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RETOUR DE CONGRÈS

Sélection de trois thèmes majeurs de l’année 2013 : actualités présentées aux congrès américains et européens de cancérologie 1 - ANTI-PD-1 ET ANTI-PD-L1 : THÉRAPIE CIBLÉE ET IMMUNOTHÉRAPIE TOUT-EN-UN Dr Vincent Launay-Vacher,* Dr Florian Scotté**

n

Les anti-PD-1 et les anti-PD-L1 sont des nouveaux médicaments qui ont été l’un des “scoops”

du dernier congrès américain de l’American Society of Clinical Oncology (ASCO) à Chicago en juin 2013. Nous allons reprendre ici les quelques rappels de physiopathologie et de mécanisme d’action, en particulier sur les interactions entre cellules “cibles” et lymphocytes T. Nous vous proposons également un résumé des premiers résultats cliniques de l’anti-PD-L1 “MPDL3280A”, présentés lors de l’European Cancer progress 2013 à Amsterdam en septembre 2013.

PHYSIOPATHOLOGIE Les lymphocytes T reconnaissent les cellules du “non-moi”, soit parce qu’elles expriment des marqueurs qui permettent de les identifier comme étrangères, et donc de les attaquer, soit parce qu’elles n’expriment pas certains marqueurs permettant de les reconnaître comme des cellules du “moi”, et donc de ne pas les attaquer. Comme nous l’avait présenté à l’ASCO le Dr Padmanee Sharma du MD Anderson Cancer Center et de l’Université du Texas, il existe une multitude de marqueurs de ce type, présents à la surface des cellules, et qui permettent la reconnaissance, la mobilisation et l’action du système immunologique. *Service ICAR, GH Pitié-Salpêtrière, Paris **Service d’Oncologie médicale, Hôpital européen Georges-Pompidou, Paris

UN FONCTIONNEMENT SUR LE MODE CLÉ-SERRURE Les cellules tumorales expriment

un certain nombre de marqueurs. Ceux-ci “trompent” l’organisme qui les reconnaît comme des cellules

PD-L1 PD-L2 B7-2 pMHC

PD-L1

Tissus périphériques Tumeurs pMHC

PD-1 B7-1 PD-1 B7-H3 CD28 LAG-3 TCR B7-1 TCR B7x LAG-3 ? CTLA-4 ? HVEM Cellules T PD-L1 BTLA HVEM effectrices BTLA CD160 Prolifération et/ou B7-1 CD160 fonction B7-1 pMHC PD-1 LAG-3 PD-L1 TCR PD-L2 CD28 PD-L1 pMHC BTLA CTLA-4 TCR B7-1 PD-1 B7-1 B7-2 CD160 BTLA Tissu PD-1 Macrophage HVEM CTLA-4 Cellules T régulatrices PD-L1 HVEM

Cellule dendritique

Figure 1 - Des multitudes de marqueurs sont présents à la surface des cellules tumorales et des cellules immunitaires.

onKo + • Novembre-Décembre 2013 • vol. 5 • numéro 42

169


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du “moi”, logiquement d’une certaine façon, et les mettent ainsi à l’abri d’une réaction immunitaire dirigée contre elles (Fig. 1). Ces marqueurs fonctionnent sur le mode de la clé (sur la cellule tumorale) et de la serrure (sur le lymphocyte). Lorsque la clé et la serrure s’emboîtent, la réaction immunologique est arrêtée et le lymphocyte T n’attaquera pas la cellule tumorale (Fig. 2).

UN NOUVEAU MÉDICAMENT : L’ANTICORPS ANTIPD-L1 (MPDL 3280A)

Figure 2 - Les marqueurs des cellules tumorales et des lymphocytes T interagissent selon un mode clé-serrure.

Au dernier congrès de l’ASCO, deux nouveaux anticorps ont été présentés. Ils agissent chacun sur l’un des éléments du couple “clé-serrure’ : PD-L1, la clé sur la tumeur, et PD-1, la serrure sur le lymphocyte (Fig. 3). En bloquant PD-L1 ou PD-1, ces médicaments empêchent la clé et la serrure d’interagir. Ils permettent ainsi l’activation de la réaction immunitaire et l’attaque des cellules tumorales par les lymphocytes du patient.

