Rhumatos 90

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la Pratique quotidienne en RHUMATOLOGie

Septembre 2013 • Volume 10 • n° 90 • 9 E

Journées nationales de rhumatologie

COMPTE-RENDU EXCLUSIF

(Poitiers, 30 mai - 1er juin 2013)

EDITORIAL

Echange d’expériences

Retour sur le rendez-vous annuel de la SFR

DMARDs et rhumatismes inflammatoires

Pr Françoise Debiais (Poitiers) et Pr Daniel Wendling (Besançon)

Dr Michel Bodin (Griselles)

Les pathologies rachidiennes

Maladies osseuses rares

Affections microcristallines, classification et prise en charge de la douleur

Quelle prise en charge ? Dr Michel Bodin (Griselles)

Pr Francis Blotman (Montpellier) et Pr Gérard Chalès (Rennes)

L’ostéoporose

Des nouveautés dans le traitement et l’examen Pr Maurice Audran (Angers)

Os, système nerveux et cartilage

Session commune avec la Société française de biologie des tissus minéralisés (SFBTM) Dr Michel Bodin (Griselles)

Tissu osseux et graisse

Maladies de surcharge

Os tumoral

Suite de la session commune avec la SFBTM

Quand y penser en rhumatologie ?

Physiopathologie et traitements

Pr Aleth Perdriger (Rennes)

Pr Michel Laroche (Toulouse)

Pr Françoise Debiais (Poitiers) et Pr Pierre Hardouin (Boulogne-sur-mer)

Billet d’humeur

Avis d’expert

Traitements de fond de l’arthrose : coupables ou victimes ?

La cohorte DESIR Entretien avec le Pr Maxime Dougados

Dr Thierry Conrozier

Dr Michel Bodin

www.rhumatos.fr • www.rhumatoaccess.fr


sommaire

la Pratique quotidienne en RHUMATOLOGie

Directeur de la publication : Dr Antoine Lolivier • Chef du Service Rédaction : Odile Mathieu • Rédacteur : Cécile Pinault • Secrétaire de rédaction : Fanny Lentz • Chef de Fabrication et de Production : Gracia Bejjani • Assistante de Production : Cécile Jeannin • Maquette et ­Illustration : ­Antoine Orry, Erica Denzler • Chef de publicité : Catherine ­Colsenet • Service abonnements : Claire Lesaint • Impression : ­Imprimerie de Compiègne 60205 Compiègne

Comité de lecture Rédacteurs en chef : Dr Dominique Clerc (Paris) et Pr Thierry Schaeverbeke (Bordeaux). Dr Didier Rousseau (Paris), Pr Yannick Allanore (Paris), Dr Laure Artru (Le Mans), Dr Laurence Bellaïche (Paris), Dr ­Olivier Brocq (Monaco), Pr Gérard Chalès (Rennes), Pr Arnaud Constantin (Toulouse), Dr Philippe Dieudé (Paris), Dr Patrick Djian (Paris), Dr Olivier Fichez (Saint-Raphaël), Dr Gilles Hayem (Paris), Pr Eric Houvenagel (Lomme), Dr Frédéric Jacq (Paris), Dr Alain Karneff (Versailles), Dr Frédéric Lavie (Le Kremlin Bicêtre), Dr Bernard Maillet (Moulins), Pr Yves Maugars (Nantes), Dr Edouard Pertuiset (Pontoise), Dr ­Muriel Piperno (Lyon), Dr Eric Roulot (Paris), Dr Philippe Thelen (Paris), Dr Philippe ­Thomas (Metz), Dr Jean-Marc Ziza (Paris).

Comité scientifique Pr Bernard Augereau (Paris), Pr Bernard Bannwarth (Bordeaux), Pr Thomas Bardin (Paris), Pr Bernard Cortet (Lille), Dr Henri Dorfmann (Paris), Pr Jean-­Denis Laredo (Paris), Dr Catherine Marty (Garches), Pr Anne Redondo (Clichy), Dr Jacques ­Rodineau (Paris), Pr Christian Roux (Paris), Pr Richard Trèves (Limoges), Pr Pierre Youinou (Brest). Rhumatos est une publication ©Expressions Santé SAS 2, rue de la Roquette, Passage du Cheval Blanc, Cour de Mai - 75011 Paris Tél. : 01 49 29 29 29 - Fax : 01 49 29 29 19 E-mail : rhumatos@expressions-sante.fr RCS Paris B 394 829 543 N° de Commission paritaire : 1116 T 85687 ISSN : 1771-0081 Mensuel : 10 numéros par an Revue indexée dans la base PASCAL Les articles de “Rhumatos” sont publiés sous la responsabilité de leurs auteurs. Toute reproduction, même partielle, sans le consentement de l’auteur et de la revue, est illicite et constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal.

www.rhumatos.fr

Septembre 2013 • Vol. 10 • N° 90

n billet d’humeur

Traitements de fond de l’arthrose : coupables ou victimes ? . . . . . . . . p.178 Dr Thierry Conrozier (Belfort)

n Avis d’expert

La cohorte DESIR : le point avec le Pr Maxime Dougados. . . . . . . . . . . . p.185

Dr Michel Bodin (Griselles)

n Dossier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

p. 188

Journées Nationales de Rhumatologie Poitiers 30 mai – 1er juin 2013

édito

Pr Françoise Debiais (Poitiers), Pr Daniel Wendling (Besançon) . . . . . p.189

n Partage d’expériences : DMARDs et rhumatismes inflammatoires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.190 Dr Michel Bodin (Griselles) n L’ostéoporose : des nouveautés dans le traitement et l’examen. . p.192 Pr Maurice Audran (Angers)

n A nti-TNF et rhumatismes inflammatoires chroniques : de la recherche à la clinique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.194 D’après un symposium organisé par le laboratoire MSD

n Polyarthrite rhumatoïde : l’observance en questions. . . . . . . . . . . . p.195 D’après un symposium organisé par le laboratoire Roche Chugai

n Les pathologies rachidiennes : affections microcristallines, classification et prise en charge de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.196 Pr Francis Blotman (Montpellier), Pr Gérard Chalès (Rennes)

n Maladies osseuses rares : quelle prise en charge ?. . . . . . . . . . . . . . . p.197 Dr Michel Bodin (Griselles) n Polyarthrite rhumatoïde : des mécanismes physiopathologiques aux essais comparatifs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.199 D’après un symposium organisé par le laboratoire Bristol-Myers Squibb

n Os, système nerveux et cartilage : session commune avec la Société française de biologie des tissus minéralisés (SFBTM) . . . . p.200 Dr Michel Bodin (Griselles)

n Tissu osseux et graisse : suite de la session commune réunissant rhumatologues de la SFR et chercheurs de la SFBTM. p.201 Pr Françoise Debiais (Poitiers), Pr Pierre Hardouin (Boulogne-sur-mer)

n Maladies de surcharge : quand y penser en rhumatologie ?. . . . . . p.203 Pr Aleth Perdriger (Rennes) n Spondyloarthrite : qu’est-ce qui change ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.206 D’après un symposium organisé par le laboratoire Pfizer n Os tumoral : physiopathologie et traitements . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.207 Pr Michel Laroche (Toulouse)

n Bulletin d’abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.193

Assemblés à ce numéro : 2 bulletins d’abonnement (2 pages et 4 pages), 1 programme « La main rhumatologique » (4 pages) Crédit de couverture : © Palais des Congrès / D. LAMING, Architecte


BIllet d’humeur

Traitements de fond de l’arthrose : coupables ou victimes ? Dr Thierry Conrozier*

L

’avis défavorable au maintien du remboursement des anti-arthrosiques symptomatiques d’action lente (AASAL) prononcé par la Commission de transparence (CT) de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), le 9 janvier 2013, en raison d’un « intérêt clinique insuffisant », et la décision récente de la Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDIMTS) d’attribuer un service médical rendu « insuffisant » aux viscosuppléments à base d’acide hyaluronique (AH), ont créé un sentiment de malaise très légitime, tant chez les rhumatologues, que chez les patients à qui ces traitements sont régulièrement prescrits depuis plus de 20 ans, sur la base des recommandations de la plupart des sociétés savantes spécialisées dans ce domaine (1-7). Déjà en 2012, l’American College of Rheumatology avait retiré l’usage des AASAL de la liste de ses recommandations (8), ce qui avait motivé une réponse de la section Arthrose de la Société Française de Rhumatologie (9), arguant que le rapport bénéfice-risque de ces traitements justifiait pleinement leur utilisation. Devant ces controverses et les conséquences prévisibles d’un déremboursement des AASAL et de l’AH (recours accru à d’autres traitements plus coûteux et/ou plus dangereux, perte de crédibilité des rhumatologues), on est en droit de se poser deux questions essentielles : • les traitements anti-arthrosiques, bien que très largement utilisés, sont-ils réellement utiles ? • les autorités de santé ne font-elles pas fausse route et ne faudrait-il pas complètement « repenser » la place des AASAL dans la prise en charge médicamenteuse de l’arthrose ?

Les AASAL et l’AH sont-ils utiles dans le traitement de l’arthrose ? « Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage » Molière La décision de la CT concernant les AASAL (« Ils *Service de rhumatologie, centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, 90000 Belfort, tconrozier@chbm.fr

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n’empêchent pas la dégradation articulaire »/« Leurs effets sur la douleur et la gêne fonctionnelle sont minimes et de pertinence clinique discutable »/« Le service médical rendu est insuffisant pour justifier leur prise en charge par la solidarité nationale ») est fondée essentiellement sur les résultats de l’étude observationnelle PEGASE (10), réalisée à sa demande, dont l’objectif était de démontrer que les AASAL permettaient de réduire la consommation d’AINS. 4 555 patients atteints de gonarthrose ou coxarthrose, traités ou non par AASAL (diacerhéine, chondroïtine sulfate [CS] et insaponifiable d’huile d’avocat et d’huile de soja [IAS]), ont été inclus et suivis pendant une moyenne de 9,7 mois. Les conclusions en étaient que près de 30 % des patients (jusqu’à 45 % pour la diacerhéine) n’étaient pas observants et qu’il n’y avait pas de différence de consommation d’AINS entre les groupes traités ou non par AASAL. Pourtant de nombreuses études randomisées avaient préalablement montré l’efficacité antalgique, modérée mais significative, de la CS et de la glucosamine sulfate (GS) (11-13). Une récente étude randomisée en double aveugle (14) comparant le sulfate de chondroïtine (CS : 1 200 mg par jour) au placebo chez 353 patients atteints de gonarthrose, montrait qu’après 3 mois de traitement, l’indice algofonctionnel de Lequesne (IAL) avait diminué de façon plus importante dans le groupe CS que dans le groupe placebo (-3,7 points versus -1,5 point, p < 0,0001). La conclusion de la CT concernant cette étude a été que, bien que très significative, cette différence de 2,2 points sur une échelle de 0 à 24 points était « de pertinence clinique minime ». On peut clairement contester cette interprétation puisque l’IAL moyenne était, dans cette étude de 11,4 points, conforme à ce qui est rapporté dans ce type d’étude (entre 9 et 11 points en moyenne) (15) et que la réduction de l’IAL correspondait à une amélioration de 32,4 % dans le groupe CS contre 13,4 % dans le groupe placebo. Les membres de la CT semblent ignorer que la valeur Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90


Traitements de fond de l’Arthrose : AASAL

seuil à partir de laquelle on retient habituellement l’indication opératoire est très éloignée des 24 points maximum de l’indice comme voudrait le laisser supposer leur conclusion, puisqu’elle est en moyenne de 12 points dans la coxarthrose (16), de 14,5 points dans la gonarthrose (17) et elle ne diminue en moyenne que de 6,6 points (54,4 %) après prothèse totale du genou (17). La décision de la CNEDIMTS pour l’AH s’est, quant à elle, basée exclusivement sur la méta-analyse de Runtjes (18) qui conteste l’efficacité de la viscosupplémentation alors que plusieurs autres méta-analyses rapportent des résultats différents (19-21), et que des études récentes, parfaitement réalisées sur le plan méthodologique, ont montré des diminutions très significatives à la fois de l’indice de Lequesne (-4,65 à -5,73 points) (22) et du WOMAC douleur (-48,2% à 6 mois) (23), soit une amélioration largement supérieure à la MCII (24). On peut donc se poser la question du bien-fondé de ces décisions alors même qu’une récente publication a démontré l’intérêt économique des AASAL (25), comme cela l’avait déjà été avec l’AH (26).

