CARDINALE CARDIOLOGIE
R e v u e d i d a c t i q u e e t p r at i q u e e n c a r d i o l o g i e
d www.cardinale.fr
L’infarctus du myocarde : une épreuve à haut risque psychologique La détresse psychologique postinfarctus touche plus de 50 % des patients et multiplie par 2 la mortalité et les complications coronariennes. Quelles sont alors les conséquences pratiques pour le cardiologue ? La réponse de Jean-Pierre Houppe.
cas clinique
avis d’expert
Interspécialités
L’hydatidose intrapéricardique : une localisation cardiaque rare
Une pratique sportive intense raccourcit-elle l’espérance de vie ?
Pathologies neurovasculaires : avancées et perspectives
François Carré
Yannick Béjot, Emmanuel Touzé
Hamid Jallal
mise au point
Actualités thérapeutiques de l’année 2013 : que retenir ? François Diévart
DPC
Développement Professionnel Continu
Mars 2014 • Volume 8 • n° 62 • 9 E
sommaire
CARDINALE CARDIOLOGIE
R e v u e d i d a c t i q u e e t p r at i q u e e n c a r d i o l o g i e
Directeur de la publication : Dr Antoine Lolivier Rédacteur en chef : Dr Serge Kownator Rédacteurs en chef adjoints : Pr Victor Aboyans, Dr Stéphane Cosson Directrice de la Rédaction : Odile Mathieu • Rédactrice : Caroline Sandrez • Directrice de Fabrication et de Production : Gracia Bejjani • Assistante de Production : Cécile Jeannin • Maquette & illustration : Élodie Lelong • Service abonnements : Claire Lesaint • Impression : Imprimerie de Compiègne 2, avenue Berthelot – ZAC de Mercières BP 60524 – 60205 Compiègne cedex
Mars 2014 • Vol. 8 • N° 62
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n Éditorial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 66
n mise au point
Actualités thérapeutiques de l’année 2013 Que doit-on retenir ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 67 François Diévart (Dunkerque)
Comité de lecture Dr Walid Amara (Montfermeil) • Dr Pierre Attali (Strasbourg) • Pr François Carré (Rennes) • Dr Gabriel Choukroun (Amiens) • Dr Serge Cohen (Marseille) • Pr Geneviève Derumeaux (Lyon) • Dr François Diévart (Dunkerque) • Dr Jean-Jacques Domerego (Nice) • Dr Alain Ducardonnet (Paris) • Dr Meyer Elbaz (Toulouse) • Pr Michel Farnier (Dijon) • Pr Alain Grynberg (Jouy-en-Josas) • Pr Daniel Herpin (Poitiers) • Dr Jean-Pierre Houppe (Thionville) • Dr Patrick Jourdain (Pontoise) • Pr Christophe Leclercq (Rennes) • Dr François Luizy (Paris) • Dr Marie-Christine Malergue (Paris) • Dr Emmanuel Messas (Paris) • Dr François Philippe (Paris) • Dr Pascal Poncelet (Lille) • Dr Naïma Rahmoun (Oran) • Dr Gilles Traisnel (Lille) • Dr Olivier Varenne (Paris) • Dr Stéphane Zuily (Nancy)
n réflexions L’infarctus du myocarde Une épreuve à haut risque psychologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 72
Jean-Pierre Houppe (Thionville)
n interspécialités Pathologies neurovasculaires Avancées et perspectives. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 79
Yannick Béjot (Dijon), Emmanuel Touzé (Caen)
n avis d’expert
Une pratique sportive intense raccourcit-elle l’espérance de vie ? Éléments de réponse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 83
François Carré (Rennes)
Comité scientifique Pr Michel Bertrand (Lille) • Pr Jean-Pierre Bourdarias (Boulogne) • Pr Jean-Paul Broustet (Bordeaux) • Pr Christian Cabrol (Paris) • Pr Alain Cribier (Rouen) • Pr Vincent Dor (Monaco) • Dr Jean Fajadet (Toulouse) • Dr Guy Fontaine (Paris) • Pr Gilbert Habib (Marseille) • Pr Samuel Lévy (Marseille) • Dr François Luizy† (Paris) • Pr Jean Marco (Toulouse) • Dr Jean-Baptiste Michel (Paris) • Pr Philippe Gabriel Steg (Paris) • Pr Paul Touboul (Lyon) • Pr Bernard Belhassen (Tel-Aviv) Cardiologie Cardinale est une publication © Expressions Santé SAS 2, rue de la Roquette Passage du Cheval Blanc, Cour de Mai - 75011 Paris Tél. : 01 49 29 29 29 - Fax : 01 49 29 29 19 E-mail : cardinale@expressiongroupe.fr RCS Paris B 394 829 543 ISSN : 1960-1646 N° de Commission paritaire : 0115 T 89308 Prix au numéro : 9 e. Mensuel : 10 numéros par an. Abonnement au prix de 75 e TTC/an. Les articles de “Cardiologie Cardinale” sont publiés sous la responsabilité de leurs auteurs. Toute reproduction, même partielle, sans le consentement de l’auteur et de la revue, est illicite et constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal.
