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Maladie d’Alzheimer et démences

« Un risque possible dans le futur : de moins en moins de clinique et de plus en plus de biologie et d’imagerie. » Mathieu Ceccaldi

Service de Neurologie et de Neuropsychologie, Pôle de Neurosciences Cliniques et CMRR PACA Ouest, CHU Timone, Marseille

a-t-il eu une évolution des concepts, au cours des toutes dernières Y années, dans votre domaine ? • L’évolution des critères de maladie d’Alzheimer, avec une démarche diagnostique enrichie par les marqueurs de la maladie, et moins subordonnée au stade de l’altération fonctionnelle et de la dépendance qu’elle entraîne.

• La volonté d’une approche plus “intégrée” de la prise en charge des patients et de l’aide aux aidants, en favorisant la communication, les liens fonctionnels et surtout la cohérence de l’action entre les mul-

tiples acteurs et structures susceptibles d’intervenir dans leur parcours. Le Plan Alzheimer 2008-2012 a indéniablement œuvré dans ce sens, notamment par la création de la fonction de Gestionnaire de cas.

Quels ont été les grands changements dans votre pratique au cours des dernières années ? • L’utilisation du dosage des biomarqueurs du LCR qui nous permet, dans les démences atypiques - par leur profil clinique ou leur évolution - ainsi que dans les démences d’installation précoce, de conforter le diagnostic positif de maladie d’Alzheimer ou, au contraire, de nous orienter vers d’autres étiologies. • Les avancées de la génétique, en particulier dans le domaine des dégénérescences lobaires frontotemporales : elles sont la source potentielle d’espoirs thérapeutiques

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futurs, mais aussi, au présent, augmentent les responsabilités et alourdissent la charge des praticiens qui sont les interlocuteurs directs des familles des patients. • La création d’unités de SSR spécifiquement dédiés à la prise en charge des patients présentant des troubles du comportement : les Unités Cognitivo-Comportementales. • La collaboration avec les Gestionnaire de cas et les MAIA pour les patients à domicile en “situation complexe”.

«  Les biomarqueurs du LCR nous permettent, dans les démences atypiques ou d’installation précoce, de conforter le diagnostic de MA ou de nous orienter vers d’autres étiologies. »

Neurologies • Janvier 2014 • vol. 17 • numéro 164


Maladie d’Alzheimer et démences

Quelles sont, pour vous, les avancées attendues pour les 2 ou 3 prochaines années dans votre domaine ? • L’arrivée dans le soin courant du PET amyloïde qui complèterait l’arsenal des outils diagnostiques dans certains cas difficiles ou ambigus. • La mise à disposition de trai-

tements symptomatiques (IACHE) plus fortement dosés. • L’identification de nouveaux gènes de susceptibilité dans la maladie d’Alzheimer à forme sporadique.

• La mise en place (et les premiers résultats) d’essais thérapeutiques ayant intégré l’utilisation de biomarqueurs de pathologie dans leurs critères d’inclusion.

Quels sont les problèmes qui vous semblent encore non résolus et les grands enjeux pour les années futures ? • Identifier des marqueurs de pronostic (de “stade”) car les biomarqueurs actuellement disponibles centrés sur le diagnostic de la pathologie cérébrale ne permettent pas de prédire à l’échelle individuelle l’évolution clinique. • Disposer de modèles animaux plus en phase avec la complexité physiopathologique et la multi-

plicité des facteurs de la maladie d’Alzheimer du sujet âgé. • Travailler d’avantage sur les traitements médicamenteux des troubles du comportement perturbateurs. • Mettre en place des essais thérapeutiques avec des associations de molécules susceptibles d’agir sur des composants distincts de la

cascade pathologique de la maladie d’Alzheimer. Un risque : de moins en moins de clinique et de plus en plus de biologie et d’imagerie ! Une nécessité : mieux définir et valoriser davantage la place du médecin généraliste dans la prise en charge des patients MA. l

Liens d’intérêt avec l’industrie pharmaceutique des dix dernières années : - Activités de conseil : Novartis, Nutricia, Exonhit, GE, Lundbeck, Ipsen, Pharnext, Lilly - Prestations de formation scientifique ou d’activités de recherche : Novartis, Lundbeck, Jansen-Cilag, Astra-Zeneca, Eisaï, Pfizer, Wyeth, Servier, Noscira, Sanofi, Lilly, Danone Research, TEVA

Correspondance Pr Mathieu Ceccaldi Service de Neurologie et de Neuropsychologie Pôle de Neurosciences Cliniques et CMRR PACA Ouest CHU Timone - Boulevard Jean-Moulin - 13385 Marseille Cedex 5 E-mail : mathieu.ceccaldi@ap-hm.fr

Neurologies • Janvier 2014 • vol. 17 • numéro 164

Mots-clés : Démences, Maladie d’Alzheimer, Biomarqueurs, LCR, Génétique, Dégénérescences lobaires fronto-temporales, Troubles du comportement, PET amyloïde, Gènes de susceptibilité, Pronostic

