Pharma110 complet

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édito

Jardin secret

M

a dermato est une femme charmante. Elle exerce dans un minuscule cabinet, tout encombré de classeurs à tiroirs. Dans chaque tiroir, des centaines de fiches. En papier. Toute sa patientèle depuis

probablement des décennies y est répertoriée, de son écriture hiéroglyphique, sur des bristols. Ça me plaît et ça m’inquiète : niveau protection des données, c’est assez efficace. Quand bien même une personne malintentionnée ferait

Par Amélie BaumannThiriez, rédactrice en chef

main basse sur ces fiches, il lui faudrait encore les déchiffrer… et ça, à part un pharmacien, je ne vois pas qui pourrait y arriver. D’un autre côté, il suffirait d’un incendie ou d’un dégât des eaux pour que les fiches et leurs précieuses informations disparaissent à jamais. Brûlées, les verrues de Madame Michu, noyée, l’acné du petit Martin… et pour moi plus aucun moyen de savoir si mes grains de beauté ont évolué depuis l’année passée. Mon ophtalmo est un homme charmant. Il exerce dans un bureau immaculé où rien ne traîne. Son agenda, ses ordonnances, les examens qu’il réalise sur les patients, tout est informatisé, stocké numériquement. Ça me plaît et ça m’inquiète. C’est efficace, pratique, et il effectue des sauvegardes régulières sur un cloud. Mais ses données, mes données, sont-elles bien protégées ? Qui y a accès, est-il possible de les « hacker » ? Madame Michu risque-t-elle de voir un jour ses fonds d’œil circuler sur le Web ? Et nous, pharmaciens, qui sommes passés en quelques années au tout informatique, prenons-nous assez soin des données de santé de nos patients ? Si la question se pose pour toutes les officines, qui ont l’obligation de garantir la confidentialité des données personnelles dont elles disposent, le point devient encore plus crucial pour les pharmacies qui se sont lancées dans la vente en ligne. C’est pourquoi, en parallèle de notre dossier qui aborde l’ecommerce (voir p. 18), nous avons tenu à faire le point sur l’agrément HDS et ses implications à l’officine (voir p. 24). Histoire de s’assurer que les dossiers des patients ne disparaissent pas en cas de souci informatique, mais ne soient pas non plus accessibles au premier pirate venu. C’est Madame Michu qui vous dira merci.

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N° 110 • MARS 2014 • cahier 1 socio-pro

10 questions sur…

18 Dossier Automédication et vente en ligne, une aubaine commerciale pour l’officine ? 22 Back-office L’essor des pharmacies discount 24 Qualité Données de santé, enjeux et opportunités 26 Cursus Quand la fac passe au numérique 54 Le jour où… … j’ai publié mon premier polar

thérapeutique 28 Lu pour vous Sélection d’articles parus dans la presse scientifique internationale 30 Doc+ Subutex et méthadone, leur dispensation en pratique

©© B. BOISSONNET – BSIP

32 Rencontres de l’officine Comment améliorer l’observance thérapeutique ?

la dégénérescence maculaire liée à l’âge actualité Directeur de la publication : Antoine Lolivier Directrice du développement et de la publicité : Valérie Belbenoit Directeur de la rédaction : Antoine Lolivier Rédactrice en chef : Amélie Baumann-Thiriez Rédacteur en chef adjoint : Olivier Valcke Conception graphique : Laurent Flin Secrétaire de rédaction : Vincent Béclin Rédacteurs pour ce numéro : Julien Boyer, Anne Champy, Clémence Clerc, Anne Fellmann, Jérôme Lapray, Laetitia Leclercq, Rose Perrier, Marie Simonot Directrice de production et de fabrication : Gracia Bejjani Assistante de production : Cécile Jeannin Publicité : Emmanuelle Annasse, Aurélie Barnier, Valérie Belbenoit, Catherine Colsenet, Philippe Fuzellier Service abonnements : Claire Lesaint Photogravure et impression : Imprimerie de Compiègne, 2 Av Berthelot, ZAC de Mercières BP 60524, 60205 Compiègne cedex Pharma est une publication © Expressions Pharma 2, rue de la Roquette - Passage du Cheval-Blanc Cour de Mai - 75011 Paris Pour nous joindre : courrierpharma@expressiongroupe.fr Tél. : 01 49 29 29 29 - Fax : 01 49 29 29 19 RCS Paris B481 690 105 Commission paritaire : 0317 T 86202 ISSN : 2101-4752 - Mensuel Comité de rédaction et de lecture : Claude Arnoldi : pharmacien ; Irène Bakal : pharmacienne ; Anne Baron : pharmacienne ; Françoise Beaunier-Daligault : pharmacienne ; Catherine Boyer : pharmacienne ; Patricia Daligault : pharmacienne ; Damien Galtier : diététicien ; Emilie Lecorps : pharmacienne ; Aude Lepoutre : gastro-entérologue ; Philippe Lesieur : psychiatre ; Mme Maury : pharmacienne ; Marguerite Mouilleseaux : pharmacienne ; Elizabeth Muller : pharmacienne ; Pascal Poncelet : cardiologue ; Sylvie Rosenzweig : pharmacienne (réseau douleur-soins palliatifs) ; Gilles Traisnel : cardiologue ; Mr Vanpoulle : pharmacien.

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6 Actus Les derniers faits marquants du monde officinal 10 7es Rencontres de l’officine Retour en images sur un salon dont le succès ne se dément pas 12 Entretien Serge Papin, président de Système U : « Le pharmacien doit se fédérer pour résister » 14 L’observatoire des pharmaciens êtes-vous au point sur la protection des données de santé ? 16 Portrait Julie Decoopman, préparatrice dans le Nord et championne de France de motocross

36 10 questions sur… La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) 38 Mémo conseil Les solutions contre le rhume des foins 40 Dossier Nouvelles avancées en diabétologie 44 Cas de comptoir Cancer colorectal, le paradoxe à vaincre 46 Molécule Paracétamol, générique polémique

Gammes 48 Matériel et soins Marché du maintien à domicile : y aller ou pas ? 50 Dermo Peut-on vraiment préparer la peau au soleil ? 52 Nouveaux produits Médicaments, conseil et parapharmacie, zoom sur les innovations des laboratoires

Retrouvez le bulletin d’abonnement en page 51 Cette publication comporte deux cahiers : cahier 1 (56 pages), cahier 2 « Spécial transactions » (8 pages). Assemblés à cette publication : deux bulletins d’abonnement (2 et 4 pages). En couverture : © Alphaspirit – Fotolia


Actualité profession

télex

Santé publique

Progression inquiétante de l’obésité en France

©© Tracy King — fotolia

Un Français sur deux est en surpoids et 16 % sont obèses. Les résultats d’une étude MGEN/OpinionWay – « Habitudes de vie et surpoids » menée auprès de 2 339 personnes entre janvier et février 2014 – traduisent la progression inquiétante de l’obésité. Pourtant, 86 % des sondés jugent qu’ils ont une « bonne alimentation » et seuls 20 % des obèses considèrent leur alimentation « plutôt mauvaise ». Autre enseignement : 11 % des personnes interrogées déclarent manger au moins une fois par semaine dans un fast-food. Côté suivi médical, 23 % des Français ont déjà consulté un diététicien. Cette proportion passe à 42 % chez les obèses. Enfin, l’étude révèle que 73 % des sondés jugent leur mutuelle complémentaire légitime pour leur proposer un accompagnement en matière de prévention santé et d’activité physique. •

60

C’est, en pourcentage, le nombre de professionnels libéraux qui se disent inquiets pour l’avenir de leur activité, selon une enquête Harris Interactive-MACSF pour l’UNAPL sur un échantillon de 1 189 professionnels libéraux.

0,1

C’est, en pourcentage, ce que représente Internet pour le marché de l’automédication en France, contre 8 % en Allemagne ou au Royaume-Uni (source : Celtipharm).

Stop aux fuites urinaires ! Podium en 3D, affichettes, badges, fiches et livrets de conseils destinés aux patients… En mars, Les Pharmaciens associés, groupement de la coopérative Astera, se mobilisent contre l’incontinence. Un sujet tabou mais un marché dynamique. En moyenne, 8 % des clients d’une pharmacie sont concernés par ces problèmes, soit 15 clients potentiels par jour. Ce problème fréquent, qui augmente avec l’âge, touche de 3 à 5 millions d’individus. L’Académie pas favorable aux salles de shoot Considérant « l’absence de garantie de qualité, d’identité et d’asepsie des produits injectés » et « l’absence de rigueur méthodologique de l’expérimentation envisagée », l’Académie de pharmacie s’est déclarée contre l’ouverture de salles d’injection contrôlée de drogues. L’institution milite pour un renforcement des moyens alloués aux centres de soins pour toxicomanes et aux unités d’addictologie. 1001Pharmacies.com lève 2 millions d’euros La start-up 1001pharmacies.com, plate-forme permettant aux pharmacies de vendre leurs produits de santé sur Internet, a levé 2 millions d’euros auprès de la banque publique d’investissement (BPI), de la région LanguedocRoussillon et de plusieurs « business angels ». Ces fonds devraient permettre à la société de poursuivre son essor et de se lancer à l’international.


Actualité profession

télex

Initiative

Mieux accompagner Alzheimer Renforcer le rôle de conseil du pharmacien sur les pathologies sensibles, tel est l’enjeu de Biogaran Expertise Alzheimer, un service dédié aux patients atteints de cette maladie. Réalisé par des experts neurologues et pharmaciens, ce programme d’accompagnement, disponible sur clé USB, ambitionne d’aider les officinaux à mieux suivre leurs patients via des outils interactifs simples et ergonomiques. Une formation Alzheimer est proposée pour développer l’expertise des équipes sur cette pathologie.

Elle se décline en quatre modules : physiopathologie, analyse d’ordonnances, cas de comptoir et interviews de patients. Sont également au programme des quiz, des fiches de synthèse, des conseils personnalisables ou un annuaire répertoriant les centres d’aide régionaux pour améliorer la qualité de la dispensation au comptoir et l’accompagnement patients/aidants. En France, 3 millions de personnes sont concernées (entourage et malades) par la maladie d’Alzheimer, dont plus de 850 000 malades. •

Entretiens pharmaceutiques

Observia, pour le suivi des patients AVK Cet outil interactif, développé par l’opérateur de services e-santé Observia avec les laboratoires Sandoz, propose une solution dynamique et pédagogique pour préparer, mener et assurer le suivi des entretiens des patients sous antivitamine K. Le service permet, en amont des rendez-vous, de se préparer et de préparer les équipes grâce à des supports de formation ou des conseils. Bulletin d’adhésion, courrier d’information de l’Assurance maladie, fiche de suivi de l’entretien, carnet d’information patient… sont disponibles et imprimables depuis le logiciel. Durant l’entretien, les modules comprenant vidéos, pilulier interactif,

conseils et contenus multimédias enrichissent le dialogue avec le patient. Le questionnaire d’entretien peut être rempli simultanément et les outils sont imprimables. Après l’entretien, le module agenda permet la gestion des rendez-vous, avec rappels par SMS ou appel vocal cinq jours et 48 heures avant. Des SMS hebdomadaires contenant des conseils hygiéno-diététiques peuvent aussi être envoyés entre deux entretiens. Ce logiciel est téléchargeable gratuitement et compatible PC, tablette Android ou IOS. Une tablette avec accès Wii ou carte 3 G peut être louée auprès d’Observia au besoin. • www.observia.fr

Le sondage pharma/Celtipharm L’e-prescription à l’essai

Le 29 janvier, lors d’une rencontre avec les syndicats de pharmaciens et de médecins, l’Assurance maladie a présenté un projet d’expérimentation d’e-prescription. •Ê tes-vous favorable à l’e-prescription ? OUI ................................................. 51 % NON ...................................................49 % • La transmission d’ordonnances par messagerie entre médecins

et pharmaciens vous semble-t-elle sûre ? OUI ................................................. 57 % NON ...................................................43 % • Pensez-vous que l’e-prescription soit, comme le définit l’Ordre, « un

garant d’efficacité et de qualité des soins, par la réduction des erreurs et la possibilité de mieux relier ‘‘prescripteur’’ et ‘‘prescrit’’ » ? OUI ................................................. 40 % NON ...................................................60 % Étude réalisée par le département gestion de call center de Celtipharm, sur un échantillon représentatif stratifié de 400 officines françaises sélectionnées dans sa base de données (du 14 au 21 février 2014).

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Le rendez-vous Pharmagora Le salon de la pharmacie d’officine se tiendra le week-end des 29 et 30 mars, porte de Versailles à Paris. L’occasion de découvrir nouveautés et partenaires, de rencontrer les exposants et de se former lors de conférences dédiées. Infos et inscriptions sur le site www.pharmagora.com. Pharmagest dans le « cloud » C’est à Pharmagora que Pharmagest dévoilera sa nouvelle application cloud de suivi patients. Hébergée dans un environnement HDS (voir p. 24), elle permet aux pharmaciens de répondre à leurs nouvelles missions, notamment les entretiens pharmaceutiques. Des solutions pour la vente en ligne seront également présentées.

• Le tableau de bord de la nouvelle application cloud de suivi patients de Pharmagest, à découvrir le 29 mars. Avenant générique polémique L’Union nationale des pharmacies de France (UNPF) maintient sa position et a réaffirmé le 6 mars, lors de la commission paritaire nationale, qu’elle ne signerait pas l’avenant sur les génériques tant que l’arrêté d’application concernant la fixation du taux des remises consenties au titre des génériques ne sera pas publié au JO et conforme à ses demandes. 66 millions d’impatients… Douze ans après l’adoption de la loi Kouchner sur les droits des malades, le Collectif interassociatif sur la santé (CISS) lance le site www.66millionsdimpatients.org. Au travers d’actualités, de dossiers de fond, de témoignages (coups de gueule) et de modules pédagogiques comme des infographies ou le simulateur du « Vrai coût de votre santé », ce site ambitionne d’apporter au grand public les clés pour appréhender le fonctionnement de leur système de santé.


Actualité salon

7es Rencontres de l’officine

Un succès qui ne se dément pas Les 7es Rencontres de l’officine ont remporté un franc succès auprès des pharmaciens, avec trois jours de débats, d’échanges et de formation sur les mutations de la profession, ainsi que l’expertise de nombreux partenaires.

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échanges informels sur les stands, convivialité, démonstration de dispositifs médicaux, de formations pratiques à distance, prises de contact, conseils dédiés... Merci à tous nos partenaires qui ont fait vivre et animé ce congrès pendant trois jours. Rendez-vous est pris pour l’an prochain.

Rendez-vous l’année prochaine pour les 8es Rencontres ! mars 2014 • Pharma N°110 • 11


Entretien

Rencontre avec Serge Papin

« Le pharmacien doit se fédérer pour résister » C’est avec lucidité que le président de Système U analyse les bouleversements qui touchent la pharmacie. Pour Serge Papin, deux atouts peuvent la sauver : la mutualisation de moyens et la proximité.

Dès qu’il s’agit de professions réglementées, les pro-libéraux parlent de corporatismes d’un autre temps limitant la concurrence. Les pharmaciens défendent au contraire un monopole d’intérêt public, garant de la sécurité sanitaire des patients. Quelle est votre analyse ? Tout d’abord, il convient de préciser la position du groupement Système U dans ce « débat » qui agite la profession de pharmacien. Contrairement à certains distributeurs, nous n’avons jamais eu de velléités de vendre des médicaments. Nous sommes des commerçants indépendants associés en coopérative dont l’origine se trouve dans le petit commerce. Rappelons que les créateurs de la coopérative à la fin du XIXe siècle étaient des épiciers de villages. Notre cœur de métier, c’est l’alimentaire.

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La vente de tests de grossesse et d’ovulation en grande surface, vous êtes donc contre ? Je le répète : nous n’aspirons pas à tout vendre dans nos magasins. En revanche, et si la loi nous y autorise, nous proposerons des articles comme les kits de nettoyage pour les lentilles oculaires. À la différence des tests de grossesse, on peut qualifier ces produits de consommables. J’ai l’impression qu’il y a eu une certaine précipitation. Rappelons que ces tests sont des produits médicaux qui nécessitent le conseil et l’expertise d’un professionnel de santé.

avons aussi des contacts réguliers avec des représentants de groupements qui s’intéressent à notre modèle d’organisation. Pour rappel, Système U est une coopérative de commerçants indépendants. Chaque magasin dispose d’une large autonomie locale. Le directeur assume la prise de risque financière mais profite, en contrepartie de cotisations, de l’organisation nationale, à savoir les achats, la logistique, la communication, les systèmes d’information… Autant d’activités où le « poids » fait la puissance. Il faut savoir malgré tout que nous avons mis plusieurs décennies à stabiliser cette organisation et que nous avons vécu des épisodes difficiles, notamment dans les années 1970, dans le combat entre les « anciens » qui refusaient les supermarchés et les modernes. Pour répondre à votre question, je pense qu’il y aura toujours des commerçants indépendants mais regroupés, structurés. Il n’y a pas de recette miracle. Tout est question de bon sens, de mutualisation des moyens et des compétences. Pourquoi Système U fonctionne ? Peut-être parce que les coopérateurs – les patrons des magasins – sont aux manettes, que le conseil d’administration national est composé de coopérateurs exploitants de magasins élus par leurs pairs. Moi-même, je suis propriétaire d’un établissement en Vendée que j’ai exploité avec ma sœur dans le village où mon père était commerçant. Cette présence au plus près des décisions stratégiques évite les orientations hasardeuses.

Assiste-t-on à la fin du commerçant indépendant ? Nous connaissons bien les difficultés rencontrées par les pharmaciens, car des officines sont souvent présentes dans nos galeries marchandes. Nous

Comme tout commerçant, le pharmacien doit faire face à l’appétit de la grande distribution. Sur quels critères peut-il faire la différence ? Comme pour nous, les pharmaciens doivent trouver un moyen, une

©© d. r.

Pharma. L’Europe s’intéresse de près aux professions réglementées. Après les taxis, les pharmaciens seront-ils les prochains sur la liste des monopoles qui sautent ? Serge Papin. Au-delà de la question de monopole, il faut prendre en compte l’évolution de la société et l’accélération formidable qui se produit. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, nous avons vu l’arrivée de techniques, d’innovations qui ont plus changé le monde en cinquante ans que lors des cinq derniers siècles. La grande distribution est d’ailleurs la conséquence d’une mutation de la société qui a vu la population quitter les zones rurales pour les villes, les femmes accéder plus largement au marché du travail, le développement de l’automobile… Les métiers qui n’ont pas pris en compte ces évolutions ont disparu.


Nous n’avons jamais eu de velléités de vendre des médicaments. Il y a tant à faire avec l’alimentaire. organisation qui permettent de fédérer les moyens pour « faire ensemble ». Cela peut concerner les systèmes d’information, la marque… Autant de sujets où seul on n’est rien. À l’inverse, il s’agit pour le pharmacien de trouver de nouvelles missions, d’autres services de proximité qui accompagneront le patient localement. C’est un double mouvement : centrifuge au national et centripète au local. Le conseil est-il le dernier atout du pharmacien dans son combat contre la grande distribution ? Mieux que le conseil, je dirais que c’est sur le conseil de proximité que le pharmacien peut faire la différence. Contrairement à la grande distribution, il possède un réel savoir-faire auprès d’une patientèle de proximité. À lui de valoriser sa compétence dans ce domaine. Le pharmacien est dans l’humain, dans l’affect. Ceci demande certainement un réinvestissement de l’humain dans les officines, mais c’est la seule façon de faire la différence avec la grande distribution et Internet qui, il ne faut pas se voiler la face, arriveront inéluctablement. Il vaut mieux se préparer efficacement à ce défi plutôt que de construire des digues temporaires qui seront vite submergées. Quel regard portez-vous sur les nouvelles missions développées à l’officine : dépistage, prévention, accompagnement des patients chroniques ? On assiste à la même tendance dans notre coopérative. Nous devons réaffirmer notre savoir-faire métier, tout comme le pharmacien doit le faire avec son statut de professionnel de santé, acteur du système de soins. Si, en officine, cela se traduit par l’éducation thérapeutique, le suivi des patients chroniques, la prévention des risques iatrogéniques, dans nos commerces, cela passe par une valorisation des rayons métiers, c’est-àdire la boucherie, la poissonnerie ou les fruits et légumes. Des zones à forte valeur ajoutée, où le vendeur doit dispenser des conseils, valoriser ses produits, les sublimer…

