Onko41 complet

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d www.onko.fr R e v u e

p l u r i d i s c i p l i n a i r e

e n

O n c o l o g i e

Urgences

Hypercalcémie maligne : diagnostic et prise en charge Pauline Soibinet, Dr Nicolas Jovenin

Perspectives

Apports des nanotechnologies dans la prise en charge du cancer : du dépistage au traitement Dr Zoher Merad-Boudia

Traitement

Prise en charge des glioblastomes : du traitement de première intention à la récidive tumorale Dr Athina Marantidou, Dr Antoine Carpentier

Zoom sur

Fatigue musculaire et cancer : approche physiologique Pr André-Xavier Bigard, Pr Michèle Beaudry, Pr Laurent Zelek

Les cancers des sinus et des fosses nasales sont très variés d’un point de vue histologique.

le point sur

Les formes histologiques des cancers des sinus Spécificités cliniques et thérapeutiques Par le Dr Antoine Moya-Plana Volume 5 • n° 41 • Octobre 2013 • 9 E • Cahier 1


Revue pluridisciplinaire en Oncologie

Directeur de la publication : Dr Antoine Lolivier Coordination scientifique : Dr Thierry Bouillet Chef du Service Rédaction : Odile Mathieu • Rédactrice : Charlène Catalifaud • Chef de Fabrication et de Production : Gracia Bejjani • ­Assistante de Production : Cécile Jeannin • Maquette et Illustration : Antoine Orry, Rémi Andrieux • Chef de ­publicité : Catherine ­Patary-Colsenet • Service abonnements : Claire Lesaint • Impression : Imprimerie de Compiègne - 60205 Compiègne oncologie générale Responsable éditorial : Thierry Bouillet (Bobigny), Didier Ammar (Marseille), Céline Bourgier (Villejuif), Eric Dudoit (Marseille), Paul Escure (Bobigny), Karen Kraeuter (Bobigny), Frédéric Selle (Paris), Marc Spielmann (Villejuif), Laurent Zelek (Bobigny) oncologie digestive

sommaire n Urgences Hypercalcémie maligne Diagnostic et prise en charge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 134 Pauline Soibinet, Dr Nicolas Jovenin

n Perspectives Apports des nanotechnologies dans la prise en charge du cancer Du dépistage au traitement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 138 Dr Zoher Merad-Boudia

Responsables éditoriaux : Jean-Didier Grangé (Paris), Gaëtan Des Guetz (Bobigny) Sophie Dominguez (Lille), Philippe Merle (Lyon) oncologie gynécologique et mammaire Responsable éditorial : Pierre Collinet (Lille) Katty Ardaens (Seclin), Bénédicte Comet (Lille), Paul Cottu (Paris), Eric Lambaudie (Marseille), Anne Lesoin (Lille), Olivier Romano (Lille), ­Richard Villet (Paris)

Octobre 2013 • Vol. 5 • N° 41 • Cahier 1

www.onko.fr

n le point sur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Les formes histologiques des cancers des sinus Spécificités cliniques et thérapeutiques

Pneumologie et oncologie Responsable éditorial : Emmanuel Martinod (Bobigny) Patrick Bagan (Argenteuil), Pierre-Yves Brillet (Bobigny), Laurent Brouchet (Toulouse), Jean Baptiste Chadeyras (Clermont-Ferrand), ­Kader Chouahnia (Bobigny), Bertrand De-Latour (Rennes), Hervé Dutau (Marseille), Pierre-Emmanuel Falcoz (Strasbourg), Sophie Jaillard (Lille), René Jancovici (Saint-Cloud), Jacques Jougon (Bordeaux), Christophe Lancelin (Brest), Christine Levy (Bobigny), Gilbert Massard (Strasbourg), Isabelle Monnet (Créteil), Jean-Marc Naccache (Bobigny), Dana Radu (Bobigny), Pierre Saintigny (Houston, USA), Agathe Seguin-Givelet (Bobigny), Pascal-Alexandre Thomas (Marseille), Yurdagul Uzunhan (Bobigny) uro-oncologie Comité éditorial : Stéphane Culine ­(Créteil), Alexandre de la Taille (Créteil), ­Christophe ­Hennequin (Paris), Bernard Malevaud (Toulouse), Catherine Mazerolles (Toulouse)

p. 142

Dr Antoine Moya-Plana

n Traitement Prise en charge des glioblastomes Du traitement de première intention à la récidive tumorale . . . . . p. 148 Dr Athina Marantidou, Dr Antoine Carpentier

n Zoom sur

Fatigue musculaire et cancer Approche physiologique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 151

Pr André-Xavier Bigard, Pr Michèle Beaudry, Pr Laurent Zelek

pharmacologie et oncologie Responsable éditorial : Vincent Launay-Vacher (Paris) Gaël Deplanque (Paris), François Lokiec (Paris), Johanna Wassermann (Paris) OnKo + est une publication ©Expressions Santé SAS 2, rue de la Roquette Passage du Cheval Blanc, Cour de Mai 75011 Paris Tél. : 01 49 29 29 29 - Fax : 01 49 29 29 19 E-mail : onkoplus@expressiongroupe.fr Site : www.onko.fr RCS Paris B 394 829 543 N° de Commission paritaire : 0414 T 89810 ISSN : 2101-9495 Mensuel : 10 numéros par an

n Bulletin d’abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

n Rendez-vous de l’industrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 137, 157

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OnKo+ est indexé dans la base Pascal.

p. 141

Crédit de couverture : © freshidea - Fotolia Cette publication comporte 2 cahiers : un cahier 1 (28 pages) et un cahier 2 (40 pages). Assemblés à cette publication : 2 bulletins d’abonnement (2 pages et 4 pages).


urgences Soins de support

Hypercalcémie maligne Diagnostic et prise en charge n

L’hypercalcémie est une des complications métaboliques les plus fréquentes en cancéro-

logie. Il est important d’y penser devant des signes cliniques souvent trompeurs, comme les nausées, qui l’accompagnent. En effet, l’hypercalcémie est une urgence médicale qui nécessite une hospitalisation et un traitement reposant sur l’association d’une hyperhydratation et l’administration de bisphosphonates intraveineux. Les préconisations du référentiel en Soins de support de l’AFSOS portant sur la prise en charge de l’hypercalcémie sont rappelées.

Une complication métabolique fréquente et grave du cancer L’hypercalcémie est une des complications métaboliques les plus fréquentes en cancérologie. Sa fréquence varie de 0,5 à 10,9 % (1). On estime qu’elle touche de 20 à 30 % des patients présentant un cancer à un stade avancé (2). Classiquement, les principaux cancers pourvoyeurs d’hypercalcémie maligne sont les cancers du sein, du poumon et le myélome multiple. Mais il est possible de l’observer dans les cancers du rein, les cancers gynécologiques, les lymphomes malins non hodgkiniens (LMNH), les cancers ORL, etc. (Tab. 1). L’hypercalcémie maligne est une urgence thérapeutique car son apparition peut engager le pronostic vital. Elle est, à elle seule, un facteur de risque de mortalité accrue chez le patient atteint de cancer (2).

*Institut Jean-Godinot, Reims

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Pauline Soibinet*, Dr Nicolas Jovenin*

Calcémie corrigée = (40 - albuminémie) x 0,02 + Ca sanguin Figure 1 - Formule de la calcémie corrigée.

Définitions et classification des hypercalcémies malignes L’hypercalcémie maligne se définit par une calcémie corrigée supérieure à 2,6 mmol/L. La calcémie donnée par le laboratoire d’analyse médicale doit être corrigée par un calcul simple (Fig. 1). En effet, le calcium plasmatique mesuré dépend de l’albumine sérique. Une fois ce calcul fait, on pourra alors classer les hypercalcémies en trois classes :

• légère : < 3 mmol/L ; • modérée : 3 à 3,5 mmol/L ; • sévère : > 3,5 mmol/L.

Physiopathologie L’hypercalcémie néoplasique peut être liée à deux mécanismes principaux (3) : • destruction osseuse des cellules tumorales par des facteurs protéolytiques locaux tels que le TNF, les interleukines ou les prostaglandines (mécanisme en rapport avec les métastases osseuses) ;

Tableau 1 - Fréquence de l’hypercalcémie en fonction du primitif (1). Primitif Fréquence Myélome multiple 21,2 - 33,0 % Cancer du poumon 6,8 - 16,0 % Cancer de l’œsophage 5,6 - 27,6 % Cancer du sein 5,3 - 22,8 % Lymphome non hodgkinien 4,1 - 30,0 % Carcinome rénal 4,0 - 12,7 % Leucémie 2,5 - 11,5 % Carcinomes de la tête et du cou 2,6 - 4,1 %

onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41


Hypercalcémie maligne

• sécrétion de facteurs humoraux par la cellule tumorale tels que la PTH release peptide (PTHrp), la PTH ou le calcitriol. Leur action entraîne une résorption osseuse ostéoclastique et une réabsorption tubulaire rénale du calcium. Il s’agit alors d’un syndrome paranéoplasique qui est plus fréquent dans les carcinomes bronchiques à petites cellules.

Asthénie Somnolence / Coma Troubles du comportement Polydipsie Nausées / Vomissements Douleurs abdominales Constipation

Polyurie

Présentation clinique Les signes cliniques sont polymorphes et souvent trompeurs. Ils peuvent être attribués à tort à la pathologie cancéreuse, aux métastases ou aux traitements. C’est pourquoi l’hypercalcémie maligne doit être systématiquement considérée comme un diagnostic potentiel des plaintes que présentent les patients en oncologie. Les principaux signes cliniques rassemblent des signes généraux (asthénie, fatigabilité musculaire, polyurie-polydipsie et déshydratation), des signes neurologiques

Fatigabilité musculaire

Figure 2 - Principaux signes cliniques de l’hypercalcémie.

(allant de la somnolence jusqu’au coma) et des troubles digestifs (nausées, vomissements ou constipation) (Fig. 2).

Prise en charge En cas d’hypercalcémie modérée

I

V1

II

V2

III

V3

AUR

QT court convexe diffus

à sévère (> 3 mmol/L), une hospitalisation en urgence est nécessaire, en unité de soins intensifs si possible. La réalisation d’un ECG à la recherche de signes de gravité est importante (Fig. 3). Le traitement repose ensuite sur une expansion volémique par

Rapport non confirmé

V4

AUL

V5

AUF

V6

Figure 3 - Les signes ECG de l’hypercalcémie : tachycardie, raccourcissement du QT en cupule, aplatissement de l’onde T, allongement de l’espace PR, troubles du rythme. onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41

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URGENCES

sérum physiologique associée à des bisphosphonates (3, 4). Outre le traitement symptomatique, la prise en charge repose également sur le traitement spécifique de la pathologie néoplasique.

La réhydratation L’hypercalcémie exerce une action diurétique, qui crée une déshydratation globale avec fuite du sodium dans les urines. L’hyperhydratation est donc le premier traitement à mettre en œuvre. La réhydratation se fait par voie intraveineuse selon les modalités suivantes : un minimum de 2 L de sérum physiologique 0,9 % par 24 h. Les bisphosphonates seront introduits 2 h après le début de la

réhydratation. Ceci permet une diminution de la calcémie de 0,4 à 0,6 mmol/L, mais rarement sa normalisation.

consignées dans le tableau 2 (6). Le zolédronate est à adapter à la fonction rénale (Tab. 3).

