FAWE Cahiers de recherche - Volume 3, Version complète (2013)

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FAWE

Forum for African Women Educationalists Forum des éducatrices africaines

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

RENFORCER la recherche sur le genre pour améliorer l'éducation des FILLES et des FEMMES en AFRIQUE


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Renforcer la recherche sur le genre pour améliorer l'éducation des filles et des femmes en Afrique

Les cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

Les études contenues dans cette publication ont été rendues possibles grâce au généreux soutien financier de l’Agence norvégienne de coopération pour le développement (Norad).

Les points de vue et les opinions exprimés dans ce volume sont ceux des auteurs et ne reflètent pas forcément les opinions du FAWE. Ils ne doivent pas être attribués au FAWE, à ses membres, à ses partenaires financiers, ou aux organisations qui lui sont affiliées, ou à toute personne agissant au nom du FAWE. ©FAWE 2013

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Table des matières Introduction ........................................................................................................................................................... 3 Remerciements ..................................................................................................................................................... 5 Liste des tableaux et des graphiques .............................................................................................................. 9 Liste des abréviations et des acronymes ....................................................................................................... 12 Vue d’ensemble ..................................................................................................................................................... 16 Enseignement post-primaire : aborder la violence, le harcèlement et le découragement dans l’environnement d’apprentissage ............................................................................. 20 L’éducation des femmes en technologie à l’Institut universitaire de technologie de l’Université de Douala ........................................................................................................................................................... 22 Explorer les expériences des femmes aux postes à responsabilité dans les établissements publics d’enseignement supérieur au Ghana ........................................................................................... 40 Violence sexuelle dans les écoles pour élèves ayant des besoins spécifiques en Afrique du Sud ...................................................................................................................................................................... 66 Le marché du travail : renforcer les liens entre l’éducation et le monde du travail ......................... 80 Education et insertion des femmes sur le marché du travail à Abidjan ........................................... 82 Genre, insertion dans le marché de l’emploi et impacts socio-économiques des formations professionnelles dispensées à Dakar ........................................................................................................ 103 Explorer la nature sexospécifique des liens éducation-marché du travail en Tanzanie : au-delà des chiffres ....................................................................................................................................................... 126 Les activités des femmes dans le secteur informel et le soutien à l’éducation des filles à Binga : Perspectives des femmes dans le secteur informel ............................................................... 149 Conclusion et recommandations de politiques et de pratiques ................................................................ 165

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Introduction La recherche est fondamentale au travail de développement socio-économique. Si elle n’offre pas de solutions rapides aux complexités de la réduction de la pauvreté et du développement, elle a le potentiel de faciliter la façon dont nous les abordons en produisant des connaissances sur des domaines spécifiques exigeant une attention politique. Etant donné que l’égalité entre les genres et l’autonomisation des femmes sont des facteurs clés des efforts de développement, les travaux de recherche qui visent à influencer ces efforts doivent être nécessairement sensibles au genre et mettre en lumière les réalités, les considérations et les approches potentielles en vue d’assurer des résultats positifs pour tous dans le processus de développement – femmes et hommes confondus. En ce qui concerne l’éducation, la recherche peut nous éclairer sur les moyens de nous assurer que les approches politiques, les attitudes des communautés, les pratiques pédagogiques et les environnements d’apprentissage sont équitables, propices et aboutissent à l’amélioration des acquis de l’apprentissage des filles et des garçons, des femmes et des hommes. Les connaissances produites par la recherche fournissent des justifications aux décisions politiques sur l’éducation et son rôle dans la réduction de la pauvreté et le développement socio-économique. L’objectif du FAWE est de s’assurer que les connaissances issues de ce recueil d’études sur le genre et l’éducation en Afrique sont intégrées dans les processus de prise de décision des politiques et des plans d’éducation, nouveaux et révisés, axés vers plus d’équité et de développement. Par ailleurs, il est essentiel qu’un plus grand nombre de femmes renforcent leurs compétences en recherche et rejoignent la communauté africaine de recherche afin de s’assurer que les perspectives des femmes sur les problématiques de genre sont incorporées dans les domaines de recherche prioritaires, notamment la qualité de l’éducation pour tous les enfants, les enseignants et la pratique pédagogique, l’égalité dans l’éducation, et l’éducation dans les situations de crises et fragiles. Ceci, aussi, constitue un élément clé du travail de développement. Elargir les opportunités de recherche à destination des femmes africaines leur offrira un accès plus important aux canaux leur permettant d’influencer leurs sociétés en posant des questions de recherche pertinentes dans tous les domaines du développement. Cela contribuera également à une répartition plus équilibrée du pouvoir dans la production et l’utilisation du savoir et une plus grande égalité entre les genres dans le dialogue politique sur le continent. Ce troisième cycle de recherche mené par le FAWE répond aux préoccupations et aux objectifs évoqués ci-dessus. Premièrement, les études contenues dans ce volume portent sur les questions clés liées à l’offre d’un environnement propice à l’apprentissage et à la création des conditions pour une transition réussie vers le monde du travail. Elles examinent les préoccupations sexospécifiques des jeunes femmes inscrites dans les programmes d’études en technologie ou cherchant à devenir des étudiantes dirigeantes sur leurs campus, le harcèlement et la violence sexuelle chez les élèves du secondaire ayant des besoins spéciaux, l’interrelation entre le genre, l’éducation et l’intégration sur le marché du travail, et le rôle du secteur informel pour soutenir ou faire obstacle à l’éducation des filles. Deuxièmement, bien que les chercheurs masculins aient apporté une perspective et une contribution précieuses aux études publiées dans ce volume, toutes les équipes de recherche ont été dirigées par des chercheuses africaines expérimentées spécialisées dans le genre et/ou l’éducation. Les idées de ces chercheuses pourront éclairer les travaux du FAWE de façon stratégique, tandis que le FAWE, grâce à son puissant réseau permettant de diffuser la recherche, pourra offrir à ces chercheuses une plateforme pour élargir leur engagement et influencer les domaines des politiques et des pratiques éducatives. Conscientes de la nécessité de renforcer les capacités de recherche des jeunes chercheurs africains, les équipes ont également inclus au moins deux chercheur(se)s mentoré(e)s. De jeunes chercheurs, femmes ou hommes, ont été mentorés par la chercheuse principale ou d’autres chercheuses expérimentées afin de renforcer leur savoir et leur pratique dans les domaines de la recherche sur le genre. Troisièmement, grâce à ses liens privilégiés avec les décideurs et les responsables politiques africains, à l’intérieur et à l’extérieur du continent, ainsi qu’avec les principales instances régionales africaines, le FAWE occupe une position unique pour contribuer au renforcement des liens entre la recherche, la politique et la pratique. Les trois cycles de recherche publiés à ce jour dans le cadre des Cahiers de recherche du FAWE offrent une opportunité unique d’introduire de nouvelles connaissances sur la scène de la recherche africaine et d’encourager l’approfondissement continu des programmes de recherche, d’offrir de nouvelles connaissances et perspectives aux processus de prise de décision et de mise en œuvre, d’ouvrir de plus grands canaux de communication entre la production de connaissances par la recherche

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et l’exploitation de ces connaissances par la mise en œuvre pratique et de créer une base commune où la recherche éclairera la politique et la politique éclairera la recherche. L’initiative de recherche dans le cadre de laquelle ces études ont été menées est au centre des activités de recherche du FAWE depuis 2009. Le FAWE s’efforcera de soutenir ses efforts de recherche au-delà de cette initiative, en s’appuyant sur son réseau continental, le mentorat de jeunes chercheurs et les Cahiers de recherche du FAWE au fil du temps. Ils sont vitaux pour les travaux du FAWE et continueront à les éclairer. Le FAWE souhaite remercier l’Agence norvégienne de coopération pour le développement (Norad) de son soutien indéfectible pendant toute la durée de l’initiative et pour avoir permis au FAWE et à ses partenaires de faire cette importante contribution. Le FAWE souhaiterait adresser ses remerciements aux équipes de recherche et aux institutions qui ont été nos partenaires estimés dans cette entreprise et qui ont tant contribué à ce volume. Hendrina Doroba Directrice exécutive du FAWE par intérim

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Remerciements Le FAWE souhaite remercier les personnes, les institutions et les organisations suivantes de leur précieuse contribution au troisième et dernier cycle de son initiative de recherche et à ce nouveau volume des Cahiers de recherche du FAWE. Appui et conseils financiers Agence norvégienne de coopération pour le développement (Norad) L’engagement de la Norad en faveur de l’égalité des genres et de l’éducation ainsi que son soutien à la recherche sur le genre et l’éducation ont été essentiels pour l’initiative de recherche du FAWE et les Cahiers de recherche du FAWE. Le FAWE souhaite remercier la Norad de son appui financier en faveur de l’initiative de recherche et du soutien de longue date qu’elle apporte à ses travaux depuis 1993. Equipes de recherche Université de Douala, Cameroun Irene Asanga, chercheuse principale Irene Asanga est maître de conférences en droit au Département de droit coutumier de l’Université de Douala. Ses domaines de rec46 herche incluent le droit de la famille, la succession, le droit du travail et les droits de l’homme. Mme Asanga est également impliquée dans des activités liées aux droits de l’homme, avec un intérêt particulier pour les droits de l’enfant et de la femme. Elle a occupé le poste de secrétaire administrative à la Human Rights Clinic and Education au Cameroun et a fait des stages avec des avocats spécialistes des droits de l’homme en Afrique du Sud. Lola Nkamanyang, chercheuse mentorée Lola Nkamanyang est maître de conférences en littérature et théorie critique au Département d’anglais et de langues étrangères de l’Université de Douala. Elle travaille actuellement sur un projet de séminaires de méthodologie en langue, littérature et études culturelles qu’elle considère comme le fondement de l’éventuelle introduction des théories et des méthodes interdisciplinaires pour l’enseignement, l’interprétation et l’analyse et la relation entre les textes littéraires et leur contexte de production au Département d’anglais. Centre ivoirien de recherches économiques et sociales (CIRES), Côte d’Ivoire Namizata Binate Fofana, chercheuse principale Namizata Binate Fofana est chercheuse et directrice de la cellule Genre et Développement du CIRES. Elle est également chargée de cours à la Faculté des sciences économiques et de gestion de l’Université de Cocody à Abidjan. Mme Binate Fofana est membre de l’Association des chercheuses de Côte d’Ivoire, de l’International Association for Feminist Economists et de l’African Women Leaders in Agriculture and Environment

Mariame Maiga, chercheuse associée Mariame Maiga est conseillère au genre et au développement social pour le programme régional de productivité agricole de la Banque mondiale au Conseil ouest et centre africain pour la recherche et le développement agricoles (CORAF/ WECARD). Elle est sociologue et chercheuse associée au CIRES. Elle a été experte pour la Région Afrique dans l’équipe de l’évaluation de la performance Genre de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et a travaillé pour la représentation de la FAO en Côte d’Ivoire. Elle a également été spécialiste en développement social et genre dans l’équipe FAO-Banque mondiale pour la formulation du projet de soutien de la Banque mondiale au secteur agricole en Côte d’Ivoire. Virginie Koffi Yapo, chercheuse associée Virginie Koffi Yapo est enseignante-chercheuse à l’Unité de formation et de recherches de sciences économiques et de gestion de l’Université Félix Houphouët Boigny (UFHB) à Abidjan. Elle est également économiste et chercheuse associée au CIRES. Mme Yapo a été consultante du rapport sectoriel Santé-Nutrition du programme de coopération UNICEF en Côte d’Ivoire. Elle a participé à la réalisation de l’étude sur le fonctionnement des différentes cellules Genres des ministères du gouvernement ivoirien et à l’atelier de validation du rapport d’expérimentation des Indicateurs de développement et des inégalités entre les sexes (IDISA) en Côte d’Ivoire en collaboration avec le ministère de la Famille, de la Femme et de l’Enfant. Adoh Bisse, chercheuse mentorée Adoh Bisse enseigne les techniques de communication à Pigier-Côte d’Ivoire et est doctorante à l’Unité de formation et de recherches de sciences économiques et de gestion de l’UFHB à Abidjan. Elle participe actuellement à des stages pratiques et des études de terrain dans le cadre de sa formation universitaire et professionnelle. Elle participe actuellement à une étude sur le monde paysan en Côte d’Ivoire. Alimatou Cisse, chercheuse mentorée Alimatou Cisse est enseignante-chercheuse. Elle est chargée des cours d’économie de la santé, d’économie du travail et d’économie de l’éducation à l’Institut universitaire d’Abidjan. Mme Cisse a mené des enquêtes pour déterminer le lien entre le taux d’infection par le VIH et la réduction de la pauvreté pour le compte de l’Institut national de la statistique du Québec et sur la violence fondée sur le genre pour le compte du Fonds des Nations unies pour les femmes (UNIFEM). Elle a publié un article sur l’analyse de l’utilisation des soins de santé en Côte d’Ivoire pour le compte du Consortium pour la recherche économique en Afrique Euphrasie Ben-Houassa Kouame, chercheuse mentorée Euphrasie Ben Houassa Kouame est économiste et doctorante à l’UFHB à Abidjan. Elle est également Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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chercheuse associée au CIRES et membre de la cellule Genre et développement du CIRES. Anick Mian, chercheuse mentorée Anick Mian est doctorante en sociologie du développement économique à l’UFHB à Abidjan en Côte d’Ivoire. Elle travaille sur les constructions sociales de la pauvreté des ménages en situation de précarité à Vridi-Abidjan. Elle est chercheuse associée membre de la cellule Genre et Développement du CIRES. Mme Mian a été formatrice pour le Research and Action Centre for Peace (CERAP) dans le cadre du projet de formation des mobilisateurs sociaux pour les audiences foraines piloté par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et l’Union européenne sont (UE). Université de l’éducation, Winneba, Ghana Grace Yawo Gadagbui, chercheuse principale Grace Yawo Gadagbui enseigne aux étudiants de deuxième et de troisième cycle universitaire à l’Université de l’éducation à Winneba et dirige des mémoires de maîtrise et des thèses de doctorat. Elle est rédactrice en chef au Journal of Research and Development in Education (JORDE) de la Faculté des études pédagogiques et directrice p.i. de l’Unité d’assurance qualité de l’université. Mme Gadagbui est présidente du comité sur l’intégration du genre chargée de sélectionner les étudiantes en vue de l’attribution des bourses/prix de la Carnegie Corporation. Winston Kwame Abroampa, chercheur mentoré Winston Kwame Abroampa est chargé de cours au Département de psychologie et d’éducation de l’Université de l’éducation à Winneba. Titulaire d’un mastère de philosophie en études curriculaires, il prépare un doctorat en curriculum et instruction. Il a animé plusieurs ateliers liés au curriculum et publié des articles dans des revues scientifiques. M. Abroampa est membre du Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Education (ROCARE). Peter Eshun, chercheur mentoré Peter Eshun est chargé de cours au Département de psychologie et d’éducation de l’Université de l’éducation à Winneba. Avant cela, il était assistant principal de recherche et aidait les chargés de cours à mener leurs travaux de recherche et à diriger les classes de travaux dirigés. Les domaines de spécialisation de M. Eshun sont la préparation des tests et l’évaluation des étudiants. En tant qu’assistant à l’enseignement, il a appuyé des cours sur l’évaluation des mesures et les statistiques de l’évaluation, la technologie éducative, les méthodes de recherche et l’utilisation des tests dans le conseil. Christina Noi-Okwei, chercheuse mentorée Christina Noi-Okwei donne des cours de psychologie et d’orientation à l’Université de l’éducation à Winneba depuis 2007. Elle est psychologue clinicienne et travaille en cette qualité au centre d’orientation de l’université. Mme Noi-Okwe est membre du ROCARE et de la Société internationale pour l’étude du développement comportemental (ISSBD). Elle a écrit des articles dans des revues scientifiques et a présenté des communications à l’occasion de conférences internationales. 6