L’anticorps anti-PD-L1, le MPDL3280A, du laboratoire Roche, est le médicament dont il était question à Amsterdam au Congrès européen de Cancérologie (European Cancer Congress, ECC), avec la présentation, en séance plénière sur le cancer du poumon, par notre collègue JeanCharles Soria, des résultats d’activité clinique et de tolérance de ce nouveau médicament. Le MPDL a été testé dans plusieurs types de tumeurs. Les premiers résultats d’activité clinique ont été présentés pour le cancer du poumon non à petites cellules (NAPC, non small cell 170

Figure 3 - L’interaction clé-serrure entre cellules tumorales et lymphocytes T est bloquée par la fixation de l’anticorps-médicament sur PD-L1 ou PD-1.

MPDL3280 A PHASE IA : RÉPONSE EN FONCTION DU STATUT TABAGIQUE Patients fumeurs (n = 53) Anciens fumeurs/ Fumeurs 81 % 19 %

Non fumeurs

Patients avec PR en %

PREMIERS RÉSULTATS DE L’ACTIVITÉ CLINIQUE DE MPDL

50

Réponse en fonction du statut tabagique

40 30

26 %

20

10 %

10 0

Anciens fumeurs/ Fumeurs n = 43

Non fumeurs n = 10

Figure 4 - Différences de réponses au médicament entre fumeurs et non-fumeurs. onKo + • Novembre-Décembre 2013 • vol. 5 • numéro 42


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lung cancer, NSCLC). Le taux de réponse atteint 23 % dans cette population, et était du même ordre, voire un peu supérieur, à celui observé pour tous types de tumeurs confondus (21  %). De même, la survie sans progression était constante, aux alentours de 45 % pour les cancers pulmonaires et, de façon intéressante, identique pour les cancers épidermoïdes et non épidermoïdes (Tab. 1).

UNE MEILLEURE RÉPONSE POUR LES FUMEURS La discussion qui a suivi cette présentation a été animée par le résultat concernant les fumeurs et anciens fumeurs. En effet, sur les 53 patients concernés, 81 % étaient des fumeurs ou anciens fumeurs, et ces derniers ont présenté un taux de réponse de 26 % alors que les non-fumeurs ne répondaient que dans 10 % des cas (Fig. 4). Le modérateur, en écho à une question de la salle, a donc

Tableau 1 - Premiers résultats de l’activité clinique de MPDL. Taux de réponse Maladie Taux de survie au médicament stabilisée sans progression en monothérapie pendant 24 à 24 semaines (RECIST 1.1) semaines ou plus Toutes tumeurs (n = 175)

21 %

19 %

42 %

NSCLC (n = 53)

23 %

17 %

45 %

Épidermoïde

21 %

17 %

44 %

Non épidermoïde

27 %

18 %

46 %

demandé à Jean-Charles Soria s’il fallait « commencer à fumer dès maintenant pour pouvoir répondre au MPDL »… !

ET AUSSI Plus sérieusement, les questions de la salle ont amené deux autres informations importantes : • Aucun anticorps antimédicament (anti-drug antibody, ADA) n’a été retrouvé chez ces patients, quel que soit le type de tumeur, ce qui est un point clé sur l’innocuité

de cet anticorps. • Le développement clinique de ce médicament est en cours dans différents types de tumeurs pour lesquelles on attend une efficacité certaine. Restera à la comparer aux traitements existants afin de savoir si le MPDL fait mieux ou aussi bien que ces derniers et s’il apportera donc un réel bénéfice clinique. n

Mots-clés :

Anti-PD1, Anti-PDL1, MPDL, Lymphocytes T, Marqueurs, Anticorps, Cancer du poumon non à petites cellules

2 - NAUSÉES ET VOMISSEMENTS CHIMIO-INDUITS : UNE BELLE AVANCÉE Dr Jean-Baptiste Rey*, Dr Florian Scotté**

n Les nausées et les vomissements, comme à chaque congrès et au fil des années, occupent une grande place tant du point de vue de la qualité des études que de l’importance des résultats. Trois études ont marqué cet été 2013, entre le congrès de l’ASCO fin mai-début juin, le congrès de la MASCC à la fin du mois de juin et le congrès de l’ECC à la fin du mois de septembre. Mais pourquoi autant de “redites” ? Parce qu’un tel message mérite bien d’être martelé, tant les résultats sont d’importance.