Autres traitements Les bisphosphonates Les bisphosphonates sont indiqués en cas d’hypercalcémie sévère (> 3,5 mmol/L) ou d’hypercalcémie modérée (> 3 mmol/L) symptomatique. Leur mécanisme d’action repose sur l’inhibition de la résorption osseuse. Les principales molécules utilisées sont : zolédronate, pamidronate et ibandronate (5). Leur délai d’action est de 4 jours, avec une baisse maximale de la calcémie à 7 jours. Leur administration se fait par voie intraveineuse, en 15 à 20 min. Les doses sont

La calcitonine fonctionne plus rapidement (entre 4 et 6 h), mais sa durée d’action est plus courte (2 à 3 jours) et son efficacité reste modérée. Elle peut cependant être utilisée à la phase aiguë en cas d’hypercalcémie sévère avec des symptômes graves, associée aux bisphosphonates, en attendant que ceux-ci agissent. La posologie recommandée est alors de 100 unités par voie sous-cutanée, trois fois par jour, pendant 24 à 48 h. Aucun autre traitement n’est à ce jour préconisé.

Tableau 2 - Doses de bisphosphonates (extraits des référentiels AFSOS, version validée du 03/12/2010 ) (6). Posologie et voie d’administration des bisphosphonates Dénomination commune internationale

Nom commercial

zolédronate

ZOMETA®

pamidronate

PAMIDRONATE®

ibandronate

BONDRONAT®

Posologie 4 mg dans 100 ml de NaCl à 0,9 % ou de glucose à 5 % pendant au moins 15 min 90 mg dans 500 ml de NaCl à 0,9 % ou de glucose à 5 % pendant au moins 4 h En cas d’hypercalcémie sévère (calcémie corrigée en fonction du taux d’albumine ≥ 3 mmol/L) : 4 mg dans 100 ml de NaCl à 0,9 % ou de glucose à 5 % pendant au moins 15 min

Voie d’administration IV IV

IV En cas d’hypercalcémie modérée (calcémie corrigée en fonction du taux d’albumine < 3 mmol/L) : 2 mg dans 100 ml de NaCl à 0,9 % ou de glucose à 5 % pendant au moins 15 min

Ces préconisations sont basées sur un consensus d’experts, issu d’une analyse de la littérature et de leurs pratiques. Elles peuvent être différentes des posologies recommandées dans le Vidal.

Tableau 3 - Adaptation de la posologie du zolédronate à la fonction rénale. Clairance de la créatinine (ml/min) Posologie recommandée > 60 ml/min 50 à 60 ml/min 40 à 49 ml/min 30 à 39 ml/min < 30 ml/min

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4 mg 3,5 mg 3,3 mg 3 mg Non recommandé

Points essentiels • Urgence métabolique • Y penser ! • Correction de la calcémie par l’albuminémie • Hypercalcémie sévère = ECG • Hyperhydratation + bisphosphonates

onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41


Hypercalcémie maligne

Surveillance La surveillance clinique et cardiologique, la surveillance de la calcémie et de la fonction rénale doivent être quotidiennes jusqu’à normalisation. L’hypercalcémie peut réapparaître et le traitement par bis-

phosphonates doit être répété toutes les 3 à 4 semaines.

Conclusion L’hypercalcémie est un trouble métabolique fréquent en oncologie, trop souvent négligé et qu’il faut penser à diagnostiquer. Le

traitement repose sur l’association d’une hyperhydratation et de bisphosphonates intraveineux. n

Mots-clés : Hypercalcémie, Urgence, Hyperhydratation, Bisphosphonates, Complication métabolique

Bibliographie 1. Lamy O. L’hypercalcémie maligne : une urgence palliative souvent négligée. InfoKara 2003 ; 18 : 11. 2. Stewart AF. Clinical practice. Hypercalcemia associated with cancer. N Engl J Med 2005 ; 352 : 373‑9. 3. Rosner MH, Dalkin AC. Onco-nephrology: the pathophysiology and treatment of malignancy-associated hypercalcemia. Clin J Am Soc Nephrol 2012 ; 7 : 1722‑9. 4. Witte RS, Koeller J, Davis TE et al. Clodronate. A randomized study in the treat-

ment of cancer-related hypercalcemia. Arch Intern Med 1987 ; 147 : 937‑9. 5. Major P, Lortholary A, Hon J et al. Zoledronic acid is superior to pamidronate in the treatment of hypercalcemia of malignancy: a pooled analysis of two randomized, controlled clinical trials. J Clin Oncol Off J Am Soc Clin Oncol 2001 ; 19 : 558‑67. 6. Meyer N et al. Hypercalcémie, urgence chez le patient atteint de cancer. Référentiels Inter-Régionaux en soins oncologiques de support. http://www. afsos.org/-Referentiels-Nationaux-.html.

rendez-vous de l’industrie Octobre rose

Sensibilisation au cancer du sein : Sandoz soutient les pharmaciens

S

andoz, division Médicaments Génériques du groupe Novartis, s’est mobilisé durant tout le mois d’octobre, en partenariat avec l’Institut Curie et l’association Europa Donna Forum, pour sensibiliser les femmes au cancer du sein (et notamment au dépistage) et accompagner les pharmaciens dans leur rôle d’acteur de santé publique. Un dispositif d’accompagnement comprenant des outils de communication et d’information a été mis en place dans les officines. Sandoz soutient également la web radio Radio Curie dont la première émission a été diffusée le 1er octobre. n Pour en savoir plus : www.sandoz.fr, www.curie.fr, www.europadonna.fr

Cancer cutané

Une solution thérapeutique pour le carcinome baso-cellulaire avancé

C

ancer cutané le plus fréquent, le carcinome baso-cellulaire (CBC) évolue dans 1 % des cas en une forme avancée pour laquelle il n’existait jusqu’à maintenant aucun traitement autorisé en France. Le médicament Erivedge® (vismodegib, laboratoire Roche) est une nouvelle solution thérapeutique pour les patients atteints de CBC avancé. Il s’agit d’un inhibiteur de la voie Hedgehog. Cette voie est impliquée dans la régulation de la croissance et du développement au cours des premières étapes de la vie. Des mutations, retrouvées chez 90 % des patients CBC avancés, peuvent survenir et la réactiver de façon anormale. Bloquer cette

onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41

voie permet d’empêcher la multiplication et la survie des cellules tumorales. La Commission de l’Union européenne a accordé une AMM conditionnelle pour Erivedge® pour les patients pour lesquels la radiothérapie ou la chimiothérapie ne conviennent pas. L’efficacité d’Erivedge® a été démontrée par l’étude pivot internationale ERIVANCE BCC de phase II. n Pour en savoir plus : www.roche.com

urologie

Cancer de la prostate : avis favorable pour le radium 223 dichloride

L

e 23 septembre dernier, Bayer a annoncé que le comité européen des médicaments à usage humain recommande le radium 223 dichloride (radium-223) pour le traitement du cancer de la prostate résistant à la castration avec métastase osseuse. Les recommandations du comité européen sont fondées sur l’étude pivot de phase III ALSYMPCA. La décision de la Commission européenne est attendue pour la fin de l’année. Le radium-223 est une particule émettrice alpha, dont la partie active imite le calcium et cible les os, notamment les zones de métastase osseuse, en formant des complexes avec l’hydroxyapatite minérale osseuse. Des transferts d’énergie des émetteurs alpha conduisent à une fréquence élevée de cassures de l’ADN double brin des cellules tumorales adjacentes. Il en résulte un effet cytotoxique auquel s’ajoutent des effets sur le microenvironnement tumoral contribuant à l’efficacité du médicament. Le Radium-223 a déja été approuvé par la FDA aux États-Unis et est commercialisé sous le nom Xofigo®. n Pour en savoir plus : www.healthcare.bayer.com

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Perspectives Général

Apports des nanotechnologies dans la prise en charge du cancer Du dépistage au traitement Dr Zoher Merad-Boudia*

Résumé Les traitements les plus utilisés en oncologie médicale sont la chimiothérapie, la radiothérapie, la chirurgie et, depuis quelques années, le recours aux thérapies dites “ciblées”. Cependant, ces traitements ne sont pas dénués d’effets secondaires, parfois rédhibitoires, notamment parce qu’ils agissent indistinctement sur les cellules malades et sur les cellules saines. Un des rêves de tout chercheur serait de trouver un moyen d’amener les molécules actives et nécessaires directement au cœur de la cellule cancéreuse sans craindre les répercussions sur le reste de l’organisme. Dans le domaine très particulier de la prise en charge du cancer, une des avancées majeures de ces dernières années est le développement des nanotechnologies.

Que sont les nanotechnologies ? Cette science consiste à manipuler des substances, comme l’or et la silice, pour en modifier la composition ou créer de nouvelles structures moléculaires ou physiques dont on pourra utiliser les propriétés. Cette démarche a lieu à

l’échelle atomique ou moléculaire, où les dimensions sont d’un cent millième de la largeur d’un cheveu humain. La taille des nano-objets est comprise entre quelques dizaines et quelques centaines de nanomètres (70 fois plus petits qu’un globule rouge). Ils sont, à l’intérieur, remplis de médicaments, tandis qu’à la surface, ils sont composés comme des missiles de reconnaissance permettant aux nanomédicaments de reconnaître leur cible biologique, ici la cellule cancéreuse. Le développement des nanotechnologies est une des avancées majeures de ces dernières années. Elles font actuellement l’objet d’études diverses tant dans l’utilisation de l’imagerie in vivo que dans le développement de nouvelles méthodes de diagnostic précoce. Leur utilisation à des fins thérapeutiques est également étudiée grâce à la vectorisation des médicaments dans des nanoparticules. Ce moyen permettrait d’atteindre et de traiter plus efficacement les cellules cancéreuses.

nanotechnologies et diagnostic précoce Les nanofils

*Chef du service d’Oncologie médicale, Clinique Eugène André, Lyon

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Les nanofils sont des fils de dimensions nanométriques constitués de matériaux conducteurs d’élec-

tricité. Ils peuvent être entourés de molécules, mais aussi d’anticorps qui se lient aux protéines ou à d’autres substances (comme par exemple des marqueurs moléculaires). Cette sensibilité aux marqueurs est accompagnée d’une grande sélectivité qui pourrait permettre de diagnostiquer le type de cancer.

Les nanotubes de carbone Les nanotubes de carbone ont une capacité de fluorescence lorsque l’on s’approche de l’infrarouge. Dans cette partie du spectre de la lumière blanche, les tissus humains et les liquides sont transparents, ils ne réagissent pas à cette lumière. Cette caractéristique est intéressante car nous pouvons dès lors détecter des nanotubes dans les tissus (marqueurs utiles dans l’imagerie in vitro). L’objectif est de donner la capacité à ces marqueurs de se diriger vers des cellules cancéreuses. Des études scientifiques ont montré qu’il était possible de détecter de faibles concentrations de nanotubes de carbone dans des cultures cellulaires de laboratoire. En effet, en utilisant un microscope équipé pour la fluorescence infrarouge, il est possible de localiser avec précision les nanotubes à l’intérieur des cellules en enregistrant leur luminescence. Ces propriétés de fluorescence des nanotubes de onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41


Apports des nanotechnologies dans la prise en charge du cancer

carbone peuvent être utilisées pour la réalisation de capteurs biologiques (dépistage du cancer). Les nanotubes de carbone peuvent aussi, par résonance magnétique après ciblage de la tumeur, détruire celle-ci. Nanotubes et nanoparticules peuvent ainsi servir à détruire des cellules cancéreuses avec des ondes radioactives. Des études ont également montré que ces nanoparticules de carbone avaient leurs limites, avec l’apparition d’effets secondaires chez l’animal et l’Homme (1, 2).

