La prise en charge globale du patient diabétique
d www.diabeteetobesite.org Parmi les 9 400 patients en attente de greffe rénale en France en 2011, 41 % d’entre eux étaient diabétiques.
dossier
Immunologie en diabétologie : une greffe réussie… Immunothérapie d’un patient greffé et diabétique : surveillance entre les explorations spécialisées Dr Arnaud Del Bello
• Altérations immunologiques du diabète de type 1 : que savons-nous ? Dr Danièle Dubois-Laforgue
• Transplantation pour le patient diabétique de type 1 : le point sur la greffe d’îlots de Langerhans Mathieu Armanet, Christophe Broca, Pr Anne Wojtusciszyn
À savoir
Thérapeutique
Épidémiologie
Activité physique et chirurgie bariatrique
L’enzyme 11βHSD1 : une nouvelle cible potentielle
Afrique et diabète : la fin d’un paradoxe
Emmanuel Beck, Pr André J. Scheen
Stéphanie Musso
Stéphane Besançon
Interspécialités
Pharmacologie
Asthme et obésité : une association loin d’être fortuite
L’industrie pharmaceutique face à sa mutation
Pr Alain Didier, Dr Claire Mailhol
Dr Jean-Pierre Lehner
Octobre 2013 • Volume 8 • n° 72 • 9 E
sommaire
La pris e e n c h ar g e g l o ba l e d u pa t i e n t diab é t i q u e
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Octobre 2013 • Vol. 8 • N° 72
www.diabeteetobesite.org
n Interspécialités Asthme et obésité Une association loin d’être fortuite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 250
Pr Alain Didier, Dr Claire Mailhol (Toulouse)
n Thérapeutique L’enzyme 11βHSD1 Une nouvelle cible potentielle pour le traitement du diabète de type 2 et des maladies métaboliques liées à l’obésité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 256
Emmanuel Beck, Pr André J. Scheen (Liège)
n pharmacologie L’industrie pharmaceutique face à sa mutation Qu’en est-il aujourd’hui ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 259
Dr Jean-Pierre Lehner (Paris)
n Dossier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
p 261
Immunologie en diabétologie : une greffe réussie… Dossier coordonné par le Dr Saïd Bekka (Chartres) et le Pr Patrick Ritz (Toulouse)
1 n Immunothérapie d’un patient greffé et diabétique Surveillance entre les explorations spécialisées . . . . . . . . . . . . . . . p. 262 Dr Arnaud Del Bello (Toulouse)
2 n Altérations immunologiques du diabète de type 1 Que savons-nous ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 268 Dr Danièle Dubois-Laforgue (Paris)
3 n Transplantation pour le patient diabétique de type 1 Le point sur la greffe d’îlots de Langerhans . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 274 Mathieu Armanet, Christophe Broca, Pr Anne Wojtusciszyn (Montpellier)
n Épidémiologie Afrique et diabète La fin d’un paradoxe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 281
Stéphane Besançon (Grenoble)
n À savoir
Activité physique et chirurgie bariatrique Synthèse des études . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 287
Stéphanie Musso (Cahuzac)
n Bulletin d’abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 258 n Rendez-vous de l’industrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 272, 280
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Interspécialités
Asthme et obésité Une association loin d’être fortuite Pr Alain Didier*, Dr Claire Mailhol*
Résumé
L
es relations entre obésité et asthme ont fait l’objet de nombreuses publications depuis plus d’une dizaine d’années. L’obésité est la maladie métabolique la plus fréquente dans le monde au point que sa prévention est devenue l’une des priorités de l’OMS (1). L’asthme et l’obésité ont considérablement progressé en deux décennies dans la plupart des pays du monde. Il pourrait s’agir d’une simple coïncidence liée de façon indépendante aux modifications de notre mode de vie. Néanmoins, un certain nombre de données objectives épidémiologiques,
*Service de Pneumologie-Allergologie, Hôpital Larrey, CHU de Toulouse didier.a@chu-toulouse.fr
250
© Sebastian Kaulitzki – iStockphoto
L’asthme et l’obésité ont considérablement progressé en deux décennies dans la plupart des pays du monde. Un certain nombre de données objectives épidémiologiques, cliniques et de mécanismes physiopathologiques plaident pour un lien réel entre les deux affections. La prise en compte de l’IMC et sa prise en charge éventuelle pourraient donc constituer un élément important du contrôle de la maladie respiratoire, notamment chez les patients présentant un asthme sévère et/ou difficile à contrôler.
cliniques et physiopathologiques plaident pour un lien réel entre les deux affections.