Quelle est la vraie place des AASAL ? « Ni cet excès d’honneur, ni cette indignité » Racine L’arthrose est le prototype parfait de la maladie chronique liée au vieillissement, dont la fréquence augmente de façon exponentielle avec l’âge même si d’autres facteurs – mécaniques, génétiques, métaboliques – sont largement impliqués dans sa genèse et son évolution (27). Curieusement, contrairement à ce qui se fait dans les autres maladies du vieillissement (ostéoporose, affections cardio-vasculaires), aucune recommandation n’est donnée concernant le diagnostic et la prise en charge précoce et continue. On se limite à traiter les symptômes, en particulier la douleur, élément clinique clé de la maladie (7, 8). Toutefois cette théorie « arthrose = douleur » est une vision très réductrice de l’affection alors même que l’on sait que

Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90

les deux sont très mal corrélées et que les mécanismes à l’origine de la douleur arthrosique sont multiples (synovite, douleur d’origine osseuse, méniscale, tendineuse, neuropathique) (28, 29) et variables selon la localisation et le stade de l’évolution. Les ASAAL, tout comme l’AH, semblent agir essentiellement par un effet antidégradatif et antiapoptotique (30-33), même si certain pourraient posséder un discret pouvoir anti-inflammatoire (33). Leur effet sur la structure est maintenant largement démontré, tant in vitro, que dans les modèles animaux (33, 34) et chez l’homme, essentiellement en ce qui concerne l’acide hyaluronique (35-37), la glucosamine et la chondroitine (3841). Si l’effet chondroprotecteur semble cliniquement discutable après 2 à 3 ans de traitement (de 5 à 10 % de la valeur de l’interligne au moment de l’inclusion), il n’en serait probablement pas de même si les traitements étaient pris pendant de très longues périodes et le plus tôt possible après le diagnostic, à la suite d’une évaluation rigoureuse des facteurs de risque de progression, comme cela est le cas dans le traitement de l’ostéoporose (42). Or comme les AASAL et l’AH ont un profil de tolérance excellent et que la majorité des patients arthrosiques sont atteints de comorbidités contre-indiquant la prise d’AINS (43), il paraît irresponsable de se priver de les utiliser sur le simple prétexte que certaines méta-analyses remettraient en compte leur intérêt. Les professionnels de l’arthrose, médecins, industriels, sociétés savantes et autorités de santé, se doivent de mettre en place des essais d’envergure, méthodologiquement irréprochables, destinés à enfin démontrer de façon indiscutable le caractère structuro-modulateur des AASAL et leur capacité à retarder la mise en n place de prothèse. Retrouvez la bibliographie complète de cet article sur www.rhumatos.fr

Mots-clés : Arthrose, Anti-arthrosiques symptomatiques d’action lente, Acide hyaluronique, Remboursement, Politique de santé

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La cohorte DESIR

La cohorte DESIR Le point avec le Pr Maxime Dougados* n Où en est-on de la cohorte DESIR ? Le Pr Maxime Dougados fait le point Dr Michel Bodin** au travers de cette interview.

Michel Bodin : Pr Dougados, bonjour. Pouvezvous, pour commencer, nous rappeler ce qu’est la cohorte DESIR ? Maxime Dougados : DESIR signifie « DEvenir des

Spondylarthrites Indifférenciées Récentes ». Après la mise en place de la cohorte ESPOIR, qui concerne les polyarthrites, l’objectif principal était de constituer une cohorte multicentrique française de patients souffrant de rachialgies inflammatoires récentes (évoluant depuis moins de 3 ans), et pouvant correspondre à une spondylarthropathie. Le but de cette cohorte était de servir de base de données pour des études scientifiques d’ordre diagnostique, pronostique, médico-économique et pathogénique.

M.B. : Le dernier des 708 patients de la cohorte DESIR a été inclus en avril 2010. Où en sommesnous aujourd’hui ? M.D. : La base de données à M24 a été gelée en no-

vembre 2012. Plus de 80 % des patients restent suivis dans la cohorte après vingt-quatre mois, et le nombre de perdus de vue est inférieur à 10 %. Les premiers patients inclus ont passé leur visite M60, soit déjà 5 ans de suivi. L’intérêt des données recueillies tient à leur qualité. Les données cliniques sont gérées à Nîmes, par le Centre d’Epidémiologie Clinique et Biostatistique ; les données radiographiques et IRM sont collectées et centralisées à l’hôpital Cochin, et les données biologiques à l’hôpital Bichat. Le traitement de toutes ces données est assuré par l’unité de recherche clinique de Paris Centre. Leur gestion se fait selon des accords de partenariat entre la SFR, l’APHP et avec le soutien logistique des Laboratoires Pfizer. Toutefois, le travail ne fait que commencer : tout d’abord, nos troupes restent mobilisées pour le recueil

*Chef du service de Rhumatologie, Hôpital Cochin, Paris **Rhumatologue, Griselles

Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90

des données manquantes, la recherche des perdus de vue, la formalisation des indispensables corrections, afin que la base de données soit la plus irréprochable possible. Par ailleurs, au suivi initial de cinq ans, il a été décidé d’ajouter un suivi complémentaire de cinq autres années, avec une visite de contrôle tous les ans. Un contrôle plus complet sera effectué à dix, voire quinze ans.

M.B. : Comment sont exploitées les données ? M.D. : La base de données cliniques et la base de don-

nées radiographiques et IRM sont directement disponibles. L’exploitation de la base de données biologiques est disponible, mais soumise à un contrôle. La qualité de nos données est directement dépendante de celle de nos cahiers d’observations, rédigés conjointement avec nos partenaires allemands et néerlandais. Notre comité scientifique travaille de façon à la fois proactive et réactive, et fait énormément pour la promotion de notre savoir-faire, qui commence à être reconnu au niveau international. Les chercheurs sont particulièrement motivés, parce qu’ils peuvent espérer bénéficier, par la qualité de leurs travaux, de publications dépassant largement notre environnement scientifique national.

M.B. : L’exploitation des éléments recueillis sur les premiers dossiers est sans doute déjà en cours ? M.D. : Certainement. Trente à quarante études ont

été initialisées ; sept publications ont été réalisées, deux sont en cours, et concernent des domaines très variables : associations de facteurs biologiques et cliniques, comorbidités, altération de la densité minérale osseuse, incidence des uvéites, identification de phénotypes, et bien d’autres… Les projets scientifiques sont proposés au comité scientifique pour acceptation, et la présentation aux congrès médicaux ainsi que les projets de publications dans les journaux médicaux 185


Avis d’expert

font l’objet d’un consensus. Nous commençons d’ailleurs à faire des émules : plusieurs autres cohortes dans le monde s’intéressent aux spondylarthrites, dont deux ou trois directement inspirées de notre modèle.

M. B. : Un tel travail intéresse, à l’évidence, l’ensemble de la communauté rhumatologique. Comment faites-vous circuler l’information ? M.D. : Nous organisons régulièrement la publication

de newsletters, non seulement aux rhumatologues (880 destinataires), mais aussi aux radiologues et aux patients. Par ailleurs, des réunions en général bisannuelles d’investigateurs sont organisées. Actuellement, elles concernent plus particulièrement les hospitaliers intéressés par la recherche clinique…

186

M.B. : Un travail d’une telle ampleur implique sans doute un énorme engagement financier ? M.D. : Bien entendu. La pérennité de la base assurée par le CHR de Nîmes, à elle seule, nécessite un réinvestissement permanent… D’autres problèmes se posent, que nous n’avions pas prévus, comme par exemple la caducité des images numériques, qui avec le temps tendent à s’effacer. Mais l’importance des résultats que nous attendons de DESIR justifie sans équivoque que nous maintenions nos efforts… n

Mots-clés : Spondylarthrite, Cohorte DESIR

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DOSSIER DOSSIER SPÉCIAL

JOURNÉES NATIONALES DE RHUMATOLOGIE Sous l’égide de la SFR

Editorial.................................................... p. 189 Pr Françoise Debiais (Poitiers), Pr Daniel Wendling (Besançon)

• P artage d’expériences : DMARDs et rhumatismes inflammatoires

Dr Michel Bodin (Griselles). ............... p. 190

• L ’ostéoporose : des nouveautés dans le traitement et l’examen

Pr Maurice Audran (Angers).............. p. 192

• A nti-TNF et rhumatismes

inflammatoires chroniques : de la recherche à la clinique

D’après un symposium organisé par le laboratoire MSD.......................... p. 194

• P olyarthrite rhumatoïde :

l’observance en questions

D’après un symposium organisé par le laboratoire Roche Chugai..... p. 195

• L es pathologies rachidiennes :

affections microcristallines, classification et prise en charge de la douleur Pr Francis Blotman (Montpellier), Pr Gérard Chalès (Rennes).................. p. 196

•M aladies osseuses rares : quelle prise en charge ?

Dr Michel Bodin (Griselles)............... p. 197

• P olyarthrite rhumatoïde : des

mécanismes physiopathologiques aux essais comparatifs D’après un symposium organisé par le laboratoire Bristol-Myers Squibb.......................................................... p. 199

•O s, système nerveux et cartilage :

session commune avec la Société française de biologie des tissus minéralisés (SFBTM)

Dr Michel Bodin (Griselles)............ p. 200

• T issu osseux et graisse : suite de la session commune réunissant rhumatologues de la SFR et chercheurs de la SFBTM

Pr Pierre Hardouin (Boulogne-sur-mer) Pr Françoise Debiais (Poitiers)..... p. 201

•M aladies de surcharge : quand y penser en rhumatologie ?

Pr Aleth Perdriger (Rennes)........... p. 203

• S pondyloarthrite : qu’est-ce qui change ?

D’après un symposium organisé par le laboratoire Pfizer................................... p. 206

•O s tumoral : physiopathologie et traitements

Pr Michel Laroche (Toulouse). ..... p. 207


JNR 2013 : L’essentiel du congrès éditorial Pr Françoise Debiais*

L

a Société Française de Rhumatologie a organisé cette année les Journées Nationales de Rhumatologie à Poitiers les 30, 31 mai et 1er juin 2013. Toute l’équipe de rhumatologie de Poitiers a été très heureuse de participer à cette organisation et de vous retrouver au Palais des congrès du Futuroscope pour cette réunion.

niciens ont eu plaisir à se retrouver pour partager leurs connaissances. Le congrès a été précédé de deux demijournées de formation concernant l’ostéoporose, pour le Développement Professionnel Continu (DPC) sous l’égide du GRIO, du CFMR et de la SFR.

Pour la première fois ces journées ont été couplées à celles de la Société Française de Biologie des Tissus Minéralisés, qui se sont déroulées sur le même site, avec un programme commun le vendredi après-midi 31 mai et nous sommes certains que chercheurs et cli-

Nous remercions tous les orateurs et modérateurs des différentes sessions et vous tous, rhumatologues, confrères et amis, qui nous avez rejoints pour faire vivre ces moments scientifiques et de convivialité. Nos remerciements vont aussi à M. Brunet, Professeur au Collège de France, qui nous a fait l’honneur de venir nous conter de passionnantes « histoires d’os ».

*Trésorière adjointe de la Société Française de Rhumatologie, chef du service de rhumatologie, CHU de Poitiers

Nous espérons que le programme de ces Journées vous a plu et vous trouverez dans cette revue des résumés d’interventions ayant eu lieu pendant ce congrès. n

Pr Daniel Wendling*

L

es « JNR » sont devenues depuis quelques années un rendez-vous attendu de l’année rhumatologique. Cette manifestation, sous l’égide de la SFR, est l’occasion de rencontres et d’échanges au sein de la discipline et avec d’autres spécialités. Son format, différent d’un congrès scientifique, est essentiellement tourné vers la formation médicale continue et pourra servir de support au DPC, comme cela a été initié à Poitiers cette année.

