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DOSSIER
4 Migration intra-osseuse de
calcifications tendineuses Du tendon à la moelle osseuse
n Les dépôts de cristaux d’hydroxyapatite de calcium constituent un désordre fréquent, parfois responsable de douleurs aiguës lors de la dissolution de calcifications migrant dans les tissus mous adjacents. Des pénétrations calciques intra-osseuses ont été décrites. Nous en illustrons l’aspect grâce à une série de 35 cas rassemblés par des membres de la SIMS.
Pr Jacques Malghem*,
D’après la présentation de Pr Jacques Malghem, Pr Frédéric Lecouvet*, Dr Ahmed Larbi*, Dr Patrick Omoumi*, Pr Baudouin Maldague*, et de Pr Bruno Vande Berg* et avec la participation de Dr Stefano Bianchi (Genève), Pr Anne Cotten (Lille), Dr Olivier Fantino (Lyon),
Pr Olivier Hauger (Bordeaux), Pr Jean-Denis Laredo (Paris), Dr Gérard Morvan (Paris) et de Dr Valérie Vuillemin (Paris)
Figure 1 – Migration intramédullaire d’une calcification d’apatite de la coiffe des rotateurs.
L
es cas initialement décrits correspondaient à des érosions corticales dans des diaphyses humérales ou fémorales, à l’insertion du grand pectoral ou du grand glutéal. Notre série comprend aussi des érosions calciques dans un rachis cervical et un calcanéus. Un deuxième type correspond à la présence de matériel calcique dans des lacunes intraspongieuses d’allure géodique. Le site le plus fréquent est le tubercule majeur de l’humérus, associé à une tendinopathie calcifiante du supra-épineux. *Service de radiologie des cliniques universitaires Saint-Luc, Bruxelles
Rhumatos • Octobre 2013 • vol. 10 • numéro 91
Notre série comporte aussi un os carpien, un grand trochanter, une région intertrochantérienne, une patella, deux condyles fémoraux et une vertèbre cervicale. Nous avons observé, en outre, quatre cas jamais décrits précédemment de diffusion intramédullaire étendue de matériel calcique (Fig. 1). L’origine en était le tubercule majeur de l’humérus (deux fois), une érosion corticale diaphysaire de l’humérus et le versant médial d’un condyle fémoral. Observées au cours ou au décours d’un épisode hyperalgique, les calcifications intra-osseuses peuvent
disparaître en quelques semaines. En cas de biopsie, le contenu montre un mélange polymorphe de calcifications, de cellules histiocytaires et de cellules géantes, avec parfois un aspect kystique. Ces lésions méritent d’être connues car elles posent le diagnostic différentiel parfois difficile avec des lésions infectieuses ou néoplasiques malignes. n
Mots-clés : Calcification tendineuse, Apatite
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DOSSIER
5 Pathologies du tendon distal
du biceps brachial Une anatomie complexe
n Bien moins fréquentes que les lésions des insertions proximales, les pathologies du tendon distal du biceps peuvent avoir d’importantes conséquences fonctionnelles. L’imagerie peut aider au diagnostic.
Dr Patrick Omoumi*
D’après la présentation de Dr Patrick Omoumi, Dr Guillermo Azulay*, Dr Ahmed Larbi*, Dr Loïc Bouilleau*, Pr Frédéric Lecouvet*, Pr Bruno Vande Berg*
Introduction
Les pathologies du tendon distal du biceps sont environ 30 fois plus rares que les lésions des insertions proximales, avec une incidence des ruptures distales évaluée à 1,2 rupture par an pour 100 000 patients. Cependant les conséquences fonctionnelles de ces lésions peuvent être importantes (perte de la flexion du coude, mais surtout de la supination). En théorie, dans un contexte traumatique aigu, un examen clinique adapté dans les mains d’un spécialiste permet de différencier les lésions à opérer (principalement les ruptures tendineuses complètes) des lésions pour lesquelles un traitement conservateur est souvent suffisant (ruptures tendineuses partielles). En pratique, surtout en cas de rupture partielle ou à distance du traumatisme, l’examen clinique de ces patients n’est pas toujours aisé et l’imagerie peut être utile. Mais tout comme l’examen clinique, l’imagerie de ce tendon est rendue difficile par son anatomie et sa topographie.
