Pathologies du motoneurone
« La prise en charge des patients SLA en centre spécialisé : un très grand progrès. » Jean-Philippe Camdessanché
Centre SLA de Saint-Etienne
a-t-il eu une évolution des concepts, au cours des toutes dernières Y années, dans votre domaine ? Concernant les maladies du motoneurone et la sclérose latérale amyotrophique (SLA), le caractère multifactoriel de l’origine de ces pathologies est un concept qui a maintenant quelques années.
Pour autant, cette réalité a pris une ampleur importante à la lumière des nombreux travaux de génétique, notamment suite à la découverte de la fréquente mutation pathogène C9orf72 ou au vu
des nombreux travaux illustrant le rôle de l’inflammation dans la mort du motoneurone. Ainsi le concept de neurodégénérscence a quelque peu été bousculé !
Quels ont été les grands changements dans votre pratique au cours des dernières années ? Sans l’ombre d’une hésitation, la prise en charge des patients SLA en centre spécialisé a été un très grand progrès. Il est sans aucun doute important d’utiliser quelques mots de ce texte pour rendre hommage et remercier l’association de patients ARSla qui a été un acteur essentiel dans la création des centres SLA en exerçant la pression qu’il fallait sur notre gouvernance.
Les directives données aux centres ont été appliquées : 1. améliorer l’accès au diagnostic et accompagner l’annonce ; 2. réunir et organiser l’interdisciplinarité nécessaire au suivi des patients ; 3. assurer le transfert des connaissances et des savoir-faire auprès des acteurs de proximité et mettre en œuvre des moyens nécessaires
sur le lieu de vie ; 4. participer à la collecte des données et aux programmes de recherche. Quelques années plus tard, différentes équipes étudient leurs cohortes de patients SLA pris en charge en centre afin d’illustrer les bénéfices pressentis et d’améliorer encore ce qui doit l’être.
Quelles sont, pour vous, les avancées attendues pour les 2 ou 3 prochaines années dans votre domaine ? Trois quarts des patients SLA décèdent de complications repiratoires. Des techniques de stimulation diaphragmatique ont vu le jour chez les traumatisés médullaires il y a quelques années.
Neurologies • Janvier 2014 • vol. 17 • numéro 164
Ces techniques ont pu être transposées aux patients SLA et, depuis un an, ont débuté les inclusions dans le cadre du projet hospitalier de recherche clinique RespiSTim SLA coordonné par le Docteur Jésus Gonzalez-Bermejo du centre
« La stimulation diaphragmatique, mise au point chez les blessés médullaires, est actuellement testée chez les patients SLA. » 51
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SLA de Paris. Ainsi, 74 patients pourront être équipés et l’impact de la technique sur le délai de recours à une ventilation non invasive étudié. Par ailleurs, l’étude d’une grande cohorte de patients SLA va commencer dans les mois qui viennent au sein des centres français. Cette cohorte, intitulée PULSE pour Pronostic valUe of biomarkers in amyotrophic Late-
« La cohorte PULSE va évaluer les critères cliniques, biologiques et génétiques prédictifs de l’évolutivité de la SLA. » ral Sclerosis & Endophenotypic study, se fixe pour but de définir des facteurs prédictifs de l’évolutivité de la SLA. Elle s’intéres-
sera notamment aux critères cliniques, biologiques et génétiques en cas de SLA en comparaison à des groupes contrôles. Tous les acteurs de la SLA espèrent que ce travail de grande ampleur permettra de mieux comprendre la maladie et d’affiner les protocoles de surveillance et les décisions de prise en charge thérapeutiques des patients SLA au plus près des réalités de la maladie.
Quels sont les problèmes qui vous semblent encore non résolus et les grands enjeux pour les années futures ? La SLA est une maladie dont le pronostic reste effroyable. Depuis le riluzole, aucune molécule n’a montré de clair bénéfice chez les patients. Les attentes des patients, des familles et des équipes soignantes concernent bien sûr la thérapeutique.
Compte tenu du caractère plurifactoriel de la SLA souligné plus haut, le choix des molécules ne ciblant qu’un processus pathologique est difficile. Si différents essais récents se sont soldés par des échecs, les
Correspondance Pr Jean-Philippe Camdessanché Service de Neurologie Hôpital Nord – CHU de Saint-Etienne 42055 Saint-Etienne Cedex 2 E-mail : j.philippe.camdessanche@chu-st-etienne.fr
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designs des essais ont utilisé des méthodologies souvent novatrices permettant de répondre aux questions à partir d’effectifs de patients moindre avec à la clé plus d’études possibles et plus d’hypothèses testées. l
Mots-clés : Motoneurone, Sclérose latérale amyotrophique, Génétique, Facteurs prédictifs, Complications respiratoires, Stimulation diaphragmatique, Prise en charge
Neurologies • Janvier 2014 • vol. 17 • numéro 164