La vente en ligne est-elle un levier de croissance pour les pharmaciens ? Aujourd’hui, on ne peut s’opposer au commerce électronique. Il s’impose et les lois n’y pourront rien. Il faut accompagner, profiter de la modernité plutôt que de s’y opposer systématiquement. C’est ce que nous faisons en développant par exemple le drive, un système où le client passe ses commandes par Internet et vient les récupérer sur le point de vente. Nous sommes leaders sur ce secteur en France, avec 600 drives. La rentabilité est incertaine mais c’est un service que le client réclame. Ne pas le faire, c’est rater le train des nouveaux services. Cette analyse vaut pour la vente de médicaments en ligne. Coopérative de commerçants, Système U résiste bien aux assauts de la grande distribution. Le groupe a vu son chiffre d’affaires grimper de 3,5 % en 2013. Quels sont les secrets de votre réussite ? Si l’on regarde les résultats des groupes de distribution pour 2013, on note que ceux qui progressent en parts de marché sont Leclerc, Intermarché et Système U, trois groupes de commerçants indépendants dont les magasins sont exploités par des entrepreneurs. Le magasin est leur patrimoine. Ce n’est pas un hasard, le commerce est une affaire de lien, de proximité. Cette capacité à appréhender les clients locaux est plus aisée pour un indépendant que pour le directeur salarié d’un groupe intégré, aussi compétent soit-il, car sa marge de manœuvre est plus serrée. Il doit respecter des directives du siège, qui a plus de mal à intégrer les spécificités locales. Et puis un groupe intégré doit « rendre des comptes » à ses actionnaires qui ont des « besoins » de rentabilité immédiate qui vont parfois à l’encontre de l’intérêt à long terme de l’entreprise. Chez Système U, nous avons depuis longtemps adopté un positionnement que nous désignons dans nos campagnes publicitaires sous le terme de « Nouveaux commerçants ». Il s’agit d’allier les techniques modernes de la

bio express

• 1955 Naissance à Saint-GillesCroix-de-Vie (Vendée) • 1976 Promoteur des ventes à la centrale LoireAtlantique des Unico (ancêtre de Système U) • 1981 Rejoint la supérette Unico de Chantonnay et crée le service communication de Système U • 2003 Vice-président de Système U • Depuis 2005 Président de Système U

grande distribution, qui permettent d’offrir les prix bas, la sécurité, etc., et les valeurs du bon commerçant (proximité, adaptabilité, capacité à créer du lien…). La recherche du prix bas poussée à son paroxysme est dangereuse. Elle détruit la valeur du produit et n’entraîne plus d’achats supplémentaires. Le client n’a plus les mêmes attentes qu’il y a vingt ans, il est devenu plus raisonnable, plus exigeant. C’est un mouvement de fond qui va nous obliger à faire évoluer notre modèle. Si on le croise avec l’irruption du commerce électronique dans l’alimentaire, il faut dès maintenant imaginer « le magasin du futur » et s’adapter à l’émergence d’un commerce mêlant magasin physique et électronique, livraison à domicile et dématérialisation. Dans une interview, vous avez dénoncé un marché de la grande distribution « déséquilibré et désinflationniste ». Comment rééquilibrer la donne ? Nous sommes entrés dans un marché déflationniste. Les produits de grandes marques reculent. Et cette baisse est supportée par les PME. Je vous donne un exemple : les M & M’s en sachet de 500 g ont vu leur prix de vente chuter de 17 % en trois ans… sans que leur prix d’achat auprès du fournisseur ne diminue d’autant. Pour compenser la perte de marge sur les « best-sellers », les magasins se « rattrapent » sur les tarifs des produits agricoles ou des PME. Or ceci pénalise leurs ventes et met ces entreprises ou secteurs en difficulté. La guerre des prix que mènent les distributeurs – et à laquelle nous participons car nous devons être dans le match – est absurde et mortifère. C’est aux pouvoirs publics de stopper le mouvement avant que nous fassions dans quelques années le même constat que pour l’industrie textile : où sont passées les usines, où est parti le savoir-faire ? Comment voyez-vous la pharmacie de demain ? La pharmacie devra avoir pris en compte l’évolution de la société qui l’entoure, les nouvelles techniques et les changements de comportements des clients. Elle aura su s’organiser pour mettre en commun des moyens pour être plus performante en amont. Elle devra capitaliser sur deux qualités reconnues par le patient : le conseil et la proximité. Propos recueillis par Olivier Valcke

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l’observatoire des pharmaciens

>> Protection des données de santé, êtes-vous au point ? Alors que la santé se numérise pour faciliter les échanges entre professionnels de santé et patients, êtes-vous sensibilisé aux questions de sécurité des données de santé ? à vous de jouer ! Par Olivier Valcke 1. La création d’un dossier pharmaceutique nécessite… ❐ La carte Vitale du patient ❐ La carte de professionnel de santé du pharmacien 4% 86 % % ❐ Le consentement verbal du patient 0 1 ❐ Les trois

A. Proposez-vous systématiquement à vos patients l’ouverture d’un dossier pharmaceutique ?

65% 35%

2. Le patient peut-il choisir de ne pas inscrire certaines dispensations dans son DP ? Titulaires ❐ Vrai ❐ Faux

Titulaires

3. Tout DP non utilisé dans les trois ans est-il conservé par l’hébergeur ? ❐ Vrai ❐ Faux %

Non

7% 72%

4. Les structures pharmaceutiques 21 qui stockent des données à caractère personnel ont l’obligation de faire une déclaration auprès de la Cnil ? ❐ Vrai Titulaires ❐ Faux 5. Quels sont les droits de vos patients envers leurs données ? Oui

Oui

B. La protection des données de santé à caractère personnel vous paraît-elle suffisante dans le DP…

4% 86 % % 10% 4% 86 % 10

Non

(plusieurs réponses possibles)

Ne se prononcent pas

❐D roit au respect de la vie privée ❐ Droit à l’information ❐ Droit d’opposition ❐ Droit d’accès ❐ Droit de rectification ❐ Tous

5. Qui est responsable des traitements des données à caractère personnel mis en œuvre au sein d’une officine ? ❐ Le pharmacien titulaire ❐ L ’Ordre ❐ L’hébergeur ❐ L a Cnil

Titulaires Titulaires

… et dans le DMP ? %

21% 21

65% 35% 65% 35%

Témoignages « Lorsqu’il s’agit de leurs données de santé, les patients sont méfiants, ce qui est Titulaires paradoxal. Ils sont prêts à dévoiler leur vie Titulaires sur Internet mais ils refusent d’inscrire leurs dispensations dans un outil informatique sécurisé. » Oui Adjoint dans le Calvados (14) Non Oui

Non

« Source d’informations précieuses pour les pharmaciens, le DP facilite la coordination des soins. Il fait progresser la relation patient-pharmacien, et bientôt la relation pharmacien-médecin. » Adjoint en Haute-Savoie (74)

Titulaires

« Comment être sûr que mon outil informatique est étanche à toute intrusion ? » Titulaire en Ille-et-Vilaine (35)

Non

Résultats

Oui Non Ne se prononcent pas

1 : les trois ; 2 : vrai ; 3 : faux ; 4 : vrai ; 5 : tous ; 6 : le titulaire

Ne se prononcent pas

14 • Pharma N°110 • mars 2014

B. DP et DMP, des données de santé suffisamment sécurisées Imaginé par l’Ordre afin de sécuriser la dispensation des médicaments à l’officine, le DP est perçu par 86 % des pharmaciens comme un outil sûr, sécurisé. Les titulaires sont 72 % à juger la protection des données de santé à caractère personnel suffisante dans le DMP.

7% 72% 7% 72%

Titulaires

Oui

A. Le DP, pas encore un réflexe Au fait des différentes règles et fonctionnalités qui régissent le dossier pharmaceutique, le pharmacien n’a pas encore le réflexe de le proposer systématiquement à ses patients. Pourtant, selon les dernières données de l’Ordre (septembre 2013), plus de 98 % des officines sont raccordées au DP et plus de 28 millions de patients ont ouvert un dossier.

Méthodologie

57 titulaires, 43 adjoints, 37 préparateurs et 25 étudiants interrogés entre le 4 et le 20 février 2014.

En partenariat avec


©© photos D.R.

portrait

Julie, préparatrice « tout-terrain » Préparatrice à Sailly-sur-la-Lys (Pas-de-Calais), Julie Decoopman fait rugir sa moto tous les week-ends depuis l’enfance. À 26 ans, elle vient d’être sacrée championne de France de motocross. Une consécration.

E

lle la bichonne comme un cheval de course. À défaut d’un pur-sang fougueux, c’est une Yamaha 250 que Julie Decoopman lustre avec soin. Pièce par pièce, la jeune femme redonne à sa monture tout son éclat : « La difficulté avec la course sur sable, c’est que le sable s’incruste partout. Pistons, suspensions, filtres à air, disques de frein, embrayage, selle… il faut tout nettoyer avec minutie. Cela peut prendre une journée ! » Malgré l’ampleur de la tâche, Julie garde le sourire. C’est que sa Yamaha lui a rendu de beaux services lors de la saison 2013. « D’habitude, je participe au championnat féminin de motocross sur terre. Pour la première fois, je me suis essayée

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J’ai la chance d’avoir un titulaire très indulgent mais il m’est arrivée plusieurs fois de cacher mon activité sportive pour avoir un poste en officine. Julie Decoopman

à la course sur sable. Il faut croire que cela me réussit plutôt bien ! » À l’issue de la saison, la jeune préparatrice, membre du team BO Sport, a en effet décroché le saint Graal : le titre de championne de France. Tout s’est joué le 9 février dernier lors de l’Enduro du Touquet, référence européenne des courses sur sable. Trois heures avec la pluie et le vent glacial pour seuls compagnons. Et 200 000 spectateurs sur le front de mer. Pour sa première participation, la jeune femme a marqué les esprits. Malgré une chute, elle termine troisième de la catégorie féminine et 364e sur plus de 1 000 participants. C’est surtout à l’issue de cette course mythique qu’elle remporte le titre féminin : « Malgré la pression, j’avais de bonnes sensations. Je chute à deux

heures de course mais sans gravité. Je me reprends bien et je parviens à dominer mes rivales habituelles du championnat. Je termine en beauté la saison ! »

À cause des garçons…

Initiée aux sports mécaniques par un père motard et champion de quad, la jeune fille tombe dans la marmite mécanique dès son plus jeune âge. À 12 ans, elle participe, contre l’avis de ses parents, à sa première course… et la remporte. Seule fille dans un univers sportif masculin, elle doit jouer des coudes pour se faire une place : « Certains parents ne comprenaient pas que je sois mieux classée que leur fils. Je les entends encore dire à leur enfant “Mais comment, tu t’es fait dépasser par une fille !” Ce machisme ambiant m’a donné


la rage de vaincre, l’envie de me surpasser. Et puis, l’enchaînement de victoires a rapidement fait taire les jaloux. » C’est également au cours de ses jeunes années qu’elle noue de solides amitiés avec les futurs champions de motocross. Parmi ses copains, Adrien Van Beveren, vainqueur de l’Enduro 2014, et Milko Potisek, deuxième de l’édition 2013. C’est à leur contact qu’elle peaufine sa technique, ses trajectoires…

150 kg lancés à 160 km/h

Une ascension qui ne doit rien au hasard. Piscine, course à pied, vélo, régime alimentaire… pour côtoyer les podiums, la jeune femme s’astreint à une préparation digne d’une athlète de haut niveau : « Le championnat de motocross est exigeant au niveau physique. On conduit des machines qui font près de 150 kg et qui peuvent atteindre des vitesses de 160 km/h. Lorsque vous chutez, le corps en sort rarement indemne ». Les blessures, Julie connaît. Sa première saison sur sable a d’ailleurs failli virer au cauchemar. Lors d’un entraînement, un pilote la percute. Bilan : double fracture de l’avant-bras. « J’ai raté la première course du championnat. Je suis remontée sur la moto mais avec des douleurs. Pendant toute la saison, j’ai souffert de cette fracture et aujourd’hui encore ce n’est pas tout à fait remis ». Fracture du pied, du poignet, vertèbre déplacée, traumatisme crânien, la jeune femme ne compte plus les blessures… qui impactent inéluctablement son activité professionnelle. « Lors de ma dernière blessure, j’ai refusé de porter un plâtre pour revenir travailler à l’officine. J’ai la chance d’avoir un titulaire très indulgent mais je peux comprendre les réticences d’un employeur à embaucher une préparatrice championne de motocross. Il m’est d’ailleurs arrivée, à de nombreuses reprises, de cacher mon activité sportive. » C’est le vendredi, jour de congés, que Julie part s’entraîner à Loon-Plage, circuit de référence sur la côte nordiste. Le reste de l’année, accompagnée de son copain mécanicien, elle sillonne la France à bord de sa camionnette pour engranger les courses… et les victoires. Une passion qui a un prix : « Essence, logement, entretien de la moto, inscriptions aux courses… Pour une année de championnat, il faut compter 15 000 € ». Malgré les sponsors – de plus en plus nombreux depuis son titre –, c’est le système D qui prévaut : « Quand j’ai une compétition à l’autre bout de la France, à Hossegor

• Dans les dunes de l’Enduro du Touquet, Julie ne fait pas de détail.

• Une belle prouesse pour sa première participation en catégorie sur sable.

bio express

• Naissance en 1987 • Première moto à 10 ans • Première course et premier succès à 12 ans • 2006 : salariée de la pharmacie Leroy, à Saillysur-la-Lys • 2008 : diplômée de l’École de préparateur en pharmacie • 2014 : championne de France de motocross, catégorie course sur sable

• Julie peut notamment compter sur le soutien de Marie-France, préparatrice, et d’Olivier, titulaire.

par exemple, je pars avec des copains. On fait du covoiturage pour partager les frais, on mange ensemble… ça reste de la débrouille. »

Le contact, carburant naturel

Lorsqu’elle ne dévale pas les dunes du circuit de Loon-Plage, Julie Decoopman officie derrière le comptoir de la pharmacie Leroy à Sailly-sur-la-Lys. Une vocation par défaut : « Je n’étais pas très bonne à l’école. Toute mon attention était portée sur la moto. Devant mes résultats catastrophiques, mes parents ont décidé de supprimer la moto. Je n’avais pas le choix ! » Une tante préparatrice l’oriente vers ce métier. Elle apprécie le contact avec les patients, la diversité des tâches devant et derrière le comptoir (gestion des commandes, des stocks, préparations magistrales, mise en rayon, dispensation de médicaments…). Encore apprentie, elle trouve une place dans une officine à Sailly et poursuit en alternance sa formation à l’école de préparatrices. « Pendant deux ans, j’ai ralenti la moto. Je n’avais qu’une crainte : me blesser. » Une fois le diplôme en poche, elle signe un CDI dans la même pharmacie mais

avec un nouveau titulaire : « J’ai décidé de jouer cartes sur table et d’évoquer mon activité sportive. J’ai eu la chance de tomber sur M. Leroy qui a tout de suite adapté mes horaires ». La championne retrouve avec plaisir son officine : « J’ai la chance d’exercer un métier polyvalent, complet. Une préparatrice doit posséder une connaissance approfondie des médicaments et faire preuve d’une extrême précaution lorsqu’elle les prépare ou les délivre. J’accorde aussi beaucoup d’importance à la dimension relationnelle. Les patients attendent une écoute, un accueil bienveillant, des conseils pratiques. J’ai même eu des personnes qui venaient me voir pour des conseils mécaniques ! » Sa formation lui sert aussi dans son sport : « Je ne sais pas si c’est le métier de préparatrice qui fait ça mais j’ai l’impression de mieux connaître mon corps, notamment lorsque je suis en course. C’est comme si des voyants s’allumaient lorsque mon corps est trop sollicité. Avec l’expérience, j’ai appris à faire plus attention, à écouter mon corps. Cela me permet de concilier vie professionnelle et vie sportive sans gros pépins physiques. » Bref, un parcours sans grain de sable. Olivier Valcke

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Dossier

Automédication et vente en ligne,

une aubaine commerciale pour l’officine ? Avec – 3 % en valeur et – 4 % en volume, le marché de l’automédication est entré en récession en 2013. L’âge d’or est-il révolu ? Même questionnement à propos de la vente en ligne qui devait révolutionner la pratique. Or, dans les faits, l’e-commerce reste marginal. Faut-il encore croire à ce nouveau modèle économique ? Réponses… Dossier réalisé par Anne Fellmann

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Dossier Vive les femmes

Automédication, un marché encore porteur ? Avec la vente en ligne, le retour du débat autour des GMS et la hausse de la TVA sur les médicaments non remboursés, 2013 a été une année charnière pour l’automédication en France. Qu’en sera-t-il en 2014 ?

Une vision élargie au selfcare

Pour rattraper le retard par rapport aux autres pays européens, le groupe de travail mis en place par le Comité stratégique de filière et vice-présidé par Pascal Brossard a d’ores et déjà formulé quelques propositions précises et prioritaires pour garantir le développement d’une automédication responsable sur le territoire : l’élargissement de la liste des produits disponibles, une meilleure

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est le 12e baromètre Afipa* qui l’a révélé en janvier dernier : pour la première fois depuis cinq ans, le marché de l’automédication a reculé, avec une baisse de 3 % par rapport à 2012. Pour Pascal Brossard, président de l’Afipa, deux raisons majeures l’expliquent : la diminution du trafic en officine et une hausse des consultations chez les généralistes, donc des prescriptions, due à une forte pathologie de grippe. « Avec une involution conséquente tant en valeur qu’en volume, c’est davantage qu’un retournement de situation, c’est un coup d’arrêt du marché de l’automédication, qui représente un réel danger pour l’organisation et l’efficience de notre système de soins, dit-il. L’automédication incite en effet les consommateurs à se rendre d’abord à l’officine. Ce faisant, elle redonne sa place à chacun : aux pharmaciens, aux médecins et aux structures d’urgences. Lorsque plus personne ne joue son rôle, on assiste à un décalage qui coûte très cher. Si 10 % de l’automédication disparaissait, chaque médecin devrait travailler 5h45 de plus par semaine, ce qui générerait un surcoût de 22 M€ pour la Sécurité sociale. Par conséquent, le soutien des pouvoirs publics et la mise en place d’actions pragmatiques sont plus que jamais nécessaires. »

information du patient, une formation adaptée des professionnels de santé, ou encore l’inscription des médicaments d’automédication dans le dossier pharmaceutique. Afin de se rapprocher de la définition couramment utilisée à l’étranger, l’Afipa a également décidé de présenter, dans Plus qu’un son baromètre annuel, non plus les seuls retournement médicaments d’automédication, mais de situation, les produits du selfcare, qui incluent les le marché de dispositifs médicaux et les compléments l’automédication alimentaires vendus en officine. « C’est subit un coup plus conforme à la réalité du marché, d’arrêt qui souligne Pascal Brossard. Ces deux derreprésente un niers segments thérapeutiques bénéfiréel danger pour cient d’ailleurs d’une croissance positive l’organisation et et significative qui compense la baisse l’efficience de des médicaments d’automédication ». notre système Avec cette vision élargie, l’Afipa défend de soins. très naturellement un accès sécurisé. Pascal Brossard, Elle a donc réagi assez vivement aux Afipa propos de l’Autorité de la concurrence recommandant l’ouverture de la vente des médicaments d’automédication en grande surface pour entraîner une

baisse des prix (voir encadré page suivante). « Un effet d’annonce pour une proposition infondée, lâche Pascal Brossard. En premier lieu, l’exemple italien nous montre que ce modèle de distribution n’a pas favorisé une diminution des prix ; en second lieu, les prix français des médicaments d’automédication sont déjà parmi les plus bas d’Europe et connaissent une baisse continue et significative depuis quatre ans. Surtout, s’agissant du marché du selfcare, le rôle du pharmacien est, à nos yeux, essentiel. Nous ne sommes pas dogmatiques, c’est une position purement pratique, de sécurité publique ».

Une délégation de tâches plus formalisée

Au Collectif interassociatif sur la santé (CISS), on est également vent debout contre l’ouverture partielle du monopole aux grandes et moyennes surfaces. « C’est un signal de banalisation du médicament qui nous pose problème et qui va à l’encontre de l’idée que l’on se fait de la prévention et de la promotion de la

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Dossier

automédication et vente en ligne

santé, commente sa présidente, Claude Rambaud. Comme tous les médicaments, les médicaments d’automédication ne sont pas des produits de consommation courante. Il est important de sensibiliser le public. Ce message doit être porté, notamment par le pharmacien ». Considérant que l’un des dangers de l’automédication réside dans les interactions médicamenteuses, le CISS estime qu’elle ne peut se concevoir que dans le respect des règles de bonnes pratiques et dans la gestion au plus près du patient des risques sanitaires engendrés par la consommation de produits non anodins. « À ce titre, reprend Claude Rambaud, le dossier pharmaceutique mis en œuvre par l’Ordre poursuit l’objectif de santé publique de lutter contre ces interactions susceptibles de créer de graves affections iatrogènes. Ainsi, un usager qui a ouvert un DP pourrait solliciter l’intégration des traitements achetés en automédication pour maintenir la vigilance professionnelle du pharmacien sur les médicaments qu’il consomme ». Car, pour le CISS, le rôle de conseil du pharmacien, parfois sous-estimé, voire négligé, doit être valorisé. « Si la profession reste dans une attitude frileuse et ne revendique pas sa légitimité en termes de conseil, lui accorder une place particulière n’a plus beaucoup de sens. Pour le coup, c’est la porte ouverte aux GMS », s’alarme sa présidente qui plaide pour une vision de la santé au sens large. « Le médicament est une réponse parmi d’autres, poursuit-elle. Avec le vieillissement de la population et l’augmentation des maladies chroniques, les parcours pluriprofessionnels se multiplient. Le rôle du pharmacien excède la délivrance de produits de

Si la profession ne revendique pas sa légitimité en termes de conseil, lui accorder une place particulière n’a plus beaucoup de sens. C’est la porte ouverte aux GMS.

santé, notamment en zones rurales, où il permet d’asseoir une offre de soins de premier recours pour l’ensemble de la population. L’automédication permet surtout de ne pas avoir à passer par les cabinets médicaux pour de la “bobologie”. Pourquoi ne pas réfléchir à une délégation de tâches plus formalisée qui contribuerait à diversifier les modes de rémunération du pharmacien, tout en lui redonnant une plus grande légitimité en tant que professionnel de santé ? »

Un moyen pour entamer le dialogue

Pour la plupart, les premiers concernés jouent le jeu. Pharmacien en activité et président d’Astera, Alain Bertheuil explique la baisse du marché de l’automédication – un recul qui, affirme-t-il, Claude Rambaud, remonte à 2012 et n’a fait que s’amplifier CISS en 2013 – par deux éléments majeurs liés à ce segment. « En premier lieu, la pharmacie ne peut pas être un univers de réussite quand le monde économique est en crise, juge-t-il. Elle fait partie de l’arbitrage auquel les Français sont obligés de consentir en termes de pouvoir d’achat : les produits non remboursés ne sont plus une priorité. En second lieu, la compétition entre les officines est de plus en plus féroce et a pour résultat de faire L’automédication baisser les prix ». ne doit pas être Ce double constat n’entame pas son un mode rapide optimisme : « Par sa nature même, de distribution. l’automédication renforce considérablement le rôle du pharmacien. C’est là Elle nécessite de poser des où peuvent s’exprimer le plus naturelquestions pour lement nos savoirs, nos compétences, offrir le conseil notre conseil. Nous n’intervenons pas le plus adapté. après le médecin ; nous sommes en preVincent Loubrieu, mière ligne. C’est ce qui justifie pour titulaire partie notre monopole ».

