Journées nationales de rhumatologie 2013
Polyarthrite rhumatoïde L’observance en questions D’après un symposium organisé par le laboratoire Roche-Chugai
Lors de ce symposium, trois intervenants ont abordé le problème du suivi du traitement chez les patients souffrant de PR.
COMMENT IDENTIFIER UN PATIENT NON OBSERVANT ? (Dr Catherine Beauvais, Paris)
L’adhésion au traitement se compose d’observance (prises des médicaments) et de persistance (prise des médicaments dans la durée). La concordance est la recherche du meilleur traitement entre le médecin et son patient. La non-observance favorise l’échec du traitement et coûte cher. Il faut vérifier auprès des soignants si les injections SC ou IV sont pratiquées, dépister les causes de retard ou de non-présentation du malade. Un contrôle par dosage sanguin n’est pas utilisable pour la PR, contrairement au lupus. Le comptage des comprimés et des blisters, des ordonnances, de la carte Vitale et l’emploi des piluliers ne sont pas infaillibles. Les questionnaires de contrôle de la compliance dans la PR semblent assez efficaces (dépistage de 40 % des non-observants). Les mesures subjectives sont peu fiables : surestimation par le patient de son observance, mémorisation insuffisante des doses absorbées, désir de plaire au médecin. Le médecin luimême détecte la bonne observance et non la mauvaise. Le dialogue permet d’interroger le malade en évitant les questions fermées, à Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90
TOUS NOS PATIENTS SONT-ILS OBSERVANTS ? (Pr René-Marc Flipo, Lille)
L’estimation de l’adhérence au traitement est nettement surestimée. Le coût estimé de la non-observance serait pour l’industrie de 30 milliards de dollars et le coût OMS global de 250 milliards. Pour l’OMS, on estime que le plus grand progrès thérapeutique, toutes disciplines confondues, serait de vaincre l’inobservance. Pour la PR, les chiffres varient (de 30 à 100 %), dépendant des outils d’évaluation. Trois questionnaires sont utilisés : Moriski et Green, CQR, Mars RA. La première étude réalisée par Guillemin et coll. date de 10 ans et ne comportait que deux questions. Sur 3 ans, l’observance était de 57 % la 1re année, puis elle diminuait de 25 % la 2e année et de 20 % la 3e année. Plus de 200 facteurs influençant les résultats ont été identifiés. AINS, DMARDs et biothérapies ont un taux d’observance moyen de 60 %. Si l’on considère à 1 l’observance pour la perfusion d’IFX, pour l’ETN ou le MTX elle est de 0,65 %. Sur 10 ans, le MTX a été suspendu par un malade sur 10. Les biothérapies ne sont pas exemptes de cas de non-observance. Les résultats partiels de notre étude locale, initiée pour les PR et la SPA depuis début 2013, donnent pour les traitements oraux 33 % de malades observants, et pour les SC, un taux de
43 %. Si les patients sont en rémission ou en LDA, le taux des observants, très logiquement, chute.
COMMENT PRENDRE EN CHARGE CES PATIENTS ? (Pr Thierry Schaeverbeke, Bordeaux)
La non-observance coûte cher : pour les statines, premier poste de remboursement de l’Assurance maladie, 50 % des produits prescrits sont abandonnés avant 6 mois (taux d’observance : 20 %). Il faut dépister les candidats potentiels, les évaluer et proposer des stratégies. Des facteurs liés à l’entourage (dénigrement du traitement), à la maladie (ostéoporotiques), au médecin (rythme des visites, temps passé à la consultation) peuvent être identifiés. Il existe des cas d’oubli non intentionnel, et des refus volontaires de la prise médicamenteuse. La non-observance, la dépression, la complexité de la prescription sont fortement corrélées. Certaines formulations pharmaceutiques n’aident pas (MTX à 2,5 mg). Des outils existent : les piluliers électroniques sont chers mais efficaces ; les agendas électroniques et smartphones peuvent aider. Certains systèmes permettent de dépister la prise effective de médicaments et d’autoriser ainsi leur remboursement. La manière de poser les questions est importante. Le discours et l’attitude du médecin paraissent difficiles à changer. L’éducation thérapeutique donne des résultats décevants. Le schéma traditionnel de l’ordonnance doit être abandonné au profit d’une véritable alliance médecin-malade, basée sur des échanges constructifs. n Dr Michel Bodin
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spécial JNR 2013
Introduction
réponse oui/non. Les questions ouvertes apprécient le vécu émotionnel du traitement par le patient. Il faut « entendre le non-dit », commencer les questions par « comment ? » plutôt que « pourquoi ? », enfin, ne pas trop parler et laisser le patient s’exprimer.