n cas clinique
L’hydatidose intrapéricardique Une localisation cardiaque rare (à propos d’un cas) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 90
Hamid Jallal, Marouane Belarbi, Sanae Arouia, Anass Zbitou, Nadir Zemraoui, Laila Bendriss, Ali Khatouri (Marrakech)
n petites annonces . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . n Dessin du mois (Jean-Philippe Kevorkian) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . n Bulletin d’abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . n rendez-vous de l’industrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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éditorial
L’habit ne fait pas le moine !
S
i on en croit le proverbe, l’habit ne ferait pas le moine. Et pourtant, l’apparence, “l’avoir l’air de”, sont souvent érigés aujourd’hui en priorité absolue. On se doit d’apparaître et, au fond, qu’importe ce que l’on est vraiment ! n Serge Cela étant, un article paru Kownator récemment dans Circulation tend à montrer qu’on pourrait être ce qu’on paraît, en tout cas en termes de maladie coronaire. Il s’agit ici d’une étude danoise qui a permis de suivre, jusque trente-cinq ans, 10 885 sujets âgés de 20 à 93 ans, indemnes de maladie coronaire connue. On constate ainsi que paraître âgé, et quel que soit l’âge réel, s’accompagne, chez l’homme et la femme, d’un risque augmenté de
entre ce pli et le vieillissement. Ici, on montre que ces particularités sont associées à un risque coronarien majoré quel que soit l’âge réel ou le sexe, avec en outre un effet de sommation. Ainsi, un sujet ayant une calvitie, un pli auriculaire et un xanthélasma aura, quel que soit son âge, un risque majoré d’environ 50 % de présenter une coronaropathie ; il y a de quoi se faire des cheveux gris ! J’allais oublier, les cheveux gris sont également un marqueur de surrisque qui a été étudié ici, il ne résiste cependant pas à l’ajustement sur les facteurs de risque traditionnels, pas plus que ne le font les rides du visage. En tout cas, et quels que soient l’âge et le sexe de nos patients, on peut trouver un intérêt pronostique à bien les dévisager et à s’intéresser à leurs oreilles. Rien de nouveau encore une fois puisqu’en 1974 déjà, le New England Journal of Medicine publiait une étude
Paraître âgé s’accompagne, chez l’homme et la femme, d’un risque augmenté de coronaropathie et d’infarctus du myocarde. coronaropathie et d’infarctus du myocarde. Que signifie ici “paraître âgé” ? Il s’agit de la présence d’une batterie de particularités physionomiques, comme, la calvitie frontale ou en couronne, la présence d’un arc cornéen ou d’un xanthélasma. Il s’agit aussi des rides du visage ou de la présence d’un pli auriculaire – le saviez-vous, ce pli qui barre le lobe de l’oreille porte le nom de signe de Frank ou de Lichstein. Cette association n’est pas récente, on avait déjà décrit le lien entre la présence d’un pli du lobe de l’oreille et la maladie coronaire, il s’agissait surtout d’établir le lien
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établissant un lien entre pli lobaire et maladie coronaire. Plus tard, on y associait comme autre facteur de risque la pilosité du conduit auditif. Au bout du compte et pour revenir au proverbe, si l’habit ne fait pas le moine, l’aspect peut faire le coronarien… Miroir, Miroir dis-moi... ! n
Bibliographie • Christoffersen M, Frikke-Schmidt R, Schnohr P et al. Visible age-related signs and risk of ischemic heart disease in the general population: a prospective cohort study. Circulation 2014 ; 129 : 990-8.
