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LA FORCE DE LA RÉSILIENCE Chère lectrice, cher lecteur,

ACTION DE CARÊME N° 4 | 2014 Des pétitions qui portent leurs fruits Les deux pétitions lancées par Action de Carême, l’une aux CFF, l’autre dans le cadre de la coalition « Droit sans frontières», portent leurs fruits. Page 2 Anne Seydoux-Christe contre Ecopop Nouvelle membre du Conseil de fondation d’Action de Carême, Anne Seydoux-Christe votera non à l’initiative Ecopop. Page 7 Les Défis du Jubilé Retour sur la 9e édition de la course organisée par l’Abbaye de St-Maurice. Page 8

Lorsque je pense aux Philippines, je pense à un pays dévasté par le typhon Haiyan. Action de Carême y soutient des communautés locales depuis les années de la dictature Marcos. Nous avons établi des partenariats, accompagné des projets pour que la population puisse vivre dans des conditions dignes, se nourrir en suffisance et durablement ; nous avons appris de leur détermination, de leur culture, de leur foi vibrante. Lors de la catastrophe du typhon Haiyan, le travail de nos partenaires a permis de limiter les dégâts immédiats. Notre action lors de cette crise a servi à renforcer les capacités de réaction déjà présentes sur place. En visant à anticiper les situations de crises, en construisant des compétences de gestion des risques sur plusieurs années, ces projets sauvent des vies. A Pâques, Action de Carême a reçu cinq Philippins, responsables de projets que nous soutenons, pour témoigner de leur réalité. Pour eux, la foi est un appel à se mettre au service de la communauté et du plus faible. Dans les conditions de ce pays, cet appel est exigeant. Désormais, lorsque je pense aux Philippines, je pense au pays du courage, de la foi qui soulève les montagnes, de la persévérance qui sauve des vies. Soutenons ensemble ce mouvement plein d’espoir !

Christelle Devanthéry, membre de la direction


Vue du Sud

Le décès de Jean-Claude Duvalier était inattendu. Les questions de sa présence dans le pays, le procès qui est en cours contre lui, et des funérailles à lui réserver se sont posées. D’autres questions se posent : comment un pays assume-t-il son passé? Comment sont traitées les victimes d’abus des droits humains? Est-ce que le pays continuera à tolérer l’impunité et la corruption? Quelles sont finalement les valeurs qu’on veut transmettre aux nouvelles générations? Le déni de l’Etat de droit, en dépit des aspirations de tout un peuple, ne s’est pas arrêté le 7 février 1987, date où Duvallier a laissé le pouvoir. On ne saurait oublier la brutalité du régime militaire qui a succédé à Duvalier, les premières élections avortées de 1987, les dérives du régime du président Aristide ou encore du refus des Présidents Préval et Martelly d’appliquer la Constitution dans son intégralité. La lutte contre l’impunité et la corruption est capitale : une personne responsable doit rendre compte de ses actes. La participation citoyenne et la société civile doivent être mieux structurées et renforcées : même de « bons projets » ne peuvent pas être imposés. La justice doit être indépendante, proche des gens et ressentie comme un service public à la gestion des conflits. La lutte contre la pauvreté exige la justice sociale. La vie politique également exige des partis politiques forts afin de résister à toute velléité dictatoriale. Père Jan Hanssens, Justice & Paix Haïti

CFF : VERS PLUS DE DURABILITÉ Succès pour la pétition lancée dans le cadre de la campagne de carême : s’ils n’adhèrent certes pas à la Fair Wear Foundation, les CFF en reconnaissent du moins les exigences. Ils entendent faire davantage attention aux conditions de travail et aux critères sociaux pour l’achat d’uniformes.