Anatomie
Les deux chefs du muscle biceps *Service de radiologie des Cliniques universitaires Saint-Luc, Bruxelles
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brachial servent à la flexion du coude, mais également à la supination de l’avant-bras. En effet, l’insertion du tendon sur la tubérosité radiale se faisant sur le versant médial de l’os, la contraction du biceps permet une rotation du radius et de fait une supination de l’avant-bras. L’insertion distale du biceps est double : latéralement et en profondeur sur la tubérosité radiale par le tendon bicipital ; médialement et en superficie par l’aponévrose bicipitale, qui est une bandelette fibreuse aussi appelée lacertus fibrosus qui naît du tendon en regard du pli du coude. Lorsqu’il est intact, il n’y a généralement pas de rétraction tendineuse, même en cas de rupture complète de l’insertion radiale. Le trajet du tendon bicipital distal vers son insertion sur la tubérosité radiale est complexe, oblique dans les deux plans antéro-postérieur et médio-latéral. De plus, les fibres tendineuses formant une bande effectuent une torsion de 90° sur elles-mêmes, la face antérieure devenant latérale en distalité. Ce trajet explique les difficultés de visualisation de ce tendon aussi bien en IRM qu’en échographie. Plusieurs études anatomiques ont
montré que le tendon distal du biceps est fréquemment bifurqué (Fig. 1), avec une composante provenant du chef long qui s’insère sur la partie proximale de la tubérosité radiale et une composante provenant du chef court qui s’insère plus distalement. Sur le plan de la biomécanique, ces deux composantes auraient un rôle fonctionnel différent. Cet aspect bifurqué peut être la cause de pièges diagnostiques en imagerie, la pathologie pouvant atteindre de façon sélective l’une ou l’autre portion du tendon.
Imagerie
L’IRM et l’échographie représentent les deux techniques principales pour l’imagerie du tendon distal du biceps. L’anatomie difficile du tendon rend souvent nécessaires des positions spécifiques, outre les positions classiques dans les plans transverse et longitudinal. Il s’agit, en IRM, de la position FABS (abduction de l’épaule et supination de l’avantbras). En échographie, on retiendra l’approche postérieure pour l’étude de la portion la plus distale du tendon et de l’approche médiale, inspirée de la position FABS. Rhumatos • Octobre 2013 • vol. 10 • numéro 91
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Pathologie
DOSSIER
L’imagerie a pour but principal de différencier les lésions pouvant nécessiter une prise en charge chirurgicale rapide (désinsertions apophysaires et ruptures complètes), des lésions pour lesquelles un traitement conservateur est en général suffisant (lésions de la jonction myotendineuse, ruptures partielles, tendinose, bursite bicipito-radiale).
Ruptures complètes
Les ruptures complètes du tendon distal du biceps sont une des causes les plus fréquentes de douleur aiguë du coude, mais restent beaucoup moins fréquentes que les lésions proximales. La présentation clinique typique est un homme de plus de 40 ans, qui présente une douleur aiguë du coude, associée à un hématome de la partie inférieure du bras à la suite d’une contraction excentrique coude en flexion à 90°. A l’examen, la flexion du coude peut être préservée (grâce à l’action du muscle brachio-radial) alors que la supination est déficitaire. La rétraction tendineuse est parfois absente cliniquement, notamment lorsque le lacertus fibrosus est intact. Un diagnostic précoce des ruptures complètes est nécessaire afin que le traitement chirurgical puisse se faire dans de bonnes conditions dans des délais rapides (dans les 3-6 semaines après la rupture). La rupture peut passer inaperçue au stade aigu, surtout en l’absence de rétraction tendineuse ou parce que le tendon du muscle brachialis est pris à tort pour le tendon bicipital à la palpation. L’imagerie (IRM ou échographie) peut alors avoir un intérêt.
