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La prise en charge globale du patient diabétique

d www.diabeteetobesite.org Thérapeutique Intérêt des IDPP4 dans la prise en charge d’un diabète insulinotraité Pr Emmanuel Cosson

p. 178

Profession Profession : endocrino-diabétologue Dr Patrick Bouillot

p. 182

Interspécialités Passé et présent du syndrome métabolique Pr Bernard Vialettes

p. 202

À savoir La boucle fermée en 2013 : où en sommes-nous ? Pr Eric Renard

p. 208

De nombreuses études ont mis en évidence une augmentation du taux d’enfants macrosomes chez les femmes obèses ou en surpoids.

dossier (2e partie)

Grossesse

Comment améliorer le pronostic maternel et fœtal en cas d’obésité, de précarité et/ou de diabète ? 5 La macrosomie : une complication périnatale fréquente chez les femmes enceintes obèses avec tolérance au glucose normale ? (Dr Sébastien Galie, Dr Clémence Tréglia, Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte) 6 Précarité et grossesse : cibler les patientes concernées (Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte, Françoise Courtoisier, Dr Clémence Tréglia)

7 Programme d’éducation thérapeutique et précarité : s’adapter à la culture des patientes (Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte, Sabrina Lopez, Sarah Beaujour, Antoine Coignard) Juin 2013 • Volume 8 • n° 70 • 9 E


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sommaire

La pris e e n c h ar g e g l o ba l e d u pa t i e n t diab é t i q u e

• Directeur de la publication : Dr Antoine Lolivier • Directrice du développement : Valérie Belbenoît • Chef du Service Rédaction : Odile Mathieu • Rédactrice : Caroline Sandrez • Secrétaire de rédaction : Fanny Lentz • Chef de Fabrication et de Production : Gracia Bejjani • Assistante de Production : Cécile Jeannin • Maquette et illustrations : Elodie Lecomte, Antoine Orry • Directrice de clientèle/projets : Catherine Patary-Colsenet • Service abonnements : Claire Lesaint • Impression : Imprimerie de Compiègne 60205 Compiègne

Comité de lecture Rédacteur en chef “Obésité” : Pr Patrick Ritz (Toulouse)

n ActualitÉs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Comité Scientifique Pr Bernard Bauduceau (Paris) Pr Rémy Burcelin (Toulouse) Pr Bertrand Cariou (Nantes) Pr François Carré (Rennes) Pr Bernard Charbonnel (Nantes) Dr Xavier Debussche (Saint-Denis, Réunion) Pr Jean Girard (Paris) Pr Alain Golay (Genève) Pr Hélène Hanaire (Toulouse) Dr Michel Krempf (Nantes) Pr Michel Pinget (Strasbourg) Pr Paul Valensi (Bondy) Diabète & Obésité est une publication © Expressions Santé SAS 2, rue de la Roquette Passage du Cheval Blanc, Cour de Mai • 75011 Paris Tél. : 01 49 29 29 29 Fax : 01 49 29 29 19 E-mail : diabete@expressiongroupe.fr RCS Paris B 394 829 543 ISSN : 1957-5238 N° de Commission paritaire : 1013 T 88454 Prix au numéro : 9 F. Mensuel : 10 numéros par an. Les articles de “Diabète & Obésité” sont publiés sous la responsabilité de leurs auteurs. Toute reproduction, même partielle, sans le consentement de l’auteur et de la revue, est illicite et constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal.

p. 186

n Thérapeutique Prise en charge d’un diabète insulinotraité Intérêt des IDPP4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 178

Pr Emmanuel Cosson (Paris)

n Profession Profession : endocrino-diabétologue État des lieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 182

Dr Patrick Bouillot (Nevers)

n Dossier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

p. 187

Grossesse (2e partie) Comment améliorer le pronostic maternel et fœtal en cas d’obésité, de précarité et/ou de diabète ?

Rédacteur en chef “Diabète” : Dr Saïd Bekka (Chartres) Pr Yves Boirie (Clermont-Ferrand) Pr Régis Coutant (Angers) Pr Jean Doucet (Rouen) Pr Pierre Gourdy (Toulouse) Pr Véronique Kerlan (Brest) Dr Sylvie Picard (Dijon) Dr Helen Mosnier Pudar (Paris) Dr Caroline Sanz (Toulouse) Dr Anne Vambergue (Lille)

Juin 2013 • Vol. 8 • N° 70

www.diabeteetobesite.org

Dossier coordonné par le Dr Saïd Bekka (Chartres) et le Pr Patrick Ritz (Toulouse)

5 n La macrosomie Une complication périnatale fréquente chez les femmes enceintes obèses avec tolérance au glucose normale ?. . . . . . . . . . p. 188

Dr Sébastien Galie, Dr Clémence Tréglia, Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte (Marseille)

6 n Précarité et grossesse Cibler les patientes concernées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 194

Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte, Françoise Courtoisier, Dr Clémence Tréglia (Marseille)

7 n Programme d’éducation thérapeutique et précarité S’adapter à la culture des patientes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 197

Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte, Sabrina Lopez, Sarah Beaujour, Antoine Coignard (Marseille)

n Interspécialités Le syndrome métabolique Passé et présent. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 202

