échos des congrès
journées de l’hypertension artérielle À retenir
Pierre Attali (Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, pierre.attali@chru-strasbourg.fr)
HTA résistante : à propos des recommandations D’après une session DPC (JHTA - Paris le 20 décembre 2013)
quelles Investigations pour l’HTA résistante ? (G. doll, tours)
Il est recommandé de définir une HTA résistante comme une HTA non contrôlée en consultation et confirmée par une mesure en dehors du cabinet médical malgré une stratégie thérapeutique comprenant des règles hygiéno-diététiques adaptées et une trithérapie médicamenteuse antihypertensive depuis au moins quatre semaines à dose optimale tolérée, incluant un diurétique adapté (Classe 1, Grade C, ++++). Les caractéristiques des patients avec une HTA résistante sont les suivantes : • présence d’une PA initialement très élevée ; • atteinte d’organes cibles ; • association à un diabète ou une obésité ; • atteinte athéromateuse vasculaire avec rigidité artérielle ; • âge avancé ; • origine africaine ; • prise excessive de sel. Devant une HTA résistante, les examens suggérés pour la recherche d’une HTA secondaire sont les suivants (en fonction de chaque
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patient, le médecin spécialiste de l’HTA sélectionne dans ce listing l’examen le plus approprié) : • ionogramme sanguin et natriurèse des vingt-quatre heures ; • créatininémie ; • créatininurie et protéinurie des vingt-quatre heures ; • angioscanner abdominal ; • échographie Doppler des artères rénales ; • dosage de la rénine et de l’aldostérone plasmatique pour calcul du rapport aldostérone/rénine plasmatique ; • dosage des métanéphrines et des normétanéphrines urinaires des vingt-quatre heures ; • dosage du cortisol libre urinaire des vingt-quatre heures avec test de freinage rapide (par dexaméthasone 1 mg) ; • oxymétrie nocturne ; • enregistrement polysomnographique (Classe 2, Grade B, ++). La cause la plus fréquente d’HTA secondaire associée à une HTA résistante est le syndrome d’apnées du sommeil (64 %), suivie de l’hyperaldostéronisme primaire (5,6 %) et de la sténose de l’artère rénale (2, 4 %). Les examens suggérés pour la recherche d’une atteinte d’organes cibles sont le dosage de la créatini-
némie, de la micro-albuminurie et de la protéinurie ainsi que la réalisation d’un ECG de repos et d’une échocardiographie. Le bilan vasculaire sera réalisé en fonction du contexte clinique (Classe 2, Grade B, + +).
Investigations pour le bilan étiologique : apports des dosages hormonaux (J.P. fauvel, lyon)
Les dosages hormonaux dans l’HTA résistante concernent essentiellement les hyperaldostéronismes primaires. Les autres causes sont nettement moins fréquentes : hypercorticisme, phéochromocytome, acromégalie, hyperthyroïdie et intoxication à la réglisse. Le diagnostic est difficile car la clinique est rarement évocatrice. Il faut néanmoins dépister ces causes hormonales car elles occasionnent des HTA sévères, augmentent la morbi-mortalité cardiovasculaire et nécessitent un traitement spécifique. Pour le phéochromocytome, il suffit de doser les dérivés méthoxylés
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des catécholamines plasmatiques ou urinaires : leur normalité permet d’écarter ce diagnostic. Le syndrome de Cushing, dont il existe des formes frustes, nécessite un dépistage précoce. En pratique, il suffit de pratiquer en ambulatoire un dosage du cortisol urinaire des vingt-quatre heures, une cortisolémie à 16h00, 0h00 et un test de freinage minute à la dexaméthasone sachant que la normale de la cortisolémie à 8h00 est < 50 nmol/L. L’hyperaldostéronisme primaire concerne 10 à 20 % des HTA. Cette HTA est souvent compliquée. Le diagnostic est difficile avec parfois 10 ans de latence. Une hypokaliémie n’est retrouvée que dans moins de 50 % des cas. Les causes d’hyperaldostéronisme primaire sont pour 35 % des cas un adénome surrénalien, pour 64 % des cas une hyperplasie (scanner souvent normal) et pour moins de 1 % des cas des formes familiales. Pour le dépistage, il convient de doser le rapport aldostérone/rénine active. Un hyperaldostéronisme primaire est suspecté lorsque ce rapport est supérieur à 32 avec une aldostéronémie > 160 ng/L. Ce résultat est valide si le patient est sous traitement neutre depuis 2 à 4 semaines, avec une consommation sodée supérieure à 100 mmol/j. Ce dépistage s’adresse au patient avec une HTA modérée à sévère (PAS > 160 mmHg ou PAD > 100 mmHg), au patient avec une HTA et une hypokaliémie avec ou sans diurétique (3,5 mmol/L sous diurétiques, 3,7 mmol/L sans traitement et 3,9 mmol/L sous IEC), au patient avec une HTA associée à une complication précoce (AVC < 40 ans), au patient avec une HTA et un nodule surrénalien, et en cas d’atteinte familiale. Il est préférable de réaliser ces dosages en centre spécialisé.
