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à savoir

Le poumon dans la polyarthrite rhumatoïde Un organe fréquemment touché n

Le poumon dans la maladie rhumatoïde (PR) doit être une préoccupation quotidienne du

rhumatologue. En effet, des manifestations respiratoires aiguës ou chroniques, d’origine spécifique, infectieuse ou médicamenteuse, surviennent chez un malade sur deux au cours de l’évolution de la maladie. Leur compréhension et leur prise en charge ont été améliorées grâce aux acquis récents de la Tomodensitométrie (TDM), de l’immunologie et de l’histologie.

Pathogénie : le fil d’Ariane

La maladie rhumatoïde doit être comprise comme une maladie inflammatoire caractéristique diffuse à tout l’organisme, d’origine indéterminée. Elle a une traduction histopathologique univoque constituée d’une hyperplasie lymphoplasmocytaire et macrophagique particulière (Fig. 1A), commune au pannus synovial, aux nodules cutanés, mais aussi aux trois compartiments de l’appareil respiratoire (Tab. 1). L’hyperplasie lymphoïde, issue de la différenciation du BALT (le Bronchial Associated Lymphoïd Tissu des Anglo-Saxons), est constamment retrouvée dans le système respiratoire. Elle est organisée en follicules dans la sous-muqueuse bronchiolaire et sécrète des facteurs rhumatoïdes et des Anticorps anti-protéines citrullinées (ACCP). L’intensité de la fibrose interstitielle adjacente est proportionnelle au développement du BALT (1). Il *Service de Pneumologie et Réanimation respiratoire, Centre de Compétence « Maladies pulmonaires rares », Hôpital Tenon, Paris

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Dr Huguette Lioté*

semble donc que l’activation spécifique du BALT joue un rôle clé dans la genèse des lésions respiratoires. Topographiquement, l’infiltrat inflammatoire bronchiolaire et la fibrose peuvent s’étendre dans l’interstitium le long des septa interalvéolaires et interlobulaires jusque dans les espaces sous-pleuraux. Dans ces différents territoires, des lésions d’âge différent coexistent. Elles se traduisent : • dans les Voies aériennes distales (VAD) : par une bronchiolite folliculaire puis fibreuse constrictive et enfin par des bronchiolectasies et des bronchectasies aboutissant à l’exclusion des territoires pulmonaires d’aval ; • dans l’interstitium : par une Pneumopathie interstitielle diffuse (PID) non spécifique puis par une fibrose interstitielle diffuse ; • dans les zones sous-pleurales, par des follicules agrégés constituant les nodules rhumatoïdes ; • lorsque ces derniers se rompent dans la plèvre, ils donnent lieu à une pleurésie sérofibrineuse souvent chronique, plus rarement à une pachypleurite avec des plaques

fibrohyalines (Tab. 1). La conjonction de facteurs environnementaux et de facteurs génétiques est nécessaire à l’initiation de la maladie. Deux facteurs environnementaux ont été identifiés à ce jour : les composants de la fumée de tabac et l’inhalation de silice (2). Ils altèrent l’épithélium bronchiolaire et démasquent des protéines qui, chez certains individus, sont citrullinées grâce à une désiminase. Ces dernières deviennent antigéniques et activent le BALT. Des études épidémiologiques ont solidement montré que le risque de survenue de PR était proportionnel à l’intensité du tabagisme. Un facteur génétique a également été identifié, il s’agit du gène de l’épitope partagé SE, surtout si ce dernier est présent à l’état homozygote. Si l’on combine un tabagisme supérieur à 20 paquets par année et l’épitope SE homozygote, le risque relatif de survenue de PR est de 77,4 ! Le rôle plus spécifique de ces facteurs dans la survenue du poumon rhumatoïde demeure mal connu. Toutefois, un taux élevé d’ACCP Rhumatos • Février 2014 • vol. 11 • numéro 95


Le poumon dans la polyarthrite rhumatoïde

Tableau 1 - Manifestations respiratoires au cours de la polyarthrite rhumatoïde. Poumon rhumatoïde Compartiment pleural

Pleurésie lymphocytaire - Empyème aseptique - Fibrothorax

Compartiment parenchymateux

Nodules - Pneumopathies infiltrantes diffuses : NSIP, UIP, PO

Compartiment bronchique

Bronchiolite folliculaire, bronchiolite constrictive, bronchiolectasies, bronchectasies

Pathologie iatrogène : infectieuse et médicamenteuse MTX

Léflunomide

Anti-TNF

RTX

Infectieuse

+

++

+++

--

Spécifique

+/ NSIP

+/ NSIP

+

+/ PO

Lymphomes ?