Nanoparticules et imagerie médicale

d’onde qui va du rouge (taille maximum du nanocristal) au bleu (taille minimum). Différents types de marqueurs biologiques des cellules tumorales (tels que des protéines ou des séquences d’ARNm) ont été identifiés pour le diagnostic du cancer et peuvent recouvrir les Quantums Dots afin de cibler les cellules cancéreuses. Des progrès récents dans le développement des Quantums Dots permettent le contrôle de la taille, de la forme et de la surface fonctionnelle de ces nanoparticules avec une utilisation possible dans l’imagerie pour le cancer. La liaison des Quantums Dots avec des biomolécules peut servir également à cibler les tumeurs in vivo.

Le ciblage actif ❚❚Les Quantums Dots Les Quantums Dots (3, 4), points quantiques aussi appelés “boîtes quantiques”, sont des nanocristaux de semi-conducteurs, c’est-à-dire des cristaux de matériaux qui ont des caractéristiques électriques intermédiaires entre celles des métaux et celles des isolants, à l’échelle nanométrique. Les Quantums Dots deviennent fluorescents quand on les excite par

Des Quantums Rods (5) ont aussi été fabriqués pour l’imagerie de fluorescence (à deux photons) des cellules cancéreuses. ❚❚Le silice Afin d’augmenter la détection des cellules tumorales (6), on peut faire appel aux nanoparticules biphotoniques. Ces nanoparticules en silice renferment des fluorophores organiques (substance chimique) capables d’absor-

L’objectif est de donner la capacité à ces marqueurs de se diriger vers des cellules cancéreuses. une source de lumière. Ils ont des propriétés optiques remarquables, comprenant une grande brillance et une résistance au photoblanchiment. Leurs spectres peuvent être changés par plusieurs facteurs. Sous excitation lumineuse dans l’ultraviolet, ces nanocristaux réémettent des photons dans le spectre visible avec une longueur onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41

ber l’énergie de deux photons. Lorsque deux particules chargées électriquement interagissent, on peut parler d’un échange de photons. Ces fluorophores organiques possèdent une longueur d’onde proche de l’infrarouge et peuvent réémettre par fluorescence un rayonnement utilisé pour l’imagerie médicale. Encore faut-il que

ces nanoparticules se fixent aux cellules cancéreuses. Il est possible de réaliser une greffe sur les nanoparticules des éléments de reconnaissance de certaines tumeurs, comme l’acide folique, reconnu par les cellules du cancer du col de l’utérus ou du cancer du sein. Différentes molécules peuvent être greffées pour permettre la détection d’autres types de tumeurs. ❚❚Les nanoparticules magnétiques Les nanoparticules magnétiques (6), composées d’un cœur en fer pur et créées pour se fixer sélectivement sur la tumeur (en particulier sur des zones qui ont résisté à la radiothérapie), sont utilisées pour une application en imagerie et en hyperthermie (augmentation locale de la température). Pour l’imagerie, leur accumulation dans la tumeur à détruire permettra une meilleure visualisation de celle-ci par IRM, rendant le traitement plus précis. Pour l’hyperthermie, les nanoparticules magnétiques seront utilisées comme sources locales de chaleur. La mise en place d’un champ magnétique alternatif générera une augmentation de la température au sein de la tumeur, rendant alors la cellule cancéreuse plus vulnérable aux traitements. L’efficacité de la chimiothérapie ou de la radiothérapie sera ainsi améliorée sans majorer les effets secondaires.

Le ciblage passif Le ciblage passif utilise le fait que le microenvironnement de la tumeur est un réseau tortueux et perméable, dû à un défaut d’angiogenèse. Ce microenvironnement favorise l’implantation des nanoparticules (7). De plus, la concentration de cellules tumorales est plus élevée que celle des cellules saines, 139


Perspectives

donc les nanoparticules passent entre les interstices des cellules saines et se fixent sur la tumeur.

Grâce à cet implant, les médicaments sont rendus “invisibles” et peuvent donc passer à travers le barrage des macrophages.

nanoparticules et traitement ciblé

• Enfin, des nanovecteurs de 3e génération sont capables de cibler essentiellement les tumeurs cancéreuses grâce à des molécules placées au bout des polyéthylènes-glycols. Elles reconnaissent certains marqueurs connus des cellules cancéreuses. Au niveau de l’endothélium vasculaire à proximité d’une tumeur, les cellules ne sont pas jointives, ce qui facilite le passage des nano-

Vectorisation des médicaments (les liposomes) La vectorisation des médicaments (8, 9) est le transport des molécules actives jusqu’à une cible biologique qui leur est propre. Des scientifiques ont créé des nanoparticules spécialisées dans le transport de médicaments jusqu’à une tumeur cancéreuse adaptée à ceux-ci. La partie active du médicament se situe à l’intérieur d’un nanovecteur de 10 à 20 nanomètres. C’est grâce à cette protection que le médicament peut voyager dans le système vasculaire. • Les nanovecteurs les plus courants de la 1re génération sont les liposomes injectés dans le sang. Le problème est qu’ils sont vite considérés par des protéines opsonines comme étant étrangers à l’organisme. Ces protéines se fixent alors autour des liposomes et déposent un marqueur identifiable par les macrophages du foie, les “éboueurs de l’organisme”, qui interviennent alors et capturent ces éléments exogènes. Ces nanovecteurs ne peuvent donc soigner que les cancers du foie. • Pour pouvoir atteindre d’autres organes que le foie, il faut donc empêcher cette fixation des opsonines. Au bout de quelques années de recherche, les scientifiques ont finalement eu l’idée d’implanter des polymères hydrophiles, appelés polyéthylènes-glycols, sur ces nanovecteurs de 2e génération. 140

mentation, 86 % des souris étaient encore en vie.

Conclusion Les nanotechnologies, médecine de l’infiniment petit, ne sont accessibles aux chercheurs que depuis peu de temps. Dans le cas particulier du cancer, ces nouvelles technologies sont devenues complémentaires avec les traitements jusqu’ici utilisés et vont, dans un avenir proche, améliorer l’efficacité des traitements.

Le ciblage passif utilise le fait que le microenvironnement de la tumeur est un réseau tortueux et perméable, dû à un défaut d’angiogenèse. vecteurs qui se fixent sur les cellules tumorales.

Les nanoparticules de silice d’or ou nanosheel Chez la souris, expérimentalement, on peut éliminer efficacement les cellules cancéreuses à l’aide des nanoparticules d’or et des rayons X. L’expérimentation consistait à injecter dans une souris des cellules cancéreuses, puis les nanoparticules d’or. Quelques minutes plus tard, la souris est soumise à des rayons X de haute énergie (environ 250 kilovolts). Les résultats ont été très intéressants : le lien entre nanoparticules d’or et rayons X a permis de réduire la taille des tumeurs, voire de les éliminer complètement. Lorsque les deux “ingrédients” sont utilisés seuls, les effets sont nettement moins efficaces, voire nuls. Un an après cette expéri-

Les nanotechnologies pourront notamment être utilisées pour le dépistage et pour faciliter les suites du traitement. Les nanofils, qui utilisent des molécules et des atomes spécialisés, vont permettre de cibler les cellules cancéreuses, et de détenir des capacités de traitement, comme c’est le cas avec les nanotubes de carbone. Le dépistage est une autre utilisation des nanotechnologies avec la possibilité d’y coupler de l’imagerie pour traiter le cancer. Les nanoparticules sont capables de repérer les cellules malades mais aussi d’émettre un signal susceptible d’être repéré de l’extérieur. L’émission de ce signal est permis par la mise en place de nanoparticules (de silice ou magnétiques) capables, grâce à leur exposition (soit à des ultra-violets, soit à des ondes magnétiques), de cibler les zones malades, les éléments les plus efficaces étant les Quantums onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41


Apports des nanotechnologies dans la prise en charge du cancer

Dots. Enfin, après avoir ciblé et visualisé les cellules cancéreuses, il ne reste plus qu’à les irradier. Les idées de thérapie utilisant les nanotechnologies sont nombreuses, mais seules quelquesunes sont véritablement efficaces. Parmi ces idées, certaines ne servaient initialement qu’à l’imagerie médicale et à la détection, mais se sont révélées par la suite capables de détruire les cellules cancéreuses.

D’autres envisagent une vectorisation des médicaments dans des nanoparticules, ce qui permettrait d’atteindre et de soigner très efficacement les cellules malades. Le problème est de mettre au point un vecteur capable d’aller jusqu’à la tumeur et de passer à l’intérieur de l’organisme sans être identifié comme “étranger” par celui-ci. Les nanotechnologies permettent donc aujourd’hui de

dépister les cellules cancéreuses et de mieux cibler les traitements sur les tissus malades sans léser les tissus sains. Reste aux chercheurs à en faire un traitement à part entière qui peut se substituer aux traitements actuels. n

Mots-clés : Nanotechnologies, Vectorisation, Traitement ciblé, Dépistage, Ciblage actif

Bibliographie 1. Abdolahad M, Mohajerzadeh S, Janmaleki M et al. Evaluation of the shear force of single cancer cells by vertically aligned carbon nanotubes suitable for metastasis diagnosis. Integr Biol (Camb) 2013 ; 5 : 535-42. 2. Webster DM, Sundaram P, Byrne ME. Injectable nanomaterials for drug delivery: carriers, targeting moieties, and therapeutics. Eur J Pharm Biopharm 2013 ; 84 : 1-20. 3. Fabbro C, Ali-Boucetta H, Da Ros T et al. Targeting carbon nanotubes against cancer. Chem Commun 2012 ; 48 : 3911-26. 4. Ojima I. Guided molecular missiles for tumor-targeting chemotherapy-case studies using the second-generation taxoids as warheads. Acc Chem Res 2008 ; 41 : 108-19. 5. Wagh A, Jyoti F, Mallik S et al. Polymeric nanoparticles with sequential

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Le point sur Thorax

Les formes histologiques des cancers des sinus Spécificités cliniques et thérapeutiques n La symptomatologie des cancers des sinus et des fosses nasales peut rester longtemps aspécifique. Leur faible fréquence et leur grande diversité histologique rendent complexe la réalisation de référentiels thérapeutiques. Une exposition professionnelle est à rechercher de manière systématique afin de permettre leur reconnaissance en maladie professionnelle.

Généralités épidémiologie Les cancers des sinus et des fosses nasales représentent 2 à 3 % des cancers des voies aéro-digestives supérieures (1). En France, leur taux d’incidence varie suivant les régions entre 0,8 et 1,2 nouveau cas pour 100 000 habitants et par an (2). La diversité des types histologiques associée à leur faible incidence rend difficile l’inclusion de ces tumeurs dans des études prospectives. La réalisation de référentiels thérapeutiques consensuels est donc complexe. Une exposition professionnelle est à rechercher systématiquement quel que soit le type histologique. Ainsi, l’ensemble des cancers du massif facial peut être reconnu comme maladie professionnelle en cas d’exposition professionnelle prolongée aux tanins (bois et cuir) et au nickel, selon les critères du tableau 37-ter des maladies professionnelles (3).