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« L’un des apports importants : la possibilité de mesurer in vivo les biomarqueurs de la maladie d’Alzheimer. » Bernard Croisile Service de neuropsychologie, Hôpital neurologique, Bron-Lyon a-t-il eu une évolution des concepts, au cours des toutes dernières Y années, dans votre domaine ? L’année 2011 a vu apparaître une nouvelle définition de la maladie d’Alzheimer, définition entérinant l’existence de formes précliniques et de formes symptomatiques non démentielles. Le début d’une maladie d’Alzheimer n’est plus seulement amnésique, il peut être comportemental

(variante frontale de maladie d’Alzheimer), aphasique (aphasie primaire progressive logopénique) agnosique (variante visuelle de maladie d’Alzheimer). Il en ressort que la maladie d’Alzheimer n’est plus une démence amnésique dans un cadre clinico-neuropathologique mais

Quels ont été les grands changements dans votre pratique au cours des dernières années ? L’un des apports importants à notre pratique a été la possibilité de mesurer in vivo les biomarqueurs de la maladie d’Alzheimer, dans le LCR et bientôt en imagerie moléculaire amyloïde.

une maladie biologique à expressions cliniques multiples. L’année 2011 fut aussi celle d’une nouvelle définition des formes comportementales de démences frontotemporales, celle-ci affine leur diagnostic clinique avec des critères plus pertinents et plus sensibles.

Quelles sont, pour vous, les avancées attendues pour les 2 ou 3 prochaines années dans votre domaine ? L’attente cruciale est celle des résultats des essais d’immunothérapie anti-amyloïde, aux stades infra-cliniques ou très débutants de maladie d’Alzheimer. En cas d’échec, il faudra revoir toute notre conception physiopathologique et ouvrir de nouvelles pistes qui seront loin de donner des résultats avant longtemps. De toute façon, le plan Alzheimer américain s’est donné jusqu’en 2025 pour trouver un traitement “efficace”.

Quels sont les problèmes qui vous semblent encore non résolus et les grands enjeux pour les années futures ? Deux questions se posent : • Quels sont les liens exacts entre le processus amyloïde et les dégénérescences neurofibrillaires ? • Quel sera l’impact réel des mesures de prévention des démences lors d’études interventionnelles ? Correspondance Dr Bernard Croisile Service de neuropsychologie – Hôpital neurologique 59 boulevard Pinel – 69677 Bron Cedex E-mail : bernard.croisile@wanadoo.fr

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Mots-clés : Démences, Maladie d’Alzheimer, Démences fronto-temporales, Physiopathologie, Biomarqueurs, Immunothérapie anti-amyloïde

Neurologies • Janvier 2014 • vol. 17 • numéro 164


Maladie d’Alzheimer et démences

« La recherche devrait permettre une meilleure compréhension du rôle de chaque acteur de la cascade amyloïde. » Catherine Thomas-Antérion

Résidence Plein Ciel Lyon ; Laboratoire EMC EA3082, Université Lyon 2

a-t-il eu une évolution des concepts, au cours des toutes dernières Y années, dans votre domaine ? La définition de la maladie a évolué avec le développement des marqueurs biologiques de la maladie (LCR, imagerie fonctionnelle avec marqueurs amyloïdes), permettant son dia-

gnostic dès le stade prodomal et permettant de « repérer les sujets à risque » aux phases précliniques de la maladie, notamment en vu d’essais thérapeutiques.

Parallèlement, sont apparus des critères cliniques de MCI, à distinguer de ceux utilisés en recherche (pour ceux-ci – et seulement pour ceux-ci –, l’usage des marqueurs biologiques est recommandé).

Quels ont été les grands changements dans votre pratique au cours des dernières années ? • En clinique : Aucun changement n’est à noter dans le diagnostic de MCI : en cas de négativité (en cas de marqueurs biologiques positifs, on ignore le délai évolutif vers la maladie) et en l’absence de traitement préventif, seuls les critères cliniques sont utilisés. En revanche, nous avons davantage recours aux marqueurs biologiques dans des tableaux de ”troubles cognitifs majeurs”1 aty-

piques, dans la DFTc et dans la MA présénile avant d’engager une étude génétique proposée dans la MA dès qu’un sujet de moins de 60 ans a un apparenté de même âge atteint. • En recherche : On note le développement d’études de suivi de sujets en population générale, de plaintifs, de sujets MCI en ayant recours à des marqueurs biologiques ou d’imagerie.

«  Nous avons désormais davantage recours aux marqueurs biologiques dans des tableaux de “troubles cognitifs majeurs” atypiques, dans la DFTc ou dans la MA présénile. »

1. terme qui remplace désormais celui de démence dans le DSM V (2013).