Pr Bernard Vialettes (Marseille)

n À savoir

La boucle fermée en 2013 Où en sommes-nous ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 208

Pr Eric Renard (Montpellier)

n Agenda . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . n Bulletin d’abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Assemblés à cette publication : 2 bulletins d’abonnement (2 pages et 4 pages). Photo de couverture : © Aksakalko / iStockphoto

p. 181 p. 192


Thérapeutique

Prise en charge d’un diabète insulinotraité Intérêt des IDPP4 Pr Emmanuel Cosson*

Introduction

I

l est donc envisageable d’associer les IDPP4 avec une insulinothérapie. Si on prend cependant en compte l’algorithme des nouvelles recommandations (1), l’association IDPP4 et insuline n’est jamais clairement mentionnée : *AP-HP, Université Paris 13, Sorbonne Paris cité, Service de Diabétologie-Endocrinologie-Nutrition, CRNH-IdF, CINFO, CHU Jean-Verdier, Bondy ; Unité de Recherche épidémiologique nutritionnelle, UMR U557 INSERM/U11125 INRA/CNAM/Université Paris 13, Bobigny emmanuel.cosson@jvr.aphp.fr

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- en échec de la trithérapie Metformine-Sulfamides hypoglycémiants-Sitagliptine, un passage à un traitement associant Metformine, Sulfamides hypoglycémiants et insuline est envisagé, mais l’association à un IDPP4 n’est pas considérée ; - lorsque l’insulinothérapie est mise en place initialement par insuline intermédiaire au coucher puis par multi-injection, le

© nikesidoroff – fotolia

Les inhibiteurs de la Dipeptidyl Peptidase 4 (IDPP4) ayant actuellement l’Autorisation de mise sur le marché (AMM) en France sont la Sitagliptine, la Vildagliptine et la Saxagliptine. Ils ont l’AMM en monothérapie lorsque la Metformine est contre-indiquée ou non-tolérée avec un service médical rendu (SMR) considéré insuffisant (SMR 0) ; en bithérapie en association à la Metformine ou aux Sulfamides hypoglycémiants (en cas de contre-indication ou d’effets secondaires à la Metformine), avec un SMR important ; et enfin, en trithérapie, avec la Metformine et les Sulfamides hypoglycémiants, avec un SMR important également. Seule la Sitagliptine est actuellement remboursée dans ce cadre, les dossiers étant déposés pour la Vildagliptine et la Saxagliptine. Quant à l’association avec l’insuline, les dossiers sont également déposés avec une AMM pour les trois molécules, le SMR étant actuellement déterminé pour la Sitagliptine (nul en association avec l’insuline mais important en association avec l’insuline et la Metformine). Les dossiers de Vildagliptine et Saxagliptine sont actuellement déposés (données mars 2013) mais nous verrons ensemble que nous disposons de données avec les trois molécules.

traitement par Metformine est conseillé, par Sulfamides hypoglycémiants également conseillé lorsqu’une insuline basale est instaurée, mais l’association à un IDPP4 n’est pas considérée. Nous envisagerons d’aller plus loin que les recommandations, en considérant les données sur les IDPP4 chez le diabétique insulinotraité : efficacité thérapeutique, Diabète & Obésité • Juin 2013 • vol. 8 • numéro 70


Profession

Profession : endocrino-diabétologue État des lieux n Parce que la profession d’endocrinologue est en évolution constante, nous avons voulu comprendre quels sont les enjeux de demain pour cette spécialité. Le Dr Patrick Bouillot a accepté de répondre à nos questions, notamment à travers le Livre Blanc de l’Endocrinologie, Diabète, Maladies métaboliques, projet qu’il a porté avec le SEDMEN et de nombreux autres représentants de la spécialité.

Diabète & Obésité : Pour commencer, Dr Bouillot, pouvez-vous vous présenter ? Dr Patrick Bouillot : Je suis endocrinologue, ou plutôt

endocrino-diabétologue. Historiquement, notre spécialité a regroupé deux compétences initiales : la diabétologie-nutrition d’un côté et l’endocrinologie de l’autre, qui ont fini par fusionner pour former la spécialité qui s’intitule, officiellement, endocrinologie, diabète, maladies métaboliques. Cet intitulé est assez complexe pour le grand public, et même parfois pour d’autres professionnels de santé. En nous présentant comme endocrino-diabétologues, nous essayons de simplifier. Je suis donc endocrino-diabétologue depuis 1988, année où j’ai été officiellement qualifié par l’Ordre des médecins. J’ai exercé en mi-temps hospitalier/mi-temps libéral et j’ai arrêté mon activité hospitalière en 2012. J’exerce donc actuellement exclusivement en libéral, à Nevers.

D&O : Qu’est-ce que le SEDMEN ? Dr P.B. : C’est le Syndicat national des spécialistes en en-

docrinologie, diabète, maladies métaboliques et nutrition, dont je suis actuellement le président. Ce syndicat a pour vocation de regrouper, pour leur défense professionnelle, l’ensemble des spécialistes en endocrino-diabétologie, quel que soit leur mode d’exercice (libéral, hospitalier, hospitalo-universitaire).

