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LE POINT SUR

sujet âgé et diabète

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quelle prise en charge ? la chirurgie bariatrique est-elle envisageable ?

1 Diabète chez le patient âgé Quelle prise en charge ? ���������������������������������������������������������������������������� p. 36 Pr Thierry Constans, Dr Marc Mennecart

2 Chirurgie de l’obésité de la personne de plus de 65 ans Le point de vue du gériatre ���������������������������������������������������������������������� p. 41 Dr Anne Ghisolfi


LE POINT SUR

1 Diabète chez le patient âgé Quelle prise en charge ?

n Un patient diabétique sur quatre est un patient âgé de 75 ans ou plus. Les objectifs glycémiques, le traitement et la prise en charge globale doivent être individualisés. La diététique, l’activité physique et l’éducation thérapeutique font toujours partie du traitement du diabète de type 2, en les adaptant aux possibilités et à la comorbidité du patient. L’insuffisance rénale (généralement calculée) est fréquente et limite l’usage des antidiabétiques oraux (ADO), obligeant la mise en route d’une insulinothérapie parfois encore associée à certains ADO. Le risque hypoglycémique est réel mais ne doit pas être un alibi pour tolérer des glycémies élevées, sources d’inconfort et de risque de décompensation. La réduction du risque cardiovasculaire doit être l’objectif principal du traitement. Toutes les décisions thérapeutiques sont prises en concertation avec le patient.

âgés en fonction de leur profil gériatrique et des recommandations thérapeutiques actuelles émises par les sociétés savantes.

Particularités du patient diabétique âgé La première difficulté rencontrée dans la prise en charge est due à l’existence de nombreuses comorbidités toujours présentes avec l’avancée en âge. Certaines comorbidités sont la conséquence directe du diabète, d’autres sont simplement plus fréquentes chez les patients diabétiques, d’autres enfin sont simplement liées à l’âge. La conséquence est le déficit d’une fonction, dont il faut tenir compte pour le traitement médicamenteux.

Insuffisance rénale *Université François-Rabelais, Faculté de Médecine de Tours ; Service de Médecine interne gériatrique, Hôpital Bretonneau, CHU de Tours **Service de Médecine interne gériatrique, Hôpital Bretonneau, CHU de Tours

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L’insuffisance rénale est la plus préoccupante, conséquence de la réduction néphronique liée au vieillissement, de l’hyperten-

©vm – iStockphoto

U

n quart des patients diabétiques en France a plus de 75 ans (1). La quasitotalité de ces patients a un diabète de type 2 mais 26 % d’entre eux sont traités par insuline. Sept pour cent seulement de ces patients consultent un diabétologue en complément des soins apportés par leur médecin généraliste. En revanche, un tiers des patients de cette tranche d’âge a déjà été hospitalisé une fois et on peut supposer que les complications de la maladie représentent une bonne part des motifs d’hospitalisation. Enfin, parmi la population âgée vivant en EHPAD, 20 % des résidents sont diabétiques et 70 % présentent des troubles cognitifs. Le but de cette mise au point est de décrire les principes de la prise en charge des patients diabétiques

Pr Thierry Constans*, Dr Marc Mennecart**

sion artérielle, de la néphroangiosclérose diabétique, voire des obstacles sur la voie urinaire, des infections urinaires ascendantes ou de la succession d’épisodes d’insuffisance rénale fonctionnelle. Il n’est jamais possible de faire la part des différentes étiologies. Sa surveillance est étroite afin de choisir le traitement antidiabétique et d’en adapter la

Repères en Gériatrie • Février 2014 • vol. 16 • numéro 131


SUJET ÂGé et diabète

posologie. Le nombre élevé de principes actifs et leurs interactions interviennent aussi dans cette réflexion. Rappelons ici que le traitement antihypertenseur prime sur le contrôle glycémique pour prévenir la dégradation de la fonction rénale.

Pathologies cardiovasculaires L’insuffisance cardiaque, l’hypertension artérielle et les sténoses vasculaires de toutes localisations sont le deuxième souci. Les liens avec la fonction rénale sont étroits. Il faut rappeler que la macroangiopathie diabétique se manifeste par des infarctus cardiaques et cérébraux itératifs souvent de petite taille. Elle est la première responsable de la mortalité du patient diabétique.