les recommandations : synthèse (T. denolle, dinard)
En amont des onze recommandations détaillées concernant la prise en charge de l’HTA résistante, quatre points clés sont à retenir. Ils concernent la méthodologie, la définition et les algorithmes de prise en charge par le médecin généraliste et par le médecin spécialiste de l’HTA. La méthodologie de ces recommandations sur l’HTA résistante est la philosophie de ce document avec une volonté de rédiger un document pratique, synthétique et lisible. Pour cela, un groupe de travail pluridisciplinaire a été constitué, avec des médecins libéraux et hospitaliers, des spécialistes et généralistes, tant dans le groupe de travail que dans l’important groupe de lecture (40 membres). Un argumentaire, préalable à la rédaction des recommandations, a été jugé incontournable pour que la méthodologie de ces recommandations soit endossée par la HAS. Une triple cotation a été souhaitée : en classe de recommandations, en grade selon le niveau scientifique et en niveau pour savoir s’il y a un consensus ou non des experts. De même, au groupe de lecture, il a été demandé de coter la précision, la pertinence, l’applicabilité, la correspondance à la pratique et l’utilité (cotation de 1 à 9). Deuxième point : la définition. L’importance d’une définition précise de l’HTA résistante est bien montrée par les résultats d’une étude récente : si l’on prend seulement le critère de trithérapie antihypertensive, 31 % avaient une HTA résistante, mais si l’on inclut dans la trithérapie un diurétique, ce taux diminue à 15 %. De même pour le critère trithérapie à dose maximale, il diminue fortement à 5 %. Enfin, si les deux critères sont associés, le taux s’effondre à 3 %.
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Les deux algorithmes de prise en charge Une fois le caractère résistant de l’HTA confirmé, pour la conduite à tenir, les auteurs ont distingué, de façon pragmatique, la prise en charge initiale par le médecin généraliste de celle dans un 2e temps par le médecin spécialiste de l’HTA. Le médecin généraliste, face à une HTA résistante, doit essayer de répondre à la série de questions suivantes : • Cette HTA est-elle réellement résistante ? C’est-à-dire, comportet-elle une trithérapie adaptée et à dose optimale ? • Y a-t-il un problème d’observance ? • Y a-t-il une HTA isolée de consultation, donc un effet blouse blanche ? • Y a-t-il un facteur, un médicament ou une substance favorisant la résistance de cette HTA ? Si ce premier algorithme n’a pas permis le contrôle de l’HTA, le médecin généraliste devrait passer la main au spécialiste de l’HTA. Le médecin spécialiste de l’HTA doit essayer de remplir une triple mission : rechercher une atteinte d’organes cibles, rechercher une HTA secondaire et envisager le traitement après la trithérapie. Pour la recherche d’une atteinte d’organe cible, autant pour le rein que pour le cœur, la démarche reste classique, mais pour ce qui est du bilan vasculaire, les auteurs n’ont volontairement pas voulu être directifs. Pour la cause de l’HTA, le spécialiste pourra sélectionner à partir du listing d’examens proposés dans les recommandations, le(s) examen(s) le(s) plus approprié(s). Quant au traitement qui suit la trithérapie, deux options sont à discuter : soit passer à une quadrithé-
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rapie (avec en première intention la spironolactone), et c’est l’une des recommandations les plus fortes, soit envisager la dénervation rénale (qui devrait être encore considérée comme en cours d’évaluation).
Investigation pour le bilan du retentissement : quel bilan cardiaque et vasculaire ? (P. gosse, bordeaux)
Le bilan cardiovasculaire du retentissement d’une HTA résistante comprend un ECG systématiquement et souvent une échocardio-
graphie pour mesurer la masse ventriculaire gauche indexée et évaluer la fonction cardiaque par la mesure de la FEVG et du strain longitudinal global. L’étude systématique de la rigidité artérielle est plus discutée. La mise en évidence d’une HVG par l’ECG peut se baser sur des anomalies de voltage (RavL ou Cornell : RavL + Sv3 + 8 mm [F] > 28), des anomalies du produit Cornell (Voltage x durée du QRS > 2 440) ou de trouble de la repolarisation (strain). Le critère électrique le plus simple et le plus performant est l’amplitude de l’onde R en AVL : une valeur de 6 mm a une sensibilité de 59 % et une spécificité de 76 %. La présence d’un strain sur l’ECG
basal ou sa modification lors d’ECG répétés ont été associées à un mauvais pronostic. À l’échocardiographie, la valeur de seuil la plus performante de la masse VG indexée pour la prédiction des événements cardiovasculaires est de 51 g/m2,7 : elle a été associée à une sensibilité de 75 %, une spécificité de 57 % et une aire sous la courbe de 0,68. À noter que la présence d’une HVG prédit le caractère résistant d’une HTA dans une population de patients non encore traités. Parmi les critères fonctionnels, le strain global longitudinal diminué semble être plus sensible qu’une altération de la FEVG. n
pour un meilleur contrôle tensionnel D’après le symposium organisé par le laboratoire Daiichi Sankyo (JHTA - Paris le 19 décembre 2013)
Des patients suffisamment informés sur leur HTA ?