Définition de l’obésité Définie par une accumulation anormale ou excessive de graisse pouvant avoir des conséquences négatives de santé ; elle peut être catégorisée en utilisant l’index de masse corporelle (IMC, BMI des Anglo-saxons) selon le tableau 1. D’autres index peuvent être utilisés en association avec l’IMC. Le tour de taille et le rapport taille/ hanche sont un meilleur reflet que l’IMC de l’obésité abdominale dont on sait qu’elle est directement associée à une adiposité viscérale,
à une inflammation systémique et à un risque cardiovasculaire accru (2). Chez l’enfant, l’obésité est généralement définie par un IMC au-delà du 97e percentile mais le tour de taille et le rapport de conicité qui évalue l’obésité abdominale seraient un meilleur reflet de l’adiposité (3). Tableau 1 – Classification de l’obésité en fonction de l’IMC. IMC (Kg/m2)
Classification chez l’adulte
< 18,5
Maigre
18,5-24,9
Normal
25-29,9
Surpoids
30-34,9
Obésité classe I
35-39,9
Obésité classe II
> 40
Obésité morbide
Diabète & Obésité • Octobre 2013 • vol. 8 • numéro 72
Thérapeutique
L’enzyme 11βHSD1 Une nouvelle cible potentielle pour le traitement du diabète de type 2 et des maladies métaboliques liées à l’obésité n La 11β-hydroxystéroïde déshydrogénase de type 1 (11βHSD1) est une enzyme intervenant dans la transformation de cortisone en cortisol, notamment dans le tissu adipeux et le foie. Elle pourrait être impliquée dans la physiopathologie de l’obésité abdominale, composante centrale du syndrome métabolique, situation proche du syndrome de Cushing. Des inhibiteurs synthétiques sélectifs de la 11βHSD1 sont en cours de développement avec des résultats préliminaires encourageants, mais qui doivent encore être améliorés avant de constituer une véritable approche innovante dans la prise en charge pharmacologique de l’obésité, du syndrome métabolique et du diabète de type 2.
Le syndrome de Cushing se caractérise, notamment, par une obésité centrale, une dysglycémie et une hypertension artérielle. Ces anomalies ressemblent à celles du syndrome métabolique associées à l’obésité abdominale (1,2). Le cortisol est une hormone contrecarrant l’action de l’insuline, et l’insulinorésistance est une anomalie importante dans le syndrome métabolique et le diabète de type 2 (DT2). Bien que la cortisolémie et la cortisolurie soient, en général, normales ou à peine accrues dans l’obésité commune, un hypercorticisme tissulaire local pourrait exister en raison d’un dysfonctionnement de l’enzyme 11β-hydroxystéroïde déshydrogénase de type 1 (11βHSD1), responsable de l’activation de *Assistant **Professeur de clinique ; professeur ordinaire, université de Liège, chef du service Diabétologie, Nutrition et Maladies métaboliques et unité de Pharmacologie clinique, département de Médecine, CHU Liège, Belgique andre.scheen@chu.ulg.ac.be
256
cortisone en cortisol, en particulier dans le tissu adipeux et le foie, offrant, dès lors, une nouvelle cible thérapeutique potentielle (3-5). Le présent article a pour but de décrire le rôle de la 11βHSD1, de résumer les anomalies en cas d’obésité, avec ou sans DT2, et de rapporter brièvement les premiers résultats obtenus chez l’Homme avec des inhibiteurs sélectifs de la 11βHSD1.