Quelles sont, pour vous, les avancées attendues pour les 2 ou 3 prochaines années dans votre domaine ? Nous espérons la découverte de nouveaux gènes, notamment dans la DFTc. Le développement de marqueurs d’imagerie concernant Tau et l’utilisation des marqueurs d’imagerie Neurologies • Janvier 2014 • vol. 17 • numéro 164

généralisée en clinique sont attendus, de même que le développement de marqueurs biologiques moins coûteux et moins invasifs. Et nous avons besoin de règles éthiques claires quant au recours

au diagnostic biologique pour les ”troubles cognitifs légers” et en amont. Enfin, il ne faut pas négliger le diagnostic et l’étude des autres maladies apparentées. 29


Maladie d’Alzheimer et démences

Quels sont les problèmes qui vous semblent encore non résolus et les grands enjeux pour les années futures ? Les enjeux pour l’avenir me semblent être les suivants : • la recherche devrait permettre une meilleure compréhension du rôle de chaque acteur de la cascade amyloïde ; • il sera nécessaire de comprendre

les formes de maladie du grand âge (et les liens avec les FDR vasculaires) ; • nous attendons le développement de traitements préventifs ; • il faudra définir la place respective des différents traitements non

Correspondance Dr Catherine Thomas-Antérion - Résidence Plein Ciel – 75 rue Bataille – 69008 Lyon E-mail : c.thomas-anterion@orange.fr

médicamenteux, et leur place en prévention ou dans le soin ; • et il ne faudra pas abandonner les recherches au stade de maladie d’Alzheimer avérée... l

Mots-clés : Démences, Maladie d’Alzheimer, MCI, Biomarqueurs

rendez-vous de l’industrie Neuropédiatrie

Sclérose en plaques

Crises convulsives : l’arrivée de Buccolam®

AMM pour Sativex®

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iroPharma a annoncé la mise à disposition de Buccolam® (midazolam, solution buccale) indiqué chez les enfants et les adolescents âgés de 3 mois à moins de 18 ans, souffrant de crises convulsives aiguës et prolongées. Chez les nourrissons de 3 à 6 mois, le traitement par Buccolam® doit être administré en milieu hospitalier, afin d’assurer une surveillance et de disposer d’un équipement de réanimation. Ce traitement ne doit être utilisé par les parents ou accompagnants que lorsque le diagnostic d’épilepsie a déjà été posé. Buccolam® est présenté en dose individuelle pour administration buccale sous forme de seringues pré-remplies, spécifiques en fonction de l’âge. L’administration se fait dans la cavité buccale, dans l’espace situé entre les joues et les gencives. Quatre études cliniques ont montré que l’efficacité et la rapidité d’action du midazolam buccal étaient comparables à celles de l’actuel traitement standard, administré par voie rectale, pour enrayer les crises convulsives pédiatriques. n

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ANSM vient d’accorder au laboratoire Almirall une AMM pour Sativex®, dérivé de cannabis en spray buccal comprenant deux molécules : le tétrahydrocannabinol (THC) et le cannabidiol. Son indication est limitée au traitement symptomatique de la spasticité liée à la sclérose en plaques des patients adultes, résistante aux autres traitements. Le traitement ne pourra être être initié que par un neurologue ou un médecin rééducateur hospitalier pour une durée de six mois. Sativex® est classé parmi les médicaments stupéfiants et sera donc soumis à la limitation de délivrance de 28 jours (il sera disponible en pharmacie de ville), mais la délivrance pourra être reconduite avec une ordonnance d’un médecin généraliste. Cette spécialité, qui est jusqu’à présent délivrée en France par ATU, est déjà commercialisée dans 17 pays européens, notamment en Allemagne et au Royaume-Uni. Il reste à attendre le prix et les modalités de remboursement... n

Neurovasculaire Sclérose en plaques

Novartis lance l’appli “SEP Agenda”

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u-delà de son engagement en recherche et développement en neurologie et la mise à disposition de traitements, Novartis souhaite répondre aux attentes et besoins des patients et enrichit son programme d’informations SEP & Vous (accessible via le lien www.sep-etvous.fr) en lançant “SEP Agenda”. Cette application mobile pratique et gratuite a été développée avec l’association de patients Notre sclérose pour aider le patient au quotidien dans la gestion de sa maladie. Elle permet de mieux appréhender tous les aspects quotidiens de la pathologie et faciliter ainsi le dialogue avec le(s) différent(s) spécialiste(s). Le patient peut paramétrer les prises de médicaments, planifier les rendez-vous médicaux sur un calendrier (qui se synchronise avec celui du smartphone) et les préparer grâce à des conseils pratiques (documents à apporter au médecin, questions à poser). n

Demande d’AMM pour l’edoxaban

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aiichi Sankyo a annoncé le dépôt d’une demande d’AMM auprès de l’Agence européenne du médicament pour l’edoxaban (inhibiteur direct du facteur Xa), nouvel anticoagulant par voie orale en une prise par jour, dans la prévention des accidents vasculaires cérébraux et des événements emboliques systémiques chez les patients souffrant de fibrillation atriale non valvulaire, ainsi que pour le traitement de la thrombose veineuse profonde ou de l’embolie pulmonaire et pour la prévention des récidives de maladies thromboemboliques veineuses symptomatique. Cette demande d’AMM repose sur les résultats des études ENGAGE AF-TIMI 48 et Hokusai-VTE, vastes études comparatives ayant inclus respectivement 21 105 et 8 292 patients. Au japon, la demande d’AMM a été déposée avec le nom de marque Lixiana® (edoxaban, hydrate de tosilate). n


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