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Impact de la chirurgie bariatrique sur les chiffres tensionnels À partir d’un cas et analyse de la littérature Dr Célia Lloret-Linares*, Dr Béatrice Bouhanick**

Introduction L’obésité se définit par un IMC supérieur à 30 kg/m2 et s’accompagne de complications pour la santé telles que les stratégies visant à la réduction pondérale se sont multipliées ces dernières années, notamment en vue d’une perte de poids importante et durable. Au fil de la prise en charge d’une patiente souffrant d’Hypertension artérielle (HTA), nous allons discuter les bénéfices d’une prise en charge chirurgicale de l’obésité dans l’approche thérapeutique de son HTA.

Madame A.-R., 41 ans, est adressée pour une prise en charge de son obésité. Elle rapporte la notion d’une HTA et d’un Diabète de type 2 (DT2) chez sa mère, décédée par ailleurs à 62 ans d’un infarctus du myocarde. Ses antécédents personnels se limitent à un syndrome dépressif et à un asthme à dyspnée paroxystique. Vous proposez de faire le bilan de ses facteurs de risque cardiovasculaire. Son poids est actuellement de 97 kg pour 1,46 m (IMC à 44,6 kg/m²). Elle se plaint d’une dyspnée d’effort. À l’examen, l’obésité est principalement androïde. L’auscultation cardiovasculaire est normale. Les PA avec un brassard large sont à 170/100 mmHg et la MAPA confirme l’HTA avec une PA moyenne des 24h à 138/87 mmHg (le jour : 141/92 mmHg ; la nuit : 133/82 mmHg).

*APHP-Hôpital Lariboisière, Service de Médecine interne A, Unité de Recherche thérapeutique, Paris **CHU Rangueil, Service d’Hypertension artérielle, Toulouse duly-bouhanick.b@chu-toulouse.fr

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© tsalko – iStock.

Présentation du cas

Vous diagnostiquez un DT2 sur la base d’une glycémie à jeun à 1,30 g/L en ville confirmée à 1,35 g/L. L’HbA1c est à 6,5 %. Le bilan lipidique est correct. La recherche d’une HTA d’origine secondaire est négative (bandelette urinaire normale, écho-Doppler des artères rénales et angio-scanner normaux en défaveur d’une HTA rénovasculaire par athérome ou liée à une dysplasie ; absence d’hyperaldostéronisme, d’hypercortisolisme ou d’arguments hormonaux en

faveur d’un phéochromocytome). Une polygraphie ventilatoire nocturne objective un Syndrome d’apnées du sommeil (SAS) relevant d’un appareillage (index d’apnées hypopnées à 33/H et 20 microéveils par nuit). Le fond d’œil montre une rétinopathie hypertensive stade 2 sans rétinopathie diabétique, la fonction rénale est préservée sans microalbuminurie. Les explorations cardiologiques (ECG, échocardiographie) sont normales. Diabète & Obésité • Mars 2014 • vol. 9 • numéro 77


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Prévalence de l’HTA en France Actuellement dans le monde, la majorité des patients atteints d’HTA sont en surpoids. L’HTA est environ 6 fois plus fréquente chez les sujets obèses que chez les hommes et femmes de poids normal (1). Un poids corporel de 10 kg plus élevé est associé à une élévation des Pressions artérielles (PA) systolique et diastolique de 3,0 mmHg et 2,3 mmHg, respectivement. Ces augmentations se traduisent par une augmentation de 12 % du risque de maladie coronarienne et de 24 % du risque d’accident vasculaire cérébral (1). Ainsi, chez les hommes, la prévalence de l’HTA augmente progressivement avec celle de l’IMC ; elle est de 15 % chez les sujets avec un IMC inférieur à 25 kg/m2 et de 42 % audelà de 30 kg/m2 (2). Cette tendance est comparable chez les femmes puisque la prévalence de l’hypertension est de 15 % à un IMC inférieur à 25 kg/m2 et à 38 % à un IMC supérieur à 30 kg/ m2 (2). Cette association est observée quelle que soit l’origine ethnique mais les prévalences sont plus élevées pour les sujets d’origine africaine quel que soit l’IMC. L’augmentation de prévalence de l’HTA est d’autant plus élevée que l’obésité est à distribution abdominale. Différents facteurs expliquent l’augmentation de la PA chez les sujets obèses. Le débit cardiaque est augmenté du fait des modifications de la composition corporelle et de demandes d’oxygène accrues par les organes et le tissu adipeux. L’élévation des résistances vasculaires périphériques est favorisée par différentes altérations biologiques affectant la fonction endothéliale, la résistance à l’insuline et le système Diabète & Obésité • Mars 2014 • vol. 9 • numéro 77