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Kwesi Nkum Wilson, chercheur mentoré Kwesi Nkum Wilson donne des cours de psychologie et d’orientation à l’Université de l’éducation à Winneba depuis 2008. Il est conseiller au centre d’orientation de l’université et est actuellement l’aumônier de l’université. Le révérend Wilson est membre du ROCARE, de l’ISSBD et du Ghana Academy of Christian Counsellors. Il est titulaire d’un mastère en conseil de l’Université de Cape Coast et participe à un programme doctoral en orientation et conseil. Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Education (ROCARE), Sénégal Dr Andrée-Marie Bonane-Diagne, chercheuse principale Andrée-Marie Bonane-Diagne, Docteur es Lettres, est formatrice au Département de lettres de la Faculté des sciences et technologies de l’éducation et de la formation (FASTEF) de l’Université Cheikh Anta Diop. Ses centres d’intérêt incluent le genre, l’équité et la promotion de la condition féminine. Mme Bonane-Diagne est membre du ROCARE et de l’association Convergence des femmes universitaires pour le leadership féminin (COFULEF). Elle est également présidente honoraire de l’Association sénégalaise des professeurs de français, chargée de mission du président de la Fédération internationale des professeurs de français (FIPF) et à ce titre, coordinatrice nationale du Réseau des professeurs de français pour l’éducation des filles et la formation des femmes en Afrique (REPROF-EFFA). Mada Lucienne Tendeng, chercheuse mentorée Mada Lucienne Tendeng est professeure de lettres dans un lycée pour jeunes filles et prépare un mastère en sciences de l’éducation à la chaire de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) à l’Université Cheikh Anta Diop. Elle est membre du ROCARE et a été avec son équipe deux fois de suite (en 2010/2011 et en 2011/2012) lauréate du Programme ROCARE des subventions pour la recherche en éducation. La première étude, dont elle était la chercheuse principale, a porté sur la prise en charge de la petite enfance et la seconde est une étude de cas sur la formation professionnelle au Sénégal Danty Patrick Diompy, chercheur mentoré Danty Patrick Diompy prépare un mastère en sciences de l’éducation à la chaire de l’UNESCO à l’Université Cheikh Anta Diop. Après une maîtrise en sciences et techniques de l’activité physique et sportive suivi de cinq années d’expérience professionnelle, il s’engage dans la recherche en sciences de l’éducation. Il a été deux fois lauréat du Programme des subventions pour la recherche en éducation du ROCARE : en tant que membre d’équipe en 2010-2011 et en tant que chercheur principal en 20112012. Il compte à son actif deux recherches publiées et un article scientifique. Université d’Afrique du Sud (UNISA), Afrique du Sud Nareadi Phasha, chercheuse principale Nareadi Phasha est professeure d’éducation inclusive au Collège d’éducation d’UNISA. Ses domaines de recherche


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sont la violence sexuelle/les agressions chez les enfants et l’inclusivité dans l’éducation. Elle est la chercheuse principale d’une étude sur les agressions sexuelles, les soins et le soutien aux apprenants persécutés et intellectuellement déficients en Afrique du Sud financée par la Fondation nationale de la recherche. Mme Phasha a reçu le Prix du leadership en recherche en 2010 pour son leadership en matière de recherche à l’UNISA. Doris Nyokangi, chercheuse mentorée Doris Nyokangi est titulaire d’un doctorat de l’Université d’Afrique du Sud. Elle a obtenu un mastère en genre et développement international à l’Institut de l’éducation de l’Université de Londres et une licence de l’éducation à l’Université de Nairobi au Kenya. Mme Nyokangi a participé à plusieurs conférences et publié des articles sur la violence sexuelle à l’école à l’égard des filles dans les écoles spécialisées. Nonhlanhla Maseko, chercheuse mentorée Nonhlanhla Maseko est chargée de cours au Département d’anthropologie et d’archéologie de l’Université d’Afrique du Sud. Elle poursuit actuellement des études de troisième cycle. Ses domaines de recherche incluent l’étude de l’élitisme, les rapports de pouvoir et la réduction de la pauvreté. Research on Poverty Alleviation (REPOA), Tanzanie Paula Tibandebage, chercheuse principale Paula Tibandebage, titulaire d’un doctorat, est chercheuse principale à REPOA. Elle a une grande expérience de la recherche sur différents enjeux sociaux et économiques. Ses principaux domaines de recherche sont la santé et l’éducation. Ses travaux actuels incluent un projet de recherche financé par le Wellcome Trust sur l’éthique, les paiements et la survie maternelle en Tanzanie et un projet sur la productivité industrielle et les performances du secteur de la santé financé par le Conseil de la recherche économique et sociale. Caroline Israel, chercheuse mentorée Caroline Israel est assistante de recherche au Département de la protection sociale de REPOA. Ses principaux domaines de recherche sont la santé et l’éducation. Elle a travaillé en qualité d’assistante de recherche à Concern Worldwide et au International Food Policy Research Institute, en tant que stagiaire à la Fondation de la recherche économique et sociale et au Département de suivi et d’évaluation de Engender Health. Lorraine Kiswaga, chercheuse mentorée Lorraine Kiswaga travaille en freelance dans les domaines de la santé, de l’éducation, du genre et de la protection sociale. Ancienne assistante de recherche à REPOA, elle a participé à toutes les étapes de l’étude REPOA-FAWE. Elle a également travaillé en tant que coordonnatrice de projet au projet Family Health International’s Safe School et en tant que coordonnatrice de formation de Comprehensive Community-Based Rehabilitation en Tanzanie.

Université du Zimbabwe, Zimbabwe Sunungurai Chingarande, chercheuse principale Sunungurai Chingarande est chargée de cours et ancienne chef du Département de sociologie de l’Université du Zimbabwe. Elle est examinatrice externe pour l’Université des femmes en Afrique. Mme Chingarande a beaucoup publié dans les domaines du genre et de l’autonomisation des femmes. Elle est membre de FAWE Zimbabwe, de l’Organisation pour la recherche en sciences sociales en Afrique orientale et australe, du Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique et de Anthropology Southern Africa. Irene Mkondo, chercheuse mentorée Irene Mkondo est directrice de programme de Africa Leadership and Management Academy (ALMA) à Harare au Zimbabwe. Elle a été enseignante dans le secondaire et chargée de cours et chef de la pratique pédagogique au Belvedere Technical Teachers’ College. Avant de rejoindre l’ALMA, elle était inspectrice de district auprès de la Commission du service public du Zimbabwe. Elle travaille actuellement sur un projet collaboratif sur l’amélioration de l’image des enseignants au Zimbabwe. Equipe de revue par les pairs Ayo Coly Ayo Coly, titulaire d’un doctorat, est professeure associée d’études africaines et afro-américaines et de littérature comparée au Darmouth College dans le New Hampshire. Ses centres d’intérêt Coly incluent les littératures et le cinéma africains, la théorie post-coloniale, les masculinités coloniales et post-coloniales et les droits de l’homme. Elle est l’auteure de The pull of postcolonial nationhood: Gender and migration in francophone African literatures, et achèvent actuellement l’écriture du livre Un/clothing African womanhood: The female body in African visual discourse. Nyokabi Kamau Nyokabi Kamau est professeure associée d’études de genre à l’Université St Paul au Kenya. Elle a été consultante dans les domaines du genre, de la sexualité, de la politique, de l’éducation et du VIH-Sida pour de nombreuses organisations locales et internationales. Depuis juillet 2010, la professeure Kamau est mentor de genre pour le programme Oxfam Pastoralist au Kenya et en Tanzanie et dirige actuellement une étude sur la Fiche de l’égalité des genres dans neuf pays d’Afrique australe et orientale. Jennifer McCleary-Sills Jennifer McCleary-Sills, titulaire d’un doctorat, est spécialiste de sciences sociales et comportementales au Centre international de recherche sur les femmes (ICRW). Elle a plus d’une décennie d’expérience en pratique de santé publique et de développement international, avec une expertise particulière en matière de conception et de mise en œuvre des programmes liés à la violence fondée sur le genre, à la santé sexuelle et reproductive et au VIH/ Sida. Elle a précédemment travaillé au Johns Hopkins Center for Communication Programs en apportant un Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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soutien à la recherche et à l’évaluation aux bureaux locaux des programmes nationaux de communication. Sela Musundi Sela Musundi est chargée de cours en genre et développement à l’Institut supérieur d’enseignement pédagogique de Kigali au Rwanda. Elle est titulaire d’un doctorat d’études culturelles en éducation et d’un certificat d’études supérieures sur les femmes et le genre de l’Université de l’Ohio. Sa thèse de doctorat examine les façons dont les enseignants et les élèves d’une école pour filles de l’ouest du Kenya ont conceptualisé la notion de l’attention et du soin dans l’enseignement. Elle s’intéresse également aux expériences scolaires des filles africaines, aux agressions sexuelles sur les enfants et aux méthodologies féministes. Jane Onsongo Jane Onsongo est commissaire à la Commission Ethique et anti-corruption du Kenya où elle fournit un contrôle stratégique et une orientation politique sur la prévention de la corruption au Kenya par le biais de l’enseignement public, la recherche, l’analyse politique et les systèmes d’audit et d’examen. Le prof. Onsongo a travaillé auparavant à l’Université catholique d’Afrique de l’Est à Nairobi, en qualité de professeure associée de l’éducation, directrice adjointe de la recherche et chef du département des études de premier cycle en éducation. Elle a offert des services de conseil sur les problématiques de genre à différentes organisations internationales de développement et a beaucoup publié sur l’enseignement supérieur. Jason Oyugi Jason Oyugi est directeur général de Bridge Africa, un laboratoire de réflexion basé à Nairobi au Kenya et a une grande expérience en matière de conception, mise en œuvre et coordination des programmes de gouvernance, de politiques publiques et de développement dans tous les secteurs et sous-secteurs, notamment le genre, le VIHSida, les politiques économiques, l’eau et l’environnement. Il a soutenu des organisations nationales, régionales et internationales en matière de suivi et d’évaluation, de renforcement des capacités, de conception des curricula, de formation et il a élaboré des stratégies de plaidoyer et d’apprentissage et des approches innovantes pour soutenir une programmation à fort impact. Krystal Strong Krystal Strong est une doctorante au Département d’anthropologie de l’Université de Californie à Berkeley. Elle a obtenu une licence en étude individualisée de l’Université de New York, avec une priorité sur les études de la diaspora africaine. Ses centres d’intérêt incluent l’Afrique, l’activisme politique, la jeunesse, l’éducation, l’identité et la culture populaire. Equipe éditoriale Irmin Durand, chargée de la recherche, de la communication et du plaidoyer du FAWE Irmin Durand est responsable du développement et de la coordination de la communication et des activités de 8

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recherche du FAWE. Elle a servi de point focal pour la mise en place de l’initiative de recherche et est la rédactrice en chef des Cahiers de recherche du FAWE. Elle a travaillé à l’Institut international de la planification (IIPE) de l’UNESCO, dans l’édition et comme journaliste. Anna Collins Mani, réviseuse, anglais Anna Collins Mani est une traductrice technique et une interprète de conférence qui travaille notamment pour les institutions de l’Union européenne et le Conseil de l’Europe. Grace Coston, traductrice, français-anglais Grace Coston est interprète de conférence et traductrice. Elle a travaillé sur les questions du développement en Afrique lors de conférences organisées par l’Association pour le développement de l’éducation en Afrique (ADEA), la Banque africaine de développement (BAD) et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Elle a aussi été interprète pour des programmes de formation à la sécurité au Niger, au Burkina Faso, en Mauritanie et au Tchad et pour des ateliers internationaux organisés par Médecins du Monde. Miriam Jones, réviseuse, anglais Miriam Jones a travaillé à l’IIPE/UNESCO, notamment sur sa collection phare Les principes de la planification de l’éducation et sur les rapports du Groupe de travail international sur l’éducation, entre autres. Elle a aussi été impliquée dans les publications de l’UNESCO sur l’eau et la paix, la bioéthique et les droits de l’homme. Nathalie Montagu, réviseuse, français Nathalie Montagu est traductrice indépendante (anglaisjaponais-français) spécialisée dans l’éducation et le développement. Elle a travaillé pour des programmes de l’UNESCO et la BAD comme l’ADEA et le Groupe de travail sur la communication pour l’éducation et le développement (GT COMED) ainsi que pour des organisations non gouvernementales (ONG) comme le FAWE. Nadia Sadoughi, traductrice, anglais-français Nadia Sadoughi est traductrice et interprète et travaille pour plusieurs organisations dans les domaines de l’éducation, en particulier en Afrique, de l’égalité entre les genres et des droits de l’enfant. Elle travaille régulièrement avec l’ADEA et l’UNESCO-IIPE, entre autres. Maura Pollin, Traductrice, français-anglais Maura Pollin est interprète de conférence et traductrice indépendante. Née à Washington D.C. aux USA, elle vit et travaille à Paris depuis de nombreuses années. Photographie Toutes les images de cette publication ont été reproduites avec l’aimable autorisation de Nancy Wong du FAWE. Graphisme et impression Capital Colours Creative Design, Nairobi, Kenya


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Liste des tableaux et des graphiques Liste des tableaux Tableau 1.1 Nombre d’étudiantes motivées par leurs parents, selon la profession ................................................ 31 Tableau 1.2 Postes des répondantes ................................................................................................................................... 52 Tableau 1.3 Profil de l’âge des répondantes ...................................................................................................................... 53 Tableau 1.4 Ordre de naissance des répondantes ............................................................................................................ 53 Tableau 1.5 Niveau d’études des parents ........................................................................................................................... 53 Tableau 1.6 Distribution de ce qui motive les répondantes a devenir dirigeante ..................................................... 53 Tableau 1.7 Distribution du soutien reçu par les répondantes ..................................................................................... 55 Tableau 1.8 Distribution des défis rencontres par les répondantes ........................................................................... 56 Tableau 1.9 Distribution des stratégies d’adaptation rencontrées par les répondantes ....................................... 57 Tableau 1.10 Test-t pour échantillons indépendants des dirigeantes des universités et des

écoles polytechniques ...................................................................................................................................... 58 Tableau 1.11 Types de violence sexuelle rapportée (pas nécessairement vécue) par les élèves

ayant des besoins spécifiques ........................................................................................................................ 70 Tableau 2.1 Niveau d’éducation des individus selon le genre (n = 3 834) ................................................................... 91 Tableau 2.2 Participation au marché du travail selon le genre .................................................................................... 92 Tableau 2.3 Insertion sur le marché du travail et éducation selon le genre ............................................................ 93 Tableau 2.4 Résultat de la régression logistique multinomiale (n = 1 539) ............................................................. 94 Tableau 2.5 Répartition du statut professionnel selon le genre .................................................................................. 116 Tableau 2.6 Test de significativité « genre et nature des contrats » ......................................................................... 118 Tableau 2.7 Répartition par sexe du nombre de candidatures par diplômés au chômage depuis

qu’ils ont commencé à chercher du travail et nombre de fois où ils ont été

convoqués pour un entretien (entre parenthèses) ................................................................................... 137 Tableau 2.8 Echantillon de postes détenus par des employés sélectionnés dans une institution

financière en fonction du sexe et du diplôme .............................................................................................. 137 Tableau 2.9 Répartition par sexe du nombre de diplômés recrutés par l’institution financière

au cours des cinq dernières années .............................................................................................................. 139 Tableau 2.10 Répartition des résultats par sexe des étudiants en génie civil à

l’université publique : 2006-2010 .................................................................................................................. 146 Tableau 2.11 Répartition des résultats par sexe des étudiants en ingénierie électrique à

l’université publique de 2006 à 2010 ............................................................................................................ 146 Tableau 2.12 Répartition des résultats par sexe des étudiants en informatique à

l’université publique de 2006 à 2010 ............................................................................................................ 147