Rôle de la 11βHSD1 La 11βHSD1 intervient dans la transformation de cortisone (inactive) en cortisol (actif) (Fig. 1) (2-5). L’exposition tissulaire aux glucocorticoïdes est ainsi modulée localement, indépendamment des variations plasmatiques nycthémérales du cortisol. La distribution de la 11βHSD1 est ubiquitaire mais, dans le cas particulier, elle contrôlerait, à un niveau pré-récepteur, les
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Introduction
Emmanuel Beck*, Pr André J. Scheen**
régulations métaboliques dans le tissu adipeux et dans le foie. Dans le tissu adipeux, la 11βHSD1 jouerait, en outre, un rôle capital dans la différenciation cellulaire (3, 5-6). La régulation de cette enzyme se Diabète & Obésité • Octobre 2013 • vol. 8 • numéro 72
Pharmacologie
L’industrie pharmaceutique face à sa mutation Qu’en est-il aujourd’hui ? n
Depuis au moins une décennie, de nombreux facteurs environnementaux conduisent les
grandes firmes pharmaceutiques à reconsidérer leur stratégie.
Dr Jean-Pierre Lehner*
Les facteurs environnementaux Ils sont nombreux et de différentes origines.
Contraintes réglementaires
Prise en charge des nouveaux médicaments par les organismes de remboursement Elle est devenue plus difficile, en raison de l’augmentation exponentielle des coûts de santé dans les pays occidentaux. La démonstration de la valeur médicale ajoutée du nouveau produit est un élément indispensable à l’obtention du remboursement. Le plan de développement doit comporter des études spécifiques pour satisfaire ce besoin. Cela vient s’ajouter aux contraintes réglementaires mentionnées précédemment. *Médecin, cardiologue, consultant pour l’Industrie pharmaceutique, Paris
Diabète & Obésité • Octobre 2013 • vol. 8 • numéro 72
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Elles se sont fortement alourdies tant au niveau de l’Union européenne que des États-Unis mais aussi dans les pays émergents. Les Agences réglementaires exigent aujourd’hui des preuves très robustes d’efficacité et de tolérance qui ont considérablement augmenté le coût du développement clinique des produits innovants.
Après la mise sur le marché Le paysage est très différent de ce qu’il était dans le passé : - la nécessité de produire aux Autorités de santé des données de tolérance à intervalles réguliers est maintenant élargie à une analyse de la balance bénéfice-risque en condition réelle d’utilisation du produit ; - la prise en charge, quand elle a été acceptée, est remise en question au moins tous les 5 ans en France, les données d’utilisation sont alors étudiées, en particulier le respect de l’indication ayant donné lieu au remboursement par la collectivité ; - le développement des molécules génériques qui a augmenté de façon considérable, conduisant à de ra-
pides pertes de revenus notamment sur le territoire nord-américain (90 % en quelques semaines), en Europe occidentale la baisse atteint 60 à 70 % en quelques mois. Voilà quelques exemples, donnés sans esprit polémique, qui conduisent les firmes pharmaceutiques ayant une forte activité de recherche et de développement à revoir leur modèle.
Des molécules innovantes Les dernières décennies ont été caractérisées par la recherche, le développement, la commercialisation de 259
DOSSIER
Immunologie en diabétologie : une greffe réussie…
© shubhangi kene – Stocklib.
Dossier coordonné par le Dr Saïd Bekka (Chartres) et le Pr Patrick Ritz (Toulouse)
1 Immunothérapie d’un patient greffé et diabétique : surveillance entre les explorations spécialisées ����������������������������������������������������������������� p. 262 Dr Arnaud Del Bello
2 Altérations immunologiques du diabète de type 1 : que savons-nous ? ����������������������������������������������������������������������������������� p. 268 Dr Danièle Dubois-Laforgue
3 Transplantation pour le patient diabétique de type 1 : le point sur la greffe d’îlots de Langerhans ����������������������������������������� p. 274 Mathieu Armanet, Christophe Broca, Pr Anne Wojtusciszyn
Immunologie en diabétologie : une greffe réussie...
DOSSIER
1 Immunothérapie d’un patient
greffé et diabétique
Surveillance entre les explorations spécialisées Dr Arnaud Del Bello*
Introduction Depuis des années, les progrès de l’immunosuppression en greffe d’organe solide ont contribué à faire de ce traitement la référence dans de nombreuses pathologies chroniques terminales, permettant non seulement un gain en qualité de vie, mais surtout une nette amélioration du pronostic vital des patients. De fait, on observe une constante augmentation de patients greffés chaque année en France. À titre d’exemple, près de 3 000 patients insuffisants rénaux terminaux ont été transplantés en 2011, amenant le nombre de patients greffés rénaux suivis à cette date à près de 30 000 (1). L’augmentation permanente de ces patients rend nécessaire l’implication de tous les acteurs de santé pour les prendre en charge de manière globale.