Ruptures partielles et tendinoses
Ces deux diagnostics sont difficilement individualisables, mais le traitement est conservateur dans les deux cas. Une étude rétrospective récente avec corrélation chirurgicale sur 45 patients Rhumatos • Octobre 2013 • vol. 10 • numéro 91
Figure 1 – Tendinose bicipitale distale sur tendon bifurqué. a et b : Coupes consécutives DPFS en position FABS montrant le tendon bicipital le long de son axe longitudinal. c et d : Coupes longitudinales correspondantes en échographie en position FABS par voie médiale. Les coupes a et c montrent la partie distale du tendon bifurqué alors que les coupes b et d montrent la portion proximale (les coupes e et f montrent les coupes correspondantes du côté normal).Le tendon du côté symptomatique est épaissi et sa structure fibrillaire est moins bien définie.
a permis d’évaluer la performance diagnostique de l’échographie pour les ruptures du tendon bicipital distal. Les auteurs montrent une sensibilité de 95 % et une spécificité de 71 % pour différencier les ruptures complètes des ruptures partielles.
Bursite bicipito-radiale
Une bursite bicipito-radiale résulte dans la plupart des cas de microtraumatismes répétés et peut accompagner une tendinose/rupture partielle du
tendon bicipital distal. Mais elle peut plus rarement être d’origine infectieuse, inflammatoire ou être liée à une chondromatose synoviale. Une compression de la branche superficielle entraînera des troubles sensitifs alors que l’atteinte de la branche profonde entraînera des troubles moteurs des extenseurs. n
Mots-clés : Tendon distal, Biceps radial, Tendinose, Bursite bicipito-radiale
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DOSSIER
6 La tendinopathie
du petit glutéal Une affection méconnue
n Les progrès de l’imagerie des tendinopathies péritrochantériennes ont conduit à identifier une tendinopathie jusque-là méconnue : celle du petit glutéal.
Dr Valérie Vuillemin*
D’après la présentation de Dr Valérie Vuillemin et de Dr Hervé Bard (Paris)
L
a tendinopathie du petit glutéal (TPG), est habituellement associée à une tendinopathie du moyen glutéal. Mais nous avons constaté que la TPG pouvait survenir isolément (communications au RSNA en 2004, au Congrès français de Rhumatologie et aux JFR en 2011).
Anatomie
Le muscle petit glutéal est le muscle le plus petit et le plus profond des muscles glutéaux. Ses fonctions sont d’être stabilisateur du bassin au cours de la marche, stabilisateur de la hanche dans l’acetabulum et rotateur interne de hanche. C’est un muscle en forme d’éventail, tendu de la face externe de l’aile iliaque au grand trochanter. Il se termine par un tendon principal qui vient s’enrouler en avant pour s’insérer sur la facette antérieure du grand trochanter. La bourse du petit glutéal, située en dedans et audessus, accompagne le tendon. Les études anatomiques ont montré qu’il existe également une adhérence solide de la face profonde du muscle et du tendon à la capsule articulaire, par le biais d’un tendon *Service de radiologie et d’imagerie médicale - Hôpital européen Georges-Pompidou et Imagerie médicale Léonard de Vinci, Paris
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accessoire. Son rôle serait d’empêcher son incarcération dans l’interligne articulaire lors de la flexion de la hanche.