Tableau 2.13 Répartition des résultats par sexe des étudiants en commerce à l’université

publique de 2006 à 2010 .................................................................................................................................. 147 Tableau 2.14 Répartition des résultats par sexe des étudiants en communication de masse

inscrits à l’université privée de 2006 à 2010 .............................................................................................. 148

Tableau 2.15 Répartition des résultats par sexe des étudiants en sociologie inscrits à

l’université privée de 2006 à 2010 ................................................................................................................ 148 Tableau 2.16 Cadre d’autonomisation des femmes ........................................................................................................... 152 Tableau 2.17 Pourcentage des inscriptions dans les écoles primaires et secondaires selon

le genre, Binga, 2012 ......................................................................................................................................... 158 Tableau 2.18 Pourcentage des directeurs d’école et des sous-directeurs selon le genre, Binga, 2012 .............. 160 Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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Liste des graphiques Graphique 1.1 Répartition des parents des répondants(e)s selon leur profession .................................................... 31 Graphique 1.2 Parents les plus motivants, par profession .............................................................................................. 31 Graphique 1.3 Plus grandes sources de motivation pour étudier la technologie ........................................................ 31 Graphique 1.4 Frères et sœurs des répondantes et choix de la technologie ............................................................... 32 Graphique 1.5 Impact de l’éducation familiale sur le choix de la technologie ............................................................. 32 Graphique 1.6 Conseils reçus sur le choix des études ...................................................................................................... 32 Graphique 1.7 Défis rencontrés par les répondant(e)s ..................................................................................................... 33 Graphique 1.8 Répondant(e)s ayant déclaré avoir été victimes de harcèlement sexuel .......................................... 33 Graphique 1.9 Stratégies d’adaptation pour gérer le harcèlement sexuel .................................................................. 34 Graphique 1.10 Les filles doivent-elles étudier la technologie ? ...................................................................................... 35 Graphique 1.11 Opinions sur les femmes ingénieurs ............................................................................................................ 35 Graphique 1.12 Perception de la capacité des femmes ingénieurs à faire de bonnes épouses ................................. 36 Graphique 1.13 Cadre conceptuel ............................................................................................................................................. 42 Graphique 1.14 Obstacles personnels à la réussite ............................................................................................................. 46 Graphique 1.15 Obstacles professionnels à la réussite ...................................................................................................... 47 Graphique 2.1 Comparaison internationale du taux d’alphabétisation .......................................................................... 104 Graphique 2.2 Situation matrimoniale des diplômés actifs ............................................................................................. 117 Graphique 2.3 Choix des filières de formation selon le genre ......................................................................................... 117 Graphique 2.4 Répartition de la nature des contrats selon le genre ............................................................................. 117 Graphique 2.5 Répartition selon le genre des raisons ayant déterminé l’emploi occupé ......................................... 118 Graphique 2.6 Raison évoquée pour expliquer la situation de chômage ........................................................................ 118 Graphique 2.7 Répartition des actifs suivant le genre et l’employeur .......................................................................... 119 Graphique 2.8 Répartition des revenus mensuels selon le genre .................................................................................. 119 Graphique 2.9 Répartition des biens acquis grâce à la formation selon le genre ...................................................... 120 Graphique 2.10 Répartition selon le principal producteur de bien de la famille ........................................................... 120 Graphique 2.11 Acquittement des tâches domestiques ..................................................................................................... 121 Graphique 2.12 Nombre total d’étudiants inscrits à l’université publique de 2006 à 2010 ....................................... 132 Graphique 2.13 Nombre total d’étudiants inscrits à l’université privée de 2006 à 2010 ........................................... 132 Graphique 2.14 Nombre total d’étudiants inscrits en génie civil à l’université public de 2006 à 2010 ................... 133 Graphique 2.15 Nombre total d’étudiants inscrits en informatique à l’université publique de 2006 à 2010 ......... 133 Graphique 2.16 Nombre total d’étudiants inscrits en commerce à l’université publique de 2006 à 2010 ............. 133 Graphique 2.17 Nombre total d’étudiants inscrits en sociologie à l’université publique de 2006 à 2010 .............. 133 Graphique 2.18 Performances de chaque sexe en génie civil à l’université publique de 2007 à 2010 .................... 133 Graphique 2.19 Performances de chaque sexe en informatique à l’université publique de 2007 à 2010 ............... 134 Graphique 2.20 Performances de chaque sexe en commerce à l’université publique de 2006 à 2010 ................... 134 Graphique 2.21 Performances de chaque sexe en communication de masse à l’université privée de

2006 à 2010 ...................................................................................................................................................... 134 Graphique 2.22 Répartition par sexe des effectifs d’étudiants inscrits à l’université publique en

ingénierie électrique de 2006 à 2010 ......................................................................................................... 145 Graphique 2.23 Répartition par sexe des effectifs d’étudiants inscrits à l’université privée en

communication de masse de 2006 à 2010 ............................................................................................... 145 Graphique 2.24 Répartition par sexe des effectifs d’étudiants inscrits à l’université privée en génie

civil de 2007 à 2010 ....................................................................................................................................... 145

Graphique 2.25 Répartition par sexe des effectifs d’étudiants inscrits à l’université privée 10

en ingénierie électrique de 2006 à 2010 .................................................................................................. 145

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013


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Graphique 2.26 Structure de l’économie du Zimbabwe ....................................................................................................... 153 Graphique 2.27 Carte de Binga .................................................................................................................................................. 154 Graphique 2.28 Niveaux d’éducation des répondantes ........................................................................................................ 157 Graphique 2.29 Pourcentage des inscriptions dans les programmes d’éducation non formelle

selon le genre, 2007 ........................................................................................................................................ 157

Graphique 2.30 Ages des répondantes et leurs niveaux d’éducation ............................................................................... 158 Graphique 2.31 Utilisation des revenus du petit commerce transfrontalier selon le genre, 2009 .......................... 159 Graphique 2.32 Perceptions des répondantes des obstacles à l’éducation des filles à Binga ................................... 159

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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Liste des abréviations et des acronymes ADEA

Association pour le développement de l’éducation en Afrique

AFARD

Association des femmes africaines pour la recherche et le développement

AGEFOP

Agence nationale de la formation professionnelle

AGEPE

Agence pour l’étude et la promotion de l’emploi

ALMA

Africa Leadership and Management Academy

ANSD

Agence nationale de la statistique et de la démographie

ASHEWA

Association pour le renforcement de l’enseignement supérieur des femmes en Afrique

ASS

Afrique Subsaharienne

BAD

Banque africaine de développement

B.Com

BEAM

Bachelor of Commerce (Licencié en commerce) Modèle d’appui à l’éducation de base

BEST

Basic Education Statistics (Statistiques de l’éducation de base)

BIT

Bureau international du travail

BM

Banque mondiale

BNS

Bureau National des Statistiques

BREDA Bureau régional de l’UNESCO pour l’éducation en Afrique BTS

Brevet de technicien supérieur

CADEFINANCE Caisse d’épargne financière pour le développement de la petite entreprise Camfed

Campagne en faveur de l’éducation des filles

CDD

Contrat à durée déterminée

CDE

Comités de développement de l’école

CDI

Contrat à durée indéterminée

CEANU Commission économique pour l’Afrique des Nations Unies CEDAW

Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes

CEDEAO

Communauté économique des états de l’Afrique de l’ouest

CEPICI Centre de promotion des investissements en Côte d’Ivoire CERAP Research and Action Centre for Peace CFPC

Centre de formation professionnel et commercial

CIFIP

Centre international de formation et d’insertion professionnelle

CIRES

Centre ivoirien de recherches économiques et sociales

CIST

Conférence internationale des statisticiens du travail

CNPS

Caisse nationale de prévoyance sociale

CODIPRAL

Coopérative de distribution de produits alimentaires

COFULEF

Convergence des femmes universitaires pour le leadership féminin

CONFEMEN

Conférence des ministres de l’Education des pays ayant le français en partage

COOPEC

Coopérative d’épargne et de crédit

CORAF/WECARD Conseil ouest et centre africain pour la recherche et le développement agricoles COSEF Conseil sénégalais des femmes CRVFE Comité de réflexion sur les violences faites aux femmes et aux enfants CSO

Office central des statistiques

CSREES Cooperative State Research Extension Education Service 12

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CV

Curriculum Vitae

DESS

Diplôme d’études supérieures spécialisées

DGE

Direction générale de l’emploi

DSRP

Document de Stratégie de relance du développement et de réduction de la pauvreté

DUT

Diplôme universitaire de technologie

EC

Expert-comptable

ENSET

Ecole normale supérieure de l’enseignement technique

ENV

Enquête sur le niveau de vie des ménages

EPT

Education pour tous

EPU

Enseignement primaire universel

ESPS

Enquête de suivi de la pauvreté au Sénégal

ETFP

Enseignement technique et formation professionnelle

EVS

Espérance de vie scolaire

FAO

Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture

FASTEF

Faculté des sciences et technologies de l’éducation et de la formation de l’Université Cheikh Anta Diop

FAWE

Forum des éducatrices africaines

FENACOVICI

Fédération nationale des coopératives de vivriers de Côte d’Ivoire

FEWS NET

Réseau de systèmes d’alerte rapide aux risques de famine

FNSI

Femmes non scolarisées et insérées

FNSNI

Femmes non scolarisées et non insérées

FSI

Femmes scolarisées et insérées

FSNI

Femmes scolarisées et non insérées

GD

Groupe de discussion

GHAMSU

Union des étudiants méthodistes du Ghana

GSM

Groupes de soutien des mères

GT COMED

Groupe de travail sur la communication pour l’éducation et le développement

ICRW

Centre international de recherche sur les femmes

IDE

Investissement direct étranger

IDISA

Indicateurs de développement et des inégalités entre les sexes

IFEF

Institutions de formation et d’éducation féminine

IIPE

Institut international de planification de l’éducation

ILFS

Integrated Labour Force Survey (Enquête intégrée sur la population active)

INS

Institut national de la statistique

IPS

Indice de parité entre les sexes

ISL

Integrated Sustainable Livelihoods

ISSBD

Société internationale pour l’étude du développement comportemental

ISU

Institut de statistique de l’UNESCO

IUT

Institut universitaire de technologie

JCRC

Junior Common Room Council

JORDE Journal of Research and Development in Education MBA

Masters of Business Administration (Maîtrise en administration des affaires)

MEN

Ministère de l’Education nationale

MENARO

Bureau régional de l’UNICEF pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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MEF

Ministère de l’Economie et des Finances

MESAC Ministère de l’Education, des Sports, des Arts et de la Culture METFP Ministère de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle METFPALN

Ministère de l’Enseignement Technique, de la Formation Professionnelle, de l’Alphabétisation et des Langues Nationales

MKUKUTA

Mkakati wa Kukuza Uchumi na Kupunguza Umaskini Tanzania (acronyme en Kiswahili pour Stratégie Nationale de croissance économique et de réduction de la pauvreté en Tanzanie)

MLEYD

Ministère du travail, de l’emploi et du développement des jeunes

NESSE

Réseau d’experts en sciences sociales de l’éducation et de la formation

Norad

Agence norvégienne de coopération pour le développement

NUGS

Union nationale des étudiants du Ghana

NUPS

Union nationale des étudiants presbytériens

OCDE

Organisation de coopération et de développement économiques

OIT

Organisation international du travail

OMD

Objectifs du millénaire pour le développement

ONG

Organisation non gouvernementale

PACIL

Projet d’appui à la commercialisation et aux initiatives locales

PAS

Programmes d’ajustement structurel

PASS

Enquête d’évaluation de la pauvreté

PDRZ

Programme pour le développement du Zanzan

PENSA Etudiants pentecôtistes et associés PNUD

Programme des Nations unies pour le développement

RADI

Réseau africain pour le développement intégré

RBS

Ratio brut de scolarisation

REPOA Research on Poverty Alleviation RH

ROCARE

Réseau ouest et centre africain de recherche en éducation

RUT

République Unie de Tanzanie

SCN

Système de comptabilité nationale

SIDA

Syndrome d’immunodéficience acquise

SPSS

Statistical Package for the Social Sciences

SRC

Conseil représentatif des étudiants

TA

Taux d’abandon

TI

TIC

Technologie de l’information Technologies de l’information et de la communication

TGNP

Tanzania Gender Networking Programme (Programme de mise en réseau des questions du genre en Tanzanie)

TT

Taux de transition

UCAO

Université catholique de l’Afrique de l’ouest

UDSM

14

Ressources humaines

Université de Dar es Salaam

UE

Union européenne

UEW

Université des sciences de l’éducation de Winneba

UFHB

Université Félix Houphouët Boigny

UNESCO

Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013


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UNFPA

Fonds des Nations unies pour la population

UNICEF Fonds des Nations unies pour l’enfance UNIFEM

Fonds des Nations unies pour les femmes

UNISA

Université d’Afrique du Sud

VIH

Virus de l’immunodéficience humaine

ZIMSTAT

Agence nationale des statistiques du Zimbabwe

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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Vue d’ensemble Les études contenues dans ce troisième volume des Cahiers de recherche du FAWE abordent deux aspects spécifiques de l’éducation des filles et des femmes en Afrique. D’une part, elles examinent certains défis liés à la violence, aux agressions, au harcèlement, au découragement et à l’intimidation qui empêchent les filles et les jeunes femmes de profiter d’une expérience d’apprentissage complète, sûre et habilitante. D’autre part, elles posent la question de la pertinence et de l’efficacité des programmes d’éducation et de formation pour les marchés du travail en Afrique aujourd’hui et dressent l’inventaire des attitudes et des pratiques sexospécifiques qui influencent les expériences des jeunes femmes lors de leur transition vers le marché du travail. L’éducation est au cœur du développement économique et social dans toutes les sociétés modernes. Pourtant, les expériences et les résultats de l’éducation sont très différents pour les garçons et les filles et pour les hommes et les femmes. Bien que les deux sexes rencontrent des obstacles ou des difficultés liées aux réalités nationales, culturelles, géographiques et socio-économiques, il n’en demeure pas moins que le niveau d’alphabétisation, le niveau d’instruction et les opportunités économiques des filles et des femmes sont en général plus faibles que ceux des garçons et des hommes. Cela a de graves répercussions. Les niveaux plus faibles d’éducation des filles et des femmes limitent leur participation au marché du travail et cette sous-représentation a trop souvent pour conséquence un revenu global des ménages plus faible ainsi qu’une pauvreté persistante. L’éducation et l’émancipation socio-économique des femmes émergent ainsi comme un mécanisme essentiel de réduction de la pauvreté dans les communautés d’Afrique subsaharienne. S’assurer que les femmes obtiennent les bons résultats scolaires nécessaires à leur intégration sur le marché du travail, développent des compétences techniques et personnelles appropriées et sont capables de prendre des décisions éclairées sur leur avenir exige une éducation et une formation non discriminatoire. Pourtant, un éventail d’attitudes discriminatoires ou décourageantes, de pratiques inégales et diverses formes de harcèlement, d’agressions et de violence dans l’environnement d’apprentissage continuent de saper leurs résultats scolaires ainsi que l’acquisition de compétences et leur développement personnel. Du harcèlement et des agressions verbales aux violences sexuelles et physiques, l’expérience d’apprentissage de nombreuses filles et jeunes femmes aux niveaux secondaire et supérieur est caractérisée par le découragement, la peur, l’isolation et la souffrance physique et psychologique. L’impact sur leur développement personnel et leur réussite scolaire est loin d’être négligeable, entravant leurs progrès scolaires et professionnels. Les mécanismes qui assurent la sécurité et la protection des étudiantes, les initiatives qui leur permettent de faire face aux défis de l’environnement d’apprentissage, et les cadres d’orientation, de conseil