nerveux sympathique, de même que par les effets directs de différents facteurs produits par les adipocytes (IL- 6, TNF-a). Malgré cette association connue des cliniciens depuis de nombreuses années, il convient de ne pas oublier d’exclure les causes d’HTA secondaires lors de notre prise en charge des sujets souffrant d’obésité, particulièrement le SAS fréquemment diagnostiqué chez les sujets obèses comme en témoigne la prévalence de 30 % environ chez les sujets candidats à une chirurgie de l’obésité. Le SAS est associé à une augmentation de l’activité sympathique diurne et nocturne et participe à l’augmentation de la prévalence de l’HTA chez les sujets obèses. Il a été montré dans des études d’intervention l’effet bénéfique de la correction du SAS dans la baisse de la PA, l’amélioration de la qualité de vie et une amélioration du pronostic cardiovasculaire (3).

Dans le cas de notre patiente L’enquête alimentaire révèle une alimentation salée (> 10 g de sel/ jour), hypercalorique à 3 300 kilocalories par jour réparties sur 3 repas et majoritairement lipidique. L’activité physique est réduite du fait de l’essoufflement à l’effort et d’un complexe physique important. Vous convenez avec elle d’une prise en charge du SAS, d’une amélioration de l’hygiène de vie portant sur la réduction calorique et la pratique régulière de la marche, avec parallèlement une prise en charge médicamenteuse de son HTA. Le traitement antihypertenseur est initialement composé de verapamil, valsartan, hydrochlorothiazide. Vous espérez que les Mesures hygiéno-diététiques (MHD) permettront de

surseoir au traitement antidiabétique et de réduire à terme le traitement antihypertenseur.

Effet des apports sodés et de la perte de poids sur la pression artérielle (PA) chez l’hypertendu L’application des MHD, incluant la réduction des apports sodés, reste l’arme prioritaire et principale dont dispose le patient hypertendu en surpoids.

Le sel Une réduction modeste de la consommation de sel induit des chutes importantes de la PA chez les individus hypertendus et normotendus, quels que soient le sexe et le groupe ethnique (4). Une moindre consommation de sodium est associée à un risque réduit d’accident vasculaire cérébral et de maladie coronarienne chez les adultes (5). Elle est associée à une légère augmentation de l’activité physiologique de la rénine plasmatique, de l’aldostérone et de la noradrénaline. La corrélation significative entre la réduction de l’excrétion urinaire du sodium des 24h et la baisse de la Pression artérielle systolique (PAS) suggère une relation dose-réponse, des réductions plus importantes des apports sodés se traduisant par de plus importantes baisses de la PAS. Les recommandations actuelles conseillant de réduire la consommation de sel à 5-6 g/jour auront certainement un effet majeur sur la PA, mais une réduction supplémentaire de la consommation de sel de 3 g/jour devrait devenir la cible à long terme pour la population (4). 85


