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CARDINALE CARDIOLOGIE

R e v u e d i d a c t i q u e e t p r at i q u e e n c a r d i o l o g i e

d www.cardinale.fr

Prise en charge des sténoses asymptomatiques des carotides internes

Faut-il suivre la recommandation basée, de manière pratiquement exclusive, sur le degré de la sténose ? La réponse du Dr Serge Kownator…

Le point sur

Conférences et congrès

Pollution par l’ozone et risque d’accident vasculaire cérébral

Gestion du traitement antiagrégant plaquettaire

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page 63

éPIDéMIOLOGIE

Interspécialités

Accidents vasculaires cérébraux et travail posté

Dysfonction érectile : un marqueur précoce de l’état vasculaire

page 36

page 54

Février 2014 • Volume 8 • n° 61 • 9 E


sommaire

CARDINALE CARDIOLOGIE

R e v u e d i d a c t i q u e e t p r at i q u e e n c a r d i o l o g i e

Directeur de la publication : Dr Antoine Lolivier Rédacteur en chef : Dr Serge Kownator Rédacteurs en chef adjoints : Pr Victor Aboyans, Dr Stéphane Cosson Directrice de la Rédaction : Odile Mathieu • Rédactrice : Caroline Sandrez • Directrice de Fabrication et de Production : Gracia Bejjani • Assistante de Production : Cécile Jeannin • Maquette & illustration : Élodie Lelong • Service abonnements : Claire Lesaint • Impression : ­Imprimerie de Compiègne 2, avenue Berthelot – ZAC de Mercières BP 60524 – 60205 Compiègne cedex

Février 2014 • Vol. 8 • N° 61

www.cardinale.fr

n Éditorial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 34

n épidémiologie Accidents vasculaires cérébraux et travail posté Des preuves encore insuffisantes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 36

Jean-Bernard Henrotin (Vandœuvre-Lès-Nancy), Yannick Béjot, Maurice Giroud (Dijon)

Comité de lecture Dr Walid Amara (Montfermeil) • Dr Pierre Attali (Strasbourg) • Pr François Carré (Rennes) • Dr Gabriel Choukroun (Amiens) • Dr Serge Cohen (Marseille) • Pr Geneviève Derumeaux (Lyon) • Dr François Diévart (Dunkerque) • Dr Jean-Jacques Domerego (Nice) • Dr Alain Ducardonnet (Paris) • Dr Meyer Elbaz (Toulouse) • Pr Michel Farnier (Dijon) • Pr Alain Grynberg (Jouy-en-Josas) • Pr Daniel Herpin (Poitiers) • Dr Jean-Pierre Houppe (Thionville) • Dr Patrick Jourdain (Pontoise) • Pr Christophe Leclercq (Rennes) • Dr François Luizy (Paris) • Dr Marie-Christine Malergue (Paris) • Dr Emmanuel Messas (Paris) • Dr François Philippe (Paris) • Dr Pascal Poncelet (Lille) • Dr Naïma Rahmoun (Oran) • Dr Gilles Traisnel (Lille) • Dr Olivier Varenne (Paris) • Dr Stéphane Zuily (Nancy)

n mise au point

Prise en charge des sténoses asymptomatiques des carotides internes Faut-il suivre les recommandations ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 42 Serge Kownator (Thionville)

n le point sur

Pollution par l’ozone et risque d’accident vasculaire cérébral Un risque, même avec un faible niveau de pollution. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 49

Yannick Béjot, Jean-Bernard Henrotin, Maurice Giroud (Paris)

n interspécialités Dysfonction érectile Un marqueur précoce de l’état vasculaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 54

Ludovic Ferretti (Villenave-d’Ornon, Bordeaux)

Comité scientifique Pr Michel Bertrand (Lille) • Pr Jean-Pierre Bourdarias (Boulogne) • Pr Jean-Paul Broustet (Bordeaux) • Pr Christian Cabrol (Paris) • Pr Alain Cribier (Rouen) • Pr Vincent Dor (Monaco) • Dr Jean Fajadet (Toulouse) • Dr Guy Fontaine (Paris) • Pr Gilbert Habib (Marseille) • Pr Samuel Lévy (Marseille) • Dr François Luizy† (Paris) • Pr Jean Marco (Toulouse) • Dr Jean-Baptiste Michel (Paris) • Pr Philippe Gabriel Steg (Paris) • Pr Paul Touboul (Lyon) • Pr Bernard Belhassen (Tel-Aviv) Cardiologie Cardinale est une publication © Expressions Santé SAS 2, rue de la Roquette Passage du Cheval Blanc, Cour de Mai - 75011 Paris Tél. : 01 49 29 29 29 - Fax : 01 49 29 29 19 E-mail : cardinale@expressiongroupe.fr RCS Paris B 394 829 543 ISSN : 1960-1646 N° de Commission paritaire : 0115 T 89308 Prix au numéro : 9 e. Mensuel : 10 numéros par an. Les articles de “Cardiologie Cardinale” sont publiés sous la responsabilité de leurs auteurs. Toute reproduction, même partielle, sans le consentement de l’auteur et de la revue, est illicite et constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal.

n conférences et congrès

Gestion du traitement antiagrégant plaquettaire Symposium présenté aux JESFC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 63

n rendez-vous de l’industrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 48 n Bulletin d’abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 48 n Dessin du mois (Jean-Philippe Kevorkian) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 62

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Assemblés à cette publication : 2 bulletins d’abonnement (2 pages et 4 pages). Photo de couverture : © DR


éditorial

Bon à savoir

C

haque année, l’American Heart Association publie une mise à jour des données épidémiologiques concernant les maladies cardiovasculaires aux États-Unis. Certes nous ne sommes pas américains, certes on ne peut n Serge pas assimiler la population Kownator française et sa santé à celles des États-Unis, il est cependant intéressant d’observer les tendances d’outre-Atlantique car souvent elles sont l’expression de ce qui nous guette. Ainsi, les parts attribuables du risque de mortalité cardiovasculaire se répartissent en 40,6 % pour l’HTA, 13,7 % pour le tabagisme, 13,2 % pour la diététique inadaptée, 11,9 % pour la sédentarité et 8,8 % pour les intolérances au glucose. Aux États-

si l’on peut dire privilégiée, 1 décès sur 6 leur est consécutif, soit 379 559 en 2010. Les AVC ne sont pas en reste, puisqu’il en survient 1 toutes les 40 secondes avec un décès toutes les 4 minutes, pour un total de 795 000 chaque année. Tout en restant important, il faut noter la réduction du taux de mortalité liée aux AVC qui a diminué de 22,8 % entre 2000 et 2010. Cette analyse épidémiologique ne serait pas complète si elle ne faisait pas un parallèle avec l’impact économique et on estime ainsi le coût annuel, direct et indirect, des maladies cardiovasculaires à 315,4 milliards de dollars, le coût du cancer étant lui de 205 milliards en 2008. Par comparaison, les maladies cardiovasculaires coûteraient environ 30 milliards d’euros en France. Bien sûr, il s’agit là d’une déclinaison de chiffres, sorte d’inventaire à la Prévert, mais n’estce pas le cas de la plupart des rapports épidémio-

On estime le coût annuel des maladies cardiovasculaires à 315,4 milliards de dollars aux états-Unis. Unis, 20,5 % des hommes, 15,9 % des femmes de plus de 18 ans continuent à fumer. Globalement, un tiers des adultes sont sédentaires et moins d’1 % adopte les mesures diététiques recommandées. Plus marquant encore, 35 % des adultes sont obèses et 68,2 % des plus de 20 ans sont en surpoids ou souffrent d’obésité. Si près de 32 millions d’américains ont un cholestérol augmenté, c’est le nombre d’hypertendus qui paraît impressionnant puisqu’il s’agit de 78 millions de sujets, soit un tiers de la population et, comme en France, seule une grosse moitié (53 %) des sujets traités sont équilibrés à la cible. Quant au diabète, il progresse de manière inquiétante touchant près de 20 millions de personnes. Globalement, 235,5 décès pour 100 000 habitants sont imputables aux maladies cardiovasculaires avec une réduction de 31 % entre 2000 et 2010. Il faut noter encore un décès par maladie cardiovasculaire toutes les 40 secondes ! Parmi ces maladies cardiovasculaires, les coronaropathies se taillent une place

34

logiques ? Il faut pourtant en tirer les leçons. Bien sûr encore, les États-Unis ne sont pas la France, mais à beaucoup d’égards, on voit qu’il existe des similitudes et l’impact des maladies cardiovasculaires sur la “santé” reste important des deux côtés de l’Atlantique. Ici, comme aux États-Unis, les progrès à réaliser sur la prise en charge de l’HTA sont indiscutables. Ici, comme aux États-Unis, les besoins de modifications comportementales arrivent au premier plan. Le sevrage tabagique, la lutte contre le surpoids et l’obésité, l’éducation alimentaire et la pratique de l’exercice physique sont essentiels. N’oublions pas cependant qu’il s’agit plus d’un enjeu de société que d’un enjeu purement médical, nos politiques devraient s’en souvenir plus souvent. n

Bibliographie • Go AS, Mozaffarian D, Roger VL et al. Heart disease and stroke statistics--2014 update: a report from the american heart association. Circulation 2014 ; 129 : e28-e292.

Cardiologie - Cardinale • Février 2014 • vol. 8 • numéro 61


Épidémiologie

Accidents vasculaires cérébraux et travail posté Des preuves encore insuffisantes

Jean-Bernard Henrotin (Département Épidémiologie en entreprise, INRS, Vandœuvre-Lès-Nancy), Yannick Béjot, Maurice Giroud (Registre dijonnais des accidents vasculaires cérébraux, Département de Neurologie, Centre Hospitalier Universitaire de Dijon)

Introduction

© Artwell - Fotolia

Nous présentons dans cet article les données épidémiologiques sur Accidents vasculaires cérébraux (AVC) et Travail posté (TP). Une étude de bonne qualité rapporte une association significativement positive, mais faible, entre TP et AVC. Globalement, les résultats se présentent contradictoires et le plus souvent non significatifs. Ainsi, les preuves épidémiologiques sont insuffisantes pour évoquer un lien de causalité entre TP et AVC. D’autres études spécifiques sont nécessaires. Toutefois, l’attention est attirée sur l’intérêt de mener une surveillance médicale des travailleurs postés sur le plan cardiovasculaire, comme le préconise actuellement la Société française de Médecine du travail. Si la relation entre AVC et travail posté n’est pas formellement démontrée, une surveillance est cependant nécessaire.

L

e travail posté, incluant le travail de nuit, est une constante dans les sociétés industrielles modernes. En France, en 2011, la fréquence du travail en plages horaires effectuées entre minuit et 5h du matin parmi les ouvriers est de 20 %, et de 14 % parmi les cadres et professions supérieures (source INSEE 2011). Les travailleurs postés présentent plus de problèmes

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de santé que les salariés de jour (1). Approximativement, 10-20 % des salariés postés présentent une intolérance à ce rythme de travail dans les deux premières années et le quittent. Pour les travailleurs postés, il est rapporté plus de troubles du sommeil, de problèmes gastro-intestinaux, de cancers, d’issues de grossesse défavorables, de diabète et troubles

métaboliques, et notamment de maladies cardiovasculaires (2). Les maladies cardiaques ischémiques et Accidents vasculaires cérébraux (AVC) sont des maladies multifactorielles qui ont en commun des facteurs de risque cardiovasculaire. S’il existe de nombreuses études ayant examiné l’association entre TP et maladies cardiaques isché-

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accidentS vasculaireS cérébraUX ET TRAVAIL POSTÉ

Tableau 1 - Études épidémiologiques examinant le lien entre le travail posté et la survenue d’AVC.