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Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

et d’autonomisation au sein des établissements d’enseignement sont quelques-unes des mesures qui sont cruciales pour améliorer les expériences et la réussite des étudiantes. Enseignement post-primaire : aborder la violence, le harcèlement et le découragement dans l’environnement d’apprentissage L’éducation des femmes en technologie à l’Institut universitaire de technologie de l’Université de Douala L’Université de Douala au Cameroun a enquêté sur les schémas spécifiques au genre affectant les jeunes femmes qui étudient la technologie à l’Institut universitaire de technologie. S’intéressant à la sous-représentation des jeunes femmes dans les programmes de technologie, l’étude visait à renseigner les facteurs de sous-représentation, les défis existants et les stratégies d’adaptation adoptées par les étudiantes affectées par ces défis. Tout en mettant en évidence la nécessité d’analyser les façons dont les environnements de l’enseignement supérieur perpétuent les défis sexospécifiques, la recherche a également étudié les stratégies adoptées par les étudiantes en technologie pour gérer la disparité entre les genres qu’elles ont connue au cours de leurs études universitaires. L’étude a identifié l’absence de planification et de suivi universitaires efficaces ciblant les étudiantes au sein de l’institut ainsi que des indications de harcèlement verbal et de violence psychologique à l’encontre des étudiantes par leurs condisciples masculins. Les femmes participant à l’étude ont insisté sur l’auto-motivation comme moyen de gérer ces défis ainsi que le rôle et l’influence positive des parents ayant fait des études, des frères et sœurs, de l’éducation familiale et des conseils. Les mesures adoptées par les étudiantes pour faire face aux défis qu’elles ont rencontrés ont constitué de puissants outils pour les aider à se construire et changer leur mentalité. D’après cette étude, cela implique la nécessité de mettre en place davantage de cadres d’autonomisation des femmes et de sensibilisation au sein de l’université ainsi que des mécanismes formels de conseil et des mesures concrètes pour infléchir le harcèlement sexuel. Explorer les expériences des femmes aux postes à responsabilité dans les établissements publics d’enseignement supérieur au Ghana Bien que les associations étudiantes des universités ghanéennes aient servi de plateformes et de terrain préparatoire à certains dirigeants politiques actuels du pays, l’Université de l’éducation à Winneba a cherché à comprendre pourquoi les anciens dirigeants étudiants qui sont devenus des dirigeants politiques sont principalement des hommes. En effet, bien que les femmes représentent environ 51 pour cent de la population du Ghana, d’après la littérature passée en revue par l’étude, elles représentent moins de 15 pour cent des parlementaires et moins de 10 pour cent des directeurs généraux des différents mi-


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nistères. Cette recherche a par conséquent choisi d’examiner les expériences des étudiantes dirigeantes sur les campus des établissements publics d’enseignement supérieur au Ghana et d’explorer les meilleures façons d’optimiser la plateforme du leadership pour développer et former plus de femmes dirigeantes. Les bureaucraties institutionnelles ont été identifiées comme constituant le défi majeur au leadership des étudiantes et qui sape leurs efforts de leadership au sein des établissements étudiés. Les commissaires des femmes de certains établissements se sont plaintes du manque d’affectation budgétaire en faveur de leur unité, tandis que le parrainage des programmes organisés par les étudiantes était très faible et décourageant. En revanche, les étudiantes dirigeantes avaient été encouragées à briguer leur poste par des éléments externes, à savoir ami(e)s, prédécesseurs et modèles et elles avaient reçu un soutien financier, moral et pour leur campagne de leurs parents, frères et sœurs, amis (femmes et hommes), fiancés, professeurs et mentors. L’étude suggère aux établissements d’enseignement supérieur de créer des directions du genre dotées d’un personnel qualifié ayant pour priorité le développement du potentiel de leadership des étudiantes, d’étendre les systèmes de mentorat ciblant les étudiantes de la sphère universitaire au domaine du leadership et de se mettre en relation avec les organisations non gouvernementales (ONG) œuvrant sur le genre pour apporter un soutien financier et logistique aux étudiantes dirigeantes potentielles. Violence sexuelle dans les écoles pour élèves ayant des besoins spécifiques en Afrique du Sud Les ramifications importantes de la violence sexuelle à l’école, notamment l’infection par le VIH et les problèmes scolaires, représentent une double violation du droit à l’éducation des apprenants ayant des besoins spéciaux qui sont déjà confrontés à de graves défis pour avoir accès à une éducation de qualité. L’Université d’Afrique du Sud a ainsi mené une étude portant sur la violence sexuelle parmi les apprenants souffrant d’un handicap pour comprendre comment cette forme de violence sexuelle contribue à la perte d’autonomie et à la marginalisation des apprenants ayant des besoins spéciaux. En documentant les formes de violence sexuelle dans les écoles pour les apprenants ayant des besoins spéciaux et en examinant les processus et les pratiques scolaires motivant ce type de comportements, l’étude a constaté que la violence sexuelle chez les apprenants était courante et prenait de nombreuses formes, avec des types de violence sexuelle variant selon les différents handicaps des apprenants. La recherche a également constaté des preuves de pratiques et de processus au sein des écoles favorisant la violence sexuelle. Citons notamment la surveillance adulte limitée autour des bâtiments scolaires et dans les bus scolaires, l’insuffisance des connaissances sur la violence sexuelle parmi le personnel scolaire, l’absence de règlement scolaire régissant le comportement entre les apprenants, la mauvaise gestion des cas de violence sexuelle signalés et la pression des pairs chez les auteurs de violence sexuelle. L’étude recommande des

politiques claires dans les écoles en ce qui concerne la violence sexuelle et les procédures de signalement, un personnel scolaire bien formé et une éducation sexuelle appropriée, le renforcement de la sécurité autour des bâtiments scolaires, et des écoles séparées pour les apprenants plus jeunes et les plus âgés. Le but de l’école est de contribuer à réparer les dégâts causés par l’expérience de la violence sexuelle chez les apprenants ayant des besoins spéciaux et de promouvoir des environnements d’apprentissage sûrs. Le marché du travail : renforcer les liens entre l’éducation et le monde du travail Education et insertion des femmes sur le marché du travail à Abidjan En Côte d’Ivoire, les femmes souffrent d’un taux de chômage plus important que celui des hommes, avec 19,8 pour cent de femmes sans emploi en 2008 contre 12,1 pour cent des hommes. De plus, on comptait 54 pour cent de femmes analphabètes en 2009 contre 39 pour cent d’hommes. Quelles sont les implications pour l’intégration des femmes sur le marché du travail en Côte d’Ivoire, et plus précisément dans la ville d’Abidjan, et quel est le rôle de l’éducation ? Le CIRES a cherché les réponses à ces questions en analysant l’impact du niveau d’éducation des femmes sur leur participation dans les différents segments du marché du travail à Abidjan : public, privé formel et privé informel. Bien que l’on ait constaté que le niveau d’éducation n’ait pas un impact significatif sur la probabilité pour une femme d’être au chômage à Abidjan, il semblerait qu’il y ait une forte corrélation entre le niveau d’éducation des femmes et leur intégration dans certains segments du marché du travail. Les femmes analphabètes représentaient 49,9 pour cent des femmes travaillant dans le secteur informel, tandis que les femmes ayant fait des études secondaires ou supérieures étaient mieux représentées dans le secteur formel, public comme privé. Néanmoins, on a constaté que la participation des femmes dans l’emploi formel était faible. Que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé, 70 pour cent des personnes employées dans le secteur formel à Abidjan étaient des hommes. Les femmes, quand elles travaillaient, étaient plus présentes dans l’emploi informel, représentant 48,6 pour cent des personnes travaillant dans ce secteur. La recherche a appelé à remettre en cause les idéologies concernant le rôle des femmes dans la société et à repenser les moyens disponibles pour promouvoir leur émancipation socio-économique et faciliter leur intégration sur le marché du travail. Elle propose que les différentes catégories de parties prenantes de l’éducation prennent plusieurs mesures à cet égard. Genre, insertion dans le marché de l’emploi et impacts socio-économiques des formations professionnelles dispensées à Dakar Au Sénégal, bien que les femmes aient toujours participé à l’industrie des services, à l’industrie légère et au secteur agroalimentaire, en particulier dans les zones urbaines, leur absence de formation accréditée est un Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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obstacle majeur à l’autodétermination et à la productivité. Le ROCARE a centré son enquête sur deux établissements de formation technique et professionnelle à Dakar. Il s’est attaché à déterminer si le genre déterminait la réussite de l’insertion sur le marché du travail et analysé les impacts socio-économiques de l’enseignement et de la formation techniques et professionnels. Bien que la taille de l’échantillon rende difficile la généralisation des conclusions, l’étude a révélé que 60 pour cent des femmes formées dans les deux établissements avaient un emploi, contre 40 pour cent des hommes. Les femmes étaient aussi plus souvent employées avec un contrat à durée indéterminée, tandis que les hommes avaient davantage des contrats plus courts, à durée déterminée. La recherche a également révélé que les femmes étaient davantage susceptibles d’obtenir un diplôme de secrétaire ou d’assistante de direction, tandis que les hommes étaient plus susceptibles de s’inscrire en comptabilité/finances et en commerce international. Ainsi, bien que le marché du travail semble favoriser les femmes, leur programme d’études ne leur permet pas toujours d’atteindre le même niveau professionnel que les hommes. Citons parmi les recommandations qui ont émergé de cette étude la promotion de l’auto-emploi par le financement des petites ou moyennes entreprises dans un effort pour accroître les opportunités d’emploi dans le secteur privé, des mesures pour encourager le recrutement accru de diplômé(e)s de l’enseignement et de la formation techniques et professionnels, et l’offre de conseils pratiques et de préparation destinée aux étudiants, hommes et femmes, en matière de candidatures et d’entretiens d’embauche. Explorer la nature sexospécifique des liens éducation-marché du travail en Tanzanie : au-delà des chiffres L’étude menée par REPOA en Tanzanie a cherché à savoir si l’augmentation des femmes inscrites dans l’enseignement supérieur était une voie vers l’amélioration de l’égalité entre les genres dans le domaine de l’emploi. Le principal argument issu de cette recherche est que malgré l’augmentation du nombre de femmes inscrites dans l’enseignement supérieur, les attitudes et les pratiques sexospécifiques inhérentes – à savoir le résultat de processus différenciés par genre dans les différentes sphères de la vie – continuent de produire des effets sexospécifiques sur les autres résultats de l’éducation qui nuisent aux femmes diplômées en matière d’emploi. Les données du recrutement ont indiqué un recrutement plus important d’hommes diplômés certaines années et de femmes diplômées d’autres années, bien que l’étude ait révélé certaines attitudes et pratiques qui pourraient avoir un impact différent sur la transition des étudiants, hommes et femmes, de l’enseignement supérieur vers le marché du travail. On a constaté que les opportunités d’emploi étaient limitées à la fois pour les femmes et les hommes diplômés de l’université, mais bien que les demandeurs d’emploi, hommes et femmes confondus, aient envoyé de nombreuses candidatures, les hommes étaient généralement plus dynamiques dans ce domaine. Enfin, 18

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les employeurs ont exprimé des préoccupations liées au genre : le possible départ en congé maternité des employées féminines et le recrutement des femmes avec des enfants en bas âge. L’étude de REPOA a suggéré d’adopter une approche intégrée à l’éducation et aux processus de prise de décision et de mise en œuvre de l’emploi pour résoudre efficacement le problème d’inadéquation des compétences, des mesures pour promouvoir l’interaction et le dialogue entre l’éducation et le monde du travail, des mesures favorisant l’égalité des chances et décourageant les processus différenciés par genre et des recherches approfondies qui explorent dans quelle mesure les attitudes et les pratiques sexospécifiques qui sapent la confiance des étudiantes sont répandues dans le système éducatif. Les activités des femmes dans le secteur informel et le soutien à l’éducation des filles à Binga : Perspectives des femmes dans le secteur informel Au Zimbabwe, à mesure que la pauvreté dans les ménages dirigés par les femmes a augmenté, la participation des femmes aux activités du secteur informel s’est intensifiée ainsi que le traitement préférentiel des garçons sur les filles quand il s’agit d’envoyer les enfants à l’école. Cependant, peu a été fait pour déterminer la relation entre la participation accrue des femmes dans les activités du secteur informel et l’éducation des filles ou sa relation à la perception des femmes de l’éducation des filles. L’étude menée par l’Université du Zimbabwe a ainsi cherché à établir les facteurs qui entravent l’éducation des filles à Binga, une localité située dans le nord-ouest du Zimbabwe, les perspectives des femmes à l’égard de l’éducation des filles et leurs priorités quand elles ont des revenus, comment les activités génératrices de revenus ont aidé à surmonter certains obstacles à l’éducation des filles et les autres facteurs promouvant l’éducation des filles à Binga ces dernières années. Les conclusions de l’étude ont suggéré que la participation des femmes dans le secteur informel avait contribué de façon positive à l’éducation des filles. De meilleures sources de revenus ont eu pour effet de permettre aux familles d’envoyer leurs enfants à l’école, y compris les filles, tandis que la prise de conscience de l’importance de l’éducation dans leurs activités commerciales a conduit les femmes entrepreneures à un changement d’attitude positif à l’égard de l’éducation des filles. Par ricochet, cela a encouragé les femmes qui avaient abandonné l’école à profiter des opportunités offertes par l’éducation de la deuxième chance et d’instaurer un dialogue avec les filles sur l’importance de l’éducation. Cependant, les femmes qui travaillent dans le secteur informel ont souvent besoin d’aide pour assumer les tâches ménagères et ont tendance à demander aux filles de la famille de s’en occuper. Les conclusions suggèrent la nécessité d’initiatives de sensibilisation sur les droits de l’enfant, y compris le droit à l’éducation tant pour les filles que pour les garçons ainsi que sur les grossesses précoces et la politique de réintégration scolaire des mères adolescentes. De plus, l’étude a demandé une analyse de l’impact de la participation des femmes dans le secteur informel sur les résultats des


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filles à l’école ainsi qu’une étude approfondie pour déterminer le degré d’inégalités entre les genres et les stéréotypes dans les écoles en ce qui concerne la distribution des ressources éducatives disponibles, la sélection des matières et l’attribution des rôles et des responsabilités, entre autres. Renforcer le partenariat recherche en éducation-politique en Afrique en vue d’un impact plus grand Les études contenues dans ce volume confirment que les recherches menées par des Africains exerçant dans le contexte éducatif africain peuvent être en première ligne pour identifier des solutions politiques à certains problèmes persistants en matière d’éducation des filles et des femmes et d’intégration économique. Si l’on veut que la recherche contribue aux mesures qui améliorent la réussite scolaire et professionnelle des filles et des femmes, il est néanmoins important de renforcer les liens entre la recherche et le processus de prise de décision.