Cardiaque +/embolique

?

Autres

Lymphomes

NSIP : non specific interstitial pneumonia, UIP : usual interstitial pneumonia ; PO : pneumopathie organisée ; MTX : méthotrexate, RTX : rituximab

est associé à un risque supérieur de survenue de poumon rhumatoïde (OR : 1,5) (3). Le sexe masculin, la sévérité des lésions articulaires et les nodules cutanés sont fréquemment retrouvés. Le tabagisme est un facteur de gravité de la maladie respiratoire. Le siège des manifestations respiratoires est aussi, en partie, génétiquement déterminé. Par exemple, la mutation ΔF508 du gène CFTR (commune à la mucoviscidose) est plus fréquemment associée aux atteintes bronchiques (4).

Épidémiologie

Dans la cohorte de la Mayo Clinic, l’incidence des PID sévères est estimée en 2004 à 2,8 % pt/an. Les manifestations respiratoires sont un facteur de gravité de la maladie. Alors que la mortalité dans la PR tout venant a diminué régulièrement ces trois dernières décennies, la mortalité des PR avec PID a augmenté (RR : 2), mais il est bien difficile de dissocier dans ce pronostic la responsabilité positive ou négative des nouveaux traitements (5). La prévalence des atteintes respiratoires est de 30 % sur l’imagerie, mais elles ne sont symptomatiques que dans 10 % des cas (Tab. 2) (6). Les atteintes des voies aériennes, longtemps méconnues, sont très fréquentes Rhumatos • Février 2014 • vol. 11 • numéro 95

Synoviale

Plèvre

Figure 1A - Nodule rhumatoïde. Aspect histologique (HES x 50) : infiltrat lymphoplasmocytaire fibreux avec nécrose centrale. 1B - Plèvre pariétale (HE x 50 et 100) : infiltrat inflammatoire lymphocytaire, macrophagique avec formations folliculaires.

(30 % des pts). La fréquence des nodules, des atteintes pleurales avec ou sans épanchement et des pneumopathies infiltrantes est de 20 % pour chaque localisation.

étude analytique

L’intrication des différentes lésions chez un même malade est responsable de l’hétérogénéité des tableaux cliniques. Pour la clarté, les atteintes des différents compartiments seront décrites séparément. Ces manifestations peuvent apparaître avant (1 %), concomitamment ou après les manifestations articulaires.

La pleurésie

Une rupture de micronodules souspleuraux dans la cavité pourrait être à l’origine de ces pleurésies (7). • L’épanchement aigu récent, uni ou bilatéral, est souvent contemporain d’une poussée articulaire. Il s’agit d’un exsudat citrin lymphocytaire et stérile, avec glycopleurie normale ou basse en fonction de l’ancienneté de l’épanchement. Tous les autres “marqueurs” sont aspécifiques et ne doivent plus être recherchés en routine. Un prélèvement à visée histologique, réalisé au mieux par thoracoscopie, s’impose pour éliminer une pleurésie tuberculeuse ou néoplasique. L’as35


à savoir

Tableau 2 - Prévalences des manifestations respiratoires de la PR estimées avant et après la diffusion de la Tomodensitométrie thoracique (TDM). Séries de périodes différentes correspondant à des technologies TDM différentes. Depuis TDM Pourcentage observé

Avant TDM

Rémy-Jardin J. 1994

Despaux J. 1998

Zrour S. 2004

Tanaka N. 2004

N = 84

N = 46

N = 75

N = 63 PID

Moyenne

Voies aériennes

5

20

50

19

25-50

30

Nodules

1

22

26

4

4

20

PID

1-2

20

11-35

28

NA

20

Plèvre

1-2

17

7

9,3

29

20

Adénopathies

?

9

13

?

?

Emphysème

?