Difficultés sensorimotrices Les déficits sensoriels (presbyacousie et déficit visuel) et la diminution de l’habileté gestuelle sont fréquents. Ils compliquent l’éducation et l’aspect technique du traitement : manipulation du lecteur de glycémie, du stylo injecteur, voire même simplement extraction des comprimés de leur blister. Les difficultés de déplacement et de mobilisation obligent les patients à faire appel aux ambulanciers et allongent le temps d’examen en consultation.

Fonctions cognitives et troubles de l’humeur La dégradation des fonctions cognitives, en particulier exécutives, et les troubles de l’humeur voient leur prévalence augmenter avec l’âge. Outre la diminution de la qualité voire l’abandon du contrôle glycémique, se pose fréquemment la question de l’observance du traitement. Elle nécessite souvent l’interven-

tion du conjoint ou de la famille, quand ils existent et à condition qu’il y ait une volonté d’aider le patient, ce qui n’est pas assuré. À défaut, l’intervention d’une infirmière à domicile est nécessaire. On imagine les conséquences sur le schéma thérapeutique du diabète : si le passage quotidien d’un soignant peut être un gage de sécurité du patient âgé à domicile, la multiplication des passages à des horaires parfois irréguliers augmente le coût des soins et ampute la liberté du patient sans améliorer son contrôle glycémique. Autre problème fréquent, les convictions thérapeutiques des soignants à domicile et les croyances diététiques du patient âgé sont parfois éloignées des consignes fournies par le diabétologue ou le gériatre. L’isolement social, l’abandon familial et la mise en danger représentent donc des causes d’admission en institution. Bien que l’admission en EHPAD soit rarement souhaitée, elle est une solution dans les situations difficiles, permettant de reconstituer un entourage affectif et de faire régresser un état de malnutrition. En résumé, la consultation du patient diabétique âgé dure souvent plus longtemps car elle doit tenir compte des nombreux éléments médicaux, psychologiques, familiaux, sociaux et environnementaux, en lien ou non avec le diabète. Le médecin doit souvent faire preuve de tolérance vis-à-vis de la perte d’autonomie et de l’autonomie de décision du patient. Cette approche globale du patient constitue justement le fondement de la prise en charge gériatrique, parfois fastidieuse, mais indispensable pour offrir une thérapeutique optimale. L’approche globale permet de décrire la typologie du

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patient diabétique âgé et d’éviter la mise en échec d’un traitement médical pourtant bien conduit.

Typologie des patients âgées Le recensement des comorbidités, l’évaluation de l’autonomie fonctionnelle et de l’autonomie de décision, éléments de la description gériatrique des patients âgés, sont désormais adoptés par les diabétologues pour prendre leurs décisions thérapeutiques.

Le patient âgé “vigoureux” Le patient est observant, entouré de sa famille, porteur d’un diabète de type 2 et de pathologies associées bien contrôlées, présente un bon état nutritionnel, a gardé son autonomie fonctionnelle, des ressources suffisantes et des activités sociales. C’est la situation la plus fréquente chez les patients de moins de 80 ans, mais cette population est également nombreuse au-delà de cet âge. Ces patients vigoureux, rarement vus par les gériatres, doivent bénéficier de la même prise en charge que celle qu’on cherche à obtenir des adultes jeunes, d’autant qu’ils souhaitent gérer leur traitement et en sont capables.

Le patient âgé “très malade” en perte d’autonomie Cette perte d’autonomie impose – ou imposerait – la vie en EHPAD, ce dernier choix relevant de considérations diverses, notamment financières. Le patient est porteur de comorbidités sévères, présente un mauvais état nutritionnel, une dépendance partielle ou totale, n’a pas d’entourage et dispose de faibles ressources intellectuelles et/ou matérielles. Dans cette situation bien connue des gériatres, à l’inverse de la précé37


LE POINT SUR

dente, l’objectif thérapeutique est de soulager les inconforts, d’aider et d’accompagner.

patient vers une hospitalisation en urgence dans un service de gériatrie où la cascade de pathologies est élucidée.