D&O : C’est donc par le biais de ce syndicat que vous avez pensé le Livre Blanc ? Dr P.B. : Oui, l’idée de départ de cet ouvrage revient au SEDMEN. Mais nous avons travaillé avec l’ensemble des

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structures représentatives de la spécialité qui sont : - la SFE (Société française d’Endocrinologie) et la SFD (Société francophone du Diabète), les deux sociétés savantes ; - la FENAREDIAM (Fédération nationale des Associations régionales d’Endocrinologie, Diabétologie et Métabolisme), l’association des libéraux ; - le CODEHG (Collège des Diabétologues et Endocrinologues des Hôpitaux généraux) ; - le CNU (Conseil national des Universités), section Endocrinologie, Diabète, Maladies métaboliques ; - le Conseil national professionnel d’Endocrinologie, Diabétologie et Maladies métaboliques, dernier né qui fédère déjà les structures représentatives de la spécialité ; - en y associant l’AFD (Association française des Diabétiques), la principale association de patients.

D&O : Quel était le but premier de ce Livre Blanc ? Dr P.B. : Nous avions besoin de donner de la lisibilité à

notre spécialité et de faire un état des lieux : Qui sommesnous ? Que faisons-nous ? Comment exerçons-nous ? Nous voulions également expliciter nos champs de compétences, notre situation dans le système de santé. Et puis, au-delà, bien sûr, nous voulions réfléchir à l’avenir et se faire, en quelque sorte, une feuille de route pour les 5 à 10 prochaines années pour faire évoluer notre spécialité.

D&O : Combien d’endocrino-diabétologues êtesvous ? Dr P.B. : Début 2012 nous étions 1 642, dont 1 596 en Diabète & Obésité • Juin 2013 • vol. 8 • numéro 70


actualités de la profession

Innovation

EN BREF Le projet FeetMe remporte diabète de type 2 : Résultats d’une étude en vie réelle Cegedim Strategic Data (CSD) a présenté les résultats d’une étude en vie réelle sur les patients atteints de diabète de type 2 dans les cinq principaux pays d’Europe dont la France. Cette étude a porté sur 415 093 patients diabétiques de type 2 traités par des médecins généralistes avec des antidiabétiques oraux (ADO) ou des GLP-1 sur un an. Les données montrent des différences sensibles entre les patients selon qu’ils sont traités en France, en Espagne, en Allemagne, en Italie ou au Royaume Uni. Par exemple : - l’âge moyen des patients traités varie de 64,5 ans en France à 69,6 ans en Espagne ; - plus de 85 % des patients de chaque pays ont au moins une des principales comorbidités associées au diabète ; - la France a le plus faible pourcentage de patients obèses (37,4 %) dans la population étudiée, le Royaume-Uni ayant le plus élevé (53,1 %). Ramadan du 9 juillet au 8 août 4 sur 5, c’est le nombre de personnes diabétiques de type 2 pratiquant le Ramadan et jeûnant malgré les risques. Et, selon les prévisions, ce chiffre devrait augmenter en 2013. Le Ramadan nécessite une préparation en amont et un suivi médical soutenu, c’est pourquoi MSD a créé le kit “Informations à propos du jeûne pendant le Ramadan” (disponible au format brochure sur demande auprès de MSD France ou en version électronique à partir du lien suivant www.msd-france.com). 186

la 7e édition du concours Be.project

L

ancé en 2007, le concours Be.project récompense et soutient une initiative d’étudiants de grandes écoles de commerce ou d’ingénieurs autour d’un projet d’entreprenariat innovant ou lié au développement durable. Parmi les nombreux dossiers reçus cette année, 5 équipes ont été sélectionnées afin de présenter leur projet devant un jury composé d’associés BearingPoint. À l’issue de la délibération, le jury a désigné FeetMe lauréat de cette édition 2013. Ce projet

porté par 2 étudiants de l’école Polytechnique est une semelle innovante qui permet de prévenir les ulcères du pied des diabétiques de type 2. Elle remporte 6 000 euros et l’accompagnement de consultants BearingPoint pendant 1 an pour faire aboutir ce projet. La mise sur le marché de ces semelles innovantes permettrait de réduire de 25 % le risque de lésion des pieds diabétiques et ainsi de réaliser des économies importantes sur ß les coûts de traitement.

Étude

Résultats 2012 de l’Observatoire des maladies rares

L’

Observatoire des maladies rares a pour but de mieux connaître la situation des personnes malades et de leurs familles. Pour cela, un recueil de données sur le quotidien de ces personnes est effectué afin de recenser et de mesurer les difficultés rencontrées. Après les premières enquêtes menées en 2011, trois thématiques ont été étudiées en 2012 :

- l’annonce diagnostique et ses suites ; - les difficultés pratiques liées aux médicaments et autres produits de santé ; - la coordination des acteurs du parcours médicosocial de la personne malade. Une synthèse des résultats et le Rapport 2012 complet sont consultables sur le site www.maladiesraresinfo.org. ß