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Le poids Dans une méta-analyse récente incluant des études de 6 à 36 mois, la PA était diminuée chez les patients observant un régime alimentaire par rapport aux témoins : la PAS était réduite de 4,5 mmHg (IC à 95 %, -7,2 à -1,8 mmHg), et la Pression artérielle diastolique (PAD) de 3,2 mmHg (IC à 95 %, -4,8 à -1,5 mmHg) sachant que les patients des groupes avec intervention perdaient en moyenne 4,0 kg (IC 95 % : -4,8 à -3,2), tandis que cette intervention permettait de réduire le recours aux antihypertenseurs (6-7). Néanmoins, la multiplicité des systèmes de régulation impliqués dans l’élévation de la PA du patient en surpoids explique qu’elle soit fréquemment résistante (8). Aussi, le traitement de l’hypertension des sujets obèses nécessite généralement une combinaison d’antihypertenseurs.

Dans le cas de notre patiente Elle bénéficie au cours des années suivantes d’un suivi régulier. Son poids est stable à 97 kg pour 1,46 m (IMC à 44,6 kg/m²). Malgré l’escalade thérapeutique, l’équilibre tensionnel et glycémique se détériore. Toutes les thérapeutiques antihypertensives sont prescrites à doses maximales et malgré l’ajout d’une antialdostérone prudemment associée à un inhibiteur de l’enzyme de conversion, un diurétique thiazidique et inhibiteur calcique dihydropyridine, les PA restent à 190/100 mmHg. Une bithérapie antidiabétique orale inefficace et l’HBA1c élevée (HbA1c = 9 % sous sulfamides et biguanides) font discuter une mise à l’insuline. Elle reconnaît une difficulté à maintenir ses efforts alimentaires et la pratique d’une activité physique. 86

Le traitement chirurgical de l’obésité pourrait-il aider au contrôle de l’hypertension artérielle ?

Quels sont les différents actes chirurgicaux possibles ? Trois techniques restrictives ont été couramment pratiquées. La gastroplastie verticale calibrée réalise une partition de l’estomac avec une petite poche gastrique se vidant dans le reste de l’estomac par l’intermédiaire d’une zone calibrée. Elle est rarement réalisée aujourd’hui. La gastroplastie ajustable consiste à encercler la partie supérieure de l’estomac par un anneau délimitant ainsi une petite poche de 20 ml qui se déverse dans le reste de l’estomac à travers un chenal étroit réglable. La sleeve gastrectomy est une pratique très en vogue ces dernières années et consiste en l’exérèse des deux tiers de la partie gauche de l’estomac, transformant la partie résiduelle en un tube d’une capacité d’environ 200 cc. Les techniques de malabsorption pures ont été abandonnées et elles s’associent de nos jours à une restriction gastrique. Le by-pass gastrique avec anse en Y (Roux-en-Y gastric bypass, RYGB) comporte une partition de l’estomac en une petite poche supérieure de 30 à 60 ml et le reste de l’estomac est exclu du circuit alimentaire. La petite poche gastrique est ensuite raccordée au tube digestif par l’intermédiaire d’une anse digestive prélevée au niveau du jéjunum, réalisant une anse en Y de longueur variable. L’absorption des aliments n’est possible qu’au-delà de l’anastomose du pied de l’anse lorsque les sécrétions gastrique, biliaire et pancréatique arrivent au

contact du bol alimentaire. Cette technique chirurgicale représente 85 % des chirurgies de l’obésité aux États-Unis actuellement. La diversion biliopancréatique associe une gastrectomie et un by-pass intestinal distal ; elle s’adresse aux superobèses, et est peu pratiquée en France. Ainsi, en France, trois interventions sont couramment pratiquées : la gastroplastie par anneau ajustable, la sleeve gastrectomy et le RYGB. Le choix de la technique repose sur l’analyse des avantages, risques, inconvénients et résultats des différentes interventions, qui doivent être abordés avec le patient au cours de différentes consultations. Ce choix doit être validé au cours d’une réunion pluridisciplinaire.