Le patient âgé fragile Entre ces deux extrêmes, se situe le patient fragile. Il vit souvent à domicile et cumule, à des degrés variables, des déficits des fonctions motrices et/ou cognitives. Fried et al. ont décrit des critères de fragilité à partir d’une étude de cohorte (2). Quatre des cinq critères retenus sont en relation étroite avec des paramètres évaluant la masse et la fonction musculaire. À ce titre, les deux syndromes gériatriques – sarcopénie et fragilité – pourraient être très proches l’un de l’autre (3). Cependant, l’étude de Fried et al. est souvent critiquée dans la mesure où elle ne fait pas apparaître les troubles cognitifs ni les facteurs socio-environnementaux, pourtant à l’origine d’une dégradation de l’état de santé, d’hospitalisations et d’entrées en institution. Dans ce contexte, le patient âgé fragile doit être rapidement repéré, aidé, traité et surveillé afin d’éviter qu’il ne bascule dans la perte d’autonomie du fait de la survenue d’un événement pathologique médical, psychologique, environnemental ou social. Cet événement est habituellement à l’origine d’un syndrome gériatrique (voir Encadré) conduisant le

Traitement du diabète chez le patient âgé Les choix thérapeutiques vis-àvis du diabète s’appuient sur cette distinction schématique décrite dans le chapitre précédent. Nous verrons plus loin qu’ils peuvent être modulés en fonction de facteurs propres au patient de façon à répondre au mieux à ses besoins réels. Il ne faut plus parler d’un équilibre glycémique choisi en fonction de “l’âge physiologique”, notion trop imprécise pour être utilisée en 2014. Des critères objectifs existent.

Chez un patient âgé vigoureux Le traitement ne diffère pas notablement de ce qui est proposé à un patient plus jeune porteur d’un diabète de type 2 d’autant que, libéré des obligations professionnelles, le patient âgé qui le souhaite a plus de facilités pour suivre scrupuleusement les conseils d’hygiène de vie (diététique et activité physique) que le patient adulte jeune. L’effet des mesures non médicamenteuses étant réel mais limité (4), les traitements oraux sont prescrits

Encadré - Définition des syndromes gériatriques. Les syndromes gériatriques sont un ensemble de manifestations cliniques et biologiques aspécifiques, communes à de nombreuses maladies d’organes identifiées ou non. L’intrication de plusieurs syndromes chez le même patient est fréquente. - Chutes, troubles de la marche et réduction de la mobilité - Fragilité - Dénutrition et sarcopénie - Altération de l’état général - Confusion, troubles cognitifs et dépression - Incontinence urinaire - Isolement familial ou social, faiblesse des revenus et maltraitance - Perte d’autonomie fonctionnelle et “difficulté de maintien à domicile”

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avec la même hiérarchie que chez le patient jeune : metformine, sulfamide puis un 3e ADO si besoin. L’insulinothérapie apparaît en cas d’inefficacité des ADO, si le patient perd du poids involontairement, à l’occasion d’un épisode aigu (infection sévère, chirurgie) ou quand survient une contre-indication aux ADO. Les mesures de prévention ciblent l’état des pieds, la pression artérielle, le taux de lipides circulants et les vaccinations. La réduction du risque vasculaire est aussi importante que le contrôle glycémique. Outre la fonction rénale toujours suivie de près, en particulier dans ce contexte, le médecin du patient diabétique âgé doit aussi être attentif aux risques de dénutrition, aux symptômes dépressifs, aux troubles cognitifs débutants et aux autres médicaments, afin d’éviter les accidents iatrogènes.

Chez un patient âgé en perte d’autonomie Même dans ces situations associant un âge avancé, des handicaps physiques de toutes origines et des fonctions cognitives souvent défaillantes, une activité physique modérée, adaptée aux possibilités du patient, tenant compte de ses préférences et des contreindications limite l’aggravation de la perte d’autonomie, même chez des nonagénaires (5). Il faut tolérer une alimentation-plaisir aux dépens des contraintes diététiques (4). Les ADO sont souvent contre-indiqués du fait de la comorbidité et l’insuline les remplace. Selon l’objectif glycémique recherché, un traitement de type basal-bolus s’impose rarement. Une insulinothérapie faite d’une seule injection par jour, de type NPH ou premix le matin, suffit souvent pour obtenir un équilibre glycémique satisfaisant quand l’objectif glycémique a été relevé. Il vaut mieux éviter les insulines