Source

Exposition

Maladies

Design

Forces

Faiblesses

Index MINORS

Taylor (20), 1972 USA

TP rotation Travail de nuit

Lésion vasculaire du système nerveux central (fatal)

• Cohorte historique • n = 8 767 • Multi-secteur • Suivi 1956-1968

• Taux de participation • Mesure indépendante de l’exposition et maladie • Salariés de secteurs professionnels différents

• Mesure de l’exposition imprécise • Pas de facteur de confusion pris en compte • Diagnostics des maladies sur certificat de décès • Comparaison externe nationale • Faible durée de suivi (15 ans)

13

Karlsson (10), 2005 Suède

Rotation lente, 3 postes schémas avec travail de nuit

AVC ischémique (fatal)

• Cohorte historique • n = 5 442 • Industrie du papier • Suivi 1952-2001

• Exposition détaillée, indépendante des salariés • Population socioéconomique homogène (ouvriers) • Longue durée de suivi (52 ans)

• Manque de contrôle des facteurs de confusion • Faible nombre de cas d’AVC (n = 35) • Diagnostics des maladies sur certificat de décès

15

Fujino (5), 2006 Japon

Travail de nuit fixe TP Rotation

Maladie cérébrovasculaire (fatal)

• Cohorte prospective • n = 17 649 • Population générale active • Suivi 1988-2003

• Design longitudinal • Contrôle des facteurs de confusion

• Peu de cas (n = 132) • Exposition (autorapportée, une mesure) • Diagnostics des maladies sur certificat de décès • Faible durée de suivi (15 ans) • Pas seulement AVC ischémique

15

Ellingsen (6), 2007 Qatar

TP en rotation

AVC et hypertension

• Cohorte rétrospective, • n = 2 562 • Entreprise d’engrais • Suivi 1972-2003

• Longue durée du suivi (31 ans)

• Manque de contrôle des facteurs de confusion • Mesure de la maladie (pas de critères, pas de codage, non exhaustif, cas prévalents…) • Mélange hypertension et AVC • Biais déclaratif possible (exposition liée à maladie)

8

Brown (4), 2009 USA

TP en rotation

AVC ischémique (fatal et non fatal)

• Cohorte prospective • n = 1 660 • Hôpitaux • Suivi 1988-2004

• Design longitudinal • Effectif large • Facteurs de confusion principaux recueillis • Population socioéconomique homogène (infirmière)

• Durée du suivi (16 ans) courte pour AVC • Exposition : une seule mesure ; autodéclarée • Pas de prise en compte des données manquantes • Mesure de la maladie

17

Hermansson (21), 2007 USA

TP (sans précision)

AVC ischémique (fatal et non fatal)

• Étude castémoins • n = 138 cas/ n = 469 témoins • Population générale • Suivi 1985-2000

• Design (cas-témoins nichée dans une cohorte) • Facteurs de confusion importants

• Durée du suivi (15 ans) courte pour AVC • Pas de suivi au-delà de 74 ans • Exposition : une seule mesure ; autodéclarée • Mesure de la maladie

14

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Épidémiologie

miques, à l’inverse, l’association entre TP et AVC a été moins explorée. C’est pourquoi il est proposé dans cet article de faire le point sur les études publiées dans la littérature ayant examiné le lien entre l’exposition au TP et la survenue d’AVC, et d’en examiner le niveau de preuve.

Source

ICR (IC 95 %)

Taylor PJ, 1972 [20] H,a,v, ✝

0,82 (0,63 -1,06)

Karlssonl B, 2005 [10] H,b,i, ✝

1,56 (0,98 - 2,51)

Fujino Y, 2006 [5]

H,c,v, ✝

0,88 (0,41 - 1,91)

Fujino Y, 2006 [5] H,b,v, ✝

1,12 (0,66 - 1,91)

Hermansson J , 2007 [21] F,a,i, ✧

1,0 (0,6 - 2,0)

Hermansson J , 2007 [21] H,a,i, ✧

1,2 (0,6 - 2,3)

Ellingson T , 2007 [6] F,b,v, ✧

1,6 (1,3 - 1,97)

Brown DL, 2009 [6] F,b,i, ✧

1,04 (1,01 - 1,07)✩

SMR SMR HR HR

OR OR HR HR

0,3

1

Indice comparatif de risque

4

H : Hommes ; F : Femmes a : TP en multiple schémas ; b : TP en rotation; c: TP nuit-fixe; v : accidents vasculaires cérébraux sans précision i : accidents vasculaires cérébraux ischémiques ; ✝ : cas fatal; ✧ cas non fatal

Que dit la littérature ?

Les études de cohorte ou cas-témoins, publiées en français ou en anglais, de janvier 1970 à décembre 2012, et examinant la relation entre TP et AVC (cas fatals et/ou non fatals) ont été recherchées dans la base de données MEDLINE. Il n’existe pas de définition internationalement reconnue du TP. Il a été retenu comme TP, dans cette revue, tout travail réalisé sur des plages horaires de soirs réguliers (entre 15h et minuit) ou de nuits régulières (début après 23h, fin avant 11h) ou en rotation (jour, soir, nuit). Des recherches complémentaires ont été réalisées dans les bibliographies de publications sélectionnées et les revues repérées sur le sujet. La qualité méthodologique des études a été évaluée à partir de l’index MINORS (Methodological Index for Non-Randomized Studies) (3). Un seuil de 16 ou plus était utilisé pour repérer les études de qualité intéressante. La recherche bibliographique a mis en évidence 6 études observationnelles ayant examiné l’association entre TP et AVC (Tab. 1). Globalement, la qualité des études reste faible, puisque seule une étude affiche un score de l’index MINORS supérieur à 16 (Tab. 1). Les forces d’association, entre 0,82 et 1,6, se présentent contrastées sans qu’il se dégage une véritable tendance globale (Fig. 1). Aucune étude de mortalité ne

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✩ Qualité d’étude satsfaisante : Index MINORS ≥16 (voir tableau 1) SMR : standardized mortality ratio ; HR : hazard ratio ; RR : relative risk ; OR : odds ratio ; SHR : standardized hospitalization ratio.

Figure 1 - événements cérébrovasculaires (cas fatal ou cas non fatal et fatal).

rapporte d’association significative. Parmi les études de morbidité, deux études rapportent une association significativement positive. Au final, au regard des critères d’analyse utilisés dans cette revue, une seule étude (4) retient l’attention (Tab. 1). Dans cette étude de cohorte concernant 80 108 infirmières et examinant la survenue d’AVC ischémiques après TP, il est observé une augmentation de 4 % du risque de survenue d’AVC pour chaque période de 5 ans (test de tendance significative ; p = 0,01).

Que peut-on en retenir ?

Globalement, cette revue montre que les résultats issus d’études observationnelles de recherche étiologique examinant le lien entre AVC et TP ne sont pas actuellement consistants : en 2013, les preuves épidémiologiques sont insuffisantes pour évoquer un lien de causalité. Cependant, à noter de manière très intéressante, qu’une étude de bonne qualité rapporte une association entre AVC ischémique et TP en rotation de nuit et cela, dans une relation dose-réponse (4).

Une analogie avec les risques cardiovasculaires Ce résultat, insuffisant en soi car

isolé, est en concordance avec des résultats issus d’études examinant le lien entre maladies cardiaques ischémiques et TP. Certains auteurs ont conclu qu’une relation causale entre maladies cardiaques ischémiques et TP pourrait exister, tandis que d’autres auteurs restent encore prudents. Dans une récente méta-analyse, Vyas et al. (2) rapportent que le risque de survenue d’un événement cardiaque ischémique était augmenté de 1,24 (CI95 % : 1,101,39). Par conséquent, compte tenu des facteurs de risque cardiovasculaire communs, la survenue d’AVC ischémique suite à une exposition au TP ne peut être exclue. Une augmentation de la fréquence de facteurs de risque cardiovasculaire chez les salariés en TP comparativement aux salariés en horaire de jour est rapportée. Cela est fréquemment observé pour le tabagisme (4-6).

Les conséquences métaboliques du travail posté Concernant les habitudes alimentaires, des changements dans la fréquence, la qualité et le moment des repas parmi les salariés en TP sont signalés ailleurs (7). Des déséquilibres alimentaires pourraient ainsi avoir un impact négatif sur le métabolisme. Des auteurs évoquent

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accidentS vasculaireS cérébraUX ET TRAVAIL POSTÉ

qu’une exposition au TP est associée à une augmentation de l’indice de masse corporelle supérieure à l’augmentation attendue pour l’âge (8, 9). L’association entre TP et diabète a été examinée dans quelques études longitudinales, avec des résultats allant dans le sens d’une augmentation du risque de survenue de diabète lors du TP (10, 11). Concernant la tension artérielle, plusieurs études de cohorte récentes, notamment japonaises, signalent une association avec le TP (9, 12). L’impact du TP sur les paramètres lipidiques est également suggéré (13). Des données d’étude prospective relèvent un risque significatif de survenue de syndrome métabolique plus important chez les salariés en TP (14, 15).

De possibles biais Dans notre revue, les résultats contradictoires peuvent être expliqués par la chance ou une variation dans l’expression de différents biais. D’une part, la population au travail est attendue en meilleure santé que la population générale du fait de l’existence de biais de sélection à l’entrée ou durant la carrière professionnelle (« effet travailleur sain »). Ce phénomène particulièrement

Travail posté

Décalage des rythmes circadiens

Troubles des rythmes sociaux

Troubles du sommeil

Augmentation de la vulnérabilité

Désynchronisation interne

Isolement social Changements comportementaux (ex. : alimentaire, tabagisme)

Stress

Maladie

Figure 2 - Mécanismes de maladies chez les travailleurs postés. D’après Knutsson 2003 (3).

attendu pour le TP peut atténuer plus ou moins les relations entre TP et AVC selon les précautions méthodologiques prises dans les études. D’autre part, il a été suggéré que certaines augmentations des forces d’association pouvaient être positivement confondues par la variable “classe sociale”. Ce risque de biais a été particulièrement souligné par différents auteurs. Également, le TP n’est pas une entité homogène. Il n’y a pas de définition commune du TP utilisée dans les différentes études. Le TP peut

impliquer un travail sur des schémas horaires, réguliers ou irréguliers, du soir, de nuit ou de matin par exemple. Le travail du soir pourrait être moins perturbant pour la santé que le travail de nuit en plage horaire alternante. Ce manque de précision dans la mesure des expositions pourrait expliquer la difficulté à mettre en évidence une liaison entre TP et AVC. Aussi, par rapport aux maladies cardiaques ischémiques, il est sans doute plus difficile de mettre en liaison le TP avec la survenue d’AVC. Ces

Tableau 2 - Recommandations de bonnes pratiques de la Société française de Médecine du travail pour la surveillance médico-professionnelle des travailleurs postés et/ou de nuit (19). Concernant le volet troubles cardiovasculaires, nutritionnels et métaboliques* : q Il est recommandé de mesurer le poids et sa distribution (tour de taille, calcul de l’indice de masse corporelle) à la 1re visite médicale, et ensuite de façon annuelle lors des visites médicales de surveillance. q Il est recommandé de surveiller lors de chaque visite la tension artérielle. q Il est recommandé de s’assurer que les travailleurs postés et/ou de nuit bénéficient d’un bilan lipidique périodique et d’un dépistage du diabète de type 2 en fonction des autres facteurs de risque associés. Le médecin du travail peut utiliser le courrier type proposé […] pour adresser le salarié à son médecin généraliste traitant. q Un interrogatoire sur la fréquence et les modes de consommation alimentaire et sur la pratique d’une activité physique dans la surveillance de ces travailleurs. q Il est recommandé d’informer les travailleurs postés et/ou de nuit de l’importance de conserver 3 repas par 24 heures, selon les conseils du Plan National Nutrition Santé, en particulier sur les fréquences de consommation des groupes alimentaires. q Une concertation entre médecin du travail, médecin traitant et spécialiste est recommandée pour les sujets présentant des troubles cardiovasculaires. *consultable sur le site internet de la SFMT : www.chu-rouen.fr/sfmt/pages/Recommandations.php

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Épidémiologie

derniers pouvant survenir plus tardivement (environ 10 ans plus tard) et, comparativement aux IDM, il faut des durées d’observation plus longues dans les études pour les repérer. Enfin, le diagnostic, notamment de mortalité par AVC, est difficile à établir avec des erreurs de classement sur la maladie, pouvant biaiser la force d’association vers le bas.

Le rôle de la perturbation des rythmes circadiens ? Concernant les mécanismes causaux, ceux-ci ne sont pas clairement définis actuellement (1). Il est suggéré que plusieurs catégories de facteurs contribueraient à la survenue de pathologies cardiovasculaires et en particulier d’AVC (Fig. 2). On peut insister sur la perturbation des rythmes biologiques circadiens. Certaines fonctions physiologiques associées au système cardio-circulatoire telles que la pression sanguine, nocturne notamment, la fréquence cardiaque et la sécrétion d’hormones (mélatonine, cortisol, hormone de croissance, catécholamines), s’en trouveraient modifiées. Notamment, la décroissance régulière nocturne de la mélatonine lors du TP du fait

de l’exposition à la lumière pourrait favoriser l’athérosclérose et avoir des méfaits cardiovasculaires (16). Plus globalement, la perturbation des rythmes biologiques circadiens provoquerait aussi un dérèglement de nombreuses horloges secondaires situées dans les tissus périphériques (foie, pancréas, muscles, tissu adipeux, cœur…), source potentielle, par voie de conséquence, de multiples désordres métaboliques (glucidique, lipidique…) (17). Enfin, il a été démontré de façon expérimentale, que la privation chronique de sommeil influencerait la sécrétion d’hormones (leptine, ghréline) impliquée dans les mécanismes de régulation de l’appétit et des dépenses énergétiques (18).

Conclusion

Dans cette revue, une étude de bonne qualité rapporte une association significativement positive, mais faible, entre TP et AVC. Globalement, les résultats se présentent contradictoires et le plus souvent non significatifs. Ainsi, concernant l’association entre AVC ischémique et TP, les preuves épidémiologiques sont insuffisantes

pour évoquer un lien de causalité. D’autres études spécifiques sont nécessaires pour améliorer les connaissances sur l’implication du TP dans la survenue des AVC. Toutefois, l’attention est attirée sur l’intérêt de mener une surveillance médicale des travailleurs postés comme le préconise actuellement la Société française de Médecine du travail (Tab. 2) (19). n Correspondance : • Dr Jean-Bernard Henrotin Département Épidémiologie en entreprise, INRS Rue du Morvan, CS 60027 54519 Vandœuvre-Lès-Nancy E-mail : jean-bernard.henrotin@inrs.fr • Dr Yannick Béjot Registre Dijonnais des Accidents vasculaires cérébraux, Département de Neurologie, Centre Hospitalier Universitaire de Dijon - E-mail : ybejot@yahoo.fr Conflits d’intérêts : aucun.