Éducation thérapeutique

Le DiabètObus est en route

L

a Maison du Diabète et des Maladies Chroniques (MDDMC Santélys association) accueille, sensibilise et dispense de l’éducation thérapeutique toute l’année auprès de patients diabétiques et/ou obèses, et/ou à risque cardiovasculaire à Loos (59). Pour renforcer son action face aux chiffres croissants du nombre de diabétiques et de maladies cardiovasculaires dans sa région, la MDDMC Santélys association va mener, en partenariat avec les Laboratoires MSD, une importante action régionale dans de nombreuses villes du Nord-Pas-de-Calais. Depuis plus de 2 ans, grâce à son antenne itinérante

le DiabètObus, les professionnels de la santé vont au devant des populations fragilisées dans des secteurs où l’accès aux soins est parfois difficile et la prise en charge éducative peu développée. L’objectif étant de proposer une sensibilisation et une éducation à la santé. Dans le DiabètObus, une infirmière et une diététicienne, formées en diabétologie, cardiologie et en éducation thérapeutique du patient, sont présentes pour accueillir, écouter, informer et accompagner les patients diabétiques et à risque cardiovasculaire et leur entourage. En 2012, c’est plus de 2 000 personnes qui ont franchi la porte du DiabètObus. ß

Prévention

À l’heure du bilan

L

e bilan de la 2e Semaine nationale de prévention du diabète, organisée par l’Association Française des Diabétiques, est positif. 100 000 tests de risque ont été réalisés sur le site contrelediabete.fr.

Ainsi, 7 300 personnes ont pris conscience de leur risque élevé de développer un diabète et ont ainsi pu être orientées vers des professionnels de santé. ß Diabète & Obésité • Juin 2013 • vol. 8 • numéro 70


DOSSIER

grossesse (2e partie) Dossier coordonné par le Dr Saïd Bekka (Chartres) et le Pr Patrick Ritz (Toulouse)

5 La macrosomie : une complication périnatale fréquente chez les femmes enceintes obèses avec tolérance au glucose normale ? ����� p. 188 Dr Sébastien Galie, Dr Clémence Tréglia, Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte (Marseille)

6 Précarité et grossesse : cibler les patientes concernées ������������������� p. 194 Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte, Françoise Courtoisier, Dr Clémence Tréglia (Marseille)

7 Programme d’éducation thérapeutique et précarité : s’adapter à la culture des patientes ����������������������������������������������������� p. 197 Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte, Sabrina Lopez, Sarah Beaujour, Antoine Coignard (Marseille)

Déjà parue dans le numéro 69, la première partie du dossier : 1 Diabète gestationnel : un diabète de type 2 méconnu ? Dr Aurélie de Verville, Françoise Courtoisier, Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte (Marseille)

2 Grossesse et néphropathie diabétique : comment limiter les complications ? Dr Françoise Lorenzini (Toulouse)

3 Femme enceinte avec antécédent de chirurgie bariatrique : surveillance biologique nutritionnelle Dr Monelle Bertrand (Toulouse)

4 Obésité et suivi obstétrical de la grossesse : nécessité d’une prise en charge adaptée Pr Ludovic Cravello (Marseille)


Grossesse

DOSSIER

5 La macrosomie Une complication périnatale fréquente chez les femmes enceintes obèses avec tolérance au glucose normale ? n La macrosomie fœtale est une des complications obstétricales bien connues des femmes présentant un diabète gestationnel (DG). Or, ces dernières années, du fait de l’augmentation de la prévalence de l’obésité chez les femmes en âge de procréer, il existe une augmentation de la fréquence de la macrosomie chez des femmes obèses y compris, semble-t-il, chez celles ne présentant pas de diabète gestationnel. Quel en est le mécanisme ? Cette complication serait-elle liée à l’indice de masse corporelle (IMC) prégestationnel et/ou à la prise de poids pendant la grossesse ? Des hyperglycémies gestationnelles isolées, sans diabète, joueraientelles un rôle dans la survenue de cette complication ? Y a-t-il un intérêt à prendre en charge ces patientes sur le plan diététique et de l’activité physique ?

Dr Sébastien Galie*, Dr Clémence Tréglia*, Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte*

Définition de la macrosomie et ses conséquences

La macrosomie est définie soit par un poids de naissance supérieur à 4 kg, soit par un poids de naissance supérieur au 90e percentile en fonction de l’âge gestationnel à la naissance (courbe de LeroyLefort). La macrosomie, indépendamment de sa cause et de son retentissement, expose à une complication majeure de l’accouchement : la dystocie des épaules. Les facteurs prédisposants peuvent être constitutionnels (obésité maternelle, poids de naissance de la mère, facteurs raciaux, sexe du bébé), ou acquis (multiparité, âge maternel supérieur à 35 ans, antécédent de macrosomie, prise de poids maternelle pendant la *Service de Nutrition-Endocrinologie-Maladies métaboliques, Hôpital Sainte Marguerite, Marseille AP-HM

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grossesse, dépassement de terme, hydramnios, diabète). Les complications de l’accouchement d’un enfant macrosome peuvent être soit maternelles (hémorragie de la délivrance, déchirure périnéale, rupture utérine), soit fœtales (dystocie des épaules avec ou sans lésion du plexus brachial, fractures, désordres métaboliques). Le dépistage de la macrosomie fœtale doit être envisagé devant tout facteur de risque de façon à prévenir les complications de l’accouchement (1).

maternelles et fœtales observées, une augmentation du taux d’enfants macrosomes chez les femmes obèses ou en surpoids. Stuebe et al. (2) retrouvent chez 1 250 femmes avec une tolérance au glucose normale, une augmentation du poids de naissance des enfants avec une augmentation de leur masse grasse chez les patientes présentant une obésité prégestationnelle (Fig. 1). En effet, plus l’IMC prégestationnel est élevé, plus le poids de naissance et la quantité de masse grasse de l’enfant sont élevés.

