réserve en bateau, afin de sensibiliser le public à la protection des oiseaux marins.
Le pétrole et la surpêche La LPO est toujours gestionnaire de l’archipel. Avec une quinzaine d’espèces qui y nichent, c’est la première réserve française d’oiseaux marins. Une vingtaine de personnes (bénévoles, salariées ou en service civique) s’y consacrent pour commenter les visites, animer la station, s’occuper des pensionnaires du centre de soins, surveiller la réserve... L’ensemble des espèces présentes est suivi, en partenariat avec des spécialistes. La situation est loin d’être satisfaisante : après la chasse et les marées noires, c’est désormais la surpêche au large qui met en danger les macareux moines. « D’autres espèces souffrent aussi, même si elles sont encore
L’interview vidéo www.espace-sciences.org/so/mars
PLANÉTOLOGIE Embarqués dans l’aventure du robot Curiosity, deux scientifiques nantais étudient les roches de Mars au laser.
Sur Mars, à la recherche du bon caillou
«C
Les macareux séjournent sur la réserve bretonne d’avril à début juillet. Ils viennent s’y reproduire. © ARMEL DENIAU L’île Rouzic est la plus éloignée de la réserve des Sept-Îles. C’est aussi la plus peuplée. Sa moitié nord est recouverte par plus de 20 000 couples de fous de Bassan ! © ESPACE DES SCIENCES
Les fous de Bassan sont des couples fidèles. Leurs parades nuptiales sont toujours un très beau spectacle. © GILLES BENTZ La station de l’Île-Grande a été construite en 1984, suite au naufrage de l’Amoco Cadiz pour sauver les oiseaux et éduquer le public. © ESPACE DES SCIENCES
abondantes au niveau européen. Mais il y a très peu de jeunes qui survivent, sachant qu’il n’y en a qu’un par couple chez plusieurs espèces », s’inquiète le responsable de la station.
Des bio-indicateurs Les oiseaux ne sont pas la seule préoccupation de la LPO : « Pour nous, le milieu marin et les oiseaux sont indissociables ; s’il y a des oiseaux, c’est parce qu’il y a du monde dessous, rappelle Gilles Bentz, et d’ajouter : Les oiseaux sont des bio-indicateurs ; quand il arrive quelque chose, cela veut dire que ça va arriver à l’homme. » Cette approche se retrouve dans la nouvelle muséologie de la station, repensée à l’occasion du centenaire. Un siècle après la création de la réserve, le nombre de macareux stagne à 175 couples dans l’archipel. La préservation de la faune des Sept-Îles reste un problème d’actualité... MARYSE CHABALIER
CONTACT Gilles Bentz Tél 02 96 91 91 40 ile-grande@lpo.fr http://sept-iles.lpo.fr
es journées ont été d’une telle intensité ! Je n’avais jamais vécu ça. » Nicolas Mangold est géologue et planétologue au LPGNantes(1). Visiblement épuisé, mais enthousiaste, il est revenu, fin août, du JPL(2) de Pasadena (États-Unis), d’où la Nasa dirige le robot martien Curiosity. Cette mission, il la prépare depuis 2004, avec 350 autres scientifiques. Lui et son collègue Stéphane Le Mouélic, spécialiste de traitement d’images, font partie de l’équipe qui s’exerçait depuis des mois, avec un rover factice, pour tester sa navigation et les instruments. Après les longues journées au JPL, avec des réunions en permanence, le rover s’est posé sur Mars. « Le 5 août à 22 h 31, c’était l’explosion de joie !, s’exclame Nicolas Mangold. Tout était calé à la minute près, tout s’est passé exactement comme prévu. Quelques instants plus tard, la première image est arrivée. C’était encore plus fort ! Une heure après, nous commencions l’exploitation des données. » Enfin, au 13e jour de la mission, le 19 août, le rover réussit son premier tir laser. « On a sabré le champagne ! Le stress s’est complètement relâché. »
Les deux chercheurs participent au projet ChemCam(3). L’instrument franco-américain est constitué d’un laser, d’un spectromètre et d’une caméra. Il a été réalisé en partie à l’Irap(4) de Toulouse, avec le Cnes et le CNRS pour étudier la géologie martienne. « Les roches sont notre principal objectif, explique Nicolas Mangold. Nous y cherchons des indications sur l’environnement primitif de Mars, plus chaud qu’aujourd’hui, donc plus favorable à la vie. »
De la roche en plasma En plus de la taille du robot (3 m de long, 900 kg), l’association caméra-laser est une originalité de Curiosity. La caméra ChemCam, qui peut prendre des photos à 9 m de distance, repère des détails jusqu’à 30 µm. « Nous pouvons caractériser très finement la texture de la roche et voir les minéraux qui la composent », précise Stéphane Le Mouélic. Le laser fait des trous d’environ 0,3 mm de diamètre. La température de la roche s’élève alors à 10 000° C. Elle devient un plasma et sa composition chimique élémentaire à l’endroit du tir peut alors être déterminée. Au vu des premiers tirs, les chercheurs sont optimistes.
« Les spectres sont parfaitement beaux, plus propres que sur Terre, et le signal est meilleur ! Cette qualité s’explique car l’atmosphère de Mars est très ténue », note Nicolas Mangold. Dans leur quête, les deux Nantais ont l’enthousiasme communicatif. « Les choses vont extrêmement vite, apprécie Stéphane Le Mouélic. Lorsqu’une roche est analysée, les résultats doivent être fournis en deux ou trois heures. Il faut être hyperréactif ! Car si la roche est intéressante, il faut arrêter le rover sans attendre le lendemain. » Curiosity a également un bras articulé qui cueillera les roches idéales pour faire d’autres analyses. Car ChemCam n’est que l’un des dix instruments du robot ! C’est un éclaireur, posté en haut du rover. Au cours de sa mission de deux ans, il devrait examiner des milliers de roches. Avec des chances de trouver son graal. NICOLAS GUILLAS (1) LPGNantes : Laboratoire de planétologie et géodynamique de Nantes. (2)JPL : Jet Propulsion Laboratory. (3)ChemCam : Chemistry & Camera, lire Sciences Ouest n°290-septembre 2011, sur www.sciences-ouest.org. (4) Irap : Institut de recherche en astrophysique et planétologie.