Mots-clés : Accident vasculaire cérébral, Travail posté, Maladies cardiaques ischémiques, Risque cardiovasculaire, Rythmes circadiens

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40

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Mise au point

prise en charge des sténoses asymptomatiques des carotides internes Faut-il suivre les recommandations ?

Serge Kownator (Centre cardiologique et vasculaire, Thionville)

Introduction Les sténoses asymptomatiques des carotides internes constituent une problématique fréquemment rencontrée dans la pratique cardiologique. Elles sont découvertes soit en raison d’un souffle, soit plus souvent à l’occasion d’un examen de dépistage chez un sujet à risque. L’écho-Doppler est la méthode de référence dans ce domaine.

Prévalence

Il est difficile de préciser la prévalence des sténoses carotidiennes asymptomatiques, tant elle dépend de la définition retenue, de la population concernée, de l’âge et du sexe des sujets. Dans une méta-analyse, la prévalence des sténoses ≥ 50 % passe chez les hommes de 0,2 % à 50 ans à 7,5 % à 80 ans. Elle est respectivement de 0 et 5 % aux mêmes âges chez les femmes (1). Dans des populations à risque telles que les coronariens ou les sujets ayant une artériopathie des membres inférieurs, elle peut atteindre des niveaux plus élevés de l’ordre de 15 %. Il va donc sans dire que la découverte d’une sténose de la carotide interne est loin d’être rare dans une consultation de cardiologue quand on

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suit la recommandation de la rechercher chez des sujets ou dans des circonstances à risque telles qu’avant une chirurgie coronarienne ou avant le traitement d’une pathologie anévrismale.

Indication d’intervention

Dès lors que l’on met en évidence une sténose, dès lors que cette sténose est bien asymptomatique, c’est-à-dire qu’elle n’a occasionné aucun événement neurologique homolatéral dans les 6 à 12 mois qui précédent, dès lors également que le degré de sténose est de plus de 60 %, se pose la question de l’indication d’intervention. Le propos de cet article n’étant pas de discuter les indications respectives de la chirurgie et de

l’angioplastie, cette question ne sera pas abordée, d’autant qu’elle ne participe en rien à l’indication de revascularisation. Les recommandations internationales, au nombre desquelles celles de 2012 de la Société européenne de Cardiologie (2), proposent, en cas de sténose asymptomatique de la carotide interne comprise entre 60 et 99 %, de poser l’indication d’une endartériectomie à la condition que le patient ait une espérance de vie de plus de 5 ans et que l’équipe chirurgicale affiche un taux de complications < 3 %. Le grade de cette recommandation est IIa A, autrement dit, l’intervention devrait être proposée et non pas “doit être”. Alors, faut-il suivre cette recommandation basée, de manière pratiquement exclusive, sur le degré de la sténose ? Il faut pour répondre à cette question revenir sur les bases et les justifications de la recommandation. Elle repose en effet sur les données de trois études déjà anciennes, ACAS (3), l’étude des Veterans (4) et ACST (5). Ces études comparant chirurgie et traitement médical montraient une réduction du

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Taux annuel moyen de risque d'accident vasculaire cérébral

prise en charge des sténoses asymptomatiques des carotides internes

4 3,5 3 2,5 2 1,5 1 0,5 0 1975

NASCET ACST

Essai VA Norris

Dick

ACAS ECST

ACBS

ACSRS ASED

CHS SMART

1980

1985

1990

1995

2000

OXVASC

2005

2010

Période de recrutement (année)

Figure 2 - Plaque carotidienne : les plages de couleur indiquent des zones de tonalité différente pouvant évoquer

Figure 1 - Sténose carotidienne asymptomatique et risque d’AVC. Le risque annuel

une composition histologique diffé-

diminue progressivement depuis 1990.

rente également.

risque relatif d’AVC de l’ordre de 50 % en faveur de l’endartériectomie avec un risque absolu annuel, dans les groupes traités médicalement, de l’ordre de 2,5 à 3 %. Or, les choses ont bien changé. Le traitement médical dans ces études était loin de ce que l’on considère aujourd’hui comme le traitement optimal. Les statines, notamment, étaient “sous prescrites”. Les résultats ne concernaient pas les sujets de plus de 75 ans et le bénéfice n’était pas démontré chez les femmes. Quoi qu’il en soit, avec l’évolution des pratiques au fil du temps, l’histoire naturelle des sténoses carotidiennes s’est transformée et le risque annuel d’AVC ou d’AIT est estimé dans les dernières publications à moins de 1 % (6) et même à 0,5 % dans la cohorte OXVASC (7) (Fig. 1). Il semble donc nécessaire de faire évoluer les pratiques et de tempérer la force des guidelines. Il faut dire cependant que dans la démarche d’élaboration des recommandations, seules les données issues d’études randomisées ayant une méthodologie solide peuvent être prises en compte. Or, en ce qui concerne les

sténoses carotidiennes asymptomatiques, seules ACAS, ACST et l’étude des Veterans étaient disponibles au moment de l’élaboration du document. Depuis, les résultats préliminaires de l’étude ACST 2 (8) apportent des enseignements relatifs au risque actuel d’intervention par chirurgie ou angioplastie qui se situe autour de 1 %. Il semble cependant important de pouvoir aller au-delà du degré de sténose pour sélectionner les patients qui seront susceptibles de bénéficier au mieux d’une intervention. Dans cette optique, on peut considérer plusieurs critères candidats pouvant être associés au degré de sténose. Au menu de ces critères figurent la caractérisation de la plaque, la progression de la sténose, le retentissement hémodynamique d’aval, les embolies distales, sans oublier les caractéristiques cliniques du patient.

Caractérisation de la plaque

Avec l’avènement des moyens modernes d’imagerie, la tentation d’établir une relation entre

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l’aspect de la plaque à l’imagerie et sa composition histopathologique a été particulièrement forte avec, en arrière pensée, l’identification de plaques “vulnérables”, promptes à s’exprimer sur le plan clinique. Des tentatives d’histologie virtuelle ont ainsi été effectuées tant en IRM qu’en échographie. C’est à cette dernière technique que s’adresseront les lignes suivantes, il s’agit en effet de la technique la plus disponible en pratique dans cette indication (Fig. 2). De nombreuses études se sont attachées à valider cette relation. De manière globale, les travaux réalisés en comparant l’aspect en imagerie aux observations faites sur des pièces d’endartériectomie, prélevées en bloc, ont montré que l’aspect hypoéchogène correspondait à une bouillie lipidocruorique ou à des hémorragies sous plaque, l’aspect hyperéchogène à des calcifications, l’aspect isoéchogène correspondant à des plaques fibreuses.

Structure de la plaque À l’échographie, une classification simple permet de distinguer

43


Mise au point

Figure 3 - Plaque hypoéchogène difficilement identifiable en

Figure 4 - Même patient que sur la figure 3. En mode puissance

mode B.

la plaque est bien délimitée.

Figure 5 - Plaque iso-échogène à surface régulière.

Figure 6 - Plaque à prédominance hyperéchogène, en partie calcifiée.

Tableau 1 – Caractérisation des plaques carotidiennes selon la classification de Geroulakos. Type 1

Plaque uniformément hypo-échogène avec ou sans liserai échogène.

Type 2

Plaque à prédominance hypo-échogène avec moins de 50 % de zones échogènes.

Type 3

Plaque à prédominance échogène avec moins de 50 % de zones hypoéchogènes.

Type 4

Plaque uniformément iso-échogène.

Type 5

Plaque ne pouvant être caractérisée en raison de calcifications responsables d’un cône d’ombre important.

les plaques hypo ou anéchogènes (Fig. 3 et 4), dont l’échogénicité est identique à celle du sang dans la lumière artérielle, les plaques isoéchogènes superposables à l’échogénicité du muscle sterno-cleido-

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mastoïdien (Fig. 5) et les plaques dites hyperéchogènes (Fig. 6) ayant les caractéristiques de l’adventice ou des apophyses transverses. Cette stratification en trois types a l’avantage de s’affranchir des

réglages particuliers de chaque machine. D’autres classifications ont tenté d’être plus discriminantes en introduisant la notion d’hétérogénéité. La plus utilisée est la classification de Geroulakos en cinq types de plaques (9) (Tab. 1).

Cela étant, les différentes approches visant à classer les lésions en fonction de leur aspect se sont heurtées à une limite de reproductibilité liée à la variabilité des réglages de l’échelle de gris et du gain sur les systèmes d’échographie.

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prise en charge des sténoses asymptomatiques des carotides internes

Pour palier cette limite, A. Nicolaïdes a mis au point et validé une méthodologie qui permet non seulement d’assurer une bonne reproductibilité intra et interobservateur mais aussi de quantifier l’échogénicité des plaques (10). Cette méthodologie passe tout d’abord par la numérisation des images et leur recalibration en fonction d’un niveau de gris prédéfini. Une fois les images

normalisées, l’échogénicité des plaques peut être quantifiée par sa densité moyenne (Fig. 7 et 8). Les travaux réalisés en utilisant cette méthodologie montrent que les plaques ayant des densités moyennes faibles (autrement dit les plaques les plus hypoéchogènes) sont assorties d’un risque neurologique plus élevé. Ces différentes phases sont assurées par l’utilisation d’un logiciel de

traitement d’image standard ou dédié. On a ainsi montré que, pour des valeurs de densité moyenne inférieures à 32, en présence d’une sténose > 50 %, le risque d’infarctus cérébral était significativement augmenté (11). L’étude ACSRS (12) a permis de confirmer qu’après normalisation, les plaques hypoéchogènes et/ou hétérogènes, autrement dit les plaques de type 1, 2 et 3 de Geroulakos, étaient associées à un risque majoré d’événements neurologiques homolatéraux, confirmant ainsi le risque potentiel lié à l’hypoéchogénicité.

Surface lésionnelle Figure 7 - Ajustement des niveaux de gris après numérisation de l’image. On affecte les mêmes valeurs de noir et de blanc à toutes les images. On peut ainsi évaluer la densité de gris moyenne de la plaque étudiée.

Figure 8 - Mesure de la densité moyenne après normalisation des niveaux de gris.

L’évaluation de la surface de la plaque constitue également un marqueur potentiel du risque d’événements. Dans une étude publiée en 2006 (13), on a pu montrer que l’aspect irrégulier des plaques multipliait pratiquement par 3 le risque d’AVC ischémique. La surface endoluminale de la plaque est souvent différenciée selon trois types : régulière (Fig. 9), anfractueuse et ulcérée (Fig. 10). Il faut reconnaître que la notion d’ulcération est souvent contestée dans la mesure où les

Figure 9 - Plaque à prédominance hypoéchogène et surface

Figure 10 - Plaque présentant une ulcération bien visible en

régulière.

Doppler couleur.

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Mise au point

comparaisons entre les données de l’imagerie et l’analyse anatomique effectuée sur les pièces d’endartériectomie prélevées en bloc, n’ont pas toujours été très concluantes. Il n’en demeure pas moins qu’on peut différencier les plaques à surface régulière et celles à surface irrégulière.

Score de plaque Publiée en 2011, une étude italienne (14) a tenté d’établir un score de plaque à risque intégrant le degré de sténose, l’échogénicité, la surface et la texture, homo ou hétérogène. Cette étude montre que pour un score de plaque élevé, le risque d’événements est significativement augmenté pouvant être, à 12 ans, multiplié par un facteur 9,6 chez des sujets de plus de 75 ans (2,9 entre 50 et 75 ans). À degré de rétrécissement égal, les plaques hypo-échogènes ou hétérogènes à surface irrégulière doivent donc être considérées comme plus dangereuses, conduisant à orienter plus volontiers le patient vers la chirurgie en plus du traitement médical. Les plaques échogènes ou calcifiées semblent présenter un niveau de risque plus faible et donc orienter plutôt vers la surveillance sous traitement optimal.

Progression de la sténose

La progression d’une sténose entre deux examens est également un facteur prédictif du risque d’événements neurologiques. Parmi les déterminants d’une progression rapide, on peut identifier des critères cliniques tels que, dans une analyse de l’étude ACSRS, l’insuffisance rénale, le sexe masculin. Il existe également des critères d’image-

46

rie, le caractère hypoéchogène de la lésion apparaissant encore une fois comme un élément prédictif important (15).