LES RECOMMANDATIONS DE L’AFSOS Il semble important de rappeler dans un premier temps, les recommandations antiémétiques *Département de Pharmacie, Institut Jean-Godinot **Service d’Oncologie Médicale et Unité Fonctionnelle de Soins de Support Oncologiques, Hôpital Européen Georges-Pompidou

diffusées par l’AFSOS (Association francophone pour les Soins oncologiques de Support), puisque ce sont celles qui sont applicables en France. Loin de nous l’idée de penser et de faire croire que les recommandations conjointes de la MASCC et de

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l’ESMO n’ont pas de valeur (bien au contraire), mais celles de l’AFSOS sont issues de la pratique et de consensus régionaux, établies par des praticiens de terrain, confrontés au quotidien des patients et à leurs “ennuis digestifs”. Comme dans les différentes 171


RETOUR DE CONGRÈS

Tableau 1 - Recommandations AFSOS pour la prise en charge des nausées et des vomissements chimio-induits. Niveau émétisant

Risque (%)

Phase aiguë

Phase retardée

Hautement

> 90 %

Sétron (ou palonosétron) + corticoïde + aprépitant

Corticoïde (de J2 à J4) + aprépitant (de J2 à J3)

Modérément

30-90 %

Sétron (classique ou palonosétron) + corticoïde + aprépitant

Aprépitant (de J2 à J3)

Faiblement

10-30 %

Corticoïde seul ou anti-D2*

Rien

Très faiblement)

< 10 %

Rien

Rien

*Anti-D2 : antagonistes des récepteurs à la dopamine de type 2

recommandations internationales, les protocoles de chimiothérapie y sont classés en fonction de leur pouvoir émétogène, le risque indiqué correspondant à la proportion de patients susceptibles de présenter des épisodes de nausées et de vomissements induits par la chimiothérapie. La différence majeure avec les autres recommandations internationales réside dans le fait que les stratégies issues des expertises des référents de l’AFSOS sont en faveur d’une épargne corticoïde (en dehors de toute prémédication antiallergique, comme cela est indiqué, notamment, pour les traitements par docétaxel) pour limiter les effets indésirables liés à l’utilisation des produits de chimiothérapie (Tab. 1). La place du palonosétron dans ces recommandations est reconnue sur le plan international et la triple association aprépitantpalonosétron-corticoïdes est de routine dans les prémédications antiémétiques et correspond au standard utilisé dans les protocoles de recherche. Ce rappel est important car le palonosétron, à disposition depuis peu dans les pharmacies à usage intérieur (PUI), a montré sa supériorité sur les autres sétrons, avec un intérêt en association (et non pas, “à la place” comme on l’entend parfois) avec les inhibiteurs de la 172

J1

(n = 694)

J2 et J3

J4

PALO

PALO 0,5 mg + DEX 20 mg + placebo

DEX 8 mg BID

DEX 8 mg BID

NEPA100

NETU 100 mg + PALO 0,5 mg + DEX 12 mg

DEX 4 mg BID

DEX 4 mg BID

NEPA200

NETU 200 mg + PALO 0,5 mg + DEX 12 mg

DEX 4 mg BID

DEX 4 mg BID

NEPA300

NETU 300 mg + PALO 0,5 mg + DEX 12 mg

DEX 4 mg BID

DEX 4 mg BID

APR 125 mg + OND 32 mg + DEX 12 mg

APR 80 mg + DEX 4 mg BID

DEX 4 mg BID

APR + OND

PALO : palonosétron ; DEX : dexaméthasone ; APR : aprépitant ; OND : ondansétron ; BID : 2 fois par jour.

Figure 1 - Schéma de l’étude NEPA.

neurokinine de type 1 (anti-NK1) par potentialisation probable des actions.

RÉSULTATS D’ÉTUDES Il semble incontournable, en 2013, pour avoir une meilleure efficacité dans la lutte contre les nausées et les vomissements chimio-induits, d’avoir recours à l’association aprépitant-palonosétron. C’est dans cette idée que se sont développées les études utilisant le nétupitant, nouvel inhibiteur de neurokinine de type 1 de demi-vie longue (96 h) et qui, associé au palonosétron, a donné des résultats prometteurs lors des études initiales.