Présentation clinique d’une tumeur sinusienne Ces tumeurs sont classiquement de découverte tardive en raison du caractère aspécifique des symptômes qu’elles occasionnent. * ORL et chirurgie cervico-faciale, Institut Gustave-Roussy, Paris

142

Les manifestations rhinologiques sont les plus fréquentes, avec au premier plan l’obstruction nasale et l’épistaxis. Le caractère unilatéral d’une symptomatologie rhinologique doit toujours faire évoquer une pathologie tumorale jusqu’à preuve du contraire. La présence d’adénopathies cervicales au diagnostic est rare. Certains signes cliniques objectivent une lésion localement avancée telle qu’une atteinte ophtalmologique (exophtalmie, paralysie oculomotrice, œdème palpébral), neurologique (atteinte du V) ou un trismus (envahissement de la fosse infratemporale).

Bilan d’extension On réalise systématiquement un scanner du massif facial et cervico-thoracique avec injection pour préciser l’atteinte osseuse et la présence d’éventuelles métastases ganglionnaires ou pulmonaires. Une IRM avec injection complète le scanner en précisant l’extension aux tissus mous, au contenu orbitaire et à l’encéphale. L’IRM permet également de distinguer le caractère tissulaire ou liquidien d’un comblement sinusien afin de mieux apprécier le volume tumoral. C’est cependant la biopsie endonasale, réalisée sous contrôle endoscopique (sous anesthésie locale

Dr Antoine Moya-Plana*

ou générale en fonction de l’accessibilité de la lésion) qui permet de poser le diagnostic (Tab. 1). L’échantillon doit être adressé à l’état frais au service d’anatomopathologie.

Formes histologiques Carcinome épidermoïde Tumeur maligne la plus fréquente au niveau nasosinusien, le carcinome épidermoïde se développe à partir de la muqueuse cylindrique respiratoire ayant subi une métaplasie malpighienne. L’âge moyen de survenue est de 60 ans et le sex ratio est de deux hommes pour une femme. L’association forte avec l’exposition au nickel et aux tanins (bois et cuir) en fait une maladie professionnelle reconnue. Il n’y a pas de rôle démontré des facteurs de risque classiques que sont le tabac et l’alcool. On notera par ailleurs, que le papillome inversé, tumeur bénigne (0,5 à 4 % des tumeurs nasosinusiennes), dégénère en carcinome épidermoïde dans 10 % des cas. La localisation la plus fréquente est maxillaire, suivie par les fosses nasales, l’ethmoïde et le sphénoïde. Les signes cliniques sont aspécifiques, avec des manifestations rhinologiques au premier plan. Un envahissement ganglionnaire est onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41


Formes histologiques des cancers des sinus

retrouvé dans 10 à 20 % des cas. ❚❚Analyse histologique Cette analyse précise le degré de différenciation, le caractère kératinisant ou non et le sous-type (verruqueux, épidermoïde papillaire, basaloïde, à cellules fusiformes, adénosquameux, acantholytique, lymphoépithélial). ❚❚Traitement standard Le traitement standard est une intervention chirurgicale d’exérèse macroscopique totale et microscopique avec marges de sécurité suivie d’une radiothérapie. La réalisation d’un évidement cervical prophylactique n’est pas indiqué chez les patients N0, mais la radiothérapie doit être systématique sur les premiers relais ganglionnaires (3). L’opération chirurgicale, parfois délabrante, est réalisée classiquement par voie transfaciale en association à des procédures de reconstruction par lambeau ostéomusculaire microanastomosé ou par réhabilitation prothétique. Une chimiothérapie d’induction (taxotère-cisplatine-5FU) peut se discuter pour les stades avancés (T3-T4). En postopératoire, la radiochimiothérapie est souvent décidée pour les tumeurs volumineuses, car les limites d’exérèse sont difficiles à apprécier. Elle est aussi indiquée pour les lésions inopérables. Les techniques conformationnelles avec au mieux modulation d’intensité (IMRT, Intensity modulated radiotherapy) permettent de réduire les effets secondaires de la radiothérapie (recommandation de grade B) (3). ❚❚Facteurs pronostiques Les facteurs pronostiques péjoratifs sont topographiques (orbite, fosse infratemporale, base du crâne) et histologiques (sous-type basaloïde, nécrose, index mitotique élevé, engainement périnerveux). onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41

Tableau 1 - Classification UICC 2010 pour les carcinomes (non valable pour mélanome et neuroblastome). Tumeurs du sinus maxillaire T1

Muqueuse du sinus maxillaire sans érosion ni lyse osseuse

T2

Tumeur avec ostéolyse du palais osseux ou de la cloison intersinuso-nasale

T3

Paroi postérieure du sinus maxillaire, tissus sous-cutanés, plancher ou paroi interne de l’orbite, fosse ptérygoïde, sinus ethmoïdal

T4a

Cavité orbitaire antérieure, peau de la joue, apophyses ptérygoïdes, fosse infratemporale, lame criblée, sinus sphénoïdal/frontal

T4b

Apex orbitaire, dure-mère, cerveau, étage moyen de la base du crâne, nerfs crâniens autres que V2, nasopharynx, clivus

Tumeurs de l’ethmoïde et des fosses nasales T1

Limitée à une cellule ethmoïdale, avec ou sans lyse osseuse

T2

Limitée à un site nasoethmoïdal voisin, avec ou sans lyse osseuse

T3

étendue à la lame papyracée, au plancher d’orbite, au sinus maxillaire, au palais ou à la lame criblée

T4a

étendue à l’orbite antérieure, à l’étage antérieur de la base du crâne (extension minime), au sinus frontal ou sphénoïde, à la peau du nez ou de la joue

T4b

Atteinte de l’apex orbitaire, de la dure-mère ou du cerveau, de l’étage moyen de la base du crâne, du clivus, du nasopharynx ou de nerfs crâniens autres que le V2

Figure 1 - Carcinome épidermoïde du sinus maxillaire gauche. Le scanner (à gauche, coupe axiale) montre la lyse osseuse des parois latérale et médiane du sinus maxillaire, tan­dis que l’IRM (à droite, ici séquence T1) montre la masse tissulaire maxillaire respectant le contenu orbitaire et l’encéphale.

❚❚Survie globale La survie globale est comprise entre 50 et 60 % à 5 ans, tous stades confondus (4) (Fig. 1).

Adénocarcinome de l’ethmoïde Parmi les cancers nasosinusiens, environ 20 % prennent naissance au niveau de l’ethmoïde, avec dans 80 % des cas un adénocarcinome (1). Plus des trois quarts des cas (35 à

96 % selon les études) sont d’origine professionnelle par exposition aux poussières de bois, avec une durée moyenne d’exposition comprise entre 20 et 30 ans (5). D’autres facteurs professionnels sont également rapportés comme l’exposition au nickel, au chrome ou l’industrie du cuir. Il existe, de ce fait, une forte prépondérance masculine (de 6 pour 1 à 59 pour 1 selon les études). 143


Le point sur

L’âge moyen au diagnostic est dans la 6e décennie. Les types histologiques sont des adénocarcinomes bien différenciés, peu différenciés et de type intestinal. Il n’a pas été mis en évidence de différences pronostiques selon le type histologique (5). ❚❚Symptomatologie Elle est le plus souvent rhinologique et aspécifique. L’unilatéralité de la symptomatologie chez un travailleur du bois doit alerter. L’existence de signes ophtalmologiques (diplopie, exophtalmie…) est un signe de gravité en rapport avec une tumeur localement avancée. La plupart des tumeurs sont diagnostiquées tardivement avec : • 65 à 80 % classées T3-4 ; • 35 % d’extension orbitaire ; • 17 % d’atteinte méningo-encéphalique au diagnostic (5). L’atteinte ganglionnaire, concernant essentiellement les lésions localement avancées, est rare (< 5 % N+ au diagnostic et 10 % au cours de l’évolution des N0). Les métastases à distance sont également peu fréquentes. ❚❚Traitement standard Le traitement standard recommandé actuellement est la séquence chirurgie puis radiothérapie (3). Une chimiothérapie pré-opératoire peut être réalisée pour les stades avancés T3-T4 (type FEP, pour farmorubicinecisplatine-5FU, protocole IGR). La voie d’abord chirurgicale dépend de l’extension tumorale et de l’expérience de l’équipe chirurgicale (voie transfaciale, résection crânio-faciale ou chirurgie endoscopique). On observe actuellement le développement de la chirurgie endoscopique endonasale dont plusieurs études ont montré une efficacité comparable à celle de la chirurgie conventionnelle, mais avec un taux de complications et une durée d’hospitalisation 144

Figure 2 - Adénocarcinome de l’ethmoïde droit dont le scanner montre une lyse de la lame criblée (flèche) en coronal et une atteinte orbitaire en axial.

moindres (6-9). Des études prospectives sur des cohortes plus importantes sont nécessaires pour confirmer ces résultats. Par ailleurs, ni la réalisation d’un évidement cervical prophylactique chez les patients N0 (3, 5, 10), ni la radiothérapie systématique sur les premiers relais ganglionnaires ne sont indiquées. ❚❚Survie globale La survie globale après traitement est de 64 % à 5 ans et 49 % à 10 ans (5). Le taux de récidive locale est de 30 % (10). La qualité de l’exérèse chirurgicale initiale est le facteur pronostique majeur. Les facteurs de mauvais pronostic sont le stade T4 avec principalement l’envahissement méningoencéphalique et la présence de métastases ganglionnaires (5, 10) (Fig. 2).

Carcinome adénoïde kystique Anciennement nommée “cylindrome”, le carcinome adénoïde kystique (CAK) est, au niveau nasosinusien, la 2e tumeur maligne épithéliale non-épidermoïde derrière l’adénocarcinome. Le sex ratio est de 1 et son âge moyen de survenue se situe entre 40 et 60 ans (11). Le CAK naît des glandes salivaires accessoires présentes au niveau du massif facial. Il se localise principalement au niveau maxillaire (point de départ palatin +++). Il existe trois types histologiques : • cribriforme (le plus fréquent) ; • tubulaire ; • compact (mauvais pronostic).

Un Ki67 élevé (index de prolifération cellulaire) est un facteur péjoratif. Cette tumeur présente un neurotropisme majeur avec de fréquentes infiltrations périnerveuses le long des V2 et V3. L’atteinte ganglionnaire est rare (5-10 % des cas) (11). L’apparition de métastases à distance (poumon +++) est fréquente et souvent tardive (48 % des cas 10 à 20 ans après le diagnostic initial) (3). ❚❚Traitement standard Il associe une chirurgie d’exérèse (transfaciale ou endoscopique) à une radiothérapie sur le lit tumoral (avec une irradiation quasisystématique de la base du crâne et particulièrement du ganglion trigéminé du fait de la fréquence élevée de l’envahissement périnerveux). Un traitement prophylactique chirurgical ou par radiothérapie des aires ganglionnaires n’est pas indiqué chez les patients N0. Le taux de survie est de 57 % à 5 ans et 33 % à 10 ans (3).

Carcinome neuroendocrine Le carcinome neuroendocrine ou SCUNC (Small cell undifferentiated neuroendocrine carcinoma) est à la fois d’origine épithéliale et neuroendocrine. Il en existe trois types : • carcinoïde ; • carcinoïde atypique ; • carcinome à petites cellules. C’est une tumeur rare dont le sex ratio est de 1 et l’âge médian de survenue de 50 ans. On observe onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41


Formes histologiques des cancers des sinus

une atteinte sinusienne (maxillaire et ethmoïde) sans extension aux fosses nasales dans environ un cas sur deux. Un syndrome endocrinien paranéoplasique est à rechercher (notamment un SiADH, Syndrome of inappropriate antidiuretic hormone secretion), même s’il est plus rare pour les tumeurs sinusiennes que thoraciques. Sa présence est un facteur péjoratif. Le SCUNC est de mauvais pronostic avec une médiane de survie entre 24 et 36 mois (12). Cette tumeur est agressive localement avec une incidence élevée de métastases à distance (foie, poumons, os, cerveau, ganglions…). Le traitement standard est une radiochimiothérapie (platine, étoposide), voire une opération chirurgicale quand elle est réalisable (12).