Retentissement d’aval

Témoin des répercussions hémodynamiques de la sténose, le retentissement d’aval peut être apprécié de différentes manières. Bien évidemment, en écho-Doppler, la modification du profil de flux enregistré dans la carotide interne, en aval de la sténose, témoigne de ce retentissement. On peut alors constater un allongement du temps de montée systolique, un amortissement général du profil de flux, il faut dire que ce type de modification ne survient que pour des sténoses particulièrement serrées. L’étude en Doppler transcrânien fournit des arguments également importants. On peut ainsi observer un amortissement du flux, notamment au niveau de l’artère cérébrale moyenne, on peut également dépister une altération de la vasoréactivité cérébrale. Celle-ci étant appréciée par la réaction à une épreuve d’hypercapnie provoquée par une apnée. Une étude italienne (16) a montré, sur un suivi moyen de 28,5 mois, une majoration du risque d’événements neurologiques chez des patients ayant une sténose carotidienne ≥ 70 % associée à une altération de la réactivité cérébrale. Le monitoring en Doppler transcrânien permet lui de dépister les phénomènes emboliques. Témoins de ces embols, les HITS (High Intensity Transient Signals) sont enregistrés au niveau de la cérébrale moyenne sous

forme de bruits brefs superposés au flux. Leur présence s’accompagne, à degré de sténose égal, d’une augmentation du risque d’AVC, comme cela a pu être démontré dans plusieurs études. Dans une étude de 2010 réalisée chez des sujets ayant une sténose ≥ 70 %, on les rencontrait dans 16 % des cas (17).

Infarctus cérébral silencieux

La présence au scanner d’infarctus silencieux paraît d’une part plus fréquente en cas de sténose > 60 %, elle est d’autre part prédictive d’événements neurologiques homolatéraux. Ainsi, dans une étude portant sur 821 patients, on note que pour des sténoses de plus de 60 %, la présence d’infarctus silencieux s’accompagne d’un risque majoré d’événements neurologiques, ce risque passant de 2,4 % à 4,6 % par an (18). Finalement, et peut être avant tous les critères d’imagerie, le profil clinique des patients ayant une sténose carotidienne asymptomatique constitue un élément essentiel pour la stratification du risque neurologique. Une analyse d’ACSRS (19), à nouveau, montre que ce risque neurologique est majoré avec l’âge, le niveau de pression systolique, la créatininémie, le tabagisme actif ou ancien, les antécédents d’AVC ou d’AIT controlatéraux.

En conclusion

Il ne semble plus raisonnable de prendre en compte le seul degré de sténose pour décider d’une intervention carotidienne et, en ce sens, les recommandations

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prise en charge des sténoses asymptomatiques des carotides internes

semblent dépassées. Des critères cliniques doivent être pris en considération, notamment le sexe et l’âge des patients, en se rappelant que dans les études ACAS et ACST, les patients âgés n’étaient pas représentés, mais aussi le niveau tensionnel, la fonction rénale et les antécédents neurologiques. Les critères d’imagerie – hypoéchogénicité, hétérogénéité, irrégularité de

plaque ainsi que progression de la sténose et retentissement d’aval – sont également des éléments majeurs. C’est la prise en compte de ces différents facteurs qui devrait permettre de mieux identifier les sujets asymptomatiques devant le plus bénéficier d’une intervention en évitant bon nombre de chirurgies inutiles. Dans l’avenir, d’autres techniques telles que le PET scan ou

la recherche d’une néovascularisation de la plaque par échographie de contraste, pourront peut-être contribuer également à la stratification du risque. n

Mots-clés : Sténose, Asymptomatique, Carotide, Recommandations, Intervention

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rendez-vous de l’industrie

accident vasculaire cérébral

Éviter un AVC grâce à la télémédecine

L

es résultats d’une étude sur la prévention de l’AVC grâce à la télémédecine ont été présentés par le cardiologue Patrick Dary aux 16es Journées européennes de la Société française de Cardiologie (JESFC). L’étude visait à évaluer la faisabilité du diagnostic d’une fibrillation atriale (FA) en télémédecine afin de prévenir la survenue d’un accident vasculaire cérébral (AVC) chez les patients à risque. L’étude portait pendant deux ans sur 130 patients, dont 49 % d’hommes et 51 % de femmes. 28 % ont déjà eu un épisode de FA, 10 % ont été victimes d’un AVC, les autres présentent le risque de développer une FA, en particulier les patients hypertendus, diabétiques ou insuffisants cardiaques. Ils avaient en moyenne un CHA2DS2VASc égal à 2,2. Il s’est avéré que pour 35 % des patients, la télésurveillance a amélioré le diagnostic et le traitement de la FA, permettant d’ajuster et de sécuriser la thérapeutique délivrée. Le patient qui entre dans l’étude reçoit un holter dont il applique seul, à domicile, les électrodes. L’appareil transmet automatiquement des électrocardiogrammes (ECG) 10 heures par jour au cabinet de cardiologie. Ce suivi en ambulatoire est effectué pendant 11 jours. Au cabinet de cardiologie, les informations sont suivies grâce à un système d’alertes qui prévient automatiquement lorsqu’il y

a la survenue d’une FA. Dans ce cas, le Dr P. Dary initie si nécessaire rapidement et en temps réel des thérapeutiques préventives, en particulier un traitement anticoagulant, mais aussi tout autre traitement nécessaire. Une bourse de 60 000 euros obtenue en août 2011 lors de la compétition « One mission One million » organisée par Boehringer Ingelheim a permis au Dr P. Dary de réaliser cette étude. Cette compétition a financé, à travers le monde, 32 projets sur le risque d’AVC lié à la FA, pour un montant global de 1 million d’euros. n

accident vasculaire cérébral

Face à l’AVC : 4H30 CHRONO

E

n France, plus de 770 000 personnes sont concernées par l’accident vasculaire cérébral et 33 000 décèdent chaque année. Première cause de handicap et 2e de démence, l’AVC est une urgence à la fois diagnostique et thérapeutique. Élaboré par un groupe de travail composé de neurologues et médecins urgentistes, la Société française Neurovasculaire (SFNV) et avec le soutien de Bayer HealthCare, le serious game (jeu vidéo pédagogique) 4H30 CHRONO est destiné à l’ensemble des acteurs impliqués dans la prise en charge d’un AVC. Il a été mis à la disposition du corps médical et paramédical en octobre dernier et est disponible sur le site www.avcVITEle15.com. Pensé à la manière d’une BD interactive à choix multiples, il s’articule comme un jeu de rôle à terminer dans un temps le plus bref possible, en veillant à éviter les erreurs et oublis dans le circuit de prise en charge. n

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Le point sur

Pollution par l’ozone et risque d’accident vasculaire cérébral

Un risque, même avec un faible niveau de pollution Yannick Béjot, Jean-Bernard Henrotin, Maurice Giroud (Université Paris Descartes, Rhumatologie A & INSERM U1016, Hôpital Cochin, Paris)

fortes concentrations d’ozone peuvent être retrouvées bien à distance de leur source, y compris au sein de régions rurales.

Introduction À côté des facteurs de risque vasculaire classiques, de nombreuses études ont cherché à identifier d’autres contributeurs favorisant la survenue d’Accidents vasculaires cérébraux (AVC). L’effet néfaste de la pollution atmosphérique a ainsi été suggéré, en parallèle de ce qui a été observé dans la pathologie coronarienne ou respiratoire. Cet article présente les données concernant l’impact de l’ozone, un polluant atmosphérique particulièrement répandu, sur le risque d’AVC.

L’ozone (O3) est une molécule formée de trois atomes d’oxygène, instable et hautement réactive. Elle est retrouvée de manière naturelle à faibles concentrations dans la stratosphère, la couche supérieure de l’atmosphère, où elle exerce un rôle de protection de la surface terrestre contre les rayonnements ultraviolets. En revanche, sa présence au sein de la troposphère, couche inférieure de l’atmosphère, est anormale et résulte de la pollution liée à l’activité humaine, sous certaines conditions (Fig. 1). L’ozone est un polluant secondaire dont la formation dépend de réactions complexes impliquant le rayonnement ultraviolet et divers polluants dont les oxydes d’azotes et les composés organiques volatiles (hydrocarbures).

L’ozone peut être transporté par le vent sur des distances considérables, parfois jusqu’à 400 à 500 km, expliquant le fait que des

Rayonnement UV

Vent PM2.5 Altitude

La pollution par l’ozone

Du fait de l’implication du rayonnement solaire, la production d’ozone est variable dans le temps : elle est particulièrement élevée la journée, avec un pic l’après-midi, et lors des mois d’été dans les régions à fortes émissions polluantes liées au trafic routier ou aux industries.

SOx PM10 CO

NO2 = NO + O O2

NOx composés organiques volatiles

NO

O3

NO2 Accumulation O3

NO

NO2 + O2 Pas d’accumulation O3

Distance

Figure 1 - Réactions atmosphériques à l’origine de la production d’ozone. En période d’ensoleillement, le rayonnement ultraviolet (UV) est à l’origine de la cassure des molécules de dioxyde d’azote (NO2) en monoxyde d’azote encore appelé oxyde nitrique (NO) et atome d’oxygène (O). Ce dernier peut se combiner à une molécule d’oxygène (O2) pour former l’ozone (O3). En condition normale, l’ozone ne s’accumule pas lorsque le NO est présent car les deux molécules réagissent ensemble pour reformer NO2 and O2. Cependant, en situation de concentrations importantes de gaz d’échappement des automobiles et des industries, les composés organiques volatiles relâchés forment dans l’atmosphère des aldéhydes riches en atomes d’oxygène qui réagissent avec le NO pour former du NO2, empêchant ainsi la dégradation de l’ozone qui s’accumule alors.

Cardiologie - Cardinale • Février 2014 • vol. 8 • numéro 61

49


Le point sur

Tableau 1 - Principales études ayant analysé les liens entre pollution par l’ozone et AVC. Auteurs, année

Lieu d’étude

Période d’étude

Niveau d’ozone

Corea et al. 2012 (2)

Mantua, Italie

2006-2008

Henrotin et al. 2010 (3)

Dijon, France

2001-2007

Oudin et al. 2010 (4)

Scania, Suède 2001-2005

Lisabeth et al. Nueces 2008 (5) County, Texas, USA

Critère de jugement

Nombre de patients

Résultat

Non disponible Admission pour AVC

781

Pas d’association

Moyenne : 38 µg/m3

Total événements neuro-cardiovasculaires ischémiques (AVC, AIT et infarctus du myocarde, hospitalisés ou non)

2 487

Association positive dose-dépendante entre survenue d’événements neuro-cardio-vasculaires et niveau élevé d’ozone la veille chez les patients porteurs de facteurs de risque vasculaire

Médiane de la moyenne journalière : 61 µg/m3

Admission pour AVC

12 948

Pas d’association

2001-2005

Moyenne : 51 µg/m3

Admission pour AVC ou AIT

3 508

Association positive à la limite de la significativité entre admission pour AVC et niveau élevé d’ozone le même jour et les jours précédents

Henrotin et al. 2007 (6)

Dijon, France

1994-2004

Moyenne : 30 µg/m3

Total AVC et AIT (hospitalisés ou non), âge > 40 ans

1 707

Association positive entre survenue AVC ischémique/AIT et niveau élevé d’ozone la veille

Low et al. 2006 (7)

New York, USA

1995-2005

Moyenne : 58 µg/m3

Admission pour AVC ischémique

16 906

Pas d’association

Chan et al. 2006 (8)

Taipei, Taïwan

1997-2002

Moyenne : 100 µg/m3

Admission pour AVC, âge > 50 ans

7 341

Association positive entre admission pour AVC et niveau élevé d’ozone le même jour

Poloniecki et al. 1997 (9)

London, GB

1987-1994

Moyenne : 26 µg/m3

Admission pour AVC et cardiopathie ischémique

373 556

Pas d’association

Kettunen et al. 2007 (10)

Helsinki, Finlande

1998-2005

Médiane de la moyenne/8 h : 72 µg/m3 (été)

Décès par AVC

3 265

Pas d’association

Hong et al. 2002 (11)

Séoul, Corée

1995-1998

Moyenne : 45 µg/m3

Décès par AVC (certificats de décès)

15,3/jour en moyenne

Association positive entre décès par AVC et niveau élevé d’ozone le même jour

Wong et al. 2002 (12)

Hong Kong, Chine

1995-1998

Moyenne : 34 µg/m3

Décès par maladies cardiovasculaires (dont AVC)

19 à 26/jour en moyenne selon la saison

Pas d’association

Afin de lutter contre la pollution par l’ozone, la Commission Européenne a publié une directive en 2002, visant à établir des objectifs à long terme, des valeurs cibles, un seuil d’alerte et un seuil

50

d’information pour les concentrations d’ozone dans l’air ambiant au sein de la Communauté, conçus pour éviter, prévenir ou réduire les effets nocifs sur la santé humaine et sur l’environ-

nement dans son ensemble (1). Ainsi, chaque année, l’Agence Européenne pour l’Environnement publie un rapport relatif à la pollution de l’air ambiant par l’ozone.

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Pollution par l’ozone et risque d’accident vasculaire cérébral

Effet de la pollution par l’ozone sur le risque d’AVC

Plusieurs études, conduites dans différentes régions du monde, ont analysé l’influence des pics de pollution par l’ozone sur le risque d’AVC (Tab. 1) (2-12). Force est de constater que les résultats obtenus divergent d’une étude à l’autre.