Les GMS reviennent dans le débat C’est une enquête de 2012 menée par l’UFCQue choisir sur l’automédication en officine qui, la première, a entrouvert les portes des grandes et moyennes surfaces (GMS). L’association y dénonçait « un conseil grippé », « une concurrence anesthésiée par l’opacité des prix » et « une inquiétante fièvre tarifaire ». Chiffres à l’appui : près d’une pharmacie enquêtée sur deux (48 %) n’avait alors pas respecté spontanément son devoir de conseil ; 89 % ne se pliaient toujours pas à l’obligation d’information des consommateurs sur la liberté de tarification des médicaments non remboursables ; des écarts de prix sur les médicaments en libre accès pouvant aller de un à quatre étaient constatés. Ces résultats avaient conduit l’UFC-Que choisir

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à demander aux pouvoirs publics l’ouverture de la distribution de l’automédication aux grandes surfaces et parapharmacies, sous la surveillance d’un pharmacien diplômé. Une proposition reprise, en juillet 2013, par l’Autorité de la concurrence via une Enquête sectorielle dans le domaine de la distribution du médicament délivré en ville. « L’ouverture partielle du monopole officinal permettrait aux consommateurs de bénéficier de prix plus attractifs pour leurs achats de médicaments d’automédication et de “produits frontières’’ », défendait-elle. Cette ouverture, précisait-elle encore, « devrait s’accompagner d’un assouplissement des règles déontologiques des pharmaciens, pour ce qui concerne la liberté commerciale, afin de favoriser la concurrence par les prix ».

Un point de vue que partage Vincent Loubrieu, pharmacien Giropharm installé à Avrillé, dans le Maine-et-Loire : « L’automédication en libre accès ne fait pas ‘‘exploser’’ le marché. On en voit les limites. Mais c’est un bon moyen de rebondir pour entamer le dialogue ». Vincent Loubrieu se souvient de l’enseignement majeur qu’il a retenu à la suite de sa participation, à l’automne 2012, à un atelier organisé sur ce thème par Giropharm : « Dans la plupart des cas, les patients connaissent le produit, mais pas les contre-indications. En officine, l’automédication n’est pas et ne doit pas être un mode rapide de distribution. Elle nécessite de poser des questions ouvertes pour offrir le conseil le plus adapté. C’est ce qui nous différencie des GMS, où le consommateur ne va que pour acheter. Il faut prendre le temps et l’habitude, autour de produits connus, de rappeler un certain nombre de règles. Nous devons tout simplement exercer notre métier ».

Une démarche délicate

Titulaire Pharmactiv à Lons-le-Saulnier, dans le Jura, Laurence Prost-Dame défend, elle, en écho à la position du CISS, une automédication strictement encadrée : « Nous sommes une officine de centre-ville qui fait la part belle au conseil. C’est ce qu’apprécient nos clients, qui viennent pour cette raison. Lorsque l’un d’eux arrive avec sa boîte au comptoir, soit nous validons son choix s’il est judicieux, soit nous le modifions ». La pharmacienne ne cache pas ses réserves sur le libre accès qui, selon elle, banalise le médicament et en balaie les effets bénéfiques comme indésirables : « C’est à double tranchant. On veut favoriser une automédication responsable, mais on met à la portée de tous des produits qui, par définition, ne sont pas anodins. Nous devons donc rester vigilants, et faire notre travail en procédant à un questionnement professionnel et technique. C’est une démarche délicate : ledit questionnement est évidemment plus difficile quand les clients ont déjà fait leur choix et entendent qu’on leur vende ce qu’ils demandent ! Mais nous avons fait de notre disponibilité notre marque de fabrique. Mon équipe a été formée dans ce sens. Nous sortons de derrière nos comptoirs pour accompagner jusqu’au rayon. Nous sommes un pilier de confiance. Tout est fait pour dire que le pharmacien et son équipe sont là pour conseiller. C’est du libre accès accompagné ». • (*) Association française de l’industrie pharmaceutique pour une automédication responsable.


Dossier Vive les femmes

Vente en ligne, le décollage ? En France, environ 4 000 produits sont vendus sur Internet. Les enquêtes montrent que les Français sont intéressés, mais pas emballés. Les pionniers du Web, eux, ne désarment pas…

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©© Maksym Yemelyanov – fotolia

vec une législation qui remonte à cinq ans, nos amis belges nous ont largement devancés. « Les consommateurs ont pris l’habitude de s’approvisionner sur Internet, commente Jérôme Gobbesso, cofondateur de New Pharma, le premier site de vente en ligne belge. L’autre raison de notre succès est dû à la structure de nos pharmacies : chez nous, le titulaire n’est pas nécessairement propriétaire, mais peut être salarié. Les officines doivent se diversifier, se différencier, se spécialiser. Bref, sortir du lot ». Lancé en octobre 2008, New Pharma propose des médicaments sans prescription et des produits de parapharmacie et a fait de la sécurité l’un de ses atouts majeurs. Le nombre de boîtes commandées est limité à trois – à deux pour Alli, avec un test de BMI (ou IMC, indice de masse corporelle) systématiquement proposé – et chaque demande est validée par un pharmacien. En outre, les internautes peuvent donner des informations sur leur état de santé, et leur historique d’achats peut être consulté à tout moment. Pour Jérôme Gobbesso, les clés de la réussite reposent d’une part sur le

timing – il faut être le premier à se lancer – et d’autre part sur la maîtrise de différents métiers que l’on ne rencontre pas en officine : pharmacien évidemment, mais aussi informaticien, logisticien, marketing manager. « Internet requiert des compétences multiples, relève-t-il. C’est un modèle dont l’essor est, à mon avis, inéluctable. Mais il ne tuera pas les officines de quartier. Il répond à d’autres besoins ».

Un bon relais pour booster le marché

Les consommateurs français, eux, se montrent encore frileux. Une récente enquête révèle qu’en 2013, 30 % d’entre eux déclaraient être disposés à acheter certains médicaments d’automédication en ligne, alors qu’ils n’étaient que 13 % l’année précédente. Mais ces chiffres cachent mal la réalité : l’achat sur le Net reste marginal dans la pratique, seuls 4 % des sondés ayant déjà tenté l’expérience. L’écart entre l’intention et la pratique est donc bien là. D’un côté, les Français expliquent leur attrait a priori croissant pour la vente en ligne par la praticité, le prix et, dans une moindre mesure, la supériorité de l’offre ; de l’autre, leur principal frein est l’absence de conseil du pharmacien.

Pourtant, comme le constate Jérôme Gobbesso, certains sites de parapharmacie hexagonaux fonctionnent plutôt bien. C’est le cas de 1001pharmacies. com, première plate-forme communautaire de vente en ligne cofondée et présidée par Cédric O’Neill, l’un des pionniers et le plus ardent défenseur Internet requiert du modèle. « Si l’on regarde du côté de des compétences la Grande-Bretagne, de l’Allemagne ou multiples. C’est de la Belgique, on observe que 8 % du un modèle dont marché de l’automédication s’est déporté l’essor est, à mon sur Internet, ce qui prouve que ce type de avis, inéluctable. vente répond à de nouvelles habitudes de Mais il ne tuera consommation, indique-t-il. Malheupas les officines reusement, la France, elle, a opté pour de quartier. Il une législation très restrictive, qui ne répond à d’autres facilite pas l’e-commerce… » Le jeune besoins. pharmacien considère pourtant qu’InJérôme Gobbesso, ternet est un bon relais pour booster le New Pharma marché de l’automédication, en baisse : « Si le gouvernement affichait une vraie volonté, on s’approcherait des situations de nos voisins européens sans remettre en cause l’existence des pharmacies physiques. Les mentalités changent tout de même progressivement, surtout depuis la loi. Je ne suis plus en train de détruire la profession, je l’aide à s’adapter… »

Un accès en toute sécurité

« Nous avons à cœur aujourd’hui de démontrer que vendre des médicaments en ligne peut répondre de manière économique, fiable et sécurisée aux besoins des Français », explique pour sa part Jérôme Aumaistre, l’un des trois créateurs du site Notrepharma.com, ouvert en juin 2013. « Depuis quelques années, la vente de médicaments sur Internet faisait régulièrement état en France de mauvaises expériences, dont l’achat de contrefaçons, alors que d’autres pays européens avaient déjà adopté de bonnes pratiques. Il était temps d’agir et de rattraper notre retard pour que les Français aient accès en toute sécurité à la vente de médicaments en ligne. Chez Notrepharma.com, nous croyons que la santé et le bien-être sont l’affaire de tous ; notre philosophie, c’est la santé en ligne responsable ! » •

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©© photos d.R.

Back-office

L’essor des pharmacies discount Elles fleurissent à travers le pays et font de l’ombre aux officines traditionnelles. Face aux attaques de la grande distribution, les pharmacies discount auraient-elles trouvé la parade ? Les avis sont partagés.

D

epuis le 16 décembre, Rouen a son enseigne Lafayette Conseil. Sur 153 m2, l’officine propose 20 000 références à bas prix. Très vite, elle a connu une certaine affluence et les premiers résultats ont dépassé les prévisions les plus optimistes. Dans la capitale normande, l’ouverture de la pharmacie du Théâtre des arts – c’est son nom – a fait l’effet d’une petite bombe, que désamorce en souriant Marie-Hélène Lalande, titulaire à PetitCouronne, dans la banlieue rouennaise, et présidente du syndicat des pharmaciens de la Seine-Maritime : « Concrètement, ce n’est qu’une pharmacie discount de plus. Ça ne va pas changer considérablement la vie des consommateurs ». Le concept, en revanche, ne la convainc pas. « Une officine fait environ 7 % de son

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Il n’existe pas qu’un modèle de pharmacie. J’en défends un qui, certes, bouscule les codes traditionnels, mais qui ne fait d’ombre à personne. Hervé Jouves,

Lafayette Conseil

chiffre d’affaires en parapharmacie, et 7 % en OTC, donc 14 % sur du produit non remboursé, rappelle-t-elle. La dispensation de médicaments, avec tout ce que cela suppose en qualification professionnelle, en compétences et en temps passé avec le patient, reste donc bel et bien son cœur de métier. Les enseignes du groupe Lafayette ont fait de la parapharmacie leur pivot. C’est leur choix. Je ne le critique pas. Mais nous n’exerçons pas la même profession ».

Une approche spécifique

Ce qui dérange surtout Marie-Hélène Lalande, c’est la course aux prix : « Si tout est à bas coût, le service le sera aussi et le système deviendra nuisible et toxique. Un prix doit être juste. À Rouen, ceux qui vont souffrir sont les titulaires des petites structures du centre-ville qui ont besoin de la para pour vivre. Il va leur être impossible de jouer dans la même

cour, car elles n’ont pas les mêmes capacités d’achat. Ce qui change la donne, c’est l’énorme publicité dont jouit ce groupe aux plans local et national. Certains s’offrant même le luxe de le promouvoir alors qu’ils sont à la tête de GMS… Il est amusant de voir combien Michel-Édouard Leclerc se fait le promoteur du système Lafayette ! Plus sérieusement, j’aimerais que les médias s’intéressent davantage à notre rôle de santé publique. L’aspect commercial de notre métier est un moyen, pas un but. Pour Lafayette, c’est un but ». Créée en 2005, Lafayette Conseil est, comme la définit son directeur général, Hervé Jouves, une société de services dispensant des conseils auprès d’un réseau de pharmacies (et de magasins d’optique) avec une approche de distributeur spécialisé. « Nous ne sommes pas des discounters, rectifie-til. Notre concept est low cost ».


Ledit concept s’appuie sur quelques fondamentaux : des tarifs attractifs et maîtrisés toute l’année sur l’ensemble des assortiments, un choix de marques le plus large possible, une compétence assurée par les 550 professionnels de santé, dont 155 pharmaciens, dans les 53 officines du réseau. « Il n’existe pas qu’un modèle de pharmacie, indique Hervé Jouves. J’en défends un qui, certes, bouscule les codes traditionnels, mais qui ne fait d’ombre à personne ». Avec un certain succès : le réseau devrait s’étoffer d’ici la fin de cette année pour arriver à 80 officines.

Une vision nouvelle

Avec son slogan « Les pharmaciens qui soignent aussi les prix », le groupe Leader Santé, lui, revendique son identité discount. « Nous sommes un réseau discount, certes, mais nous donnons dans le discount chic, précise son cofondateur, Alexis Berreby. Nous sommes aujourd’hui un groupement d’envergure nationale avec, c’est vrai, une réelle volonté de progression. Notre ambition est d’apporter une vision nouvelle de l’officine et une communication directement tournée vers le patient et le client ». Leader Santé s’est développé autour de ce qu’Alexis Berreby appelle « un bel écrin » : une enseigne colorée, percutante, puissante, en rupture avec les codes couleur classiques de la pharmacie, et un concept intérieur fouillé, basé sur une clarification de l’offre au sein du point de vente. Une enseigne qui n’hésite pas à mettre en avant son image prix avec un rail permanent de promotions : un produit par mois et un flyer avec une trentaine de produits référencés tous les quarante-cinq jours. Depuis sa création, le groupe a déployé un éventail de recettes qui ont su, assure Alexis Berreby, asseoir sa notoriété : des outils clés en main d’aide à la vente et à la communication, une puissance de négociation et une force de frappe telles que certains laboratoires, séduits, ont mis en place des accords pilotes avec l’enseigne. « Nous ne versons pas dans l’image dégradante pour faire du prix, assure Alexis Berreby. Nous fédérons autour de valeurs fortes comme le respect des engagements, la réactivité, le partage. Avoir une offre commerciale attractive n’exclut pas la qualité du service. Nous avons par exemple travaillé à la mise en place des nouvelles missions, notamment en aménageant un espace de confidentialité. L’image prix est un rempart, un pare-feu pour éviter que la clientèle soit

tentée d’aller dans les GMS. C’est une façon d’anticiper l’avenir ». Les arguments avancés par les deux groupes laissent de marbre Philippe Besset, président de la commission Économie de l’officine de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) : « Ces structures sont à la merci du moindre revers de fortune puisqu’elles sont fragilisées par les baisses de prix des médicaments remboursables. J’ajoute que c’est la répartition même de leur chiffre d’affaires qui peut leur être reprochée : une faible rentabilité sur les médicaments administrés compensée par le profit dégagé par tous les autres produits présentés comme des produits d’appel. C’est très discutable, alors que 80 % de l’activité moyenne des officines est administrée. C’est à la limite de la déontologie. Il n’est pas inutile de rappeler que ces dernières ne peuvent offrir des prix cassés sur le segment de la parapharmacie que parce qu’elles gagnent leur vie sur le médicament. D’ailleurs, à ma connaissance, aucune parapharmacie n’est rentable ».

Si tout est à bas coût, le service le sera aussi et le système deviendra nuisible et toxique. Un prix doit être juste. Marie-Hélène Lalande, titulaire

Une durée de vie limitée

Le syndicaliste ne le conteste pas : dans le champ des articles de santé hors monopole, la concurrence s’exerce librement, et le prix en est l’un des éléments normaux. « En revanche, dit-il, les patients sont en droit d’attendre un prix juste et uniforme sur tout le territoire en ce qui concerne les médicaments prescrits et non prescrits. La concurrence sur ce terrain-là est considérée comme étrange, pour ne pas dire incompréhensible. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous militons depuis plusieurs années en faveur d’un ‘‘corridor de prix’’ pour chaque catégorie de produits, à l’instar du système à l’œuvre dans la vente des livres ». Philippe Besset en est en tout cas persuadé : les pharmacies discount ou low cost ne constituent pas, à ses yeux, un modèle d’avenir : « Cela aurait pu

Notre ambition est d’apporter une vision nouvelle de l’officine et une communication directement tournée vers le patient et le client. Alexis Berreby, Leader Santé

éventuellement être le cas si notre pays avait opté pour la constitution de chaînes ou l’ouverture du capital ». Une politique de court terme, c’est aussi ce que pense Lucien Bennatan, président du groupe PHR, qui constate que ce type de structure ne fonctionne pas partout, ni chez tout le monde. « Si une officine pratique le discount, expliquet-il, trois critères doivent être concomitamment remplis pour que ce soit, à mes yeux, un modèle qui marche : une augmentation du chiffre d’affaires, une hausse de la fréquentation et une multiplication des conquêtes d’ordonnances de patients chroniques. C’est donc étroitement lié à l’éthique et, bien sûr, à la zone de chalandise ». Il y voit néanmoins une limite : l’introduction de la rémunération en honoraires : « C’est un changement de paradigme dont les incidences ne sont pas anodines. En effet, le prix de vente ne s’établira plus en fonction du chiffre d’affaires, mais de l’excédent brut d’exploitation. Or, l’EBE de ces officines sera impacté par une marge très réduite sur l’OTC et la parapharmacie, ce qui diminuera leur valeur ». Le président de PHR n’en disconvient pas : la communication très élaborée à laquelle se livrent les pharmacies discount contribue indéniablement à leur succès. Mais là encore, de courte durée. « Je ne pense pas que ce type de réseaux aura une durée de vie supérieure à cinq ou six ans, analyse-t-il. Il suffit de comparer avec les enseignes ou la grande distribution qui, d’une part, se sont recentrées sur le service et l’augmentation de leurs marges, et d’autre part communiquent non plus uniquement sur les tarifs, mais sur un service joint au prix. Les réseaux discount sont donc condamnés à développer, à terme, du service. Ce faisant, ils devront non seulement rattraper leur retard, mais également investir sans avoir les marges nécessaires ». Anne Fellmann

Pas de travail dominical en Seine-et-Marne à la demande du syndicat des pharmaciens de Seine-et-Marne, qui les accusait de désorganiser le système de garde, un arrêté préfectoral a obligé les pharmacies discount de Torcy et de la gare de Roissy-en-Brie (Seine-et-Marne) de cesser leur activité le dimanche. Un coup dur pour ces officines qui avaient bâti leur succès sur l’ouverture 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Suite à cet arrêté, une pétition avait circulé pour obtenir la réouverture dominicale. Une quarantaine de

salariés vêtus de tee-shirts au slogan évocateur « Non à la fermeture le dimanche » avaient également manifesté contre cette décision. La préfète s’est toutefois donnée le temps de la réflexion : « Je me donne six mois pour voir si le système de garde fonctionne, explique-t-elle dans les colonnes du Parisien. Car j’ai déjà une liste de pharmacies qui ne jouent pas le jeu. S’il s’avère que ce système ne marche pas, je rouvrirai ces deux pharmacies le dimanche. » Affaire à suivre.

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Données de santé, enjeux et opportunités L’hébergement de données de santé à caractère personnel est un point sensible, strictement encadré par la loi. Il touche tous les pharmaciens, et notamment ceux désireux de se lancer dans l’e-commerce. Décryptage.

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a parution, en juin 2013, de l’arrêté relatif aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments par voie électronique, en imposant aux pharmaciens de placer leur site d’e-commerce de médicaments chez un hébergeur agréé HDS (hébergement de données de santé à caractère personnel), a mis sur le devant de la scène ce dispositif méconnu. Si cette mise en lumière s’est accompagnée d’interrogations, voire de crispations, de la part des pharmaciens désireux de se lancer sur ce marché, il s’agit de considérer l’agrément à l’aune des évolutions des pratiques et des usages auxquelles il entend répondre.

Un agrément encadré

Le cadre législatif de l’hébergement de ces données a été défini dans la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative

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qualité

Les solutions de santé mobiles pourraient permettre d’économiser 11,5 milliards d’euros de dépenses d’ici à 2017. Jérôme Lapray, Pharmagest

aux droits des patients (article L. 1111-8 du code de la santé publique), dite loi « Kouchner ». Deux ans plus tard, la loi n° 2004-810 relative à l’Assurance maladie et acte de naissance du dossier médical personnel rappelle que « les données [du DMP] seront hébergées auprès d’un hébergeur de données de santé à caractère personnel ». Mais ce n’est qu’en 2006 (le 4 janvier), avec le décret n° 2006-6 relatif à l’hébergement de données de santé à caractère personnel, que les conditions d’hébergement sont clairement précisées. L’objectif pour les pouvoirs publics est alors d’apporter aux patients, en renforçant le cadre législatif, toutes les garanties indispensables pour le respect de la confidentialité de leurs données en établissant, en particulier pour les prestataires de services, les règles et obligations à respecter pour la mise en place des infrastructures et services d’hébergement de données de santé.

Il faut préciser qu’un organisme ne peut pas aujourd’hui être agréé en général, mais que chaque type de prestation doit faire l’objet d’un agrément spécifique. C’est par exemple le cas pour l’agrément permettant l’hébergement de sites de vente en ligne de médicaments devant obligatoirement intégrer l’accès par les patients aux données hébergées et tout ce que cela implique. Ainsi, s’il y a cinq ans, moins de vingt agréments avaient été délivrés, on compte aujourd’hui un peu plus de soixante agréments HDS pour une cinquantaine d’hébergeurs agréés, Il est à noter qu’une pharmacie, comme les autres professionnels de santé, n’est pas soumise à cette procédure d’agrément au titre des données qu’elle héberge dans le cadre son activité. Aussi, cela implique-t-il que divers dispositifs soient a minima mis en place dans l’officine pour garantir, autant que possible, la sécurité et la confidentialité des


données : système de vidéoprotection, accès Internet sécurisé, antivirus, gestion des droits d’accès des collaborateurs aux données, etc. À ce titre, l’Ordre publiait, début 2013, un rapport sur ce sujet (Respect de la confidentialité des données de patients) rappelant les dispositifs et bonnes pratiques à mettre en place dans l’officine.