30

34

30

29

30

PR : polyarthrite rhumatoïde, NA : non applicable car série de Pneumopathies infiltrantes diffuses (PID)

sociation très spécifique de lésions pleurales macroscopiques (semis de granulations très vascularisées) et microscopiques (infiltrat rhumatoïde) (Fig. 1B) n’est que très rarement observée. Le plus souvent, les biopsies, trop tardives, ne montrent que des dépôts fibrineux et une métaplasie mésothéliale. Cet épanchement peut régresser spontanément, mais il est le plus souvent récidivant et passe à la chronicité dans 50 % des cas. • L’empyème aseptique en est la résultante. Le liquide, difficile à ponctionner, est trouble, puriforme parfois chyliforme, riche en polynucléaires et en fibrine, la glycopleurie y est effondrée. Se pose le problème du diagnostic différentiel d’une pleurésie purulente, en particulier à staphylocoque, secondaire aux ponctions itératives ou à une fistule bronchopleurale à partir de nodules parenchymateux nécrosés. Les biopsies sont alors inutiles. Le pronostic est très sombre. • Enfin, d’authentiques pachypleurites ont été décrites à la TDM, elles restent exceptionnelles et asymptomatiques. La corticothérapie, tant locale que générale, est controversée. Pour certains, elle permettrait d’éviter les 36

récidives et le passage à la chronicité si elle est administrée à un stade précoce. Pour d’autres, elle favoriserait les rebonds à l’arrêt du traitement. Aucune thérapeutique spécifique n’a fait l’objet d’essais à ce jour. Les péricardites parfois associées, détectées au mieux par l’IRM, sont le plus souvent asymptomatiques, exceptionnellement à l’origine de tamponnade ou de constriction. Leur problématique est identique à celle des pleurésies.

Nodules pulmonaires

Les nodules pulmonaires, de nombre et de taille variables, prédominant aux lobes supérieurs et dans les régions sous-pleurales (Fig. 2), sont des agrégats de follicules bronchiolaires plus ou moins organisés (Fig. 1). Ils ne sont symptomatiques que par leurs complications : nécrose et excavation dans la plèvre à l’origine de pleurésies, pneumothorax ou pyothorax, excavation et fistulisation dans les bronches à l’origine d’hémoptysies, de greffe aspergillaire ou d’infections à mycobactéries. Le méthotrexate, le léflunomide et les agents anti-TNF ont été incriminés dans l’efflorescence et la nécrose de ces nodules tant cutanés que pulmonaires. Ce

Figure 2 - Aspect TDM : nodules rhumatoïdes multiples dont certains sont excavés.

phénomène demeure incompris. Le nodule unique pose le problème du diagnostic de cancer bronchique. Lors de la tomodensitométrie à émission de positons, les nodules rhumatoïdes présentent un hypermétabolisme au FDG. Mais cet examen n’est pas discriminant et ne dispense pas d’un prélèvement à visée histologique. Les nodules multiples, surtout s’ils sont excavés, imposent d’éliminer des infections à germes Rhumatos • Février 2014 • vol. 11 • numéro 95


Le poumon dans la polyarthrite rhumatoïde

Figure 3 - Bronchiolite constrictive et maladie évoluée des VAD. 3A : Aspect TDM en coupes sagittales et frontales en expiration et en inspiration : verre dépoli et air-trapping expiratoire ; en coupe transversale : micronodules péribronchiolaires périphériques avec aspect "d’arbre en bourgeons". 3B : Histologie de bronchiole terminale (HES x 200) siège d’une bronchiolite constrictive en coupe transversale et longitudinale. Infiltrat inflammatoire floride sous-épithélial avec fibrose du chorion responsable d’une réduction du calibre bronchiolaire.

opportunistes (aspergillose…).

La maladie des voies aériennes

Initialement, seules des Bronchectasies (DDB) postinfectieuses précédant la PR avaient été rapportées. Depuis, l’hypothèse d’une maladie des voies aériennes spécifique, fréquente, précoce et longtemps asymptomatique a été étayée par de nouvelles données : une obstruction des VAD plus précoce que dans la population générale, une imagerie caractéristique de bronchiolite, avec ses 3 stades évolutifs, confirmée par l’histologie (Fig. 3A-B) (6). La bronchiolite folliculaire est la plus précoce, tantôt asymptomatique tantôt responsable d’une toux isolée. La bronchiolite constrictive pure étendue est exceptionnelle. Elle a une traduction clinique particulière associant une dyspnée d’effort progressive, une toux sèche, parfois des râles en “cris d’oiseaux” ou “squeak” à l’auscultation, une distension, des micronodules branchés sur les axes bronchiolaires réalisant parfois un aspect “d’arbre en bourgeons”, un Rhumatos • Février 2014 • vol. 11 • numéro 95

trappage expiratoire en mosaïque du parenchyme en TDM (Fig. 3A). Cette forme est grave car le plus souvent évolutive et corticorésistante. Des macrolides à faibles doses au long cours sont parfois partiellement efficaces. La maladie évoluée des VAD (8) se manifeste par l’apparition d’une maladie obstructive bronchique lentement évolutive et peu spécifique cliniquement associant une dyspnée, des épisodes de bronchospasme et d’infections bronchiques. Cependant, l’existence d’un Trouble ventilatoire obstructif (TVO) périphérique aux EFR, d’un aspect de bronchiolite évoluée avec bronchiolectasies et DDB distales diffuses rend le tableau évocateur dans un contexte de PR. La suppuration bronchique chronique n’apparaît que tardivement. Elle est favorisée par l’altération de l’épithélium, le syndrome sec, la corticothérapie et les autres immunosuppresseurs.