Esthésioneuroblastome ou neuroblastome olfactif C’est une tumeur maligne neuroendocrine rare dont l’origine est le neuroépithélium olfactif (neurones olfactifs primaires). Cette localisation anatomique explique l’invasion précoce de la lame criblée et de l’étage antérieur de la base du crâne. L’imagerie (TDM/ IRM) objective une lésion centrée sur la fente olfactive et recherche une extension orbitaire et/ou intracrânienne en précisant le caractère extra- ou intraparenchymateux. Il existe deux diagnostics différentiels principaux : SNUC (Sinonasal undifferentiated carcinoma) et SCUNC. Deux pics de fréquence sont décrits à 20 et 60 ans. Une atteinte ganglionnaire métastatique est observée chez 5-8 % des patients au diagnostic et 20-25 % des patients au total (13). Des métastases à distance sont présentes chez 10 % des patients (poumons et os). Il

existe

deux

classifications

onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41

Tableau 2 - Classification clinique de Kadish (1976), modifiée par Morita (1993). Type A

Tumeur limitée aux fosses nasales

Type B

Tumeur intéressant les cavités nasales et paranasales

Type C

Tumeur étendue au-delà des cavités paranasales

Type D

Patient M+

Tableau 3 - Grade histologique de Hyams. Il est parfois difficile de trancher entre deux grades proches (ex : grade 1 ou 2). Les études actuelles ont tendance à classer ces tumeurs en bas grade (Hyams I et II) et haut grade (Hyams III et IV). Grades Architecture lobulaire Polymorphisme nucléaire Mitoses Calcifications Nécrose

I

II

III

IV

++

++

+/-

+/-

-

-/+

+

++

-

+

++

++

+/-

+/-

-

-

-

-

+/-

++

Fond fibrillaire

+++

++

+/-

-

Pseudorosettes Homer-Wright

+/-

+/-

-

-

Rosettes glandulaires Flexner

-

-

++

+

principales : Kadish et Hyams (Tab. 2 et 3). Tous les grades histologiques peuvent métastaser. ❚❚Facteurs pronostiques Les facteurs de bon pronostic sont le jeune âge, l’absence d’extension extrasinusienne (Kadish stade A) et le bas grade histologique (Hyams). L’extension intracrânienne et l’atteinte orbitaire sont des facteurs indépendants influant de manière péjorative le pronostic (14). ❚❚Traitement standard Le traitement standard est la chirurgie (voie transfaciale, résection crânio-faciale ou chirurgie endoscopique) complétée par une radiothérapie sur le lit tumoral et les premiers relais ganglionnaires. Pour les tumeurs inopérables, on réalise généralement une chimiothérapie première (platine + vépéside) suivie de radiothérapie. ❚❚Survie La survie sans récidive est de 77 % à 5 ans et de 53 % à 10 ans alors que la survie globale est de 61 % à 5 ans et de 42 % à 10 ans (14) (Fig. 3).

SNUC ou carcinome indifférencié Pour cette tumeur très rare, il existe une prédominance masculine (2 à 3 pour 1) avec un âge moyen de 5055 ans. Le point de départ est fréquemment ethmoïdal. Le SNUC se caractérise par son agressivité locale et une évolution rapide (80 % de T4 au diagnostic). Les patients présentent souvent de multiples symptômes d’apparition récente et d’évolution rapide (obstruction, douleurs, exophtalmie, paralysie des paires crâniennes…). Les extensions intra-orbitaires et intra-crâniennes sont fréquentes. On observe ainsi de volumineuses tumeurs avec lyses osseuses massives en TDM et IRM. Un envahissement ganglionnaire est présent dans 30 % des cas et des métastases dans 28 % des cas (14). Le SNUC est un diagnostic d’élimination puisque les marqueurs neuroendocrines et mélanocytaires doivent être négatifs. Il est nécessaire de réaliser une hybridation in situ EBV (virus Epstein-Barr) et une sérologie EBV 145


Le point sur

afin d’éliminer un UCNT (Undifferenciated carcinoma of nasopharyngeal type). ❚❚Pronostic Le pronostic est très mauvais avec une médiane de survie de 18 mois et une survie à 5 ans de 20 % (14). ❚❚Traitement Le traitement est une chimiothérapie d’induction (TPF ou platinevépéside) puis une chirurgie (si réalisable) et une radiochimiothérapie sur le lit tumoral et les aires ganglionnaires. Dans les SNUC pour lesquels le risque métastatique est important (surtout en cas d’envahissement ganglionnaire initial), l’indication chirurgicale peut être remplacée par une radiochimiothérapie en cas de réponse complète à la chimiothérapie d’induction.

Mélanome malin des fosses nasales Ces mélanomes muqueux représentent 1 % des mélanomes et 3 % des cancers nasosinusiens. Ils sont issus des mélanocytes originaires de la crête neurale et disséminés dans les muqueuses nasosinusiennes. Il existe une prépondérance masculine avec un âge moyen compris entre 60 et 65 ans. Les localisations classiques sont le septum antérieur, les cornets (surtout inférieur) et le sinus maxillaire. Un envahissement ganglionnaire est observé chez 10-20 % des patients avec moins de 5 % de métastases au diagnostic (11). Cliniquement, on observe une lésion polypoïde d’aspect mélanique, saignant facilement, fréquemment multifocale. En immunohistochimie, la protéine S100 mais surtout l’HMB45 et le MELAN-A sont très spécifiques. ❚❚Survie globale La survie à 5 ans est inférieure à 30 % avec un risque tardif de mé146

Figure 3 - Esthésioneuroblastome de type C de Kadish avec effraction de la lame criblée et envahissement méningé.

tastases (poumons, ganglion, cerveau) mais surtout un taux élevé de récidive locorégionale (67 % à 92 %) (14). La médiane de survie est de 24 mois. ❚❚Facteurs pronostiques Les facteurs de mauvais pronostic de ces mélanomes muqueux des fosses nasales sont : stade avancé au diagnostic, épaisseur supérieure à 5 mm, stade métastatique, invasion lymphovasculaire prouvée en histologie (14). La localisation à la fosse nasale semble être de meilleur pronostic que la localisation sinusienne.

Figure 4 - Mélanome muqueux du cornet inférieur droit (caractère plurifocal).

❚❚Traitement Le traitement est la chirurgie (si possible) complétée par une radiothérapie sur le lit tumoral. La chirurgie ganglionnaire se justifie en cas d’atteinte ganglionnaire sans métastases à distance (Fig. 4).

❚❚ Survie moyenne La survie moyenne est de 12 mois malgré la réalisation d’un traitement standard (chirurgie + radiochimiothérapie). Les caractéristiques histologiques sont : important contingent indifférencié, index mitotique élevé, nécrose extensive et fréquente infiltration par des neutrophiles. En immunohistochimie, la tumeur est cytokératine+, antigène de membrane épithélial+, p63+, CD34+ et synaptophysine+ (15).

NUT midline carcinomas (NMC)

tumeurs mésenchymateuses

Il s’agit d’une tumeur maligne très agressive définie récemment par la présence d’anomalies du gène NUT (15q14). Son incidence est inconnue car l’analyse génétique (FISH ou RT-PCR) n’est pas systématiquement réalisée à l’heure actuelle pour les tumeurs des sinus. Une étude récente a mis en évidence une protéine NUT mutée chez 2 % des carcinomes nasosinusiens avec 15 % des carcinomes indifférenciés (SNUC) et 1 % des carcinomes épidermoïdes (15).

Elles sont essentiellement d’origine ostéocartilagineuse (ostéo/ chondrosarcome), musculaire (rhab­domyo / léiomyosarcome) et vasculaire (angiosarcome, Kaposi, hémangiopéricytome malin). Le rhabdomyosarcome (RMS) est le sarcome le plus fréquent au niveau du massif facial. Dans près de la moitié des cas, il se développe dans les régions paraméningées : fosse infra-temporale, fosses nasales, sinus, oreille moyenne et mastoïde et espace parapharyngé. Il survient en onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41


Formes histologiques des cancers des sinus

général dans les deux 1res décennies sans prédominance de sexe. Les deux sous-types principaux sont embryonnaire (71 %) et alvéolaire (13 %) (14). Cette tumeur est généralement desmine et myogénine positive. ❚❚ Survie globale La survie globale à 5 ans varie pour les formes localisées entre 60 et 90 %. Les principaux facteurs pronostics sont : l’âge (> 10 ans), la qualité incomplète de la résection initiale, la taille de la tumeur (> 5 cm), la localisation paraméningée, le sous-type histologique alvéolaire, l’atteinte ganglionnaire et la présence de métastases. ❚❚Traitement Le traitement de référence des RMS paraméningés associe une chimiothérapie première (IVA ou IVADo, pour ifosfamide, vincristine, adriamycine, ± doxorubicine) et une irradiation. Une chirurgie d’exérèse large réalisée au décours des 1res cures de chimiothérapie peut se discuter afin d’améliorer le contrôle local de la maladie, notamment pour les RMS développés dans la fosse infratemporale. La localisation et l’extension tumorales imposent généralement une voie transfaciale, voire transmandibulaire, avec une reconstruction par lambeau libre microanastomosé musculo-osseux ou musculaire pur.

Tumeurs hématologiques : lymphome B et lymphome T/NK Les

lymphomes

malins

non-

hodgkiniens (LMNH) forment un groupe très hétérogène de tumeurs hématopoïétiques. Dans les pays occidentaux, la forme histologique la plus fréquente est le lymphome B à grandes cellules alors que dans les pays asiatiques, le type le plus fréquent est le lymphome T/NK de type sino-nasal. Dans les deux cas, il existe une prédominance masculine avec un âge moyen au diagnostic de 60 ans. Les lymphomes sino-nasaux T/NK sont rares en Occident mais endémiques en Asie et en Amérique du Sud. On observe une association systématique avec l’EBV. Cliniquement, ils se présentent comme une lésion nécrotique, médiofaciale, très destructrice. Des symptômes B peuvent être présents : altération de l’état général, fièvre, sueurs nocturnes, etc. ❚❚Diagnostics différentiels Les diagnostics différentiels principaux sont une mycose invasive (de type mucormycose) et une granulomatose de Wegener. La biopsie retrouve de larges plages de nécrose associées à un infiltrat polymorphique atypique CD2+, CD56+, CD3cyto+, CD45RO+ et CD43EBV+. Le bilan d’extension comprend un scanner thoraco-abdominal, un PET-scan, une biopsie ostéomédullaire et une ponction lombaire. On réalise également une PCR EBV sérique. ❚❚Traitement Le traitement classique dans les formes localisées doit associer une radiothérapie réalisée d’emblée en

association avec une chimiothérapie qui n’est pas actuellement consensuelle. Le CHOP est habituellement délivré avec des résultats décevants. L’utilisation d’asparaginase semble actuellement plus efficace. Dans les formes disséminées, le pronostic est particulièrement sombre. Dans le cas des lymphomes B à grandes cellules, le traitement repose sur une association de type rituximab-CHOP, le rôle de la radiothérapie étant plus discutable vu l’efficacité de cette immunochimiothérapie.