Bénéfices de la chirurgie de l’obésité sur le poids et la mortalité cardiovasculaire Les traitements classiques de l’obésité (activité physique, régime alimentaire) s’adressent davantage aux obésités modérées qu’aux formes sévères où seule la chirurgie a montré une réelle efficacité sur le long terme. L’étude SOS a comparé la perte de poids observée sur dix ans chez des patients traités de façon conventionnelle et des patients opérés, tous types de chirurgie confondus (9). Au terme de dix ans, le poids a augmenté de +1,6 % dans le groupe contrôle et il a chuté dans tous les groupes chirurgicaux : -25 % dans le groupe de sujets opérés d’un bypass gastrique (RYGB) et -13,2 % dans le groupe opéré d’un anneau gastrique. Les succès de la chirurgie sont tels que leur nombre a considérablement augmenté au fil Diabète & Obésité • Mars 2014 • vol. 9 • numéro 77


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des dernières années. La chirurgie de l’obésité, qui concerne plus de 30 000 patients en 2011, est actuellement en plein essor : le nombre d’interventions a ainsi doublé entre 2006 et 2011 (données de la Caisse nationale d’Assurance maladie, février 2013). Le suivi de dix ans en moyenne des patients après chirurgie montre un excès de mortalité chez les sujets du groupe contrôle (129 décès/2 037 sujets) en comparaison aux patients opérés (101 décès/2 010), avec respectivement 25 et 13 décès d’origine cardiovasculaire (10). L’amélioration de différents facteurs de risque cardiovasculaire associés à l’obésité explique la réduction des événements.

Impact de la chirurgie bariatrique sur le diabète Différents travaux ont confirmé l’intérêt de la chirurgie dans l’amélioration des complications métaboliques associées à l’obésité et dans la réduction des événements cardiovasculaires (10). L’amélioration, la rémission, voire l’absence de survenue du diabète, a été décrite suivant la réalisation de différentes techniques chirurgicales voire endoscopiques très récemment, techniques dont nous entendrons davantage parler dans les années à venir, notamment pour la prise en charge du diabète chez les sujets en surpoids (11-17). Une publication récente montrait qu’en comparaison à une prise en charge rigoureuse et intensifiée, la chirurgie de type RYGB augmente la proportion de patients obtenant une HbA1c inférieure à 7 % à un an (49 versus 19 %) associée à une réduction majeure du nombre de prescriptions thérapeutiques (18). Diabète & Obésité • Mars 2014 • vol. 9 • numéro 77

Impact de la chirurgie bariatrique sur les PA La diminution des chiffres de PA et de la prévalence des sujets hypertendus grâce à la chirurgie a également été documentée, mais de façon moins exhaustive que pour le diabète. Notons que les bénéfices de la chirurgie sur le risque cardiovasculaire et sur le contrôle du diabète sont tels que des travaux cliniques récents portent sur une population élargie aux sujets dont l’IMC est inférieur à 35 kg/m2 (18-19). L’évolution de la prévalence de l’HTA et des prescriptions après perte de poids est davantage décrite que les chiffres de PA. Les techniques chirurgicales n’ont jamais fait l’objet d’une comparaison directe en dehors de travaux rétrospectifs. Dans le tableau 1, certaines études illustrent les bénéfices de la perte de poids sur des chiffres de PA. Les travaux concernant l’anneau ajustable sont plus anciens que ceux concernant le RYGB et la sleeve gastrectomy, qui tendent à être préférés ces dernières années. La prévalence de sujets avec une PA supérieure ou égale à 160/90 mmHg ou en cours de traitement antihypertenseur était améliorée avec un anneau ajustable (20). Une résolution de l’HTA était observée chez 66 % des patients et les patients ne recevant pas de traitement antihypertenseur avaient une amélioration de leurs chiffres de PA supérieure aux patients sous traitement avant chirurgie. Les patients dont l’HTA était résolue avaient une perte d’excès de poids plus importante que ceux dont l’HTA ne l’était pas (89,3 versus 66,0 % respectivement), suggérant que l’obtention d’un poids proche du poids idéal garantisse une résolution de l’HTA (20). Des données