Des employés CFF portant des uniformes équitables : le but de la pétition lancée par Action de Carême avec Pain pour le prochain et Etre partenaires, signée par 18 000 personnes, devient de plus en plus réalité. « Les membres de la Fair Wear Foundation (FWF) pourront désormais répondre aux appels d’offres des CFF pour l’achat de vêtements de travail, sans devoir adhérer au code de conduite BSCI, ni se soumettre à son contrôle », explique Erica van Doorn, directrice de la FWF. « Il s’agit d’un premier pas dans la bonne direction. » La BSCI (Business Social Compliance Initiative) appartient aux marques de mode et aux grossistes du secteur du textile. Les CFF en sont membres. Ceux-ci s’engagent à exiger de leurs fournisseurs le respect de normes minimales en matière de conditions de travail et de salaires. Néanmoins, il n’y a pas de contrôle indépendant. La FWF applique des critères plus stricts et associe aux contrôles les entreprises, le personnel et les syndicats sur un pied d’égalité. Les trois organisations estiment que cette approche multipartite garantit bien mieux que les normes sociales de production sont vraiment respectées chez les fournisseurs et les usines des marques.

Patrick Renz (Action de Carême) et Miges Baumann (Pain pour le prochain) lors de la remise de la pétition aux CFF.

Plus de poids pour les standards écologiques et sociaux Du côté des CFF, Jacqueline Klaiss Brons, responsable des achats chez les CFF, a assuré par ailleurs que l’entreprise continuerait, dans ses processus d’acquisition, de tenir compte des bonnes pratiques. C’està-dire de se fournir auprès des fournisseurs appliquant les normes les plus élevées. Les CFF ont le souhait d’œuvrer au sein de la BSCI à l’amélioration des contrôles et de leur qualité. Action de Carême s’engage pour que le secteur des marchés publics prenne en compte non seulement des critères économiques, mais aussi des normes sociales et écologiques minimales.

COUP DOUBLE À BERNE Succès de la pétition « Droit sans frontières » : les Chambres fédérales examinent durant la session d’hiver deux objets en lien avec nos revendications.

En septembre, la Commission de politique extérieure du Conseil national a transmis une motion qui exige l’introduction des mécanismes de diligence en matière de droits humains et d’environnement. Sans doute le plus grand succès jusqu’ici de la pétition lancée en 2012 par Action de Carême

et d’autres ONG dans le cadre de la coalition « Droit sans frontières ». L’inscription de cette obligation dans la loi n’est toutefois pas encore acquise. Par ailleurs, le Conseil des États examinera un postulat qui demande l’élaboration d’un rapport sur les mécanismes de réparation ouverts aux personnes dont les droits ont été bafoués. La deuxième exigence de la pétition est ainsi, elle aussi, à l’ordre du jour. Daniel Hostettler

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TRAGÉDIE AU PAYS DE NULLE PART Dans une Afrique du Sud qui se plaît à se présenter comme une nation en plein essor, Action de Carême aide les laissés-pour-compte à se faire entendre. À l’image des proches des victimes d’un accident dans une mine, que les responsables auraient préféré oublier depuis longtemps.

Kleinsee, une région désertique de la province du Cap-Nord : seuls les animaux et quelques plantes y survivent. La monotonie n’est brisée que par les vestiges d’une mine abandonnée et par un monument commémoratif. Il se dresse au milieu de nulle part. Sur le terrain de la mine de diamants abandonnée de Bontekoe, où dix hommes ont péri le 22 mai 2012, le sable recouvre tout. L’entreprise a comblé le site, bien avant qu’une enquête puisse être menée. Aujourd’hui, c’est le brouillard qui empêche le soleil d’éclairer l’endroit. Dans une tentative désespérée de subvenir aux besoins de leurs familles, ces hommes étaient à la recherche de diamants. Même si la mine était officiellement fermée. Bien que la loi le prescrive, le gouvernement n’a jamais mis en place de commission d’enquête. Beaucoup se sont demandé ce que les victimes allaient faire dans la mine. Mais pratiquement aucune voix ne s’est élevée contre l’entreprise, qui a abandonné une communauté à son sort après en avoir détruit les terres. La richesse qu’elle en