Une fréquence accrue chez les femmes obèses

Les résultats de Di Benedetto et al. (3) révèlent une fréquence élevée de macrosomie chez les nouveau-nés de mères obèses ou en surpoids comparativement aux nouveau-nés de mères de poids normal (respectivement 17,7 % et

De nombreuses études ont étudié les conséquences de l’obésité sur la grossesse et ont mis en évidence, parmi les complications

Diabète & Obésité • Juin 2013 • vol. 8 • numéro 70


Grossesse

DOSSIER

physique pourront-elles réduire la morbidité fœto-maternelle, et notamment la macrosomie chez les femmes obèses ?

Conclusion

Au vu de la littérature, l’obésité maternelle semble être un facteur de risque de macrosomie fœtale, même en l’absence de diabète gestationnel. La prise de poids exces-

sive pendant la grossesse joue un rôle capital dans la croissance fœtale. Les hypothèses physiopathologiques doivent encore être précisées. Des excursions glycémiques maternelles passant inaperçues pourraient expliquer ce surrisque de macrosomie rencontré chez les femmes obèses. Cette hypothèse mérite d’être confirmée par des études complémentaires. D’autres mécanismes, dont des

facteurs génétiques sont à envisager. Les études interventionnelles publiées ne permettent pas de conclure sur la prise en charge optimale durant la grossesse pour réduire la macrosomie fœtale, que ce soit en termes de diététique ou d’activité physique. n

Mots-clés : Macrosomie, Obésité, Grossesse

Bibliographie 1. http://www.med.univ-rennes1.fr/cngof/publications 2. Stuebe AM, Landon MB, Lai Y et al. Maternal BMI, glucose tolerance, and adverse pregnancy outcomes. Am J Obstet Gynecol 2012 ; 207 : 62. 3. Di Benedetto A, D’anna R, Cannata ML et al. Effects of prepregnancy body mass index and weight gain during pregnancy on perinatal outcome in glucose-tolerant women. Diabetes Metab 2012 ; 38 : 63-7. 4. Owens LA, O’Sullivan EP, Kirwan B et al. ATLANTIC DIP: the impact of obesity on pregnancy outcome in glucose-tolerant women. Diabetes Care 2010 ; 33 : 577-9. 5. Marshall NE, Guild C, Cheng YW et al. Maternal superobesity and perinatal outcome. Am J Obstet Gynecol 2012 ; 206 : 417. 6. Kiel DW, Dodson EA, Artal R et al. Gestationnal weight gain and pregnancy outcomes in obese women: how much is enough? Obstet Gynecol 2007 ; 110 : 752-8. 7. Cedergran MI. Optimal gestationnal weight gain for body mass index categories. Obstet Gynecol 2007 ; 110 : 759-64. 8. Bodnar LM, Siega-Riz AM, Simhan HN et al. Severe obesity, gestational weight gain, and adverse birth outcomes. Am J Clin Nutr 2010 ; 91 : 1642-8. 9. Hinkle SN, Sharma AJ, Dietz PM. Gestational weight gain in obese mo-

thers and associations with fetal growth. Am J Clin Nutr 2010 ; 92 : 644-51. 10. Catalano PM, McIntyre HD, Cruickshank JK et al. The hyperglycemia and adverse pregnancy outcome study (HAPO): associations of GDM and obesity with pregnancy outcomes. Diabetes Care 2012 ; 35 : 780-6. 11. Bowers K, Laughon SK, Kiely M et al. Gestational diabetes, pre-pregnancy obesity and pregnancy weight gain in relation to excess fetal growth: variations by race/ethnicity. Diabetologia 2013. 12. Yogev Y, Ben-Haroush A, Chen R et al. Diurnal glycemic profile in obese and normal weight nondiabetic pregnant women. Am J Obstet Gynecol 2004 ; 191 : 949-53. 13. Hernandez TL, Barbour LA. A standard approach to continuous glucose monitor data in pregnancy for the study of fetal growth and infant outcomes. Diabetes Technol Ther 2013 ; 15 : 172-9. 14. Thangaratinam S, Rogozinska E, Jolly K et al. Effects of interventions in pregnancy on maternal weight and obstetric outcomes: meta-analysis of randomized evidence. BMJ 2012 ; 344 : 1-15. 15. Beyerlein A, Schiessl B, Lack N, von Kries R. Associations of gestational weight loss with birth-related outcome: a retrospective cohort study. BJOG 2011 ; 118 : 55-61.

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Grossesse

DOSSIER

6 Précarité et grossesse Cibler les patientes concernées n

En cette période de crise, comment ne pas parler de précarité et plus spécifiquement de

précarité et grossesse ? Plusieurs enquêtes ont montré que les disparités sociales interfèrent directement sur le suivi des grossesses et le risque de prématurité (1). Cependant, les critères d’évaluation de la précarité ont évolué et demandent encore à être validés durant la grossesse, en absence ou en présence de diabète, qu’il soit préexistant ou gestationnel.

Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte*, Françoise Courtoisier**, Dr Clémence Tréglia*

Définition de la précarité

Selon la définition proposée par J. Wresinski en 1987, (2) dans le Journal officiel, « la précarité est l’absence d’une ou plusieurs des sécurités permettant aux personnes et aux familles d’assumer leurs responsabilités élémentaires et de jouir de leurs droits fondamentaux. L’insécurité qui en résulte peut être plus ou moins étendue et avoir des conséquences plus ou moins graves et définitives. Elle conduit le plus souvent à la grande pauvreté quand elle affecte plusieurs domaines de l’existence, qu’elle tend à se prolonger dans le temps et devient persistante, qu’elle compromet gravement les chances de conquérir ses droits et de réassumer ses responsabilités par soi-même dans un avenir prévisible ». Le Haut Comité de Santé publique précisait son caractère « multidimensionnel » (professionnel, relationnel, social, accès aux soins…). Ainsi, la précarité désigne des per-

*Service de Nutrition-Endocrinologie-Maladies métaboliques, Hôpital Sainte Marguerite, Marseille AP-HM **Maternité de la Conception, Marseille, AP-HM

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sonnes présentant des difficultés financières (sans travail, sans couverture sociale, etc.), de logements (hébergés, sans domicile fixe), sociales (situation irrégulière, isolement, barrière de la langue, etc.), souvent cumulées. Si la notion de précarité est évidente pour les plus démunis, sa définition illustre bien la difficulté à la quantifier dans les situations moins extrêmes, où coexistent pourtant comorbidités médicales et sociales.

Des critères hétérogènes pour qualifier la précarité

Différents scores existent, le plus souvent limités au statut socioéconomique. Dans certains pays, les autorités sanitaires locales utilisent l’adresse de résidence pour classer les quartiers selon un score de précarité, le Townsen Material Deprivation Score au RoyaumeUni (3) ou (NZDep2006) en Nouvelle-Zélande (4). En France, lors des premières études publiées, seuls deux indicateurs étaient utilisés : niveau

d’étude et catégorie socioprofessionnelle. Cependant, devant le caractère multifactoriel de la précarité, un troisième a été ajouté en 2003 : les bénéficiaires de minima sociaux. Malgré cela, ces critères sont encore trop restrictifs et des études plus approfondies dans les situations précaires sont nécessaires. En effet, souvent, en pratique courante, l’évaluation de la situation est laissée à la libre appréciation du soignant. En 1998, un nouveau score de vulnérabilité sociale a été développé puis validé en 2002 : le score EPICES (Évaluation de la Précarité et des Inégalités de santé dans les centres d’examen de santé) par les centres d’examens de santé (CES), le centre technique d’appui et de formation des centres d’examens de santé (CETAF) et l’école de santé publique de Nancy. Initialement construit à partir de 42 items, il a été ensuite réduit à 11 par régression logistique (5). Ces questions binaires explorent différents domaines de l’existence : aspects économiques, matériels, sociaux et psychologiques, indépendamment du facteur profesDiabète & Obésité • Juin 2013 • vol. 8 • numéro 70


Grossesse

DOSSIER

7 Programme d’éducation

thérapeutique et précarité S’adapter à la culture des patientes Dr Marie-Françoise Jannot-Lamotte*, Sabrina Lopez**, Sarah Beaujour**, Antoine Coignard***

Introduction Dans notre expérience, les patientes précaires représentent environ 30 % de la population suivie à la maternité de la Conception de Marseille. Le critère utilisé est celui de la couverture sociale. Le caractère “précaire” est retenu chez les femmes sans couverture sociale, ou bénéficiaires d’AMU, AME ou CMU. Selon la même définition, le pourcentage s’élève à 52 % chez les patientes atteintes de diabète gestationnel (DG) (dépistage systématique en un temps). La précarité est fréquemment associée à une origine étrangère et un bas niveau scolaire. Dans notre série non-publiée, 50 % des patientes avec DG sont originaires d’Afrique du Nord et 25 % des Comores ; 58,3 % de niveau scolaire inférieur ou égal au collège. Il a été montré au Canada (1) qu’une popula-

Quels critères d’efficacité d’un programme adapté à la culture des patients ?