(B. Vaïsse, Marseille) Le contrôle tensionnel en automesure reste encore trop insuffisant, environ 50 % (enquête FLAHS). L’observance est un problème crucial : 50 % des patients ne prennent plus leur traitement antihypertenseur à un an.
Comment améliorer l’observance ? Un questionnaire d’observance, simple d’utilisation, est à disposition des médecins. La consultation d’information et d’annonce peut être une aide, chez le sujet nouvellement hypertendu, pour accepter et comprendre sa maladie. La pratique de l’automesure tensionnelle bien utilisée, c’est-
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à-dire avant une visite chez le médecin, doit être encouragée. La CNAM a mis en place un projet pour promouvoir l’automesure tensionnelle dans l’HTA en mettant à disposition gratuitement à l’ensemble des médecins généralistes français un appareil d’automesure tensionnelle. L’amélioration de l’observance, du traitement médicamenteux et des règles hygiéno-diététiques devrait faciliter l’atteinte de l’objectif 2015 de 70 % de patients hypertendus contrôlés.
Une intensification suffisante des traitements ? (X. Girerd, Paris et B. vaïsse, Marseille)
Alors que la moitié des patients hypertendus ne sont pas contrôlés, seule une minorité de
patients sont sous trithérapie antihypertensive. La stratégie thérapeutique proposée par la SFHTA est de commencer d’abord par une monothérapie. Si toutes les classes sont envisageables, il vaut mieux prendre un médicament auquel le patient adhère le plus, ARAII et ensuite IEC, qui sont à 60 % d’adhésion à un an. Au sein d’une classe, tous les agents antihypertenseurs n’ont pas la même efficacité antihypertensive. Ainsi, dans une revue systématique sur les ARA-II, la baisse de la PA sur vingt-quatre heures a été maximale avec olmésartan. La bithérapie fixe doit être envisagée si la monothérapie ne permet pas le contrôle de la PA après un mois de traitement. En cas d’objectifs tensionnels non atteints, plusieurs combinaisons peuvent être essayées
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avant le passage à la trithérapie optimale. Par exemple, l’association olmésartan/HCTZ a pu diminuer la PAS jusqu’à 23 mmHg, avec une relation dose-effet de l’ARAII et du diurétique, en particulier chez des patients sensibles au sel. L’autre alternative est l’association d’un bloqueur du SRAA avec un antagoniste calcique, comme dans l’étude ACCOMPLISH, avec en corolaire une diminution des événements coronariens par l’antagoniste calcique. La bithérapie olmésartan/amlodipine a montré un effet-dose remarquable avec une baisse de la PAS atteignant 30 mmHg à la posologie maximale de 40/10 mg. Dans l’étude OLAS, en termes de PA, les deux associations sont efficaces, mais sur le risque diabétogène à 3 ou 4 ans, le risque d’augmentation de la glycémie est plus important avec l’association olmésartan/HCTZ.
Pour un duo gagnant médecin/patient : l’entretien motivationnel du patient (A. Pathak, toulouse)
« La motivation c’est de passer d’une médecine fondée sur les preuves à une médecine fondée sur le patient. » « La porte du changement s’ouvre de l’intérieur. » Dans les recommandations françaises, avant de débuter le traitement, il est préconisé de réaliser une consultation d’information et d’annonce de l’HTA. L’entretien motivationnel repose dans un premier temps sur l’identification du stade de changement dans lequel se situe le patient (selon le modèle de Prochaska). L’ambivalence et la motivation sont au centre d’un processus de changement, mais le changement peut entraîner la résistance du patient.
Les outils sont mémorisables dans l’acronyme OUVER : • poser des questions Ouvertes ; • Valoriser ; • pratiquer l’Écoute réfléchie ; • Résumer. Poser des questions ouvertes consiste à éviter les réponses par oui ou par non, à encourager le patient à s’exprimer, à créer un climat de confiance et d’acceptation. Valoriser/soutenir consiste à ponctuer l’entretien avec des phrases valorisant la démarche, les efforts. Pour conclure, j’identifie le stade de mon patient et s’il est ambivalent, je définis “son” objectif ; je mets en place un entretien motivationnel en tenant compte des outils cités et de l’environnement, et enfin je réalise comment n mon patient évolue.
Mots-clés : HTA, Traitements, Entretien motivationnel, Bilan étiologique, Bilan du retentissement
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