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Dr Guillaume Leroux Les Jardins* IVT
Endophtalmie après injection intravitréenne 4 Intravitreal injections at the Massachusetts Eye and Ear Infirmary: analysis of treatment indications and postinjection endophthalmitis rates. Englander M, Chen TC, Paschalis EI et al. Br J Ophthalmol 2013 ; 97 : 460-5.
être réalisées avec beaucoup moins de précautions (2). L’endophtalmie post-IVT d’anti-VEGF est un événement rarissime, les études publiées retrouvent un taux d’endophtalmie compris entre 0,02 % et 0,03 % (3-4). Ici, il s’agit d’une étude rétrospective, monocentrique (Boston, États-Unis) qui a analysé l’ensemble des IVT réalisées dans l’établissement sur une période de 5 ans (de 2007 à 2011), toutes indications confondues (anti-VEGF, corticoïdes retards). Ces IVT ont été réalisées par 9 rétinologues aux habitudes variées.
Utilisation variable d’un champ stérile, d’un blépharostat et d’une antibiothérapie post-IVT
Figure 1 - Endophtalmie aiguë survenue 8 jours après une IVT de ranibizumab.
La survenue d’une endophtalmie après IVT, bien qu’extrêmement rare, est la complication qui inquiète le plus l’ophtalmologiste et le patient. La pratique des IVT s’est considérablement développée ces dernières années. La Haute autorité de santé a émis en 2011 des recommandations concernant les bonnes pratiques pour la réalisation des IVT en France : salle dédiée, blépharostat, champ stérile et antibiothérapie locale postopératoire sont recommandés pour faire cette injection (1). Pourtant, à l’étranger, notamment aux États-Unis, les IVT peuvent *Hôpital Hôtel-Dieu, groupe hospitalier Cochin-Hôtel-Dieu, Paris
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Le protocole d’anesthésie et d’aseptie était à la discrétion de chaque praticien : 7 sur 9 utilisaient un blépharostat, 3 sur 9 un champ stérile. En revanche, tous utilisaient de la povidone iodée 5 % sur la surface oculaire. L’injection à l’aiguille 30 gauges était réalisée en inférotemporal. Seuls 5 médecins sur 9 prescrivaient 3 jours d’antibiothérapie locale post-IVT. Durant ces 5 ans, 10 208 injections ont été réalisées sur 1 833 yeux. La moyenne d’injections par œil était de 5,57 IVT. 76 % des injections étaient du ranibizumab, 22,8 % du bevacizumab, 0,5 % du pegaptanib et 0,7 % de la triamcinolone.
Taux très faible d’endophtalmies : 0,029 % (3 cas pour 10 208) Le nombre d’endophtalmies était de 3 pour 10 208 injections avec un taux de 0,029 % (moins de 1 cas pour 3 000). Il s’agissait de patients traités par ranibizumab. Les trois patients avaient reçu un antibiotique local post-IVT et avaient été injectés avec l’aide d’un blépharostat stérile. L’analyse bactériologique était négative pour un cas, positive dans les deux autres cas avec un Staphylococcus coagulase neg et un Staphyloccocus epidermidis. Après traitement adéquat (antibiotiques généraux et en IVT,
Pratiques en Ophtalmologie • Mai 2013 • vol. 7 • numéro 64
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corticoïdes, vitrectomie), il n’y avait pas de différence entre les acuités visuelles avant et après endophtalmie. Le taux d’endophtalmies retrouvé dans cette étude est comparable à celui retrouvé dans d’autres études (3-4). Les auteurs concluent que l’absence d’utilisation systématique de champ stérile, de blépharostat et d’antibiothérapie post-IVT ne semble pas avoir influencé ici la survenue d’une endophtalmie. Cette étude confirme que le risque d’endophtalmie après IVT est très faible. Ceci même en cas de pratiques moins rigoureuses (blépharostat, champ stérile, antibiothérapie locale non systématiques) que ce qui est pratiqué en France. n
Bibliographie 1. http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/201209/09r09_argu_dmla.pdf, page 248 2. http://www.youtube.com/watch?v=2m5W0uAWK0o 3. Moshfeghi AA, Rosenfeld PJ, Flynn HW Jr et al. Endophthalmitis after intravitreal vascular [corrected] endothelial growth factor antagonists: a six-year experience at a university referral center. Retina 2011 ; 31 : 662-8. 4. Pilli S, Kotsolis A, Spaide RF et al. Endophthalmitis associated with intravitreal anti-vascular endothelial growth factor therapy injections in an office setting. Am J Ophthalmol 2008 ; 145 : 879-82.