1RE ÉTUDE Le NEPA est un comprimé oral, combinant du palonosétron à 0,5 mg avec ce nouvel anti-NK1, le nétupitant. Ce “combo” a été évalué au cours d’une étude rando-

misée versus palonosétron oral à 0,5 mg et dexaméthasone dans les deux bras. Les résultats ont été en faveur du “combo” avec des taux de réponse complète (absence d’épisode émétique et pas de prise de traitement de secours) tous significatifs : entre 80 et 90 % selon la phase (aiguë, retardée ou globale). Cette première étude d’enregistrement devrait faire de cette association une des thérapeutiques phare de la prévention antiémétique des chimiothérapies. Encore faut-il que le “combo” soit admis par nos tutelles et que nous puissions, auparavant, utiliser les produits à disposition, à savoir l’aprépitant avec le palonosétron…

2NDE ÉTUDE Au cours d’une seconde étude d’enregistrement, dans les chimiothérapies hautement

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Tableau 2 - Résultats de l’étude NEPA - taux de contrôle des nausées et des vomissements et taux de contrôle global. PALO (n = 136)

NEPA100 (n = 135)

NEPA200 (n = 137)

NEPA300 (n = 135)

APR + OND (n = 134)

Aigus (0-24 h)

89,7 %

93,3 % (p = 0,278)

92,7 % (p = 0,383)

98,5 % (p = 0,007)

94,8 % (NS)

Retard (25-120 h)

80,1 %

90,4 % (p = 0,018)

91,2 % (p = 0,010)

90,4 % (p = 0,018)

88,8 % (p ≤ 0,05)

Global (0-120 h)

76,5 %

87,4 % (p ≤ 0,05)

87,6 % (p ≤ 0,05)

89,6 % (p ≤ 0,05)

86,6 % (p ≤ 0,05)

MEC (n= 1 449)

NEPA oral + DEX 12 mg oral (NEPA = NETU 300 mg + PALO 0,50 mg)

R 1:1

PALO 0,50 mg oral + DEX 20 mg oral

p = 0,047 Proportion de patients

100

88 %

85 %

80

p = 0,001 77 %

p = 0,001 74 %

70 %

67 %

60 40

NEPA + DEX

20

PALO + DEX

0

Aigus (0-24 h)

Retard (25-120 h)

Global (0-120 h)

DEX : dexaméthasone ; NETU : nétupitant ; PALO : palonosétron ; MEC : CT modérément émétisante.

Figure 2 - Résultats de l’étude NEPA : proportion de patients pour lesquels le contrôle des nausées et des vomissements est observé.

Groupe A (n = 154) J1 : PALO 0,75 mg IV DEX 10 mg J2, J3 : Dexaméthasone 8 mg

R Groupe B (n = 151) J1 : PALO 0,75 mg IV DEX 10 mg J2, J3 : Rien Figure 3 - Schéma de l’étude visant à comparer l’administration de corticoïdes vs une épargne corticoïde à J2 et J3.

émétisantes à base de cisplatine, l’association combinée dans un comprimé en prise orale unique à J1 a été comparée avec plusieurs doses de nétupitant par rapport au palonosétron et à l’association de référence (ondansétron, aprépitant, corticoïde). Au cours de cette étude randomisée de phase II multicentrique, internationale, menée en double aveugle, 694 patients ont été étudiés (Fig. 1).

La posologie optimale a été l’association nétupitant 300 mg + palonosétron 0,5 mg. Les taux de réponse complète ont été très impressionnants au cours de cette étude, avec 98,5 % de réponse en phase aiguë et 90,4 % en phase retardée. Les résultats ont tous été significatifs comparés à ceux obtenus avec du palonosétron associé aux corticoïdes. L’étude n’avait pas un schéma de

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comparaison d’efficacité avec le triplet de référence et ne permet donc pas de conclure en termes de supériorité de l’un ou l’autre des protocoles, mais la comparaison des événements indésirables des cinq groupes n’a pas montré de différence. Cette association présente l’avantage d’être administrée par voie orale (moins de manipulations par les infirmiers), en prise unique (pas de multiplication des prises médicamenteuses) avec une efficacité qui en fait une avancée majeure dans la lutte antiémétique. Encore une fois, en l’absence de ce “combo” à disposition, le recours à une association avec l’aprépitant peut s’avérer utile (Fig. 2, Tab. 2).

