écho RETOUR des EXCLUSIFcongrès du Congrès de la sims
DOSSIER
Le doigt qui saute
ou qui se bloque Place de l’échographie
n Les ressauts et les blocages des doigts sont des situations cliniques extrêmement fréquentes, qui touchent toutes les catégories d’âge y compris les enfants. Dans la grande majorité des cas il s’agit d’une variété de ténosynovite sténosante liée à une inadéquation entre le calibre la gaine digitale fibreuse d’un doigt et les tendons fléchisseurs qu’elle entoure. Mais parfois ces ressauts ont des causes beaucoup moins connues ….
Dr Franck Lapègue*
D’après la présentation de Dr Franck Lapègue, Dr Marie Faruch (Toulouse), Dr Marie-Aurélie Bayol (Toulouse), Dr Antoine Ponsot (Toulouse),
Dr Hélène Chiavassa (Toulouse),Pr Jean-Jacques Railhac (Toulouse) et de Pr Nicolas Sans (Toulouse)
REssauts et blocages liés au système fléchisseur des doigts
L’incidence annuelle du doigt à ressaut est de 28/100000, et 2,6 % de la population générale sera touchée pendant sa vie (1). On note 2 pics de fréquence (1) : le plus important durant la 5e et 6e décade ; le second avant l’âge de 8 ans. Le pouce est le plus touché, suivi du majeur. Pour la plupart des auteurs le primum movens est l’épaississement de la poulie A1 secondaire à des microtraumatismes répétés (2). La symptomatologie du patient varie de la simple gêne (plutôt matinale), au ressaut perçu mais facilement réductible, jusqu’au ressaut avec blocage complet qui nécessite l’utilisation de l’autre main pour débloquer douloureusement le doigt pathologique. Le diagnostic clinique étant sou*Service de radiologie, Hôpital Purpan, CHU de Toulouse Centre de radiologie de Narbonne
Rhumatos • Octobre 2013 • vol. 10 • numéro 91
Figure 1 – Signes échographiques classiques d’un doigt long à ressaut. a : Coupe axiale transverse montrant un épaississement hypoéchogène circonférentiel de la poulie A1 (flèche). b : Epaississement nodulaire (double flèche) de la poulie A1. c : Hyperhémie périphérique de la poulie en mode Doppler. d : Coupe sagittale montrant l’épaississement hypoéchogène de la poulie A1, la ténosynovite avec épaississement hypoéchogène de la gaine des fléchisseurs (**), l’hypertrophie des tendons en aval de la poulie A1. e : Vue clinique correspondante.
vent évident, les spécialistes qui traitent cette pathologie se sont longtemps passés d’imagerie complémentaire. En 2013 l’échographie pratiquée
avec du matériel adapté permet d’identifier clairement les éléments anatomiques impliqués pour mieux adapter le traitement. Guerini et coll. (2) ont retrouvé 237
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dans leur série de 33 patients adressés pour doigts à ressaut les signes suivants (Fig. 1) : • un épaississement hypoéchogène de la poulie A1 (dans 100 % des cas) compris entre 1,1 et 2,9 mm avec une moyenne de 1,8 mm ; • une hypervascularisation de la poulie (91 % des cas) ; • une ténosynovite des fléchisseurs (dans 55 % des cas) ; • une tendinose (48 % des cas) avec épaississement et un aspect hétérogène des tendons fléchisseurs en aval de la poulie A1 pour les doigts longs, et un épaississement du long fléchisseur en amont ce cette poulie pour le pouce ; • une fissure intratendineuse (6 % des cas). Dans notre expérience nous avons également observé d’autres signes : • le dark tendon sign (3) (effet d’anisotropie lié à la déviation des fibres des tendons fléchisseurs par l’hypertrophie de la poulie A1) ; • pour les doigts longs, la tendinose hypertrophique porte principalement sur les languettes latérales du fléchisseur superficiel (4) ; • dans de rares cas, cette hypertrophie tendineuse est au premier plan sans épaississement de la poulie A1 ; • il est parfois possible de montrer directement de façon dynamique le ressaut en échographie ; • on peut assez souvent visualiser la phase qui se déroule juste avant le ressaut, avec un “asynchronisme”lors de la flexion du fléchisseur profond et des languettes du fléchisseur superficiel. En 2013 l’échographie ne se cantonne plus simplement au diagnostic lésionnel mais peut jouer un rôle à part entière dans le traitement. L’infiltration de corticostéroïdes est utilisée depuis 1953 (5) avec, selon les séries, des bons résultats 238
dans 38 à 93 % des cas (6) (7). Ce type d’infiltration peut tout à fait être pratiqué sous échographie, avec une balistique très précise : aiguille positionnée en regard de la partie distale de la poulie A1 pour une infiltration dans la gaine des fléchisseurs et en périphérie de la poulie (Fig. 2). Une “libération” percutanée de la poulie A1 sous contrôle échographique au moyen d’une aiguille est possible avec de très bons résultats immédiatement après le geste (8) (9) (10).
Figure 2 – Infiltration d’un doigt à ressaut sous échographie.
AutrEs ressauts et blocages
Les ressauts et blocages liés aux autres structures anatomiques des doigts sont plus rares, mais présentent souvent une sémiologie clinique et échographique typique.
a : L’aiguille de calibre 25 g est placée sous contrôle échographique au contact de la partie distale de la poulie A1 hypertrophique (flèches). L’objectif est d’injecter le produit anesthésiant puis le corticoïde retard (demi-ampoule d’Altim®), en périphérie de la poulie (**) et dans la gaine du tendon (flèches en pointillés). b : Simulation montrant la position de
Nous ne ferons ici que les citer : • le ressaut postérieur des fléchisseurs en arrière des articulations métacarpo-phalangiennes (MCP), secondaire à une lésion post-traumatique des bandelettes sagittales, appelé dans la littérature anglosaxonne le boxer’s Knuckle (11, 12) ; • le blocage d’un doigt long en flexion (13) par incarcération du ligament collatéral radial (faisceau palmaire) derrière une proéminence constitutionnelle ou un ostéophyte de la tête du métacarpien ; • le blocage d’un doigt long en abduction par rupture d’un ligament collatéral radial de l’articulation métacarpo-phalangienne (MCP) d’un doigt long avec effet Stener like responsable d’un blocage irréductible en abduction (14, 15) ; • la maladie de Dupuytren limitée au 5e rayon (16, 17), se caractérisant par une bride fibreuse cubitale du 5e rayon et s’accompagnant d’une déformation avec flexion de l’interphalangienne proximale (IPP).
l’aiguille et de la sonde au moment de l’infiltration. Il va de soi que ce geste doit normalement être réalisé dans des conditions stériles : désinfection, gants, protège-sonde stérile, gel stérile…
• la camptodactylie, déformation congénitale fréquente ( jusqu’à 1 % de la population) touchant préférentiellement le 5e rayon. L’IPP présente une flexion spontanée pouvant atteindre 90°, l’extension de cette articulation n’étant possible que si la MCP est fléchie. n
Mots-clés : Ressaut, Blocage, Ténosynovite, Poulie A1, Infiltration, Maladie de Dupuytren, Camptodactylie
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