2013 a vu en parallèle les journées de la Société Française de Biologie des Tissus Minéralisés, avec une séance conjointe aux JNR , illustrant cette volonté d’échanges. Merci à Françoise Debiais et toute son équipe pour la qualité du programme élaboré, la chaleur de l’accueil et l’excellence de l’organisation.

Les centres d’intérêts de l’équipe locale, qui élabore le programme, permettent une diversification de l’offre proposée chaque année. Ainsi, l’édition

Le souhait de la SFR est de favoriser le développement de ces JNR au fil des ans pour amplifier cette action. Dans ce sens, et de manière incitative, la SFR offre la gratuité de l’inscription aux JNR à ses membres à jour de cotisation.

*Président de la Société Française de Rhumatologie, Chef du service de rhumatologie, CHU de Besançon

Rendez-vous aux prochaines JNR !

Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90

n

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Journées nationales de rhumatologie 2013

Partage d’expériences DMARDs et rhumatismes inflammatoires Avec le soutien institutionnel de Nordic Pharma

n Pour la première conférence, les Journées Nationales de Rhumatologie 2013 ont organisé une session sur les DMARDs et les rhumatismes inflammatoires, au travers de cinq interventions.

Dr Michel Bodin*

Utilisation des DMARDs dans les spondyloarthrites

Optimisation des traitements de fonds synthétiques

(Pr Daniel Wendling, Besançon)

(Pr Bruno Fautrel, Paris)

Les critères de classification des spondyloarthrites (SPA) ont été validés. Les recommandations en vigueur sont celles de l’EULAR et de l’ASAS (2011). Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et, dans les formes périphériques, le recours à la salazopyrine (SSZ) constituent le traitement de base. La SSZ est active dans les seules formes périphériques de rhumatisme psoriasique (Rh pso), avec un profil de tolérance satisfaisant. Le recours aux biothérapies peut se faire en première intention, mais l’arthrite psoriasique périphérique est la seule indication reconnue.

Le MTX, éventuellement associé à des corticoïdes, est recommandé pour le traitement initial de la polyarthrite rhumatoïde (PR). Dans l’étude CAMERA 1, la réponse au traitement était prédictive d’une meilleure évolution à moyen et long termes (5 ans). L’évolutivité clinique et la progression structurale sont moindres chez les bons répondeurs aux traitements. 10 à 15 mg de MTX d’emblée, dose ensuite adaptée en fonction de l’état clinique, est le meilleur schéma. Selon la tolérance, on augmente vers 20 à 25 mg/ semaine. Les voies parentérales sont le gage d’une biodisponibilité supérieure, dose à moduler en fonction de l’évolution. Le passage d’une forme sous-cutanée (SC) vers une forme orale est à déconseiller.

Le méthotrexate (MTX), inactif dans les formes axiales, est faiblement efficace au niveau périphérique. Il bénéficie d’indications EULAR dans le Rh pso, sur les atteintes périphériques actives et les manifestations cutanées. L’association MTX/biothérapie n’apporte aucun bénéfice dans le Rh pso. Le léflunomide a une efficacité modeste sur les atteintes périphériques du Rh pso et figure dans les recommandations. *Rhumatologue, Griselles

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L’association MTX + infliximab (IFX), comparativement à une triple association MTX, SSZ et hydroxychloroquine (HCQ) chez des PR naïves de MTX, donne de meilleurs résultats et une meilleure maintenance thérapeutique. Selon l’étude CAMERA 2, une corticothérapie, à la dose de 10 mg maintenue de façon stable pendant 2 ans (ce

que beaucoup considèrent comme une posologie à haute toxicité), associée au MTX, permettrait une amélioration du DAS 28, une progression structurale ralentie et un moindre taux de recours à la biothérapie, sans augmentation de la toxicité. Les résultats de cette étude, bien qu’ayant fait l’objet de vives critiques des auditeurs, ne peuvent cependant pas être occultés. Le non-respect des recommandations (75 % des patients) multiplie par 2 le risque de progression de la détérioration structurale et du handicap. Le MTX augmente les chances de rémission, stabilise le taux de handicap, mais ne diminue pas la progression structurale, ni le taux de recours à la biothérapie. Il ne permet pas de réduire de manière significative le coût des biothérapies.

Rôle des traitements de fond dans les maladies systémiques (Pr Jean Sibilia, Strasbourg)

Tous ces traitements, sauf un, sont utilisés hors AMM. Le lupus est seul à bénéficier de l’indication officielle pour les antipaludéens de synthèse (APS, type HCQ), propoRhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90


Journées nationales de rhumatologie 2013

sés d’emblée. Les résultats d’une étude portant sur 1 500 patients, basée sur la survie, montrent des résultats significatifs avec divergence des courbes de survie, selon que les malades sont soumis ou non aux APS. Le dosage sanguin de HCQ peut détecter la non-observance (chez 15 à 30 % des femmes lupiques). En cas de grossesse, contrairement à une idée fausse, le HCQ est recommandé. Selon les recommandations US de 2011, aucune surveillance n’est nécessaire durant les 5 premières années, sauf chez les sujets trop minces, ou soumis à de fortes doses, ou insuffisants hépatiques ou rénaux. Le MTX est efficace sur les signes articulaires et cutanés lupiques (même si échec des APS), ainsi que dans les formes pédiatriques et certaines formes systémiques. La tolérance est correcte. Le léflunomide aurait démontré une efficacité relative, chez 14 malades. Dans le GGS, le HCQ est souvent prescrit, mais aucun traitement de fond n’a montré une efficacité. MTX et Imurel® sont sans effet prouvé. Le léflunomide aurait montré une efficacité modeste, mais pourrait entraîner des cas de lupus induit. Pour la SCL, des recherches sont poursuivies avec le MTX, en raison de ses propriétés anti-fibroblastiques. Efficace sur les lésions cutanées chez l’enfant, elle n’améliorerait pas la fonction pulmonaire.

Association entre le MTX et les biothérapies (Pr Alain Cantagrel, Toulouse)

Intérêt de la prescription du MTX à l’initiation d’un traitement par biothérapie

Si le patient est naïf de MTX et naïf de biothérapie, on note une supéRhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90

riorité de la combinaison MTX + biothérapie sur les critères ACR 20 et un meilleur score sur les critères ACR 50 et ACR 70.

Stratégie et optimisation thérapeutique

Si le patient est sous MTX avec un bénéfice insuffisant, et que l’on veut initier une biothérapie, le DAS 28 et la probabilité d’atteindre les critères ACR 50 (75 % vs 45 %) sont nettement meilleurs en cas de bithérapie MTX/étanercept. Il n’y a pas de potentialisation en cas d’association MTX + rituximab (RTX), alors qu’elle existe avec l’association RTX + léflunomide. Pour les traitements combinant tocilizumab et MTX, ou abatacept et MTX, pas de potentialisation démontrée : elle n’est présente que pour les anti-TNF, et non pour les autres biothérapies.

L’optimisation d’un traitement passe par un choix stratégique, modulé progressivement en fonction des résultats obtenus. Choisir n’est pas toujours simple : MTX seul ou associé ? Combiné à d’autres traitements de fond (SSZ, HCQ…) ou infiltrations ? Ou dose modérée de corticoïdes ? Ou biothérapie d’emblée?

Le MTX permet-il d’optimiser le traitement par biothérapie ?

Selon les données des registres britannique (10 000 patients) et italien, il est préférable de conserver l’association MTX/anti-TNFα. Il n’y a pas de données disponibles pour les autres biothérapies.

Le MTX peut-il réduire la formation des anticorps antimédicaments ?

Les anticorps anti-ADA, facteurs d’inefficacité et d’arrêt de traitement, apparaissent chez 30 % des patients, précocement chez 1 patient sur 2. En fonction de la posologie de MTX associé à l’adalimumab, ce taux est significativement diminué. L’immunogénicité induite par les autres biothérapies est peu connue.

Faut-il garder le MTX pour stabiliser la rémission ?

La réponse est oui, surtout si l’on a l’intention de réduire ou d’arrêter la biothérapie. La prise de MTX a un effet favorable sur la poursuite de la rémission et retarde l’apparition des rechutes.

(Pr Alain Saraux, Brest)

La qualité du suivi permet l’amélioration de l’évolution. Le taux de rémission varie en fonction des critères d’appréciation : jugé sur les critères ACR, il sera plus représentatif que jugé sur le DAS 28. Selon l’étude OPERA, un traitement par MTX auquel on ajoute des infiltrations peut suffire, si l’on apprécie l’évolution sur le DAS 28. Des critères de rémission plus exigeants imposeront un recours à une biothérapie. La comparaison d’une biothérapie à une association triple de traitements de fond plaide en faveur d’un sursis à la mise sous biothérapie coûteuse, en raison des faibles différences. Selon l’étude BeSt, la structure des articulations n’est pas modifiée par la stratégie adoptée. Si l’arrêt total de l’anti-TNF ne permet pas de maintenir une rémission, le passage à demi-dose peut maintenir les résultats et diminuer les coûts (étude PRESERVE). On peut espacer les prises : en cas d’aggravation, le retour aux doses initiales améliore l’état du patient. Une biothérapie interrompue pour inefficacité peut être souvent reprise avec une efficacité retrouvée. Le MTX constitue un frein à l’apparition d’anticorps anti-médicaments. Dans le futur, le dosage de ces anticorps permettra une optimisation des traitements. 191


Journées nationales de rhumatologie 2013

l’évolution ; le plus souvent, l’arrêt total expose à une rechute. n

En cas d’amélioration partielle, faut-il garder stables les doses de MTX ?

Mots-clés : DMARDs, Rhumatismes inflammatoires, Spondyloarthrite, Polyarthrite

Non avec le tocilizumab, oui avec les autres molécules. Diminuer un traitement biologique est en général possible sans conséquence sur

rhumatoïde, Rhumatisme psoriasique, Méthotrexate, Lupus, Biothérapies

L’ostéoporose Des nouveautés dans le traitement et l’examen n La session plénière « Os et Métabolisme phosphocalcique » a donné lieu à trois interventions sur des sujets d’actualité susceptibles d’influencer notre pratique clinique quotidienne. Pr Maurice Audran* Quel second traitement choisir ?

Le Pr Erick Legrand (Angers) s’est prononcé sur le « choix du traitement après une première séquence thérapeutique dans l’ostéoporose (OP) ». Les situations qui amènent à s’interroger sont hétérogènes. Beaucoup dépend de la gravité initiale de l’OP, d’éventuelles comorbidités, de la volonté de la patiente de se traiter, de l’agent initial utilisé (mode d’action, effet rémanent, effets secondaires). Les études sur le choix d’un second traitement sont limitées. On sait cependant que passer de l’alendronate à l’acide zolédronique (ZOL) n’induit pas de gain densitométrique alors que passer de l’alendronate au dénosumab entraîne un gain osseux plus intéressant. Après un agent antirésorbeur, le recours au tériparatide ou au ranélate de strontium induit un gain osseux, moindre qu’en traitement initial. En schématisant, le Pr Legrand a conclu : *Chef du service de rhumatologie, CHU d’Angers

192

• excellent résultat à 4-5 ans (pas de nouvelle fracture, pas de réduction de taille, DMO stable ou accrue) = poursuite du traitement par raloxifène pendant 3 à 4 ans, arrêt du bisphosphonate (BP) et réévaluation 2 ans plus tard ; • résultat insuffisant (fracture incidente, perte de taille, diminution de DMO) = après raloxifène, changer pour un BP per os ou en intraveineuse (IV) si doute sur l’observance ; • très mauvais résultat (≥ 2 nouvelles fractures vertébrales) = rotation vers tériparatide ; fracture de l’ESF : ZOL en IV.