Repères en Gériatrie •Février 2014 • vol. 16 • numéro 131


SUJET ÂGé et diabète

d’action longue comme la glargine, responsable d’hypoglycémies nocturnes quand elle est le seul agent hypoglycémiant de tout le nycthémère. Les mesures de prévention des complications visent à éviter les plaies des pieds, les hypotensions orthostatiques et la dénutrition. Les hypo et hyperglycémies peuvent être facilement limitées quand le patient séjourne en EHPAD, sans pour autant viser un taux d’HbA1c à 9 % (6), valeur qui nous semble excessive dans un contexte où la présence d’une infirmière garantit la possibilité de contrôles glycémiques quotidiens. C’est probablement moins facile à domicile. Les vaccinations, le contrôle des douleurs et la vigilance vis-à-vis de la iatrogénicité des médicaments sont des objectifs tout aussi importants que l’équilibre glycémique. L’éducation des soignants représente une tâche importante du médecin, les connaissances sur le diabète et son équilibre étant de qualité très diverse selon les soignants.

Chez un patient fragile C’est un patient difficile à traiter car il peut être encore à son domicile et souhaite y rester, mais des dangers le menacent de toutes parts : ils sont liés à la comorbidité, à la perte d’autonomie physique et/ou cognitive, à la volonté d’aide de l’entourage. Un mauvais équilibre glycémique ou des malaises hypoglycémiques risquent de compromettre son maintien à domicile. Il faut exiger une ration glucidique quotidienne minimale, au moins égale à 200 g de glucides/ jour, répartis dans la journée, plus qu’un “régime” strict. L’insulinothérapie, quand elle est nécessaire, doit être simple pour éviter que la journée du patient ne soit rythmée par des passages d’infirmières irréguliers. L’association insuline-ADO lui redonne parfois un peu de liberté. Rappelons que la metformine peut être prescrite à condition de ne pas

Figure 1 - Critères de décision permettant de personnaliser les objectifs glycémiques chez le patient diabétique âgé, d’après (7).

dépasser la posologie de 1500 mg/j chez les patients dont la clairance de la créatinine est comprise entre 30 et 60 ml/min/1,73 m2 (6). Toutes les mesures de prévention vues précédemment s’appliquent à ce patient. En résumé, c’est donc un patient qu’il faut surveiller, aider et traiter, tous les événements intercurrents tels que chute, infection ou agression climatique devant le faire bénéficier d’une prise en charge rapide. La perte d’autonomie du patient lui permet de demander l’APA pouvant financer partiellement la préparation des repas ou le portage des repas à domicile.

Objectifs glycémiques Les objectifs glycémiques recommandés pour les patients âgés par la HAS en janvier 2013 (6) tiennent compte désormais de la description gériatrique des patients âgés. Il est souhaitable de rechercher un taux d’HbA1c inférieur ou égal à 7 % chez un patient vigoureux, inférieur ou égal à 8 % chez un patient fragile et inférieur à 9 %

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chez un patient très malade. Cette dernière recommandation est critiquable pour trois raisons. 1. Si le choix de la surveillance se porte sur le contrôle de l’HbA1c, l’abandon des glycémies capillaires ne permet pas de préciser les moments de la journée où les glycémies sont régulièrement trop basses ou trop élevées. Dans le premier cas, l’éventualité d’hypoglycémies sévères est possible même avec un taux d’HbA1c à 9 %. Dans le second, le risque de décompensation hyperglycémique n’est pas exclu car l’attention n’est plus attirée par des hyperglycémies apparaissant lors d’épisodes infectieux. 2. Un taux d’HbA1c à 9 % ne met pas le patient à l’abri des inconforts liés aux glycémies élevées, telles la polyurie ou les mycoses, ni d’une déshydratation évoluant vers une hyperosmolarité. 3. La personne âgée “très malade” est souvent en perte d’autonomie et bénéficie d’aide(s) humaine(s) (auxiliaire de vie, IDE) pouvant faciliter une surveillance régulière. 39


LE POINT SUR

Fort heureusement, ces recommandations peuvent être améliorées ou tempérées par celles de l’ADA-EASD de 2012 (Fig. 1) (7).