*Chef de clinique, spécialité Néphrologie-Transplantation, hôpital de Rangueil, Toulouse
262
L
e diabète est l’une des principales comorbidités rencontrées dans cette population : parmi les 9 400 patients en attente de greffe rénale en France en 2011, 41 % d’entre eux étaient diabétiques (dont 92 % de diabète de type 2) (1) et cette prévalence s’accroît encore après la greffe. L’impact sur le devenir des greffons et des patients fait du dépistage, du traitement ainsi que de la surveillance de cette pathologie un élément capital du suivi de ces patients.
Définition, incidence et prévalence Le diabète est connu pour compliquer la greffe rénale depuis près de 50 ans (2). Depuis, il est clairement établi que cette comorbidité favorise les pertes de greffon, augmente le risque cardiovasculaire et le risque de décès de ces patients (3-5). Devant l’importance de cette pathologie en greffe d’organe, une terminologie spécifique s’est imposée, permettant de mieux définir la prévalence, l’histoire naturelle et l’impact clinique du diabète en transplantation. Ainsi seront différenciés les diabètes et intolérances au glucose préexistants à la greffe, et les TAH (Transplant Associated Hyperglycemia), regroupant les diabètes NODAT (New Onset Diabetes After Organ Transplan-
tation) et les intolérances au glucose postgreffe (3). La définition de ces troubles est directement adaptée des recommandations de la WHO (6-7). L’incidence et la prévalence du diabète NODAT sont variables selon les études et les organes transplantés (d’autant plus qu’avant 2003, les définitions étaient très hétéroclites), mais restent fortes : l’incidence est estimée en greffe rénale, comme en greffe hépatique, entre 15 et 25 % des patients (5, 7-9) après la première année. Elle serait légèrement plus importante en greffe cardiaque et pulmonaire, entre 35 % et 40 % (1011) à un an. Les mécanismes physiopathologiques amenant à l’apparition d’un diabète postgreffe associent une combinaison de facteurs : - augmentation de la clairance de l’insuline (par la restauration d’une fonction rénale en greffe de rein) ; - diminution de la sécrétion d’insuline (rôle du traitement immunosuppresseur) ; - insulinorésistance (rôle de la prise de poids et du syndrome métabolique, du VHC, de l’âge avancé et des corticoïdes).
Facteurs de risque Les principaux facteurs de risque Diabète & Obésité • Octobre 2013 • vol. 8 • numéro 72
Immunologie en diabétologie : une greffe réussie...
DOSSIER
2 Altérations immunologiques
du diabète de type 1
Que savons-nous ? Dr Danièle Dubois-Laforgue*
Résumé Le diabète de type 1 (DT1) est caractérisé par une destruction sélective des cellules b pancréatiques d’origine auto-immune, conduisant dans des délais variables à une carence totale en insuline. Son diagnostic positif repose sur la mise en évidence, dans le sérum des patients, d’autoanticorps dirigés contre des déterminants antigéniques insulaires. La maladie résulte d’événements stochastiques survenant sur un terrain de prédisposition génétique et impliquant des facteurs environnementaux, encore largement méconnus. Trois étapes sont déterminantes dans la survenue de la maladie : anomalies de la tolérance centrale, permettant la sélection de lymphocytes autoréactifs ; activation et recrutement de ces lymphocytes au niveau des îlots pancréatiques, par un agent qui reste spéculatif ; altération des mécanismes de régulation périphérique, permettant l’expansion de la réponse immune aboutissant à terme à la destruction des cellules b. La meilleure compréhension des mécanismes impliqués dans le développement de l’auto-immunité, conjointement aux données issues des premiers essais d’immuno-intervention chez l’Homme, ouvre de nouvelles perspectives en termes de prévention secondaire (visant à inhiber la réponse immune déjà engagée) et tertiaire (au stade de diabète, permettant de préserver les cellules b résiduelles). La possibilité d’une prévention primaire de la maladie (visant à éviter le déclenchement de l’auto-immunité) reste utopique, car nécessitant l’identification de l’événement initiateur de la réponse immune et/ou une intervention précoce sur la sélection thymique.
