Immunologie en diabétologie : une greffe réussie...
DOSSIER
2 Altérations immunologiques
du diabète de type 1
Que savons-nous ? Dr Danièle Dubois-Laforgue*
Résumé Le diabète de type 1 (DT1) est caractérisé par une destruction sélective des cellules b pancréatiques d’origine auto-immune, conduisant dans des délais variables à une carence totale en insuline. Son diagnostic positif repose sur la mise en évidence, dans le sérum des patients, d’autoanticorps dirigés contre des déterminants antigéniques insulaires. La maladie résulte d’événements stochastiques survenant sur un terrain de prédisposition génétique et impliquant des facteurs environnementaux, encore largement méconnus. Trois étapes sont déterminantes dans la survenue de la maladie : anomalies de la tolérance centrale, permettant la sélection de lymphocytes autoréactifs ; activation et recrutement de ces lymphocytes au niveau des îlots pancréatiques, par un agent qui reste spéculatif ; altération des mécanismes de régulation périphérique, permettant l’expansion de la réponse immune aboutissant à terme à la destruction des cellules b. La meilleure compréhension des mécanismes impliqués dans le développement de l’auto-immunité, conjointement aux données issues des premiers essais d’immuno-intervention chez l’Homme, ouvre de nouvelles perspectives en termes de prévention secondaire (visant à inhiber la réponse immune déjà engagée) et tertiaire (au stade de diabète, permettant de préserver les cellules b résiduelles). La possibilité d’une prévention primaire de la maladie (visant à éviter le déclenchement de l’auto-immunité) reste utopique, car nécessitant l’identification de l’événement initiateur de la réponse immune et/ou une intervention précoce sur la sélection thymique.
Données cliniques Le diabète de type 1 présente une grande hétérogénéité phénotypique (1). Initialement décrit chez les enfants et caractérisé par une carence insulinique aiguë, le DT1 survient en fait dans la moitié des cas après l’âge de 20 ans, avec un continuum de présentation clinique, allant de l’acidocétose révélatrice au diabète pauci-symptomatique évoquant parfois un diabète de type 2 (forme *MCU-PH, service du Pr Boitard, hôpital Cochin - Hôtel-Dieu, Paris
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reconnue sous le terme de LADA, Latent Autoimmune Diabetes in the Adults). La mise en évidence de marqueurs sériques d’auto-immunité revêt ici tout son intérêt, permettant d’établir le diagnostic étiologique du diabète. De plus, dans un tiers des cas, le DT1 s’associe à d’autres maladies auto-immunes spécifiques d’organes (les plus fréquentes étant les thyroïdites), témoignant d’une auto-immunité plus diffuse. Enfin, dans 10 % des cas, le diabète est familial. Il
est vraisemblable qu’à cette hétérogénéité clinique corresponde une hétérogénéité génétique et immunologique.
Données histologiques L’une des façons d’aborder la physiopathologie des maladies auto-immunes est d’en étudier l’organe cible. Du fait de la mauvaise accessibilité du pancréas, les données histologiques disponibles sont essentiellement issues d’études postmortem ou de modèles murins. Chez la souris NOD (Non Obese Diabetic, modèle de diabète auto-immun spontané), des cellules dendritiques et des macrophages infiltrant le pancréas sont visibles dès l’âge de 3 semaines. Des lymphocytes (à prédominance T, LT) apparaissent ensuite en périphérie des îlots (péri-insulite), puis les envahissent (insulite, initialement constituée de LT de type CD4, puis CD8). L’évolution ultérieure est marquée par une destruction des cellules b (insulite destructrice) et la survenue du diabète après l’âge de 15 semaines. Chez l’Homme, l’insulite apparaît très limitée chez les sujets non diabétiques mais porteurs d’autoanticorps. Au diagnostic de diabète, l’insulite est constituée majoritairement de lymphocytes T CD8, et est nettement plus marquée chez l’enfant Diabète & Obésité • Octobre 2013 • vol. 8 • numéro 72