Une réponse à l’explosion des données de santé

Le dispositif de l’agrément HDS entend surtout répondre à une évolution majeure du système de santé permise par l’évolution des technologies et des modes d’accès, de partage de l’information. Au cours des dix dernières années, les volumes des données de santé stockées et partagées ont connu une croissance exponentielle, amenée à s’accélérer encore puisque que certains estiment que ce volume sera multiplié par vingt d’ici à l’année 2020. Cet essor s’explique notamment par le développement de nouveaux usages, de nouveaux comportements des patients, notamment en termes d’accès à l’information santé. Ainsi, selon une étude de l’institut TNS Sofres de 2013, près d’un Français sur deux (49 %) a déjà utilisé Internet pour rechercher et partager de l’information de santé. Les technologies mobiles (smartphone, tablettes, objets connectés) ont naturellement été un facteur d’accélération de cette tendance. Elle s’explique aussi par le fait que les données de santé sont aujourd’hui un enjeu majeur de santé publique. En effet, leur partage et leur analyse contribuent à éclairer les décisions des pouvoirs publics, mais aussi à améliorer la prise en charge et l’état de santé des patients, notamment grâce aux solutions e-santé et au développement du cloud computing.

Quelles applications en pharmacie ?

Nous l’avons vu, l’une des applications qui concernent aujourd’hui les pharmaciens – principalement car ils devront en assumer le coût – est la vente en ligne de médicaments. Autorisée depuis 2012, avec la parution de l’ordonnance n° 2012-1427, son cadre a été précisé en juin 2013 par l’arrêté relatif aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments par voie électronique. Dans son article 4.1, l’arrêté précise que « l’hébergement des données ne peut se faire qu’auprès

d’hébergeurs agréés par le ministre chargé de la santé. » Le texte ne précisait alors pas directement la nature de l’hébergement nécessaire pour réaliser ce type de prestation, ou du moins celle-ci demeurait difficilement interprétable par les pharmaciens, les agences Web ou les ARS – en charge de délivrer les autorisations de mise en ligne – qui n’en maîtrisaient alors que très partiellement les tenants et les aboutissants. Force est de constater également qu’à date de parution de l’arrêté, aucun hébergeur n’était en mesure de proposer une prestation spécifique dans le cadre de cette application. Des précisions ont été apportées par l’Asip Santé (Agence des systèmes d’information partagés de santé, dépendante du ministère de la Santé) dans une note de fin 2013, notamment : « Ces sites doivent prévoir un accès informatique du patient à l’application dans des conditions assurant l’identification du patient, et au moyen de dispositifs d’authentification forte afin de préserver la sécurité de tels accès, et par conséquent la confidentialité des données de santé ». La simple saisie d’un login et d’un mot de passe pour l’accès aux données hébergées ne constitue en rien un système d’authentification forte, celui-ci pouvant prendre la forme d’un OTP (One Time Password, mot de passe à usage unique) ou d’un certificat électronique. Si pour beaucoup cette obligation est un frein important au développement de ce nouveau canal – contrainte financière car l’hébergement HDS a un coût largement supérieur au coût d’un

L’une des applications de l’agrément HDS est la sauvegarde externalisée des données, apportant une réponse à une éventuelle perte des données au sein de la pharmacie, par exemple en cas d’incendie. Jérôme Lapray, Pharmagest

L’agrément des hébergeurs Sur la base du cahier des charges établi par l’ASIP Santé (Agence des systèmes d’information partagés de santé), les hébergeurs déposent un dossier auprès de cette dernière. Le dossier est ensuite instruit par l’agence et la Cnil, qui vont notamment évaluer la capacité financière du candidat, le niveau de sécurité proposé et les conditions du respect des principes de la protection des données personnelles. La décision finale revient au ministère, qui délivre l’agrément. L’agrément Hébergement de données de santé (HDS) est accordé pour trois ans, son renouvellement étant soumis à un audit extérieur obligatoire. Durant ces trois années, l’organisme agréé s’engage à respecter les obligations et engagements définis dans son dossier, l’hébergeur devant pour cela adresser chaque année à l’Asip Santé une auto-évaluation (audit interne – tout changement du périmètre pouvant conduire à déposer une nouvelle demande d’agrément) et des contrôles externes peuvent être diligentés, notamment par la Cnil.

hébergement standard, contrainte également en termes de parcours client –, elle permet surtout de s’assurer du seul accès par les patients à leurs données de santé, cela de manière sécurisée, et de la sécurisation optimale de la dispensation en ligne.

De la vente en ligne aux nouveaux services

Une autre application est en lien direct avec les nouvelles missions du pharmacien (définies dans le cadre de la loi HPST et précisées dans la Convention de 2012), à savoir la e-santé, qui participe concrètement à la mise en œuvre de ces missions. L’e-santé, au travers de ses diverses déclinaisons – télémédecine, dispositifs connectés, m-santé, cloud computing… – apporte des réponses concrètes à certains enjeux majeurs de santé publique : vieillissement de la population, gestion de la dépendance, explosion des maladies chroniques, dépistage, prévention ou encore maîtrise des dépenses de santé (selon une étude du cabinet PWC, les solutions de santé mobiles pourraient permettre d’économiser 11,5 milliards d’euros de dépenses d’ici à 2017). Pour le pharmacien, l’e-santé peut prendre la forme d’applications en mode cloud lui permettant de suivre ses patients dans le cadre de programmes conventionnels (asthme, AVK) ou de pathologies chroniques, d’organiser, de mener et d’archiver les entretiens pharmaceutiques, d’y intégrer des relevés de constantes et d’en suivre l’évolution, et bien sûr de partager ses informations avec d’autres professionnels de santé, les patients ou les aidants. Des applications qui, au-delà de la solution simple et efficace qu’elles apportent à la mise en œuvre des nouvelles missions, permettent d’asseoir le pharmacien comme un coordinateur de soins incontournable, le premier relais de santé de proximité. Enfin, l’une des applications de l’agrément HDS la plus simple, dans son expression, est la sauvegarde externalisée des données. Apportant une réponse à une éventuelle perte des données au sein de la pharmacie (par exemple, en cas de sinistre grave comme un incendie), la sauvegarde externalisée des données de la pharmacie, composées pour partie de données de santé à caractère personnel, doit obligatoirement s’exercer sans un environnement HDS, chez un hébergeur agréé. Jérôme Lapray

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cursus

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Quand la fac passe au numérique

Elles ne se substituent pas aux universités classiques mais apportent un complément pédagogique dématérialisé. Qui sont-elles ? Les universités numériques thématiques. Exemple avec l’une d’elle, l’Université numérique des sciences pharmaceutiques francophone.

C

’était l’un des vœux pieux du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Pour favoriser l’entrée des universités dans l’ère du numérique, le ministère a lancé, sous le pilotage de la Sous-direction des technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (SDTICE), les universités numériques thématiques (UNT). Depuis 2003, ces UNT produisent, mutualisent et recensent, à l’échelle

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nationale, des contenus pédagogiques numériques pour les étudiants et les enseignants. Pour favoriser cette mutualisation, sept UNT ont été créées, couvrant les domaines suivants : sciences de la santé et du sport ; sciences de l’ingénieur et technologie ; économie gestion ; environnement et développement durable ; sciences humaines et sociales, langues et cultures ; sciences juridiques et politiques  ; sciences fondamentales. Parmi ces UNT, l’Université numérique des sciences pharmaceutiques

francophone (UNSPF) a été créée en 2007 et est opérationnelle depuis 2009. Elle s’appuie sur des structures existantes (conférence des doyens de facultés de pharmacie, Anepf, associations disciplinaires…) pour structurer, aider et inciter au développement du numérique dans les universités. Côté financement, l’UNSPF fonctionne avec une subvention du ministère et une contribution des universités. Elle est une filière de l’Université numérique francophone des sciences de la santé et du sport (UNF3S), qui comprend


l’Université médicale virtuelle francophone (UMVF), l’Université numérique des sciences odontologiques francophones (UNSOF) et l’Université virtuelle en sciences du sport (UV2S). « C’est la dernière-née des universités numériques, précise Françoise Galland, directrice de l’UNSPF depuis sa création. Ce qui explique qu’elle ne possède pas autant de ressources numériques que son aînée de médecine. »

Un fonds numérique des ressources

« M. V., 61 ans, est admis au sein du service de diabétologie du CHU de Grenoble le 1er novembre 2011 pour un déséquilibre hyperglycémique de son diabète de type 2 et plaie infectée sévère du premier orteil du pied gauche. » Des études de cas comme celle-ci, le site de l’UNSPF en compte des centaines. De la rechute de leucémie myéloïde chronique aux complications iatrogènes chez une patiente greffée cardiaque avec un cancer du sein, le site dresse un large panorama des cas cliniques. Véritable base de données numériques – études de cas, cours magistraux, fiches pratiques, vidéos, QCM, exercices… –, l’UNSPF entend mettre en

commun les ressources pédagogiques des vingt-quatre facultés de pharmacie françaises. « Nous n’en sommes qu’aux prémices, tempère Françoise Galland. La structure est encore jeune et souffre d’un manque de notoriété mais les facultés jouent le jeu. Elles prennent peu à peu conscience du fabuleux potentiel d’une base de données commune. Notre message est clair : faisons ensemble ce que l’on ne peut pas faire tout seul. » Une future bibliothèque numérique qui s’adresse aux enseignants-chercheurs, aux pharmaciens en activité, aux étudiants en formation initiale et aux professionnels en formation continue de France ou de la francophonie. « Dernièrement, je me suis rendue au Burkina Faso, où j’ai été accueillie par des étudiants qui n’avaient même pas accès à une bibliothèque universitaire. La constitution d’une base de ressources pédagogiques mutualisée prend alors tout son sens. » Certains contenus sont également mis à disposition du grand public qui, à travers cette base, peut accéder à des informations fiables, produites et validées par un comité scientifique regroupant des universitaire français et francophones.

Les facultés prennent peu à peu conscience du fabuleux potentiel d’une base de données commune. Notre message est clair : faisons ensemble ce que l’on ne peut faire tout seul. Françoise Galland, UNSPF

La créativité numérique des étudiants récompensée Compétition réservée aux étudiants en pharmacie français, le concours UNSPF-Anepf 2013 a récolté pas moins de trente-quatre

projets et mobilisé dix-huit facultés de pharmacie. Pour rappel, en 2012, seules neuf facs étaient représentées. Ce concours, qui met en synergie la créativité des étudiants et l’expertise des enseignants, a pour but de produire des ressources numériques scientifiques. En 2013, la thématique portait sur la santé des étudiants. Contraception, nutrition, sommeil, stress ou encore tabac… les participants étaient libres de choisir leur support de présentation : vidéo, chaîne éditoriale, application pour smartphone… La remise des prix 2013 s’est déroulée à l’UFR de pharmacie de Grenoble lors de l’assemblée générale de l’Anepf en septembre dernier. Le premier prix (1 000 €) a été attribué à Antoine Chavagnac, pour son projet « Infection sexuellement transmissible », qui alimentera la base de données consultable par le grand public sur le site de l’UNSPF. Nouveauté en 2013, le prix du jury a, lui, consacré Benoît Brouard pour son application smartphone intitulée « Risque sida ». Ce dernier est reparti avec 700 €. Un troisième concours sera lancé courant 2014.

Si actuellement les ressources sont en accès libre sur le site de l’UNSPF (www.unspf.fr), des réflexions sont en cours pour en limiter l’accès. Pour Françoise Galland, il est essentiel de « donner des informations adaptées au public destinataire : on ne peut pas, par exemple, parler d’effets indésirables de médicaments de la même façon entre professionnels de santé ou auprès du grand public. C’est la raison pour laquelle nous proposerons des ressources spécifiques avec la contribution de nos étudiants ». Actuellement décliné en trois parties – « Nous connaître », « Se former », « S’informer » –, le site devrait se doter dans les prochaines semaines d’une nouvelle charte graphique permettant de mieux identifier les ressources réservées aux professionnels, celles accessibles au grand public, celles payantes… « On essaie de gagner en clarté pour mieux diffuser les informations, poursuit Françoise Galland. À côté du site Web, on va prochainement proposer des modules de formation à distance, notamment au travers d’une plate-forme pédagogique commune. Comme pour les ressources numériques, nous proposerons aux universités de mutualiser leurs modules de formation à distance. »

La francophonie à l’honneur

Enfin, placé sous la bannière de la francophonie, l’UNSPF entend poursuivre l’œuvre menée depuis 2008 par l’Université médicale virtuelle francophone. Sous l’impulsion de l’UMVF, de nombreux sites miroirs contenant des ressources d’enseignement numérique médical sont mis à disposition des pays francophones : Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cambodge, Cameroun, Côte d’Ivoire, Congo… L’UNSPF s’inscrit dans cette démarche avec une réflexion au sein de la conférence des doyens de pharmacie des pays francophones, qui intéresse tout particulièrement l’ordre pharmaceutique francophone « La mutualisation de ressources pédagogiques doit bénéficier à l’ensemble de la communauté francophone. Dans certains pays, les supports pédagogiques manquent. Si, grâce à notre action, nous pouvons diffuser ce savoir aux quatre coins de la francophonie, enrichi, de surcroît, par la diversité culturelle de nos partenaires, nous aurons avancé dans notre mission », conclut Françoise Galland. Olivier Valcke

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Lu pour vous

Revue de presse scientifique Chaque mois, nous vous proposons une synthèse des articles marquants parus Par Julien Boyer, pharmacien hospitalier dans la presse spécialisée du monde entier.

Régler le thermostat pour ajuster la balance Cold exposure – an approach to increasing energy expenditure in humans our la première fois, une étude démontre qu’il suffit de baisser la température pour augmenter nos dépenses énergétiques et perdre du poids. En effet, lorsque la température chute, l’organisme mobilise beaucoup d’énergie dans des réactions de protection contre le froid et de production d’énergie calorifique, et ce, afin d’assurer la thermogénèse et le maintien du corps à 37 °C. Comme nous passons 90 % de notre temps dans des foyers et des bureaux surchauffés en hiver, les auteurs se sont demandés ce qu’il arriverait si des sujets étaient exposés à des températures entre 15 et 17 °C, six heures par jour et dix jours d’affilée. Si des frissons peuvent survenir au début, ils laissent place à la stimulation du tissu adipeux brun, qui brûle des calories au lieu de les stocker et constitue la véritable usine de production de chaleur corporelle. Les chercheurs parlent même de « confort » à ces températures suite à un certain « entraînement ». Même si le froid peut paraître inconfortable a priori, les personnes réussissent à s’adapter après des expositions fréquentes et prolongées. Baisser la température générerait aussi des économies d’énergie mais risquerait d’inciter les habitants à manger davantage pour se réchauffer, ce qui annulerait le bénéfice attendu. À l’inverse, accroître la température permettrait de réduire l’appétit des individus comme cela a déjà été prouvé par de précédents travaux

mais la facture énergétique et les conséquences environnementales méritent d’être évaluées. Chaque stratégie a ses avantages et ses inconvénients. • • Trends in Endocrinology & Metabolism, publication en ligne du 17 janvier.

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Carence en vitamine C = AVC ? Extrait de la présentation du congrès annuel de l’American Academy of Neurology : « Des victimes d’AVC carencées en vitamine C »

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uparavant à l’origine du scorbut, les carences en vitamine C semblent aujourd’hui conduire à d’autres pathologies, cardio-vasculaires. D’après cette étude rendue publique mais pas encore publiée, les personnes victimes d’accident vasculaire cérébral (AVC), en particulier hémorragique, manquaient toutes de vitamine C. Pour arriver à cette conclusion, les chercheurs français ont comparé les taux sanguins de vitamine C de 65 personnes ayant eu un AVC à ceux de 65 personnes en bonne santé. Résultat, dans le premier groupe, 41 % avaient des taux normaux de vitamine C, 45 % un déficit modéré et 14 % présentaient une réelle carence, alors que, dans le second groupe, 74 %

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avaient un taux normal, 26 % un déficit modéré et aucun n’était carencé. Même si l’étude porte sur un échantillon réduit, ces résultats semblent prometteurs. Ils montrent que la carence en vitamine C devrait être considérée comme un facteur de risque pour ce type d’attaque sévère, au même titre que l’hypertension artérielle, la consommation d’alcool ou le surpoids. Il existe un intérêt évident à adopter un régime alimentaire équilibré, riche en fruits et légumes frais, mais ces résultats sont trop préliminaires pour recommander la prise de compléments alimentaires dédiés de façon préventive. • • Figaro Santé, présentation en ligne du 18 février


ȵȵ Marcher, pour s’éloigner de l’hôpital

UVA Irradiation of Human Skin Vasodilates Arterial Vasculature and Lowers Blood Pressure Independently of Nitric Oxide Synthase

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a tension artérielle est habituellement plus élevée en hiver qu’en été. Selon des chercheurs britanniques, la lumière du soleil est responsable de ce phénomène. Pour cette étude, les équipes des universités de Southampton

Réalisée sur 543 patients atteints de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), une étude espagnole montre que des patients qui sont moins susceptibles d’avoir une activité physique régulière du fait de leur maladie peuvent réduire leur risque d’hospitalisation suite à une attaque grave en marchant quotidiennement entre trois et six kilomètres.

(Angleterre) et d’Édimbourg (Écosse) ont exposé 24 participants à une lumière bronzante durant deux séances de 20 minutes chacune. Lors de l’une des deux séances, les rayons UV étaient bloqués. Les examens réalisés ensuite ont montré que l’effet de la chaleur seule ne modifiait pas la tension artérielle, tandis que l’exposition aux UV la réduisait. Selon eux, le taux de monoxyde d’azote (NO) dans l’organisme est responsable de ce phénomène. Le NO et les produits de sa dégradation, qui abondent dans la peau, sont impliqués dans la régulation de la tension artérielle. Lors d’une exposition à la lumière du soleil, de petites quantités de monoxyde d’azote passent de la peau à la circulation sanguine, ce qui réduit le tonus des vaisseaux sanguins. La diminution de la tension artérielle était également associée à une réduction du risque de crise cardiaque et d’accident vasculaire cérébral. Ainsi, selon les chercheurs, le NO pourrait constituer un facteur essentiel dans la prévention des maladies cardio-vasculaires, et ne pas s’exposer à la lumière du soleil pourrait être contre-productif. • • Journal of Investigative Dermatology,

ȫȫ Respirology, publication en ligne du 2 février

ȵȵ La musique comme cure de jouvence La musique semble améliorer la qualité de la vieillesse, en agissant sur la mémoire et la motricité. Elle stimulerait une région du cerveau, l’hippocampe, l’une des rares zones à produire de nouveaux neurones tout au long de la vie et qui joue un rôle clé dans la mémoire. Les jeunes seniors qui commencent une pratique musicale affichent un déclin cognitif réduit. Par exemple, un atelier de chant proposé à des malades atteints d’Alzheimer leur a permis de retenir des chansons, et de s’en souvenir parfois même après plus de quatre mois d’arrêt.

publication en ligne du 20 janvier

Contre les poux, un simple shampoing suffit Efficacy of Products to Remove Eggs of Pediculus humanus capitis (Phthiraptera: Pediculidae) From the Human Hair rès fréquentes chez les enfants âgés de 3 à 12 ans, les infestations de poux sont difficiles à traiter car les femelles déposent leurs œufs sur les mèches de cheveux et les collent avec une substance gluante. À ce jour, les preuves d’efficacité in vitro et in vivo des produits spécifiques sont rares. Une équipe de chercheurs belges a donc réalisé une étude sur 605 cheveux prélevés sur 6 enfants. Chaque cheveu a été infesté par une lente, qui a pondu ses œufs. Ils ont ensuite tenté de retirer les coquilles d’œufs en déterminant l’efficacité de plusieurs produits via une procédure de mesure objective. Leurs résultats indiquent que les lentes fixées à des cheveux non traités sont les plus difficiles à éliminer et que celles présentes sur des cheveux préalablement trempés dans de l’eau déminéralisée s’avèrent plus faciles à enlever, et ceci de manière similaire à celles fixées sur des cheveux

traités avec un shampoing ordinaire ou spécifique antipoux. D’autres produits tels que l’acide formique et l’huile d’amande n’ont pas eu d’effet bénéfique. Ils n’identifient donc aucune différence significative d’efficacité entre ces deux types de shampoings. Pour eux, tous les shampoings réduisent l’adhérence des lentes au cheveu et facilitent leur élimination. • •Journal of Medical Entomology,

ȫȫ Neuroimage, vol. 90C, pp. 179-88

ȵȵ Mieux vieillir en groupe

publication en ligne du 27 janvier

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en bref

Le soleil, un brillant anti-hypertenseur

Des travaux menés sur 20 000 personnes révèlent que le sentiment de grande solitude s’accompagne d’un sommeil perturbé, d’une tension artérielle élevée, d’une altération des cellules immunitaires et d’un accroissement des états dépressifs. Se sentir très seul peut ainsi accroître de 14 % le risque de mort prématurée chez une personne âgée. L’impact est aussi néfaste que le fait d’être défavorisé socialement. ȫȫ Cognition & Emotion, vol. 28(1), pp. 3-21

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doc+

Spécialités

Spécialités

Spécialités

Substances actives

Buprénorphine haut dosage (BHD)

Chlorhydrate de méthadone

Formes et modes d’administration

Comprimés sublinguaux, 1 prise quotidienne

Sirop et gélules, 1 prise quotidienne

Listes

Liste I

Liste des stupéfiants

Dosages existants

0,4 mg, 2 mg et 8 mg (en générique, existe également en 1 mg, 4 mg et 6 mg)

Sirop : 5, 10 , 20 , 40 , 60 mg Gélule : 1, 5 , 10 , 20 , 40 mg

Indications

Traitement de la pharmacodépendance majeure aux opiacés (héroïne, codéine, morphine)

Sirop/gélule : idem buprénorphine Gélule : en relais de la forme sirop chez des patients traités par la forme sirop depuis au moins un an et stabilisés

Mécanisme d’action

Action agoniste-antagoniste, agoniste « partiel ». Faible risque de surdosage lié à l’existence d’un effet plafond (minimisation des risques de dépression respiratoire, par rapport aux agonistes purs tels que héroïne, morphine, méthadone, etc.)