Données cliniques Le diabète de type 1 présente une grande hétérogénéité phénotypique (1). Initialement décrit chez les enfants et caractérisé par une carence insulinique aiguë, le DT1 survient en fait dans la moitié des cas après l’âge de 20 ans, avec un continuum de présentation clinique, allant de l’acidocétose révélatrice au diabète pauci-symptomatique évoquant parfois un diabète de type 2 (forme *MCU-PH, service du Pr Boitard, hôpital Cochin - Hôtel-Dieu, Paris
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reconnue sous le terme de LADA, Latent Autoimmune Diabetes in the Adults). La mise en évidence de marqueurs sériques d’auto-immunité revêt ici tout son intérêt, permettant d’établir le diagnostic étiologique du diabète. De plus, dans un tiers des cas, le DT1 s’associe à d’autres maladies auto-immunes spécifiques d’organes (les plus fréquentes étant les thyroïdites), témoignant d’une auto-immunité plus diffuse. Enfin, dans 10 % des cas, le diabète est familial. Il
est vraisemblable qu’à cette hétérogénéité clinique corresponde une hétérogénéité génétique et immunologique.
Données histologiques L’une des façons d’aborder la physiopathologie des maladies auto-immunes est d’en étudier l’organe cible. Du fait de la mauvaise accessibilité du pancréas, les données histologiques disponibles sont essentiellement issues d’études postmortem ou de modèles murins. Chez la souris NOD (Non Obese Diabetic, modèle de diabète auto-immun spontané), des cellules dendritiques et des macrophages infiltrant le pancréas sont visibles dès l’âge de 3 semaines. Des lymphocytes (à prédominance T, LT) apparaissent ensuite en périphérie des îlots (péri-insulite), puis les envahissent (insulite, initialement constituée de LT de type CD4, puis CD8). L’évolution ultérieure est marquée par une destruction des cellules b (insulite destructrice) et la survenue du diabète après l’âge de 15 semaines. Chez l’Homme, l’insulite apparaît très limitée chez les sujets non diabétiques mais porteurs d’autoanticorps. Au diagnostic de diabète, l’insulite est constituée majoritairement de lymphocytes T CD8, et est nettement plus marquée chez l’enfant Diabète & Obésité • Octobre 2013 • vol. 8 • numéro 72
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DOSSIER
3 Transplantation pour
le patient diabétique de type 1 Le point sur la greffe d’îlots de Langerhans Mathieu Armanet*, Christophe Broca**, Pr Anne Wojtusciszyn***
Introduction Le concept de greffe pancréatique pour traiter le patient diabétique insulinoprive (DT1) n’est pas récent. Dès 1893, avant même la découverte de l’insuline, Williams tenta la greffe d’un fragment de pancréas de mouton de la taille d’« une noix du Brésil » sous la peau d’un jeune garçon de 13 ans en acidocétose. Si l’expérience se solda par un échec, elle ouvrit le champ à un traitement du diabète par transplantation. C’est en 1966, pour la transplantation de pancréas entier, que de nouveaux essais débutèrent avec succès. Il fallut attendre 1974 pour un nouvel essai de greffe cellulaire par greffe d’îlots de Langerhans. Cependant, les résultats restèrent longtemps bien en dessous de ceux de la transplantation de pancréas seule. Les données spectaculaires rapportées par le groupe d’Edmonton en 2000 (1), ont renouvelé l’intérêt pour la greffe d’îlots. Cette technique est perçue comme une avancée thérapeutique qui, en apportant des résultats bientôt similaires à la transplantation pancréatique, comporte un risque opératoire moins élevé. Les indications sont cependant limitées et doivent être posées consciencieusement, nous allons le voir, après avoir pris en compte les bénéfices et les risques apportés par cette technique.