D’une part, les capacités des chercheurs africains doivent être renforcées en permanence et leurs programmes de recherche sur les politiques constamment affinés. D’autre part, il est essentiel qu’une communication claire du milieu politique permette aux chercheurs de cibler les domaines critiques de recherche et que la recherche soit une composante essentielle du processus de mise en œuvre des politiques. L’objectif du FAWE est d’exploiter la recherche pour influencer les politiques tant au niveau national qu’à celui des établissements d’enseignement afin d’améliorer les résultats scolaires des filles et des femmes africaines. Le renforcement des partenariats entre la communauté africaine de recherche et les responsables de la mise en œuvre des politiques est crucial pour y parvenir. Grâce à ce type de partenariat étroit, il sera possible d’accroître le potentiel des connaissances issues des études de ce volume pour apporter une contribution positive au dialogue politique.

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lutter contre la violence, le harcèlement et le découragement dans l’environnement d’apprentissage


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Enseignement post-primaire : lutter contre la violence, le harcèlement et le découragement dans l’environnement d’apprentissage Le thème commun aux trois études de cette section est la sécurité, le bien-être et le développement personnel des étudiantes dans les contextes spécifiques de l’enseignement post-primaire. Au Cameroun, l’Université de Douala se penche sur la façon dont les jeunes femmes suivant des études de technologie– un domaine longtemps considéré comme typiquement masculin – affrontentle harcèlement verbal, sexuel et les autres formes de harcèlement qui sapent leur motivation, leur assurance et leur réussite. Au Ghana, les jeunes femmes se présentant aux élections des associations étudiantes à l’université ont trouvé des formes de soutien et d’encouragement pour surmonter les railleries, les frustrations etl’isolementsuscités par leurs postes. Pourtant, certaines de celles qui sont élues ne joueraient pas un rôle actif en matière de leadership et de prise décision.

En Afrique du Sud, les jeunes filles souffrant de handicaps physiques et mentaux sont la cible de nombreuses formes de violence sexuelle, notamment de viols, perpétrée par desgarçons qui souffrent des mêmes handicaps physiques et mentaux qu’elles. Malgré la rareté des mécanismes en place pour les protéger et signaler ou poursuivre en justice les agresseurs, certaines filles proposent des pistes pour diminuer l’incidence de la violence sexuelle, notamment pour s’assurer que les filles plus jeunes ne subissent pas les mêmes abus. Les études suggèrent que les personnes les plus affectées par la violence, le harcèlement et le découragement dans leur environnement d’apprentissage ont le potentiel d’identifier et d’employer des moyens pour surmonter ces situations et peuvent proposer des pistes efficaces pour s’assurer que ces défis à leur sécurité personnelle, à leur bien-être, à leur réussitescolaire et au développement de leurs compétences sont éliminés.

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Université de Douala

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La technologie est toujours représentée au Cameroun comme un domaine typiquement masculin. Grâce à leur détermination et au soutien de membres importants de leur famille, une minorité d’étudiantes se lancent dans les différents secteurs de la technologie.

L’éducation des femmes en technologie à l’Institut universitaire de technologie de l’Université de Douala

RÉSUMÉ La sous-représentation des femmes dans les filières techniques exige d’analyser comment l’enseignement supérieur, à travers ses environnements d’apprentissage, perpétue les expériences et les défis sexospécifiques. Nous avons ensuite été amenées à nous interroger sur les stratégies adoptées par les femmes pour gérer la disparité entre les genres dans les filières techniques. La présente étude vise à enquêter sur les schémas spécifiques au genre affectant l’inscription des femmes dans les cours d’ingénierie à l’Institut universitaire de technologie (IUT) de l’Université de Douala, en mettant l’accent sur la sous-représentation, les défis rencontrés et les stratégies d’adaptation déployées par les femmes qui sont les plus affectées. Cette recherche a été menée par des femmes, professeures à l’université, connaissant bien les facteurs sexospécifiques dans l’enseignement supérieur. Entre mars et juin 2012, des données concernant les facteurs de motivation, les perceptions et les attitudes, les défis et la réussite universitaire et les stratégies d’adaptation déployées pour surmonter les défis de l’environnement universitaire ont été collectées auprès d’étudiantes en technologie. Ces données ont été recueillies auprès de 231 étudiantes de première, deuxième et troisième année, inscrites pour la plupart dans trois disciplines orientées vers la technologie : génie électrique et informatique et industriel, génie mécanique et productique et génie industriel et maintenance. Etant donné que les données qualitatives peuvent produire des informations quantitatives et vice-versa, nous avons décidé de mener une étude à méthodologie mixte. Les données qualitatives sur les facteurs de motivation, les

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perceptions et les attitudes, le harcèlement sexuel, les défis et l’évaluation des femmes ingénieurs ont été collectées au moyen de questionnaires distribués aux étudiants, hommes et femmes. Cette méthode d’échantillonnage dirigé nous a permis de « recueillir des informations ciblées » au lieu de « cas typiques utiles seulement » (Oso et Onen, 2008: 79) et dans un délai limité. Des entretiens individuels en face à face avec une « communication verbale de personne à personne » ont été utilisés pour obtenir des informations qualitatives complémentaires auprès de 12 étudiantes sur les variables ci-dessus mentionnées, puisque les défis et les stratégies d’adaptation adoptées par les femmes ne peuvent pas être « observés » directement (Oso et Onen, 2008: 84), ni obtenus dans les livres. Les données statistiques (quantitatives) d’inscription sur les ratios hommes-femmes ont été obtenues à partir de la brochure fournie par l’administration universitaire. L’étude a révélé que la plupart des femmes qui ont choisi d’étudier les disciplines technologiques l’ont fait en dépit des efforts de dissuasion de leurs ami(e) s et de leurs proches et affichaient un niveau élevé de motivation personnelle et une passion pour la discipline concernée. La plupart des répondantes ont aussi déclaré l’absence de services officiels de conseil dans les lycées et les universités. La majorité avait des parents ayant fait des études qui les avaient encouragées directement ou indirectement. Il faudrait néanmoins mettre l’accent sur l’offre officielle de conseils et d’encouragement à l’intention des filles douées en mathématiques et en science pour les orienter vers les disciplines technologiques. Certaines répondantes ont révélé avoir été victimes de harcèlement sexuel, en particulier de la part de professeurs de sexe masculin qui avaient essayé de les séduire avec de l’argent ou leur avaient offert de bonnes notes en échange de faveurs sexuelles. Pour cette raison, la plupart des filles pensaient qu’elles devaient parler et agir comme des garçons pour réussir et éviter le harcèlement. Elles développaient donc fortes personnalités pour paraître moins vulnérables à leurs homologues masculins. L’analyse qualitative des défis liés à l’environnement universitaire a révélé que ces mesures constituaient de puissants outils d’auto-construction et d’évolution des mentalités. Il est néanmoins nécessaire que les établissements d’enseignement supérieur prennent des mesures concrètes pour vérifier la prévalence du harcèlement. 1. INTRODUCTION ET CONTEXTE Le droit des femmes à l’éducation a fait l’objet d’une grande attention. Il convient de signaler les efforts de l’UNESCO pour promouvoir l’égalité entre les genres et améliorer la situation des femmes. Son troisième Plan à moyen terme (1990–1995) mettait l’accent sur la participation des femmes considérée comme la condition sine qua non de la réussite du développement. La priorité 1 2

est accordée à « l’éducation des femmes et des filles », clé de leur participation sur un pied d’égalité à tous les aspects de la vie économique, sociale culturelle » (Tchombe, 1994: Préface). Les contributions de l’UNESCO en vue d’améliorer et d’affirmer le droit des femmes à l’éducation sont attestées par les textes existants sur les efforts, l’accès, la participation et les activités publiés par le Bureau régional de l’UNESCO pour l’éducation en Afrique1. Une autre tendance mondiale fondamentale des efforts en faveur de l’éducation et la formation des femmes est le Plan d’action du Commonwealth et la Déclaration et le Plan d’action de Beijing de 1995. La nécessité d’assurer l’accès des femmes à « la science et la technologie … la scolarité et l’éducation formelle et informelle (LeoRhynie 1999: 12) sont quelques-unes des priorités spécifiques de la Déclaration de Beijing. Le Plan d’action de Beijing a accordé une attention particulière à l’éducation et à la formation des femmes. Les objectifs de cette section spécifique ont insisté sur la nécessité d’assurer l’égalité de l’accès à l’éducation des femmes, d’éradiquer l’analphabétisme des femmes, d’améliorer l’accès des femmes à la formation professionnelle, la science et la technologie et la formation continue, de développer des systèmes d’éducation et de formation non discriminatoires, d’affecter des ressources suffisantes en faveur des réformes éducatives et du suivi de leur mise en œuvre et de promouvoir l’éducation et la formation tout au long de la vie des filles et des femmes (Leo-Rhynie, 1999: 12). Bien que le droit à l’éducation des femmes et des filles soit à présent garanti par plusieurs instruments des droits de l’homme allant de la Constitution du Cameroun et la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 à la Convention de 1979 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes2, les femmes représentent toujours la majorité de la population analphabète. Ce n’est donc pas une simple hypothèse que de dire qu’au Cameroun les femmes ont traditionnellement été marginalisées et privées du droit à l’éducation. D’après Fonkoua (1994: 11), les résultats du recensement de 1987 indiquaient que 43,3 pour cent de la population âgée de 15 ans et plus ne savait ni lire ni écrire dans aucune langue. Sur cette population analphabète, 34,3 pour cent d’hommes ne savaient ni lire ni écrire contre 55,1 pour cent de femmes. Cela implique que les deux tiers de la population féminine étaient analphabètes. Les statistiques alarmantes de sous-représentation numérique dans l’enseignement supérieur au Cameroun en1999–2000 sont fournies par Fonkoua (1994: 11) qui notait qu’en 1991–1992, les filles ne constituaient que 17,3 pour cent des admissions dans les disciplines scientifiques, 12,5 pour cent à l’école de médecine et 1,9 pour cent à l’Ecole normale supérieure polytechnique. On peut déduire des statistiques susmentionnées que même lorsque les femmes accèdent à l’éducation, elles choisissent rarement de suivre des

Pour plus renseignements à ce sujet, voir Tchombe, 1994: Préface. Le Cameroun a accédé au Protocole facultatif du CEDAW le 7 janvier 2005. Extrait de http://www.UN.org/womenwatch/daw/cedaw.

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cours de science et de technologie, en particulier dans l’enseignement supérieur. C’est aussi le cas à l’IUT de l’Université de Douala où la sous-représentation des femmes dans les filières d’ingénierie a motivé la présente étude. Ce n’est pas forcément à cause de capacités intellectuelles inférieures, mais en raison de plusieurs facteurs, notamment leur situation socioéconomique et les croyances religieuses et traditionnelles au sein de la société plus large. Les efforts nationaux et internationaux ci-dessus mentionnés ont permis une relative amélioration de l’éducation des femmes. Les statistiques révèlent qu’au Cameroun, entre 2005 et 2009, la population féminine des établissements d’enseignement supérieur était passée de 40 070 à 77 553 ou de 39,73 pour cent à 42,53 pour cent (Lebogo, 2012: 2). Cependant, les statistiques de 2011– 2012 de l’IUT ont indiqué que sur 616 étudiants inscrits, on comptait 89 filles et 527 garçons. Ce déséquilibre alarmant ne révèle pas seulement une disparité entre les genres dans les filières de technologie, mais elles montrent que la technologie est toujours représentée au Cameroun comme un domaine typiquement masculin. Grâce à leur détermination et au soutien de membres importants de leur famille, une minorité d’étudiantes se lancent dans les différents secteurs de la technologie. Au vu de ce constat, l’étude est fondée sur une enquête quantitative et qualitative des femmes inscrites dans les filières de technologie à l’IUT, en mettant l’accent sur la sous-représentation, les défis sexospécifiques liés à l’environnement universitaire et les stratégies adoptées pour surmonter ces défis. En présentant un aperçu des facteurs de motivation, des défis et des stratégies d’autoconstruction déployées par les femmes pour surmonter les défis de l’environnement universitaire, l’étude sera en mesure de formuler des recommandations pour améliorer l’inscription des femmes en ingénierie et les conditions de l’environnement scolaire. Elle pourra également faire des propositions sur la façon de remédier aux défis auxquels elles sont confrontées en technologie toujours perçue sur le plan socioculturel comme un domaine essentiellement masculin. L’étude espère contribuer à présenter les mesures sensibles au genre dans l’enseignement supérieur. Une telle tentative vise également à accroître la prise de conscience sur la nécessité que les femmes adoptent des mesures d’auto-construction (comme la détermination, l’affirmation de soi, l’auto-transformation, la compétitivité et les stratégies d’autonomisation personnelle). Objectifs de l’étude Les principaux objectifs de l’étude étaient les suivants : - Voir quelles attitudes et perceptions perpétuées au sein de l’environnement universitaire empêchent l’inscription des filles et des femmes dans les programmes d’ingénierie. - Fournir des données pouvant amener les responsables politiques à mettre en place des interventions visant à faire évoluer les attitudes et stimuler l’inscription des

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femmes/filles à l’IUT en particulier et dans les filières de technologie en général. - Déterminer les résultats universitaires, les relations avec les autres étudiant(e)s et les enseignants et les facteurs qui motivent les filles à s’inscrire dans les filières de technologie ainsi que les formes et les manifestations des schémas sexospécifiques pouvant affecter leur représentation dans les programmes d’ingénierie et de technologie. - Identifier les stratégies d’adaptation déployées par les étudiantes pour venir à bout des défis qu’elles rencontrent. - Suggérer des politiques et des stratégies sensibles au genre pouvant encourager et favoriser l’inscription des femmes. 2. Revue de la littérature La sous-représentation féminine et les schémas sexospécifiques affectant l’inscription des filles dans les cours d’ingénierie n’est pas un domaine de recherche inédit. Des travaux de recherche antérieurs ont exploré la représentation féminine en science, mathématiques et technologie. A la différence de ces études (plus spécifiquement FAWE, 2010: 64–76) qui ont isolé les stratégies d’auto-construction et de motivation de leur contexte et mis l’accent sur les disparités entre les genres en matière d’accès, participation et achèvement, la présente étude examine les facteurs de motivation, les perceptions, les attitudes ainsi que les capacités personnelles d’autonomisation susceptibles d’encourager une hausse des inscriptions et de permettre aux femmes de surmonter les défis des études en ingénierie. La revue ci-dessous de documents sélectionnés explore les études sur les femmes en science et en technologie et aborde partiellement les questions analysées nécessitant une attention approfondie. [Bien que] l’éducation des filles et des femmes soit … un investissement important …, des inégalités considérables entre les genres existent dans le secteur éducatif. On ne constate pas seulement ces inégalités dans les indicateurs que l’on peut obtenir facilement à partir des données des recensements démographiques comme l’alphabétisation, la scolarisation, l’achèvement et les niveaux de scolarité obtenus, mais aussi dans plusieurs autres aspects de l’éducation concernés par la quête de l’égalité et l’équité entre les genres, par exemple les gestionnaires aux postes de décision, le contenu des curricula et les réformes ainsi que l’interaction enseignantélève (Leo-Rhynie, 1999: 7–8). Leo-Rhynie attire l’attention sur les facteurs liés aux inégalités entre les genres dans le secteur éducatif et les domaines dans lesquels ces inégalités sont facilement discernables. L’alphabétisation, la scolarisation, l’achèvement et les niveaux d’études atteints sont des domaines dans lesquels les disparités entre les genres sont visibles dans les écoles.