Innovations thérapeutiques

Le Pr Thierry Thomas (SaintEtienne) a ensuite présenté « l’actualité du futur » des traitements de l’OP. Il a rappelé la place de l’inhibiteur du RANKL, le dénosumab, efficace dans la prévention des fractures vertébrales et périphériques. En plus de sa commodité d’emploi,

qui peut favoriser l’observance et le suivi des patients, ce médicament est une alternative intéressante (et qui nous manque !) lorsque le déclin de la fonction rénale gêne pour instaurer un traitement par BP. La voie de la résorption peut aussi être contrôlée par l’odanacatib inhibiteur de la cathepsine K, protéase sécrétée par les ostéoclastes. Des travaux sur l’OP post-ménopausique ont montré, outre la réduction attendue du remodelage osseux, un effet positif sur la DMO chez des patientes naïves de traitement ou après alendronate. Un avantage de cet agent est de ne pas obérer le couplage « résorption ostéoclastique - formation ostéoblastique », son activité étant ciblée sur l’enzyme et non sur l’ostéoclaste. Les résultats sur l’efficacité anti-fracturaire sont attendus. Dans un avenir un peu moins proche, le romosozumab, inhibiteur de la sclérostine (protéine impliquée dans la régulation de la formation osseuse) pourrait apparaître comme un agent anabolique très prometteur… Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90


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Amélioration de la densitométrie osseuse

La densitométrie osseuse, très utilisée dans l’approche rationnelle du traitement de l’OP, a connu deux développements présentés par le Pr Roland Chapurlat (Lyon). Le premier a pour objectif de faciliter le diagnostic des fractures vertébrales, dont la reconnaissance lors du bilan d’une OP influence les décisions thérapeutiques. Il s’agit de la VFA (pour Vertebral Fracture Assessment). Une étude française a

montré que le recours à la VFA permettait une économie de radiographies et une prescription thérapeutique mieux adaptée dans un tiers des cas. On espère son inscription à la nomenclature. Le second développement est en lien avec les travaux menés sur la micro-architecture osseuse. L’image obtenue par le densitomètre est traitée par un logiciel d’analyse des niveaux de gris qui fournit un score TBS (Trabecular Bone Structure) corrélé à des paramètres de microarchitecture. Des travaux

cliniques indiquent que le recours à cet outil améliore la prédictivité du risque fracturaire, notamment chez les sujets non ostéoporotiques selon la définition classique. Des études complémentaires sont attendues pour une meilleure définition des seuils décisionnels lors du recours à ce système. n

Mots-clés : Os, Fracture, Ostéoporose

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Anti-TNF et rhumatismes inflammatoires chroniques De la recherche à la clinique D’après un symposium organisé par le laboratoire MSD

Introduction Trois intervenants se sont succédés lors du symposium mis en place par MSD. Ils ont traité des anti-TNFα, du choix des biothérapies dans la spondylarthrite ankylosante et ont étudié plusieurs cas cliniques de PR.

Propriétés biologiques et pharmacologiques des anti-TNFα (David Shealy, PhD, USA)

Depuis 15 ans, les anti-TNFα constituent un traitement de choix des rhumatismes inflammatoires. Le TNFα est l’un des éléments clés de l’inflammation articulaire dans la PR et les anticorps monoclonaux n’ont cessé d’évoluer à la recherche de propriétés améliorées. Les travaux sur la souris transgénique ont permis le développement par screening de nouvelles molécules, le but étant de faire reculer leurs limitations d’emploi par l’amélioration de leurs caractères spécifiques en matière d’affinité, de stabilité, de solubilité et d’immunogénicité. Parmi tous les candidats, le golimumab est un anticorps monoclonal totalement humain, qui a fait, chez l’homme, la preuve d’une très haute affinité et d’une excellente spécificité pour le TNFα, sur l’activité duquel il présente un fort pouvoir de neutralisation in vitro (2 à 5 fois supérieur à celui de l’infliximab et de l’adalimumab). Chez la souris transgénique, il retarde le développement des atteintes articulaires inflammatoires. Golimumab et infliximab 194

sont tous deux efficaces à 10 mg/kg, mais le golimumab est également efficace dès 1 mg/kg. De plus, il a un effet préventif de la destruction articulaire. Sa formulation a été démontrée comme particulièrement stable, favorisant les hautes concentrations en principe actif et donc un faible volume à injecter (0,5 ml) en SC, une seule fois par mois.

Biothérapies dans la spondylarthrite ankylosante (Pr Jean Roudier, Marseille)

Le choix d’une biothérapie dans la SPA, basé sur 15 ans d’expérience marseillaise, se fonde sur les réponses à cinq questions : • Quand le diagnostic de SPA est certain, que donne-t-on ? Pas de réponse établie à cette question. Les trois anciens anti-TNF ont fait la preuve de leur efficacité. Nous commençons à utiliser les nouveaux. • Que peut-on faire en cas de doute diagnostique ? Nous pratiquons de manière atypique, un test avec 3 perfusions d’IFX et traitons en fonction des résultats. • Comment traiter (ou ne pas traiter) une uvéite ? Après deux cas d’uvéite déclenchés par étanercept, nous traitons ces manifestations par anticorps plutôt que par récepteurs solubles. • Comment traiter une SPA en échappement à l’infliximab ? Dans la majorité des cas, le switch vers l’ETN ou l’ADA est inopérant. Nous employons avec succès le certolizumab (hors AMM). Pas encore

d’expérience avec le golimumab. • Comment réagir à l’aggravation d’une SPA sous anti-TNF ? Celle-ci peut se manifester par l’apparition d’une diarrhée. Dans ce cas, nous prescrivons plutôt des anticorps. Mais ce n’est pas toujours suffisant. Deux cas récents avec une atteinte sévère de l’état général se sont avérés être une maladie de Whipple, affection infectieuse sévère et parfois mortelle en absence de traitement (tétracycline au long cours, 1 à 2 ans).

PR : impact de la situation clinique sur la décision thérapeutique (Pr Philippe Bertin, Limoges)

Ce thème a été traité sous forme interactive avec l’ensemble des auditeurs présents. Il s’agit d’un problème complexe et, sur ce sujet, la littérature regorge de plus de 3 000 références. Plusieurs cas cliniques ont été discutés, avec à chaque fois la recherche de la réponse adaptée en fonction de l’état clinique : quel résultat peuton attendre d’un anti-TNF en cas d’échec du MTX ? Faut-il démarrer précocement la biothérapie en cas d’affection sévère ? Nombre de réponses seront grandement facilitées dans un avenir relativement proche, lorsque les dosages des taux de médicaments et des anticorps anti-médicaments seront devenus coutumiers. De ces dosages, interviendra, ou non, la décision, par exemple de changer n de biothérapie. Dr Michel Bodin

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Polyarthrite rhumatoïde L’observance en questions D’après un symposium organisé par le laboratoire Roche-Chugai

Lors de ce symposium, trois intervenants ont abordé le problème du suivi du traitement chez les patients souffrant de PR.

COMMENT IDENTIFIER UN PATIENT NON OBSERVANT ? (Dr Catherine Beauvais, Paris)

L’adhésion au traitement se compose d’observance (prises des médicaments) et de persistance (prise des médicaments dans la durée). La concordance est la recherche du meilleur traitement entre le médecin et son patient. La non-observance favorise l’échec du traitement et coûte cher. Il faut vérifier auprès des soignants si les injections SC ou IV sont pratiquées, dépister les causes de retard ou de non-présentation du malade. Un contrôle par dosage sanguin n’est pas utilisable pour la PR, contrairement au lupus. Le comptage des comprimés et des blisters, des ordonnances, de la carte Vitale et l’emploi des piluliers ne sont pas infaillibles. Les questionnaires de contrôle de la compliance dans la PR semblent assez efficaces (dépistage de 40 % des non-observants). Les mesures subjectives sont peu fiables : surestimation par le patient de son observance, mémorisation insuffisante des doses absorbées, désir de plaire au médecin. Le médecin luimême détecte la bonne observance et non la mauvaise. Le dialogue permet d’interroger le malade en évitant les questions fermées, à Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90

TOUS NOS PATIENTS SONT-ILS OBSERVANTS ? (Pr René-Marc Flipo, Lille)

L’estimation de l’adhérence au traitement est nettement surestimée. Le coût estimé de la non-observance serait pour l’industrie de 30 milliards de dollars et le coût OMS global de 250 milliards. Pour l’OMS, on estime que le plus grand progrès thérapeutique, toutes disciplines confondues, serait de vaincre l’inobservance. Pour la PR, les chiffres varient (de 30 à 100 %), dépendant des outils d’évaluation. Trois questionnaires sont utilisés : Moriski et Green, CQR, Mars RA. La première étude réalisée par Guillemin et coll. date de 10 ans et ne comportait que deux questions. Sur 3 ans, l’observance était de 57 % la 1re année, puis elle diminuait de 25 % la 2e année et de 20 % la 3e année. Plus de 200 facteurs influençant les résultats ont été identifiés. AINS, DMARDs et biothérapies ont un taux d’observance moyen de 60 %. Si l’on considère à 1 l’observance pour la perfusion d’IFX, pour l’ETN ou le MTX elle est de 0,65 %. Sur 10 ans, le MTX a été suspendu par un malade sur 10. Les biothérapies ne sont pas exemptes de cas de non-observance. Les résultats partiels de notre étude locale, initiée pour les PR et la SPA depuis début 2013, donnent pour les traitements oraux 33 % de malades observants, et pour les SC, un taux de

43 %. Si les patients sont en rémission ou en LDA, le taux des observants, très logiquement, chute.

COMMENT PRENDRE EN CHARGE CES PATIENTS ? (Pr Thierry Schaeverbeke, Bordeaux)

La non-observance coûte cher : pour les statines, premier poste de remboursement de l’Assurance maladie, 50 % des produits prescrits sont abandonnés avant 6 mois (taux d’observance : 20 %). Il faut dépister les candidats potentiels, les évaluer et proposer des stratégies. Des facteurs liés à l’entourage (dénigrement du traitement), à la maladie (ostéoporotiques), au médecin (rythme des visites, temps passé à la consultation) peuvent être identifiés. Il existe des cas d’oubli non intentionnel, et des refus volontaires de la prise médicamenteuse. La non-observance, la dépression, la complexité de la prescription sont fortement corrélées. Certaines formulations pharmaceutiques n’aident pas (MTX à 2,5 mg). Des outils existent : les piluliers électroniques sont chers mais efficaces ; les agendas électroniques et smartphones peuvent aider. Certains systèmes permettent de dépister la prise effective de médicaments et d’autoriser ainsi leur remboursement. La manière de poser les questions est importante. Le discours et l’attitude du médecin paraissent difficiles à changer. L’éducation thérapeutique donne des résultats décevants. Le schéma traditionnel de l’ordonnance doit être abandonné au profit d’une véritable alliance médecin-malade, basée sur des échanges constructifs. n Dr Michel Bodin

195

spécial JNR 2013

Introduction

réponse oui/non. Les questions ouvertes apprécient le vécu émotionnel du traitement par le patient. Il faut « entendre le non-dit », commencer les questions par « comment ? » plutôt que « pourquoi ? », enfin, ne pas trop parler et laisser le patient s’exprimer.


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Les pathologies rachidiennes Affections microcristallines, classification et prise en charge de la douleur n La séance consacrée au rachis a connu un grand succès, témoignant de l’intérêt que les rhumatologues praticiens portent à cette pathologie. Trois exposés composaient cette session : rachis et pathologies microcristallines, phénotypage des lombalgies et prise en charge des séquelles douloureuses de chirurgie rachidienne.