Le chiffre

11 000 C’est le nombre de personnes qui ont pu bénéficier de l’aide d’urgence apportée par les partenaires d’Action de Carême aux Philippines il y a exactement une année, après le passage du typhon Haiyan. Trois semaines après la catastrophe, 2227 familles ont reçu des kits de première urgence, de quoi reconstruire leur maison et des nouvelles semences pour leurs champs. actiondecareme.ch/ philippines

a retirée n’a pas contribué au développement de la région. L’inauguration du monument est émouvante : les orateurs insistent sur l’angoisse dans laquelle vit la communauté. Cet accident ne s’est pas produit en vain : après la tragédie de Bontekoe, une campagne en faveur de la justice dans le secteur minier a été lancée par des victimes de catastrophes similaires. Depuis cette catastrophe, un réseau de cinq organisations partenaires d’Action de Carême apporte son soutien aux proches. En 2013, la campagne a

exigé du gouvernement la réalisation d’une enquête en bonne et due forme. Elle a demandé aux services de l’État d’assumer leur responsabilité dans le domaine de la sécurisation des mines, pour que les paysans puissent cultiver leurs terres. Seuls les proches des victimes, des employés des cinq partenaires d’Action de Carême et un représentant de la communauté assistent à la cérémonie. La tragédie restera gravée dans leur mémoire. Quelques femmes me disent qu’elles ont beaucoup apprécié ma présence. J’en suis touchée et me sens honorée de représenter une organisation qui prend le parti des opprimés. Daniela Gennrich, programme Afrique du Sud

L’Etat doit prendre au sérieux la remise en état : entrée de la mine.

GRAND ÉCHO POUR L’ÉTHIQUE Du sang dans nos téléphones portables : notre classement éthique a suscité un énorme intérêt.

Action de Carême et Pain pour le prochain ont analysé la performance des dix plus grandes marques de l’électronique quant aux droits du travail, l’environnement et les minerais des conflits. Notre message est bien passé. Nous avons distribué 22 000 mini-guides au format carte de crédit dans les gares et 200 exemplaires aux députés et députées durant la session d’automne des Chambres fédérales.

Sur le Net, les « confessions » des téléphones portables ont été entendues 8200 fois. L’écho dans la presse a aussi été retentissant : le téléjournal, la radio RTS et les grands quotidiens ont abordé le sujet. La moitié des fabricants a affirmé comprendre notre cause, sans pour autant faire de concessions. Par téléphone, courriel ou sur les réseaux sociaux, de nombreux consommateurs se sont montrés préoccupés, mais aussi désireux de s’engager et d’en savoir plus sur le Fairphone. Daniela Renaud

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Trois questions à…

Anne Seydoux-Christe, Conseillère aux Etats JU

La population sera appelée prochainement à voter sur l’initiative Ecopop. Qu’allez-vous voter ? Je voterai non. Elle a pour objectif la préservation durable des ressources naturelles, en limitant de manière rigide l’immigration en Suisse et en exigeant qu’au moins 10 % des moyens alloués à la coopération au développement suisse soient affectés à encourager la planification familiale volontaire. Cette initiative menace nos relations avec l’UE. Par ailleurs, c’est en investissant dans la formation, la santé, l’emploi et la sécurité sociale, plutôt que dans la planification familiale, qu’on verra un recul du taux de natalité dans les pays en développement. Vous avez rejoint il y a peu notre Conseil de fondation. Pourquoi ? J’ai participé à plusieurs voyages d’information sur des projets menés par la Confédération ou des ONG. Je suis totalement convaincue de la nécessité et de l’utilité de ces projets pour améliorer le bien-être des populations concernées. Je suis aussi impressionnée par l’engagement des personnes sur le terrain. Comment vous engagez-vous pour un monde plus juste ? Je suis engagée dans différentes associations dans les domaines social et culturel. Comme parlementaire, je me suis engagée pour le respect des droits humains, en faveur de la campagne « Droit sans frontières » et pour l’augmentation du budget de la coopération au développement.


Clin d’œil

De l’or équitable

Agenda

La Suisse raffine près de 70 % de la production mondiale d’or. Aux quatre coins de la planète, plus de 100 millions de personnes vivent de l’exploitation de mines à petite échelle. Max Havelaar a lancé l’or équitable sur le marché suisse, qui prend en compte des critères sociaux et environnementaux. actiondecareme/or_equitable

22 novembre, Clarens : « Action partage » – Soirée solidarité dans le cadre du jubilé de l’Eglise catholique dans le canton de Vaud (19, Eglise Sainte Thérèse, Vinet 34) cath-vd.ch

Un nouveau magazine ! Après 32 numéros, le magazine INFO prend fin. Dès l’année prochaine, Action de Carême éditera un nouveau magazine, en collaboration avec Pain pour le prochain. Plus étoffé, ce nouveau magazine continuera à présenter le travail d’Action de Carême. Un second cahier approfondira à chaque fois une thématique et proposera des pistes d’action.