Cardiologie - Cardinale • Mars 2014 • vol. 8 • numéro 62
Mise au point
Actualités thérapeutiques de l’année 2013
Que doit-on retenir ?
François Diévart (Clinique Villette, Dunkerque)
Introduction L’année 2013 a été riche en données nouvelles en termes de thérapeutique cardiovasculaire et, vu l’espace imparti pour une mise au point sur un tel sujet, un choix, obligatoirement partiel et partial, doit être fait. Les données ici présentées, même si elles comportent plusieurs déconvenues, ont pour objectif de montrer qu’une recherche clinique de qualité perdure et que ses résultats suscitent de nombreuses questions justifiant la poursuite de l’évaluation d’hypothèses par des méthodes fiables allant au-delà de suppositions, aussi intuitives et logiques paraissent-elles.
Remises en cause publiques et retombées potentielles
Début 2013, deux médecins ont fait parler d’eux sur les plateaux télévisés, les antennes de radio et dans les journaux et magazines grand public. À l’origine, c’est parce qu’ils avaient chacun écrit un livre grand public, l’un pour dénigrer le rôle du cholestérol dans la genèse des maladies ischémiques et donc nier l’utilité des statines, l’autre pour affirmer, parce qu’il l’avait « constaté dans sa clientèle », que les génériques sont moins efficaces et moins bien tolérés que les princeps. Leurs allégations ne reposent pas sur des méthodes scientifiques fiables. L’un des deux a même écrit qu’il avait jugé que des don-
nées publiées par une équipe de méthodologistes de renom étaient fausses parce que, selon lui, trafiquées, sans aucune preuve de cette allégation, et il a produit dans son livre les données telles qu’elles devaient être selon lui, sans disposer d’aucun document source autre que son “intuition”. Le problème avec ce battage médiatique est que les patients qui entendent ces allégations ont des difficultés à juger de leur véracité et certains sont alors tentés de ne pas prendre la statine qui leur a été prescrite, avec des conséquences dommageables.
Le traitement a l’effet que l’on croit qu’il a Une étude a montré qu’en prescrivant un placebo il était pos-
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sible d’obtenir les effets attribués au traitement qu’il est censé remplacer. Dans cette étude, l’investigateur a en effet proposé à des étudiants, en ouvert, un traitement bêtabloquant afin de réduire leur anxiété en leur indiquant que ce traitement est efficace et qu’il peut avoir des effets secondaires telle une baisse de pression artérielle et avoir aussi quelques effets indésirables. Le principe de l’étude a été de proposer à toutes les personnes incluses le bêtabloquant sous la forme d’une marque connue, et ce pendant une semaine, puis au terme de la semaine, de diviser aléatoirement la population enrôlée en trois groupes : l’un recevait le même traitement sous la même forme, un autre recevait le même traitement sous la forme d’une autre marque co-commercialisée (le princeps en “comarketing”), et le troisième groupe recevait le même traitement sous forme de générique. Lorsque les critères prédéfinis ont été évalués, l’étude a montré que, dans le groupe ayant gardé le traitement sous la forme du princeps de marque réputée, par rapport aux deux autres groupes, le score d’anxiété a été significativement
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Réflexions
L’infarctus du myocarde
Une épreuve à haut risque psychologique Jean-Pierre Houppe (Centre cardiologique et vasculaire, Thionville ; jeanpierrehouppe@wanadoo.fr)
Introduction Depuis l’étude Interheart, publiée il y a maintenant dix ans, et les dernières recommandations de la Société européenne de Cardiologie (ESC) sur la prévention coronarienne éditées en 2012, les cardiologues sont beaucoup plus sensibles à la notion du risque psychosocial. L’évaluation et la prise en charge du stress, de l’anxiété, de la dépression commencent à faire partie intégrante de la prévention primaire au même titre que l’abstention tabagique, l’activité physique et l’équilibre alimentaire.