Procédure d’isolement des îlots de Langerhans L’isolement des îlots de Langerhans à partir de pancréas de donneur multi-organes en état de mort encéphalique nécessite un laboratoire spécialement dédié à la procédure et respectant les conditions de Bonnes Pratiques de Fabrication, et exige savoir-faire et expertise. *Laboratoire de Thérapie cellulaire du Diabète, Institut de recherche en Biothérapie, CHU Montpellier, Hôpital Saint-Eloi, Montpellier ; Unité de Thérapie cellulaire, Hôpital Saint-Louis, AP-HP, Paris **Laboratoire de Thérapie cellulaire du Diabète, Institut de recherche en Biothérapie, CHU Montpellier, Hôpital Saint-Eloi, Montpellier ***Laboratoire de Thérapie cellulaire du Diabète, Institut de recherche en Biothérapie, CHU Montpellier, Hôpital Saint-Eloi, Montpellier ; Département d’Endocrinologie, Diabète, Nutrition, CHU Montpellier, Hôpital Lapeyronie, Montpellier
274
Les techniques utilisées actuellement dérivent toutes de la méthode semi-automatique développée en 1988 par le Dr Camillo Ricordi à Saint-Louis, USA (2). Elles consistent à fractionner le pancréas en petits “morceaux” par une digestion enzymatique utilisant de la collagénase. Une fois la digestion jugée satisfaisante, la suspension de tissu pancréatique est récoltée et purifiée par centrifugation sur gradient de densité ; les îlots étant plus légers que le reste du tissu pancréatique, ils s’en séparent et peuvent être récupérés facilement. Alors que les îlots de Langerhans ne représentent que 1 à
2 % de la masse pancréatique totale, les préparations obtenues à l’issue d’une procédure d’isolement sont enrichies en îlots (pureté oscillant entre 30 et 80 %) et ne représentent que quelques millilitres de tissu. Une préparation d’îlots éligible pour une greffe chez un patient DT1 doit répondre aux exigences suivantes : • Absence de contamination microbiologique. • Viabilité générale ≥ 70 %. • Proportion d’îlots de la préparation ≥ 30 %. • Volume de tissu à greffer ≥ 10 ml. Une fois conformes aux critères de libération/greffe, les îlots sont conditionnés dans des poches de perfusion identiques à celles utilisées pour les transfusions plaquettaires. Les îlots ainsi conditionnés sont ensuite acheminés, dans un délai maximal de huit heures, en salle de radiologie où s’effectue la greffe des îlots pancréatiques par perfusion.
La greffe d’îlots de Langerhans Bien que de nouveaux sites d’implantation soient explorés (moelle osseuse, muscle) (3), le foie reste encore le site privilégié pour l’injection des îlots chez l’Homme. En général, deux à trois préparations d’îlots (provenant de donneurs différents) sont nécessaires en raison du faible rendement de l’isolement des îlots humains. Diabète & Obésité • Octobre 2013 • vol. 8 • numéro 72
Immunologie en diabétologie : une greffe réussie...
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DOSSIER
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rendez-vous de l’industrie Insuline
Lecteur de glycémie
Un nouveau stylo injecteur à insuline réutilisable : HumaPen® savvioTM
MyStar Extra®, le premier lecteur de glycémie avec estimation de l’hémoglobine glyquée
Lilly France a annoncé le lancement du stylo injecteur à insuline HumaPen® savvioTM. HumaPen® savvioTM a été créé pour répondre aux besoins des patients qui souhaitent se sentir plus à l’aise et confiant dans la gestion de leur traitement. Ainsi, il s’adapte au style de vie des patients et à leurs personnalités. HumaPen® savvioTM peut être utilisé avec toutes les insulines de la gamme Lilly en cartouche (3 ml) et a été conçu pour ressembler à un petit accessoire personnel plutôt qu’à un dispositif médical. Il dispose d’un design compact, attrayant, durable et disponible en plusieurs couleurs : rouge, bleu, rose, vert, argenté et anthracite. HumaPen® savvioTM est disponible en pharmacies d’officine. Il est remboursé par la Sécurité sociale dans la limite d’un stylo par an et par patient, au tarif en vigueur correspondant à la ligne générique : “auto traitement, stylo injecteur avec aiguilles à cartouches pré remplies” (code LPPR 1132086). Le stylo est garanti six ans, et Lilly s’engage à le remplacer si un problème technique intervenait. n