L’étude de Taïwan Une étude menée à Taipei, Taïwan, où les niveaux moyens d’ozone étaient particulièrement élevés, a mis en évidence le fait que les jours durant lesquels les taux d’ozone étaient les plus forts s’associaient à une augmentation des admissions pour AVC chez les sujets de plus de 50 ans (8). Cette augmentation, statistiquement significative, restait cependant faible en valeur absolue.

Une étude américaine Des résultats similaires furent retrouvés à Nueces County, Texas, USA, quel que soit l’âge (5). Néanmoins, les autres études ayant pris pour critère de jugement les admissions hospitalières pour AVC ont conclu à des résultats négatifs (2, 4, 7, 9). Une des raisons pouvant expliquer ces divergences est le caractère hospitalier du recrutement des patients, pouvant conduire à un biais de sélection des malades.

Les observations du Registre dijonnais Pour contourner ce problème, nous avons analysé le lien entre ozone et survenue des AVC/AIT au sein du registre de population de Dijon. L’avantage de cette approche est que ce registre identi-

Figure 2 - Relation dose-dépendante entre le niveau d’ozone atmosphérique (exprimé en quintiles) un jour donné et le risque de survenue d’infarctus cérébraux chez les hommes le lendemain. Données issues du Registre Dijonnais des AVC (6). Q1 : < 9 µg/m3 - Q2 : 9-20 µg/m3 - Q3 : 21-32 µg/m3 - Q4 : 33-48 µg/m3 - Q5 : > 48 µg/m3.

fie tous les cas d’AVC/AIT survenus dans la population dijonnaise (152 000 habitants), qu’ils soient hospitalisés ou non (13). Malgré des taux moyens modérés à Dijon comparativement à d’autres régions du monde, nous avons montré, dans une première étude, qu’un niveau élevé d’ozone s’accompagnait le lendemain d’une augmentation de l’incidence des AVC ischémiques et AIT chez les plus de 40 ans, indépendamment des autres polluants et conditions climatiques (6). Un argument fort en faveur de la réalité de l’association était le caractère dose-dépendant de cette dernière (Fig. 2). En analyse stratifiée, cette association était retrouvée chez les hommes, pour les infarctus par athérome des gros troncs et les AIT, et en présence d’au moins un facteur de risque vasculaire. Dans une seconde étude, en partenariat avec l’Observatoire des infarctus du myocarde de Côte

Cardiologie - Cardinale • Février 2014 • vol. 8 • numéro 61

d’Or (RICO), nous avons mis en évidence un lien entre pollution par l’ozone et augmentation le lendemain de l’incidence des événements neuro-cardio-vasculaires (AVC ischémiques, AIT, infarctus du myocarde) chez les patients porteurs d’au moins un facteur de risque vasculaire parmi l’hypertension artérielle, le diabète, le tabagisme, et l’hypercholestérolémie (3). De manière intéressante, l’association était à nouveau dose-dépendante et d’autant plus importante que le nombre de facteurs de risque augmentait. D’autres études ont utilisé comme critère de jugement la mortalité par AVC issue des données de certificats de décès (10-12). L’interprétation des résultats obtenus reste néanmoins sujette à caution. En effet, ce critère ne permet pas de conclure si les pics d’ozone sont associés à la survenue d’un AVC ou s’ils précipitent les décès chez les patients ayant un antécédent récent d’AVC.

51


Le point sur

Quel est le support physiopathologique du lien entre ozone et avc ?

Les mécanismes physiopathologiques pouvant expliquer le lien entre ozone et survenue des AVC, et plus particulièrement des infarctus cérébraux, sont complexes et pas encore totalement élucidés. Des études observationnelles conduites chez l’Homme, ainsi que des études animales, suggèrent que la pollution par l’ozone contribue aux réactions de stress oxydant et augmentent la réponse inflammatoire systémique (14-16). Ainsi, des travaux ont montré une élévation des taux sanguins de protéine C réactive (CRP), d’interleukine-6, et de TNF alpha. Ceci favorise l’instabilité des plaques athéromateuses, les altérations de la fonction endothéliale, les arythmies cardiaques dont la fibrillation auriculaire, ou encore l’hypercoagulabilité sanguine (Fig. 3). L’ensemble de ces phénomènes pourrait expliquer l’excès de risque d’infarctus cérébral dans le sillage des pics atmosphériques

Pollution O3

Instabilité plaque athérome

Stress oxydant

Réponse inflammatoire systémique

Altération fonction endothéliale

Troubles du rythme cardiaque

CRP IL-6 TNF-α

Hypercoagulabilité

Infarctus cérébral Figure 3 - Cascade physiopathologique pouvant expliquer le lien entre pollution par l’ozone et survenue d’infarctus cérébraux.

d’ozone, en particulier chez les sujets les plus vulnérables, porteurs de facteurs de risque vasculaire.

Conclusion

Même à des faibles niveaux, la pollution atmosphérique par l’ozone pourrait contribuer à augmenter le risque d’infarctus cérébral, en particulier chez les sujets à risque. La relation dose-dépendante observée incite fortement à des mesures visant à réduire la production d’ozone notamment dans les zones urbaines. n

Correspondance : Dr Yannick Béjot Registre Dijonnais des AVC (EA4184), Service de Neurologie, CHU et Faculté de Médecine de Dijon 3, rue du Faubourg Raines - 21000 Dijon Tél. : 03 80 29 37 53 Fax : 03 80 29 36 72 E-mail : ybejot@yahoo.fr

Mots-clés : Accident vasculaire cérébral, Facteurs de risque, Pollution, Ozone, AVC ischémique, AIT, Infarctus du myocarde, Stress oxydant

Bibliographie 1. Directive 2002/3/EC of the European Parliament and of the Council of 12 February 2002 relating to ozone in ambient air. Official Journal of the European Communities 2002 ; L67 : 14-30. 2. Corea F, Silvestrelli G, Baccarelli A et al. Airborne pollutants and lacunar stroke: a case cross-over analysis on stroke unit admissions. Neurol Int 2012 ; 4 : e11. 3. Henrotin JB, Zeller M, Lorgis L et al. Evidence of the role of short-term exposure to ozone on ischaemic cerebral and cardiac events: the Dijon Vascular Project (DIVA). Heart 2010 ; 96 : 1990-6. 4. Oudin A, Strömberg U, Jakobsson K et al. Estimation of short-term effects of air pollution on stroke hospital admissions in southern Sweden. Neuroepidemiology 2010 ; 34 : 131-42. 5. Lisabeth LD, Escobar JD, Dvonch JT et al. Ambient air pollution and risk for ischemic stroke and transient ischemic attack. Ann Neurol 2008 ; 64 : 53-9. 6. Henrotin JB, Besancenot JP, Béjot Y et al. Short-term effects of ozone air pollution on ischaemic stroke occurrence: a case-crossover analysis from a 10-year population-based study in Dijon, France. Occup Environ Med 2007 ; 64 : 439-45. 7. Low RB, Bielory L, Qureshi AI et al. The relation of stroke admissions to recent weather, airborne allergens, air pollution, seasons, upper respiratory infections, and asthma incidence, September 11, 2001, and day of the week. Stroke 2006 ; 37 : 951-7.

52

8. Chan CC, Chuang KJ, Chien LC et al. Urban air pollution and emergency admissions for cerebrovascular diseases in Taipei, Taiwan. Eur Heart J 2006 ; 27 : 1238-44. 9. Poloniecki JD, Atkinson RW, de Leon AP et al. Daily time series for cardiovascular hospital admissions and previous day’s air pollution in London, UK. Occup Environ Med 1997 ; 54 : 535-40. 10. Kettunen J, Lanki T, Tiittanen P et al. Associations of fine and ultrafine particulate air pollution with stroke mortality in an area of low air pollution levels. Stroke 2007 ; 38 : 918-22. 11. Hong YC, Lee JT, Kim H et al. Effects of air pollutants on acute stroke mortality. Environ Health Perspect 2002 ; 110 : 187-91. 12. Wong CM, Ma S, Hedley AJ et al. Effect of air pollution on daily mortality in Hong Kong. Environ Health Perspect 2001 ; 109 : 335-40. 13. Béjot Y, Troisgros O, Gremeaux V et al. Poststroke disposition and associated factors in a population-based study: the Dijon Stroke Registry. Stroke 2012 ; 43 : 2071-7. 14. Kelly FJ. Oxydative stress: its role in air pollution and adverse health effects. Occup Environ Med 2003 ; 60 : 612-6. 15. Chuang KJ, Chan CC, Su TC et al. The effect of urban air pollution on inflammation, oxidative stress, coagulation, and autonomic dysfunction in young adults. Am J Respir crit Care Med 2007 ; 176 : 370-6. 16. Corradi M, Alinovi R, Goldoni M et al. Biomarkers of oxidative stress after controlled human exposure to O3. Toxicol lett 2002 ; 134 : 219-25.

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Interspécialités

Dysfonction érectile Un marqueur précoce de l’état vasculaire

Ludovic Ferretti (Urologue, Département de Chirurgie viscérale, HIA Robert-Picqué, Villenave-d’Ornon ; Praticien attaché CHU Pellegrin, Bordeaux)

Introduction La dysfonction érectile (DE) est définie par l’incapacité à maintenir ou obtenir une érection du pénis suffisante pour permettre un rapport sexuel satisfaisant (1). Elle est à l’origine d’une diminution de la qualité de vie et devient progressivement un marqueur précoce de l’état vasculaire, car un événement cardiovasculaire majeur (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral) apparaît de façon statistique dans les 3 ans après la survenue de la dysfonction érectile (2-4). La DE est retrouvée chez 32 % des hommes atteints de diabète de type 1 (DT1) et 46 % en cas de diabète de type 2 (DT2). Aux États-Unis, 83 % des patients atteints d’un DT2 sont obèses ou en surpoids. L’obésité et le diabète étant étroitement liés, l’adiposité abdominale et le poids corporel sont associés de façon significative à une DE (5). Les hommes présentant un indice de masse corporelle (IMC) compris entre 25 et 30 kg/m2 ont un risque accru de DE comparativement aux hommes dont l’IMC est < 25 kg/m2. De plus, l’incidence de la DE est encore plus majorée si l’IMC est > 30 kg/m2 par rapport aux patients présentant un IMC < 25 kg/m2 (6-7).

L

es mécanismes liés à l’apparition de la DE sont souvent multiples, et en rapport avec l’état vasculaire, neurologique, hormonal et psychologique des patients.

Physiologie normale de l’érection

L’érection est un phénomène vasculotissulaire complexe mettant en jeu des facteurs vasculaires, anatomiques et neuro-hormonaux. L’érection est obtenue par l’augmentation de la pression dans les corps caverneux comprimant les veines sous-albuginéales sous

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une membrane inextensible : l’albuginée du corps caverneux. L’intégrité des différents organes mis en jeu est nécessaire à l’initiation et au maintien de l’érection. On distingue trois types d’érections (reflexe, psychogène et nocturne) dont les afférences et le contrôle central sont distincts, mais dont les fibres terminales sont identiques : les nerfs caverneux dont les fibres proérectiles sont nitrinergiques (monoxyde d’azote : NO) et produites par la NO synthase nerveuse (nNOS) permettant l’initiation de l’érection. Le NO est également produit par les cellules endothéliales (10 % du contingent cellulaire du corps caverneux) par

l’intermédiaire de la NO synthase endothéliale (eNOS) participant au maintien de l’érection. Le NO a pour rôle de relaxer les fibres musculaires lisses (90 % des cellules du corps caverneux) et permet l’augmentation du flux sanguin intracaverneux (Fig. 1). L’initiation de l’érection est sous la dépendance de stimuli sensitifs tactiles, visuels, odorants et cognitifs. Le centre cortical d’intégration des fonctions érectiles est situé dans le noyau préoptique (8). Par les voies latéro-dorsales de la moelle, l’influx est transmis au noyau dorsolombaire spinothalamique (T10-L2) et au noyau sacré (S2-S3-S4) et va moduler l’arc réflexe proérecteur et permet le maintien, l’activation ou l’inhibition de l’érection. Les afférences sensitives péniennes sont transmises par le nerf pudendal au noyau sacré, qui va faire remonter l’information au noyau préoptique d’une part et entraîner une activation de l’arc réflexe pelvien par l’intermédiaire du plexus hypogastrique inférieur d’autre part et entraîner la libération de NO par les nerfs caverneux. Les principales voies neuroanatomiques sont répertoriées en figure 2. Il n’existe pas de récepteur de la testostérone au niveau du corps caverneux, cependant le rôle central de la testostérone conditionne de façon majeure la libido et donc la qualité de l’érection (8-11).