légèrement contradictoires montraient un bénéfice très supérieur de la chirurgie sur la PA chez les patients hypertendus avant chirurgie par rapport aux sujets ne l’étant pas (21). Les données à quatre ans montraient que malgré une efficacité modérée de l’anneau ajustable sur l’excès de poids chez des patients hypertendus, les chiffres de PA sont inférieurs à ceux des patients n’ayant pas été opérés (22). Le suivi des patients non hypertendus de cette étude montrait la survenue d’une HTA dans 25,6 % des cas à quatre années, tandis que seuls 1,4 % de sujets non hypertendus et opérés développaient une HTA. À l’inverse, dans le groupe de patients hypertendus, 20,5 % des patients opérés avaient une résolution de leur HTA contre 2,3 % dans le groupe de patients non opérés (22). Ces résultats rappellent l’évolution naturelle des chiffres de PA chez le patient obèse et leur évolution en l’absence d’intervention d’une part et le bénéfice d’une perte de poids sur la prévention de la survenue ou de l’aggravation de l’HTA d’autre part. L’étude récente d’Ikramudin dont l’objectif principal était de comparer l’intervention intensive (MHD et traitement) versus la chirurgie de type RYGB sur le contrôle du diabète, a inclus 120 patients avec un IMC de 30 à 39 kg/m2 (18). L’HTA était une comorbidité fréquente avec une prévalence de 70 %. Une diminution significative de la PAS de 9 mmHg et de la PAD de 6 mmHg, par rapport au groupe contrôle, était rapportée tandis que le nombre de prescriptions à visée cardiovasculaire était moindre que celles des patients contrôles avec trois médicaments de moins après un an de suivi. Dans une population avec des IMC très élevés avant 87


à savoir

Tableau 1 - Évolution des chiffres de PA en fonction de différents types de chirurgies bariatriques. Évolution de l’indice de masse corporelle

Évolution de la pression artérielle

Avant

Avant

Après

RYGB (18)

Après

Avant

Après

Pression artérielle systolique

Pression artérielle diastolique

25,8 ± 3,5

127 ± 15

115 ± 14

78 ± 12

68 ± 9

31,6 ± 3,7

132 ± 14

124 ± 12

79 ± 10

74 ± 9

Sujets opérés

Suivi = 12 mois, n = 120

34,9 ± 3,0 Sujets contrôles 34,3 ± 3,1 Anneau gastrique ajustable (21)