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éanmoins, dans ses recommandations, aussi bien de prévention que de prise en charge de l’infarctus du myocarde, l’ESC n’aborde pas la question de la répercussion psychique de l’infarctus du myocarde. Un article très récent publié dans Circulation par un groupe de psychiatres vient rappeler aux cardiologues que la
gique peut entraîner un syndrome dépressif, mais aussi de l’anxiété, des manifestations de déni, ou encore un tableau de stress post- traumatique. Cette détresse psychologique est toujours un facteur d’évolution péjoratif ; elle a parfois des conséquences dramatiques, notamment en ce qui concerne le risque de suicide.
« Il y a deux maladies : celle soignée par le médecin et celle vécue par le patient. Ces deux maladies sont différentes à bien des égards. » Arthur Kleinman, The Illness Narratives. dépression postinfarctus est un important facteur de risque de récidive d’événements coronariens mortels et non mortels. La question de l’impact psychologique d’un infarctus du myocarde et de ses conséquences pour l’avenir coronarien du patient est cependant loin de se limiter à la seule dépression. La survenue d’un syndrome coronarien aigu chez un patient indemne jusque-là de souffrance psycholo-
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L’infarctus : un temps de bouleversement, d’épreuve et d’adaptation
risque de mort et se traduit par des peurs spécifiques liées à cette réalité : mort, souffrance, déchéance, abandon. D’un point de vue psychique, la maladie est une expérience singulière d’adaptation qui donne lieu dans de nombreux cas à une remise en cause fondamentale des valeurs sur lesquelles reposait la vie du patient. La maladie définit un enjeu psychique essentiel lié à la mobilisation de ressources psychiques qui font appel à de nouvelles valeurs et qui constituent d’autres raisons de vivre ».
Le bouleversement instantané Le vécu de l’infarctus est en luimême extrêmement riche en ressentis physique et émotionnel. La brutalité de l’événement, la douleur intense, l’appel fréquent du Samu, la frayeur possible de l’entourage, l’hospitalisation, la perception de l’urgence, la coronarographie, l’angioplastie : autant d’événements qui peuvent être traumatisants d’un point de vue psychologique.
L’épreuve du deuil
Le syndrome coronarien aigu, s’il est inaugural, marque pour le patient l’entrée inattendue et définitive dans la maladie chronique. Une fois le mot infarctus prononcé, la vie ne sera plus jamais tout à fait la même. « La maladie chronique grave se caractérise par un
L’annonce du diagnostic marque le début d’un temps d’épreuve, la fin d’une illusoire immortalité et la nécessité de faire le deuil d’une santé parfaite. Les étapes de ce deuil symbolique sont plus ou moins marquées et plus ou moins exprimées, mais toujours présentes. Atteint initialement par la
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Interspécialités
Pathologies neurovasculaires Avancées et perspectives
Yannick Béjot (Service de Neurologie, CHU de Dijon), Emmanuel Touzé (Service de Neurologie, CHU de Caen)
évolution des concepts au cours des toutes dernières années Alors que la thrombolyse intraveineuse par rt-PA intraveineux (altéplase) demeure le seul traitement médicamenteux de phase aiguë de l’infarctus cérébral ayant montré une efficacité sur la réduction du risque de handicap, son administration à un grand nombre de patients reste limitée, du fait d’une fenêtre thérapeutique étroite fixée selon les critères de sélection des essais thérapeutiques jusquelà basés sur le délai chronologique (durée d’évolution des signes).