Cardiologie - Cardinale • Février 2014 • vol. 8 • numéro 61


dysfonction érectile

Physiopathologie

La dysfonction érectile du patient diabétique est plurifactorielle. La prévalence croissante du diabète a été associée à une augmentation des facteurs de risque cardiovasculaire sous-jacents, incluant la sédentarité, et à l’augmentation de la prévalence de l’obésité au sein d’une population vieillissante (12-13). La dégradation de l’état vasculaire liée à l’athérosclérose aboutit à une DE et une diminution du calibre des artères à visée pénienne et à la dysfonction endothéliale. De plus, la neuropathie diabétique entraîne une diminution de la sensibilité pénienne nécessaire à l’initiation de l’érection (nerf pudendal) et une atteinte des nerfs caverneux, nerf végétatif moteur de l’érection. Enfin, l’obésité et l’hypogonadisme qui découlent d’une insulinorésistance vont également entraîner une dégradation voire une diminution de la libido (1).

Figure 1 - Le NO a pour rôle de relaxer les fibres musculaires lisses et permet l’augmentation du flux sanguin intracaverneux.

Dysfonction endothéliale Les facteurs de risque cardiovasculaire, notamment le diabète, mais également le stress oxydatif, l’hypoxie chronique rencontrée chez le patient obèse présentant un syndrome d’apnées du sommeil, et l’hyperhomocystéinémie sont à l’origine d’une dysfonction endothéliale. Celle-ci aboutit à une diminution de la production d’eNOS, et donc une diminution de la relaxation caverneuse, aboutissant à une DE clinique. De plus, la sécrétion de facteurs vasoconstricteurs comme l’endothéline-1 et pro-inflammatoires (IL-6, CRP…) associée à la diminution du NO aboutit à une augmentation du tonus vasculaire et à la production de radicaux libres. L’ensemble de ces facteurs contribue donc à l’établissement de la dysfonction érectile par défaut de relaxation de l’endothélium caverneux (14). De plus,

Figure 2 - Les principales voies neuroanatomiques.

l’action des radicaux libres oxydatifs (AGE, advanced glycosilation end products) présents chez le diabétique majore cette dysfonction endothéliale (15-17).

Cardiologie - Cardinale • Février 2014 • vol. 8 • numéro 61

Syndrome métabolique Les études évaluant l’augmentation de l’adiposité abdominale et l’insulinorésistance dans des situations de syndrome métabolique et/ou d’obé-

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Interspécialités

sité indiquent que ces conditions contribuent de façon significative à la dysfonction endothéliale (13, 18) et donc à la DE. En cas d’obésité abdominale et d’insulinorésistance, l’augmentation de sécrétion des cytokines pro-inflammatoires, l’augmentation des acides gras libres circulants et l’hyperglycémie postprandiale altèrent l’expression génique et les signaux intercellulaires de l’endothélium vasculaire. L’hyperglycémie prolongée rencontrée dans les cas d’insulinorésistance comme lors d’un syndrome métabolique, d’une obésité ou d’un diabète de type 2 entraîne une dysfonction mitochondriale et une augmentation du stress oxydatif, ayant pour conséquence une dysfonction de l’activité de la eNOS et donc la production de NO (5).

Hypogonadisme La testostérone favorise la prolifération musculaire lisse et endothéliale, diminue le taux de LDL, améliore la sensibilité à l’insuline, réduit l’IMC et la masse grasse viscérale (5). Le déficit en testostérone a été identifié comme un facteur de risque indépendant de la dysfonction endothéliale (19). De plus, il entraîne une diminution de la libido, aboutissant de façon indirecte à la dysfonction érectile. Ce déficit est fréquent chez les hommes atteints de diabète. Les mécanismes exacts de cette réduction des niveaux de testostérone sont inconnus ; cependant, différents mécanismes ont été proposés. La leptine interagit avec la LH (hormone lutéinisante), des taux élevés peuvent donc entraîner une androgénosuppression (20-21). Une étude portant sur 233 patients atteints d’un diabète de type 2 et présentant des signes d’hypogonadisme a retrouvé une absence d’élévation de la LH en cas de diminution des taux de tes-

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tostérone (21), indiquant ainsi une dysfonction pituitaire par défaut de production de LH. L’étude du polymorphisme de CAG du récepteur aux androgènes a retrouvé une plus grande répétition de CAG dans le récepteur des patients présentant une obésité et des taux de leptine élevés, et une répétition faible des CAG ayant une influence possible sur le maintien d’un métabolisme et d’un anthropomorphisme sain chez les hommes atteints d’un diabète de type 2. L’activité de l’aromatase, qui catalyse la conversion des androgènes en œstrogènes dans les cellules adipeuses périphériques pourrait également être impliquée dans l’hypogonadisme. Des taux d’œstrogène circulant élevés suppriment l’action de la testostérone par un mécanisme de rétrocontrôle négatif, entraînant une augmentation de l’obésité abdominale. Les inhibiteurs de l’aromatase ont été utilisés avec succès pour élever le taux de testostérone chez les hommes présentant une obésité morbide avec hypogonadisme hypogonadotrophique (5). Une revue de la littérature (12-13) indique qu’un traitement substitutif par testostérone (TST) améliore le syndrome métabolique et la fonction endothéliale. De plus, le TST chez les hommes diminue les taux de leptine (5). La testostérone participe également à l’équilibre glycémique et lipidique (22). La supplémentation par testostérone améliore la dysfonction endothéliale et l’insulinorésistance, et est une nouvelle approche thérapeutique du traitement des comorbidités associées au diabète de type 2 et à la DE (5).

pliquée d’éjaculation rétrograde. L’atteinte des nerfs caverneux aboutit à une diminution de la production de NO par la nNOS, et donc de la relaxation des fibres musculaires lisses entraînant la DE (1).

Dysérection psychogène Le patient diabétique est un malade chronique. Plusieurs intrications psychosexologiques peuvent être à elles seules à l’origine de la DE. L’existence d’un syndrome dépressif a été associée à une DE en présence de déterminants majeurs comme le diabète de type 2 (OR : 1,09 ; IC 95 % : 1,02-1,19 ; p = 0,03). Des études longitudinales ont démontré une augmentation significative des symptômes dépressifs chez les patients atteints de DT2, tout en illustrant une diminution significative de la qualité de vie (5, 23). La plus large étude de qualité de vie portant sur 1 460 patients a montré que les symptômes de la DE étaient liés à des niveaux de frustration et de découragement élevés, à une plus mauvaise acceptation du diabète, un plus mauvais contrôle métabolique et des niveaux de symptômes dépressifs plus élevés (24).

Bilan du patient diabétique

Il peut être délicat d’aborder la problématique érectile en consultation, ce d’autant la densité du programme chez le diabétique. Pourtant, comme nous l’avons vu précédemment, le marqueur érectile est un reflet fidèle de l’état vasculaire et un témoin important de la qualité de vie.

Diagnostic positif Neuropathie diabétique La dysfonction érectile est une manifestation clinique majeure de la DE. Elle peut également être com-

❚❚Interrogatoire C’est un diagnostic d’interrogatoire. Celui-ci doit confirmer la

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dysfonction érectile

plainte du patient. Une question simple est proposée, par exemple : « Avez-vous un problème d’érection (ou de manque de rigidité) pendant les rapports ? », dont la valeur diagnostique paraît équivalente à l’utilisation de l’International Index of Erectile Function (IIEF-5) dans sa version courte, auto-questionnaire validé largement utilisé dans toutes les études sur le sujet (Fig. 3). La réponse à cette question peut être facilitée par l’utilisation du score de rigidité (HES : Hardness Erection Score), cotant de 1 à 4 la rigidité pénienne (Fig. 4). Une écoute active, sans préjugé, respectant la con fi dentialité, paraît essentielle à la bonne conduite de l’interrogatoire, et met en confiance le patient. Une durée minimale de 3 mois est admise pour confirmer le diagnostic (en dehors des DE suite à un traumatisme ou une chirurgie pelvienne). Les circonstances de l’apparition de la dysfonction érectile et son côté situationniste peuvent orienter vers une étiologie psychogène, l’existence d’érections nocturnes ou matinales ou l’absence de trouble avec une autre partenaire. L’ancienneté de la dysfonction érectile et son retentissement psychologique doivent également être recherchés, une DE ancienne étant plus difficile à traiter qu’une récente. D’autres troubles sexuels associés doivent être recherchés, comme l’existence d’un trouble du désir ou de l’éjaculation, une douleur lors des rapports ou une anomalie morphologique de la verge. L’association de la DE à un autre trouble du désir doit conduire à une consultation spécialisée. ❚❚Caractérisation de la dysfonction érectile Une fois la DE confirmée, il est recommandé de rechercher la pré-

Figure 3 - Questionnaire d’évaluation de la fonction érectile.

Le pénis est plus grand mais pas dur

Dur, mais pas assez pour la pénétration

Assez dur pour la Complètement pénétration, mais pas dur et entièrement complètement dur rigide

Figure 4 - Score d’évaluation de la rigidité pénienne.

sence d’autres critères diagnostiques et pronostiques : • Le caractère primaire (c’est-àdire existant depuis le début de la vie sexuelle) ou secondaire, acquis, de la DE ;

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• Le caractère inaugural ou réactionnel à un autre trouble sexuel ; • Le caractère brutal (où il convient de rechercher une circonstance déclenchante) en faveur d’une cause psychologique prédo-

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Interspécialités

minante, ou progressif, pouvant orienter vers une cause organique ; • Le caractère permanent ou situationnel (par exemple selon la partenaire…) ; • La persistance d’érections nocturnes et/ou matinales spontanées qui évoque en premier lieu une origine psychologique ; • La sévérité de cette DE : — par le délai entre l’apparition du trouble et la consultation : il semble que plus longue est la durée, plus complexe sera la prise en charge, — par l’existence ou non d’une capacité érectile résiduelle (tumescence ou rigidité suffisante ou non pour une pénétration), — par la possibilité d’érections provoquées (masturbation...), — par la persistance des érections nocturnes et/ou matinales spontanées. Une DE réactionnelle, situationnelle, associée à la présence d’érections spontanées ou provoquées de bonne qualité évoque une problématique psychogène prédominante. Le maintien d’une capacité érectile résiduelle est a priori un facteur de bon pronostic et peut permettre de rassurer le patient. ❚❚Examen clinique Un examen clinique est recommandé chez tous les patients (accord professionnel fort). Cet examen général comportera : • un examen urogénital avec appréciation des caractères sexuels secondaires : testicules (taille, consistance), pénis (recherche d’un phimosis, d’une maladie de Lapeyronie ou autres anomalies morphologiques), toucher rectal après 50 ans (à partir de 45 ans dans les cas d’antécédents familiaux), examen des seins ; • un examen cardiovasculaire : prise de tension artérielle du pouls et des pouls périphériques,

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recherche d’un souffle artériel, mesure du périmètre abdominal ; • un examen neurologique orienté : réflexes ostéotendineux et cutané plantaire, sensibilité des membres inférieurs, en particulier des pieds, et recherche d’une anesthésie en selle (au moment du toucher rectal), réflexes crémastériens (contraction du muscle crémastérien homolatéral après stimulation sensitive superficielle du tiers supérieur et antéromédial de la cuisse, en remontant vers l’aine) et bulbocaverneux (contraction des muscles bulbocaverneux et bulbospongieux réflexe à une pression du gland). ❚❚Examens complémentaires à réaliser dans le bilan initial Le bilan recommandé est essentiellement biologique (accord professionnel fort) : • Glycémie à jeun, hémoglobine glycosylée (HbA1c) ; • Bilan d’une anomalie lipidique (BAL), s’il n’y en a pas eu dans les 12 mois précédents ; • NFS, ionogramme, créatininémie, bilan hépatique s’il n’y a pas eu de bilan depuis 5 ans, sauf anomalie clinique ; • Recherche d’un déficit androgénique biologique, recommandée chez les patients présentant des facteurs de risque (existence d’une maladie chronique, corticothérapie au long cours, infertilité, cryptorchidie opérée, cure de varicocèle ou orchidectomie, notamment pour cancer du testicule...) ou en cas de signes cliniques évocateurs, comme une diminution du désir sexuel ou de la fréquence et de la qualité des érections nocturnes, des troubles de l’éjaculation. Aucune autre exploration n’est recommandée en première intention dans la prise en charge initiale d’un patient présentant une DE.

Prise en charge initiale de la dysfonction érectile Il convient d’informer le patient que la prise en charge pourra être pluridisciplinaire, en association avec un sexologue, puis que le suivi pourra être pratiqué par le médecin généraliste. La participation active de la partenaire devra être inclue dans cette prise en charge, et un dépistage d’une dysfonction sexuelle féminine est recommandé. ❚❚Une information sexuelle Une information sexuelle expliquera la physiologie de l’érection, le mécanisme des pannes et celui de l’anxiété de performance ainsi que la prévalence de la DE et l’évolution de la sexualité avec l’âge et apportera, si nécessaire, des informations adaptées sur la sexualité féminine, ses spécificités (physiologie, ménopause, grossesses), ses troubles (sécheresse vaginale, infections urinaires...). Le but est de rassurer et de dédramatiser, de façon adaptée à l’âge et à la demande, en prenant en compte si possible la partenaire (accord professionnel fort). ❚❚Des conseils d’hygiène de vie L’intervalle entre l’apparition de la DE et les premiers événements cardiovasculaires (3 à 5 ans selon Jackson) permet d’entreprendre une politique de réduction des facteurs de risque cardiovasculaire. Elle permettra une amélioration de la fonction érectile et une meilleure réponse au traitement. La lutte contre les facteurs de risque cardiovasculaire impose de réguler la pression artérielle, d’équilibrer le diabète et l’hypercholestérolémie. Des règles hygiéno-diététiques sont à proposer avec l’arrêt du tabagisme et de toutes substances addictives, un régime alimentaire, et la lutte

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dysfonction érectile

contre la sédentarité (grade B). Le patient devra être incité à pratiquer une activité physique modérée de façon régulière. La perte de poids en cas de surpoids est une des pierres angulaires du traitement et une perte de 10 kg peut permettre de récupérer 30 % de fonction érectile.