Rachis et affections microcristallines

Thomas Bardin a commencé la session par une mise au point sur les relations entre rachis et pathologies microcristallines. La goutte est classiquement considérée comme rare, mais cette fréquence est peut-être sous-estimée (15 % des gouttes sévères tophacées). Le tableau clinique est variable : latence, compressions nerveuses, douleurs rachidiennes. Le scanner montre les dépôts d’urates dont la ponction radioguidée ou la chirurgie permettent d’affirmer la nature. Les cristaux calciques sont d’origine variable : cristaux d’oxalate dans l’oxalose primitive, au stade d’insuffisance rénale, dépôts de phosphates de calcium (rhumatisme apatitique, séquelles d’infiltrations de corticoïdes, ochronose, immobilisation vertébrale) ; ils peuvent être responsables de rachialgies aiguës, parfois fébriles. La chondrocalcinose a une prédominance lombaire et cervicale, pouvant toucher tous les *Département de rhumatologie, CHRU de Montpellier **Service de rhumatologie, CHU de Rennes

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Pr Francis Blotman* et Pr Gérard Chalès**

éléments anatomiques d’une vertèbre. Les calcifications discales de la chondrocalcinose s’associent souvent à une maladie de Forestier. Le syndrome de la dent couronnée peut être dû à des dépôts cervico-occipitaux de pyrophosphate de calcium (ou d’apatite). Les arthropathies destructrices y sont classiques avec, souvent, des aspects de pseudospondylodiscites. Au total, les dépôts microcristallins peuvent, lorsqu’ils sont symptomatiques, être responsables de douleurs inflammatoires rachidiennes, de compressions neurologiques et d’arthropathies destructrices.

Lombalgies et phénotypes cliniques

François Rannou, dans une conférence brillante et dense, donc difficile à résumer, a proposé un phénotypage des lombalgies pour les prendre en charge de façon plus spécifique, en dépassant le classique paradigme du modèle biopsycho-social qui leur est communément attribué. Les lésions peuvent être un élément du phénotypage : instabilité segmentaire, canal lombaire

étroit, discopathie évolutive avec remaniement de Modic, scoliose, discopathie isolée du sujet jeune avec discolyse rapide… Dans cette optique, l’IRM, les clichés dynamiques répétés pour dépister une instabilité, les clichés EOS peuvent être des bio-marqueurs pour apprécier l’effet structural des traitements. Une stratification des patients selon le risque de la chronicité peut être aussi établie : lombalgie peu grave ou risque majeur de désocialisation. Les traitements peuvent, eux-mêmes, être classés en deux groupes : spécifiques (infiltrations, renforcement des spinaux par isocinétisme, chirurgie…) et non spécifiques (lutte contre les facteurs de chronicité, travail aérobie….).

Radiculalgies postopératoires : de la physiopathologie a la prise en charge

Philippe Bertin a abordé de façon originale une entité complexe et multifactorielle : les lomboradiculalgies post-opératoires. La fréquence des patients souffrant de douleurs après chirurgie Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90


Journées nationales de rhumatologie 2013

du rachis (Failed Back Surgery Syndrom) varie entre 10 et 40 %, selon la chirurgie (fusion vertébrale > discectomie) et le nombre d’interventions chirurgicales. Les causes sont différentes selon le délai d’apparition des douleurs après la chirurgie (post-opératoire immédiat ou quelques jours, semaines, mois, années). Multiplier les imageries peut être facteur de catastrophisme. D’où la nécessité d’avoir préalablement une approche sémiologique analytique : radiculalgie prédominante, douleur neuropathique (DN4), mécanique ou mixte, composante sensorielle et/ou émotionnelle (questionnaire ANAES), critères de juge-

ment, facteurs professionnels et médico-légaux. L’approche non médicamenteuse n’a pas été abordée. Philipe Bertin a voulu essentiellement « revisiter » l’approche médicamenteuse, nous incitant à oublier les paliers de l’OMS (niveau d’efficacité des antalgiques en fonction de l’intensité de la douleur) et à classer les médicaments en fonction du mécanisme supposé de la douleur : antalgiques antinociceptifs (non opioïdes, opioïdes, cannabinoïdes), antihyperalgésiques (kétamine, antiépileptiques, néfopam), modulateurs des contrôles descendants inhibiteurs ou excitateurs (tricycliques, IRS),

modulateurs de la transmission et de la sensibilisation périphériques (anesthésiques locaux, carbamazépine, oxcarbazépine, topiramate, capsaïcine), mixtes (tramadol, tapentadol). L’évaluation thérapeutique doit être personnalisée, en soulignant que la meilleure arme reste la prévention : discuter l’indication chirurgicale, documenter les facteurs « psycho-sociaux » et prendre en charge précocement la douleur n post-opératoire.

Mots-clés : Rachis, Affections microcristallines, Lombalgies, Radiculalgies

Maladies osseuses rares Quelle prise en charge ? n

Cette session s’intéresse plus particulièrement à trois maladies : la dysplasie fibreuse, la

mastocytose osseuse et l’ostéogenèse imparfaite.

La dysplasie fibreuse (Pr Philippe Orcel, Paris)

Cette maladie rare est secondaire à une mutation protéinique induisant une activation de l’adénylcyclase et l’AMP cyclique, une prolifération excessive et un défaut de maturation des préostéoblastes. Ces cellules produisent en excès des cytokines (IL-6), avec augmentation de l’activité des ostéoclastes et de la résorption osseuse. *Rhumatologue, Griselles

Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90

Dr Michel Bodin* Une hyperproduction de phosphatonine peut entrainer un diabète phosphaté et une ostéomalacie. La peau (taches café au lait à bords déchiquetés), les glandes endocrines (puberté précoce) peuvent être touchées. Des complications ophtalmologiques, ORL et stomatologiques sont fréquentes. Une lésion osseuse isolée pose un problème de diagnostic et de bilan global. Les taches sont généralement caractéristiques en localisation (métamère) et en aspect. Une biopsie peut aider si l’imagerie

n’est pas assez explicite (lésions en fumée, atteintes soufflantes des corticales, alternance de zones lytiques et condensantes). La scintigraphie est souvent utile (disposition monomérique ou métamérique évocatrice). Les côtes sont très souvent atteintes. Le bilan d’extension et l’évaluation pronostique sont indispensables. L’approche thérapeutique passe par les antalgiques, les corticoïdes, les bisphosphonates, les traitements endocriniens et le traitement chirurgical éventuel. Plusieurs protocoles sont en cours 197


Journées nationales de rhumatologie 2013

d’essai, dont un avec le tocilizumab (TCZ).

Mastocytose osseuse (Dr Rose-Marie Javier, Strasbourg)

La mastocytose osseuse est une maladie rare (1/10 000) liée à une prolifération des mastocytes accumulés dans la peau et l’os, activés anormalement sans stimulation, et à une mutation somatique du récepteur tyrosinekinase CD117 (c-kit). Cliniquement, les manifestations transitoires de l’enfant diffèrent des atteintes de l’adulte : atteinte osseuse systémique (plus chez l’homme de 60 ans) et manifestations cutanées rougebrun : le frottement de la peau induit une réaction pseudo-allergique (turgescence, prurit). Une intolérance alimentaire, des diarrhées, une toux chronique, une fatigue, une dépression, des palpitations et des flushes doivent orienter. Les douleurs osseuses sont diffuses, liées à une ostéoporose pure et aspécifique avec des fractures éventuelles. Sur les radiographies, on constate une ostéopénie, des lésions lytiques et condensantes axiales. Une ostéoporose inexpliquée avec ou sans fracture, des

198

troubles alimentaires, des diarrhées et des lésions cutanées imposent la recherche d’une mastocytose (éventuellement biopsie, dosage de la tryptase). Des recommandations ont été établies : recherche des risques de fracture, densitométrie, bilan radiographique et biologique. Le traitement passe par les antihistaminiques de types 1 et 2, avec IPP associés. En cas d’échec, prescrire les inhibiteurs de la tyrosine-kinase. Le traitement osseux implique les bisphosphonates, associés ou non à l’interféron.

Ostéogenèse imparfaite (OI) (Pr Marie-Christine de Vernejoul, Paris)

On doit y penser devant une fragilité osseuse : trois fractures de fragilité avant 20 ans, un T-score < -2.5 peuvent suffire au diagnostic. Les sclérotiques bleues et la dentinogenèse imparfaite ne sont que des éléments d’orientation. Il n’y pas de test biologique spécifique. Depuis un siècle, sept formes d’OI ont été identifiées, en fonction de la sévérité clinique, de la taille des patients, des signes associés. Depuis 2004, dix nouveaux gènes ont été associés au

diagnostic. Il existe des formes légères (fractures nombreuses dans l’enfance, taille normale, peu de signes associés, altération du collagène I) et des formes sévères (petite taille, déformations invalidantes, scoliose et poursuite de fractures à l’âge adulte, DMO très basse, atteinte du collagène III ou IV). L’OI est associée à un taux bas de PINP et un taux d’ostéocalcine élevé (augmentation du remodelage). L’OI est également liée à des manifestations cardiaques (formes sévères) et ORL (diminution de l’audition). Il faut normaliser le calcium et la vitamine D et vérifier les conditions de vie. En cas de grossesse souhaitée, il faut prendre l’avis d’un généticien et éviter l’allaitement. Les douleurs doivent être traitées par antalgiques et surtout bisphosphonates à hautes doses. Ces traitements peuvent induire des ostéonécroses de mâchoire, voire des fractures atypiques. L’avenir passe vraisemblablement par l’utilisation des anticorps anti-sclérostine chez les enfants atteints. n

Mots-clés : Maladies osseuses rares, dysplasie fibreuse, Mastocytose osseuse, Ostéogénèse imparfaite

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Polyarthrite rhumatoïde

Des mécanismes physiopathologiques aux essais comparatifs Introduction Les découvertes sur les mécanismes intervenant dans la PR et ses traitements ont fait l’objet de ce symposium.

Pathogénie de la polyarthrite rhumatoïde (Pr Thierry Schaeverbeke, Bordeaux)

La recherche translationnelle a conduit à la découverte des anti-TNF, de l’HLA-DR, des cytokines, des médiateurs de l’inflammation, de l’IL-1, puis du TNF. Pour la SEP, il a été noté une aggravation dose-dépendante et les anti-TNF ont été abandonnés. De nouvelles cytokines (IL-1, IL-6, IL-17, IL-23) évoquent autant de cibles potentielles, mais peu débouchent sur un processus de traitement. Deux signaux successifs conduisent à l’inflammation : l’activation de la cellule présentatrice débouche sur des processus de costimulation, puis sur une stimulation du lymphocyte T et le début de l’inflammation. On peut intervenir sur le signal de costimulation et le signal d’activation, notamment avec l’abatacept. Les molécules CD80 et CD86 bloquent le processus inflammatoire ; toutefois, leur utilisation en clinique est impossible (défaillance multiviscérale chez les six premiers volontaires sains). Le lymphocyte B fabrique le facteur rhumatoïde (FR) et les anti-peptides citrullinés. Il ne produit pas d’autoanticorps, mais module l’action du lymphocyte T. Les peptides arthritogènes peuvent être modifiés par glycosylation, oxydation, carbamylation et ainsi utilisés pour une sorte de « vaccination ». Certains facteurs Rhumatos • Septembre 2011 2013 • vol. 810••numéro numéro70 90

exogènes peuvent intervenir, comme le tabac. Par ailleurs, soigner les paradontopathies améliore le résultat thérapeutique. Les Toll-like receptors (TLR) et les voies de signalisation qu’ils activent régulent la réponse immunitaire et sont autant de cibles pour des nouvelles thérapies. On sait enfin qu’il existe des bactéries pro-inflammatoires, d’autres anti-inflammatoires, et l’on peut imaginer de moduler la flore pour modifier la réponse immunitaire.