Les pneumopathies infiltrantes diffuses

Leurs formes cliniques se déclinent selon trois modalités de fréquence inégale.

La forme suraiguë, très rare, est une pneumopathie hypoxémiante sévère, avec verre dépoli diffus voire des poumons blancs à l’imagerie. Histologiquement, on observe un dommage alvéolaire diffus. Exceptionnellement révélatrice, il s’agit le plus souvent de l’acutisation d’une PID préexistante. La forme aiguë ou Pneumopathie organisée (PO) (prévalence : 2 à 10 %) est un mode de révélation du poumon rhumatoïde. Le tableau clinique est souvent bruyant, pseudo­ -grippal fébrile avec des opacités alvéolaires multifocales et fluctuantes (Fig. 4b). Le diagnostic de pneumopathie bactérienne et médicamenteuse se pose alors. Le LBA objective une alvéolite à PNN non altérés, puis mixte et enfin lymphocytaire. Mais il permet surtout d’éliminer une infection. L’analyse histologique, quand elle est réalisée, montre des bourgeons lymphoplasmocytaires, parfois totalement obstructifs, dans les bronchioles et les alvéoles (Fig. 4a). La PO peut régresser spontanément, dans les autres cas elle est sensible à la corticothérapie. Elle peut récidiver et engendrer des fibroses séquellaires. 37


à savoir

Figure 4 - Pneumopathie organisée. 4a : Aspect histologique (HES x 200), bronchiole respiratoire siège d’un bourgeon fibro-inflammatoire obstructif. L’épithélium bronchiolaire est bien visible en périphérie du bourgeon. 4b : Aspect TDM de pneumopathie organisée. Condensation alvéolaire multifocale avec bronchogramme aérien.

montrent qu’il s’agit dans 75 % des cas de Pneumopathie interstitielle non spécifique (PINS) ou de Pneumopathie interstitielle commune (PIC) (Fig. 5). L’histoire naturelle de ces PID se décline selon quatre modalités : la régression spontanée, surtout lorsque le verre dépoli prédomine à l’imagerie, la stabilisation, “l’acutisation” (formes suraiguës et PO) peu fréquente mais grave et la détérioration morphologique et fonctionnelle progressive. Malheureusement, aucun facteur prédictif clinique (hormis le tabagisme), fonctionnel, morphologique ou histologique de détérioration, de surmortalité ou de réponse au traitement n’a pu être déterminé. Or ces derniers conditionnent les indications et les modalités thérapeutiques : le traitement demeure donc empirique. La règle est de traiter les patients symptomatiques ou qui s’aggravent au plan fonctionnel et sur l’imagerie. Une corticothérapie de 0,75 à 1 mg/kg/j pendant 4 à 6 semaines puis à doses dégressives en surveillant le patient reste inefficace une fois sur deux. Les immunosuppresseurs (méthotrexate, azathioprine, antiTNF…) sont inconstamment efficaces. Le cyclophosphamide par voie orale ou en bolus, associé aux corticoïdes, demeure le traitement des formes les plus aiguës. Les biothérapies commencent seulement à être évaluées (9).

Manifestations rhumatoïdes spécifiques, mais rares Figure 5 - Aspect TDM et histologique de NSIP (A) et UIP (B) sur un même poumon : verre dépoli, micronodules diffus, épaississement des cloisons interalvéolaires, réticulations interlobulaires, rétraction des scissures et bronchectasies par traction.