Une revue récente (2) complète une première méta-analyse datant de 2008 (3) qui concluait qu’une éducation « adaptée à la culture » était plus efficace dans le diabète qu’une éducation « standard ». Il faut entendre par « adaptée à la culture », centrée sur les croyances culturelles ou religieuses, la langue parlée et le degré d’alpha*Service de Nutrition-Endocrinologie-Maladies métaboliques, Unité d’Éducation thérapeutique, Hôpital Sainte Marguerite, Marseille AP-HM **Diététicienne, Maternité de la Conception, Marseille AP-HM ***Éducateur médico-sportif, Unité d’Éducation thérapeutique, Service de Nutrition-Endocrinologie-Maladies métaboliques, Hôpital Sainte Marguerite, Marseille AP-HM

Diabète & Obésité • Juin 2013 • vol. 8 • numéro 70

tion immigrée originaire d’Asie du Sud, d’Amérique latine ou d’Afrique présentait un risque 2 à 4 fois plus élevé de développer un diabète de type 2 que la population native du pays. Cette constatation souligne l’importance des programmes de prévention, a fortiori dans une population avec antécédent de DG. Cependant, barrière de la langue, traditions, coutumes, difficultés financières, problèmes de logement ou d’isolement compliquent l’éducation thérapeutique. Afin d’illustrer cette problématique, nous tenterons de comprendre les critères d’efficacité d’un programme d’éducation adapté à la culture d’une population, puis présenterons un outil d’éducation diététique créé pour les patientes comoriennes atteintes de DG et un cycle d’activité physique adaptée, intégré dans un programme de prévention du DT2 post DG.

bétisation. Onze études randomisées et contrôlées (1 603 patients) sont analysées pour en dégager les points forts en faveur de la réussite d’un programme, ou au contraire les points faibles semblant réduire son efficacité (Tab. 1 et 2).

ments traditionnels et abordables financièrement. Nous allons développer ce dernier point à partir de pratiques quotidiennes.

Les meilleurs résultats en termes d’adhésion des patients et d’efficacité métabolique sont constatés chez des minorités avec barrière de la langue et accès spontanément limités aux programmes d’éducation thérapeutique. Ceci sous réserve d’un intervenant de même origine ethnique (patient ressource ?) et de messages “culturellement acceptables”. L’éducation diététique doit privilégier les ali-

Spécificités chez les patientes précaires

Éducation diététique

La pierre angulaire du traitement du DG est la diététique. Les dernières recommandations (4) confirment la nécessité d’apporter au moins 1 500 kcal/j au 1er trimestre, 1 800 kcal/j aux 2e et 3e trimestres pour répondre aux besoins énergétiques de la grossesse. Fractionner les repas et les enrichir en fibres permet de 197


Interspécialités

Le syndrome métabolique Passé et présent Pr Bernard Vialettes*

Introduction Le syndrome métabolique est caractérisé par une constellation d’anomalies métaboliques, vasculaires, hépatiques, inflammatoires… qui s’associent volontiers chez certains individus et leur confèrent un risque significativement accru de diabète de type 2 et de pathologies cardiovasculaires. Ce syndrome a plus de 60 ans d’âge. Il continue de mobiliser les scientifiques puisqu’en avril 2013 on ne dénombrait pas moins de 10 753 publications référencées dans Pubmed sur les seuls motsclés “Metabolic Syndrom”. Depuis 2005 ces publications se sont stabilisées à un rythme annuel compris entre 765 et 1 089 publications/an.

L

e syndrome métabolique usurpe peut-être le nom de syndrome puisque beaucoup s’accordent à penser qu’il ne s’agit pas d’un tableau clinico-biologique que le praticien doive impérativement rechercher et traiter en tant que tel. Il s’agit plutôt d’un concept à valeur éducationnelle et scientifique. Il a le mérite de rappeler aux cliniciens que la lutte contre les facteurs de risque doit être multifactorielle afin de tendre vers la meilleure prévention possible. Il représente aussi un concept opératoire qui a dyna-

*Service de Nutrition-Maladies métaboliques-Endocrinologie, CHU La Timone, Marseille

202

misé la recherche scientifique dans ses efforts pour mieux comprendre la diabétogenèse et l’athérogenèse. On peut lui attribuer des ouvertures vers le rôle potentiel de dépôts dits ectopiques de la graisse (viscérale, épicardique, diverses formes de stéatose intra-organe…), de la micro-inflammation associée à ce syndrome, de l’influence de fluctuations de l’état nutritionnel dans les périodes initiales de la vie sur le développement des états d’insulinorésistance. Il est enfin un paramètre intéressant dans les études épidémiologiques et on comprend que beaucoup d’efforts aient été mobilisés pour obtenir une définition clinico-biologique consensuelle du syndrome métabolique. Toutefois, même si cet objectif est pratiquement réalisé, certaines ambigüités persistent, notamment pour les paramètres morphométriques si dépendants des ethnies considérées.

Historique

En 1947, Jean Vague (1) constate qu’il semble exister deux formes d’obésité. L’une se distingue par un excès de graisse au niveau du tronc et en particulier du ventre, qu’il nomme “androïde”, et l’autre par un développement exagéré du tissu adipeux au niveau des cuisses et des fesses, qu’il nomme “gynoïde”. Son hypothèse d’alors était qu’il y avait une véritable différentiation sexuelle de la répartition du tissu adipeux, dépendante des stéroïdes surrénaux et gonadiques. En 1956, il complète son observation en