Immunogénicité et biomédicaments (Pr Philippe Goupille,Tours)

L’immunogénicité est la capacité pour une molécule étrangère (comme un biomédicament) à induire une réponse immunitaire, avec production d’anticorps anti-médicament (ADA). Tous les anticorps monoclonaux peuvent induire des ADA. Les protéines de fusion sont beaucoup moins immunogènes. Des ADA apparaissent dans deux tiers des cas dans les 6 premiers mois, chez 28 % des PR sous adalimumab. Pas d’ADA avec les protéines de fusion. Dans la SPA, 25 % des patients sous infliximab développent rapidement des anticorps (3 mois). Pas d’ADA avec abatacept SC ou IV. Parfois muette, l’immunisation induit une perte d’efficacité et des réactions secondaires lors des injections ; la clairance des biomédicaments est augmentée, l’élimination plus rapide avec une chute des concentrations sériques. Le stade de rémission ou de LDA (low disease activity) est plus difficilement atteint. La recherche des antécédents d’immunogénicité (échec d’un premier

traitement), le dépistage d’une dose trop faible (obésité ou diminution des doses), le monitoring des concentrations sériques devraient augmenter les chances d’un traitement efficace. L’association au MTX diminue l’immunisation proportionnellement à la dose administrée. Les modulations de traitement seront envisagées en fonction de ces éléments.

Essais comparatifs et face-face dans la PR (Pr Bernard Combe, Montpellier)

Les études de stratégie servent à un meilleur ciblage de chaque produit. Pour la PR, on a tendance à préférer un comparateur actif (i.e. biothérapie vs MTX). On a récemment comparé le tocilizumab (TCZ) au MTX, puis le tofacitinib (TFC) au MTX (données en cours de publication). Les biothérapies ont été comparées indirectement avec un placebo : abatacept (ABA) vs infliximab (IFX), et TFC vs ABA. Deux études comparatives directes « face-face » ont été réalisées : TCZ vs ADA et ABA vs ADA. Une non-infériorité, une efficacité supérieure, voire les deux, peuvent être recherchées. Si les critères principaux, dont le choix est primordial, ne sont pas atteints, l’étude ne peut être exploitée. Les résultats positifs de certaines études peuvent être sujets à caution : le TCZ est actif en monothérapie, l’ADA doit être coprescrit avec le MTX. Les données de tolérance sont également importantes. Pour l’étude ABA vs ADA, sur le critère principal ACR 20, la noninfériorité a été démontrée, avec à 1 an, des profils d’efficacité et de tolérance superposables. n Dr Michel Bodin

199

spécial JNR 2013

D’après un symposium organisé par le laboratoire Bristol-Myers Squibb


Journées nationales de rhumatologie 2013

Os, système nerveux et cartilage Session commune avec la Société française de biologie des tissus minéralisés (SFBTM) n Pour la première fois lors des Journées Nationales de Rhumatologie, une session a été organisé avec la SFBTM. Trois interventions ont eu lieu ayant pour thème les liens entre l’os et le système nerveux central, et l’os et le cartilage.

Nouveaux liens entre os et SNC

Interactions os et cartilage

(Dr Florent Elefteriou, USA)

(Pr Martine Cohen Solal, Paris)

Les neuropeptides et leurs récepteurs, régulant in vivo la fonction des ostéoblastes et des ostéoclastes, confirment la nature homéostatique du remodelage osseux. Le tissu osseux est sous la dépendance du système sympathique, notamment en cas de perte osseuse (ostéoporose, os tumoral) ; à l’inverse, la perturbation du système sympathique induit chez la souris un gain de masse osseuse. Les récepteurs β2adrénergiques (β2AR) sont stimulés au niveau des ostéoblastes soumis aux cortisoniques, avec, de plus, une accumulation d’AMP cyclique induite par l’isoprotérénol. Les stéroïdes favorisent la réactivité des ostéoblastes différenciés à la stimulation adrénergique par l’intermédiaire du β2AR/ RANKL. La perte osseuse induite par les corticoïdes pourrait être en relation avec une sensibilité accrue des cellules osseuses à l’effet inhibiteur des nerfs sympathiques sur la formation osseuse ou leur effet stimulant sur la résorption osseuse.

L’arthrose atteint 10 % de la population. Depuis 2006, on sait qu’il existe des interactions entre os et cartilage, ménisques, capsule et synoviale. La libération dans l’articulation de produits de dégradation, de cytokines renforçant l’activation des synoviocytes et des macrophages, conduisent à une différentiation, puis à l’apoptose des cellules. Les lésions osseuses médullaires, facteur prédictif le plus important dans la survenue de l’arthrose, rapprochent l’arthrose et l’ostéoporose. La DMO à différents sites est diminuée en cas d’arthrose. La diminution transitoire du volume osseux, l’augmentation des espaces intertrabéculaires et de l’ostéoclastogénèse précèdent un processus de reformation osseuse. L’injection d’alendronate prévient la dégradation du cartilage ; l’injection d’ostéoprotégérine évite les détériorations cartilagineuses chez la souris. In vivo, l’arthrose et la résorption osseuse ont été analysées dans l’étude KOSTAR, chez 2 438 patients de 60 ans, arthrosiques, avec un interligne de 2 à 4 mm. Un traitement de 2 ans par risédronate n’a eu aucun effet sur la douleur, ni sur

*Rhumatologue, Griselles

200

Dr Michel Bodin* l’interligne articulaire, mais il a été noté une diminution urinaire des marqueurs de dégradation du cartilage. La quantité (volume osseux) et la qualité de l’os sous-chondral (nombre et architecture des travées), la minéralisation et l’élasticité de la matrice influent sur la destruction articulaire. Le rôle des cytokines agissant sur l’os, tel le RANKL, a été mis en évidence par l’injection d’ostéoprotégérine (OPG), qui, inhibant le RANKL, diminue le remodelage osseux et prévient la dégradation du cartilage. Le rôle de l’ostéophyte a fait également l’objet de travaux. A partir de la synoviale, la réactivation des cellules souches majore la formation hypertrophique osseuse. Le système Wnt serait l’un des pivots de la régulation os/cartilage. L’activation des agonistes et antagonistes de ce système modifierait l’homéostasie du métabolisme ostéo-cartilagineux.

Effets des traitements à visée osseuse au cours de l’arthrose (Pr Francis Berenbaum, Paris)

Bisphosphonates

Le risédronate à 15 mg/j, administré pendant 1 an, améliore la douleur et la fonction de 284 arthrosiques, sans Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90


Journées nationales de rhumatologie 2013

modification de l’interligne, avec une diminution des marqueurs de résorption. L’étude KOSTAR, déjà citée, est cliniquement négative, malgré une diminution des marqueurs de dégradation. Le zolédronate, chez des arthrosiques sévères, diminue les lésions de l’os sous-chondral.

Vitamine D

Pas d’effet favorable dans une étude récente.

Ranélate de strontium

Sur plus de 1 600 patients, effet favorable sur le pincement articulaire à la dose de 1 g et 2 g, effet sur la douleur à 2 g seulement.

THS

Résultat négatif chez 1 000 patientes.

Calcitonine orale

Chez 1 000 malades, petite diminution du Womac, pas d’action sur l’interligne.

La mise au point de traitements susceptibles de passer de l’os souschondral vers le cartilage constitue une perspective d’avenir. L’identification récente du TGF-β constituerait une piste intéressante, tant pour la connaissance physiologique de l’arthrose que pour l’identification de nouvelles cibles thérapeutiques. n

Raloxifène, tériparatide, inhibiteurs de cathepsine K

Données pré-cliniques encourageantes.

Mots-clés : Os, Cartilage, Système nerveux central, arthrose

Tissu osseux et graisse Suite de la session commune réunissant rhumatologues de la SFR et chercheurs de la SFBTM n La seconde partie de cette session était consacrée aux liens unissant l’os et le tissu adipeux. Trois aspects particuliers de ce thème en plein essor ont été abordés.

Adipocytes médullaires et vieillissement osseux (Pr Pierre Marie, Paris)

La transformation adipeuse de la moelle osseuse avec le vieillissement est un phénomène naturel, connu de longue date, qui prédomine dans les diaphyses des os longs. La transformation de la moelle rouge en moelle jaune est corrélée à la perte osseuse avec l’âge. Certains *Chef du service de rhumatologie, CHU de Poitiers **Directeur de l’unité EA 4490 (physiopathologie des maladies inflammatoires osseuses), Boulogne-sur-mer

Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90

Pr Françoise Debiais* et Pr Pierre Hardouin** facteurs de transcription jouent un rôle important dans la modification de l’adipogénèse médullaire, notamment PPARγ2, qui, à partir des cellules stromales médullaires, va permettre la différenciation progressive vers l’adipogenèse, alors que RUNX2 contrôle la différenciation des mêmes cellules vers la voie ostéoblastique. Chez la souris, il a bien été montré que la stimulation de PPARγ2 (par la rosiglitazone) augmente l’adipogenèse et induit une perte osseuse et que l’expression de PPARγ2 augmente avec l’âge dans l’os.

Pourquoi PPARγ2 augmente-til avec l’âge ?

Plusieurs raisons sont évoquées. L’une des plus importantes est probablement l’accumulation des lipides oxydés, qui sont des activateurs de PPARγ2, conduisant à l’augmentation de l’adipogenèse, mais qui ont aussi un effet antiostéoblastique et inhibent la voie de signalisation Wnt. De plus il existe des variations d’hormones sexuelles, en particulier des œstrogènes, qui sont des inhibiteurs de PPARγ2 (il existe une accumulation des adipocytes chez les souris 201


Journées nationales de rhumatologie 2013

ovariectomisées) ; les œstrogènes agissent, en partie, par l’intermédiaire de facteurs de croissance tels que TGFβ. Par ailleurs, il existe une diminution progressive de TGFβ avec l’âge, le TGFβ étant un inhibiteur de PPARγ2. Des variations de signalisation liée au TGFβ, mais aussi de la voie des BMP, contribuent à augmenter la différenciation adipocytaire. L’expression d’IGF-1 diminue également avec l’âge et il y a une inhibition réciproque d’IGF-1 et de PPARγ2. Enfin, la voie Wnt est impliquée dans le contrôle de l’adipogenèse : les acteurs de la signalisation Wnt diminuent avec l’âge chez la souris et il existe une diminution importante de Wnt3a, Wnt10b, et Wnt5a. Wnt10b est une protéine qui favorise l’ostéoblastogenèse et diminue l’adipogenèse. Il existe beaucoup d’autres molécules contrôlant l’adipogenèse médullaire mais leur implication au cours du vieillissement est moins bien connue (sauf pour le cofacteur de transcription Maf ). A côté de ces facteurs, il existe un contrôle local de l’adipogenèse médullaire. Les sémaphorines, protéines produites par les ostéoblastes, agissent en favorisant la translocation de la β-caténine au niveau intracellulaire. La sémaphorine 3a inhibe la différenciation des cellules stromales en adipocytes et, chez la souris invalidée pour la sémaphorine 3a, il existe une diminution de la formation osseuse associée à une augmentation de l’adipogenèse. D’autres contrôles locaux de l’adipogenèse médullaire sont représentés par le rôle des jonctions cellulaires (certaines protéines associées à ces jonctions telles que la connexine 43 pourraient être impliquées) et par le rôle de la N-cadhérine (inhibiteur de la 202

voie Wnt, se liant à LRP5 et 6). Certaines causes extrinsèques peuvent aussi être responsables d’une augmentation de l’adipogenèse. Les glucocorticoïdes diminuent la formation osseuse et favorisent l’adipogenèse. On connaît mieux les mécanismes par lesquels les glucocorticoïdes augmentent l’adipogenèse médullaire (inhibition de facteurs tels que IGF-1, Pref-1 [Preadipocyte factor-1], inhibition de la voie Wnt en favorisant l’expression de DKK1). La diminution de l’activité physique peut également favoriser l’adipogenèse médullaire.

Peut-on prévenir l’adipogenèse médullaire au cours du vieillissement ?

Certaines cibles potentielles sont PPARγ (l’adipogenèse est réversible lors de l’utilisation chez la souris d’un inhibiteur de PPARγ), le TGFβ, la voie de signalisation Wnt. Il existe aussi quelques données concernant une diminution de l’adipogenèse médullaire avec un traitement intermittent par la parathormone, les bisphosphonates, le ranélate de strontium. Le rôle des adipokines pouvant être relarguées par les adipocytes avec l’âge reste à déterminer.