DU COEUR ET DE L’ENTRAIDE En vue des célébrations de ses 1500 ans, l’Abbaye de Saint Maurice organise chaque année les Défis du Jubilé. Le 11 octobre a vu sa 9e édition. Impressions.

parcours a encore le souffle pour s’amuser : « j’ai taquiné un copain venu ici pour l’exploit sportif en lui montrant le logo d’Action de Carême sur son dossard! »

400 inscrits pour cette édition des défis du Jubilé ! Sur un parcours allant de 7 à 71 kms, ils ont choisi leur défi en fonction de leurs forces et ont dévalé les sentiers du district de St-Maurice à la recherche d’un chrono et du dépassement de soi. C’est d’abord l’esprit de la manifestation qui ressort des commentaires sur l’aire d’arrivée : « Un moment extraordinaire : la bénédiction de l’abbé sur la ligne de départ à 7h ce matin. Un souffle m’a porté » raconte un coureur encore tout haletant. Les motivations d’Etienne Pillonnel, assistant pastoral à Fribourg, évoque le sens de ce rendez-vous : « Il fallait que je fasse cette course cette année en l’honneur de l’abbaye : 1500 ans d’existence, c’est quand même un formidable anniversaire !». Après 71 km de course, ce quarantenaire, habitué aux grands

Un moment de fête Action de Carême soutient la manifestation depuis de nombreuses années. Son effigie y est bien ancrée. « C’est une course qui se veut un moment de fête avec un esprit chrétien d’entraide. Nous trouvons donc tout à fait logique de collaborer avec Action de Carême et sommes très heureux de pouvoir compter sur son soutien » nous explique le président Yannick Rupen. Les 10 paroisses du district et les autorités communales s’engagent avec beaucoup d’énergie et de cœur sur le parcours ; comme cette équipe de jeunes de Massongex, tout sourire, qui tiennent le stand des gâteaux à l’arrivée. « C’est l’aventure de toute une région » relève le chanoine Michel Ambroise Rey, fortement impliqué dans l’organisation.

La 10e année sera la dernière : 2015 est l’année des 1500 ans de l’abbaye. Mais la manifestation a tellement de succès, bien au-delà du canton, que l’avenir reste ouvert. Nous félicitons tous ceux et celles qui ont œuvré à ce grand événement et souhaitons encore longue vie à la course du jubilé ! Christelle Devanthéry

Campagne de carême – séances de formation 17 janvier à Peseux (NE) 9h–15h, paroisse catholique 23 janvier à Sion 18h30–21h30, Notre Dame du Silence (Ch. Sitterie 2) 24 janvier à Lausanne 8h45–14h15, Espace Dickens (Av. Charles Dickens 6) 28 janvier à Fribourg 19h30–21h30, Maison d’accueil Africanum – salle Africa (Rte de la Vignettaz 57) 29 janvier à Moutier 19h–21h, Foyer réformé (Rte de Vorbourg 4) 29 janvier à Genève 18h30–21h, Eglise Saint-Germain Informations et programme: www.voir-et-agir.ch Impressum

ACTION DE CARÊME Avenue du Grammont 7 1007 Lausanne Téléphone 021 617 88 81 Fax 021 617 88 79 actiondecareme@fastenopfer.ch www.actiondecareme.ch CCP 10-15955-7 Editeur Action de Carême Le bulletin paraît quatre fois par an. La poste nous octroie le tarif « journaux ». Une fois par an, 3 fr. sont pris sur le montant des dons comme contribution d’abonnement. Rédaction Johanna Monney Traduction Jean-François Cuennet Photos Bob Timonera (p. 1, 3–6), Jean-Pierre Grüter (p. 1 Portrait), Greet Schaumans/Broederlijk Delen (p. 2 Portrait), Monika Flückiger (p. 2), Claudia Fuhrer (p. 7), Sandra Hüsser (p. 7 portrait), Christelle Devanthéry (p. 8). Dessin Daria Lepori Concept grafikcontainer Lucerne Layout/Impression Cavelti AG medien. digital und gedruckt.