Pression artérielle diastolique

125 ± 1

125 ± 1

78 ± 1

79 ± 1

144 ± 2

134 ± 2

90 ± 1

84 ± 2

Sujets opérés

Suivi = 12 mois, n = 95 Prévention primaire Prévention secondaire

F : 44,0 ± 1,0

35,8 ± 0,9

H : 46,0 ± 2,1

37,1 ± 1,3

F : 44,7 ± 1,1

38,4 ± 1,0

H : 49,8 ± 2,4

38,9 ± 1,6

Anneau gastrique ajustable (22) Suivi = 4 ans, n = 56/29

Pression artérielle systolique

Prévention primaire

Pression artérielle systolique

Pression artérielle diastolique

36,5 ± 0,7

132 ± 2

128 ± 2

84 ± 1

82 ± 1

46,5 ± 2,3

137 ± 3

149 ± 4

85 ± 1

92 ± 2

42,1 ± 1,7

143 ± 4

128 ± 3

88 ± 3

80 ± 3

46,4 ± 1,2

149 ± 4

151 ± 3

87 ± 2

90 ± 1

Sujets opérés 45,2 ± 1,1 Sujets contrôles 45,2 ± 1,6

Prévention secondaire

Sujets opérés 48,3 ± 1,5 Sujets contrôles 45,2 ± 1,1

Sleeve gastrectomy (34) Suivi = 6 et 12 mois

43,6 ± 11,9

6 mois : 32,1 ± 7,4 12 mois : 28,9 ± 5,8

Pression artérielle systolique

Pression artérielle diastolique

137 ± 26

88 ± 17

6 mois : 65 ± 8 12 mois : 64 ± 8

Prévalence de l’HTA : 35,3 %

à 6 mois : 8,6 % à 12 mois : 2,9 %

6 mois : 112 ± 11 12 mois : 109 ± 12

Résolution de l’HTA 29 % des patients dans le groupe chirurgie versus 0 % dans le groupe intervention médicale intensive Sleeve gastrectomy (35) Suivi = une année, n = 14/17

Prévalence de sujets hypertendus (%)

Nombre d’antihypertenseurs

29,1 ± 4,0

82

82

2 (0-5)

1 (0-3)

32,5 ± 5,8

86

57

2 (0-4)

2 (0-4)

Sujets opérés 40,5 ± 4,6 Sujets contrôles 35,8 ± 5,0

HTA : hypertension artérielle ; RYGB : Roux-en-Y-gastric Bypass ; H : hommes ; F : femmes.

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chirurgie (47 kg/m2, n = 95 sujets) dont l’HTA évoluait depuis environ 6 ans, la PAS diminuait de façon significative de 140 ± 17 mmHg à 120 ± 18 mmHg à 12 mois, et la PAD de 80 ± 11 mmHg à 71 ± 8 mmHg (p < 0,01). À 12 mois, 44 patients (46 %) présentaient une résolution complète de leur HTA et 18 patients (19 %) l’amélioraient (23). Cette étude soulignait que les patients dont l’HTA se corrige avaient une durée d’évolution de l’HTA plus courte que celle des autres patients (53 vs 95 mois, respectivement, p = 0,01). Une étude médico-économique américaine suggérait par ailleurs que la réalisation d’une chirurgie de type RYGB était susceptible de réduire les coûts de santé liés au diabète et à l’HTA dès la première année de suivi (24). Une analyse rétrospective de 31 patients dont l’IMC variait de 38 à 57 kg/m2, montrait que 55 % des patients opérés d’une sleeve gastrectomy pouvaient suspendre leur traitement antihypertenseur, et ce chiffre s’élevait à 89 % pour les sujets opérés d’un RYGB (15). Notons que cet effet bénéfique fut rapporté chez des patients plus âgés (analyse de 76 patients âgés de plus de 60 ans) (25). Bien que le pourcentage de perte de poids corporel en excès soit moindre, le DT2 et l’HTA dont la fréquence est plus importante dans ce groupe d’âge, tendaient à s’améliorer de façon plus satisfaisante encore que chez des sujets plus jeunes. Même si l’étude rétrospective de Cutolo allait dans le sens d’un bénéfice supérieur du RYGB par rapport à la sleeve gastrectomy, une revue récente de la littérature montrait un bénéfice important de cette technique chirurgicale sur la PA : chez des patients dont l’IMC évoluait de 49,1 ± 7,5 kg/m2 à 36 ± 7,0 kg/m2 après un suivi moyen de 17 mois (12 à 48) (26), une Diabète & Obésité • Mars 2014 • vol. 9 • numéro 77

résolution de l’HTA dans 58 % des cas et son amélioration dans 75 % des cas étaient observées, soit des chiffres encore supérieurs à ceux rapportés après chirurgie de type RYGB dans une population d’IMC comparable. Ainsi, l’ensemble des travaux est en faveur d’un meilleur contrôle de la PA chez les patients ayant perdu du poids après chirurgie de l’obésité, quelle que soit la méthode utilisée. Le bénéfice semble d’autant plus important que la perte de poids l’est et que le poids se rapproche du poids idéal du patient. La perte de poids aide à la prévention et la maîtrise de l’HTA chez les sujets obèses par rapport aux sujets non opérés.