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Lors du Congrès annuel de l’Association européenne pour l’étude du diabète (EASD), à Barcelone (Espagne), Sanofi (EURONEXT : SAN et NYSE : SNY) a présenté le lecteur de glycémie MyStar Extra®, premier dispositif d’autosurveillance de la glycémie à fournir des estimations précises de l’hémoglobine glyquée (HbA1c), un indicateur essentiel du contrôle de la glycémie sur le long terme. La fonction “A1c estimée” de MyStar Extra® repose sur une nouvelle méthode d’estimation permettant le suivi de la glycémie moyenne à l’aide des mesures d’autosurveillance glycémique enregistrées dans le lecteur. Désormais approuvés en Europe, MyStar Extra® et le nouvel autopiqueur MyStar SylkFeel®, qui permet aux patients de prélever leur sang pratiquement sans douleur pour le dosage de leur glycémie, seront commercialisés dans certains pays européens à partir du quatrième trimestre de 2013. Ils viendront compléter le nouveau portefeuille MyStar® de Sanofi composé de dispositifs, services et conseils pour une prise en charge simple et efficace du diabète. n
Diabète & Obésité • Octobre 2013 • vol. 8 • numéro 72
épidémiologie
Afrique et diabète La fin d’un paradoxe Stéphane Besançon*
Introduction Contrairement aux images encore grandement véhiculées par les grandes ONG et les médias, où l’Afrique est souvent présentée comme un bout de brousse où tous les problèmes alimentaires renvoient aux images d’adultes aux visages creusés, vieillis avant l’âge, et d’enfants décharnés aux ventres ballonnés (1), la réalité sur le terrain est tout autre.
Une véritable épidémie de diabète Le continent africain, à l’image de ce qu’il se passe à l’échelle mondiale, fait face à une véritable épidémie de diabète. La Fédération internationale du Diabète (FID) rappelle que l’on compte, aujourd’hui, 371 millions de Personnes atteintes de diabète (PAD) dans le monde soit 8,3 % de la population adulte mondiale (2). Le diabète compte 6 millions de nouveaux malades chaque année et est responsable de plus de 4 millions de morts annuellement, d’1 million d’amputations (85 % du nombre total d’amputations) et de multiples complications invalidantes (2). L’avenir
*Biologiste, nutritionniste spécialiste des pays en voie de développement, directeur général de l’ONG Santé Diabète (SD), Grenoble stephane.besancon@santediabete.org
Diabète & Obésité • Octobre 2013 • vol. 8 • numéro 72
semble encore plus alarmant puisque les projections de la FID estiment que le nombre de personnes touchées par le diabète devrait dépasser les 552 millions d’ici à 2030, dont 80 % de ces patients résideront dans les pays intermédiaires et en voie de développement (2), ce qui fera de cette condition l’une des principales causes d’invalidité et de décès dans le monde (2). Le continent africain est déjà très fortement touché par l’épidémie de diabète avec plus de 14 millions de PAD, ce qui représente 4,3 % de la population adulte. L’Afrique va connaître la progression la plus importante de la maladie dans les 20 prochaines années, avec un doublement de la prévalence du diabète (de 3,5 % à 7 %) et du nombre de patients (de 14 à 28 millions) (2). Ces chiffres démontrent la transition épidémiologique qui est en cours en Afrique, du fardeau des maladies transmissibles à celui des maladies non transmissibles (3) (Fig. 1).