Métastases Exceptionnelle, une métastase sinusienne doit être classiquement évoquée devant une lésion tumorale maxillaire dont l’analyse histologique est en faveur d’un adénocarcinome à cellules claires. En effet, c’est le cancer rénal à cellules claires qui est le plus pourvoyeur de métastases sinusiennes devant l’adénocarcinome colique et le cancer de l’endomètre. D’autres cancers primitifs (poumon, sein, rein, côlon, prostate et thyroïde) peuvent également être évoqués. Le sinus maxillaire est le plus fréquemment atteint. En cas de métastase unique, une intervention chirurgicale peut n être envisagée. Remerciements pour leur relecture attentive aux Drs Janot, Ribrag et Minard.

Mots-clés : Carcinome épidermoïde, Carcinome neuroendocrine, Tumeurs mésenchymateuses, Tumeurs hématologiques, Adénocarcinome de l’ethmoïde

Bibliographie 1. Barnes L, Tse LLY, Hunt JL et al. Tumours of the nasal cavity and paranasal sinuses: introduction. World Health Organization classification of tumors: Pathology and genetics of head and neck tumours, IARC, WHO 2005. 2. Cancer Incidence in Five Continents. IARC, WHO 2007. 3. Référentiel REFCOR (Réseau d’expertise français sur les cancers ORL rares), 2009. 4. Turner JH, Reh DD. Incidence and survival in patients with sinonasal cancer: a historical analysis of population-based data. Head Neck 2012 ; 34 : 877-85. 5. Choussy O, Ferron C, Védrine PO et al. Adenocarcinoma of Ethmoid: a GETTEC retrospective multicenter study of 418 cases. Laryngoscope 2008 ; 118 : 437-43. 6. Nicolai P, Villaret AB, Bottazzoli M et al. Ethmoid adenocarcinoma-from craniofacial to endoscopic resections: a single-institution experience over 25 years. Otolaryngol Head Neck Surg 2011 ; 145 : 330-7. 7. Lund VJ, Stammberger H, Nicolai P et al. European position paper on endoscopic management of tumours the5nose, paranasal onko + • Octobre 2013 •ofvol. • numéro 41 sinuses and skull base. Rhinol Suppl 2010 ; 1 : 1-143. 8. Nicolai P, Battaglia P, Bignami M et al. Endoscopic surgery for malignant tumors of the sinonasal tract and adjacent skull base: a 10-year experience. Am J Rhinol 2008 ; 22 : 308-16.

9. Hanna E, DeMonte F, Ibrahim S et al. Endoscopic resection of sinonasal cancers with and without craniotomy: oncologic results. Arch Otolaryngol Head Neck Surg 2009 ; 135 : 1219-24. 10. De Gabory L, Maunoury A, Maurice-Tison S et al. Long-term single-center results of management of ethmoid adenocarcinoma: 95 patients over 28 years. Ann Surg Oncol 2010 ; 17 : 1127-34. 11. Simon C, Toussaint B, Coffinet L. Tumeurs malignes des cavités nasales et paranasales. EMC - Oto-rhino laryngologie 1997 : 1-0 [Article 20-405-A-10]. 12. Babin E, Rouleau V, Vedrine PO et al. Small cell neuroendocrine carcinoma of the nasal cavity and paranasal sinuses. J Laryngol Otol 2006 ; 120 : 289-97. 13. Zanation AM, Ferlito A, Rinaldo A et al. When, how and why to treat the neck in patients with esthesioneuroblastoma: a review. Eur Arch Otorhinolaryngol 2010 ; 267 : 1667-71. 14. Wenig BM. Undifferentiated malignant neoplasms of the sinonasal tract. Arch 147 Pathol Lab Med 2009 ; 133 : 699-712. 15. Hsieh MS, French CA, Liang CW, Hsiao CH. NUT midline carcinoma: case report and review of the literature. Int J Surg Pathol 2011 ; 19 : 808-12.


traitement Tête et cou

Prise en charge des glioblastomes Du traitement de première intention à la récidive tumorale Dr Athina Marantidou*, Dr Antoine Carpentier**

Introduction Les glioblastomes sont les plus agressives des tumeurs cérébrales primitives malignes. Ils sont, dans leur majorité, d’emblée de grade IV. Plus rarement, ils résultent de la progression d’un astrocytome ou d’un oligoastrocytome anaplasique de grade III. Les glioblastomes sont caractérisés par une nécrose intratumorale extensive, un fort potentiel infiltrant et une vascularisation intense due à une forte expression des facteurs angiogéniques, notamment le VEGF (Vascular endothelial growth factor).

Traitement spécifique de première intention Devant la découverte d’une lésion tumorale d’allure maligne, l’exérèse chirurgicale, si possible complète, reste le premier geste indiqué, avec un objectif à la fois diagnostique et thérapeutique. Après confirmation du diagnostic de glioblastome, le traitement standard associe la radiothérapie et l’administration concomitante et adjuvante de temozolomide (1, 2). La radiothérapie est administrée *CCA, Hôpital Avicenne, service de neurologie, AP-HP et Université Paris 13, Bobigny **PUPH, Hôpital Avicenne, service de neurologie, AP-HP et Université Paris 13, Bobigny

148

par fractions journalières de 1,8 à 2 Gy pendant 6 semaines, pour une dose totale de 54 à 60 Gy. Chez les patients âgés de plus de 70 ans, le protocole de radiothérapie est parfois raccourci (40-45 Gy administrés en 3 semaines) (3). Le temozolomide est administré à la dose de 75 mg/m2 tous les jours pendant la radiothérapie (3 ou 6 semaines). Des cures mensuelles de temozolomide seul sont ensuite mises en place (5 jours par mois à dose de 150 mg/m2 le premier mois, augmenté à 200 mg/m2 par la suite) pour une durée totale de 6 mois. L’intérêt de poursuivre le temozolomide au-delà de six cycles et jusqu’à progression tumorale n’est à ce jour pas établi. Avec ce protocole combinant radiothérapie et chimiothérapie, la survie médiane augmente de 12,1 à 14,6 mois et le taux de survie à 2 ans passe de 10,4 % à 26,5 % par rapport à la radiothérapie seule.

Le bevacizumab : un nouveau traitement prometteur ? Très récemment un nouveau traitement a fait l’objet de deux essais cliniques randomisés chez les glioblastomes nouvellement diagnostiqués en association avec le protocole de radiochimiothérapie sus-mentionné (4, 5).

Il s’agit du bevacizumab, un anticorps monoclonal dirigé contre le VEGF. Ces deux études montrent une nette amélioration de la durée de survie sans progression (de 3 à 6 mois), sans bénéfice en termes de survie globale. L’impact sur la qualité de vie est plus complexe : une étude rapporte un effet positif (étude AVAglio, ASCO 2013), l’autre - moins convaincante sur le plan méthodologique - un effet négatif (étude RTOG 0825, ASCO 2013). Des analyses complémentaires sont en cours.

Surveillance et traitement symptomatique Lors de l’évolution, les patients doivent être régulièrement évalués afin de distinguer toxicité des traitements, complications intercurrentes et progression tumorale. Une IRM cérébrale doit être réalisée 1 mois après la fin de la radiothérapie. C’est elle qui servira de référence pour les IRM ultérieures en raison de fausses images de progression parfois observées après la radiothérapie. Une IRM cérébrale de contrôle tous les 2-3 mois permet d’évaluer l’efficacité du traitement et de décider d’un éventuel changeonko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41


Prise en charge des glioblastomes

ment de molécule en cas de progression tumorale. Plusieurs symptômes dus à la progression tumorale ou à l’œdème vasogénique périlésionnel peuvent apparaître au cours de la maladie.

mandé de façon systématique. Si des crises d’épilepsie surviennent, un traitement par antiépileptiques non inducteur enzymatique du système métabolique P450 semble le plus approprié (7).

Les signes d’hypertension intracrânienne (HTIC) avec nausées, vomissements et céphalées sont ainsi fréquents, surtout pendant et juste après la radiothérapie qui majore l’effet de masse. Un traitement par corticoïdes doit souvent être instauré dès le début de la radiothérapie : 90 % des patients auront besoin de ce traitement dès les premiers 8 jours, en particulier ceux qui n’ont pas pu bénéficier d’une exérèse chirurgicale (6). La dose des corticoïdes peut être diminuée progressivement après la fin de la radiothérapie, mais ceux-ci doivent presque toujours être repris lors de la récidive et de la fin de vie.

Les phlébites sont fréquentes chez les patients atteints de glioblastome (environ 25 %) (8). Un traitement anticoagulant à doses curatives doit alors être institué. L’existence d’une tumeur cérébrale ne contre-indique pas les anticoagulants, sauf si une hémorragie active est vue à l’IRM ou au scanner cérébral.

Un traitement antiépileptique prophylactique n’est pas recom-

En ce qui concerne les symptômes neurologiques focaux, la kinésithérapie et l’orthophonie sont parfois utiles pour améliorer la qualité de vie du patient. Enfin, il ne faut pas méconnaître les troubles anxiodépressifs de ces patients, devant la récidive quasiconstante et le pronostic très sombre (9).

Récidive tumorale Lors de la récidive, une nouvelle exérèse chirurgicale peut être envisagée si la localisation de la tumeur le permet. La radiothérapie stéréotaxique sur une lésion de moins de 3 cm de diamètre ne fait pas partie des standards thérapeutiques compte tenu du caractère très infiltrant de cette tumeur. Quant aux chimiothérapies classiques, elles ont un effet bénéfique modeste. En effet, une analyse rétrospective de huit études de phase II (10), avec diverses chimiothérapies (carboplatine, procarbazine, 5FU, ménogaril) pour les glioblastomes en récidive, retrouve une médiane de survie sans progression (SSP) de 2,1 mois, une SSP à 6 mois de 15 % et une survie médiane de 5,8 mois. En pratique, une chimiothérapie par nitrosurées (principalement

Tableau 1 - Récapitulatif des essais sur l’utilisation du bevacizumab en cas de récidive tumorale. Essai clinique

Wong 1999 (10)

Kreisl 2009 (12)

Friedman 2009 (13)

Raizer 2010 (14)

Taal 2013 (15)

Phase

II

IIa

IIb

II

IIb

Chimiothérapie

Variable

BV

BV

BV

Lm

Dose de BV

-

10 mg/kg 14 doses

BV+ I 10 mg/kg 14 doses

BV

15 mg/kg 21 doses 50

Field 2013 (16)

Lm + BV 10 mg/kg 14 doses

n

225

48

82

85

46

50

RR

6%

35 %

28,2 %

37,8 %

SSP médiane

2,1 mois

4 mois

4,2 mois

5,6 mois

2,8 mois

2 mois

3 mois

4 mois

SSP 6 mois

15 %

29 %

42,6 %

50,3 %

25 %

11 %

18 %

Médiane de survie

5,8 mois

7,75 mois

9,2 mois

8,7 mois

6,5 mois

8 mois

8 mois

BV

BV + Crb 10 mg/kg 14 doses

52

118 13 %

15 %

41 %

24 %

26 %

12 mois

6,4 mois

6,9 mois

n : nombre de patients atteints de glioblastome ; SSP : survie sans progression ; RR : réponse radiologique ; BV : bevacizumab ; I : irinotecan ; Lm : lomustine ; Crb : carboplatine onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41

149


traitement

le BCNU) est essayée à la récidive, suivie par du carboplatine à la progression tumorale, même si aucun essai thérapeutique n’a prouvé leur efficacité de façon formelle. Lors de la dernière décennie, plusieurs thérapies dites “ciblées”, inhibant les voies de l’oncogenèse, ont été essayées chez des patients souffrant de glioblastome. Les résultats de ces essais cliniques ont été décevants, à l’exception de ceux menés avec du bevacizumab (11). De multiples essais ont testé le bevacizumab à la récidive, soit en monothérapie, soit en combinaison avec la chimiothérapie (Tab. 1) (10, 12-16). L’ensemble des études souligne un taux de réponses radiologiques élevé, avec amélioration clinique et réduction des besoins en corticoïdes. Son impact sur la survie est en revanche très discuté en l’absence d’essai randomisé d’envergure. Sur la base de ces résultats, le bevacizumab a été autorisé aux États-Unis.

