Cas clinique
L’encéphalite à anticorps anti-récepteur au NMDA Une cause sous-estimée de psychose aiguë chez l’enfant et l’adulte jeune L’encéphalite à anticorps anti-récepteur au NMDA est d’origine auto-immune, parfois paranéoplasique, et touche essentiellement le sujet jeune. Elle se présente initialement sur un mode psychiatrique ou neurologique et son évolution peut aller jusqu’à un état catatonique avec état de mal convulsif et dysautonomie. Son pronostic est, dans la majorité des cas, favorable sous traitement
Dr Frédérique Beaudonnet, Dr Nathalie Garrec, Dr Annie Sfez, Dr Arnaud Chalvon-Demersay Service de pédiatrie, Centre Hospitalier de Lagny, Marne-laVallée
par immunoglobulines ou anticorps anti-CD20. Nous rapportons ici l’histoire clinique d’une adolescente de 14 ans ayant présenté une forme essentiellement psychiatrique d’encéphalite.
Introduction L’encéphalite à anticorps anti-récepteur au N-Méthyl-D-Aspartate (NMDA-R) est une entité récemment décrite, associée à la présence d’anticorps dirigés contre les hétéromères NR1 et NR2 des récepteurs au NMDA et dont le tableau clinique est essentiellement neuro-psychiatrique. Initialement rapportée en association à des tératomes matures de l’ovaire, plusieurs cas (notamment pédiatriques) ont ensuite été décrits de façon isolée.
Observation Une adolescente de 14 ans était admise en janvier 2010 pour des troubles du sommeil et du comportement avec hallucinations. Issue de parents d’origine marocaine non consanguins, l’adolescente n’avait pas d’antécédent médical et menait une scolarité normale.
bbHospitalisation en psychiatrie L’histoire débutait en novembre 2009 par des troubles du sommeil et une attitude de la jeune fille décrite comme “renfermée”. Fin décembre, elle présentait une crise convulsive tonico26
clonique généralisée sans fièvre suivie 24 h après d’hallucinations visuelles et auditives. La jeune fille était hospitalisée en psychiatrie pendant 2 semaines, avec persistance d’hallucinations et de troubles du comportement (jusqu’à ingestion de ses matières fécales et refus alimentaire avec perte de 6 kg en 3 semaines) malgré un traitement neuroleptique. Après récidive d’une 2e crise convulsive généralisée, un traitement par valproate de sodium était débuté et la jeune fille était transférée en pédiatrie.
tabolique était infructueuse. On retrouvait des anticorps anti-nucléaires faiblement positifs à 1/160, sans spécificité. La recherche d’anticorps antirécepteur au NMDA s’avérait positive dans le LCR et le sang (taux non quantifié). L’IRM cérébrale était normale et l’EEG retrouvait une activité lente delta diffuse, prédominant à droite, sans anomalie paroxystique (Fig. 1). La recherche de tumeur primitive par échographie et scanner thoraco-abdomino-pelvien était négative.
bbTraitement et suites bbTransfert au service de pédiatrie Elle présentait alors un syndrome confusionnel avec une alternance de phases calmes et agitées, une insomnie avec inversion du rythme nycthéméral, et des troubles du langage à type d’écholalie. Du point de vue cognitif, elle avait perdu la lecture et l’écriture. L’examen clinique retrouvait des dyskinésies oro-faciales sans autre anomalie. Il n’y avait pas de syndrome inflammatoire biologique. L’analyse du liquide céphalo-rachidien (LCR) était strictement normale. La recherche d’infection virale et de maladie mé-
Un traitement par anticorps antiCD20 (rituximab) était débuté après 8 semaines d’évolution (2 injections à 14 jours d’intervalle). Les dyskinésies oro-faciales avaient disparu lors de la 2e injection. Les hallucinations commençaient à régresser 15 jours après la 2e injection pour disparaître complètement par la suite. Elle recommençait à écrire quelques phrases simples après 3 semaines et pouvait reprendre sa scolarité après 5 semaines. Il persistait, à 1 an d’évolution, une amnésie lacunaire. L’EEG contrôlé 2 mois après la fin du traitement était normal ainsi que l’IRM à 4 mois. A 6 mois d’évolu-
Adolescence & Médecine • Juillet 2012 • numéro 4