larisation précoce en fonction de la quantification du volume de tissu à sauver pourrait ainsi devenir une option intéressante dans un futur proche, permettant non seulement d’étendre la fenêtre thérapeutique, mais aussi de récuser les patients pour lesquels la balance bénéfice/risque serait défavorable. Ce concept est particulièrement pertinent dans le cadre des infarctus cérébraux du réveil, ou plus largement des infarctus à horaire de début indéterminé, qui représentent environ 20 % des patients. À titre d’exemple, l’essai thérapeutique en cours WAKE-UP, basé sur la sélection des patients à partir des données de l’IRM cérébrale,
Une sélection par l’imagerie des patients candidats à une revascularisation précoce en fonction de la quantification du volume de tissu à sauver pourrait devenir une option intéressante. Au-delà de ce délai chronologique, la notion de délai tissulaire de l’infarctus cérébral émerge ces dernières années. L’apport de l’imagerie cérébrale (scanner de perfusion, mistmatch perfusion/ diffusion ou diffusion/FLAIR à l’IRM) dans la détermination de la viabilité tissulaire au cours d’un infarctus est en cours d’évaluation. Une sélection par l’imagerie des patients candidats à une revascu-
permettra d’évaluer le bénéfice de la thrombolyse intraveineuse chez les patients sans lésion visible en séquence FLAIR (1).
les grands changements au cours des dernières années
Concernant la prise en charge à la phase aiguë, l’organisation des
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filières de soins dédiées aux AVC sur le territoire national, conjuguée à l’extension de la fenêtre thérapeutique d’administration de la thrombolyse intraveineuse suite aux résultats de l’étude ECASS-III publiée en 2008, ont permis d’accroître la proportion de patients pouvant bénéficier de ce traitement (2). Ce bénéfice existe aussi chez les sujets de plus de 80 ans, comme l’a montré l’étude IST‑3 (3). Les grands registres de patients traités par rt-PA IV ont permis d’affiner les indications du traitement et un bon nombre de contre-indications théoriques de la thrombolyse (déficit mineur ou régressif, diabète et antécédent d’AVC, infarctus du myocarde récent, anévrisme intracrânien non rompu…) ne doivent plus être des facteurs limitant l’utilisation du rt-PA. Un autre point majeur démontré par les essais est la nécessité de traiter le plus tôt possible à partir du moment où le patient est pris en charge. Cela amène à organiser les filières pré et intrahospitalières pour optimiser ce délai. En Finlande, l’équipe de Helsinki a ainsi amélioré sa filière et actuellement 50 % des patients éligibles reçoivent le traitement dans les 20 minutes qui suivent leur admission (4). Plus récemment, l’avènement des nouveaux anticoagulants oraux
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Avis d’expert
Une pratique sportive intense raccourcit-elle l’espérance de vie ?
Éléments de réponse
François Carré (Université Rennes 1, INSERM U 1099, Hôpital Pontchaillou ; francois.carre@univ-rennes1.fr)
Introduction Les effets bénéfiques sanitaires, entre autres cardiovasculaires, de la pratique sportive régulière et modérée sont indiscutables. En revanche, les effets du sport intense, et en particulier de compétition, sur l’espérance de vie sont classiquement discutés.
L’effet bénéfique direct d’une Activité physique (AP) pour la santé, en particulier cardiovasculaire, est bien démontré (1-2). Un débat déjà ancien existe concernant le possible effet néfaste d’une pratique sportive trop intense (3). Dans la population générale, une courbe en U reliant l’intensité de la pratique et la survenue d’événement coronarien a ainsi été observée (Fig. 1), relation qui n’existe néanmoins pas entre intensité de l’AP et prévention du diabète de type 2 (4). De même, plus récemment, dans la population de sportifs de compétition de niveau variable, s’est posée la question de l’éventuel effet cardiaque délétère d’une pratique sportive trop intense (5-6).