Le bevacizumab est donc actuellement une option thérapeutique chez les glioblastomes en récidive, à condition que son utilisation ne soit pas contre-indiquée du fait d’un saignement intratumoral ou d’une thrombose veineuse par exemple. La survie après échappement thérapeutique sous bevacizumab reste très sombre, aux alentours de 2-2,5 mois (14).

Biologie moléculaire et avenir Jusqu’à présent, les marqueurs moléculaires et les altérations génétiques n’ont pas d’impact sur les décisions thérapeutiques. Il existe cependant des marqueurs dont la valeur pronostique ou prédictive est connue. L’existence d’une mutation IDH-1 (isocitrate déshydrogénase - 1) a une valeur pronostique favorable indépendamment du traitement par chimiothérapie associé. Elle n’est retrouvée que dans les glio-

blastomes dits secondaires, c’està-dire survenant sur une tumeur de plus bas grade. La méthylation du promoteur MGMT, retrouvée dans 40 % des glioblastomes primaires ou secondaires, a une valeur prédictive favorable concernant le bénéfice de chimiothérapie par temozolomide (2, 17, 18). Les difficultés techniques liées à son dosage n’ont pas permis son implantation en routine. Des chimiothérapies adaptées au profil moléculaire spécifique de chaque patient seraient souhaitables, en attendant qu’un nouveau traitement fasse la preuve d’une efficacité importante. n

Mots-clés : Glioblastome, Tumeur cérébrale primitive, Radiothérapie, Chimiothérapie, Temozolomide, Bevacizumab, Récidive tumorale

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150

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onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41


zoom sur Général

Fatigue musculaire et cancer Approche physiologique Pr André-Xavier Bigard*, Pr Michèle Beaudry**, Pr Laurent Zelek***

Introduction La fatigue est actuellement la principale plainte fonctionnelle retrouvée chez des patients atteints de cancers, notamment en cours et dans les suites de chimiothérapie. C’est un problème important qui affecte très sévèrement les patients et altère durement leur qualité de vie (1). La prévalence des états de fatigue est très importante puisqu’on estime que 70 à 96 % des patients suivant une chimiothérapie ou une radiothérapie présentent des signes cliniques de fatigue (2). Même si dans les suites des traitements, la prévalence des états de fatigue se réduit, jusqu’à n’affecter que 20 à 40 % des patients suivis (3), la sévérité des traitements initiaux semble être déterminante pour les suites et pour le maintien de la qualité de vie. Différentes thérapeutiques ont été proposées, parfois assez efficaces, pour lutter contre ces états d’épuisement, mais la caractérisation et les mécanismes biologiques à l’origine de la fatigue restent très largement méconnus (4). Le terme de fatigue peut accepter plusieurs définitions, ce qui rend complexe son diagnostic et la détermination de son origine. La fatigue peut être vue sous l’angle subjectif comme résultant d’un état perçu qui affecte directement la réalisation d’une tâche, ou sous un angle plus physiologique, en étant alors défini comme un état d’incapacité à maintenir la charge d’un travail déterminé, que celui-ci soit physique (travail musculaire) ou mental (travail intellectuel). Il s’agit ici de traiter de l’approche physiologique de la fatigue, qui se caractérise par une altération de la fonction de l’effecteur musculaire et qui peut être définie comme étant l’incapacité du muscle à maintenir un niveau de force requis, conduisant à la faillite de performance. Cette notion a été étendue à d’autres grandeurs mécaniques caractérisant les fonctions du muscle. Ainsi, la fatigue musculaire se caractérise aussi par une impossibilité à délivrer une puissance attendue, avec pour conséquence une altération de la force développée, mais aussi de la vitesse de contraction du muscle (5).

Fatigues centrale et/ou périphérique Les travau x histor iques de Bigland-Ritchie (1984) ont permis d’identifier les principales structures impliquées dans la fatigue, du cortex cérébral aux *Professeur agrégé du Val-de-Grâce, Agence Française de lutte contre le dopage, Paris **Professeur des universités, Université Paris 13, Bobigny ***Professeur des universités, Praticien hospitalier, Hôpital Avicenne, Bobigny

onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41

ions et macromolécules impliqués dans le couplage excitationcontraction du muscle lui-même. De nombreuses controverses ont alimenté le débat qui consistait à déterminer les rôles respectifs joués par les structures centrales et périphériques dans la fatigue. Ce qu’il importe de retenir c’est que, classiquement, les acteurs

moléculaires et cellulaires de la fatigue ont été classés en deux grandes catégories, selon qu’ils interviennent au dessus de la jonction neuromusculaire (fatigue centrale) ou qu’ils résident au sein des fibres musculaires, après la jonction neuromusculaire (fatigue périphérique).

La fatigue centrale La fatigue centrale se caractérise principalement par une altération du recrutement moteur au niveau du cortex (6). La fatigue qui résulte d’une activité motrice volontaire reste un phénomène complexe, et nous n’avons à ce jour que peu d’informations sur le rôle joué par le système nerveux central. Des expérimentations d’électrophysiologie suggèrent que la fatigue serait à l’origine d’une diminution de la commande nerveuse des effecteurs musculaires impliqués dans le mouvement. Par ailleurs, plusieurs autres hypothèses ont été développées pour expliquer la fatigue, impliquant certains neurotransmetteurs dont la sérotonine, la dopamine et les monoamines. La plus communément admise met en jeu le système sérotoninergique (7). Un certain nombre de résultats montre que l’augmentation ou la diminution de l’activité sérotoninergique peut accélérer ou diminuer la fatigue. Cependant, la question de l’altération du système sérotoninergique dans l’origine de la fatigue reste ouverte. 151


Zoom sur

Par ailleurs, l’hyperammonémie et l’augmentation de l’ammoniaque cérébrale peuvent agir sur le système nerveux central et la fatigue (8). Des corrélations ont été établies entre l’entrée d’ammoniaque dans le système nerveux central et, d’une part, sa concentration dans le liquide céphalorachidien, et, d’autre part, sa concentration dans le sang artériel, suggérant un rôle de l’accumulation d’ammoniaque dans le cerveau sur l’apparition de la fatigue centrale. Une autre origine de la fatigue centrale est actuellement largement étudiée ; il s’agit de celle qui implique l’interleukine-6 (IL-6). Des observations récentes et très reproductibles démontrent que de nombreuses altérations du comportement sont observées dans le cadre de maladies inflammatoires chroniques, avec notamment des états de fatigue rebelle. Ces notions ont permis de proposer une implication de certaines cytokines pro-inflammatoires, dont le TNF-α, l’IL-1b et l’IL-6 (9). Des arguments expérimentaux permettent de penser que la présence de cytokines pro-inflammatoires perturbe directement certains systèmes de neurotransmission, notamment le système sérotoninergique. Des travaux réalisés chez l’Homme sain, sans pathologie évolutive, ont suggéré un rôle tout particulier de l’IL-6 dans l’origine de la fatigue (10). De tels travaux prennent une résonance particulière dès lors que l’on traitera de l’origine de la fatigue dans les suites de cancer.

La fatigue périphérique Bien que les états de fatigue musculaire, induits soit par des contractions musculaires de haute intensité, de courte durée et 152

répétées, soit par des contractions de faible intensité mais très prolongées, résultent de mécanismes différents, leur caractérisation fonctionnelle est très similaire et se traduit dans tous les cas par une faillite de la production de force ou de la puissance. Cet état de fatigue peut être dépendant de multiples facteurs, mais l’altération des mouvements du calcium et la déficience des processus de resynthèse de l’ATP jouent un rôle essentiel dans la fatigue. ❚❚Mouvements du calcium Il est maintenant parfaitement démontré que l’altération des

encore largement débattues est de savoir si la baisse des concentrations intracellulaires en ATP permet d’atteindre des valeurs critiques qui affectent de manière très sensible et rapide le couplage excitation-contraction (5). Il semble en effet que certains évènements moléculaires contemporains de la fatigue altèrent l’utilisation de l’ATP (notamment au niveau des ponts actine-myosine) avant que sa concentration cellulaire n’atteigne un niveau critique. La concentration intracellulaire de PCr dans les fibres baisse aussi de manière importante au décours du travail musculaire intense.

L’altération des mouvements du calcium joue un rôle fondamental dans la fatigue. mouvements du calcium joue un rôle fondamental dans la fatigue. Les mouvements de cet ion essentiel à la contraction peuvent être altérés soit au niveau de leur libération à partir du réticulum sarcoplasmique (RS), soit au niveau de leur recapture dans le RS par des pompes ioniques dépendantes de l’ATP (SERCAs). L’altération des processus de resynthèse de l’ATP a donc des conséquences directes sur la recapture de calcium par le réticulum sarcoplasmique de la fibre musculaire et sur le maintien de la contraction. ❚❚Phosphagènes et fatigue musculaire Les concentrations en ATP et en phosphocréatine (PCr, substrat de la première filière métabolique impliquée dans la resynthèse de l’ATP) varient en fonction du muscle considéré, mais aussi et surtout en fonction de l’état d’entraînement du sujet. L’une des questions qui restent

Le rôle joué par la déplétion de PCr dans les fibres amène à poser les mêmes questions que pour l’ATP. Il convient donc de rester prudent avant de conclure que la fatigue musculaire observée au cours des contractions intenses et de très courtes durées a une origine métabolique directe. Cependant, compte tenu de la fonction des mitochondries dans la resynthèse rapide de PCr, grâce à l’activité de la créatine-kinase mitochondriale et à la navette Cr-PCr, le métabolisme oxydatif joue un rôle essentiel dans la récupération de contractions intermittentes et la resynthèse de la PCr. ❚❚Glycogène musculaire et fatigue L’importance des réserves musculaires en glycogène est fondamentale afin d’assurer le maintien optimal du travail musculaire. Les réserves en glycogène dépendent du type de muscle et du type de onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41


Fatigue musculaire et cancer

fibres, les fibres les plus glycolytiques (de type IIx) ayant des réserves plus élevées en glycogène que les fibres oxydatives (types I et IIa). Il est indéniable que l’altération des réserves musculaires en glycogène peut expliquer certains états de fatigue.

L’évaluation de la fatigue musculaire impose une analyse des principales fonctions du muscle, ce qui nécessite un certain nombre d’outils de mesure et une mesure fine des différentes propriétés musculaires.

Les mesures de force sont nécessaires Les mesures de force peuvent s’envisager dans les différents modes de contraction musculaire, c’està-dire en mode isométrique ou anisométrique. • En mode isométrique (contraction réalisée à longueur du muscle constante), la force segmentaire maximale peut être mesurée sur un ergomètre dédié ou à l’aide d’un simple capteur de force. Dans ce mode de contraction, le déterminant principal de la performance de force est la masse musculaire. Ainsi, la force mesurée est en général rapportée à la masse ou au volume du groupe musculaire engagé dans la contraction. • En mode anisométrique, le couple maximal développé peut être mesuré en raccourcissement (contraction concentrique) ou en étirement (contraction excentrique). La mesure des couples impose de posséder un ergomètre isocinétique de manière à ce que des vitesses de rotation angulaire onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41

© Andrzej Wilusz -123 RF

Quels outils pour évaluer la fatigue ?