PATHOLOGIE
L’atteinte du tendon petit glutéal peut être associée à une tendinopathie de la lame latérale du moyen glutéal dans un quart des douleurs péritrochantériennes et représente l’atteinte antérolatérale. Elle peut aussi être isolée et responsable à elle seule de la symptomatologie douloureuse dans environ 10 % des cas. Dans notre expérience, cette tendinopathie survient 9 fois sur 10 chez des femmes, avec un âge
moyen de 61 ans (46 à 80) inférieur à celui des tendinopathies du moyen glutéal, les rares cas masculins étant soit des tendinopathies calcifiantes, soit des ruptures aiguës chez des hommes âgés. Les facteurs de risque susceptibles d’induire une TPG sont les mouvements nécessitant le rétablissement constant de l’équilibre du bassin ou sollicitant la hanche en rotation, comme la pratique des escaliers ou du stepper. La douleur est volontiers inguinale ou antérieure de cuisse, mimant une irradiation pseudo-radiculaire L3 ou L4 ou faisant craindre une coxopathie.
Figure 1 – Tendinopathie isolée du tendon petit glutéal vue en coupe coronale, sagittale et axiale en IRM et axiale en échographie. Rhumatos • Octobre 2013 • vol. 10 • numéro 91
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DOSSIER
Enfin, il n’y a pas de test clinique spécifique du TPG, qui permettrait de le différencier du moyen glutéal, mais la palpation du tendon en regard de la facette antérieure est douloureuse, et la douleur est souvent majorée en rotation interne forcée, ce qui n’est pas le cas pour le moyen glutéal.
Imagerie
L’imagerie doit analyser le tendon, le péritendon et le muscle petit glutéal. L’examen de première intention reste l’échographie, l’IRM devant être réservée aux formes résistantes au traitement. La tendinopathie est diagnostiquée en échographie devant un tendon augmenté de volume, hypoéchogène, non fibrillaire entouré d’un halo hypoéchogène. En IRM, le tendon peut être de volume normal, hypertrophié ou dilacéré. La tendinopathie est attestée par les modifications œdémateuses péritendineuses, soit de type inflammatoire avec épaississement tissulaire de la bourse, soit sous forme d’un véritable épanchement liquidien péritendineux ou bursite liquidienne du petit glutéal. L’évolution d’une tendinopathie fissuraire peut se faire vers la rupture tendineuse, avec interruption complète des fibres et rétraction de l’extrémité rompue. Le tableau de rupture peut parfois être aigu et induire une boiterie avec véritable impotence fonctionnelle. L’évaluation des masses musculaires de la région sustrochantérienne doit faire partie de l’examen. L’échographie peut renseigner sur l’échogénicité du muscle et rechercher une désorganisation des fibres musculaires. Le bilan se fait plus précisément en IRM sur des coupes dans le plan coronal en T1 et par Rhumatos • Octobre 2013 • vol. 10 • numéro 91
Figure 2 – Schéma du muscle et du tendon petit glutéal avec son tendon accessoire, expansion adhérente à la capsule articulaire.
comparaison au côté opposé. Le corps musculaire du petit glutéal a une trophicité normale dans 70 % des cas de tendinopathie. Parmi les 30 % de muscle atrophié, l’atteinte musculaire accompagne une tendinopathie fissuraire dans plus de la moitié des cas.
Traitement
Le traitement médical ne diffère pas de celui des tendinobursites trochantériennes et doit comporter une mise au repos relative du tendon pendant 3 mois en évitant le port de charges et les escaliers, parfois associé au port d’une canne dans les ruptures aiguës. Le traitement symptomatique de la douleur et la kinésithérapie font partie des mesures associées. L’infiltration de dérivés cortisonés peut être utile dans les formes très algiques avec bursite liquidienne, mais peut s’avérer décevante dans les tendinopathies fissuraires en cours de rupture où elle peut exa-
cerber momentanément la douleur. Si elle doit être réalisée, le guidage sous échographie permet de cibler la bourse du petit glutéal. Il n’y a pas de traitement chirurgical spécifique des tendinopathies du petit glutéal.
Conclusion
La tendinopathie du petit glutéal mérite d’être reconnue car elle peut être responsable de douleurs à irradiation inguinales laissant croire à une origine articulaire. Elle doit faire partie des étiologies de “douleur de hanche à radiographies normales”. n
Mots-clés : Tendinopathie trochantérienne, Petit glutéal
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