Traitements médicamenteux d’aide à l’érection Les traitements oraux : les inhibiteurs de la PDE5 Les iPDE5 représentent actuellement le traitement oral de référence en première intention dans la DE (grade A). Ils ont pour rôle de prolonger la relaxation musculaire lisse secondaire à l’action de la voie nitrergique du GMP cyclique. Quels que soient le mode d’administration et la molécule, des

taux d’efficacité entre 65 et 85 % sont généralement retenus sur l’ensemble des études. Les effets secondaires de ces molécules sont d’intensité minime à modérée, essentiellement bouffées vasomotrices, céphalées, sensations vertigineuses, altération de la vision des couleurs, dyspepsie, palpitations, congestion nasale, douleurs dorsales. Le respect strict de leurs contre-indications, dont la principale est la prise de dérivés nitrés ou de donneurs de NO et de leurs précautions d’emploi, en particulier les interactions médicamenteuses, est indispensable avant l’instauration du traitement. Avant d’instaurer un traitement d’aide à l’érection, le consensus de Princeton doit être respecté (Tab. 1). • Chez tous les patients, ayant ou non une pathologie cardiovasculaire connue, avant instauration d’un traitement d’aide à l’érection quel qu’il soit, il est recommandé de vérifier l’aptitude à l’exercice

physique que représente le rapport sexuel. Le patient doit être capable de faire facilement : - soit la montée de deux étages (un étage pour une partenaire habituelle, car le travail cardiaque dans le cadre d’un rapport extraconjugal est presque multiplié par 2) ; - soit 20 minutes de marche par jour. • Si le patient était jugé « inapte » à l’activité sexuelle, et après contrôle cardiovasculaire, un programme d’exercices graduels peut être proposé, qui permettra une réévaluation ultérieure en vue d’un traitement. • S’il n’y a pas de maladie coronarienne connue : chez un patient actif et asymptomatique à l’occasion d’efforts réguliers, avec peu ou pas de facteurs de risque cardiovasculaire (≤ 3), les inhibiteurs de la PDE5 sont autorisés sans exploration cardiologique préalable.

Tableau 1 - Classification du risque de déclencher un événement cardiovasculaire lors d’un rapport sexuel selon la conférence de Consensus de Princeton II. Faible risque

Risque intermédiaire Reclasser après évaluation cardiologique

Haut risque Réévaluer après bilan et traitement cardiologique

Asymptomatique et < 3 FDRCV*

Asymptomatique et ≥ 3 FDRCV*

Angor réfractaire ou instable

Hypertension contrôlée

CLASSE À HAUT RISQUE DE DÉCLENCHER UN ÉVÉNEMENT CARDIOVASCULAIRE SURTOUT SI SÉDENTAIRE

Augmentation du risque d’IDM

Angor léger et stable (le traitement antiangineux pourra être sujet à modification) Absence d’ischémie myocardique après revascularisation (ETT nécessaire) Sténose aortique légère Dyspnée de stade I de la NYHA

Angor modéré stable ETT nécessaire Infarctus du myocarde > 2 semaines et < 6 semaines Risque de réinfarcissement et d’arythmie maligne ETT nécessaire Dyspnée de stade II de la NYHA Risque modéré d’aggravation des symptômes Séquelle d’accident vasculaire non cardiaque Évaluation cardiologique nécessaire

Hypertension non contrôlée Augmentation du risque d’événement cardiovasculaire Dyspnée de stade III ou IV de la NHYA Augmentation du risque de décompensation cardiaque Infarctus récent (moins de 2 semaines) Arythmies cardiaques à haut risque Risque de mort subite Cardiopathies hypertrophiques obstructives Valvulopathie sévère à modérée

*Genre exclu.

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Interspécialités

• Chez un patient sédentaire et/ou présentant plus de trois facteurs de risque, les inhibiteurs de la PDE5 ne doivent pas être prescrits sans un avis cardiologique. C’est le cardiologue qui jugera de la nécessité d’un test d’effort. • Chez un patient coronarien connu, un avis cardiologique est nécessaire avant d’initier le traitement. Il est recommandé au médecin d’expliquer au patient les modalités de prise : il s’agit d’un traitement facilitateur de l’érection, à la demande, ou en prise quotidienne, une fois par jour au même moment de la journée, nécessitant une stimulation sexuelle, dont l’effet peut être visible dès la première prise mais dont les résultats peuvent encore s’améliorer au fil du traitement ; ce qui nécessite un minimum de quatre à six essais. Cet encadrement de prescription est indispensable, puisque l’on sait qu’une cause fréquente d’échec du traitement oral est l’absence d’explications (prescription « sèche »). Pour un traitement à la demande, il est recommandé de prendre le comprimé environ une heure avant le rapport. En dehors des cas particuliers, il faut prescrire le dosage le plus faible (prise concomitante d’un traitement agissant sur le cytochrome P -450 : kétoconazole, érythromycine, cimétidine..., insuffisance hépatique ou rénale sévère). Le traitement quotidien permet de limiter l’anxiété liée à la nécessité de préméditer les rapports sexuels et la fréquence des effets secondaires. Cependant, il doit être pris tous les jours et peut être plus onéreux que le traitement à la demande chez des couples ayant moins de huit rapports sexuels par semaine. Les iPDE5 ne sont pas remboursés par l’Assurance maladie.

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Il est fréquent que la DE soit résistante aux iPDE5 chez le patient diabétique : en effet, la composante neuropathique peut se présenter au premier plan et réduire fortement l’action des iPDE en altérant la phase d’initiation de l’érection (50 % d’efficacité vs 70 % chez le patient non diabétique). Toutefois, il est bon de rappeler que la première cause d’échec des iPDE5 reste la mauvaise utilisation liée à un manque d’information.

Les traitements locaux ❚❚Les injections intracaverneuses de PGE1 Sauf exception, elles ne font pas partie de la prise en charge de première intention. La PGE1 est un agent inducteur de l’érection, par l’intermédiaire de récepteurs intracaverneux, dont la stimulation provoque une relaxation du muscle lisse par augmentation de la concentration de l’AMPc (Fig. 1). Les injections intracaverneuses de PGE1 permettent une érection dans 55 à 93 % des cas, selon l’étiologie. Les indications des injections intracaverneuses sont principalement l’échec du traitement oral, la chirurgie carcinologique pelvienne et ces injections sont remboursées par l’Assurance maladie chez les diabétiques (avec complication neurologique), après chirurgie ou radiothérapie abdomino-pelvienne, dans les maladies neurologiques et en cas de séquelles de priapisme si la prescription est faite sur une ordonnance dite « d’exception ». Les produits disponibles en France sont l’Edex® (10 et 20 mg) et le Caverject® (dual) (10 et 20 mg). Les principaux effets secondaires sont : • des douleurs, pouvant intéresser jusqu’à 29 % des patients, essentiel-

lement au début du traitement, et qui s’amendent en général progressivement au fil des injections ; • un hématome au point de ponction, sans caractère de gravité ; • les érections pharmacologiquement prolongées, voire un priapisme rapporté dans 1 à 2 % des cas ; • une fibrose localisée des corps caverneux (0,8 à 23,3 % des cas). Le respect strict des contre-indications est nécessaire avant instauration de ce traitement. En raison du passage de l’alprostadil dans le sperme et le liquide séminal, le traitement devra être évité chez un patient dont la partenaire est enceinte ou susceptible de l’être. Les injections intracaverneuses ne sont pas contre-indiquées dans les pathologies cardiovasculaires, ni en cas de traitement anticoagulant. ❚❚La PGE1 intra-urétrale (MUSE® 500 et 1 000 µg) C’est le même mécanisme d’action que les injections intracaverneuses. La voie intra-urétrale évite l’injection. Il n’est pas remboursé, quelle que soit la pathologie à l’origine de la DE. La diffusion de la PGE1 par cette voie entraîne une efficacité moindre que par injections intracaverneuses (environ 50 %). Les effets secondaires sont essentiellement l’apparition de douleurs, dans 5 à 32,7 % des cas, et une baisse très modérée de la TA systolique et diastolique dans 0 à 3,6 % des cas et vertiges dans 1 à 5,5 % des cas. ❚❚Le vacuum Il s’agit d’un système mécanique permettant une érection passive du fait de la dépression induite par une pompe à vide reliée à un cylindre dans lequel est placée la verge. Le remplissage sanguin obtenu est maintenu en place grâce à un anneau élastique compressif placé à la base du pénis. Son efficacité est

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dysfonction érectile

de 40 à 80 % dans la littérature en fonction de l’expérience du thérapeute. Il n’y a aucun remboursement de l’appareil.

Interrogatoire, examen clinique général, CV et OGE Bilan biologique (glycémie, EAL, créatininémie, uricémie, testostéronémie totale) Pathologie de la verge

Les traitements chirurgicaux

Hypogonadisme Trouble isolé

❚❚Les implants péniens Il s’agit de la mise en place chirurgicale de deux implants, un dans chaque corps caverneux, entraînant une érection mécanique. Ils sont indiqués en cas d’échec des autres thérapeutiques ou si le patient ne souhaite pas poursuivre les injections intracaverneuses ou l’utilisation d’un vacuum. Ils se substituent de façon définitive au tissu érectile : il s’agit donc d’un traitement de troisième « ligne ». Chez les patients présentant une prothèse fonctionnelle, chez des couples sélectionnés, et parfaitement informés, le taux de satisfaction est très élevé, allant de 79 à 98 % (25). Le médecin généraliste doit connaître leur existence pour savoir, le cas échéant, orienter son patient vers l’urologue spécialisé dans cette chirurgie. Le principal risque de cette chirurgie est l’infection de l’implant, majoré deux fois chez le diabétique par rapport au patient non diabétique. Ce taux autrefois élevé a pu être réduit à 1 % grâce à l’utilisation de prothèses enduites d’antibiotique ou d’un biofilm diminuant l’adhésion bactérienne.

Les traitements hormonaux du déficit androgénique Une hormonothérapie substitutive par les androgènes ne doit être entreprise qu’en cas d’indication claire, c’est-à-dire devant des signes cliniques évocateurs de déficit androgénique confirmés biologiquement par deux dosages de testostéronémie inférieurs à la normale (grade A). La prescription initiale de testosté-

Paraphilie

Endocrinologue Psychiatre

>3 mois > 2 FDRCV Avis cardiologique

urologue Associé à un autre trouble sexuel ou origine psychogène suspectée

< 3 FDRCV

Sexologue

< 3mois

iPDE-5

ATCD chirurgie/radiothérapie pelvienne

Échec après 4 tentatives Oui Injection intracaverneuse de PGE1

Échec

Non Réévaluer à 3 mois Sexologue Échec

Uro-andrologue spécialisé pour discuter implant pénien après pharmaco-doppler pénien

Figure 5 - Algorithme décisionnel de prise en charge de la dysfonction érectile.

rone est aujourd’hui réservée aux endocrinologues, urologues et gynécologues pour toutes les formes et tous les produits. Le respect strict des contre-indications est indispensable, avant instauration d’une androgénothérapie substitutive. Il s’agit d’un traitement au long cours, nécessitant une surveillance clinique et biologique régulière. Cette surveillance est une responsabilité partagée : le médecin doit insister auprès du patient sur la nécessité de bilans périodiques de ce traitement (PSA, NFS), instauré a priori à vie. Un algorithme décisionnel de prise en charge est proposé en figure 5.

Conclusion

La dysfonction érectile est la plupart du temps plurifactorielle et altère la qualité de vie. Une bonne connaissance de la physiopathologie et un interrogatoire précis couplé à un examen clinique adapté permettent la plupart du temps de faire la lumière sur les étiologies.

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La prise en charge doit être fonction des attentes du patient, en lui expliquant de façon objective les tenants et aboutissants des différents traitements qui peuvent lui être proposés. En cas de situation complexe (pathologie psychiatrique sous-jacente, malformation anatomique ou autres troubles sexuels associés), il devra être orienté vers un spécialiste urologue, psychiatre ou endocrinologue selon le trouble. Enfin, il est essentiel pour le médecin généraliste de dépister une DE chez ses patients, en raison du risque d’événement cardiovasculaire dans les 3 ans suivant l’apparition d’une DE, qui peuvent être évités moyennant une correction des facteurs de risque cardiovasculaire, permettant de façon efficace de diminuer l’incidence d’événements graves en cas n de prise en charge précoce.