Les signes cliniques de fatigue se caractérisent par un sentiment d’épuisement pour des mouvements et activités anodins et/ou une faiblesse généralisée.

parfaitement contrôlées soient imposées. Les performances musculaires dépendent ici de la masse musculaire, mais aussi de la composition des muscles dans les différents types de fibres.

Objectiver la fatigue musculaire Conformément à la définition de la fatigue, l’objectiver nécessite d’imposer un travail musculaire parfaitement défini pour chaque sujet, pour lequel on va évaluer l’incapacité à maintenir le niveau de force imposé. L’apparition de la fatigue peut être étudiée au décours de différentes modalités de travail musculaire (contraction isométrique prolongée, à différents pourcentages de la force maximale mesurée pour chaque sujet, contractions isocinétiques concentriques ou excentriques, etc.), et objectivée de différentes manières (arrêt volontaire de la contraction par le sujet, pourcentage de diminution par rapport au niveau de force exigé, etc.).

Origine de la fatigue Comme nous l’avons évoqué cidessus, il est important, après avoir objectivé un état de fatigue musculaire, d’avoir des éléments sur l’origine de la fatigue. Depuis quelques années, la stimulation neurale percutanée directe a été proposée pour permettre de répondre à cette question. En effet, la stimulation électrique percutanée peut être appliquée alors que les muscles sont au repos ou lors de contractions volontaires. Ce moyen d’investigation permet de faire la part de l’origine périphérique et/ou centrale de l’altération de la production de force. Il s’agit d’analyser les tracés de force et de vérifier si la stimulation neurale induit un surplus de force développée, ou pas, ce qui permet d’orienter le diagnostic de la fatigue vers une origine centrale ou une origine périphérique. Cette méthode, dont l’utilisation reste très pratique en recherche clinique, présente cependant quelques limites méthodologiques. Ceci explique le 153


Zoom sur

développement de nouvelles techniques d’exploration supraspinale, comme la stimulation magnétique transcrânienne (11).

Cancer et fatigue musculaire Cancer et fatigue allégée Les signes cliniques de fatigue se caractérisent par un sentiment d’épuisement pour des mouvements et activités anodins et/ou une faiblesse généralisée. La fatigue affecte près de 70 % des patients atteints d’un cancer, dans les suites de traitements ou de chirurgie (12). C’est cette fatigue qui semble le plus affecter les patients dans leur confort et leur qualité de vie quotidienne. Cet état de fatigue est retrouvé de manière prépondérante dans les suites de traitement. Ainsi, dans certaines études, l’état de fatigue a persisté entre 2 et 10 ans chez 76 % des patientes ayant bénéficié d’une radiothérapie pour cancer du sein (13). Il semble cependant que dans les suites de radiothérapie, la persistance de l’état de fatigue soit maintenant moins importante et que la fatigue revienne à l’intensité mesurée avant la radiothérapie, entre 2 et 6 mois après la fin du traitement (14). La fatigue est très commune chez les patients ayant bénéficié de chimiothérapies. On a estimé que 82 % des femmes présentent un état de fatigue invalidant après la première cure de chimiothérapie pour cancer du sein, et 77 % après la deuxième cure (15). Un peu plus de 7 mois après la fin de la chimiothérapie, la prévalence de l’état de fatigue est de 83 % chez des patientes atteintes d’un cancer du sein (16). Enfin, 40 % 154

des patientes survivant des mois et des années après un cancer du sein présentent toujours un état de fatigue sévère (17). L’étiologie de la fatigue très fréquemment observée dans les suites de cancers reste complexe, est probablement de nature très multifactorielle et demeure un champ de recherche important. Elle est très probablement liée à la maladie elle-même (état inflammatoire systémique), aux effets secondaires des traitements (libération massive de cytokines à partir des tissus nécrosés atteints par les traitements), à l’état psychologique des patients (état anxiodé-

disponibilité en substrats utilisables par le muscle, qui peuvent, au moins en partie, expliquer les états de fatigue. La radiothérapie peut affecter de manière très sensible la perméabilité et les fonctions de différentes membranes, dont les membranes du réticulum sarcoplasmique et des mitochondries, ce qui affecte les mouvements du calcium et l’utilisation des substrats par le métabolisme aérobie (19).

Objectivation de la fatigue musculaire dans les suites de cancer La fatigue musculaire a été évaluée chez des patients atteints

Les troubles de l’appétit et de la prise alimentaire peuvent, au moins en partie, expliquer les états de fatigue. pressif, stress émotionnel, etc.), mais aussi au déconditionnement lié à l’inactivité profonde induite par la maladie et les effets secondaires des traitements.

Atteinte potentielle de la fonction musculaire dans les suites de cancer L’immobilisation et l’inactivité induites par la maladie sont à l’origine d’une amyotrophie importante (18). L’immobilisation prolongée, comme le repos complet au lit, est à l’origine d’une amyotrophie marquée, qui, chez des patients atteints de cancer, est majorée, d’une part par la libération de cytokines pro-inflammatoires à partir des tumeurs, et d’autre part par l’utilisation potentielle de traitements immunosuppresseurs. Les troubles de l’appétit et de la prise alimentaire ont des conséquences directes sur la

de cancers. Chez des patients examinés 4 semaines après la fin de toute chimiothérapie et radiothérapie, un état de fatigue musculaire a été confirmé. Il se manifeste par une réduction du temps de maintien d’une contraction sous-maximale prolongée des fléchisseurs du coude (correspondant à 30 % des valeurs maximales individuelles) (20). Cette réduction de l’endurance musculaire qui caractérise l’état de fatigue a été suggérée comme relevant surtout d’une origine centrale avec une altération de la capacité à recruter les unités motrices musculaires au cours des contractions volontaires. Au cours d’une autre étude, le temps maximal de maintien d’une contraction isométrique à 30 % de la force maximale volontaire des f léchisseurs du coude est réduit de 32 % chez des patients présentant un cancer viscéral en onko + • Octobre 2013 • vol. 5 • numéro 41


Fatigue musculaire et cancer

cours de traitement, par rapport à des sujets sains appariés en âge. Cet état de fatigue musculaire est plutôt attribué à des mécanismes d’origine centrale (21). Parmi ces deux seules études publiées à ce jour, on ne retrouve que peu d’éléments sur la qualité de la contraction musculaire et sur les caractéristiques du pic de contraction (forme de la secousse, relation avec la masse musculaire, etc.). Ces deux études semblent fortement impliquer des processus centraux dans l’origine de la fatigue. Ceci mérite cependant d’être confirmé sur un nombre plus important de patients, avec une approche

expérimentale et des méthodes d’analyse plus adaptées.

Conclusions La fatigue reste une plainte majeure dans les suites de cancer, aussi bien pendant et dans les suites précoces des traitements, que dans leurs suites plus tardives. Le diagnostic de l’origine de cet état de fatigue reste complexe et ce dernier est très certainement multifactoriel. Le rôle joué par le muscle, effecteur de tout mouvement, dans la fatigue des suites de cancer nécessite aussi d’être objectivement éclairci. De l’origine

centrale ou périphérique de la fatigue musculaire, découlent des orientations thérapeutiques adaptées. Certaines thérapeutiques non pharmacologiques ont dès à présent fait preuve d’efficacité sur la fatigue, au premier rang desquelles la pratique régulière d’une activité physique adaptée (22). n

Mots-clés : Fatigue musculaire, Fatigue centrale, Fatigue périphérique, Chimiothérapie, Radiothérapie

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Cancer cutané

La peau s’affiche pour la kératose solaire

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a kératose solaire (ou kératose actinique), due à une exposition solaire excessive au cours de la vie, peut évoluer, dans un petit nombre de cas, en cancer cutané, d’où l’intérêt d’une surveillance régulière. Cette affection est largement méconnue du grand public, mais touche pourtant 1 personne sur 5 chez les plus de 60 ans. Pour sensibiliser le grand public à cette affection, le laboratoire LEO Pharma a organisé un événement street art les 12 et 13 octobre dernier sur la place du Palais Royal à Paris. Vingt-cinq photographies d’hommes et de femmes ont été assemblées pour former une silhouette humaine de 750 m2, afin de montrer la diversité et l’inégalité de notre peau vis-à-vis du soleil. Cette mosaïque humaine a ensuite été laissée entre les mains de sept artistes de street art pour un résultat original. n Pour en savoir plus : www.lapeausaffiche.com , www.leo-pharma.fr

Cancer de la thyroïde

Caprelsa® : le seul inhibiteur de tyrosine kinase pour le traitement du cancer médullaire de la thyroïde

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usqu’à présent, aucune thérapie approuvée n’était disponible pour le traitement du cancer médullaire de la thyroïde, la seule option envisageable étant la chirurgie (thyroïdectomie). Un nouveau médicament, Caprelsa® (laboratoire Astrazeneca), est désormais indiqué pour le traitement du cancer médullaire de la thyroïde agressif et symptomatique chez les patients avec une maladie localement avancée non opérable ou métastatique. Il s’agit d’un inhibiteur sélectif, notamment de l’activité tyrosine kinase du VEGFR, du récepteur RET (réarrangé au cours d’une transfection) et de l’EGFR. L’administration de Caprelsa® entraîne des réponses positives (réduction de l’angiogenèse induite par les cellules tumorales, de la perméabilité des vaisseaux tumoraux, etc.), mais le mécanisme d’action exact est inconnu. Son efficacité a été démontrée par l’étude ZETA (étude clinique de phase III). Les résultats ont mis en évidence une amélioration significative de la survie sans progression avec Caprelsa® par rapport au placebo.

Ce médicament a obtenu une AMM européenne conditionnelle en 2012. n Pour en savoir plus : www.astrazeneca.fr

Cancer bronchique

Le nintedanib : prometteur pour les patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules

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’étude clinique de phase III LUME-Lung 1 a montré que la molécule nintedanib prolonge la survie de 2,3 mois chez les patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules de type adénocarcinome, lorsqu’elle est associée au docétaxel. Ces résultats sont intéressants car aucune avancée n’avait été observée depuis près de 10 ans en termes de survie globale chez les patients atteints de CBNPC traités en 2e ligne. Le nintedanib est un triple inhibiteur de l’angiokinase ; il bloque de façon simultanée trois récepteurs de facteurs de croissance. Le blocage de ces récepteurs est susceptible d’inhiber l’angiogenèse et donc de limiter la croissance tumorale. Cette molécule fait encore l’objet d’études et n’est pas autorisée actuellement. n Pour en savoir plus : www.boehringer-ingelheim.com

Innovation thérapeutique

Leucémie aiguë myéloïde : la FDA accorde le statut d’innovation thérapeutique au volasertib

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e laboratoire Boehringer Ingelheim prévoit de collaborer avec la FDA pour proposer une potentielle option thérapeutique pour le traitement des leucémies aiguës myéloïdes (hémopathies malignes) : le volasertib, un inhibiteur sélectif de la Plk (polo-like kinase). Grâce à son mode d’action, cette molécule pourrait constituer une approche innovante pour les patients en attente de solution. La tolérance et l’efficacité du volasertib n’ont pas encore été totalement démontrées. Boehringer Ingelheim souhaite s’impliquer pour accélérer la phase finale du développement du volasertib et rendre accessible cette thérapeutique aux patients. n Pour en savoir plus : www.boehringer-ingelheim.com

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