Fréquence d’événement pour 1 000 sujets/an
“No Pain, No Gain” : vrai aussi pour la santé dans la population générale ?
12
? 8
4
0
Aucune
Occasionnelle
Faible
Modérée
Intense
Type d’activité physique pratiquée Figure 1 – Relation entre intensité de la pratique sportive et risque de survenue d’un accident coronarien dans la population générale masculine adulte d’âge moyen 4045 ans (n = 5 159, suivi 19 ans). D’après (4).
Devant la possibilité d’un effet de type dose-réponse positif de l’AP, la question des dose et intensité “idéales” individuelles de pratique a ensuite été posée (3). En résumé, il apparaît que globalement les bien-
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faits sanitaires obtenus par la pratique d’une AP sont d’autant plus importants que celle-ci est plus intense (7). En notant cependant que les effets d’une pratique de la compétition ne sont pas étudiés (7).
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Cas clinique
L’hydatidose intrapéricardique
Une localisation cardiaque rare (à propos d’un cas) Hamid Jallal*, Marouane Belarbi**, Sanae Arouia*, Anass Zbitou*, Nadir Zemraoui**, Laila Bendriss*, Ali Khatouri* (*Service de Cardiologie, Hôpital militaire Avicenne, Marrakech, Maroc, jalal-hamid@hotmail.com ; **Service de Néphrologie-Hémodialyse, Hôpital militaire Avicenne, Marrakech, Maroc)
Le kyste hydatique du cœur est une affection parasitaire qui représente le développement au niveau du cœur de la forme larvaire du Taenia Echinococcus granulosus (1). La localisation cardiaque à l’intérieur du péricarde est très rare et représente 10 % des localisations cardiaques, elle est rarement primitive mais souvent secondaire à une rupture d’un kyste hydatique du VG à développement sous-épicardique. Nous rapportons le cas d’une patiente âgée de 65 ans opérée avec succès de deux kystes hydatiques intrapéricardiques comprimant les cavités droites.
Observation
Il s’agit d’une patiente âgée de 65 ans, asymptomatique sur le plan cardiovasculaire, hémodialysée chronique depuis un mois sur néphropathie indéterminée, avec découverte fortuite d’une masse intracardiaque lors d’une ETT systématique. L’examen clinique a objectivé une TA basse à 90/60 mmHg et un roulement diastolique au foyer tricuspidien. L’ECG s’inscrit en rythme sinusal avec des ondes T négatives en septal profond, la radiographie thoracique (face/profil) (Fig. 1) a révélé une opacité paracardiaque déformant l’arc inférieur gauche. Le bilan biologique a objectivé une légère hyperéosinophilie avec un syndrome inflammatoire. La sérologie hydatique était négative. L’échocardiographie transthoracique (Fig. 2 et 3) a montré un VG de taille et de fonction normales, et des cavités droites de dimensions réduites par une masse kystique de 82x24 mm de siège péricardique
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Figure 1 - Opacité paracardiaque déformant l’arc inférieur gauche.
entraînant un rétrécissement tricuspidien modéré avec un gradient moyen à 6 mmHg. La TDM thoraco-abdominale a secondairement corroboré le diagnostic en mettant en évidence la présence de deux formations kystiques intrapéricardiques au contact des cavités droites. La plus grande (Fig. 4) est
uniloculaire et hypodense à paroi épaisse comprimant l’OD et le VD, et la plus petite (Fig. 5) à projection apicale, multivésiculée. Par ailleurs, le reste de l’abdomen est sans particularité, à part un kyste polaire rénal droit banal. La coronarographie faite dans le cadre du bilan préopératoire a montré une
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