Les formes chroniques : toutes les nuances cliniques sont possibles entre une pneumopathie infiltrante fruste peu ou pas symptomatique d’évolution imprévisible ou, à l’op38

posé, devant une insuffisance respiratoire chronique restrictive de fibrose pulmonaire de mauvais pronostic. Les données TDM, bien corrélées aux données histologiques,

Quelques cas d’arthrite crico-aryténoïdienne, responsable de sténose laryngée parfois aiguë et menaçante, ont été rapportés. Certains syndromes d’apnées du sommeil, d’origine centrale ou périphérique, ont été attribués à une atteinte rhumatoïde du rachis cervical supérieur. Les vascularites pulmoRhumatos • Février 2014 • vol. 11 • numéro 95


Le poumon dans la polyarthrite rhumatoïde

Tableau 3 - évolution des infections dans la PR. Avant les immuno­modulateurs, avant 1990

Depuis le MTX, avant 2000

Depuis les anti-TNF, après 2000

Bronchites-Sinusites

Pneumonies

Infections disséminées >> Pneumonies

Pyogènes

+ Opportunistes PCC…

+ Tuberculoses…

1,5*

1,8*

8*

+

RR  : 2

Siège Germes RR ajusté/Population générale Infection sévère

± en fonction de la dose et de la durée des stéroïdes

naires responsables d’hémorragies intra-alvéolaires et d’hypertension artérielle pulmonaire sont exceptionnelles. En revanche, l’atteinte musculaire est sous-­ estimée d’autant qu’elle est majorée par la myopathie cortisonique et le déconditionnement musculaire de nombreux patients. Enfin, il faut citer l’augmentation de fréquence des tumeurs solides et lymphomes qui peuvent se localiser au poumon chez les patients atteints de PR d’autant qu’ils sont traités au long cours par des immuno­modulateurs.

Pathologie iatrogène

Ce chapitre recouvre les infections et les atteintes respiratoires d’origine médicamenteuse qui se posent constamment au diagnostic différentiel des atteintes spécifiques. Les infections ont évolué au cours du temps en fonction des thérapeutiques utilisées. Ces données sont résumées dans le tableau 3. Les agents les plus fréquemment responsables de Pneumopathies médicamenteuses (PM) sont le méthotrexate, le léflunomide, les anti-TNF, plus rarement le rituximab (6). La prévalence reste cependant faible. Pour le méthotrexate à faible posologie, elle est estimée ≤ 1 %. Le tableau de PM est, dans la majorité des cas, celui d’une PO aiguë, voire suraiguë, retardée de quelques semaines par rapport Rhumatos • Février 2014 • vol. 11 • numéro 95

au début du traitement. Le LBA est indispensable pour éliminer une infection (pneumocystose, tuberculose…). La corticothérapie est efficace si elle est administrée précocement. Dans le cas contraire, on déplore une mortalité de 10 à 15 %. Avec le léflunomide qui s’accumule dans l’organisme, une procédure de Wash out par cholestyramine ou charbon actif permet d’accélérer l’élimination et la guérison. Les facteurs prédisposant à la survenue d’une PM restent inconnus. Il n’y a donc pas de contre-indication respiratoire formelle à leur prescription. Cependant, une surveillance clinique est nécessaire. Elle doit être d’autant plus vigilante que

les patients sont porteurs d’une maladie broncho-pulmonaire sous-jacente. L’apparition ou l’aggravation de signes respiratoires nécessite une exploration rapide en milieu spécialisé pour affirmer ou infirmer le diagnostic, si possible avant l’arrêt du médicament, à condition que l’état clinique l’autorise. Cette démarche permet de réunir le maximum d’arguments diagnostiques et de ne pas priver le malade d’un médicament efficace, le cas échéant. n

Mots-clés : Poumon, Polyarthrite rhumatoïde

Que retenir ? La Tomodensitométrie (TDM) et une approche histolopathologique plus précise ont permis de mieux comprendre le poumon rhumatoïde. Ainsi, l’existence d’un infiltrat inflammatoire, à point de départ bronchiolaire, identique à celui du pannus rhumatoïde, atteste de l’unicité de la maladie, quel que soit son siège (respiratoire ou extrarespiratoire). Des notions récemment acquises, on retient : • l’atteinte respiratoire hétérogène présente dans 50 % des PR tout venant, symptomatique dans 10 % des cas ; • la fréquence de la maladie des voies aériennes distales (30 %), longtemps asymptomatiques, peut être précurseur des atteintes des autres organes ; • le profil clinique, radiologique et histologique très varié des atteintes parenchymateuses et leur évolution imprévisible ; • l’insuffisance des moyens thérapeutiques malgré les biothérapies ; • enfin les effets indésirables de ces molécules pourvoyeuses d’infections opportunistes (pneumocystose ou tuberculose…) et plus rarement de pneumopathies médicamenteuses de diagnostic difficile.

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à savoir

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