Conclusion Un patient diabétique sur quatre est un patient âgé de 75 ans ou plus. Les objectifs glycémiques, le traitement et la prise en charge globale doivent être individualisés en s’appuyant initialement sur la distinction gériatrique internationale entre les patients vigoureux, fragiles ou “très malades”. La diététique, l’activité physique et l’édu-

cation thérapeutique font toujours partie du traitement du DT2, adaptées aux possibilités et à la comorbidité du patient. L’éducation concerne aussi l’entourage, qu’il soit familial ou soignant. La metformine reste l’ADO de première ligne sauf contre-indication, en particulier rénale. L’insuffisance rénale est fréquente, conséquence d’un contrôle insuffisant de l’hypertension artérielle, et limite l’usage de tous les ADO. La réduction du risque cardiovasculaire doit être l’objectif principal du traitement. La décision d’insulinothérapie résulte, comme chez le patient plus jeune,

de l’intolérance ou de l’inefficacité des ADO, d’une perte de poids, d’une insuffisance rénale ou de la survenue d’une affection aiguë. L’insulinothérapie peut rester associée à la metformine ou au répaglinide. Le risque hypoglycémique est réel mais ne doit pas être un alibi pour tolérer des glycémies élevées, sources d’inconfort pour le patient et de décompensation du diabète. n

Mots-clés : Patient âgé, Diabète, Objectifs glycémiques, Traitement, Fragilité, Perte d’autonomie

Bibliographie 1. Fagot-Campagna A, Romon I, Fosse S, Roudier C. Prévalence et incidence du diabète, et mortalité liée au diabète en France – Synthèse épidémiologique. In : Institut de Veille Sanitaire, éd. Saint-Maurice (Fra), 2010 ; 12p. 2. Fried LP, Tangen CM, Walston J et al. Frailty in older adults: evidence for a phenotype. J Gerontol A Biol Sci Med Sci 2001 ; 56 : M146-156. 3. Michel J-P. Vers une définition consensuelle de la sarcopénie. La sarcopénie. Paris: Springer Healthcare, 2013 ; 46-52. 4. Constans T, Lecomte P. Non pharmacological treatments in elderly diabetics. Diabetes Metab 2007 ; 33 : S79-86. 5. Fiatarone MA, O’Neill EF, Ryan ND et al. Exercise training and nutritional supplementation for physical frailty in very elderly people. N Engl J Med

1994 ; 330 : 1769-1775. 6. Avis n°2013.0069/AC/SBPP du 11 septembre 2013 du Collège de la Haute autorité de santé relatif au projet de mémo sur la stratégie médicamenteuse du contrôle glycémique du diabète de type 2 : situations cliniques particulières 2013. http://www.has-sante.fr 7. Société francophone du Diabète : Présentation de la traduction par la SFD de la prise de position émise par l’Association américaine du Diabète (ADA) et l’Association européenne pour l’Étude du Diabète (EASD) sur la prise en charge de l’hyperglycémie chez les patients diabétiques de type 2 : une stratégie centrée sur le patient. Paris, 2012. http://www. sfdiabete.org

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LE POINT SUR

2 Chirurgie de l’obésité de

la personne de plus de 65 ans Le point de vue du gériatre

n Rechercher une perte de poids peut être, chez le sujet âgé obèse, un moyen de prévenir l’entrée dans la dépendance. L’évaluation gérontologique va permettre de repérer les sujets qui vont bénéficier de cet amaigrissement. Les résultats de la chirurgie de l’obésité après 60 ans sont très supérieurs à ceux obtenus après restriction calorique, à la fois sur la perte de poids et la régression des comorbidités. Le risque apparaît acceptable au regard des bénéfices attendus. Toutefois, il est indispensable de préciser les bénéfices de la chirurgie de l’obésité chez le sujet de plus de 65 ans en se basant sur des indicateurs spécifiquement gériatriques (autonomie, performances fonctionnelles). Il est également souhaitable de disposer de données relatives au devenir à long terme des sujets opérés, devenir fonctionnel mais également cognitif.

*Gérontopôle, Centre hospitalier universitaire de Toulouse

Hétérogénéité de la population âgée La population âgée constitue un groupe très hétérogène d’un point de vue chronologique mais également physiologique. L’âge chronologique définit la personne âgée mais avec des seuils variables selon les points de vue : • plus de 60 ans pour l’OMS et pour les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS) relatives à la chirurgie de l’obésité ; • plus de 65 ans pour la plupart des études scientifiques ; • au-delà de 75 ans pour les sociétés gériatriques. Une personne âgée peut donc avoir 60 ans, ou être centenaire… Pour le gériatre, un patient âgé est naturellement très âgé, très dépendant et polypathologique, son risque nutritionnel majeur est la dénutrition. Ce constat est en ac-

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L’

obésité est une pathologie fréquente chez le sujet âgé : elle concerne plus de 18 % des sujets de plus de 65 ans (15 % chez l’adulte). Les comorbidités associées à l’excès de poids (diabète, hypertension artérielle, troubles respiratoires, arthrose, incontinence…) sont également plus fréquentes après 65 ans (1). L’obésité constitue par ailleurs, chez le sujet âgé, un facteur de risque majeur de dépendance, de perte d’autonomie et ce d’autant plus que l’excès de masse grasse s’associe à une sarcopénie (perte de masse et de fonction musculaires) (2). Dans l’absolu, le sujet âgé obèse devrait donc être pris en charge et une perte de poids recherchée.