« Un moment de fête » : Un dossard aux couleurs d’Action de Carême

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PHILIPPINES 8 novembre 2013. Le typhon le plus violent de l’histoire des Philippines s’abat sur l’archipel. Haiyan dévaste des régions entières sur son passage : 9,8 millions de personnes sont touchées. Il fait plus de 6000 victimes et 4 millions de sans-abris. À Mondragon, au nord de l’île de Samar, les habitants de Bugko ont su quoi faire et où se réfugier. CERD, une organisation partenaire d’Action de Carême, prépare les communautés de pêcheurs à faire face à ce type de catastrophes, un effet direct des changements climatiques.

ACTION DE CARÊME


« Nous nous entraidons pour faire face aux typhons ensemble » : Pepito (casquette rouge) aide ses collègues à sortir un bateau de l’eau pour le mettre à l’abri.

SURVIVRE À HAIYAN Pour Pepito de Leon, la vie c’est la mer : « j’avais dix ans lorsque j’ai commencé à accompagner mon père Elpidio à la pêche ». À 52 ans, il vit dans le village de Bugko avec sa femme Clarita et ses trois enfants. Son fils aîné Bernardo, 29 ans, a suivi les pas de son père : il est aussi pêcheur. Pepito a de la chance : son terrain de pêche, l’océan Pacifique, est connu pour sa faune marine riche. Si l’on est suffisamment courageux pour affronter les eaux agitées de l’océan. Mais la région qu’il habite se trouve sur le chemin des typhons qui atteignent régulièrement les côtes des Philippines : en moyenne, six à neuf typhons chaque année. Pepito a appris à vivre avec.

Comme la plupart des personnes habitant des régions fréquemment touchées par des typhons, le village de Bugko s’est toujours débrouillé tant bien que mal pour faire face aux catastrophes. Mais les risques sont bien là. Et les pertes aussi. Une aide bienvenue Le CERD est arrivé à Mondragon en 2002. Avec l’aide d’Action de Carême, cette organisation soutient les communautés de pêcheurs aux Philippines. Ceux-ci apprennent à s’organiser afin de gérer de manière durable les ressources côtières et pouvoir en vivre. L’année suivante, le village donne vie à la Bugko Fish Folks Association


« Faire avec les dérèglements climatiques » : la maison de Pepito et Clarita de Leon se situe tout près de la mer, sur le chemin des typhons.

« Sans aide d’urgence, nous aurions eu faim » : kit de nourriture distribuée par CERD.

(BFFA), l’association des pêcheurs de Bugko et la Bugko Women’s Association (BWA), l’association des femmes de Bugko. Pepito devient président de la BFFA en 2010, puis Clarita vice-présidente de la BWA. Avec le CERD, les membres mettent sur pied des formations et des ateliers. Objectif: aider les pêcheurs et le reste de la communauté à se préparer lorsque des typhons s’abattent sur l’île. Se préparer au pire Les pêcheurs ont ainsi l’occasion de suivre une formation sur la gestion et la réduction des risques en cas de catastrophes. Ils apprennent à s’y préparer et savent désormais comment réagir et en minimiser les risques. « Avec le recul, nous n’étions pas vraiment préparés lorsqu’un typhon arrivait », poursuit Pepito. « Avant, nous prenions soin uniquement de notre famille et nous préparions chacun de notre côté. Aujourd’hui, nous sommes mieux organisés et nous nous entraidons pour y faire face ensemble ». Dorénavant, chacun suit les nouvelles à la radio et la télévision de près durant les période de