Obésité et fractures (Pr Christian Roux, Paris)

L’obésité a longtemps été considérée comme protectrice visà-vis du risque fracturaire. En réalité, des études épidémiologiques récentes indiquent que des fractures surviennent fréquemment chez des sujets obèses. Dans l’étude GLOW, cohorte de 44 534 femmes âgées de 55 ans ou plus, 23,4 % avaient un IMC supérieur ou égal à 30. La prévalence et l’incidence des fractures

non traumatiques à 2 ans était la même que chez les sujets ayant un IMC normal. Chez l’homme, dans la cohorte MrOS, le risque de fractures non vertébrales est également augmenté chez les sujets obèses. Les fractures retrouvées chez les patients obèses touchent surtout certains sites, tels que l’extrémité supérieure de l’humérus ou la zone sous-trochantérienne, alors que les autres fractures de hanche ou les fractures du poignet sont moins fréquemment rencontrées. Il se peut qu’il existe des différences en fonction de la répartition de la graisse, des comorbidités associées, de la capacité de mobilité en fonction de l’obésité. Les sujets obèses et fracturés ont souvent une densité minérale osseuse (DMO) normale ou élevée. L’existence d’une DMO basse dans cette population justifie un bilan étiologique complet et certainement un traitement. Chez le sujet non obèse, la perte de poids est un facteur de risque ostéoporotique et de fracture, contrairement à la perte de poids observée chez le sujet obèse. Existe-t-il une interaction entre l’IMC et le traitement ? L’impact de l’IMC a été étudié dans trois études. Avec le clodronate, il n’a pas été retrouvé d’effet anti-fracturaire du bisphosphonate chez les sujets obèses. Il n’y avait, par contre, pas d’interaction entre l’IMC des sujets et le bénéfice anti-fracturaire de patients traités par le ranélate de strontium. En ce qui concerne le dénosumab, le bénéfice anti-fracturaire était perdu pour les fractures non vertébrales chez les sujets à IMC élevé, mais persistait pour les fractures vertébrales. L’obésité ne protège donc pas de toutes les fractures. Le plus souvent la DMO ne sera pas abaisRhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90


Journées nationales de rhumatologie 2013

sée. Il n’existe pas actuellement d’argument pour mettre en route un traitement en cas de DMO normale.

Tissu osseux - tissu adipeux et anorexie mentale (Pr Bernard Cortet, Lille)

Un retentissement osseux est connu au cours de l’anorexie mentale (AM). Le tissu adipeux pourrait jouer un rôle important au cours de cette affection. Chez les jeunes femmes atteintes d’AM, la maigreur corporelle contraste avec une augmentation de l’adiposité médullaire osseuse. Cette augmentation de la graisse intraosseuse peut être objectivée par

IRM classique ou par spectroscopie IRM et une corrélation inverse est observée entre l’adiposité intra-osseuse et la DMO. Chez ces patientes, on observe des perturbations des taux sériques d’adipokines, avec notamment une diminution de la leptine et une augmentation des taux d’adiponectine. Il existe une corrélation au cours de l’AM entre leptine et DMO, particulièrement au niveau de l’extrémité supérieure du fémur. On constate également une augmentation de Pref-1, protéine de la superfamille de l’EGF (Epidermal growth factor) libérée par les précurseurs mésenchymateux et par les préadipocytes. Les patientes ayant une anorexie active sont celles dont les taux de Pref-1

sont les plus élevés. Celles ayant eu une AM guérie ont des taux comparables au groupe témoin. Il existe une relation inverse entre les taux de Pref-1 et la DMO. Par ailleurs il existe peu de données concernant l’axe IGF-1/GH au cours de l’AM. Toutes ces anomalies sont susceptibles de participer à la perte osseuse, mais d’autres données sont nécessaires pour savoir si ces éléments expliquent l’augmentation du risque de fractures au cours de cette affection. n

Mots-clés : Os, Tissu adipeux, Adypocytes médullaires, Obésité, Fractures, Anorexie mentale

Maladies de surcharge Quand y penser en rhumatologie ? n Le Pr Thierry Schaeverbeke (Bordeaux) a fait une présentation des maladies de surcharge et a indiqué les principales circonstances qui évoquent ce type de maladies en rhumatologie.

L

es maladies de surcharge, ou thésaurismoses, sont caractérisées par l’accumulation intracellulaire d’une molécule non dégradée en raison d’un déficit enzymatique. La surcharge cellulaire peut être lysosomiale, comme dans la maladie de Gaucher ou de Fabry, avec une accumulation des métabolites dans les *Chef du service de rhumatologie, CHU de Rennes

Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90

Pr Aleth Perdriger* macrophages ; il peut s’agir d’une glycogénose, avec une accumulation du glycogène dans le foie et les muscles. Le squelette est le plus souvent concerné dans les maladies de surcharge, car les cellules qui stockent le substrat non dégradable s’accumulent dans la moelle. Il s’agit de maladies génétiques rares, qui sont le plus souvent diagnostiquées dans l’enfance. Cependant,

certaines de ces maladies de surcharge ne s’expriment qu’à l’âge adulte, notamment les formes modérées, qui sont largement sous diagnostiquées. Il est certainement illusoire pour un rhumatologue d’espérer connaître l’ensemble de ces maladies. Par contre, il doit retenir les éléments simples qui permettent de poser la question de l’existence d’une maladie de surcharge et d’en faire le 203


Journées nationales de rhumatologie 2013

diagnostic. Cela est d’autant plus important qu’un certain nombre de ces maladies sont accessibles à une enzymothérapie substitutive susceptible de bouleverser le pronostic de l’affection. Les grands signes d’appel sont rappelés fig. 1. Vous évoquez une maladie de surcharge ? Listez les symptômes de façon rigoureuse et discutezen avec un centre de référence qui se chargera des dosages. Par exemple, Pr Thierry Levade (Laboratoire de biochimie, CHU de Toulouse, Hôpital Purpan, 05 67 69 03 76).

thésaurismoses lysosomiales

Les thésaurismoses lysosomiales sont des maladies génétiques, le plus souvent autosomales récessives, comme la maladie de Gaucher.

MAladie de gaucher

La maladie de Gaucher est un déficit en β-glucocérébrosidase. Le début est le plus souvent précoce, mais une découverte chez un adulte de moins de 50 ans reste possible. Le diagnostic doit être évoqué devant une histoire familiale et des manifestations qui touchent les organes infiltrés, l’os et les articulations, le foie, la rate. Les manifestations osseuses sont de deux types : dysmorphisme et douleurs. Le dysmorphisme n’est pas limité au squelette, mais les atteintes osseuses peuvent être évocatrices du diagnostic, avec une petite taille, une bradymétacarpie, une dysplasie spondylo-épiphysaire, un élargissement de la partie distale du fémur. L’atteinte osseuse peut se manifester par des ostéonécroses osseuses aseptiques, souvent multiples, des infarctus osseux et/ou une ostéopénie, avec fractures osseuses possibles. La radio204

Figure 1 - Les signes d’appel pour le rhumatologue Signes osseux

Troubles de la croisance : • petite taille ; • dysmorphisme. Dysplasie spondylo-épiphysaire Douleurs osseuses Ostéonécrose

Signes viscéraux

Hépatomégalie Splénomégalie

Éventuellement

Une histoire familiale

Et, selon les cas

Signes neurologiques Signes musculaires Signes cardiaques Signes sensoriels Signes cutanés

graphie fait le diagnostic. L’IRM peut être utile pour confirmer les atteintes osseuses et montrer un infiltrat pathologique du tissu graisseux médullaire. Les atteintes non osseuses concernent essentiellement le foie et la rate, avec une hépatomégalie, une splénomégalie et, plus tardivement, une cirrhose, une hypertension portale ou un hypersplénisme avec ses conséquences sur la numération formule sanguine. Les atteintes neurologiques sont possibles.

Maladie de fabry

La maladie de Fabry est plus rare. C’est une maladie héréditaire liée à l’X, qui se traduit par un déficit en α-galactosidase. Les symptômes cliniques associent aux manifestations ostéo-articulaires des maladies de surcharge, des anomalies de la conduction cardiaque, des troubles sensoriels avec dysplasie cornéenne, des manifestations neurologiques, digestives ou rénales.

maladie de farber

La maladie de Farber, lipogranulomatose liée à un déficit en céramidase acide lysosomiale, se manifeste par l’apparition

précoce, dès les premiers mois de la vie, d’anomalies ostéoarticulaires, associées à des nodules sous-cutanés périarticulaires.

maladie de niemann-pick

La maladie de Niemann-Pick, dont les déficits enzymatiques conduisent à une accumulation de sphingomyéline, se manifeste par une hépatosplénomégalie et une atteinte neurologique plus ou moins sévère.

LE diagnostic des thésaurismoses lysosomiales

Le diagnostic est évoqué sur la clinique et la radiologie ostéo-articulaire, complétées par l’IRM qui permet de caractériser les dysplasies, l’infiltrat graisseux, les images de déminéralisation, d’infarctus ou de nécroses. Le myélogramme ou une biopsie ostéo-médullaire permettent de rechercher une surcharge cellulaire, comme les cellules de Gaucher, grosses cellules macrophagiques au cytoplasme plissé, qui contiennent des inclusions lysosomales constituées de glucosylcéramide. Un déficit de l’activité enzymatique est recherRhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90


Journées nationales de rhumatologie 2013

ché à partir d’un prélèvement de leucocytes circulants, ou sur des fibroblastes obtenus par une biopsie cutanée. Le traitement repose sur des enzymes de substitution, disponibles pour la maladie de Gaucher (l’imiglucérase) ou la maladie de Fabry (l’agalsidase-α et l’agalsidase-β). Leurs coûts sont très élevés. L’indication des traitements de substitution doit être posée par un centre de compétence. En l’absence d’enzyme de substitution, le seul traitement spécifique est la greffe osseuse.

Glycogénoses

Les glycogénoses représentent

plusieurs entités cliniques hétérogènes, qui se caractérisent par des déficits enzymatiques qui conduisent à une accumulation de glycogène. Il existe trois grands types de glycogénoses : les formes hépatiques, avec hypoglycémie et hépatomégalie, comme le déficit en glucose-6-phosphatase ; les formes musculaires, avec un déficit musculaire et des complications cardio-respiratoires, comme le déficit en phosphorylase musculaire (maladie de Mc Ardle) ; et les formes mutiviscérales, comme le déficit en maltase acide (maladie de Pompe), avec des manifestations très hétérogènes touchant le cerveau les muscles, le cœur et le foie. Les

manifestations cardiomusculaires restent prédominantes. Le diagnostic repose sur la clinique, l’élévation des CPK et un tracé myogène sur l’électromyogramme. Il existe peu de traitement spécifique actuellement pour les glycogénoses. Le développement des enzymes n de substitution est en cours.

Mots-clés : Maladie de surchage, Lysosome, Maladie de Gaucher, Maladie de Fabry, Maladie de Farber, Maladie de Niemann-Pick, Glycogénoses


Journées nationales de rhumatologie 2013

Spondyloarthrite Qu’est-ce qui change ? D’après un symposium organisé par le laboratoire Pfizer

Introduction Ce symposium, organisé par le laboratoire Pfizer, était entièrement consacré aux spondylarthrites, autour de trois thèmes : les différentes formes, l’apport de l’IRM dans le diagnostic et le lien entre la maladie et l’ostéoporose.

Spondyloarthrites : un nouveau nom, des concepts nouveaux ? (Pr Pascal Claudepierre, Créteil)

Le terme de spondyloarthrites recouvre plusieurs entités : la spondyloarthrite radiographique (aussi appelée SPA) et la non radiographique qui regroupe toutes les autres. Trois études ont comparé les formes radiographiques (RX) et les non radiographiques (non RX). Les points divergents entre les 2 formes sont modestes : dans les non RX, il y a moins d’hommes, un indice fonctionnel meilleur, une CRP moins élevée et un score d’ossification moins sévère. Dans les formes RX, il existe sur l’IRM un taux supérieur de lésions inflammatoires. A partir de la cohorte DESIR, une analyse sur 474 patients ne montre pas de différence significative sur les paramètres évoqués. La proportion des patients chez lesquels le stade non RX est définitif est de 20 % à 10 ans. La présence de lésions RX ne fait plus partie des critères d’éligibilité pour les anti-TNFα. Mais ces traitements sont-ils actifs dans les formes non RX ? L’étanercept donne les mêmes résultats dans les deux groupes de patients. L’adalimumab est plus efficace lorsque la 206

CRP est plus élevée. Avec le certolizumab, la proportion de répondeurs est identique.

tement, celle-ci étant directement proportionnelle à l’importance des lésions inflammatoires.

