Onko41 fatigue musculaire

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ZOOM SUR GĂŠnĂŠral

Fatigue musculaire et cancer Approche physiologique Pr AndrÊ-Xavier Bigard*, Pr Michèle Beaudry**, Pr Laurent Zelek***

Introduction La fatigue est actuellement la principale plainte fonctionnelle retrouvĂŠe chez des patients atteints de cancers, notamment en cours et dans les suites de chimiothĂŠrapie. C’est un problème important qui affecte très sĂŠvèrement les patients et altère durement leur qualitĂŠ de vie (1). La prĂŠvalence des ĂŠtats de fatigue est très importante puisqu’on estime que 70 Ă 96 % des patients suivant une chimiothĂŠrapie ou une radiothĂŠrapie prĂŠsentent des signes cliniques de fatigue (2). MĂŞme si dans les suites des traitements, la prĂŠvalence des ĂŠtats de fatigue se rĂŠduit, jusqu’à n’affecter que 20 Ă 40 % des patients suivis (3), la sĂŠvĂŠritĂŠ des traitements initiaux semble ĂŞtre dĂŠterminante pour les suites et pour le maintien de la qualitĂŠ de vie. DiffĂŠrentes thĂŠrapeutiques ont ĂŠtĂŠ proposĂŠes, parfois assez efficaces, pour lutter contre ces ĂŠtats d’Êpuisement, mais la caractĂŠrisation et les mĂŠcanismes biologiques Ă l’origine de la fatigue restent très largement mĂŠconnus (4). Le terme de fatigue peut accepter plusieurs dĂŠfinitions, ce qui rend complexe son diagnostic et la dĂŠtermination de son origine. La fatigue peut ĂŞtre vue sous l’angle subjectif comme rĂŠsultant d’un ĂŠtat perçu qui affecte directement la rĂŠalisation d’une tâche, ou sous un angle plus physiologique, en ĂŠtant alors dĂŠfini comme un ĂŠtat d’incapacitĂŠ Ă maintenir la charge d’un travail dĂŠterminĂŠ, que celui-ci soit physique (travail musculaire) ou mental (travail intellectuel). Il s’agit ici de traiter de l’approche physiologique de la fatigue, qui se caractĂŠrise par une altĂŠration de la fonction de l’effecteur musculaire et qui peut ĂŞtre dĂŠfinie comme ĂŠtant l’incapacitĂŠ du muscle Ă maintenir un niveau de force requis, conduisant Ă la faillite de performance. Cette notion a ĂŠtĂŠ ĂŠtendue Ă d’autres grandeurs mĂŠcaniques caractĂŠrisant les fonctions du muscle. Ainsi, la fatigue musculaire se caractĂŠrise aussi par une impossibilitĂŠ Ă dĂŠlivrer une puissance attendue, avec pour consĂŠquence une altĂŠration de la force dĂŠveloppĂŠe, mais aussi de la vitesse de contraction du muscle (5).

FATIGUES CENTRALE ET/OU PÉRIPHÉRIQUE Les travau x histor iques de Bigland-Ritchie (1984) ont permis d’identifier les principales structures impliquĂŠes dans la fatigue, du cortex cĂŠrĂŠbral aux *Professeur agrĂŠgĂŠ du Val-de-Grâce, Agence Française de lutte contre le dopage, Paris **Professeur des universitĂŠs, UniversitĂŠ Paris 13, Bobigny ***Professeur des universitĂŠs, Praticien hospitalier, HĂ´pital Avicenne, Bobigny

onKo + t 0DUPCSF t WPM t OVNšSP

ions et macromolÊcules impliquÊs dans le couplage excitationcontraction du muscle lui-même. De nombreuses controverses ont alimentÊ le dÊbat qui consistait à dÊterminer les rôles respectifs jouÊs par les structures centrales et pÊriphÊriques dans la fatigue. Ce qu’il importe de retenir c’est que, classiquement, les acteurs

molĂŠculaires et cellulaires de la fatigue ont ĂŠtĂŠ classĂŠs en deux grandes catĂŠgories, selon qu’ils interviennent au dessus de la jonction neuromusculaire (fatigue centrale) ou qu’ils rĂŠsident au sein des fibres musculaires, après la jonction neuromusculaire (fatigue pĂŠriphĂŠrique).

LA FATIGUE CENTRALE La fatigue centrale se caractĂŠrise principalement par une altĂŠration du recrutement moteur au niveau du cortex (6). La fatigue qui rĂŠsulte d’une activitĂŠ motrice volontaire reste un phĂŠnomène complexe, et nous n’avons Ă ce jour que peu d’informations sur le rĂ´le jouĂŠ par le système nerveux central. Des expĂŠrimentations d’Êlectrophysiologie suggèrent que la fatigue serait Ă l’origine d’une diminution de la commande nerveuse des effecteurs musculaires impliquĂŠs dans le mouvement. Par ailleurs, plusieurs autres hypothèses ont ĂŠtĂŠ dĂŠveloppĂŠes pour expliquer la fatigue, impliquant certains neurotransmetteurs dont la sĂŠrotonine, la dopamine et les monoamines. La plus communĂŠment admise met en jeu le système sĂŠrotoninergique (7). Un certain nombre de rĂŠsultats montre que l’augmentation ou la diminution de l’activitĂŠ sĂŠrotoninergique peut accĂŠlĂŠrer ou diminuer la fatigue. Cependant, la question de l’altĂŠration du système sĂŠrotoninergique dans l’origine de la fatigue reste ouverte. 151


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