typhon. Même si sa vieille télévision en noir et blanc ne peut capter qu’une chaîne, elle donne à Pepito au moins les nouvelles dont il a besoin. Lorsqu’une alerte est lancée, les membres des associaitons vont dans le village appeler tout le monde à se préparer et aller se réfugier dans le centre d’évacuation. « Parfois, nous avons dû forcer certaines personne à y aller », raconte Pepito. Clarita prépare des habits pour chacun d’entre eux. Elle met les documents importants de la famille dans une pochette en plastique : certificats de naissance et de baptême, carnet de santé des enfants et cartes de vote. Puis elle prévoit un peu de nourriture. Du riz, du sel, du café, du sucre, ou encore du poisson séché ou des sardines. « Pas grand chose. De notre expérience, les typhons ne durent jamais longtemps ». Pepito, lui, va chercher l’aide des voisins pour sortir le bateau de l’eau, le mettre à l’abri et le fixer solidement à des piquets. Ils emballent les quelques appareils électroniques que la famille possède et les entrepose dans la chambre à coucher, en lieu sûr. En effet : durant les typhons, les vols sont l’un des plus gros soucis des habitants de Bugko.

Un bilan de l’aide d’urgence Trois partenaires d’Action de Carême aux Philippines ont été touchés par le typhon Haiyan : Pina, Cerd et la congrégation des franciscaines (FSPIF). Action de Carême a réagi sur-le-champ, dans le but de fournir aux victimes dans les régions où elle est présente une aide alimentaire dans les meilleurs délais. À peine quatre jours après la catastrophe, ces partenaires commençaient à distribuer des vivres. Des champs entiers ont été détruits. C’est pourquoi dans les semaines qui ont suivi, d’autres kits ont été distribués. En outre, Pina a pu rapidement distribuer des semences et des plantons aux familles paysannes, qui ont aussi la plupart du temps reçu du matériel pour reconstruire leur maison. Les franciscaines, quant à elles, ont aussi pro-

posé une assistance psychologique et pastorale aux victimes. Au total, Action de Carême est venue en aide à 2227 familles, pour un montant de 140 000 francs. En janvier, le programme d’aide d’urgence est arrivé à son terme. «Nos partenaires ont tous atteint leurs objectifs. Ils ont bien planifié et évité le surmenage», constate Helena Jeppesen, chargée du programme d’Action de Carême aux Philippines. Son bilan est cependant contrasté : «Haiyan a bouleversé la coopération aux Philippines ! L’aide d’urgence et les réparations effectuées après le typhon ont détourné de nombreux spécialistes nécessaires à la poursuite des projets de développement en cours.» Il en est de même pour les partenaires d’Action de Carême.


Se mettre à l’abri Les membres de la fédération ont aussi participé à une formation qui vise à évaluer la vulnérabilité de la région : ensemble, ils ont listé les catastrophes susceptibles de se produire, puis réalisé une carte des dangers. Ils y ont colorié en rouge les zones dangereuses et en bleu les zones sûres. Puis, avec les autorités locales, ils ont défini un centre d’évacuation – le séchoir du village : un énorme bâtiment en béton où l’on sèche le riz fraîchement récolté avant de le moudre, qui peut héberger jusqu’à 500 personnes. Le bâtiment n’a qu’une pompe à eau et deux toilettes. « Ce n’est pas beaucoup, mais au moins nous avons quelque chose » constate Pepito. Avant de désigner le séchoir comme zone d’évacuation, les villageois ne savaient pas où aller en cas de danger. Maintenant, ils savent tous où se réfugier. Le jour avant l’arrivée de Haiyan, Pepito a envoyé sa femme, sa belle-fille et quatre de ses petitsenfants au centre d’évacuation. Lui et son fils ont monté la garde dans leur maison respective. Haiyan a atteint les côtes le matin d’après. Comme les pêcheurs étaient bien préparés, les dégâts après Haiyan n’ont pas été aussi grands qu’à d’autres endroits. Mais le plus important : aucun mort n’a été à déplorer à Mondragon.

vos dons : L’impact de uez à mettre , vous contrib cs n a fr 0 5 c aux Philip– Ave lture durable cu ri g a e n u oppant des en place ple en dével em ex r a p pines – résistantes. its et légumes u rs fr e d es rt so ncez des cou cs, vous fina n a fr er 0 m 0 1 la c e s et d – Ave rable des côte u d n o ti se es is g s pu nt sur la ations future ér én g s le e u – pour q e la pêche. es produits d d e vr la dévi i ss u a t à soutenir en u ib tr n co cs à garantir le – 150 fran humains – et s it ro d es d à la terre. fense on et l’accès ti ta en lim a l’ droit à

« Documenter les dégâts et les besoins » : Pepito et les membres de la fédération passent de maison en maison faire un état des lieux.