En cause : le développement du continent Cette explosion du diabète est reliée directement au développement du continent. En effet, l’Afrique connaît une forte croissance économique, un important développement et, par conséquent, fait face à trois grands défis :
• une augmentation de l’espérance de vie et donc de l’âge des populations : l’espérance de vie moyenne en Afrique subsaharienne est passée de 44 ans en 1970 à 52 ans aujourd’hui (4). Cette augmentation accroît d’année en année le nombre de personnes présentes dans les classes d’âge où se développe le plus le diabète ; • une urbanisation galopante : en 2009, l’Afrique dépassait le milliard d’habitants avec 395 millions de personnes vivant dans des zones urbaines (40 %). En 2050, la population totale des villes africaines passera à 1,23 milliard d’habitants, représentant ainsi 60 % de la population africaine (5). L’urbanisation galopante entraîne une modification des modes de vie avec une forte augmentation de la sédentarité. • une transition nutritionnelle qui se caractérise par une augmentation de la consommation de graisses, de sucres et de produits d’origine animale (6). Ces changements de mode de vie, associés au prestige social du surpoids et de l’obésité, expliquent l’explosion du surpoids et de l’obésité en cours sur le continent, entraînant une transition des formes de malnutrition, de la sousnutrition vers la surnutrition. Ainsi, depuis quelques années, les problèmes de surpoids dépassent les problèmes de sous-poids en Afrique (7). 281
à savoir
Activité physique et chirurgie bariatrique Synthèse des études Stéphanie Musso*
Avec une prévalence de 15 % de la population adulte, l’obésité touche en France 6,9 millions de personnes en 2012 (1) dont 550 000 personnes (soit 1,2 % de la population) souffrent d’une obésité dite morbide, c’est-à-dire avec un Indice de masse corporelle (IMC) supérieur ou égal à 40 kg/m². La fréquence de l’obésité et son augmentation sont considérées comme un problème de santé publique en France. Les politiques de santé publique reposent sur la mise en avant du corps associant la santé à un exercice physique régulier et pointent du doigt la sédentarité. Les recommandations de l’HAS (2) soulignent en première intention l’importance des Mesures hygiéno-diététiques (MHD) dans la prise en charge de l’obésité. En deuxième intention, la chirurgie de l’obésité chez l’adulte fait partie des stratégies de prise en charge en cas d’échec des MHD seules. En 2011, 30 000 patients en ont bénéficié, chiffre qui a doublé entre 2006 et 2011 (1). La chirurgie bariatrique permet une perte de poids importante et durable, améliore les comorbidités et la qualité de vie des patients. Pour équilibrer la balance énergétique, l’accroissement du niveau d’activité est une option incontournable. L’activité physique régulière entraîne une diminution de la masse grasse et un maintien voire une augmentation de la masse musculaire. L’Activité physique (AP) fait intégralement partie de l’action thérapeutique dans la prise en charge de l’obésité.
Profil des patients opérés L’enquête de l’Assurance maladie (1) montre qu’en 2011, 4 % des patients atteints d’obésité morbide ont bénéficié d’une chirurgie bariatrique, 69 % étaient des femmes dont 77 % avaient un IMC supérieur ou égal à 40kg/m². Ces opérations touchent essentiellement les personnes âgées en moyenne de 39 ans pour les femmes et de 41 ans pour les hommes. On retrouve aussi plus de 700 patients de moins de 20 ans. L’obésité étant liée au niveau socio-économique, environ *Enseignante en Activité physique adaptée, SSR de nutrition de la Clinique du Château de Cahuzac
20 % des patients appartiennent à une catégorie sociale plutôt modeste. De plus, les comorbidités ou traitements associés sont fréquents : 1 patient opéré sur 4 est traité pour hypertension artérielle, 1 sur 10 est traité pour diabète, asthme, broncho-pneumopathie chronique obstructive, hypercholestérolémie ou est appareillé pour syndrome d’apnées du sommeil. D’après les recommandations de l’HAS, un suivi s’intègre dans le programme personnalisé du patient. L’enquête de la Cnamts a montré que le protocole de suivi des patients ayant bénéficié d’une
Diabète & Obésité • Septembre 2013 • vol. 8 • numéro 71
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Introduction
chirurgie n’était pas respecté pour 53 %, et 18 % étaient perdus de vue. Durant 1 an, une étude américaine (3) portant sur le suivi des recommandations de 100 patients opérés a montré que 41 % de ces patients ne les respectaient pas en matière d’AP alors que la plupart des patients les respectaient par rapport à la consommation de graisses. De plus, 63 % arrivaient à éviter les grignotages. Cela montre qu’une éducation en matière d’alimentation et d’AP est recommandée pour un résultat optimal. 41 % des patients opérés ne respectaient pas les recommandations en matière d’AP alors que la plupart des patients les respectaient par rapport à la 287