CONTACTS Nicolas Mangold Tél. 02 51 12 53 40 nicolas.mangold@univ-nantes.fr Stéphane Le Mouélic Tél. 02 51 12 54 65 stephane.lemouelic@univ-nantes.fr
Le rover s’est posé ici ! Les scientifiques Nicolas Mangold (à gauche) et Stéphane Le Mouélic participent à l’expédition martienne. © NICOLAS GUILLAS
OCTOBRE 2012 N°302 SCIENCES OUEST
9
LE DOSSIER DE
BESOIN DE SUP TÉLÉPHONIE MOBILE, INTERNET : LES RÉSEAUX DE TÉLÉCOMMUNICATIONS DÉPASSENT LEURS LIMITES POUR RÉPONDRE À NOS USAGES. n 2007, l’arrivée de l’iPhone bousculait les usages et boostait l’arrivée de la 3G : un nouveau système de transmission permettant d’envoyer et recevoir non seulement des appels et des SMS, mais aussi des données et des images. Internet arrivait sur les téléphones.
E
La nouvelle génération Aujourd’hui, la 3G est en passe d’être dépassée, et l’arrivée en France de la 4G, la quatrième génération des communications par téléphones mobiles, n’est plus qu’une question de temps. À Brest, la plate-forme
10 SCIENCES OUEST N°302 OCTOBRE 2012
ImaginLab (lire p. 12) teste le LTE(1), une “presque”» 4G, déjà en service en Suède, aux États-Unis ou au Canada. « Il remplit presque tous les critères de la 4G définis par l’Union internationale des télécommunications, explique Xavier Lagrange. » Et si plusieurs technologies répondaient aux critères de la 3G et coexistaient, le LTE s’annonce comme la principale norme internationale pour la 4G.
Il transporte toutes les données Le LTE, c’est un nouveau réseau. « Au départ, ce devait être une évolution des technologies 3G que l’on utilise aujourd’hui. Mais finalement, c’est un nouveau système ! » Son originalité : transporter par voie radio toutes les données, que ce soit la voix, les images,
les pages Web... avec la même technique : l’OFDM(2), déjà utilisée pour la télévision numérique terrestre, le courant porteur en ligne et l’ADSL. Alors que la 3G traite la voix et les données différemment : elles sont aiguillées chacune sur leur propre réseau par les équipements des stations de base, qui abritent les antennes. « Avec la 3G, toutes les communications sur téléphones portables sont transmises sur les mêmes fréquences. Elles sont codées un peu différemment pour ne pas qu’elles se mélangent. Mais lorsqu’on doit transmettre très rapidement beaucoup de données, ça n’est pas très efficace. En OFDM, les communications se font en parallèle. On affecte à chaque connexion plusieurs bouts de fréquences, qui lui sont propres. Cela consomme
P. 14
La maison à très haut débit © BERTRAND LANGLOIS / AFP
P. 16
Vers un réseau plus autonome © THOMAS COEX / AFP
P. 17 © LI ZHONG / XINHUA
Ils éteignent les antennes © DR
ER-RÉSEAUX plus de fréquences, mais grâce à des “astuces” mathématiques, on parvient à ce que cela ne prenne pas trop de place ! » Avec le LTE, on quitte le monde de la téléphonie mobile pour entrer dans celui de l’Internet mobile, où la voix n’est qu’un des services que peut offrir le réseau.
Faire face à la saturation L’Internet fixe devrait lui aussi évoluer grâce à la fibre optique (lire p.12-13). « C’est le support incontournable pour transporter de très grandes quantités d’informations, rappelle Philippe Gravey, spécialiste de l’optique à Télécom Bretagne, à Brest. Mais on va arriver à une saturation dans les fibres déjà en place. Et cela coûte cher d’en poser de nouvelles. Surtout en France, où on ne les envisage qu’enterrées. Donc on cherche des moyens de faire passer plus d’informations par la même fibre. »
Anticiper les besoins de demain
C
omment la recherche peut-elle répondre aux attentes des industriels ? En les faisant participer à la réflexion sur les thématiques à explorer ! Tel est l’objectif du Pracom, le Pôle de recherche avancée en communication porté depuis six ans par Télécom Bretagne. « Nous organisons des groupes de travail avec les entreprises adhérentes, explique Patrick Adde, responsable
développement du Pracom à Télécom Bretagne. Chaque année, ces réflexions aboutissent au financement de thèses et à la mise en place de projets concrets, grâce au financement des adhérents, au nombre de onze en 2012. » La démarche séduit les grands groupes comme des PME. « Nos premiers adhérents ont été la Scarmor, la centrale d’achats de Leclerc, et Orange. » Actuellement
l’accent est porté sur l’efficacité énergétique, avec le lancement en 2011 du projet Greencom. Mais aussi sur les énergies marines renouvelables, la technologie RFID, les réseaux de capteurs sans fil et la localisation. Des sujets dont on devrait entendre parler à l’avenir ! CD Rens. : Patrick Adde Tél. 02 29 00 13 10 patrick.adde@telecom-bretagne.eu www.pracom.org
OCTOBRE 2012 N°302 SCIENCES OUEST
11