Staphylococcus epidermidis ont été cultivées dans des milieux composés d’humeur aqueuse avec des concentrations croissantes de cortex cristallinien d’origine humaine. Le développement des colonies bactériennes était évalué après 72 h d’incubation à 37°C. En parallèle, 80 lapins étaient opérés de la cataracte par phacoémulsification. Pour 40 d’entre eux il était volontairement laissé du cortex. En fin d’intervention était inoculé en chambre antérieure du Staphylococcus aureus à différentes concentrations. Les lapins du groupe contrôle recevaient quant à eux une injection intracamérulaire de solution saline aseptique. Apres 72 h, la survenue d’une endophtalmie était évaluée cliniquement sur la réaction inflammatoire de chambre antérieure. In vitro, il existait une croissance bactérienne significative (p < 0,01) en présence de cortex cristallinien. De plus, cette croissance était proportionnelle aux concentrations de protéines cristalliniennes. In vivo, sur les lapins, pour les deux premières concentrations bactériennes inoculées, il existait un développement significatif (p < 0,05) d’endophtalmie dans les yeux dans lesquels il restait du cortex cristallinien. La concentration d’inoculum la plus élevée en bactéries a, en revanche, déclenché une endophtalmie sur tous les yeux injectés, avec ou sans cortex résiduel.
Chirurgie
Cortex résiduel en fin de chirurgie de la cataracte et risque d’endophtalmie 4 Residual lens cortex material: potential risk factor for endophthalmitis after phacoemulsification cataract surgery. Lou B, Lin X, Luo L et al. J Cataract Refract Surg 2013 ; 39 : 2507. Après chirurgie de la cataracte, la survenue d’une endophtalmie est un événement indésirable extrêmement rare et grave qui peut conduire à la perte de l’œil opéré. Le terrain du patient et les complications peropératoires (rupture capsulaire, issue de vitré) sont des facteurs de risque reconnus (1-2). Les auteurs ont voulu évaluer si les protéines résiduelles du cortex pouvaient favoriser la croissance bactérienne intraoculaire. Il s’agit d’une étude réalisée par une équipe chinoise (ville de Canton). L’étude présente une analyse in vitro de cultures bactériennes, et une phase in vivo chez des lapins à qui l’on inocule des doses croissantes de Staphylococcus aureus après ablation complète ou non du cristallin.
Croissance bactérienne proportionnelle aux concentrations résiduelles de cortex Des souches bactériennes de Staphylococcus aureus et de Pratiques en Ophtalmologie • Mai 2013 • vol. 7 • numéro 64
Importance de retirer tout le cortex en fin d’intervention La première partie de cette étude est intéressante car elle montre que les protéines du cortex cristallinien sont un substrat complémentaire favorable à la croissance de bactéries. La seconde expérience est méthodologiquement plus discutable (le cortex résiduel, en grande quantité, peut déclencher une réaction inflammatoire importante) même si elle tend à appuyer cette hypothèse. Cette étude suggère que la présence de cortex résiduel intraoculaire après chirurgie de la cataracte est un élément favorisant la croissance bactérienne, pouvant donc probablement favoriser la survenue d’une endophtalmie. D’après les auteurs, l’ablation la plus complète possible du cortex cristallinien semble être un élément supplémentaire pour diminuer le risque d’endophtalmie. n
Bibliographie 1. Kodjikian L, Salvanet-Bouccara A, Grillon S et al. Postcataract acute endophthalmitis in France: national prospective survey. J Cataract Refract Surg 2009 ; 35 : 89-97. 2. Taban M, Behrens A, Newcomb RL et al. Acute endophthalmitis following cataract surgery; a systematic review of the literature. Arch Ophthalmol 2005 ; 123 : 613-20.
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