Agoniste complet des récepteurs opiacés (propriétés analogues à celles de la morphine)

Personnes concernées

Adultes et adolescents de plus de 15 ans, volontaires pour recevoir un traitement de substitution

Posologie initiale

0,8 à 4 mg par jour en une prise (personnes non sevrées : la première prise de buprénorphine doit intervenir au moins 4 heures après la dernière prise de stupéfiant ou lors de l’apparition des premiers signes de manque

Sirop : la première dose quotidienne est habituellement de 20 à 30 mg, selon le niveau de dépendance physique et doit être administrée au moins 10 heures après la dernière prise d’opiacés

Posologie de stabilisation

La posologie est adaptée par paliers quotidiens de 2 à 4 mg jusqu’à disparition des signes de sevrage. Posologie de stabilisation : généralement entre 8 et 12 mg par jour (atteinte en 1 à 2 semaines). La dose maximale recommandée est de 16 mg par jour

Sirop : la posologie est adaptée progressivement jusqu’à 40 à 60 mg en 1 à 2 semaines. La dose d’entretien est obtenue par augmentation de 10 mg par semaine et se situe habituellement entre 60 et 100 mg par jour. Relais sirop/gélule : la forme gélule sera d’emblée prescrite à la posologie correspondant à la posologie d’entretien atteinte avec la forme sirop. La première prise de gélule doit avoir lieu le lendemain de la dernière prise de sirop, à l’heure habituelle

Posologie d’arrêt

Progressif sur plusieurs mois ou plusieurs années (l’Asud* recommande de ne pas diminuer de plus de 10 % par périodes de 15 jours)

Progressif par paliers, au moins hebdomadaires, de 5 à 10 mg

Prescription

Prescription possible par tout médecin. Sur ordonnance sécurisée, avec rédaction de la posologie en toutes lettres et mention du nom du pharmacien ou de la pharmacie d’officine sur l’ordonnance. Durée maximale de prescription : 28 jours

Prescription initiale réservée aux médecins exerçant en Csapa** ou aux médecins hospitaliers. Prescription sur ordonnance sécurisée avec nom du pharmacien et, en toutes lettres, le nombre d’unités thérapeutiques par prise, le nombre de prises, le dosage. Durée maximale de prescription : 14 jours. Au moment du relais de la forme sirop à la forme gélule : le nom du médecin traitant choisi devra être noté

Délivrance

Depuis 2012, plus de délai de présentation de l’ordonnance. La délivrance est fractionnée par périodes de sept jours, sauf si le prescripteur mentionne sur l’ordonnance « délivrance en une fois »

L’ordonnance doit être présentée dans les trois jours suivant la date de prescription ou la fin de la fraction précédente. Au-delà de ce délai, elle n’est exécutée que pour la durée de traitement restant à prendre. La délivrance est fractionnée par périodes de sept jours, sauf si le prescripteur mentionne sur l’ordonnance « délivrance en une fois »

Effets indésirables fréquents

Constipation, nausées, vomissements, insomnie, céphalée, évanouissement, vertige, asthénie…

Euphorie, vertiges, somnolence, nausées, vomissements, constipation, sédation, hypersudation, dysurie, œdèmes…

Conseils pharmaceutiques

• Bien s’assurer que le patient a un suivi complet (psychologique, social, médical) • Insister auprès du patient que la voie sublinguale est la seule efficace et bien tolérée • Le comprimé doit être maintenu sous la langue jusqu’à dissolution (soit environ 10 minutes) • Ne pas boire et manger pendant la dissolution • L’association avec l’alcool et/ou les benzodiazépines peut s’avérer très dangereuse À noter pour les sportifs : la buprénorphine est inscrite sur la liste des substances dopantes

• Bien s’assurer que le patient a un suivi complet (psychologique, social, médical) • Faire attention aux enfants, le risque de décès est très important en cas d’ingestion accidentelle (ne pas déconditionner les comprimés à l’avance)

(*) Auto-support des usagers de drogue. (**) Centres de soins d’accompagnement et de prévention en addictologie.

Cette fiche équipe vous est offerte par la revue pharma • à afficher dans le back-office

Subutex et méthadone, leur dispensation en pratique


7es Rencontres de l’officine Déjeuner-débat Biogaran

Observance thérapeutique :

comment l’améliorer ?

Réunis autour d’un déjeuner-débat organisé par le laboratoire Biogaran lors des 7es Rencontres de l’Officine, experts et professionnels de santé ont tenté d’identifier les leviers pour améliorer l’observance thérapeutique. Décryptage. 32 • Pharma N°110 • mars 2014

S

elon un rapport de l’IGAS (Encadrement des programmes d’accompagnement des patients associés à un traitement médicamenteux, août 2007), la mauvaise observance concernerait 30 % à 50 % des patients de manière régulière, voire 90 % des personnes atteintes d’affections chroniques à un moment donné de leur maladie. 50 % des diabétiques oublient de prendre leur médicament au moins une fois par semaine. 40 % des dépenses hospitalières en psychiatrie pourraient être imputées aux rechutes par défaut d’observance. Enjeu de santé publique, l’observance constitue également un enjeu socio-économique. Pour le professeur Gérard Reach, responsable de l’endocrinologie-diabétologie-maladies métaboliques de l’Hôpital Avicenne à Bobigny, « la non observance est une absence d’adéquation entre les comportements des patients et les prescriptions médicales. Quand on parle de


L’OMS définit l’observance, ou adhérence, comme la « mesure selon laquelle le comportement d’une personne, la prise de médicaments, le suivi d’un régime, et/ou l’exécution de changement de style de vie, correspond aux recommandations d’un professionnel de santé » (source : OMS, 2003).

Test de l’évaluation de l’observance de Xavier Girerd

Oui non

1. Ce matin avez-vous oublié de prendre votre médicament

r

r

2. Depuis la dernière consultation, avez-vous été en panne de médicament

r

r

3. Vous est-il arrivé de prendre votre traitement avec retard par rapport à l’heure habituelle ?

r

r

4. Vous est-il arrivé de ne pas prendre votre traitement parce que certains jours, votre mémoire vous fait défaut ?

r

r

r r

r r

5. Vous est-il arrivé de ne pas prendre votre traitement parce que certains jours, vous avez l’impression que votre traitement vous fait plus de mal que de bien ? 6. Pensez-vous que vous avez trop de comprimés à prendre ? Total des OUI :

Réalisation du test Au cours de la consultation pour le renouvellement de l’ordonnance du traitement antihypertenseur, toutes les questions sont posées par le médecin à son patient.

Interprétation du test

Gérard Reach

Responsable du service endocrinologiediabétologie-maladies métaboliques, Hôpital Avicenne, Bobigny

non-observance, c’est la prise médicamenteuse insuffisante qui vient d’abord à l’esprit. En fait, le médecin doit prendre conscience que c’est chacune de ses prescriptions qui risque de ne pas être suivie : non seulement la prise de médicaments tels qu’ils sont prescrits ( fréquence d’administration quotidienne, durée du traitement), mais aussi d’autres recommandations telles que celles qui ont trait au suivi d’un régime, la pratique d’une activité physique quotidienne, le fait de surveiller son poids, ou sa glycémie, ou sa tension artérielle... Ce n’est pas le fruit du hasard si l’OMS a déclaré en 2003 qu’améliorer l’observance serait plus bénéfique que n’importe quel autre progrès médical. On peut effectivement se poser la question : à quoi cela sert de créer de nouveaux médicaments s’ils sont mal ou pas pris ? » Médecin généraliste à Saint-Epain (37), François Liard a relevé le nombre de cas d’observance lors d’une journée de travail classique. Sur 29 consultations réalisées dans son cabinet médical, 20 concernent

50

%

des diabétiques oublient de prendre leur médicament au moins une fois par semaine.

Total des OUI = 0

Bonne observance

Total des OUI = 1 ou 2

Minime problème d’observance

Total des OUI ≥ 3

Mauvaise observance

des traitements chroniques. « Et sur ces 20, j’ai identifié 9 cas de mauvaise observance ce qui est considérable. »

Soigner la communication auprès des patients

De quoi dépend une bonne observance ? De multiples facteurs émotionnels, comportementaux et sociaux sont à prendre en compte. Le patient va ainsi plus ou moins bien suivre son traitement, en fonction des informations qu’il possède sur sa maladie, de la manière dont il a intégré les prises de traitement dans sa vie quotidienne et du soutien médical mais également personnel dont il bénéficie. « La lassitude, l’ennui, le désespoir d’un patient chronique peuvent l’amener à oublier de prendre son traitement, à le décaler voire le refuser, note ainsi le Pr. Gérard Reach. Il est naturel de ne pas être observant lorsqu’on est patient chronique ». Le patient chronique a sa psychologie, sa culture, ses connaissances. Le professionnel

de santé ne peut pas se contenter de délivrer une information médicale et une prescription. Pour améliorer l’observance thérapeutique, l’effort doit être porté sur la communication. Des méthodes existent pour évaluer la bonne observance d’un patient. Ainsi dans le domaine de l’hypertension artérielle, le test d’évaluation de l’observance de Xavier Girerd (voir ci-contre) fait office de référence. Dans d’autres cas, c’est par le biais du dialogue qui va se nouer avec le professionnel de santé (spécialiste, médecin généraliste ou pharmacien) que des pistes d’amélioration vont être identifiées. Certaines questions sont d’ailleurs incontournables lors de cet échange : que comprend le patient de sa pathologie ? Connaît-il les mécanismes d’action des médicaments qui lui sont prescrits ? Est-il d’accord sur le rapport bénéfices/risques de son futur traitement ? Connaît-il les risques d’une mauvaise observance ? « Le professionnel de santé oublie bien souvent un élément primordial lors

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7es Rencontres de l’officine Déjeuner-débat Biogaran

François Liard Médecin généraliste

d’un échange avec son patient : vérifier que l’information médicale est comprise, confirme le Pr. Gérard Reach. Lorsque je m’adresse à un patient, il y a systématiquement deux barrières à franchir. Il y a la barrière des mots et la barrière du sens. Je vais vous donner un exemple : les diabétologues se sont battus comme des chiffonniers pour savoir s’il valait mieux dire hémoglobine glyquée ou hémoglobine glycosylée. Pourquoi ne dit-on pas hémoglobine sucrée ? Les patients diabétiques comprendraient plus rapidement et ce serait beaucoup plus facile à expliquer. D’une manière générale, c’est seulement lorsque le patient a compris ce qu’on lui a dit qu’on peut espérer qu’il fera ce qu’on lui a dit. »

De l’observance à l’adhésion thérapeutique

Yves Michiels Pharmacien titulaire

François Tharaux

Directeur marketing Biogaran

34 • Pharma N°110 • mars 2014

L’information du patient sur sa maladie est le premier pas pour mettre en place une bonne observance. Elle doit se faire en termes simples et compréhensibles et porter sur la pathologie, sur les bénéfices attendus, mais aussi les risques et effets secondaires du traitement. Ce dialogue, cet échange crucial s’opère une première fois dans le cabinet médical lors d’une consultation. « La relation médecin-patient a considérablement évolué au cours des vingt dernières années, observe François Liard, médecin généraliste. On est passé d’une relation paternaliste avec le patient à une relation de consensus. On est passé de l’observance thérapeutique à l’adhésion thérapeutique. A nous de convaincre le patient d’accepter son traitement thérapeutique. Et ce n’est pas chose aisée. Le patient est de plus en plus exigeant, de mieux en mieux informé sur sa pathologie et les traitements mis à sa disposition, de plus en plus méfiant… » Désormais le médecin ne se contente plus de prescrire mais de bâtir avec le patient un projet thérapeutique. « Dans le domaine de l’observance, pharmacien et médecin généraliste doivent renforcer leur rôle de coordinateurs des soins. A nous de vérifier la cohérence, la pertinence et l’acceptation des traitements proposés à nos patients. La loi HPST nous offre de formidables possibilités pour travailler ensemble sur l’amélioration de l’observance, notamment via l’élaboration de protocole de soins réunissant l’ensemble des professionnels de santé. »

Des pharmaciens mobilisés

Après le suivi des patients sous AVK, les officinaux vont prochainement accompagner les patients asthmatiques lors d’entretiens pharmaceutiques dédiés. Un enjeu en terme d’observance. « 50 % des patients asthmatiques ne prennent pas leur traitement. Il y a un énorme travail à faire sur la non observance, observe Yves Michiels, titulaire en Côte d’Or, qui a mis au point au sein de sa pharmacie une méthode qui permet d’inclure dans la dispensation un certain nombre de questions relatives à l’observance. « Le cœur de notre métier reste la dispensation mais cela ne nous empêche pas d’agir sur l’observance, note le pharmacien. Les patients inobservants sont des patients ambivalents. Ils veulent être en bonne santé mais dans l’application de leur traitement, il y a un décalage. En s’intéressant à l’ambivalence du patient non-observant, nous parvenons à rétablir un comportement déviant. » Yves Michiels le reconnaît. « Nous avons un énorme avantage par rapport au médecin du fait de l’existence du dossier pharmaceutique. Il nous permet d’avoir un historique médicamenteux du patient ou de voir les dates de renouvellement du traitement. Le DP nous permet de traduire l’observance ou l’inobservance à travers des faits concrets et de manière régulière. » Autre outil utilisé : le spiromètre qui permet de mesurer les capacités respiratoires du patient. Grâce à cette surveillance respiratoire, le pharmacien et son équipe ont pu améliorer l’observance des patients asthmatiques qui prenaient mal ou pas leur traitement. « Au-delà de l’enjeu de santé publique, cette expérience permet d’éviter de nouveaux coûts pour l’Assurance maladie (nouvelle consultation voire hospitalisation, examens de laboratoires…). Il serait normal que le pharmacien soit rémunéré pour ce service. »

Des industriels concernés

Première cause de mortalité mondiale selon l’OMS, la non observance mobilise l’ensemble des acteurs de santé. Les professionnels de santé en premier lieu, mais également les industriels du médicament. Pour François Tharaux, directeur marketing du laboratoire Biogaran, « la chronicité est un déterminant de l’observance.


15 millions de Français souffrent de pathologies chroniques. Que ce soit par oubli, lassitude ou du fait de nombreux déplacements, près de 50 % des personnes malades ne suivent pas correctement leur traitement. La non observance est un combat quotidien pour Biogaran. Nous apportons une attention particulière à l’efficacité de nos traitements mais plus encore à leur suivi. Il est de notre devoir d’agir pour améliorer l’observance, notamment en développant des outils adaptés à une meilleure prise des traitements ». Fidèle à sa démarche en faveur du bon suivi des traitements par les patients, Biogaran a ainsi récemment lancé l’Organiseur à médicaments. Disponible dans les pharmacies en février 2014, cet outil est remis gratuitement par les pharmaciens accompagné de conseils favorisant la bonne observance (voir encadré). Preuve de son utilité, ce nouvel outil innovant a reçu le Janus de la santé 2014. « Parmi les seniors âgés de 55 à 70 ans, atteints de maladie chronique, 59 % prennent plus 4 de médicaments par jour et 38 % se déplacent au moins une fois par mois, observe François Tharaux. Dédié aux seniors polymédiqués, ce nouveau service répond à l’engagement de Biogaran : favoriser la bonne observance et le bon suivi des traitements par les patients. » Une bonne observance passe également par une meilleure communication autour de la marque. « Les patients font confiance à une marque reconnue, notamment lorsque celle-ci soigne efficacement, explique

François Tharaux. Biogaran, grâce à ses campagnes de communication, a toujours cherché à rassurer les patients sur les médicaments génériques. Et cet effort est payant. La marque Biogaran est aujourd’hui connue et reconnue en France par 70 % des Français selon une enquête BVA de mai 2013. 73 % considèrent que Biogaran est une marque rassurante et qui inspire confiance. Son action en faveur de la bonne observance est également reconnue puisque 69 % considèrent que ses emballages les aident à bien suivre leur traitement. » Biogaran a également innové en créant un langage pictographique sur ses packagings pour apporter des informations claires et détaillées pour prendre son traitement au bon moment et en bonne quantité. Un autre élément graphique permet d’identifier rapidement à qui ce traitement s’adresse (enfant ou adulte).

59

%

parvenir à trouver un accord consenti entre le patient et son médecin ou pharmacien ». « On peut parfois regretter une certaine confusion dans la prise des seniors en charge du patient, observe de son âgés de 55 à 70 ans, atteints côté François Liard. Chaque professionnel de santé arrive avec sa vision, de maladie sa connaissance, sa représentation chronique, prennent plus de de la maladie et souvent occulte la vi4 médicaments sion du patient et sa perception de sa pathologie. Il faut parvenir à nouer par jour un dialogue constructif où le patient n’est plus simplement au cœur des débats mais acteur d’un projet de santé consenti et validé par ses soins. Un traitement thérapeutique validé sera pris par le patient. »

Attention à ne pas transformer le patient en homo medicus

Si les solutions pour aider les patients à mieux suivre leurs traitements existent, attention à ne pas perturber le patient avec une foule d’informations. « Il est commun d’affirmer que le patient doit être au centre du système de soins. Evitons que le patient ne se sente encerclé, cerné par l’expertise médicale, prévient le professeur Reach. Il ne faut pas transformer le patient en homo medicus. D’où la nécessité de travailler sur le dialogue, de

L’Organiseur à médicaments Biogaran En France, 15 millions de personnes souffrent de maladies chroniques et près de 50 % des personnes malades ne suivent pas correctement leur traitement. Les seniors sont les plus touchés par les affections de longue durée. C’est pourquoi Biogaran a créé pour les jeunes seniors (50 à 70 ans) l’Organiseur à médicaments qui leur permet d’avoir sur eux et en toutes circonstances leurs traitements pour une journée, un week-end, une semaine ou plus. Ce nouveau service innovant récompensé par le Janus de la santé 2014 se compose d’un pilulier à glisser dans la poche ou le sac pour la journée, d’une pochette amovible pour transporter les plaquettes de médicaments avec leurs notices pour quelques jours, de l’Organiseur pour stocker les boîtes de médicaments d’un mois de traitement, et d’un espace dédié pour ranger les ordonnances.

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10 questions sur…

La DMLA

Selon les chiffres de l’Inserm, 1 million de Français souffrent de DMLA, qui est la première cause de handicap visuel après 50 ans. Un chiffre qui pourrait grimper à 2 millions d’ici à 2025. 1

Qu’est ce que la DMLA ?

La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est une maladie de la rétine touchant, comme son nom l’indique, sélectivement la région maculaire située au pôle postérieur de la rétine, support de la vision précise et des couleurs. Elle apparaît dès l’âge de 50 ans mais son diagnostic est généralement fait dix à quinze ans plus tard puisque, au stade précoce, les troubles visuels minimes passent souvent inaperçus (les personnes se plaignent d’avoir besoin de plus de lumière pour lire plutôt que d’une mauvaise vision).

Quels sont les facteurs de risque ?

L’âge et le tabac sont les facteurs les plus clairement définis. On sait par exemple qu’une personne fumant plus de vingt cigarettes par jour a un risque de DMLA multiplié par 2,5. Le facteur génétique est également présent : avoir un membre de sa famille (frère, sœur, parent) atteint multiplierait par quatre le risque de l’être à son tour. D’autres facteurs comme l’exposition à la lumière, la couleur des yeux, l’hypertension artérielle ou l’obésité sont souvent évoqués et font aujourd’hui l’objet d’études.

©© B. BOISSONNET – BSIP

2

2,5

Une personne fumant plus de Quels en sont 20 cigarettes 3 par jour a les deux types ? La DMLA dite « sèche » ou atrophique un risque de est la forme la plus fréquente. Elle se développer la caractérise par la disparition progres- DMLA multiplié sive des cellules de l’épithélium pig- par 2,5. mentaire de la rétine. Elle conduit à une baisse de l’acuité visuelle sur des mois, voire des années. La DMLA néovasculaire, exsudative ou « humide » se caractérise, elle, par la formation de « néovaisseaux » sous la rétine, gênant la vision. Son évolution peut être particulièrement rapide, et peut conduire à une perte de la vision centrale en quelques semaines. Cette forme serait à l’origine de 80 à 90 % des pertes de vision liées à une dégénérescence maculaire liée à l’âge.

36 • Pharma N°110 • mars 2014

4

Quels sont les symptômes évocateurs ?

On en recense quatre principaux. – Diminution de la sensibilité aux contrastes : le patient a l’impression de manquer de lumière pour lire ou écrire. Les images peuvent lui paraître plus ternes ou jaunies. – Baisse de l’acuité visuelle : la personne a des difficultés à voir les détails. – Déformation des lignes droites : le patient les perçoit comme déformées ou ondulées. – Apparition d’une tache sombre centrale : la personne distingue une tache noire ou grise (appelée scotome) devant l’œil, qui le gêne pour distinguer les éléments. Si un patient évoque l’un de ces symptômes, proposez-lui de faire le test de la grille d’Amsler disponible par exemple sur www.retina.fr et très simple à réaliser. Si les résultats évoquent une

DMLA, orienter le patient vers un ophtalmologue en précisant que le test d’Amsler a été effectué. Ce dernier proposera alors un rendez-vous. Le site www.dmlainfo.fr est également une source d’information appréciable.

Quels sont les examens nécessaires pour poser le diagnostic ? 5

– Le fond d’œil permet de mettre en évidence certaines anomalies caractéristiques d’une DMLA, et notamment les Drusen – taches blanches dues à l’accumulation de déchets lipidoprotéiques sous la rétine – et les altérations de l’épithélium pigmentaire. – L’angiographie consiste à photographier les vaisseaux de la rétine après injection intraveineuse d’un colorant fluorescent. Attention, le patient ne doit pas conduire dans les deux-trois heures suivant l’examen.