Autres facteurs impliqués dans la réduction du risque cardiovasculaire Des mécanismes associés à l’amélioration du diabète, de l’HTA, de la dyslipidémie pourraient être impliqués dans la diminution du risque cardiovasculaire, tels que la réduction de l’épaisseur intima-média, une réduction de l’inflammation de bas grade, de la production de différentes cytokines et une amélioration de la dysfonction endothéliale (27). La perte de poids après gastroplastie est accompagnée d’une augmentation de la concentration sérique de l’oxyde nitrique, ayant potentiellement des effets cardioprotecteurs (1, 27). Enfin, des marqueurs de thrombose, de coagulation et de fibrinolyse ont un profil plus favorable en postopératoire (1, 27). On peut ainsi imaginer, malgré l’absence de niveau de preuve suffisant, qu’une amélioration des comorbidités et des douleurs articulaires influence positivement la qualité de vie et l’état fonctionnel

et qu’elle contribue indirectement à l’amélioration du risque cardiovasculaire par leurs effets bénéfiques sur l’activité des patients opérés.

Dans le cas de notre patiente

À 98 kg, elle bénéficie d’une sleeve gastrectomy. L’impact sur l’évolution pondérale est spectaculaire avec une perte de poids de 20 kg en six mois et une stabilisation du poids à 75 kg pendant les quatre années suivantes. L’équilibre glycémique est satisfaisant sous metformine seule (HbA1c = 6,7 %). Le contrôle tensionnel, en revanche, s’est amélioré de façon moins spectaculaire. Le traitement prescrit est alors valsartan-hydrochlorothiazide 160/25 : 1 cp le matin, vérapamil 240 LP : 1 cp matin et soir, amiloride : 1 cp le matin, uradipil 60 mg matin et soir. Les PA restent à 150/86, 156/105 au mieux 145/92 mmHg après plusieurs minutes de repos, la MAPA qui n’a été tolérée que durant la période diurne confirme la persistance d’un déséquilibre tensionnel avec 148/91 mmHg le jour. Elle vous apprend qu’elle a décidé de suspendre l’appareillage du SAS, convaincue de sa disparition avec la perte de poids.

Évolution des chiffres de PA à distance de la chirurgie Le maintien du bénéfice de la chirurgie à très long terme est peu décrit. Le suivi des chiffres de PA à quatre années de la pose d’un anneau ajustable était en faveur d’un maintien du contrôle, mais l’étude SOS montrait un rebond de l’HTA après six à huit ans de suivi (9-10, 22). Dans la cohorte de patients de l’étude SOS, la chirurgie de type RYGB était peu représentée, au 89


à savoir

regard des autres méthodes (9). Or, la perte d’excès de poids était supérieure chez les patients ayant bénéficié de cette chirurgie et maintenue jusque quinze années après, faisant espérer un meilleur contrôle de la PA chez des patients ayant bénéficié d’un RYGB par rapport aux autres méthodes réalisées dans cette étude (gastroplastie verticale calibrée et anneau ajustable). Les bénéfices de la sleeve gastrectomy au-delà de douze mois ne sont pas connus. Notons que malgré le rebond de l’HTA à six à huit années de suivi, les patients opérés bénéficiaient d’une réduction de la survenue d’accidents cardiovasculaires (10).

Absorption des médicaments après chirurgie de l’obésité On peut s’interroger sur l’absorption des médicaments antihypertenseurs après chirurgie de l’obésité. Aucune donnée concernant l’évolution de la pharmacocinétique ou de la biodisponibilité de ces médicaments n’a été publiée à ce jour. Les études sur les prescriptions postchirurgicales ont davantage concerné l’effet des médicaments, c’est-à-dire la mesure de la PA, dont l’amélioration est rassurante et incite à la réduction des médicaments.