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Les programmes d’enseignement professionnel ont traditionnellement fait l’objet d’une ségrégation selon le sexe, orientant les hommes et les femmes dans des filières différentes. Alors que les femmes sont majoritairement formées à la santé, l’économie familiale, la bureautique et le commerce, les hommes se trouvent principalement dans les travaux de préparation technique (Leo-Rhynie, 1999: 23).

Nous avons une compréhension claire de la préférence accordée aux hommes en matière d’inscription en technologie au détriment des femmes grâce à LeoRhynie qui mentionne de façon implicite l’attitude traditionnelle de « ségrégation entre les sexes » qui refuse aux femmes l’accès à l’éducation, aux études et aux professions en technologie. Les écoles cultivent indéniablement des attitudes et des perceptions fondées sur le genre. L’enseignement supérieur au Cameroun ne fait pas exception. On peut en déduire à juste titre que l’orientation des femmes dans les filières non techniques a eu un impact très significatif sur leur inscription à l’IUT, en particulier en ingénierie. Le fait que les extraits cités ci-dessus identifient les types de programmes éducatifs et les niveaux dans lesquels l’écart entre les genres est toujours visible et qu’ils en rendent responsable la nature discriminatoire entre les sexes de l’enseignement professionnel est déjà une indication que la recherche sur les disparités entre les genres dans l’enseignement supérieur devrait recevoir plus d’attention. Nous ne voulons pas dire que rien n’a été fait pour gérer les obstacles que les femmes et les filles rencontrent dans l’enseignement supérieur au Cameroun et ailleurs. Nous avons analysé quelques études disponibles pour faire le point sur l’état des connaissances relatives à l’écart entre les genres dans l’enseignement supérieur technique au Cameroun et identifier les domaines insuffisamment traités. Nous avons également effectué une revue de la littérature des documents, revues, et articles sur le genre. ASHEWA dans FAWE (2010: 64–76) a soutenu que la participation des filles et des femmes en science, en mathématiques et en technologie au Lesotho, au Swaziland et au Zimbabwe a été gravement compromise à la fois aux niveaux secondaire et supérieur. Ce travail recoupe celui de la présente étude, car il tente de comprendre pourquoi les filles et les femmes sont moins susceptibles de choisir la science, les mathématiques et la technologie à l’école secondaire et à l’université. Pour ce faire, la présente étude a identifié les facteurs dissuasifs comme le manque de confiance en elles des femmes, l’absence de cours de mise à niveau des compétences et des connaissances des filles en technologie, les curricula et l’intégration du genre, les politiques de lutte contre la violence, l’impact des grossesses et du mariage sur les étudiantes et les problèmes liés aux logements hors du campus. Elle a aussi enquêté sur les processus sociaux au sein des établissements d’apprentissage pouvant favoriser la participation des filles et des femmes et a recommandé l’introduction de programmes-passerelles,

d’activités après les cours, la création de politiques de genre et de structures d’intégration du genre ainsi que l’offre d’incitations pour améliorer les résultats des femmes dans les matières quantitatives, de lutter contre le harcèlement sexuel, de changer les perceptions et de concevoir des stratégies d’adaptation comme la détermination, le courage et l’affirmation de soi entre autres. Tout cela est absent de l’étude de ASHEWA. Osongo (2006) a étudié le harcèlement sexuel dans les universités kenyanes et a mis l’accent sur la façon dont les inégalités nuisent à l’avancement professionnel des femmes. Elle s’est concentrée sur les programmes pouvant favoriser la participation des femmes dans les disciplines traditionnellement masculines et a évoqué des activités comme les séminaires sur les possibilités de carrière en science et l’exposition des femmes aux possibilités de carrière en science. Tchombe (1994) a mené une étude détaillée sur l’accès des filles dans l’enseignement de base au Cameroun. Bien qu’elle ait limité sa recherche à l’enseignement primaire et de base, les données de son étude ont révélé que « les inégalités entre les genres restent une caractéristique régulière des tendances en matière d’inscription dans le système éducatif camerounais, avec un déséquilibre général au détriment du sexe féminin » (Tchombe, 1994: 7). La faiblesse du taux d’inscription de filles dans les enseignements primaire et secondaire au Cameroun (que Tchombe attribue aux contraintes politiques, au système éducatif, aux facteurs socioreligieux, aux pratiques morales et religieuses, aux facteurs économiques, linguistiques, psychologiques et géographiques) éclaire les contraintes et les facteurs qui contribuent à favoriser les mentalités considérant la femme comme intellectuellement improductive, inférieure et très incompétente par opposition à son homologue masculin. Bien que l’analyse de Tchombe ne couvre pas l’enseignement supérieur, et en particulier l’ingénierie et la technologie, ces mentalités et facteurs culturels qui ne favorisent pas l’égalité de l’accès et de la participation des femmes à l’éducation corroborent également l’héritage de longue date selon lequel certains domaines sont des prérogatives masculines. Les contraintes sociales révèlent en outre comment « l’idéologie patriarcale fonctionne pour garder les femmes et les hommes dans leurs rôles sexospécifiques traditionnels et par conséquent maintenir la domination masculine » (Tyson, 1999: 90) et rendre la femme « inadaptée » à l’enseignement scientifique et technique. Les questions sexospécifiques relatives à l’enseignement supérieur au Cameroun ont été étudiées par Endeley et Ngaling et Mulugeta (ASHEWA: dans FAWE, 2010: 100) qui ont examiné le harcèlement sexuel, la violence contre les femmes, les relations entre les professeurs et les étudiantes et l’inégalité du nombre de femmes par rapport aux hommes aux postes de direction de deux universités. Dans la même étude, Endeley et Ngaling (ASHEWA: dans FAWE, 2007: 100) ont recommandé la création « d’un environnement durable inclusif au genre

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par le biais de politiques et de pratiques que chacun pourrait soutenir et qui ne dépendrait pas de quelques féministes enthousiastes ». Les chercheuses ont par ailleurs identifié le manque de soutien financier comme obstacle supplémentaire. La recherche sur l’écart entre les genres dans l’enseignement supérieur doit être focalisée sur les écoles d’ingénierie et de technologie où le taux d’inscription des femmes est, de façon alarmante, inférieur à celui des hommes. Une étude sur ce sujet devrait aborder les facteurs sexospécifiques responsables du faible taux d’inscription des femmes en technologie, les défis perpétués au sein de l’environnement scolaire et les stratégies d’adaptation déployées par les femmes ainsi que les solutions aux problèmes qui empêchent l’égalité de l’inscription et de la participation des filles et des femmes en ingénierie et en technologie. Une étude similaire sur les disparités entre les genres dans les établissements d’enseignement supérieur du Cameroun a été réalisée par Fonkoua (1994). D’après lui, les filles et les femmes des universités camerounaises préfèrent se spécialiser dans les disciplines non scientifiques et opter pour la littérature, les sciences sociales en général, le droit, l’économie et les sciences appliquées ou médicales. Très peu d’entre elles choisissent des disciplines purement scientifiques comme les mathématiques, la physique, l’informatique et l’ingénierie. La chercheuse appuie son argument par le faible pourcentage d’inscription des femmes dans cinq établissements d’enseignement supérieur, y compris l’Institut supérieur d’ingénierie de Yaoundé qui a enregistré une population féminine de 1,9 pour cent pendant l’année scolaire 1991/1992. Bien que le chercheur ait enquêté sur les disparités entre les genres dans certains établissements d’enseignement supérieur, la grande lacune de cette étude est l’absence de suggestions sur les stratégies d’adaptation déployées par les femmes pour surmonter les défis liés aux campus et stimuler les inscriptions. Une série d’articles compilée par le FAWE (2010) présente des contributions variées sur le genre et l’éducation, avec un accent particulier sur l’amélioration de l’éducation des filles et des femmes en Afrique. Ces articles étudient les questions comme l’accès des filles dans les écoles primaires du Sénégal et du Cameroun, l’importance de la scolarité pour les filles en Afrique, la relation entre la qualité de l’enseignant et les résultats des filles dans les écoles primaires africaines, les stratégies de réussite scolaire et les disparités entre les genres en science, mathématiques et technologie dans l’enseignement supérieur au Zimbabwe (avec l’accent sur les critères de sélection des cours, l’amélioration des services aux étudiants, le soutien du personnel en dehors des cours, le soutien scolaire aux étudiantes, les curricula et l’intégration du genre, les effets du planning familial institutionnalisé, l’impact des grossesses et du mariage sur les étudiantes et l’accès aux technologies de l’information et de la communication [TIC] et aux

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ressources Internet). Dans une autre dimension, Karsenti, Collins et Harper ont évoqué de la discrimination à l’égard des filles comme un obstacle important à l’intégration des TIC dans des écoles africaines sélectionnées. Bien que cette revue riche d’informations nous révèle l’existence d’études sur l’accès et la participation dans l’éducation, la situation des écoles de technologie au Cameroun semble être un sujet à peine exploré, surtout dans la mesure où les études existantes n’ont pas suffisamment attiré l’attention sur les facteurs de motivation et les stratégies d’adaptation. Il convient également de noter que la présente étude identifie les stratégies d’autonomisation personnelle comme une tendance de la recherche sur le genre en ce qui concerne l’égalité de l’inscription et de la participation des femmes et des filles dans les programmes d’ingénierie et orientés vers la technologie, un facteur que les recherches précédentes sur l’écart entre les genres dans l’enseignement supérieur semblent avoir ignoré. Selon la présente étude, les statistiques des inscriptions 2011/2012 fournies par l’IUT ainsi que les attitudes et les perceptions à l’égard des femmes inscrites en technologie montrent très clairement la représentation des femmes en ingénierie et en technologie. Bien que les études antérieures aient reconnu l’existence de recherches sur le harcèlement sexuel des étudiantes dans les environnements scolaires, la situation de l’IUT où les victimes ne se résignent pas aux défis sexuels et développent des stratégies d’adaptation, de dissuasion ou préventives n’a pas encore reçu l’attention qu’elle mérite. Le harcèlement fondé sur le sexe … est assez récent, mais apporte beaucoup d’informations auparavant cachées. La recherche pointe les agressions dont souffrent beaucoup de femmes en tant que membres de classes mixtes et l’absence de sanctions infligées aux étudiants de sexe masculin, et même dans certains cas aux enseignants, coupables de ce type de comportement. Le harcèlement des jeunes enseignantes par les étudiants de sexe masculin a aussi été documenté. Le harcèlement fondé sur le sexe relègue les filles et les femmes à une position inférieure par rapport aux garçons et fait que les femmes se sentent embarrassées, effrayées, blessées et mal à l’aise à cause de leur sexe. L’impact sur l’expérience sociale et éducative des filles peut être dévastateur. Dans certains cas, elles cessent d’assister à certaines matières ou elles quittent tout simplement l’école (Leo-Rhynie, 1999: 22). La citation ci-dessus souligne les risques et les frustrations des victimes de harcèlement sexuel. Les cas où elles cessent d’assister à certaines matières ou où elles quittent l’école (abandons) peuvent être l’expression de réactions ou de frustrations.


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Malgré les découvertes pertinentes récentes sur les disparités entre les genres en matière d’inscription dans les disciplines technologiques, les critiques ci-dessus n’ont avancé aucun argument sur les stratégies d’adaptation. Leur dépendance à l’égard des obstacles ou des formes de frustration que le harcèlement sexuel inflige aux victimes impose des restrictions à la recherche existante sur le harcèlement sexuel. Ce qui unit la présente étude aux recherches existantes sur le déséquilibre entre les genres en matière d’inscription dans les disciplines technologiques est l’insistance sur les disparités entre les genres en matière d’inscription et rencontrées par les étudiantes en science et en technologie. Toute comme la présente étude, les critiques désapprouvent les défis fondés sur le genre, notamment ceux perpétués par l’environnement scolaire qui constituent un obstacle à l’inscription et à la formation. Considérant les défis spécifiques à chaque pays et chaque contexte, toute investigation doit prendre en compte les stratégies d’adaptation qui impliquent des mesures d’auto-construction. Ces mesures peuvent avant tout révéler que tous ces défis rendent les étudiantes plus conscientes, plus compétitives et déterminées et par conséquent augmentent leurs chances de réussir dans les filières technologiques. Si l’on ne prend pas en compte les stratégies d’adaptation et autres stratégies d’autoconstruction ainsi que les recommandations pouvant encourager et promouvoir les inscriptions, la recherche sur le genre dans l’enseignement supérieur n’entrera pas dans le débat général actuel sur l’élimination des attitudes fondées sur le genre qui empêchent l’inscription et la formation des femmes en technologie. On commence juste à écrire sur la sous-représentation dans les filières technologiques, les agressions que les femmes vivent à cause de leur genre, le harcèlement sexuel et les stratégies d’adaptation. Contrairement aux études existantes sur la réussite universitaire, la présente étude porte sur le domaine moins exploité des stratégies d’adaptation comme l’autonomisation personnelle et la confiance en soi. Alors que les recherches précédentes considéraient les disparités entre les genres et les défis rencontrés par les étudiantes en technologie comme des facteurs dissuasifs ou des obstacles à l’inscription et à la réussite universitaire, cette étude les voit au contraire comme des facteurs stimulant. Elle va même un peu plus loin en identifiant les symptômes pour développer une attitude positive. Intégrer le genre dans l’éducation (UNESCO, 1999), la réunion des ministres de la Condition féminine du Commonwealth en 1996 et la quatrième conférence mondiale sur les femmes de Beijing en 1995, entre autres, ont mis en évidence la promotion de l’égalité entre les genres, l’autonomisation des femmes et l’égalité de l’accès à l’éducation et à la technologie pour les hommes comme pour les femmes dans les enseignements primaire, secondaire et supérieur. Les avantages économiques de l’égalité entre les genres dans l’éducation ont été analysés par le Plan d’action