– L’OCT (tomographie par cohérence optique) permet une exploration anatomique des couches de tissus constituant la rétine. Elle est de plus en plus utilisée pour suivre l’évolution de la maladie et les effets du traitement.

Avastin

Selon les études, les traitements Avastin et Lucentis sont équivalents Quels sont les 6 en termes traitements d’efficacité médicamenteux existants ? et d’effets Aujourd’hui, seule la forme exsudaindésirables. tive de la DMLA bénéficie d’un traitement spécifique, dont l’objectif n’est pas de guérir mais de ralentir l’évolution de la maladie, et ainsi de limiter la perte d’acuité visuelle. Le traitement de première intention consiste à injecter des anti-VEGF (facteur de croissance de l’endothélium vasculaire) permettant d’inhiber la formation des néovaisseaux responsables de la DMLA. Le plus courant est le ranibizumab (Lucentis), qui s’administre par injection intravitréenne toutes les quatre semaines sur trois mois consécutifs. De la même famille mais moins employé car d’efficacité moindre et incertaine, le pégaptanib s’utilise à raison d’une injection tous les six semaines, soit neuf injections dans l’année. Plus récent, l’aflibercept (Eyla) présente un SMR important mais pas d’ASMR par rapport au Lucentis. En cas de contre-indication ou de non réponse aux anti-VEGF, ainsi que dans certaines formes cliniques spécifiques, le patient pourra se voir proposer de la photothérapie. Cette technique qui nécessite l’injection d’un photosensibilisant, la vertéporfine, vise à coaguler les néovaisseaux sans altérer la rétine sous-jacente. Concernant la forme sèche de la DMLA, à défaut de traitement chirurgical ou médicamenteux, le professionnel pourra recommander une supplémentation en lutéine et en antioxydants, ainsi que des systèmes optiques grossissants permettant de restaurer une capacité visuelle de base. Pour les jeunes patients, il sera proposé une rééducation basse vision améliorant la fixation excentrique.

7

Et l’Avastin dans tout ça ?

Une question agite l’ophtalmologie et l’Assurance maladie depuis plusieurs années : pourquoi l’Avastin (bevacizumab, laboratoire Roche), qui coûte plus de vingt fois moins cher que le Lucentis (Novartis) et qui semble d’efficacité similaire, n’est-il pas officiellement reconnu par les autorités françaises dans le traitement de la

DMLA ? Une étude comparative des deux traitements financée par les pouvoirs publics et l’Assurance maladie – l’étude Gefal (Groupe d’évaluation français Avastin versus Lucentis) –, portant sur 501 patients, a été lancée en 2009. Elle est venue confirmer les résultats de nombreuses autres études parues à l’international : les deux molécules semblent équivalentes en termes d’efficacité et d’effets indésirables. Seul un doute persiste sur la sécurité sanitaire de l’Avastin, notamment du fait du manque de recul. Alors que Roche et Novartis viennent d’être condamnés à 182,5 millions d’euros d’amende en Italie pour entente illicite, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a transmis au conseil d’état un projet de décret permettant aux ophtalmologistes d’utiliser Avastin dans le cadre d’une « recommandation temporaire d’utilisation pour raison économique ».

Quelle est la place des compléments alimentaires ? 8

Repère

Pour les patients les plus touchés, l’habitat doit souvent être réorganisé pour limiter les risques de chutes. De nombreux conseils sont donnés via la « maison virtuelle DMLA » (sur le site www.prochede malade.com).

L’étude Areds (Age-Related Eye Disease Study) a permis de révéler que certains suppléments et compléments vitaminiques jouent un rôle protecteur chez les patients atteints de DMLA intermédiaire ou de DMLA avancée unilatérale. Elle met en évidence que la prise quotidienne d’antioxydants à forte dose (500 mg de vitamine C, 400 UI de vitamine E, 15 mg de bêtacarotène) et d’oxyde de zinc (80 mg + 2 mg d’oxyde de cuivre pour compenser les effets du zinc) limiterait le risque de progression vers le stade sévère de la maladie (source : Vidal). En France, les compléments alimentaires disponibles (Visioprev Duo, Nutrof total, Preservision 3…) comportent des doses très inférieures à celles préconisées par l’étude Areds et ne bénéficient pas actuellement d’une AMM permettant leur administration à de très fortes doses. Ils sont toutefois prescrits dans certaines formes de DMLA.

Quels conseils pour améliorer la qualité de vie ? 9

– Règles hygiéno-diététiques. Pour retarder l’évolution ou prévenir une aggravation, il sera recommandé au patient de consommer des aliments riches en oméga 3, en lutéine et en antioxydants (poisson gras, légumes verts…), de ne pas fumer, de se

protéger les yeux contre les rayonnements puissants. – Aide optique et rééducation visuelle. Rassurer le patient car, dans la grande partie des cas, la DMLA ne rend pas aveugle. Il conservera sa vision périphérique et pourra l’optimiser grâce à des systèmes optiques grossissants et une rééducation orthoptique. – Soutien psychologique. Pour que les patients jeunes ou atteints d’une forme néovasculaire d’évolution rapide arrivent à accepter leur baisse de vision et apprennent à vivre avec des repères différents, un soutien psychologique est primordial. Le pharmacien s’assurera du bon suivi du patient, et l’orientera au besoin vers une association de malades ou un médecin. – Aménagement de l’habitat. Dans les stades les plus avancés, l’espace de vie doit être réorganisé pour éviter les chutes liées à la malvoyance. Il est par exemple recommandé d’éclairer les zones sombres et d’éliminer les obstacles tels que tapis, rallonges électriques, escaliers mal protégés… – Aide à domicile. Pour les personnes isolées ou dans le besoin, ne pas hésiter à appeler les services sociaux de proximité afin d’obtenir un suivi et une aide financière.

10

Où en est la recherche ?

Concernant la maladie, la recherche s’intéresse aujourd’hui de très près aux facteurs génétiques afin de mieux identifier les personnes à risque et de les traiter précocement. Des chercheurs de l’Inserm auraient, eux, trouvé un lien entre les gènes impliqués dans le cholestérol et ceux de la DMLA. Pour ce qui est des traitements, de nombreuses pistes sont explorées. On entend par exemple parler de transplantations de l’épithélium pigmentaire, qui ont fait l’objet de multiples approches et de progrès techniques, ou de thérapie génique, qui permettra probablement l’utilisation de cellules modifiées génétiquement. Si ces pistes offrent de nombreux espoirs pour les malades, elles devront faire l’objet de nombreuses études avant d’être validées. En attendant, des chercheurs de l’Institut de la vision ont peut-être trouvé le moyen de freiner l’évolution de la DMLA, grâce à des verres capables de filtrer une fraction des longueurs d’ondes toxiques qui seraient en partie responsables de la maladie. Anne Champy, pharmacienne

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conseil associé

©© Lichtmeister Photography Productions – istockphoto

Le rhume des foins revient…

Les pollens passent déjà à l’attaque, avec une saison pollinique précoce. Retour à la case médecin ou pharmacien pour les allergiques. Vos précieux conseils feront toute la différence. ˭˭Un antihistaminique per os

La cétirizine est la molécule de référence en conseil. Elle peut être proposée à partir de l’âge de 6 ans. Les contre-indications regroupent l’hypersensibilité et l’insuffisance rénale sévère. Aucune interaction médicamenteuse n’est attendue et, même si la prudence est de mise durant la grossesse, le retour d’expérience est rassurant et permet un emploi aussi bien durant la gestation que l’allaitement. Au titre des effets indésirables, on trouve essentiellement une somnolence d’intensité généralement faible à modérée. Malgré un effet antagoniste sélectif des récepteurs H1 périphériques et la relativement faible activité anticholinergique, on peut citer des cas de difficulté mictionnelle, de problèmes d’accommodation et de sécheresse de la bouche.

˭˭Un collyre et une solution oculaire

L’irritation des yeux est fréquente dans la rhinite allergique, associant démangeaisons et larmoiements. Si

38 • Pharma N°110 • mars 2014

la prise de l’antihistaminique par voie orale ne suffit pas à calmer ces symptômes, n’hésitez pas à conseiller une solution de lavage oculaire, qui permettra d’éliminer les allergènes localement présents. Au besoin, un collyre antiallergique peut y être associé.

˭˭Une solution nasale

15 à 20 La prévalence de la rhinite et de la conjonctivite allergique est estimée entre 15 et 20 % dans les pays industrialisés.

Comme pour les yeux, il est possible de conseiller des spécialités dédiées au nez, afin de traiter les symptômes récalcitrants. Eau de mer ou sérum physiologique peuvent être proposés en lavage, suivi éventuellement d’une instillation de solution antihistaminique, corticoïde, ou d’huiles essentielles. Par ailleurs, qui dit mouchage à répétition dit épiderme irrité. Homéoplasmine, Dr Ducharme, Humer nez irrité… sont autant de baumes ou de crèmes réparateurs à conseiller sans modération.

˭˭Homéo et oligo pour traiter le terrain

On peut recourir à l’oligothérapie pour essayer de moduler les réponses du

système immunitaire. Soufre, manganèse et phosphore sont les éléments qui sont généralement recommandés. Côté homéopathie, Allium cepa et Pollens sont les souches couramment utilisées pour préparer les patients allergiques à la saison polliniques. Au moment des symptômes, on pourra recourir à Pollens, Poumon histamine ou encore Polyrhinium.

˭˭Et la désensibilisation ?

Dans le cas d’allergie aux pollens de graminées, une désensibilisation par voie orale est possible (phléole des prés pour Grazax, cinq graminées pour Oralair). En revanche, le traitement devant être débuté avant la saison pollinique ; il sera donc peut-être préférable pour vos patients d’attendre que cette saison soit terminée. Conseiller dans tous les cas d’en parler avec un allergologue, car le recours à ces traitements nécessite de confirmer auparavant l’allergie aux graminées (via un test cutané positif et/ou présence d’IgE spécifiques). Rose Perrier, pharmacienne


thérapeutique

Nouvelles avancées en diabétologie Entre espoirs et avancées, la recherche médicale sur le diabète s’oriente vers de nouvelles molécules, mais également vers d’autres stratégies de traitement. Découverte. cas d’acidocétose. Par ailleurs, ils ne se substituent pas à une insuline. À savoir : quelques rares cas de pancréatites aiguës ont été rapportés. Aussi les patients doivent-ils être informés des symptômes caractéristiques de cette affection (douleur abdominale intense et persistante).

©© PHOTOTAKE/WERNER – BSIP

> Les gliptines

D

ans la prise en charge du diabète de type 2, les médicaments apparus ces dernières années jouent sur le cycle de l’hormone GLP-1. Cette hormone glucagon-like peptide 1 aide à faire baisser la glycémie. Mais il a été observé que le GLP-1 est rapidement détruit dans l’organisme par l’enzyme DPP-4 (ou dipeptidylpeptidase 4). Ces observations ont permis de mettre au point deux nouvelles classes de médicaments : – les analogues du GLP-1 dotés d’une meilleure résistance à la DPP-4, aussi appelés incrétinomimétiques ; – les inhibiteurs de l’enzyme DPP-4, ou gliptines. Ces médicaments aident à réduire la glycémie et participent à la diminution du poids du patient, notamment pour les analogues du GLP-1. De nouvelles formes sont testées pour permettre une prise par semaine, voire une par mois.

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• La greffe d’îlots de Langerhans est l’une des pistes suivies dans le traitement du diabète. Elle implique toutefois le recours aux immunosuppresseurs à vie pour éviter le rejet.

> Les incrétinomimétiques

Glycosuriques

Faire baisser la glycémie en augmentant l’élimination urinaire… c’est une idée surprenante, et c’est le principe d’action de la classe des inhibiteurs du SGLT2.

Les analogues du GLP-1 ont la particularité de s’administrer par voie injectable. Ils augmentent la sécrétion d’insuline, ralentissent la vidange gastrique et diminuent la sécrétion de glucagon. En France, deux spécialités sont commercialisées (voir tableau page suivante) sous forme de stylo à conserver au réfrigérateur : l’exénatide (Byetta) et le liraglutide (Victoza). Une autre molécule non vendue dans l’Hexagone, le lixisénatide (Lyxumia), reste pour l’heure dans l’ombre, ce médicament faisant l’objet d’une surveillance supplémentaire. Leur indication : le traitement du diabète de type 2, en bithérapie, avec la metformine ou un sulfamide hypoglycémiant, et en trithérapie, avec la metformine et un sulfamide si le contrôle glycémique adéquat n’a pas été obtenu aux doses maximales tolérées de ces traitements oraux. Les incrétinomimétiques ne doivent pas être utilisés chez les diabétiques de type 1 ou en

Ces médicaments inhibiteurs de l’enzyme DPP-4 augmentent le taux des incrétines. D’où une stimulation de la sécrétion d’insuline lors d’un repas (de manière glucose-dépendante) et une diminution de celle de glucagon. Les trois molécules disponibles – saxagliptine (Onglyza), sitagliptine (Januvia, Xelevia) et vildagliptine (Galvus) – disposent d’une AMM chez les diabétiques de type 2, en bithérapie, avec la metformine ou un sulfamide hypoglycémiant, ou en association à l’insuline (voir tableau page suivante). Dans les recommandations, la bithérapie doit être instaurée lorsque le régime alimentaire, l’exercice physique et la metformine en monothérapie ne permettent pas de parvenir à un contrôle adéquat de la glycémie. La Haute autorité de santé (HAS) préconise d’utiliser les trois gliptines en association préférentielle avec la metformine. L’association à un sulfamide hypoglycémiant peut être nécessaire si la metformine est contre-indiquée ou mal tolérée. Dans ce cas, afin de limiter le risque d’hypoglycémie, la posologie du sulfamide peut être réduite. Au-delà, les gliptines disposent aussi d’une AMM en trithérapie, en association avec la metformine et un sulfamide hypoglycémiant. Et en monothérapie ? Les gliptines peuvent être prescrites seules (ces prescriptions sont rares), attention toutefois à la prise en charge. Enfin, les trois molécules possèdent une efficacité similaire.


avis d’expert Dr Éric Marsaudon, médecin diabéto-endocrinologue au centre hospitalier Côte de lumière aux Sables-d’Olonne

« La question de la greffe d’îlots de Langerhans » « La thérapie cellulaire basée sur la greffe en nouvelles cellules bêta-pancréatiques chez un diabétique est conceptuellement séduisante. Si le processus d’isolement des îlots reste techniquement complexe, leur administration est plus simple, puisque non chirurgicale. L’implantation intra-hépatique des îlots est en effet réalisée en radiologie interventionnelle par cathétérisme de la veine porte. Comme toute greffe allogénique, le risque de rejet

justifie la mise en place d’un traitement immunosuppresseur à vie, contrainte qui explique le faible nombre de sujets implantés. Depuis dix ans, le registre international Collaborative Islet Transplant objective des résultats encourageants avec un taux d’insulino-indépendance à trois ans évoluant de 27 % en 1999 à 44 % en 2010. Pour ceux qui gardent malgré tout un faible besoin en insuline, la greffe est associée à une protection

vis-à-vis du risque d’hypoglycémie puisque 90 % en sont indemnes, tandis que 70 % des patients implantés ont une HbA1c < 6,5 %. Pour diminuer les rejets, les recherches tentent d’améliorer le dispositif d’encapsulation des îlots, tandis que pour pallier le manque de donneurs, on se tourne vers les îlots xénogéniques porcins ou vers la production de progéniteurs pancréatiques dérivés de cellules souches embryonnaires humaines. »

> Stratégies de traitement

Modalités d’utilisation des incrétinomimétiques DCI, spécialités Posologie

À savoir

Exénatide Byetta 5 µg, 10 µg

• Posologie progressive pour une meilleure tolérance (nausées fréquentes à l’instauration du traitement) • Posologie initiale pendant au moins 1 mois : 5 µg 2 fois par jour, avant le petit déjeuner et le dîner, par voie sous-cutanée • Possibilité d’augmenter la dose à 10 µg 2 fois par jour afin d’obtenir un meilleur contrôle glycémique • Ne s’administre pas après un repas

Liraglutide Victoza 6 mg/mL

• S’administre 1 fois par jour par voie souscutanée, indépendamment des repas • Posologie progressive pour une meilleure tolérance gastro-intestinale • Posologie initiale : 0,6 mg par jour • Après au moins une semaine de traitement : 1,2 mg par jour • Selon la réponse clinique et après une semaine supplémentaire : possibilité d’augmenter la dose journalière à 1,8 mg (dose maximale recommandée)

• Généralement, en association à la metformine, ces médicaments ne provoquent pas d’hypoglycémie. En revanche, attention en cas d’association aux sulfamides hypoglycémiants, des hypoglycémies étant possibles

Posologies des gliptines DCI, spécialités Posologie

À savoir

• Saxagliptine, Onglyza 5 mg

5 mg 1 fois par jour

Des réactions d’hypersensibilité graves (angiœdème, réaction anaphylactique) et des pancréatites aiguës ont été rapportées. La molécule est donc désormais contre-indiquée en cas d’antécédents de réaction d’hypersensibilité grave

• Sitagliptine, Januvia 50 mg, 100 mg Xelevia 50 mg, 100 mg

100 mg 1 fois par jour – En cas d’insuffisance rénale modérée : 50 mg 1 fois par jour – En cas d’insuffisance rénale sévère (rarement prescrite) : 25 mg 1 fois par jour – Adaptation posologique non nécessaire chez le sujet âgé

Des cas graves d’hypersensibilité ont été observés : angiœdème, réaction anaphylactique, lésions cutanées exfoliatives, nécrolyse épidermique toxique. Ils imposent un arrêt immédiat et définitif de la molécule

• Vildagliptine, Galvus 50 mg

100 mg par jour en 2 prises, matin et soir

• Ne doit pas être employé en cas d’insuffisance hépatique • Surveillance régulière de la fonction hépatique au cours du traitement

À noter que dans les associations fixes d’antidiabétiques oraux avec gliptine, la metformine est dosée à 1 000 mg. Les spécialités disponibles sont Komboglyze (metformine et saxagliptine), Janumet et Velmetia (metformine et sitagliptine) et Eucreas (metformine et vildagliptine).

Il semblerait qu’aujourd’hui les bithérapies, voire les trithérapies avec injection d’insuline soient plus rapidement instaurées dans la prise en charge du diabète de type 2, afin de ramener plus vite le taux d’hémoglobine glyquée entre 6,5 et 7 % pour les patients présentant un diabète récent sans complications. Selon les prescripteurs et après une durée d’évolution de la maladie supérieure à dix ans, ou en cas de complications cardio-vasculaires, la valeur cible de l’hémoglobine glyquée se situerait vers 7,5 %, avec une individualisation du traitement.

> Et demain…

Faciliter le renouvellement des cellules bêta, tel est l’objectif du professeur Habib Zaghouani, de l’université de médecine du Missouri (états-Unis). Ses études viseraient à corriger le diabète de type 1 en empêchant le système immunitaire d’attaquer les cellules bêta, probablement en agissant sur la fixation des vaisseaux sanguins autour des îlots de Langerhans. Les résultats des tests cliniques chez les souris sont prometteurs. Les recherches s’orientent donc maintenant vers la production d’une version humaine du remède. Quant au géant Google, il a annoncé, courant janvier, un projet de lentilles de contact intelligentes destinées à mesurer, par le biais d’une petite puce et d’un capteur de glucose miniaturisé, le taux de glucose dans les larmes afin d’aider les diabétiques. Des prototypes pouvant générer une lecture du taux de glucose toutes les secondes seraient en cours de test. Laetitia Leclercq, pharmacienne Suite en page 42

mars 2014 • Pharma N°110 • 41


thérapeutique

Le cas

Ordonnance commentée Gérard, 58 ans, est diabétique de type 2 depuis plusieurs années. Son traitement a permis d’améliorer ses résultats de glycémie. À l’occasion de son renouvellement, il précise qu’il doit subir un examen avec injection de produit dans un mois. Il a entendu dire qu’il devait arrêter un médicament…

Dr Olivier D. Médecine générale

Monsieur L. Gérard

, 58 ans

Le 28 février 2014 Lantus Solostar 10 0 U/mL 32 U par jour à inje cter par voie SC

engendre la formation de micro-précipités à partir desquels de petites quantités d’insuline glargine vont se libérer de façon continue et régulière. L’injection peut se faire à n’importe quel moment de la journée, mais au même moment chaque jour. Comme lors de toute insulinothérapie, l’effet indésirable le plus fréquemment rencontré est l’hypoglycémie, en particulier si la dose d’insuline injectée est supérieure aux besoins. En cas d’hypoglycémie légère, un apport oral de glucides est préconisé. Pour un épisode plus sévère, le recours au glucagon par voie intramusculaire ou sous-cutanée peut être nécessaire.

Metformine

Utilisée dans le traitement du diabète de type 2, la metformine est un biguanide réduisant la glycémie basale et postprandiale. Employée seule, la metformine ne provoque pas d’hypoglycémie car elle ne stimule pas la sécrétion d’insuline. La dose maximale recommandée de metformine est de 3 g par jour en trois prises distinctes, ce qui est le cas ici avec la metformine seule le midi et la metformine associée à la saxagliptine le matin et le soir. Les troubles gastro-intestinaux sont assez fréquents lors de l’instauration du traitement. Les patients doivent être rassurés, ces effets étant le plus souvent transitoires et régressent spontanément. Pour une meilleure tolérance digestive, il est toutefois important de prendre la metformine au cours ou à la fin des repas.

Metformine 1 000 m g cp 1 comprimé le mid i Komboglyze 2,5 mg/ 1 000 mg cp 1 comprimé matin et soir au cours de s repas QSP 3 mois

Komboglyze

Commentaires

Selon les recommandations, afin d’obtenir un meilleur contrôle glycémique, metformine, gliptine et insuline peuvent être associées chez un patient diabétique de type 2. Ce schéma de prise en charge peut être observé après échec des monothérapies.