Dr Anne Ghisolfi*

cord avec les recommandations de la HAS relatives à la prise en charge de l’obésité de la personne âgée (3). Pourtant, la majorité des personnes de plus de 65 ans vivent à domicile, même si un certain nombre d’entre elles sont fragiles et à risque d’entrée dans la dépendance. Ce risque peut être diminué par la mise en place de 41


LE POINT SUR

programmes de prévention ciblés, par exemple pratique d’une activité physique chez le sujet sédentaire. Le concept de fragilité rend toute sa force à la prévention de la dépendance chez le sujet âgé ; la prise en charge de l’obésité, facteur de fragilité, n’apparaît plus comme un contresens en gériatrie.

Pourquoi ne pas traiter tous les sujets âgés obèses ? L’hétérogénéité de la population âgée est également de mise pour la population âgée en excès de poids. Un sujet âgé obèse peut être “simplement obèse” et très semblable à un sujet jeune ; ou être sarcopénique, à haut risque de perte d’autonomie (2) ; ou bien dénutri ; ou enfin polypathologique, atteint de maladie d’Alzheimer à un stade sévère et d’insuffisance cardiaque. L’évaluation gérontologique explore les différents domaines de la santé du sujet âgé : nutritionnel, mais aussi physique, social, cognitif et permet de préciser l’état de santé du sujet. Elle aide à définir pour chacun un projet thérapeutique adapté : • traitement de la dénutrition chez le sujet dénutri ; • alimentation-plaisir non restrictive chez le sujet atteint de maladie d’Alzheimer à un stade sévère ; • objectif de gain de masse musculaire pour le patient sarcopénique ; • perte de poids chez le sujet obèse “simple”. Les relations entre obésité et mortalité du sujet âgé restent toutefois un facteur limitant de la prise en charge de l’obésité en gériatrie. L’excès de poids apparaît un facteur de protection en présence d’une pathologie hypercatabolisante et la perte de poids au cours d’une maladie semble être un facteur in42

dépendant de surmortalité. Après 70 ans, un IMC compris entre 30 et 35 est ainsi associé à la mortalité la plus faible. Au-delà, elle augmente cependant pour rejoindre le risque des IMC bas. (4). Il existe peu de données étudiant les conséquences en termes de mortalité de la perte de poids intentionnelle. Les durées de suivi sont courtes, et les sujets le plus souvent jeunes (moins de 70 ans). Il semblerait cependant que l’amaigrissement volontaire ne soit pas associé à une surmortalité (5).

Restriction calorique chez le sujet âgé obèse Deux méta-analyses récentes ont montré que la restriction calorique permet, chez le sujet âgé, d’obtenir une perte de poids moyenne de 3 kg, modeste donc, mais statistiquement significative. L’amaigrissement obtenu s’accompagne de bénéfice en termes de diabète de type 2, d’insuffisance coronarienne et d’arthrose. Le risque le plus important est la perte de masse musculaire et osseuse induite par la restriction calorique. Associée à un programme d’exercice physique en endurance et/ou avec renforcement musculaire, la perte de poids obtenue permet une amélioration des performances fonctionnelles et épargne la masse musculaire (6-7). L’association d’un programme d’activité physique à la restriction calorique doit donc être systématiquement proposée. Le risque de fracture du col du fémur après amaigrissement volontaire reste cependant élevé (8). La chirurgie de l’obésité permet,

chez l’adulte jeune, d’obtenir une perte de poids et une réduction des comorbidités et de la mortalité très supérieures à la restriction énergétique. Chez le sujet de plus de 60 ans, elle est autorisée en France depuis 2009 mais non recommandée. L’indication doit être portée au cas par cas après évaluation du rapport bénéfice/risque (9).