BILAN Que ressort-il de ces études  ? Que la stratégie antiémétique semble s’orienter vers une administration de “tout à J1”. Toutes les armes sont disponibles pour lutter contre les nausées et les vomissements chimio-induits. Il reste maintenant à peaufiner les traitements pour : • améliorer encore plus le confort des patients ; • s’assurer de la bonne observance des traitements ; • garantir ainsi le succès dans la prise en charge de cet effet indésirable, puisqu’il est maintenant 173


RETOUR DE CONGRÈS

établi que tout se joue à C1J1 (le premier jour de la première cure de chimiothérapie). Un échec (survenue de nausées et/ou de vomissements) à C1J1 conditionne une mauvaise tolérance du traitement tout au long de celui-ci. Au contraire, une prise en charge optimale dès la première cure de chimiothérapie est souvent gage de succès par la suite. Si tous les traitements efficaces sont administrés au patient quand il est “entre les mains des soignants” et qu’il n’a plus à s’en préoccuper lors du retour à domicile, avec une efficacité identique à une prise en charge sur plusieurs jours, pourquoi s’en priver ?

Cela amène à se poser la question de la place de la corticothérapie dans la lutte antiémétique des chimiothérapies moyennement émétisantes non-AC (chimiothérapies autres qu’une association anthracycline-cyclophosphamide). Cette étude présentée à l’ECC comparait un schéma de traitement avec corticothérapie J2 et J3 vs une absence de corticothérapie J2 et J3 (Fig. 3).

CONCLUSION Les résultats ont montré l’absence d’infériorité du bras sans corticothérapie à J2 et J3 avec des réponses complètes en termes de nausées et de vomissements de 64,7 % dans le groupe A contre

68,2 % dans le groupe B (sans corticoïdes J2 et J3) (p = 0,0002). S’agitil de la fin de la corticothérapie dans les chimiothérapies moyennement émétisantes ? Peut-être… En tout cas, cela rejoint les recommandations d’épargne corticoïde établies par l’AFSOS. Un jour (prochain ?), les patients traités par chimiothérapie ne présenteront plus de nausées ni de vomissements et cette guerre-là aura été gagnée… sous réserve d’appliquer les recommandations dans la pratique quotidienne avec les patients. n

Mots-clés :

Nausées, Vomissements, Chimiothérapie, Antiémétiques

3 - IMPACT DE L’ACTIVITÉ PHYSIQUE ET SPORTIVE SUR LA SURVIE DES PATIENTS PORTEURS D’UN CANCER COLORECTAL Dr Thierry Bouillet*, Dr Gaëtan des Guetz*, Dr Bernard Uzzan*, Dr Patrick Nicolas*, Dr Kader Chouahnia*, Dr Laurent Zelek*

n Outre les effets connus sur la fatigue et la qualité de vie, la pratique d’une activité physique et sportive soutenue et régulière au décours de soins pour un cancer colorectal est associée à une amélioration des taux de survie globale et spécifique. L’étude présentée était exposée sous forme de poster à l’ASCO (Chicago, juin 2013).

DES ÉTUDES DE COHORTE Si l’Activité physique et sportive (APS) améliore la qualité de vie et réduit le niveau de fatigue des patients traités pour un cancer colorectal (1, 2), l’impact de la pratique d’une APS sur la survie est moins évidente. Il n’existe en effet que des études de cohorte de patients porteurs de cancer colorectal en rémission complète répondant de façon prospective et régulière à des questionnaires *AP-HP, Hôpital Avicenne, Bobigny,

174

portant sur leur type d’activité physique, l’intensité et la durée par séance, les fréquences hebdomadaires, leur régularité dans l’année. Ces données permettent, à partir de tableaux reliant type de pratique, intensité et durée de l’activité physique réalisée, un calcul de la dépense énergétique par semaine exprimée en MET-H par semaine (Tab. 1). Ces études de cohorte, bien que prospectives et réalisées en analyse multivariée intégrant les différents paramètres pronostiques

connus, exposent à de nombreux biais statistiques. En l’absence d’essai randomisé publié étudiant l’impact de l’APS sur la survie après les soins de cancers colorectaux localisés, elles restent, néanmoins, la seule source d’information sur cette association. Six cohortes (3, 4, 5, 6, 7, 8) de patients porteurs de cancer colorectal localisé et sans rechute sont analysées en ce qui concerne l’association entre les survies globale ou spécifique des cancers colorectaux et les niveaux d’APS pratiquée en post-thérapeutique.

onKo + • Novembre-Décembre 2013 • vol. 5 • numéro 42


SÉLECTION DE TROIS THÈMES MAJEURS DE L’ANNÉE 2013

Tableau 1 - Exemple de mesure de la dépense énergétique par type d’exercice. Activités physiques