La modification de l’anatomie gastrointestinale La modification de l’anatomie gastro-intestinale résultant du RYGB peut induire des changements importants de l’absorption des médicaments administrés par voie orale. Certaines enzymes du métabolisme et des transporteurs de médicaments sont présentes dans l’intestin grêle proximal contourné après 90

RYGB, de telle sorte que les médicaments qui subissent un important effet de premier passage dans l’intestin peuvent avoir une biodisponibilité orale augmentée après RYGB. À l’inverse, les médicaments nécessitant un temps de contact privilégié avec la muqueuse intestinale proximale (duodénum et début du jéjunum proximal) désormais “shuntée” après RYGB, peuvent avoir une absorption réduite. L’exposition orale de médicaments est parfois augmentée (atorvastatine, moxifloxacine, metformine) ou réduite (inhibiteurs de la recapture de la sérotonine) après RYGB (28-32). La résultante de la chirurgie sur l’absorption de nombreux médicaments reste à déterminer et cette recherche est sans doute à privilégier pour les médicaments à marge thérapeutique étroite ou ne disposant pas de marqueur pharmacodynamique simple tel que la mesure de la PA.

La restriction de la poche gastrique La restriction de la poche gastrique après RYGB, sleeve gastrectomy ou anneau ajustable peut également modifier les processus biopharmaceutiques dans le tractus gastro-intestinal (taux de vidange gastrique, dissolution de formes pharmaceutiques) (28). Ainsi, même si la sleeve gastrectomy est une chirurgie restrictive pure, la réduction de la poche gastrique peut induire une diminution du temps de dissolution gastrique de médicaments ayant une forme galénique solide (33). L’anneau ajustable, quant à lui, peut augmenter le temps de vidange gastrique, favoriser la dissolution, mais retarder la vidange gastrique et donc le contact du principe actif avec la muqueuse intestinale (28, 33).

Les propriétés pharmacocinétiques de médicaments antihypertenseurs Les propriétés pharmacocinétiques de médicaments antihypertenseurs suggèrent que l’absorption soit progressive le long de la muqueuse de l’intestin grêle et de nombreuses formes à libération prolongée sont disponibles. Un retard de dissolution ou de vidange de la forme galénique solide a probablement peu de répercussions sur l’absorption d’un médicament habituellement correctement absorbé le long de l’intestin. L’adaptation des traitements antihypertenseurs doit toujours être réalisée sur le marqueur d’effet des médicaments, à savoir la PA mesurée de façon correcte avec un brassard adapté, et il n’y a pas d’indication à une augmentation de la dose en cas de doute sur l’absorption des médicaments antihypertenseurs.

Autres facteurs impliqués dans le contrôle de la PA après chirurgie Les apnées du sommeil régressent fréquemment après chirurgie de l’obésité. Une métaanalyse montre une résolution des apnées dans 80 à 86 % des cas et leur amélioration dans 95 % des cas (3). Malgré ces données très rassurantes sur l’évolution de cette comorbidité, il convient de s’assurer de leur disparition au cours du suivi, surtout dans un contexte d’HTA sévère persistante. Par ailleurs, il convient de rappeler aux patients que les MHD expliquées plus précocement dans la prise en charge de la maladie, comme la réduction des apports sodés, doivent être Diabète & Obésité • Mars 2014 • vol. 9 • numéro 77


impact de la chirurgie bariatrique sur les chiffres tensionnels

maintenues malgré la chirurgie de l’obésité.

Conclusion L’ensemble des données sur HTA et chirurgie bariatrique suggère que la perte de poids importante, quelle que soit la technique chirur-

gicale utilisée, améliore les chiffres tensionnels des patients, et même si certains travaux montrent une perte du bénéfice à distance des premières années, la chirurgie permet sans doute de limiter ou retarder l’aggravation de l’HTA, assez inéluctable chez les patients obèses. L’amélioration des autres

comorbidités, notamment métaboliques, contribue à la diminution du risque cardiovasculaire. n

Mots-clés : Chirurgie bariatrique, Obésité, Hypertension artérielle

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Diabète & Obésité • Mars 2014 • vol. 9 • numéro 77

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