Lantus Solostar

L’insuline glargine, analogue de l’insuline humaine, possède une durée d’action prolongée, et s’administre ainsi une fois par jour. En effet, après injection dans le tissu sous-cutané, la solution acide est neutralisée, ce qui

42 • Pharma N°110 • mars 2014

1 Le diabète est la première cause d’amputation hors traumatismes.

Cette spécialité combine la saxagliptine, inhibiteur très puissant, sélectif et réversible de la DPP-4, à la metformine. Elle est indiquée ici en association à l’insuline pour améliorer le contrôle glycémique. Le patient doit être encouragé à signaler rapidement tout trouble cutané (cloques, éruption, ulcération…). En raison de la présence de metformine dans la spécialité, la fonction rénale devra être contrôlée régulièrement. Par ailleurs et pour cette même raison, attention en cas d’administration de produits de contraste iodés. Comme pour la metformine seule, le médicament devra être arrêté avant l’examen pour n’être réintroduit qu’après 48 heures. Les produits de contraste iodés peuvent en effet entraîner une insuffisance rénale associée à une acidose lactique chez les patients traités par metformine. Donc, pour répondre à l’interrogation du patient, et en fonction du produit prescrit pour l’examen, une interruption de la metformine et de Komboglyze sera peut être nécessaire quelques heures avant.


cas de comptoir

• La coloscopie permet d’examiner les parois du côlon et du rectum et de pratiquer au besoin la biopsie ou l’exérèse des polypes, voire des tumeurs trouvées. Cet examen est pratiqué systématiquement en cas de résultat positif au test au gaïac.

Deuxième cancer le plus meurtrier, le cancer colorectal est pourtant curable dans 90 % des cas s’il est pris à temps. On mesure donc tout l’enjeu du dépistage, et de l’information envers patients et professionnels de santé.

L

e cancer colorectal représente un enjeu de santé publique et son dépistage est primordial puisqu’il permet une prise en charge précoce, et donc un meilleur taux de survie. Le dépistage revêt différentes formes selon le niveau de risque des patients. Les patients sont dits à

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risque moyen lorsqu’ils ont de 50 à 74 ans et sont asymptomatiques ; dans ce cas, ils sont invités à réaliser le test Hemoccult II dans le cadre du programme national organisé. Ceux qui présentent un antécédent personnel ou familial de cancer colorectal ou d’adénome, une maladie inflammatoire chronique, telle que maladie de Crohn ou rectocolite hémorragique,

sont dits à risque élevé. Pour eux, le dépistage est individuel (consultation chez un gastro-entérologue et coloscopie). Enfin, le risque est dit très élevé chez les personnes avec polypose adénomateuse familiale, cancer colorectal non polyposique (tel que syndrome de Lynch). Le dépistage est ici aussi individuel et repose sur une consultation d’oncogénétique.

©© PHOTOTAKE/OH M.S – BSIP

Cancer colorectal, le paradoxe à vaincre


> Connaître le test Hemoccult

Le dépistage par le test Hemoccult II, en France, concerne les personnes de 50 à 74 ans dites à risque moyen. Le patient reçoit un courrier l’invitant à consulter son médecin traitant. Celui-ci lui remet un test s’il estime le patient éligible au programme. Le test est réalisé à domicile, puis transmis par courrier à un centre de lecture agréé. Les résultats sont ensuite envoyés au patient, au médecin et à la structure de gestion départementale. Il s’agit d’un test au gaïac permettant la recherche de sang occulte dans les selles. Il détecte l’activité peroxydase de l’hème intacte (s’il y a présence de sang, une réaction peroxydasique entraîne une coloration bleue). En pratique, le test doit porter sur trois selles consécutives, sur une durée de un à quinze jours. Elles doivent être émises sur un support sec (vous pouvez conseiller d’utiliser un journal, une assiette en carton, un pot de chambre…) et sans urines. Attention également, le test ne doit pas être réalisé en période de règles, en cas de saignement hémorroïdaire, de prise d’aspirine supérieure à 1 g par jour ou de vitamine C. Il faut également s’abstenir de consommer de la viande rouge dans les trois jours qui précédent. À l’aide du bâtonnet fourni, le patient va recueillir une petite quantité de selles (de la taille d’une lentille ou d’un grain de riz) et la déposer dans le cadre prévu (sans dépasser les bords). Avec le deuxième bâtonnet, il renouvelle l’opération, en prélevant à un autre endroit des selles. La plaquette, une fois refermée, est conservée à température ambiante. Une fois les trois plaquettes utilisées, le patient les place dans le sachet en plastique qu’il met avec la fiche d’identification dans l’enveloppe T fournie, avant de poster le tout.

> Rassurer en cas de test positif

L’interprétation du test Hemoccult II est faite au laboratoire. En cas de test négatif (pas de saignement occulte dans les selles), on ne peut formellement éliminer la présence d’une lésion précancéreuse ou cancéreuse. En effet, ces lésions ne saignent pas de façon continue ; il est donc recommandé de renouveler le test deux ans plus tard, et de consulter le médecin si, dans l’intervalle, des symptômes évoquant un cancer colorectal sont ressentis. Si le test est positif (2 à 3 % des cas), on ne peut affirmer la présence d’une lésion. La présence de sang doit faire rechercher l’origine du saignement et confirmer ou infirmer la présence d’un adénome ou d’un cancer. Ceci sera fait par coloscopie. Dans six cas sur dix, aucune lésion n’est alors retrouvée.

3 Le cancer colorectal est le troisième cancer le plus fréquent chez l’homme en France et le deuxième cancer le plus meurtrier. C’est la première cause de décès par cancer après 85 ans.

Les symptômes pouvant faire suspecter une lésion cancéreuse ou précancéreuse sont la survenue de rectorragies, une modification du transit intestinal (diarrhée, constipation, en alternance ou non), un syndrome rectal tel que faux besoin, ténesme (tension douloureuse au niveau de l’anus avec envie constante d’aller à la selle), épreinte (douleur abdominale avec contraction du côlon et du rectum et fausse envie d’aller à la selle), des douleurs abdominales inexpliquées, de violentes coliques ou un amaigrissement récent et sans cause apparente.

> Promouvoir la prévention

La prévention de ce cancer passe par l’hygiène de vie et l’alimentation : tabac, alcool, sédentarité et consommation de viande rouge sont ainsi clairement incriminés dans la survenue de cette pathologie. L’activité physique, la consommation de fibres alimentaires et de laitages font au contraire partie des mesures préventives préconisées.

> Se préparer aux tests immunologiques

D’après la ministre de la Santé, Marisol Touraine, l’arrivée (très attendue) des tests immunologiques est pour la fin de cette année 2014. Devant remplacer le test au gaïac, le test immunologique présente plusieurs avantages dont une sensibilité supérieure (70 à 85 % contre 50 % pour Hemoccult II), un nombre de prélèvements moindre (un à deux sur deux selles, contre six sur trois selles) et une lecture automatisée et quantitative avec seuil de positivité ajustable. Côté inconvénients, certains spécialistes craignent que la sensibilité du test n’augmente le nombre de faux positifs, certains experts estimant que le nombre de coloscopies sera multiplié par deux lors du passage à ces nouveaux tests. Des appels d’offres européens ont été lancés à la fin du mois de janvier.

> Identifier des signaux d’alerte

> Expliquer la coloscopie

42 100 C’est le nombre de nouvelles personnes touchées en 2012 (23 200 hommes et 18 900 femmes).

C’est un examen d’endoscopie digestive qui permet de visualiser les parois du côlon et du rectum, et au besoin de réaliser l’exérèse et la biopsie des polypes et/ou des tumeurs trouvées. On introduit, le plus souvent sous anesthésie générale, une sonde par l’anus et on remonte jusqu’à la jonction entre le côlon et l’intestin grêle. De l’air est insufflé pour déplisser les parois et l’observation se fait lors du retrait progressif et lent de la sonde. Cet examen nécessite une préparation du patient : régime sans résidu durant les deux ou trois jours qui précèdent, purge la veille et le jour même. Le régime

Le mois de mars en bleu « Mars bleu » est le mois de mobilisation contre le cancer colorectal. Il est organisé par l’Institut national du cancer (Inca), en partenariat avec le ministère chargé de la Santé, l’Assurance maladie, la Mutualité sociale agricole (MSA) et le régime social des indépendants (RSI), et ce, afin de répondre aux exigences du plan cancer en termes d’égalité d’accès, d’adhésion et de fidélisation aux campagnes de dépistage. Pour l’édition 2014, le

dispositif de communication invite les femmes et les hommes concernés à réaliser le test de dépistage, et vise également à sensibiliser les personnes à risque particulier afin qu’elles en parlent avec leur médecin traitant. Affichette, carte postale, jeton de chariot, film pédagogique ou actions de proximité… le dispositif s’appuie sur de nombreux supports, à partager sans modération. Plus d’infos sur le site www.e-cancer.fr

mars 2014 • Pharma N°110 • 45


cas de comptoir

sans résidu (autrement appelé régime sans fibre) autorise la consommation de viande, jambon blanc, volaille, œufs et poisson, pâtes et riz blanc, pommes de terre (sans la peau) et fromages à pâte cuite. Graines, noix, fruits et légumes sont interdits, tout comme les graisses, le pain, les féculents complets et les laitages. La préparation colique passe, quant à elle, par l’absorption de solutions à base de PEG (Colopeg, Fortrans, Klean-Prep, Moviprep), de phosphate de sodium (Fleet, Colokit), ou à base de magnésium (Citrafleet, Picoprep). Si au cours de la coloscopie, un ou plusieurs polypes est découvert, il doit être détruit ou retiré. Les produits d’exérèse ou de biopsie feront ensuite l’objet d’un examen anatomopathologique pour déterminer si les lésions sont cancéreuses ou non. Le compte-rendu précisera le cas échéant le type histologique de la tumeur et son stade selon la classification TNM (tumeur, ganglions, métastases). Au stade I (tumeur envahissant la sous-muqueuse ou la musculeuse, sans métastase ni atteinte ganglionnaire), on traite par chirurgie seule, si le traitement endoscopique n’a pas été suffisant. Au stade II, qui correspond à l’envahissement de la sousséreuse ou des tissus péricoliques et périrectaux, puis à une tumeur envahissant les autres organes, mais toujours sans atteinte ganglionnaire ou métastase, on a recours à la chirurgie seule en l’absence de risque de récidive, éventuellement accompagnée d’une chimiothérapie adjuvante en cas de récidive possible. Dans les stades III (tous niveaux d’atteintes tumorales avec atteinte ganglionnaire mais sans métastase), la chirurgie s’accompagne de chimiothérapie adjuvante. Enfin, en cas de stade IV ou métastatique, la prise en charge est discutée au cas par cas. La chimiothérapie repose sur plusieurs molécules : 5-fluoro-uracile, oxaliplatine, irinotécan, capécitabine (Xeloda), acide folinique (ou leucovorine). En cas de stade métastatique, en plus de ces molécules, le recours est possible aux raltitrexed (Tomudex), cétuximab (Erbitux), panitumumab (Vectibix) et bévacizumab (Avastin).

46 • Pharma N°110 • mars 2014

Détecté précocement, le cancer colorectal guérit dans 90 % des cas.

50

C’est l’âge à partir duquel les hommes et les femmes sont invités à faire le test de dépistage dans le cadre du programme organisé. Il doit avoir lieu tous les deux ans entre 50 et 74 ans, 95 % des cancers colorectaux se développant après 50 ans.

18

C’est, en millions, le nombre de personnes concernées par le programme national de dépistage. Seules 31 % d’entre elles ont effectivement réalisé le test en 2012-2013.

33

C’est, en pourcentage, la réduction de la mortalité chez les personnes ayant réalisé le test Hemoccult.

©© MAY – BSIP

> Connaître les traitements

90

> Accompagner la chimiothérapie per os

La capécitabine (Xeloda) est indiquée dans le traitement de plusieurs cancers, dont le colorectal. Il s’agit d’un cytostatique antimétabolite. Il se comporte comme un précurseur administré par voie orale de la fraction cytotoxique, le 5-fluoro-uracile (5FU). L’activation de la capécitabine suit plusieurs étapes enzymatiques, l’enzyme impliquée dans la conversion finale en 5-FU se trouve dans les tissus tumoraux, mais également dans les tissus sains, quoique habituellement à des taux moindres. La posologie est déterminée selon la surface corporelle. En monothérapie dans le cancer du côlon, elle est de 1 250 mg/m2 matin et soir, soit un total quotidien de 2 500 mg/m2, pendant quatorze jours, suivie d’une période sans traitement de sept jours. En association, la posologie est de 800-1 000 mg/m2 deux fois par jour pendant quatorze jours, suivie d’une période sans traitement de sept jours, ou à 625 mg/m2 deux fois par jour en administration continue.

17 500 C’est le nombre de décès causés en 2012 par le cancer colorectal.

73 C’est l’âge moyen au diagnostic chez les femmes. Il est de 70 ans chez les hommes.

Les comprimés doivent être pris dans la demi-heure qui suit le repas, et un intervalle de 12 heures entre deux prises doit être respecté. Parmi les effets indésirables, citons le syndrome main-pied, des diarrhées, vomissements, nausées, stomatites, céphalées, mucites, thrombopénie, leucopénie, anémie, anorexie, infections des voies respiratoires… La toxicité de la capécitabine peut être contrôlée par un traitement symptomatique et/ou la baisse (voire l’arrêt) de la posologie. Ceci se fera selon le grade du ou des effets indésirables et le pharmacien devrait connaître les grades afin de conseiller au mieux ses patients. Ainsi, dans le cas de l’effet indésirable « vomissements », le grade 0 correspond à leur absence. Le grade 1 à un épisode en 24 heures, le grade 2 à deux à cinq épisodes en 24 heures, le grade 3 à six à dix épisodes et le grade 4 à plus de dix épisodes nécessitant un support parentéral. En cas de baisse due à des effets indésirables, la posologie ne devra pas être réaugmentée par la suite. Amélie Baumann, pharmacienne


Molécule au microscope

Paracétamol, générique polémique Alors que l’inscription du paracétamol au répertoire des génériques fait débat, Pharma fait le point sur cette molécule bien connue mais dont la dispensation mérite toute votre attention. – 130 spécialités contenant du paracétamol seul – Formes orales, rectales, injectables – SMR important – Le paracétamol est l’antalgique de premier choix dans son indication – Remboursement à 65 % pour les spécialités prises en charge

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1 Indications

Le paracétamol est indiqué dans le traitement symptomatique des douleurs d’intensité légère à modérée et des états fébriles. Le paracétamol à la dose de 1 g par prise est également indiqué dans les douleurs de l’arthrose. 2

Mode d’action

Le paracétamol est un analgésique et un antipyrétique ayant un mécanisme d’action central et périphérique. Son absorption par voie orale est complète et rapide. Par voie rectale, elle est moins rapide mais totale également. Après absorption, il se distribue vite dans tous les tissus, et est métabolisé par le foie. L’élimination est essentiellement urinaire. 3

Repère La pipette de Doliprane sirop permet d’administrer 15 mg/kg/prise. Il ne faut donc pas dépasser quatre prises par jour.

Posologie

La dose quotidienne recommandée de paracétamol est de 60 mg/kg/jour, à répartir en quatre ou six prises (la dose maximale est de 80 mg/kg/j). Ceci équivaut à 15 mg/kg pour quatre prises par jour ou à 10 mg/kg pour six prises. Le grand nombre de présentations et de dosages doit permettre une administration adaptée au poids du patient. Chez l’adulte et l’enfant de poids supérieur à 50 kg, la posologie est de 500 mg à 1 g par prise avec un maximum de 4 g par jour. Les prises doivent être espacées de quatre heures au minimum. Chez l’enfant, on recherche des prises régulièrement espacées, y compris la nuit. Les prises systématiques permettent d’éviter les oscillations de douleur ou de fièvre.

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4

Effets indésirables

Quelques cas de réactions d’hypersensibilité ont été rapportés (érythème, urticaire, rash cutané, œdème de Quincke, choc anaphylactique), ainsi que de très rares cas de thrombopénie, leucopénie et neutropénie.

Précautions d’emploi

L’insuffisance hépatocellulaire légère à modérée, l’insuffisance rénale sévère, l’alcoolisme chronique, la malnutrition chronique et la déshydratation imposent une utilisation avec précaution.

Contre-indications

Le paracétamol est contre-indiqué en cas d’hypersensibilité et d’insuffisance hépatocellulaire. La forme suppositoire est contre-indiquée en cas d’antécédent récent de rectite, anite ou rectorragie. 7

En cas de surdosage, l’antidote est la N-acétylcystéine.

adaptée. Par ailleurs, la prise de paracétamol peut fausser le dosage de la glycémie par la méthode à la glucose oxydase-peroxydase et le dosage de l’acide urique sanguin par la méthode à l’acide phosphotungstique. 8

5

6

Repère

O

Interactions

En cas de prise aux doses maximales (4 g par jour) pendant au moins quatre jours, il existe un risque d’augmentation de l’effet anticoagulant oral et du risque hémorragique avec les anticoagulants oraux. Le contrôle de l’INR doit être plus fréquent et la posologie de l’anticoagulant, éventuellement

Grossesse et allaitement

Le paracétamol est autorisé durant ces périodes. De récentes études se sont intéressées au paracétamol pendant la grossesse et certaines suspectent un impact sur le développement moteur des enfants exposés. Une étude de 2010 indiquait un lien entre prise d’antalgiques légers et cryptorchidie mais, pour le Centre de référence sur les agents tératogènes (Crat), ce lien n’est pas établi. 9

Conseils

Les comprimés effervescents contiennent du sodium, ce qui doit être pris en compte en cas de régime hyposodé. Les poudres pour solution buvable comprennent du saccharose et les suspensions buvables sans sucre, du maltitol et sorbitol. Le risque de surdosage est présent avec le paracétamol, employé dans de nombreuses spécialités d’automédication. À rappeler impérativement au comptoir. Rose Perrier, pharmacienne

mars 2014 • Pharma N°110 • 47


Matériel et soins

MAD : y aller ou pas ?

• à la pharmacie de Barriol, savoir-faire, fairesavoir et juste prix sont les clés de la réussite.

• La pharmacie Centrale de Mallemort a alloué toute une vitrine à son activité MAD.

• à la pharmacie des Oliviers, l’activité MAD est suggérée par une étagère et des figurines. .

Pharmacie centrale à Mallemort (13) • Un défi pour l’avenir

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epuis que Didier Convers, l’adjoint responsable du MAD à la Pharmacie centrale, est arrivé en 1987, il a toujours connu l’activité MAD. Il y a une quinzaine d’années, ce secteur en croissance a poussé les anciens titulaires à acquérir un local de 40 m² en face de l’officine qui servait de lieu d’exposition et était une belle vitrine pour la pharmacie. Aujourd’hui, le titulaire, Maxime Mendelsohn, est associé à Valérie Liphard, de la Pharmacie de la Durance, et à Julien Régnier, de la Pharmacie des oliviers. Chacune a son référent en MAD. Si la communication de l’activité MAD passe par la mise en scène d’une salle de bains dans la vitrine de la Pharmacie centrale, Julien, lui, a opté pour une étagère avec de petites figurines suggérant l’activité mais permettant un gain de place conséquent. La récente association des trois pharmacies les

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pousse désormais à s’interroger sur une possible gestion de leur matériel. Ils se retrouvent en effet confrontés à une difficulté de gestion des stocks sur les trois établissements et sont déçus par leur prestataire de matériel. Le trio faisant partie d’un réseau, d’autres pharmacies partenaires pourraient s’adosser au projet, ce qui permettrait d’augmenter le volume d’achats, et donc d’avoir un poids supérieur dans les négociations face aux fournisseurs afin d’obtenir de meilleures remises. Actuellement, c’est Didier qui s’occupe des installations du matériel à domicile en partageant une fourgonnette de la pharmacie avec la personne responsable des livraisons à domicile. Son constat pour l’avenir n’est pas des plus optimistes : « L’influence de la ville de Salon-de-Provence, où sont implantées quelques boîtes privées, se ressent de plus en

plus. Il nous est très difficile de pouvoir afficher les mêmes prix qu’elles ». Là encore, une centrale de matériel permettrait des tarifs plus compétitifs et une certaine autonomie. Pour le pharmacien, « il faut miser sur un service de proximité et de qualité, ne pas hésiter à se déplacer au domicile et accepter de se rendre le plus disponible possible ». Par ailleurs, dans les objectifs fixés par leur certification ISO 9001, la visite une fois par an au domicile du patient a été proposée pour permettre d’assurer le SAV, mais également de pérenniser le lien avec des personnes parfois isolées. Les qualités à avoir pour se lancer dans le MAD ? Pour Didier, il faut avant tout « une certaine adaptabilité aux situations, mais aussi une absence de jugement face aux patients ». Le secret selon lui pour garder la bonne distance et acquérir la confiance de chacun.

©© photos D.R.

Si le maintien à domicile (MAD) est un métier à part, il fait partie intégrante du rôle de l’officinal. Un secteur encore sous-exploité mais en constante progression. Trois pharmaciens nous livrent leur expérience.


Pharmacie Pitel à Marvejols (48) • La proximité avant tout

D

’abord installés à Saint-Chély-d’Apcher, où l’activité MAD était bien établie, les titulaires Marie-Claire et Michaël Pitel l’ont tout naturellement relancée à leur arrivée à Marvejols. Au sein de leur équipe, composée de deux adjointes et d’un préparateur, les compétences sont partagées et tous sont capables de répondre à une demande spontanée au comptoir. Sandra, l’une des adjointes, vient compléter le savoir-faire proposé grâce à un DU d’orthopédie et de petits appareillages. Dans cette pharmacie, la relation avec le patient prime avant tout. Pour Michaël, le MAD est un métier à part qui les a conduits à séparer leur activité en deux parties. Une première pour les petits appareils, fauteuils roulants, aménagement des salles de

bains, dont ils assument l’installation au domicile du malade et le SAV. Dans ce cas, c’est leur véhicule qui est utilisé pour la livraison. Une deuxième partie intégrant l’oxygénothérapie et les lits médicalisés est prise en charge par Airmédic, une société basée essentiellement en Lozère et en Aveyron dont ils ont fait un partenaire de confiance. Le fait de travailler avec un partenaire de proximité est un gros avantage : « La communication est aisée car elle se limite à un seul interlocuteur et le temps de réactivité est imbattable. Il n’est pas rare que pour une demande faite un vendredi soir à 17 heures, tout soit réglé à 19 heures ! », constate Michaël avec satisfaction. L’entreprise est par ailleurs certifiée ISO 9001, une certification que la pharmacie a entrepris de passer.