du Commonwealth pour l’égalité des sexes 2005–2015, dans le cadre de l’éradication de la pauvreté et de l’émancipation économique. L’étude menée par Tabi A. J. et Noula G. (2011) a constaté que les taux bruts de scolarisation au Cameroun favorisaient traditionnellement les hommes et c’est encore plus visible aux niveaux supérieurs de la scolarité. Ils ont constaté un taux plus élevé d’inscription des ménages riches que des ménages pauvres et ont suggéré que les dépenses consacrées à l’éducation ciblent les zones rurales. Lynch K. et Feeley M. (2009), dans leur rapport soumis par le NESSE à la Commission européenne, ont analysé les conceptions de l’égalité entre les genres en y ajoutant une dimension économique. D’après eux, si la société reste très inégalitaire aux plans économique, social et politique, la possibilité d’une véritable égalité d’opportunité dans l’éducation est hautement improbable (Blossfeld et Shavit, 1993 ; Wilkinson et Pickett, 2009, dans Lynch et Feeley (2009:55). Ils ont aussi souligné la nécessité de l’intégration du genre et de la conception de curricula, notamment des programmes d’accueil de mathématiques, de science et de technologie. Le rapport a mentionné l’effet de la pression des pair(e)s qui a tendance à renforcer les comportements de genre stéréotypés et punit la non-conformité, ayant ainsi un impact sur le choix des disciplines (Kessels, 2005, dans Lynch et Feeley 2009:38). Il ne met toutefois pas l’accent sur les stratégies d’adaptation comme moyen d’améliorer l’inscription des filles en technologie. 3. MÉTHODOLOGIE Cette étude a employé les méthodologies quantitative et qualitative, car elle voulait comprendre d’une part l’étendue des différents facteurs liés à la sousreprésentation des femmes en ingénierie à l’IUT, et d’autre part identifier les défis et les questions auxquels sont confrontées les étudiantes en technologie minoritaires dans leurs classes. Seule, la méthode quantitative ou la méthode qualitative n’aurait pas suffi pour l’étude. C’est une étude empirique de l’IUT de l’Université de Douala. Des sources de données primaires et secondaires ont été utilisées pour cette étude. Les données secondaires ont été obtenues sur les registres officiels d’inscription, tandis que les données primaires ont été produites par les questionnaires donnés à tous les étudiants, hommes et femmes, pour recueillir leurs perceptions sur les différents thèmes de la recherche. Les étudiants masculins ont été inclus pour connaître leurs perceptions et leurs opinions sur certaines questions pertinentes et pour être en mesure de comparer et d’analyser certaines variables dans une perspective de genre. Les entretiens ont été menés principalement avec des étudiantes en ingénierie de l’IUT afin d’obtenir leurs véritables expériences en tant que minorité dans une discipline considérée jusqu’à présent comme dominée par les hommes. Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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3.1 Echantillonnage La population cible était les étudiant(e)s en ingénierie de l’IUT inscrit(e)s dans les filières technologiques. L’IUT offre environ cinq spécialités principales en technologie qui débouchent sur l’obtention du Diplôme universitaire de technologie (DUT) après deux années d’études et d’une Licence après trois années d’études réussies. L’admission à l’IUT se fait par un concours d’entrée. Les étudiant(e) s commencent par un programme de cours communs en génie industriel ou électrique ou informatique en première année. Ce n’est qu’en deuxième année qu’ils se spécialisent dans l’un des spécialités de l’ingénierie au nombre de quatre : génie électrique et informatique industriel (ou télécommunication), génie mécanique et productique, génie industriel et maintenance, et génie thermique et énergie. Des étudiants des trois principales spécialités en ingénierie de la première à la troisième année ont été échantillonnés. Ces secteurs sont les suivants : 1. Génie électrique et informatique industriel (ou télécommunication) ; 2. Génie mécanique et productique ; et 3. Génie industriel et maintenance. Les étudiant(e)s de génie thermique (composés de 6 filles et 31 garçons) n’étaient pas facilement disponibles et ils ont donc été omis par l’étude. Nous pensons que cela n’a pas beaucoup affecté la crédibilité de notre échantillonnage. Un total de 321 questionnaires a été rempli par les étudiant(e)s sur une population totale de 965 étudiants dans les différentes spécialités technologiques concernées par l’étude. Nous n’avons pas eu facilement accès à de nombreux étudiants de première année (surtout en génie industriel) à cause de leur emploi du temps. Ils étaient surtout retenus par différents ateliers. Cela explique la diminution de la taille de l’échantillon, en particulier celui des étudiantes. Sur les 112 étudiantes en ingénierie, 89 était en première année et n’étaient pas disponibles pour remplir les questionnaires. Nous avons fini par avoir 21 étudiantes qui ont rempli les questionnaires et nous en avons interrogé 12. Cela a été une limite, mais nous pensons que cela n’a pas affecté la crédibilité de l’étude parce que le nombre total de répondants s’est élevé à 33,3 pour cent. En raison du délai limité de l’étude, les perceptions des étudiantes en ingénierie ont été principalement recueillies auprès de leurs homologues masculins. Cependant, leurs propos ont été étayés par des membres de leur famille, ami(e)s et pair(e)s et par la littérature existante. 3.2 Données quantitatives En ce qui concerne la méthode quantitative, les questionnaires ont été conçus de façon à convenir aux femmes comme aux hommes, de la première à la troisième année, dans les spécialités de l’ingénierie mentionnées précédemment. Les questionnaires contenaient des questions ouvertes et fermées. 28

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Les questions ont été classées en différentes catégories comme le milieu familial (profession des parents, frères et sœurs dans le domaine de la science et de la technologie) et son influence sur leur décision d’étudier les disciplines technologiques, les facteurs de motivation, les études et les défis, les perceptions et les attitudes, le harcèlement sexuel et les stratégies d’adaptation. Il y avait de nombreuses questions ouvertes sur les perceptions de la famille, des ami(e)s, des pair(e)s et de la communauté dans son ensemble. Premièrement, nous avons testé environ 100 questionnaires de l’Ecole normale supérieure de l’enseignement technique (ENSET) de l’Université de Douala, après avoir discuté avec un professeur d’anthropologie de l’université. Le test pilote a été facilité par un contact dans l’établissement qui nous a présenté certains enseignants de technologie, qui nous ont ensuite permis de distribuer les questionnaires aux étudiant(e)s de leurs classes. Le test préliminaire nous a révélé que sur les 75 questionnaires distribués aux étudiants et aux étudiantes, environ trois quarts avaient été partiellement remplis ou pas du tout. Ce test nous a permis d’estimer approximativement le temps nécessaire pour répondre au questionnaire en classe. Nous avons aussi réalisé qu’il n’était pas possible de répondre à certaines questions. Nous avons donc modifié le questionnaire avant d’en distribuer des copies aux participants de l’IUT. Nous avons écrit au directeur de l’IUT pour lui demander la permission de mener une recherche à l’institut et lui avons personnellement expliqué le but de notre recherche. Après avoir obtenu sa permission, nous avons contacté les chefs des différents départements dont certains ont été très accueillants. Nous avons eu des difficultés à obtenir les emplois du temps exacts des cours parce qu’ils manquaient et nous avons donc contacté les professeurs des différentes classes sur les conseils donnés par les chefs de département. Un total de 231 questionnaires a été distribué à la fois en anglais et en français sur la sous-représentation des femmes. Quelques-uns nous ont été retournés non remplis. Sur le nombre total des répondants 21 étaient des femmes et 210 des hommes. Nous pensons que le fait de remplir les questionnaires pendant les cours était la façon la plus fiable de recueillir des données crédibles, parce que si l’on avait autorisé les étudiant(e)s à les emporter chez eux, ils auraient été plus enclins à ne pas les remplir ou à en discuter avec leurs camarades, leur famille ou leurs ami(e)s. 3.3 Données qualitatives Nous avons mené des entretiens individuels semi-directifs en face à face et avons interrogé 12 filles de la première à la troisième année. La plupart d’entre elles étaient en première année. Le choix des répondantes a aussi été dirigé. Outre le fait que nous n’avons pas pu avoir d’entretien direct avec les garçons, les enseignants et le public sur leurs attitudes, perceptions, et comportement à l’égard des femmes ingénieur en raison de contrainte de temps, nous avons


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aussi volontairement priorité les participantes parce que nous avions besoin d’informations sur les défis auxquels elles étaient confrontées pendant leurs études, comment elles pensaient être traitées, les stratégies d’adaptation qu’elles déployaient et les comportements, les attitudes et les perceptions à leur égard ainsi que leurs effets sur leur choix de l’ingénierie en tant que profession. Les entretiens ont été menés avec l’aide d’un guide d’entretien. Nous avons programmé les entretiens au moment qui convenaient aux répondantes de façon à ne pas interrompre leurs études en aucune façon. L’utilisation d’entretiens approfondis et de questionnaires pour solliciter les attitudes et les perceptions des étudiants, hommes et femmes, à l’égard des femmes ingénieurs a été jugée pertinente au motif que les réponses reflétaient non seulement les réalités, mais qu’elles pouvaient aussi révéler les facteurs de motivation, les relations entre les genres en cours et les facteurs influençant le choix du domaine d’étude ainsi que des informations sur les stratégies d’adaptation. La méthode de l’entretien direct a été jugée la plus appropriée parce qu’elle évite les suppositions et les généralisations susceptibles d’éluder les réalités pratiques. Les jugements et les citations textuelles qui permettent de comprendre comment les étudiantes vivent les attitudes et les perceptions sexospécifiques ont été étudiés. Elles ont permis à l’étude de « développer les groupes de signification des énoncés significatifs en thèmes » (Creswell, 2007: 61), d’écrire une description textuelle de ce que les étudiantes ont vécu et de décrire « le contexte ou l’environnement qui a influencé la façon dont les participants ont vécu le phénomène. » (Creswell, 2007: 61) En termes d’analyse phénoménologique des données, les données des entretiens, les énoncés pertinents et les résultats ont été classés par catégorie, transcrits, codés et analysés à l’aide des méthodes qualitative et quantitative. Tout d’abord, pour les informations de méthodologie qualitative, l’étude s’appuie sur l’approche à la phénoménologie de Polkinghorne (1998, dans Creswell 2007:58)3. D’après Creswell (2007: 61), cette approche qualitative donne la priorité aux « entretiens approfondis et aux entretiens multiples avec les participants » et « recommande que les chercheurs interrogent 5 à 25 individus qui ont tous vécu le même phénomène ». Cette approche convient tout à fait à la présente étude parce qu’en plus du fait de s’appuyer sur d’autres formes de données comme les revues, l’art, la poésie, la musique et plus important l’observation, elle exige que les données soumises à l’analyse soient « collectées auprès des individus qui ont vécu le phénomène » (Creswell, 2007: 61). L’approche a ainsi permis à l’étude de poser des questions ouvertes dans les questionnaires et de mener

des entretiens semi-directifs dans le but de découvrir quelles sortes de défis sexospécifiques les participant(e) s avaient vécu et les contextes ou les situations qui avaient influencé leurs expériences de genre et leurs stratégies d’adaptation. Les questions ouvertes visaient à « rassembler des données qui conduiront à la description textuelle des expériences et à terme de comprendre les expériences communes des participants » (Creswell, 2007: 61). Nous avons préféré la phénoménologie empirique, transcendantale ou psychologique (Moustakas, 1994) parce qu’elle est moins centrée sur les interprétations du chercheur et davantage sur la description des expériences des participants analysées à l’aide des énoncés, des citations et de la description de ce que les répondantes ont vécu en particulier. Les données sur les perceptions, les attitudes et les comportements des étudiants et des enseignants de sexe masculin et de la communauté à l’égard des femmes ingénieurs ont été recueillies auprès des répondants. Il convient de noter ici que la collecte des données a été un exercice fastidieux impliquant un contact initial avec les participants, de rendez-vous manqués en raison de circonstances imprévues liées aux activités universitaires, aux jours de fête et aux jours fériés et parfois à la reprogrammation des activités d’enseignement par les enseignants. Prendre les premiers contacts avec le personnel administratif pour expliquer les objectifs de notre étude et obtenir l’autorisation de mener une recherche sur le genre se sont aussi avérés difficiles, car certaines des personnes que nous avons rencontrées ne voulaient pas coopérer. Ils nous soupçonnaient de rechercher des informations pour des raisons fiscales. D’autres ont exprimé leur crainte que la recherche soit effectuée pour des raisons politiques. De même, la plupart des participants étaient très réticents à remplir le questionnaire ou accepter un entretien de crainte que nous n’utilisions les résultats contre eux. Nous avons cependant réussi à persuader l’administration et les participant(e)s que cet exercice était mené uniquement à des fins académiques et que nous respecterions l’anonymat des répondant(e)s. Des visites laborieuses ont été effectuées à l’IUT. Pendant la première des deux visites, nous avons eu des difficultés à trouver les participants car les portes des salles de cours étaient mal numérotées. Soit les étudiant(e)s assistaient à des ateliers ou bien ils n’étaient pas là où ils étaient censés être. D’autres contacts ont été pris avec les chefs des départements choisis qui nous ont aidés à trouver les participants et nous ont fourni les numéros de téléphone des professeurs chargés des spécialités qui intéressaient notre recherche. Trois professeurs ne se sont pas présentés au rendez-vous, d’autres ont demandé de le changer et quelquefois nos appels

L’étude de cas de Polkinghorne sur la méthodologie qualitative est une approche holistique qui s’appuie sur les sources multidimensionnelles ou nombreuses de collecte des données comme les entretiens, les observations, les documents et les matériels audiovisuels. Un autre avantage de cette approche qui la rend appropriée ou mieux adaptée à cette étude est le fait que les données recueillies sont analysées par la description du cas et des thèmes provenant du cas. 3

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téléphoniques ont tout simplement été ignorés. Quoique monotone, cette méthode a été productive, car quelques enseignants (trois) ont sacrifié une partie du temps de leur séminaire (souvent 30 minutes ou plus) pour nous permettre de programmer des entretiens ou guider les étudiants pour remplir les questionnaires pendant les séminaires. Certains facteurs qui ont gêné la collecte des données peuvent être attribués au manque de temps des étudiant(e)s, l’infrastructure, la mauvaise volonté de certains professeurs de nous donner du temps pour rencontrer leurs étudiant(e)s, les irrégularités du calendrier d’enseignement, etc. La plupart des entretiens prévus ont eu lieu sur le site de l’IUT, soit dans les couloirs et le plus souvent quand les étudiant(e)s avaient une pause, attendaient leur professeur ou après les cours, car la plupart des professeurs ne pouvaient pas sacrifier du temps de leur cours pour ce qu’ils considéraient comme un exercice extra-curriculaire. Toutes les notes prises pendant les entretiens ont été traitées immédiatement après. 3.4 Analyse des données Les réponses aux questionnaires et les notes des entretiens ont été analysées. En ce qui concerne les questionnaires, ils ont été tout d’abord comptés. Ils ont ensuite été codés à l’aide de numéros pour toutes les variables. Après avoir codé les questionnaires, les données ont été saisies sur ordinateur à l’aide de Microsoft Excel. Une analyse de genre a été menée sur les variables et les résultats présentés dans des graphiques en barres tridimensionnels et en camembert. Les conclusions sont présentées ci-dessous. Les données qualitatives sur les perceptions et les attitudes ont été tirées des questionnaires, analysées et classées par catégorie, puis les informations pertinentes ont été extraites selon les différentes catégories. Les notes prises pendant les entretiens ont aussi été classées par catégorie et analysées. 12 entretiens seulement ont été enregistrés parce que dans certains cas nous avons simplement saisi l’opportunité d’interroger certaines filles en l’absence de leurs enseignants. Les données sur la représentation des femmes/filles dans les IUT ont été imputées, c’est-à-dire que nous avons transféré ce que nous avions codé à partir des guides d’entretien en quantité et établi des descriptions et des significations. Les citations directes ont été utilisées, non seulement pour éviter toute interprétation erronée des données, mais aussi pour donner du poids à certains arguments. L’analyse comparative des quatre différents niveaux a aussi été effectuée pour fournir une analyse quantitative. Les résultats ont été présentés sous la forme de graphiques, de diagrammes en camembert et d’analyse narrative.