Bénéfice de la chirurgie bariatrique chez le sujet âgé Les données scientifiques disponibles chez le sujet âgé sont relativement abondantes, même si le nombre de sujets de plus de 65 ans est parfois restreint et l’âge des sujets peu avancé. L’analyse des données issues du registre de la Société française et francophone de Chirurgie de l’Obésité (SFFCO) montre, en accord avec la littérature (1, 10), une perte de poids moyenne après chirurgie significativement moindre chez le sujet âgé comparativement à l’adulte jeune. Après un an, la perte de poids moyenne du sujet âgé opéré est de 20 % avec la technique de l’anneau gastrique, 25 % après gastrectomie longitudinale et 30 % après bypass gastrique (Fig. 1). Ces résultats restent toutefois très largement supérieurs à ceux obtenus chez le sujet âgé après restriction calorique, la perte de poids étant dans ce cas limitée à 2 à 3 %. L’amaigrissement semble se maintenir dans le temps (au-delà de cinq ans), même si le nombre de patients perdus de vue et au final la faiblesse de l’échantillon diminuent la force de ces résultats. Aucune étude n’est à notre connaissance disponible à plus long terme chez le sujet âgé, qui permettrait de

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SUjet âgé et diabète

préciser leur aptitude à maintenir à un âge plus avancé la modification des habitudes alimentaires et donc la perte de poids.

A : Âge < 40 ans 40 Perte de poids (%) 10 20 30

0

Comme il en est du poids, la diminution des comorbidités et de la consommation médicamenteuse apparaît moindre chez le sujet âgé comparativement au sujet jeune mais reste cliniquement très significative.

0

Perte de poids (%) 10 20 30

40

B : Âge 40-59 ans

0

3

6 mois

9

12

0

3

6 mois

9

12

40

C : Âge ≥ 60 ans

Il n’existe pas à notre connaissance de travaux évaluant l’impact de la chirurgie sur des indicateurs spécifiquement gériatriques tels que l’autonomie, les performances physiques et le risque d’entrée dans la dépendance. Or, les bénéfices attendus peuvent être sensiblement différents dans les deux groupes d’âge. L’espérance de vie est au moins, d’un point de vue théorique, beaucoup plus limitée chez le sujet âgé par comparaison à l’adulte jeune ; la prévention du risque cardiovasculaire n’a pas la même puissance chez le sujet âgé. Par ailleurs, le maintien de l’autonomie et la pré-

AG : anneau gastrique BGRY : by-pass gastrique, Roux-en-Y SG : sleeve gastrectomie

0

Ces résultats très séduisants et superposables (même si à un moindre degré) aux données disponibles chez le sujet jeune doivent cependant être nuancés. Les données disponibles concernent de très jeunes sujets âgés, le plus souvent entre 60 et 70 ans. Les durées de suivi restent courtes, moins de deux ans en moyenne. Les indicateurs choisis pour juger du bénéfice du traitement chirurgical sont ceux de l’adulte jeune : impact sur les comorbidités, diminution du nombre de médicaments et amélioration de la qualité de vie.

AGB RYGB SG

Perte de poids (%) 10 20 30

La qualité de vie des sujets âgés opérés semble de la même manière améliorée dans tous les domaines.

0

3

6 mois

9

12

Figure 1 - Perte de poids après chirurgie en fonction de l’âge (données issues du registre de la SOFFCO).

vention du risque d’entrée dans la dépendance, permettant de maintenir une trajectoire de vieillissement réussi (puisque les sujets ont été retenus comme pouvant bénéficier de la chirurgie), sont des indicateurs gériatriques de première importance. L’intérêt d’une perte de poids importante chez le sujet âgé doit donc également être évalué sur ces paramètres, par le suivi des performances physiques, de la force musculaire, de la vitesse de marche et des échelles d’autonomie validées.