Pharmacie de Barriol à Arles (13) • Une image encore plus professionnelle

D

ans cette pharmacie de quartier, l’activité MAD est en place depuis 1980. L’investissement est tel que la communication doit être à la hauteur. Mais pas facile lorsque la publicité est interdite. Sur son véhicule de livraison, Pierre-Arnaud Marie, l’un des trois titulaires de la pharmacie de Barriol, a trouvé un compromis : pas de caducée, pas de nom, mais juste la palette de couleurs qui rappelle le logo de son officine. Pour le reste, c’est à l’intérieur de la pharmacie que cela se passe ! Et pour Pierre-Arnaud, « rien ne vaut un travail de qualité pour que le bouche à oreille opère ». Il n’a d’ailleurs pas hésité à compléter son DU d’orthopédie par une formation sur les orthèses thermoformées de trois jours chez Thuasne, qui est devenue l’une des spécialités de la maison et est une activité très rentable. Il nous rappelle que cette formation n’est pas obligatoire mais permet d’acquérir une bonne pratique, et donc d’apporter une image très professionnelle à la pharmacie. Dante Belmondo, le second titulaire, a également passé la « formation Woippy » pour obtenir l’agrément pour vendre des fauteuils roulants. Elle n’est plus obligatoire désormais, mais accentue l’image de techniciens de la pharmacie.

Ils se sont également entourés de prestataires de qualité et de confiance : Thuasne, Gibaud, mais aussi Néosanté pour le matériel, une jeune entreprise basée à Salon-de-Provence très réactive qui leur donne entière satisfaction. « Le SAV réalisé par Néosanté est irréprochable et ajoute à l’image de qualité que la pharmacie veut transmettre à ses patients », souligne le titulaire. Résultat à Barriol, le MAD représente 3,7 % du chiffre d’affaires, l’activité est une belle vitrine sur les possibles services rendus aux patients et la marge est élevée. Selon Pierre-Arnaud Marie, pour se lancer dans le MAD, il faut d’abord pouvoir octroyer une surface suffisante à l’activité (40 m² dans leur cas) car l’orthopédie nécessite de l’exposition. La communication doit ensuite être à la hauteur et passer par un vrai savoirfaire. Tant pis s’il faut perdre une heure sur une orthèse, le principal est la satisfaction du patient, qui reviendra et en parlera autour de lui. Enfin, dans des endroits concurrentiels comme peut l’être Arles, il faut faire attention aux prix. « Mais être bien placé ne signifie pas s’aligner sur les grandes boîtes privées car le conseil apporté par le pharmacien fera toujours la différence », conclut Pierre-Arnaud Marie.

Selon Michaël, avant de se lancer, mieux vaut bien étudier l’environnement. Si à SaintChély, l’activité avait connu un bon développement, à Marvejols, il en est autrement : « Même dans des régions isolées comme c’est le cas en Lozère, des sociétés privées s’installent, court-circuitant ainsi les demandes des particuliers. À Marvejols, elles répondent même à la demande des quatre maisons de retraite implantées dans les alentours ». Pour le titulaire, le nombre important de maisons de retraite fait aussi que les patients ont des besoins moindres en MAD car peu restent à domicile quand un problème de santé survient. Enfin, la baisse de démographie dans leur ville vient s’ajouter à ce phénomène.

10 bonnes raisons de se lancer 1 Pour renforcer l’image de véritable professionnel de santé parfaitement intégré dans la chaîne de soins. 2 Pour la formation à la dispensation du matériel qui permettra à l’équipe d’avoir un discours plus professionnel et des conseils plus complets face aux patients. 3 Pour le facteur humain et la proximité que vous allez pouvoir mettre en place avec vos clients. 4 Pour la diversification de votre activité qui permettra d’apporter un maximum de réponses aux besoins de vos patients. 5 Pour conserver une bonne marge. Si en termes de chiffre d’affaires, l’activité MAD est minime, elle est connue pour permettre des marges de l’ordre de 20 à 30 %, ce qui permet de minimiser l’investissement. 6 Pour détecter plus aisément les prescripteurs des alentours et mieux définir leurs besoins. 7 Pour la notoriété de la pharmacie, et à plus long terme pour la fidélisation de votre patientèle. 8 Pour pouvoir répondre à toutes les demandes et ne pas perdre sur le médicament parce qu’on n’a pas pu satisfaire à la demande de dispositifs médicaux rattachés à l’ordonnance. 9 Pour avoir un stock minimum dans les zones les plus reculées. Plus la zone est rurale, plus le potentiel de développer l’activité maintien à domicile est important.  Pour communiquer sur votre pharmacie, vos compétences en général, votre engagement humain et présenter à vos patients tout ce qu’il est possible de leur fournir pour faciliter leur quotidien.

Marie Simonot, pharmacienne

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©© lutavia, drflet – istockphoto

Dermo-cosmétique

Peut-on vraiment préparer la peau au soleil ?

I

Les compléments alimentaires « solaires » entendent préparer la peau avant et durant son exposition pour améliorer sa tolérance et la protéger des méfaits des UV. Avec à la clé un hâle doré prolongé. À voir…

ntégrés dans nombre de formules destinées à préparer la peau au soleil, les caroténoïdes sont les ingrédients phares des compléments alimentaires « solaires ». Lesquels y trouve-t-on principalement ? Le bêta-carotène ou provitamine A (exemple : Phytobronz d’Arkopharma),

50 • Pharma N°110 • mars 2014

le lycopène (exemple : Oenobiol solaire de Sanofi-Aventis), la lutéine ou des mélanges de phytopigments sélectionnés notamment pour leur variété de couleurs (exemple : Doriance de Naturactive). Ils sont souvent associés, entre autres, à la vitamine E, au sélénium et à certaines huiles. Activation de la pigmentation de la

peau, meilleure tolérance, protection cellulaire antioxydante sont les principaux effets revendiqués par ces préparateurs solaires. « Les caroténoïdes et la vitamine E vont augmenter la résistance aux agressions extérieures et aux radicaux libres générés sous l’effet des UV », précise Nicole Mourey, chef de produit Phytobronz. Certaines


à la peau de mieux s’adapter au soleil, ils ne sont pas photoprotecteurs », insiste le spécialiste. Ils ne dispensent donc pas d’utiliser une protection solaire adaptée. Autre effet, plus marqué : celui exercé dans la lucite estivale bénigne, une allergie solaire qui touche une femme sur quatre. « La prise de caroténoïdes à bonne dose permet de prévenir l’apparition de la maladie de plus de moitié », signale Michel Jeanmougin. Autre interrogation : permettentils de prolonger ou d’intensifier le bronzage ? « Aucune étude valable ne le prouve. Le bronzage n’est pas plus important mais il est plus visible ». Via

formules mettent en outre en avant un effet anti-âge (Oenobiol solaire intensif anti-âge contient en plus du zinc et de la vitamine C, Doriance solaire & anti-âge a ajouté du cuivre et de l’huile de cameline). « Des huiles riches en oméga 6 ont été associées aux caroténoïdes : elles jouent un rôle au niveau de l’hydratation et de l’élasticité de la peau. Un rôle important puisqu’au soleil, on s’expose à la sécheresse, l’un des facteurs du vieillissement », indique Nicole Mourey.

Des bénéfices discutés

Apportent-ils un réel bénéfice à la peau confrontée au soleil ? « Sous l’effet des UV, il existe un phénomène d’oxydation qui a certainement une fonction dans la genèse du cancer cutané et du vieillissement. L’idée d’apporter des antioxydants par voie générale est donc assez bonne. Cependant, les études réalisées n’ont pas de réelle démonstration médicale. Même s’il est logique de le penser, on n’a pas de preuve que les antioxydants freinent le vieillissement », rapporte Michel Jeanmougin, dermatologue au service de photo-dermatologie de l’hôpital Saint-Louis, à Paris. Pris deux à quatre semaines avant exposition, les caroténoïdes peuvent en revanche augmenter la dose érythémale minimale (DEM, dose « coup de soleil »). Mais d’environ 10 % seulement… « En pratique, s’ils permettent

l’effet « colorant naturel », les caroténoïdes donnent en effet à la peau une teinte discrètement colorée. Au final, si on manque de preuves concernant leur action antivieillissement, ils n’ont pas d’effet protecteur contre les coups de soleil. Mais ils peuvent limiter le risque de lucite estivale bénigne. Autre intérêt, selon Michel Jeanmougin, « on peut penser que les personnes qui prennent de tels produits sont plus sensibilisées aux méfaits du soleil, en se préparant mieux, en s’exposant moins et, progressivement, en se protégeant plus, en hydratant leur peau après exposition ». Clémence Clerc, pharmacienne

Des caroténoïdes risqués ? Des études* ont montré une augmentation de la survenue de cancer du poumon chez les gros fumeurs utilisant du bêta-carotène comme complément alimentaire (20 ou 30 mg/jour**). Plus récemment, une méta-analyse lancée par l’Agence européenne de sécurité alimentaire (EFSA) a montré que le bêta-carotène n’augmente pas l’incidence de ce cancer chez les gros fumeurs à des doses inférieures à 15 mg/jour. Et il n’a pas non plus d’effets protecteurs. Chez les personnes qui ont une alimentation équilibrée et riche en antioxydants (par exemple, les femmes françaises de l’étude Suvimax***), l’apport supplémentaire sous forme de compléments pourrait accroître le risque de cancer de la peau. De fait, se pose la question des effets délétères de l’ingestion de trop fortes quantités de caroténoïdes. « Consommés en surplus, les antioxydants ont un effet néfaste. Pour la femme, leur prise au long cours n’est donc pas recommandée. En revanche, on peut prendre des caroténoïdes pendant une période courte », commente le Dr Jeanmougin, dermatologue à l’hôpital Saint-Louis de Paris. (*) Mayne, 1996 ; Ziegler et al., 1996 ; ATBC Study group, 1994 ; Omenn et al., 1996 ; Omenn, 1998 ; Druesne-Pecollo et al., 2010. (**) La limite maximale autorisée dans les compléments alimentaires est fixée en France à 4,8 mg (arrêté du 9 mai 2006). (***) Suvimax (supplémentation en vitamines et minéraux antioxydants) a été lancée en 1994.

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mars 2014 • Pharma N°110 • 51

F e u i l l e t e z l e s r e v u e s s u r W W W . P H A R M A SITE . F R

Pharma 110

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nouveaux produits

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L’info des génériques

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˕˕Cristers Rabeprazole 10 mg Boîte de 14 comprimés Princeps : Pariet ˕˕Mylan Acarbose 50 mg Boîte de 90 comprimés Princeps : Glucor Acarbose 100 mg Boîte de 90 comprimés sécables Princeps : Glucor

Flutiform

• Fluticasone et formotérol • Association fixe d’un corticoïde inhalé et d’un bronchodilatateur bêta-2 agoniste à longue durée d’action • Traitement de l’asthme • Aérosol-doseur avec compteur de doses, flacons de 120 doses • Deux dosages : 50/5 µg et 125 /5 µg par dose • Liste I • Remboursable à 65 % • Laboratoire Mundipharma

˕˕Pierre Fabre Médicament Tanganil Gé, acétylleucine 500 mg Boîte de 30 comprimés Princeps : Tanganil Pro

Nouvelle association fixe dans l’asthme Cette spécialité associant le propionate de fluticasone

toujours être recherchée. Si les dosages disponibles

et le fumarate de formotérol est indiquée chez l’adulte

ne suffisent pas à contrôler la pathologie, il faudra

et l’enfant à partir de 12 ans dans le traitement

recourir aux molécules administrées séparément.

continu de l’asthme, dans les cas où l’administration

L’administration se fait debout ou assis, et nécessite

par voie inhalée d’une association corticoïde inhalé

une bonne coordination main-poumon. Si tel n’est pas

et bronchodilatateur bêta-2 agoniste de longue

le cas, recourir à une chambre d’inhalation adaptée.

durée d’action est justifiée. Il s’agit donc des patients

Le dispositif doit être amorcé avant la première

chez qui la prise d’une corticothérapie inhalée associée

utilisation ou s’il n’a pas été employé depuis trois jours

à un bêta-agoniste de courte durée d’action à la

ou plus. Le mode d’emploi doit être expliqué au

demande ne suffit pas à contrôler la pathologie, ainsi

patient pour une bonne observance : agiter le flacon,

que les personnes qui prennent déjà un corticoïde

retirer le capuchon, expirer et placer l’embout dans la

inhalé et un bêta-agoniste de longue durée d’action

bouche, commencer à inspirer et déclencher la dose,

séparément, et chez qui ce traitement est efficace.

finir d’inspirer puis bloquer la respiration 10 secondes

La posologie est de 2 bouffées matin et soir, en

environ, retirer l’inhalateur puis expirer. Ceci doit être

débutant avec 50/5 µg par dose. Si l’asthme reste

répété après environ 30 secondes. Rappeler au patient

insuffisamment contrôlé, la dose peut être augmentée

de se rincer la bouche après inhalation pour éviter

à 125 /50 µg. La posologie minimale efficace doit

les risques de candidose ou de raucité de la voix.

˕˕Création de 9 nouveaux groupes génériques Dompéridone 20 mg, comprimé orodispersible Esoméprazole 40 mg, poudre pour solution injectable ou pour perfusion Acetate de flecaïnide 50 mg, 100 mg, 150 mg, 200 mg, gélule à libération prolongée Lévonorgestrel 0,1 mg + éthinylestradiol 0,02 mg, comprimé enrobé Mupirocine 2 %, pommade Chlorure de trospium 20 mg, comprimé enrobé

en bref…

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Kelo-cote UV, protection spécifique pour les cicatrices exposées quotidiennement au soleil • Solution naturelle pour les poussées dentaires avec Babygencalm de Gifrer, gel de massage gingival à base d’extraits de camomille • Nouvelles fonctionnalités pour le tensiomètre brassard Omron M3 et brassard M/L pour tour de bras de 22 à 42 cm • Les gourdes Babybio se déclinent aussi en salé avec un velouté de petit pois-carottes-canard et une purée de légumes doux • L’huile protectrice Phytoplage « l’originale » s’habille d’osier pour l’été.

52 • Pharma N°110 • mars 2014


Petit Drill

Salvacast

Densilogy Men

Contre la toux des tout-petits

Chevillée au froid

Formule au poil

La nouvelle orthèse stabilisatrice de cheville Salvacast avec cryothérapie localisée permet d’optimiser le traitement par le froid. Elle peut en effet désormais être placée au congélateur, pour une réfrigération plus rapide, favorisant l’action antalgique et anti-oedémateuse. Par ailleurs, des sangles renforcées et une talonnette avec traitement antimicrobien à action anti-odeur ont été ajoutées.

Innéov s’intéresse à la santé des cheveux masculins. La formule associe vitamine D3 (pour son action sur la division cellulaire) et acides gras oméga 3 et zinc (contribuant au bon ancrage des cheveux) à la taurine, actif dérivé d’acide aminé soufré spécifique à cette formule. La promesse : des cheveux plus épais, plus toniques et une meilleure couvrance capillaire. À conseiller par cures de deux mois, à raison de 1 capsule et 1 comprimé par jour lors d’un repas.

Le conseil de la toux sèche chez le nourrisson est réduit le plus souvent à la désobstruction du nez, au maintien d’une bonne hydratation et à l’aération des pièces. Cette spécialité Drill apporte une nouvelle solution à partir de 3 mois grâce au glycérol et à son action mécanique sur les muqueuses. 3 à 4 prises par 24 heures, de 1 ou 2 doses de 5 mL selon l’âge (de 3 mois à 6 ans). La pipette facilite l’administration.

Flacon de 125 ml Prix : 7,10 € Dispositif médical Pierre Fabre Santé

Déodorant antitranspirant 48h Et le rasoir prend des vacances… Sans alcool, sans paraben et hypoallergénique, ce déodorant promet, en plus d’une efficacité longue durée, de ralentir la repousse des poils et d’affiner le grain de la peau. L’action kératolytique repose sur le LHA ER195, qui exfolie et permet de retarder la repousse. La perlite au haut pouvoir absorbant confère son effet buvard pour un toucher sec et les sels d’aluminium leur efficacité antitranspirante. À conseiller aux peaux sensibles ou épilées. Rappelez que l’application de sels d’aluminium ne doit pas se faire sur peau lésée (soit immédiatement après rasage, par exemple).

Ppc : 9,90 € Vichy

Tailles small et standard Coloris blanc ou noir Prix LPPR : 27,44 € Cooper

Boîte de 28 capsules et 28 comprimés Ppc : 27 € Inneov

Novanuit

Ibufetum 5 % gel

Dans les troubles du sommeil légers

Dans le sac du sportif

Ce complément alimentaire table sur trois actions et plusieurs actifs pour restaurer un sommeil de qualité : la passiflore relaxante, la mélatonine pour favoriser l’endormissement et le pavot de Californie associé à la mélisse contre les réveils nocturnes. Conseiller durant quinze jours 2 gélules par jour, 30 minutes à 1 heure avant le coucher. À renouveler si nécessaire. À associer aux conseils hygiéno-diététiques habituels : activité physique, horaires réguliers de couchage, alimentation équilibrée, éviction des excitants…

Boîtes de 30 gélules Ppc : N. C. Sanofi

Indiquée dans le traitement symptomatique de la traumatologie bénigne (entorses, contusions) et des tendinites superficielles, cette spécialité est un gel anti-inflammatoire, dosé à 5 % d’ibuprofène. La posologie est de 1 application, en massage doux et prolongé sur la région douloureuse, 3 fois par jour chez l’adulte de plus de 15 ans. Rappeler de bien se laver les mains ensuite. Impliqué de longue date dans la médecine du sport, le laboratoire lancera aussi ce printemps le site www.lamedecinedusport.com.

Tube aluminium de 60 g, 2,77 € Remboursement SS à 30 % Menarini

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Titulaire à Villeneuve-d’Ascq (Nord), David-James Kennedy vient de sortir Ressacs, un polar plébiscité par Franck Thilliez, l’un des maîtres du thriller français.

J’

ai toujours été attiré par l’univers des films noirs, des romans policiers. J’aime être pris dans une intrigue, avec ses rebondissements, ses retournements de situation, la tension qui monte. Le scénario de Ressacs m’est venu lors de mon service militaire, en 1997. Affecté à l’hôpital militaire Scrive, au cœur de Lille, j’ai été subjugué par l’architecture du bâtiment, son escalier en spirale, ses longs couloirs aux murs défraîchis, ses larges fenêtres, son dôme… Alors interne en pharmacie, il m’arrivait d’y errer la nuit, seul avec mon imagination débordante. C’est au cours de ces pérégrinations nocturnes qu’a germé le roman. J’ai simplement transféré l’intrigue sur la côte basque, dans un bâtiment militaire similaire mais au bord de l’océan. Il m’a fallu dix ans pour l’écrire. Installé dans le Nord depuis 2006, il m’a parfois été difficile de concilier mon activité avec l’écriture. Je m’y attelle le matin avant de venir à l’officine, pendant la pause déjeuner, le soir, le week-end, en vacances… C’est bien simple, dès que j’ai un moment de libre, je suis devant mon ordinateur. J’ai la chance d’avoir une famille très compréhensive qui m’a toujours soutenu dans ma deuxième activité. De formation scientifique, je suis toutefois parti de zéro. L’histoire était là mais je n’avais pas les mots pour la décrire. Imaginez ma frustration ! J’ai dû apprendre à écrire, trouver les mots, élaguer des pans entiers du récit, supprimer les passages trop détaillés. Les dix premières pages ont été les plus difficiles, j’étais obnubilé par le rythme, la cohérence des intrigues. Mon autre obsession portait sur le moyen d’accrocher le lecteur par des coups de théâtre, des rebondissements. Dans un polar, il n’y a pas de place pour les temps morts, l’effet de surprise doit être permanent. Concernant l’intrigue, j’ai beaucoup puisé dans mon expérience officinale. C’est d’ailleurs un interne, Tom Castille, qui mène l’enquête officieuse suite à la disparition de l’un de ses collègues. J’utilise également un médicament, la digitaline, dans l’un des meurtres. Et puis il y a ce médecin aux pratiques obscures qui expérimente une molécule de sa création sur ses patients. Le roman oscille ainsi entre présent et passé, surnaturel et réel. Terminé fin 2012, le manuscrit a été envoyé à Fleuve Éditions, l’une des références françaises en termes de polar. Je connais Franck Thilliez depuis une dizaine

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©© D.R.

le jour où…

« … j’ai publié mon premier polar »

d’années. Il est lui aussi publié par Fleuve Éditions. Peut être a-t-il joué de son influence ? Toujours est-il que, début 2013, je reçois un coup de fil. Mon roman est accepté. Depuis, je vis un rêve éveillé… Après quelques passages à Paris pour y discuter du titre, des corrections et du choix des photos de couverture, Ressacs est sorti en librairie le 9 janvier dernier. À la pharmacie, très peu de gens étaient au courant, je ne voulais pas me mettre de pression. Le roman a reçu un bon accueil et j’ai eu la chance d’avoir plusieurs articles positifs dans la presse, de faire des radios, des télés. Le bouche à oreille a fait le reste. Depuis, des patients viennent me voir au comptoir, le roman sous le bras, pour que je leur dédicace. Je travaille actuellement sur un deuxième livre. J’espère obtenir le même succès et pourquoi pas la même carrière que Franck Thilliez ! »



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