Après Haiyan Les dégâts matériels dans la région sont néanmoins importants. Après le passage du typhon, Pepito et d’autres membres du village ont suivi un cours accéléré sur l’évaluation des dommages et des besoins. Ils ont passé plusieurs jours à aller de maison en maison pour documenter les dégâts dans le village et les besoins immédiats des familles. Un travail qui s’avèrera très utile par la suite, lorsque l’aide d’urgence arrivera. Nombre de maisons ont subi des dégâts. Les toits, les murs faits en bambou ou en nipa ont été emportés par le typhon. La communauté s’entraide pour reconstruire. La vie devient dure pour les pêcheurs. Le prix du poisson chute, jusqu’à se vendre à moitié prix. Le prix de l’essence, quant à lui, qui fait marcher le moteur de leur bateau, flambe. Heureusement pour eux, l’aide arrive. CERD amène les kits de première urgence d’Action de Carême dans les villages de la région une semaine après Haiyan. Puis deux autres lots arrivent dans la première semaine de décembre et le jour de Noël. « L’aide d’urgence est arrivée à temps, autrement nous aurions eu faim », relève Pepito. Les membres de la fédération se mobilisent, s’organisent pour distribuer les kits. De la nourriture mais aussi des matériaux de construction. Le village se reconstruit. Et la vie continue. Grâce au travail de CERD, les habitants de Bugko n’ont déploré aucun mort. Parce qu’ils ont su se préparer au pire. « L’outil de gestion des risques que nous avons introduit avec nos partenaires aux Philippines doit être renforcé et étendu à toutes les régions » explique Helena Jeppesen. « Il est essentiel pour les partenaire d’Action de Carême de travailler avec les autorités locales. Haiyan l’a montré : les populations locales doivent pouvoir exiger de la part des autorités des mesures et un soutien pour se préparer et faire face à ce genre de catastrophe. C’est ce que nous allons continuer à exiger avec nos partenaires. »

Bobby Timonera

Philippines en bref Le réchauffement climatique place la population philippine face à de graves difficultés. Action de Carême l’aide à les affronter grâce à la diversification des cultures (riz, légumes et fruits) et à la gestion des espaces côtiers. Les familles menacées d’expulsion ont, elles aussi, besoin de notre engagement. Le typhon Haiyan, qui a dévasté les Philippines en novembre 2013, est la catastrophe la plus destructrice et la plus meurtrière qu’ait jamais connue ce pays. En cause : les réchauffements climatiques. Les typhons sont toujours plus fréquents et de plus en plus violents. Un engagement pour les droits humains Un problème auquel les communautés locales sont toujours plus souvent confrontées : des entreprises philippines et étrangères accaparent d’immenses surfaces pour y pratiquer l’agriculture industrielle, instaurer des zones franches ou extraire des minerais. Le fléau de la corruption est très répandu, les autorités n’écoutant que leurs intérêts privés. Les habitants, qui ne sont pas consultés, ne savent pas comment se défendre contre la perte de leurs maisons et de leurs terres. Action de Carême apporte un soutien concret aux personnes menacées d’expulsion afin qu’elles puissent faire valoir leurs droits, en exerçant des pressions, en réalisant des études ou en diffusant dans la presse les ravages des projets miniers. Soutenez les populations locales aux Philippines. Faites un don ! CCP 10-15955-7, mention Philippines

ACTION DE CARÊME Avenue du Grammont 7 – 1007 Lausanne Téléphone 021 617 88 81, Fax 021 617 88 79 actiondecareme@fastenopfer.ch www.actiondecareme.ch CCP 10-15955-7

Novembre 2014

« Mieux se préparer » : Clarita rassemble quelques affaires avant d’aller se réfugier dans le centre d’évacuation.


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