METS

Activités physiques

METS

Aviron modéré

7

Marche 5 km/h

3

Badminton

7

Marche 6,5 km/h

4,5

Basket-ball loisir

6

Natation loisir

6

Course à pied 8 km/h

8

Patinage, Roller

5,5

Course à pied 12 km/h

12,5

Saut à la corde

8,5

Danse aérobique

5,5

Simulateur escalier

6

Danse moderne ou classique

6

Ski alpin loisir

6

Équitation

7

Ski randonnée

8

Escrime loisir

6

Tennis de table

4

Football loisir

7

Tennis

6,5

Golf sans véhicule

5,5

Tai chi

4

Golf avec véhicule

3,5

Vélo loisir

8

Hockey sur glace

9

Yoga

3

Judo, karaté

10

Médiété CAMI

9

Activité physique après un cancer du côlon: survie globale et spécifique 1 0,9

SS

0,8 0,7

SS

0,6 0,5

SS SS

SS

Pas AP AP survie spécifique (SS) AP survie globale

0,4 0,3 0,2 0,1

Le niveau d’APS retenu pour définir le seuil d’une APS significative est variable mais trois de ces cohortes ont le même niveau seuil d’APS (18 MET-H/sem.), deux cohortes utilisent des limites différentes, une plus faible à 8,75 MET-H/sem., une plus élevée à 27 MET H /sem. La dernière cohorte se base sur un questionnaire simplifié pour définir les actifs et les sédentaires. Les conclusions, en ce qui concerne l’association entre pratique d’une APS et amélioration des survies spécifique ou globale, sont variables. Trois cohortes retrouvent une association statistiquement significative entre une APS au-delà du seuil choisi et une amélioration de la survie spécifique, tandis que cinq retrouvent une association statistiquement significative entre atteinte du seuil d’APS et amélioration de la survie globale (Tab. 2, fig. 1). L’association entre la pratique d’une activité physique et sportive au-delà d’un seuil après cancer colorectal et survie spécifique ou globale est donc variable entre les études de cohorte.

dt ar

dt ar

RÉSULTATS DE LA MÉTA-ANALYSE

M

ey er h

dt ar M

ey er h

e ad

ey er h M

Ba

ip er Ku

Ca m pb el l

0

Figure 1 - Activité physique (AP) après un cancer du côlon : survie globale et spécifique. MÉTA-ANALYSE : ACTIVITÉ PHYSIQUE APRÈS DIAGNOSTIC DE SURVIE SPÉCIFIQUE. Modèle Nom de l'étude

Meyerhardt (NHS), 2006 Meyerhardt (NCI-III), 2006) Meyerhardt (HPFS), 2009 Baade (Queensland), 2011) Kuiper (WHI), 2012 Campbell (CPS-II), 2013 Fixé Aléatoire

Statistiques pour chaque étude Rapport Limite des risques inférieure

Limite supérieure

0,390 0,510 0,470 0,890 0,290 0,870 0,740 0,614

0,837 1,005 0,920 1,139 0,767 1,240 0,887 0,856

0,182 0,259 0,240 0,680 0,110 0,610 0,616 0,441

Rapport des risques (RR) et 95 % CI

0,5

1

En faveur d'une activité physique importante

Figure 2 - Activité physique après diagnostic : survie spécifique. onKo + • Novembre-Décembre 2013 • vol. 5 • numéro 42

2 En faveur d'une faible activité physique

Une méta-analyse de ces cohortes a été réalisée (9). Il apparaît alors qu’une APS intense post-thérapeutique est significativement associée à une meilleure survie spécifique (RR SS = 0,61, 0,44-0,86 ; random-effect model ; p < 0,001) et à une meilleure survie globale (RR OS = 0,62, 0,54-0,71; fixedeffect model ; p < 0,001) (Fig. 2 et 3). Il s’agit de la première méta-analyse sur ce sujet. Le bénéfice de l’APS sur la survie globale peut intégrer d’une part un effet sur les risques de rechute impactant la survie spécifique et 175


RETOUR DE CONGRÈS

Tableau 2 - Cohortes de patients suivis après cancer colorectal localisé. Nombre de patients Nom de cohorte

Variables d’ajustement

Association APS et survie Survie spécifique (SS) Survie globale (SG)

Campbell 2013 (3)