Mots-clés : Dysfonction érectile, Diabète, Obésité, Dysfonction endothéliale, Hypogonadisme, Syndrome métabolique, Monoxyde d’azote

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Interspécialités

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Dessin du mois

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conférences et congrès

Gestion du traitement antiagrégant plaquettaire Symposium présenté aux JESFC

Gestion du traitement antiplaquettaire D’après le symposium parrainé par Daiichi Sankyo-Lilly (JESFC - Paris le 16 janvier 2014)

D

ans ce symposium consacré à la prise en charge des Syndromes coronaires aigus (SCA), la place des inhibiteurs récents des récepteurs P2Y12 plaquettaires de l’ADP en traitement de première ligne dans les recommandations de l’European Society of Cardiology (ESC) dans les SCA ST+ (2012) et non ST+– (2011) a été rappelée au cours de la présentation de cas cliniques interactifs.

résultats de l’angiographie pour avoir la confirmation du diagnostic avant d’initier un traitement avec un inhibiteur du P2Y12.

Selon les recommandations européennes, la bithérapie antiagrégante plaquettaire doit comporter de l’aspirine et l’un des deux inhibiteurs des récepteurs P2Y12 plaquettaires de l’ADP de référence actuels, le prasugrel (en l’absence d’antécédent d’AVC/AIT et chez les moins de 75 ans, ≥ 60 kg) ou le ticagrélor.

(C. Brasselet, Reims)

Un point a également été fait sur l’actualité récente avec les résultats de l’étude ACCOAST en défaveur de la stratégie de prétraitement par une dose de charge de prasugrel chez les patients SCA non ST+ en amont de la coronarographie. La priorité chez ces patients est d’attendre les

quel traitement antiplaquettaire de référence en 2014 pour les patients avec syndrome coronaire aigu stentés ? Les recommandations de l’ESC concernant la prise en charge des Syndromes coronaires aigus avec sus-décalage du segment ST (SCA ST+) ont été réactualisées en 2012 (1). La bithérapie AAP doit comporter de l’aspirine et l’un des deux inhibiteurs des récepteurs P2Y12 plaquettaires de l’ADP de référence actuels, le prasugrel (en l’absence d’antécédent d’AVC/AIT et chez les moins de 75 ans) ou le ticagrélor. Le clopidogrel est utilisé en cas de contreindication ou si le prasugrel ou le ticagrélor ne sont pas disponibles. Ces recommandations font suite aux essais pivot réalisés avec les inhibiteurs récents des

Cardiologie - Cardinale • Février 2014 • vol. 8 • numéro 61

récepteurs plaquettaires P2Y12. Pour le prasugrel, l’étude TRITON-TIMI 38 (2) est une étude de supériorité qui a comparé le prasugrel 60/10 mg vs le clopidogrel 300/75 mg en association à l’aspirine chez 13 608 patients SCA bénéficiant d’une angioplastie. Sur la totalité de la population de l’étude, les résultats ont montré une réduction du risque de 19 % (p < 0,001) pour le critère principal à 15 mois de suivi (décès cardiovasculaires, IDM non fatal, AVC non fatal) qui s’accompagne d’une augmentation du risque hémorragique (saignements TIMI majeurs non liés au pontage) : 2,4 % vs 1,8 % (p = 0,03). Une réduction très significative des thromboses de stent a été constatée dans le bras prasugrel (réduction du risque de 52 % ; 1,1 % vs 2,4 % ; p < 0,001), observée que l’on se situe en phase précoce (RR = 59 % ; p < 0,0001) ou tardive (RR = 40 % ; p = 0,03) ou avec des stents nus (RR = 48 % ; p = 0,0009) ou actifs (RR = 64 % ; p < 0,0001). Cette étude a également permis d’identifier des sous-groupes à

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conférences et congrès

risque accru de saignements : patients avec antécédents d’Accident vasculaire cérébral (AVC) ou d’Accident ischémique transitoire (AIT) et patients âgés de plus de 75 ans, pesant moins de 60 kg. Ces patients sont aujourd’hui exclus de la prescription du prasugrel 10 mg en France (4). Dans le sousgroupe des patients SCA ST+, le bénéfice sur le critère principal à 15 mois (10 % vs 12,4 %, soit une réduction du risque de 21 % ; p = 0,02) – significatif dès 30 jours (réduction du risque de 32 % ; p = 0,0017) –, ne s’accompagnait pas d’une augmentation du risque hémorragique (4,8 % vs 5,9 % ; p = 0,23) (2). Chez ces patients SCA ST+, une réduction très significative des thromboses de stent a été également observée dans le bras prasugrel : réduction du risque de 51 % dès 30 jours (1,2 % vs 2,4 % dans le bras clopidogrel ; p = 0,008) confirmée à 15 mois de suivi (1,6 % vs 2,8 %, soit une réduction du risque de 42 % ; p = 0,02) (2). Enfin, le prasugrel s’est également montré plus efficace que le clopidogrel chez les patients diabétiques (n = 3 146) traités par angioplastie et stent (nu ou actif ) et réduit significativement (12,2 vs 17 % ; RRR = 30 % ; p < 0,001) les complications ischémiques du critère principal, sans augmentation concomitante du risque hémorragique (2,6 % dans le bras clopidogrel vs 2,5 % dans le bras prasugrel pour les saignements majeurs ; p = 0,81) (5). Avec le ticagrélor, l’étude PLATO a comparé chez 18 624 patients SCA ST+ ou non ST+ l’efficacité, en association à l’aspirine, du clopidogrel 300/75 mg vs ticagrelor 180 et 90 mg deux fois

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par jour (6). Les résultats à 1 an sur le critère principal (décès CV, IDM non fatals AVC non fatals) montrent une réduction de 16 % (9,8 % vs % ; p < 0,001) du risque sous ticagrélor – bénéfice observé de façon précoce puis au long cours – sans surrisque pour les saignements majeurs (p = 0,43) selon les critères de saignement PLATO (7). Dans le sous-groupe des patients SCA ST+, le bénéfice sur le critère principal est en accord avec les résultats de la cohorte globale de PLATO mais n’est plus significatif 9,4 % vs 10,8 % (p = 0,07) – de même que pour les décès cardiovasculaires (4,5 % vs 5,5 % ; p = 0,07) (8). Un bénéfice significatif en faveur du ticagrélor est en revanche constaté sur la survenue d’infarctus du myocarde excluant l’IDM silencieux (réduction du risque de 20 % ; p = 0,03) et la thrombose de stent (réduction du risque de 25 % ; p = 0,04). Le risque d’AVC, faible dans les deux bras, est cependant plus élevé avec le ticagrélor (1,7 % vs 1,0 % ; p = 0,02). Cette analyse complémentaire ne montre pas de différence concernant l’incidence des saignements majeurs (9 % vs 9,2 % pour le clopidogrel ; p = 0,76) selon les critères de saignement PLATO (8).

syndrome coronaire aigu non St+ : y a-t-il un intérêt à prétraiter en amont de l’angioplastie ? (G. cayla, nîmes)

Dans les Syndromes coronaires aigus sans surélévation du segment ST (SCA non ST+), les dernières recommandations de

l’ESC ont confirmé l’intérêt de la troponine ultrasensible (qui a permis de raccourcir les délais diagnostiques, de l’échocardiogramme et du coroscanner dans les bas risques) et de la stratification du risque ischémique (score GRACE) et hémorragique (score CRUSADE) (9). La pierre angulaire de la prise en charge médicamenteuse demeure le traitement antiagrégant (aspirine à dose de charge 150-300 mg, dose d’entretien 75-100 mg et un inhibiteur du P2Y12) et les anticoagulants. La stratégie invasive est choisie en fonction du niveau de risque avec des indications simplifiées : deux critères principaux justifient la coronarographie (variations des troponines et variations dynamiques du segment ST ou de l’onde T), les autres critères de risque étant considérés comme secondaires et venant essentiellement renforcer l’indication (diabète, insuffisance rénale, dysfonction ventriculaire gauche, angioplastie récente, antécédents de pontage, score GRACE intermédiaire ou élevé, récidive précoce postinfarctus). Le moment où réaliser la coronarographie est fonction de ces différents éléments : dans les 2 heures après le premier contact médical en cas de SCA non ST+ à très haut risque (angor réfractaire, variation dynamique du segment ST, arythmie menaçant le pronostic vital, instabilité hémodynamique), dans les 24 heures après le premier contact médical en cas de risque élevé (score GRACE > 140, douleur thoracique persistante, troponine positive, variations dynamiques du segment ST ou de l’onde T) et dans les 72 heures chez les patients à haut risque (diabète, insuffisance rénale, FEVG < 40 %, antécédents

Cardiologie - Cardinale • Février 2014 • vol. 8 • numéro 61


gestion du traitement antiagrégant plaquettaire

de pontage, récidive douloureuse après infarctus). Concernant le traitement antiagrégant, le prasugrel (dose de charge 60 mg puis dose d’entretien à 10 mg/ jour) est recommandé (niveau de preuve I B) chez les patients avec SCA ayant eu une coronarographie (absence d’antécédents d’AVC ou d’AIT, moins de 75 ans, poids ≥ 60 kg), en cas de décision d’angioplastie. Le ticagrélor (dose de charge 180 mg puis 90 mg 2 fois par jour) est recommandé (niveau de preuve I B) comme inhibiteur du P2Y12 chez les patients SCA présentant un risque modéré à élevé, quelle que soit la stratégie de prise en charge adoptée et y compris chez les patients traités initialement par clopidogrel. La place du clopidogrel chez ces patients devant bénéficier d’une stratégie invasive est désormais limitée aux cas où le prasugrel ou le ticagrélor ne peuvent être utilisés. Chez les patients ( jusqu’à 10 % des patients avec un SCA non ST+) pour qui un pontage est envisagé en cas d’atteinte pluritronculaire, après prise en compte du score Syntax et discussion pluridisciplinaire (Heart Team

Discussion®), le geste chirurgical peut être pratiqué – en raison du risque accru de saignement – avec un délai de 5 jours en cas de dose de charge de 600 mg de clopidogrel et de 7 jours selon les AMM des inhibiteurs récents du P2Y12. Sur la question de l’intérêt du prétraitement dans les SCA non ST+, l’étude ACCOAST (10), réalisée spécifiquement dans une population de 4 033 patients SCA non ST+ avec majoration des troponines (≥ 1,5 x VLN) devant bénéficier d’une stratégie invasive dans les 2 à 48 heures après la randomisation, ne montre pas de bénéfice à une stratégie de prétraitement par une dose de charge de prasugrel (30 mg en amont de la coronarographie puis 30 mg après la coronarographie vs placebo puis 60 mg après la coronarographie) en termes de réduction des événements ischémiques (critère primaire : décès CV, IDM, AVC et revascularisation par anti-GP 2b/3a en urgence à 7 jours) : 10 vs 9,8 % en cas de prétraitement (HR = 1,02 ; p = 0,81). À 30 jours, l’évolution sur ce critère principal est strictement comparable entre les deux bras : 10,8 vs 10,8 % (HR = 0,997 ; p = 0,98). La straté-

gie de prétraitement majore en revanche, et de façon significative, le risque de saignement majeur (TIMI) au moment du geste de revascularisation à 7 jours (2,6 % vs 1,4 % soit un HR à 1,90 ; p = 0,006) et à 30 jours (2,9 % vs 1,5 % soit un HR à 1,97 ; p = 0,002). Concernant le critère principal d’efficacité, il n’existe aucune différence dans les différents sousgroupes de population étudiés (y compris chez les patients les plus à risque de thrombose – diabétiques, sujets âgés, score GRACE élevé, accès radial vs fémoral) à 7 et à 30 jours. Les résultats d’ACCOAST montrent que chez les patients SCA non ST+ devant être pris en charge dans les 2 à 48 heures, la dose de charge de 60 mg de prasugrel doit être administrée au moment de l’angioplastie, ce qui confirme le design utilisé chez les patients SCA non ST+ dans l’étude TRITON. Ces résultats ne sont pas applicables n aux patients SCA ST+.

Mots-clés : Antiplaquettaire, Syndrome coronaire aigu, Prétraitement, Angiographie

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with clopidogrel in patients with a planned invasive strategy for acute coronary syndromes (PLATO): a randomised double-blind study. Lancet 2010 ; 375 : 283-93. 8. Steg PG, James S, Harrington RA et al. Ticagrelor versus clopidogrel in patients with ST-elevation acute coronary syndromes intended for reperfusion with primary percutaneous coronary intervention: A Platelet Inhibition and Patient Outcomes (PLATO) trial subgroup analysis. Circulation 2010 ; 122 : 2131-41. 9. Hamm CW, Bassand JP, Agewall S et al. ESC Guidelines for the management of acute coronary syndromes in patients presenting without persistent ST-segment elevation: The Task Force for the management of acute coronary syndromes (ACS) in patients presenting without persistent ST-segment elevation of the European Society of Cardiology (ESC). Eur Heart J 2011 ; 32 : 2999-3054. 10. Montalescot G, Bolognese L, Dudek D et al. Pretreatment with prasugrel in non-ST-segment elevation acute coronary syndromes. N Engl J Med 2013 ; 369 : 999-1010.


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