évaluer
1 Plainte de mémoire Comment conduire l’entretien neurologique et le bilan de débrouillage ? Catherine Thomas-Antérion, Aurélie Richard-Mornas, Sandrine Basaglia-Pappas et Michèle Puel
Ce qu’il faut rechercher
L’entretien doit prendre en compte si le sujet est venu seul ou accompagné en consultation, et s’il se plaint spontanément ou non. D’emblée, il faut écouter le discours pour repérer d’éventuels troubles du langage (voir l’article sur le langage p. 355), la perte du fil de la pensée, des incohérences, des réponses imprécises ou à côté, etc. Evidemment, si le sujet ne se plaint pas, l’orientation du diagnostic ne peut se construire qu’avec l’entourage. Ce temps de l’entretien est primordial. En outre, il permet d’avoir une idée de ce que le sujet pense de sa situation et son vécu de celle-ci. 1. En premier lieu (mais comme dans tout temps médical), on s’intéressera aux antécédents médicaux et à la situation psychique, somatique et sociale du moment. 2. Bien sûr, il faut faire décrire qualitativement la plainte de mémoire (Fig. 1) c’est-à-dire déterminer : • son ancienneté (récente ou non) ; • ses répercussions sur les activités de vie quotidienne (prise de notes, adaptation ou réduction de cellesci) ; • et si elle est isolée ou s’accompagne d’autres difficultés cognitives ou comportementales. 3. On s’intéressera toujours à comment le sujet pense qu’il fonctionnait antérieurement (« une excellente mémoire », « jamais été bon », « plus visuel que verbal »,
etc.). Il faut s’attacher à rechercher les situations dans la vraie vie qui l’ont conduit à consulter. 4. Enfin, l’entretien permet de confirmer que ce que le sujet appelle plainte de mémoire n’est pas : • une plainte de langage (« j’oublie les mots, les noms ») ; • une difficulté praxique ou gnosique (« je n’arrive plus à travailler, je suis maladroit, je ne sais plus faire les gestes, on dirait que je les ai oubliés », « je ne reconnais plus les gens ») ; • ou une plainte attentionnelle (voir ci-dessous). Il peut être utile de demander pourquoi il a jugé bon de venir : « parce que j’ai peur d’avoir la maladie d’Alzheimer » (à tort, car il est phobique, ou à raison).
COMMENT ?
Il convient d’écouter comment est formulée la plainte et déterminer les circonstances ou occasions dans lesquelles celle-ci se manifeste (encadré 1).
• Le sujet a-t-il des difficultés d’accès aux souvenirs anciens ? (mécanisme exécutif ) • Est-il aidé par des indices ? • Certains domaines sont-ils plus touchés ? • Les souvenirs biographiques ? Depuis toujours ou récemment ? • Les savoirs ? • Certaines modalités sontelles plus émoussées ? • Verbal ? • Visuel ? • Le sujet a-t-il des difficultés pour apprendre de nouveaux souvenirs ou consolider des informations dans le temps ? • Y a-t-il des productions positives ? Des fabulations ? Des fausses reconnaissances ?
QUAND ?
La survenue dans le temps est très importante à préciser. Bien sûr, il faut rechercher la plainte insidieuse et progressive (impossible
Ancienneté ? Récente ou non Ses répercussions sur les activités de vie quotidienne (AVQ) Prise de notes, adaptation ou réduction des AVQ
PLAINTE Isolée ? Ou s’accompagne d’autres difficultés cognitives ou comportementales ?
Figure 1 - L’évaluation de la plainte de mémoire dans son contexte.
Repères en Gériatrie • Juin-Juillet 2013 • vol. 15 • numéro 127
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