2 293 CPS-II

Âge, sexe, stade, IMC, tabagisme

• > 8,75 MET-H/sem. vs < 3,5 MET • RR SS = 0,87 (0,61-1,24) • RR SG = 0,58 (0,47-0,71)

Kuiper 2012 (4)

1 339 WHI

Âge, temps depuis diagnostic, IMC, stade, alcool, tabac, THS

• > 17 MET-H/sem. vs < 3 MET • HR SS = 0,29 (0,11-0,77) • HR SG = 0,41 (0,21-0,81)

Baade 2011 (5)

1 825 Queensland

Âge, sexe, IMC, stade, tabagisme, type de traitement

• 593 actifs vs 748 sédentaires • HR SS = 0,88 (0,68-1,15) • HR SG = 0,75 (0,60-0,94)

Meyerhardt 2009 (6)

668 HPFS

Âge, stade, côlon/rectum, IMC, tabac

• > 27 MET-H/sem. (n = 252) vs < 3 MET (n = 102) • HR SS = 0,47 (0,24-0,92) • HR SG = 0,59 (0,41-0,86)

Meyerhardt 2006 (7)

573 NHS

Âge, sexe, IMC, stade, côlon/ rectum, chimiothérapie, tabac, temps depuis diagnostic

• > 18 MET-H/sem. (n = 144) vs < 3 MET (n = 167) • HR SS = 0,39 (0,18-0,82) • HR SG = 0,43 (0,25-0,74)

Meyerhardt 2006 (8)

832 Stage III NCI

Âge, sexe, invasion, perforation, obstruction, ACE, IMC, chimiothérapie, PS

• 18-27 MET-H/sem. (n = 84) vs < 3 MET (n = 273) • HR SS sans rechute = 0,51 (0,26-1,01) • HR SG = 0,71 (0,32-1,59)

Auteur

MÉTA-ANALYSE : ACTIVITÉ PHYSIQUE AVANT LE DIAGNOSTIC DE SURVIE GLOBALE.

d’autre part un effet sur les comorbidités cardiovasculaires, métaboliques et neurodégénératives. L’APS apparaît comme un facteur pronostique de survie indépendant de l’ensemble des autres facteurs pronostiques. En revanche, son association avec une survie globale ou spécifique plus élevée se manifeste seulement pour des niveaux d’activité significatifs (plus de 18 MET-H/sem.), plus élevés que ceux mis en évidence pour les cancers du sein (9 MET-H/sem.). Ces effets doivent conduire à proposer la pratique d’une APS d’intensité soutenue, régulière et sur une longue durée au décours des soins d’un cancer colorectal localisé. Des recommandations existent (AFSOS, 10). Il s’agit néanmoins de propositions issues d’études de cohorte avec des risques de biais multiples. Afin de pallier ces difficultés, un 176

Modèle Nom de l'étude

Meyerhardt (NHS), 2006 Meyerhardt (NCI-III), 2006) Meyerhardt (HPFS), 2009 Baade (Queensland), 2011) Kuiper (WHI), 2012 Campbell (CPS-II), 2013 Fixé Aléatoire

Statistiques pour chaque étude Rapport Limite des risques inférieure

Limite supérieure

0,430 0,710 0,590 0,750 0,410 0,580 0,619 0,608

0,740 1,578 0,850 0,939 0,805 0,713 0,706 0,718

0,250 0,320 0,410 0,599 0,209 0,472 0,543 0,515

Rapport des risques (RR) et 95 % CI

0,5

1

2

En faveur d'une activité En faveur d'une faible physique importante activité physique

Figure 3 - Activité physique avant le diagnostic : survie globale.

essai randomisé au décours de chirurgie et de chimiothérapie adjuvante pour des patients porteurs de cancers coliques de stade III comparant 18 mois d’APS structurée contre les conseils classiques est en cours (Challenge trial).

CONCLUSIONS En associant ces données, un faisceau d’arguments convergents

permet d’affirmer qu’outre les bénéfices psychologiques et corporels, une activité physique et sportive (APS) régulière, deux à trois fois par semaine, réalisée à un niveau d’intensité soutenu à intense est associée à une augmentation des taux de survie globale et spécifique après traitement d’un cancer colique localisé. n

Mots-clés :

Cancer colorectal, Activité physique et sportive, Survie globale, Survie spécifique

onKo + • Novembre-Décembre 2013 • vol. 5 • numéro 42


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