Risque de la chirurgie de l’obésité chez le sujet âgé Les données les plus anciennes retrouvaient une surmortalité et des complications de la chirurgie plus marquées chez les sujets âgés, et ont été à l’origine des

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recommandations de la HAS en 2009. Ainsi, une étude rétrospective de patients opérés entre 1997 et 2002 aux États-Unis retrouve une mortalité des plus de 65 ans à trente jours de 4,8 % versus 1,7 % chez les moins de 65 ans, à quatre-vingt-dix jours de 6,9 % versus 2,3 % et à un an de 11,1 % versus 3,9 %. Cette même étude a montré que la surmortalité liée à l’âge est limitée par un volume d’actes chirurgicaux pratiqués élevé (11). Cette différence péjorative s’atténue dans les travaux récents, au moins pour la mortalité à court terme : une étude multicentrique incluant plus de 48 000 patients recrutés entre 2005 et 2009 dans les centres experts américains ne retrouve pas chez le sujet âgé de surmortalité statistiquement significative à trente jours postopératoires ; le risque de complication postchirurgicale n’apparaît pas 43


LE POINT SUR

plus élevé chez le patient âgé. En revanche, la durée d’hospitalisation après la chirurgie est prolongée après 65 ans (12). Les données françaises issues du registre de la SOFFCO montrent qu’à un an de suivi après by-pass, les complications chirurgicales (perforations intestinales, occlusion, abcès…) sont significativement plus fréquentes chez le sujet de plus de 60 ans : 12,3 % versus 3,8 % chez l’adulte jeune ; p = 0,03. Les mêmes résultats sont retrouvés pour les complications médicales (thromboses veineuses, infection, dénutrition…) : 7 % versus 0,8 % ; p = 0,01. L’augmentation du nombre de complications en fonction de l’âge n’est pas retrouvée avec les deux autres techniques chirurgicales (gastrectomie longitudinale et anneau gastrique) de manière statistiquement significative (Fig. 2). Le risque apparaît donc plus important chez le sujet âgé, sujet porteur de comorbidités plus lourdes. Ce risque est toutefois diminué dans les centres pratiquant un fort volume d’interventions et apparaît lié à la technique opératoire (risque plus élevé après by-pass). Il peut sembler donc, au moins à court et à moyen terme, être acceptable en regard des bénéfices jugés sur la réduction des comorbidités et de l’amélioration de la qualité de vie. Cependant, les conséquences à long terme chez le sujet âgé ne sont pas à notre connaissance prises en considération. La chirurgie va modifier la prise alimentaire, entraînant en l’absence même de pathologie un risque de défaut de couverture des besoins nutritionnels en acides aminés et micronutriments, cruciaux chez le sujet âgé. Ses effets viennent s’ajouter aux conséquences nutritionnelles 44

Figure 2 - Complications après chirurgie en fonction de l’âge (données issues du registre de la SOFFCO).

du vieillissement : modification de l’appétit, des phénomènes de satiété. Les conséquences du vieillissement, peu perceptibles chez le “jeune” sujet âgé candidat à la chirurgie vont s’accentuer au fur et à mesure de l’avance en âge. Les conséquences à long terme, après dix ans, restent inconnues. Un déficit chronique est susceptible d’avoir des conséquences sur l’état de santé, le fonctionnement cérébral, les performances physiques et est un facteur de fragilité reconnu (13). L’amaigrissement recherché est responsable d’une perte de masse musculaire inévitable, même si limitée par un programme d’activité physique adapté. La perte de muscle peut aggraver la sarcopénie caractéristique du sujet âgé et le risque d’entrée dans la dépendance (2). Enfin, les pathologies majorant les besoins nutritionnels (maladies hypercatabolisantes, cancers) ou modifiant le comportement alimentaire (maladie d’Alzheimer) sont fréquentes chez le sujet âgé et leur prévalence augmente avec l’âge. Le patient opéré ne pourra, du fait de la chirurgie, répondre à la majoration des besoins protéinoénergétiques requis et le risque de dénutrition sera majeur, associé à des difficultés importantes de prise en charge de la dénutrition.

Conclusion Le rapport bénéfice-risque de la chirurgie de l’obésité apparaît favorable chez le sujet âgé éligible après évaluation gérontologique. Cependant, les indicateurs d’efficacité et/ou de risque sont ceux de l’adulte jeune et ne prennent pas en compte les spécificités gériatriques. Des études complémentaires utilisant des indicateurs d’autonomie et de performances fonctionnelles sont indispensables afin de préciser le bénéfice de la chirurgie après 60 ans. Parallèlement, des travaux de suivi à long terme, évaluant les sujets après 70-75 ans, permettraient de préciser les interactions potentiellement délétères des conséquences du vieillissement, des pathologies hypercatabolisantes plus fréquentes et de la chirurgie bariatrique sur la couverture des besoins nutritionnels, le fonctionnement d’organes tels que le cerveau ou le muscle. n

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Mots-clés : Obésité, Chirurgie, Sujet âgé

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