IRM dans la spondyloarthrite : quoi de neuf ?

Spondyloarthrite et ostéoporose

(Pr Corinne Miceli,Le Kremlin-Bicêtre)

L’IRM est essentielle comme critère de diagnostic et comme facteur prédictif de réponse au traitement. Les rachialgies inflammatoires orientent directement vers le diagnostic mais, même à partir de rachialgies non inflammatoires, on peut rechercher les critères ASAS. L’IRM prend en compte les lésions inflammatoires (œdème souschondral à deux endroits différents), mais non les anomalies structurales, ni les anomalies conjointes du rachis et des sacro-iliaques, ce qui empêche d’évaluer le patient dans sa globalité. Autres limites : la fréquence de faux positifs, d’où l’importance d’apprécier le niveau d’inflammation. Elle permet d’éliminer les diagnostics différentiels : simples fessalgies ou images dégénératives. Le taux de patients avec des lésions rachidiennes évocatrices, sans atteinte des sacro-iliaques, varie de 5 à 10 %. Dans la cohorte DESIR, sur l’IRM des patients douloureux, 46 % ont une atteinte des sacro-iliaques, 20 % des atteintes thoraciques ou lombaires, avec une bonne corrélation entre les douleurs et les atteintes RX. L’IRM permet d’apprécier les résultats des biothérapies (plusieurs études sur dix ans avec ETN et ADA, contrôlées par le score de SPARRC). Elle autorise enfin une prédiction de la réponse au trai-

(Pr Christian Roux, Paris)

La SPA, peu érosive, s’accompagne d’ostéoporose, de processus ostéoformateurs et de majoration du risque de fracture vertébrale (3 à 6 fois plus élevé selon les études). La prise d’AINS aurait un effet préventif de la survenue de ces fractures, mais sans incidence sur le risque de fracture périphérique. La colonne bambou, hyperfragile, facilement fracturée (pratiquement disparue), est différente des déformations des corps vertébraux pouvant simuler un tassement. Selon la cohorte DESIR, la DMO est normale au moment du diagnostic. Toutefois, certains sujets jeunes ont une DMO basse (sexe masculin, VS élevée, œdème osseux sur l’IRM du rachis). Ceci constitue un facteur de risque de DMO basse au fémur. Sur les modèles animaux, la raréfaction osseuse, sans trouble de la minéralisation, a été démontrée. Il existe une augmentation du RANKL et de l’inflammation. Sous l’effet de IL-17 et IL-23, sont libérées un certain nombre de cytokines, notamment au niveau de l’enthèse. Les anticorps anti-CCP, présents dans la SPA, augmenteraient le processus d’ostéoclastogenèse, tout comme dans la PR. L’introduction d’un anti-TNF réduit la résorption osseuse de 50 % et augmente la DMO, en moyenne de 12 % en 6 ans, indépendamment de la présence ou non de syndesmophytes. n Dr Michel Bodin Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90


Journées nationales de rhumatologie 2013

Os tumoral Physiopathologie et traitements n La session consacrée à l’os tumoral a abordé la physiopathologie des métastases osseuses, les traitements et s’est intéressée au cas des ostéonécroses de la mâchoire.

Physiopathologie des métastases osseuses (Pr Philippe Clézardin, Lyon)

Les interrelations sont multiples entre cellules cancéreuses, cellules osseuses, cellules de l’environnement et du stroma médullaire. La compréhension de ces phénomènes peut permettre de dégager des facteurs pronostiques dans l’évolution du cancer et de synthétiser des thérapies ciblées à même d’inhiber indirectement la prolifération de cellules cancéreuses et annihiler leurs conséquences sur le remodelage osseux.

Premier processus à comprendre

Pourquoi certaines cellules cancéreuses ont un tropisme pour l’os ou plutôt pour la moelle osseuse ? Si devant un cancer primitif, on cherche des cellules DTC (cellules tumorales disséminées), leur découverte est un facteur de mauvais pronostic dans l’évolution du cancer. Elles peuvent rester très longtemps quiescentes dans la moelle osseuse puis proliférer en développant des métastases plusieurs années après. Le premier mécanisme de colonisation de la moelle est lié au fait que ces cellules cancéreuses puissent traver-

*Centre de rhumatologie, CHU de Toulouse

Rhumatos • Septembre 2013 • vol. 10 • numéro 90

Pr Michel Laroche*

ser les parois vasculaires. La sécrétion de métalloprotéases est impliquée. La sécrétion d’EGF agissant sur un récepteur propre (EGFr) peut stimuler le système RANK-RANKL et agir sur les cellules osseuses. EGF et son récepteur sont aussi impliqués dans la croissance tumorale. Le système CXCR4/CXCL12 intervient également dans la prolifération des cellules cancéreuses dans la moelle hématopoïétique. Il s’agit de chémokines pro-inflammatoires impliquées dans l’adhésion cellulaire. La voie SLIT/ ROBO et les récepteurs ROBO4 et ROBO1, qui interviennent sur le complexe β-caténine, sont eux aussi impliqués. Les cellules cancéreuses expriment ROBO4 et ROBO1 : si l’on inhibe ROBO1 la tumeur prolifère, lorsqu’on invalide ROBO4 la tumeur diminue. Ce système intervient précocement dans l’invasion de la moelle et la survie des cellules tumorales. L’intégrine intervient aussi et actuellement des anticorps antiintégrine sont en cours d’expérimentation clinique.

tion à l’environnement par sécrétion de certaines substances dont les cathepsines et les connexines. Le passage de la cellule « dormante » à la cellule proliférante implique VCAM 1.

Deuxième mécanisme à élucider

Les métastases osseuses peuvent entraîner des douleurs, des compressions médullaires ou neurologiques, des fractures et une hypercalcémie. La prise en charge des métastases osseuses repose obligatoirement sur des réunions multi-

Pourquoi les cellules cancéreuses restent quiescentes puis engendrent des métastases osseuses ? Il existe un phénomène d’adapta-

Dernier mécanisme à résoudre

La prolifération de cellules cancéreuses va enfin entraîner des modifications du remodelage osseux, créant la métastase proprement dite : les cellules cancéreuses pourront sécréter du PTHrP, des prostaglandines, certaines cytokines comme M-CSF ou GM-CSF qui stimulent les ostéoclastes. Les cellules néoplasiques sont aussi capables d’inhiber les ostéoblastes en intervenant sur la voie de la protéine Wnt par sécrétion de DKK1, de sclérostine, d’activine A qui est un antiTGF. La sécrétion par les cellules cancéreuses de VEGF permet, de plus, la prolifération de vaisseaux qui nourriront ces cellules.

TRAITEMeNt des métastases osseuses (Pr Françoise Debiais, Poitiers)

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Journées nationales de rhumatologie 2013

disciplinaires faisant intervenir rhumatologues, oncologues, radiologues, chirurgiens et radiothérapeutes. L’utilisation d’inhibiteur de la résorption osseuse dans les métastases osseuses se justifie par la stimulation fréquente par les cellules cancéreuses des ostéoclastes. Les interrelations des cellules osseuses entre elles et la prolifération de cellules cancéreuses pourraient laisser envisager une action indirecte de ces inhibiteurs sur l’ostéoblaste ou sur la prolifération néoplasique.

ACTION CLINIQUE sur les métastases osseuses des bisphosphonates

Une revue Cochrane fait état d’une diminution globale des « accidents osseux » secondaires aux métastases sous biphosphonates (BP) de -15 %. Si l’on considère uniquement les métastases ostéolytiques et le zolédronate, la diminution est de -30 %. Il n’existe aucune action bénéfique sur la survie des patients. Dans le cancer du sein, une étude de non-infériorité montre que le dénosumab à 120 mg en souscutané toutes les 4 semaines est supérieur au zolédronate pour prévenir le premier accident osseux (HR = 0,82). Idem dans le cancer de prostate (HR = 0,82). Dans les autres cancers le dénosumab n’est pas supérieur au zolédronate. Des effets secondaires sont rapportés chez 29 % des malades sous dénosumab et chez 33 % des patients sous zolédronate. Pour le cancer du sein, les BP sont recommandés en prévention secondaire et non en prévention primaire. Le dénosumab peut être une alternative ou un recours en cas d’échec. Selon les recommandations 2013, dans le cancer de la prostate hormono-résistant, il est préconisé d’utiliser le zolédronate ou le dénosumab. 208

En cas d’insuffisance rénale et de possible toxicité du zolédronate, le dénosumab ou l’ibandronate doivent être utilisés. Les autres effets secondaires des BP sont : l’hypocalcémie, le plus souvent asymptomatique, et les fractures diaphysaires atypiques, très rares chez les cancéreux dont la survie est courte. Les questions non résolues, pour l’instant, concernant ces inhibiteurs de la résorption sont : • quelle est la durée du traitement ? • faut-il utiliser des marqueurs du remodelage osseux pour adapter le traitement à l’évolution ? • ces traitements sont-ils utiles en prévention primaire ? Une revue Cochrane récente ne permet pas d’objectiver une action favorable des BP en prévention primaire des métastases sauf dans le cancer du sein dans un sous-groupe de femmes ménopausées.

ostéonécrose de la mâchoire (Pr Marie-Hélène Vieillard, Lille)

Il faut d’abord rappeler que les ostéonécroses de la mâchoire (ONM) existaient en dehors des traitements par BP ou dénosumab et sont favorisés par l’infection, les traumatismes, la prise de corticoïdes, un mauvais état dentaire et l’alcoolotabagisme. En cas d’ONM imputables aux BP, il s’agit dans 98 % des cas de BP utilisés pour traiter les métastases osseuses ou le myélome. Il n’y a pas de cas décrit avec le clodronate. La chirurgie dentaire augmente le risque mais certaines ostéonécroses ont pu survenir chez des patients édentés depuis plusieurs années. L’incidence, d’après les méta-analyses, est de 1 % lorsque les amino-biphosphonates sont donnés dans le cas de métastases osseuses et

1 pour 10 000 à 100 000 lors de leur administration dans l’ostéoporose. Il existe des biais quant à l’évaluation de ces incidences du fait des ostéonécroses non déclarées ou de faux diagnostics positifs. La définition de l’ostéonécrose de la mâchoire est la mise à nu de l’os maxillaire depuis au moins 8 semaines en zone non irradiée.

physiopathologie

Les BP ont une action inhibitrice sur le remodelage osseux qui pourrait favoriser l’ostéonécrose en inhibant les cellules ostéoblastiques. Ils ont aussi un effet antiangiogénique, démontré pour le zolédronate, et il existe probablement une action sur les parties molles, en particulier l’inhibition des kératinocytes, potentiellement néfaste. En ce qui concerne l’imagerie, la zone osseuse paraît ostéo-condensée avec un double contour et des appositions périostées. Sur le plan biologique, l’utilisation des marqueurs du remodelage osseux pour prédire la survenue d’ONM n’est pas recommandée pour l’instant. Le traitement va être tout d’abord préventif avec l’exérèse des foyers dentaires potentiels d’infection avant le début du traitement par BP. Lorsque l’ostéonécrose est survenue, il faut prescrire une antibiothérapie continue, des bains de bouche et une chirurgie avec exérèse des séquestres peut être indiquée. Les traitements par ozone, laser infrarouge, caisson hyperbare, tériparatide pourraient avoir un effet favorable. Si une corticothérapie est associée, il faut si possible l’arrêter. n

Mots-clés : Os, Tumeur, Métastases, Bisphosphonates, Ostéonécrose de la mâchoire

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