montrant que l’obésité androïde prédispose au diabète, à l’hyperuricémie et aux pathologies cardiovasculaires (2), tandis que les risques associés à l’obésité gynoïde sont plutôt mécaniques et veineux. Ce concept naissant ne put atteindre une reconnaissance scientifique que grâce à la simplification des paramètres morphologiques qui permettaient de le caractériser. Le critère inventé par Jean Vague pour classer les patients obèses, le “rapport adipo-musculaire brachio-fémoral”, était basé sur de nombreuses mesures (plis cutanés et périmètres) pratiquées à la racine des membres. La consécration du concept fut rendue possible seulement en 1982 grâce à la contribution de Kissebah (3). Celui-ci montrait avec deux mesures particulièrement simples à réaliser (les périmètres corporels mesurés au niveau de la taille (T) et au niveau des hanches (H) au moyen d’un mètre de couturière) que l’obésité “abdominale” se distinguait de son homologue “glutéale” par un rapport T/H plus élevé et devait être considérée comme un facteur de risque d’intolérance au glucose, d’hyperinsulinisme et d’hypertriglycéridémie. En 1987, Ferranini (4) démontrait les relations entre hyperinsulinisme et hypertension artérielle essentielle. Finalement, à la fin des années 1980, Reaven (5) émettait l’idée qu’il existait un véritable cluster d’anomalies métaboliques (hyperglycémie et/ou intolérance au glucose, hypertriglycéridémie, hypoHDLhémie) et vasculaires (HTA et risque vascuDiabète & Obésité • Juin 2013 • vol. 8 • numéro 70


À savoir

La boucle fermée en 2013 Où en sommes-nous ? n Pour améliorer la qualité de vie des patients diabétiques, la boucle fermée (ou pancréas artificiel) est en cours de développement. Le Pr Eric Renard (CHU de Montpellier) nous aide à y voir plus clair sur cette nouvelle révolution.

Diabète & Obésité : Quels sont les objectifs, définitions et composantes de la boucle fermée ? Pr Eric Renard : L’objectif général est de maintenir la

glycémie la plus proche de la norme, le plus longtemps possible, au quotidien. Pour l’instant, les objectifs des traitements du diabète sont fondés essentiellement sur l’hémoglobine glyquée, ce qui est une approche un peu simpliste puisque l’un des problèmes des diabétiques de type 1, c’est la variabilité glycémique. C’est-à-dire qu’un patient peut avoir une bonne hémoglobine glyquée mais être souvent en hyper et en hypoglycémie. Le but de la boucle fermée est donc, non seulement d’avoir une bonne hémoglobine glyquée, mais surtout de passer le plus de temps possible dans une fourchette proche de la norme, c’est-à-dire entre au moins 0,70 et 1,80 g/L et si possible entre 0,80 et 1,40 g/L. Les moyens utilisés sont le couplage d’un système d’administration de l’insuline en continu (une pompe) avec un système de mesure du glucose en continu (capteurs sous-cutanés) et l’automatisation de l’ensemble. Le but est que la mesure du glucose en continu puisse régler le débit de la pompe non seulement en fonction de la glycémie du moment mais aussi en prévoyant l’évolution de la glycémie au vu de l’insuline administrée et de diverses informations qui vont être fournies par le patient (prise d’un repas, exercice physique, etc.). C’est ce que l’on appelle l’algorithme, une formule mathématique qui calcule la quantité d’insuline nécessaire en fonction de la glycémie actuelle et des prévisions concernant l’évolution de cette dernière.

D&O : Quelle est la différence par rapport à la boucle ouverte ? Pr E.R. : Le patient ne modifie pas directement la perfusion d’insuline. Dans la boucle ouverte c’est le patient qui a l’information et qui, au vu de l’information,

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prend la décision concernant le réglage de sa pompe. C’est-à-dire que la pompe n’est pas réglée automatiquement, c’est le patient qui doit prendre la décision finale, ce n’est pas un rétrocontrôle direct. Dans les boucles fermées, les patients sont quand même présents puisqu’ils doivent être capables de vérifier que le système fonctionne correctement. Il peut éventuellement y avoir des alertes indiquant que, malgré l’automatisation, il y a un risque important de sortie de la zone normale et, à ce moment-là, les patients peuvent être amenés à intervenir. Ils n’interviennent donc qu’à la marge, c’est-à-dire quand le système automatisé ne fonctionne pas comme il faut ou alors pour aider à la prédiction parce que, par exemple, il est très difficile de prédire l’évolution glycémique dans les suites d’un repas. Le patient va alors intervenir pour enrichir l’information du système en indiquant qu’il va manger tant de glucides et, dans ce cas là, va permettre à l’algorithme d’améliorer sa prédiction. Donc “boucle fermée” ne veut pas dire que le patient n’intervient pas. Simplement, il n’intervient que dans certaines circonstances, soit quand il y a une alerte car la glycémie va sortir de la norme, soit parce qu’il y a un événement que le système ne peut pas prédire lui-même, comme la prise d’un repas ou une activité physique.

D&O : Quels sont les niveaux de preuve de l’efficacité par rapport à la boucle ouverte ? Pr E.R. : Pour l’instant, le niveau de preuve est tou-

jours limité à quelques jours puisqu’il n’y a pas eu de preuves de longue durée avec la boucle fermée. Les preuves ont d’abord été apportées dans un environnement particulier, hospitalier puisque la plupart des essais boucle fermée vs boucle ouverte ont été réalisés à l’hôpital, pour des durées toujours assez courtes (moins de 48 h). Les essais en question ont montré qu’il Diabète & Obésité • Juin 2013 • vol. 8 • numéro 70


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