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4. PRINCIPALES CONCLUSIONS Les dossiers statistiques de l’IUT pour l’année universitaire 2011/2012 ont révélé qu’il n’y avait que 89 filles sur 616 étudiants en première année, 2 filles sur 313 étudiants en deuxième année et 3 filles sur 125 étudiants dans les trois principales spécialités en troisième année, soit un total de 112 étudiantes et 853 étudiants. Trois développements ont émergé en rapport avec les perceptions et les attitudes à l’égard des filles qui choisissent les filières, les formations et les professions en technologie. La première tendance était une attitude sexiste plutôt odieuse impliquant que les femmes sont inférieures aux hommes. C’est l’attitude que Tyson (1999: 34) a appelée « l’essentialisme biologique ». D’orientation purement sexiste, certains répondants masculins pensaient que la technologie convenait mieux aux hommes qu’aux femmes et fondaient leurs arguments sur les dispositions purement psychologiques que la société attribue exclusivement aux femmes comme la faiblesse, la timidité, la réticence, la nervosité, l’hyperémotivité et l’irrationalité du comportement. Une autre catégorie de répondants a reconnu le droit aux formations et aux professions comme l’ingénierie et la technologie comme étant une prérogative masculine, un postulat patriarcal qu’ils ont cherché à justifier par des motifs purement socio-culturels. Outre les traits biologiques et émotifs perçus comme typiquement féminins, une autre catégorie a rejeté les femmes au motif que le monopole masculin du pouvoir économique garde les femmes à la maison pour élever et s’occuper des enfants, tandis qu’un domaine visant à acquérir le pouvoir éducatif et professionnel comme l’ingénierie devait être réservé aux hommes. Une autre catégorie pensait que permettre aux femmes d’étudier l’ingénierie pourrait les prédisposer à entrer en concurrence avec les hommes. Cependant, la majorité des répondants, hommes et femmes, ont reconnu que les femmes possédaient comme les hommes des connaissances et des compétences et pouvaient contribuer sur un pied d’égalité à l’édification de la nation. Quelques répondants, principalement des femmes, ont aussi expliqué qu’elles avaient peur de répondre aux questions en classe et étaient souvent intimidées pendant les exposés à cause des « moqueries » ou des « insultes » des garçons qui sont courantes dans les salles de classe. 4.1 Facteurs de motivation Les facteurs de motivation identifiés sont les suivants : les parents et leur profession, l’éducation familiale, les frères et sœurs déjà dans le domaine de la technologie, l’intérêt personnel et la détermination. 4.1.1 La profession des parents Sur les 21 répondantes qui ont rempli les questionnaires, une a rendu une feuille blanche et 20 ont indiqué la profession de leurs parents comme le montre le graphique 1.1.


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Les réponses ont révélé que 90 pour cent des étudiantes en technologie avaient des parents dans le domaine des arts, de la science et de la technologie, tandis que 10 pour cent seulement étaient des enfants d’ouvriers. Aucune n’avait de parents sans emploi. Il semble par conséquent que le niveau d’études des parents affecte la décision de leur fille à étudier la technologie. Non seulement les parents ont les moyens d’assumer le coût des études, mais ils comprennent et encouragent le choix de leur fille. Ces informations sont étayées par les données qualitatives des entretiens. La plupart des étudiantes ont révélé qu’elles étaient encouragées par leurs parents qui étaient soit employés dans le domaine de la technologie ou comme cadres. Certaines avaient des parents qui ne les avaient pas expressément encouragées, mais ne s’étaient pas non plus opposés à leur choix de la technologie. Cela rejoint Lynch et Feeley (2009: 55) dans le rapport NESSE qui ont noté que l’égalité des opportunités éducatives ne sera pas réalisée si la société reste inégalitaire aux plans économique, politique et social. D’autre part, l’égalité sociale et économique peut être réalisée par l’éducation. Graphique 1.1 Répartition des répondant(e)s selon leur profession

parents

Graphique 1.2 Parents les plus motivants, par profession Parents dans la technologie 38% Girls 40%

Boys 60%

des Parents dans les arts et les sciences sociales 62%

87

90

domaines des arts ou de la science et de la technologie ont été motivées par leurs parents pour choisir la technologie. Trente-huit pour cent des parents qui ont motivé leurs enfants travaillaient dans le domaine de la technologie, tandis que 62 pour cent travaillaient dans les arts et les sciences sociales. Les résultats actuels indiquent que lorsque les parents des étudiants étaient ouvriers, ils n’avaient aucune influence sur leur choix de la technologie, indiquant ainsi une corrélation directe entre la profession des parents et le choix de la technologie.

Graphique 1.3 Plus grandes sources de motivation pour étudier la technologie

80 70 56

60

Autres 25%

50

Parents 33%

50 40 30

Ami(e)s

20

9

10 0

9 2

Arts et sciences Domaine de la sociales science et de la technologie

Hommes Femmes

Ouvrier

2

Famille, conjoint, frère, sœur 14%

0

Sans emploi

Profession des parents

Tableau 1.1 Nombre de répondantes motivées par leurs parents, selon la profession Profession des parents Parents dans les arts et les sciences sociales Parents dans la technologie Parents ouvriers Parents sans emploi

Total

Nombre

8 5 0 0 13

Sur les 21 répondantes, 62 pour cent ont été motivées par leurs parents pour choisir la technologie. Parmi celles-ci, seules celles dont les parents étaient dans les

28%

Certains répondant(e)s ont indiqué plus d’une source de motivation. Sur les 21 répondantes, 33 pour cent ont été motivées par leurs parents, 28 pour cent par leurs ami(e) s, 14 pour cent par un membre de la famille, le conjoint ou les frères et sœurs et 25 pour cent par d’autres personnes. 4.1.2 Frères et sœurs Les résultats de l’enquête indiquent que le pourcentage de sœurs des répondantes également dans la science et la technologie était plus faible (40 pour cent) que celui de frères (60 pour cent). Cela confirme le fait que les femmes sont sous-représentées dans le domaine de la science et de la technologie et que les sœurs des répondantes n’ont pas été un facteur fort de motivation.

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Graphique 1.4 Frères et sœurs des répondantes et le choix de la technologie

Filles 40%

Garçons 60%

4.1.3 Education familiale L’examen des statistiques obtenues en relation avec l’influence de l’éducation familiale sur le choix de la technologie à l’université nous révèle que 9 des 19 répondantes ont déclaré que leur éducation familiale avait eu une influence positive sur leur décision. Cela rejoint la déclaration que l’égalité significative des opportunités éducatives ne sera pas réalisée si la société reste inégalitaire aux plans économique, politique et social (Wilkinson et Pickett, 2009, cité par Lynch et Feeley, 2009: 55). Les données qualitatives ont aussi révélé que la plupart des participantes (19 sur 20) ont été élevées avec leurs parents qui les ont encouragées ou ne se sont pas opposés à leur choix de la technologie. La plupart étaient financées par leurs parents qui avaient les moyens de le faire. Dans certains cas, leurs mères ont tout fait pour les soutenir malgré leur absence d’instruction. Graphique 1.5 Impact de l’éducation familiale sur le choix de la technologie 109

120 100

Nombre

4.1.5 Conseils La majorité des étudiants à l’IUT ne recevaient aucune sorte de conseil. Si quelques-uns ont admis que leurs frères et sœurs leur avaient parlé de l’IUT et de ses filières, la plupart des étudiants, surtout ceux des zones rurales, se sont plaints du manque d’information sur l’existence de l’IUT et de ses avantages. Très peu d’étudiants en avaient entendu parler par des ami(e) s qui étai(en)t allé(s) à l’institut. Pour corroborer cela, les données numériques sur les facteurs de motivation révèlent que 39 garçons seulement et 11 filles sur l’ensemble des 231 répondants ont reçu des conseils dans leur lycée (voir le graphique 1.6).

88

Graphique 1.6 Conseils reçus sur le choix des études

80 60

9

20 0

39

40

40

Positif Hommes Femmes

2

0

Négatif

10

Type d’impact

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

35 30

Sans influence

4.1.4 Détermination et force de caractère Confrontées à de nombreux obstacles pour étudier les disciplines scientifiques et technologiques comme les obstacles culturels et les perceptions de la société sur les femmes dans la technologie, les données qualitatives recueillies par notre étude ont révélé que la plupart des filles qui s’étaient inscrites aux programmes de technologie étaient des filles indépendantes d’esprit et 32

très déterminées. Beaucoup d’entre elles ont déclaré se passionner pour les mathématiques et la physique. Une des répondantes nous a laissé entendre qu’elle avait toujours été intéressée par les appareils électriques et qu’enfant elle essayait toujours de réparer ce qui était cassé. Elle voulait entrer dans l’enseignement technique après avoir obtenu son certificat de fins d’études primaires, mais elle avait été jugée trop jeune par les autorités scolaires pour être admise à l’école technique à l’âge de 11 ans. Malgré cela, elle avait insisté auprès de ses parents et avait finalement été admise à entrer dans une école secondaire technique, puis à l’IUT. Certaines ont été découragées par des ami(e)s ou des parents qui considéraient la technologie comme un domaine principalement masculin. Une autre répondante a révélé que sa famille accusait son père (un ingénieur mécanicien) d’avoir essayé d’en faire un garçon et lui ont dit qu’elle ne trouverait jamais de mari. Elle a néanmoins décidé de continuer ses études dans ce domaine. Une autre a ignoré les conseils de sa mère d’étudier la comptabilité, tandis qu’une autre s’est lancée dans l’ingénierie malgré les tentatives de sa tante (qui l’avait élevé et la finançait) de l’influencer pour qu’elle étudie l’économie. De nombreuses répondantes ont bravé les commentaires négatifs de leurs ami(e)s et de leurs proches et sont allées de l’avant, l’esprit déterminé, pour étudier la technologie.

25 20 15

11

10 5 0

5 3

0

Par les parents

Hommes Femmes

2

0

Par les proches

0 Au lycée

A l’IUT


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4.2

Défis et stratégies d’adaptation

4.2.1 Défis généraux Les données ont révélé les obstacles comme le manque d’une planification et d’un suivi universitaire efficaces, l’irrégularité et l’absence permanente des enseignants et les défis d’ordre financier, moral et émotionnel. La majorité des étudiants ont indiqué qu’ils n’étaient pas satisfaits du curriculum en déclarant : « les possibilités de travaux pratiques sont insuffisantes ». Plus de trois quarts des étudiants de l’IUT se sont plaints que les enseignants étaient centrés sur la théorie en les laissant presque sans connaissance sur les compétences pratiques requises dans l’ingénierie. D’après eux, certains enseignants étaient « paresseux », sans éthique professionnelle, « incompétents » dans leur discipline, employaient de mauvaises méthodes pédagogiques et étaient toujours en grève, tandis que certains « passaient plus de temps à enseigner dans des établissements privés ». Les étudiants se sont aussi plaints que les enseignants préféraient donner leurs cours par photocopies ou copies électroniques qu’ils n’avaient pas les moyens de se payer. Graphique 1.7 Défis rencontrés par les répondant(e)s 90

83

80 Nombre des répondant(e)s

70 60 45

50 40

35

32

30

23

20 10 0

9 4

3

1

Financier Domestique Académique Etudiant(e) (y compris qui travaille

7 Moral

mariage)

Hommes Femmes

Type de défis

Beaucoup de se sont plaints du manque d’équipements, d’outils et de machines. Certains ont observé qu’il n’y avait pas de temps accordé aux travaux personnels des étudiants et aux tutoriels. Les données quantitatives, présentées dans le graphique 1.8, ont révélé que les principaux défis rencontrés par les répondantes étaient d’ordre domestique, suivis par ceux d’ordre moral, tandis que leurs homologues masculins affrontaient surtout des défis financiers, suivis par des défis académiques. Les répondantes étaient les principales victimes du harcèlement sexuel et des moqueries. 4.2.2 Harcèlement sexuel Le harcèlement est considéré comme un abus de pouvoir par des hommes en position d’autorité, souvent pour intimider et contrôler les femmes. Pendant les entretiens, 48 répondants seulement ont répondu à la question sur le harcèlement sexuel : 39 garçons et 9 filles, soit un pourcentage comparativement plus important de

répondantes. Parmi elles, cinq filles ont indiqué avoir été harcelées par des professeurs et quatre ne l’avait pas été. Quatre garçons seulement ont déclaré avoir été des victimes. Ces informations ont été consolidées par les données qualitatives. Graphique 1.8 Répondant(e)s ayant déclaré avoir été victime de harcèlement sexuel 35 35 30 25 20 15 10 4

5 0

Victime

5

4

Pas victime

Hommes Femmes

Parmi les étudiantes qui ont déclaré avoir subi un harcèlement sexuel, une a témoigné avoir été accostée par un professeur qui a essayé de la séduire avec de l’argent, mais elle a refusé. Elle a déclaré qu’il la coinçait et lui faisait constamment des propositions et quand elle refusait, il la menaçait de la recaler ou de ne pas transmettre ses résultats. J’ai été victime de harcèlement sexuel. Cela ne m’est arrivé qu’une fois. Un enseignant a essayé de me donner 3 500 francs. J’ai refusé de prendre l’argent. Il m’a alors lancé des menaces verbales quand je lui ai résisté. Il m’a menacé de ne jamais publier mes résultats. Il a commencé à m’insulter chaque fois que je venais en classe. J’ai dénoncé l’incident au directeur des études. Quand mes notes ont été bonnes, j’ai laissé tomber l’affaire. L’enseignant n’a plus rien fait. Nous sommes en bons termes à présent. L’utilisation de l’expression « menaces verbales » dans la citation ci-dessus suggère que le ton de la voix constitue une manifestation supplémentaire de harcèlement sexuel dans les établissements d’enseignement. Cela implique aussi un énoncé de nature autoritaire, de commandement et d’intimidation. Le terrorisme verbal devient un outil de harcèlement sexuel. Indubitablement, certaines féministes y voient toute forme de comportement masculin pour rendre les femmes sans défense dans une tentative de « justifier le monopole masculin de position de …. pouvoir » (Tyson, 1999: 84). La persistance du harcèlement sexuel des étudiantes dans les environnements d’apprentissage, plus spécifiquement à l’institut de technologie, est aussi visible dans le langage. Les menaces verbales de l’exemple ci-dessus suggèrent que le langage est un outil de harcèlement sexuel. Les effets du harcèlement sexuel sont constatés dans l’intimidation, la production du pouvoir et l’oppression Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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des victimes. Cela révèle beaucoup de choses sur les formes et les manifestations des différences culturelles. La participante a dit qu’elle n’avait pas essayé de découvrir d’autres incidents, mais elle pensait qu’un « code vestimentaire pourrait être mis en œuvre par l’administration » pour limiter les habitudes vestimentaires qui étaient une autre forme de harcèlement sexuel et un facteur qui peuvent provoquer les envies sexuelles. Une autre participante a dit : « Les habitudes vestimentaires indécentes des filles exposent leur corps de façon alarmante et affolent ». Elle a dit qu’il faudrait en faire part à l’université pour qu’elle établisse un code vestimentaire. De nombreux répondants ont répondu que le type de vêtement porté par les étudiantes encourageait inévitablement l’attirance sexuelle et pouvait être perçu comme une forme de harcèlement sexuel. Un répondant de sexe masculin a dit : Une conduite que je trouve déplorable est la façon de s’habiller des enseignantes. Je me sens affecté quand certains professeurs femmes s’habillent comme si elle voulait séduire les étudiants. Les étudiantes portent des jupes courtes. On voit leurs genoux. Cela peut émouvoir un homme. Un autre étudiant a admis se sentir sexuellement attiré en présence d’une enseignante à cause de la façon dont elle s’habillait et pourtant un autre s’est plaint que « les femmes professeurs ont l’attitude de sortir avec les étudiants ». D’autres n’ont pas mentionné de cas de harcèlement. Les traits comportementaux constituent une forme par laquelle le harcèlement sexuel se manifeste à l’institut de technologie. D’après une participante: « Un enseignant m’a fait une fois des avances, sans aucun effet. J’ai juste décidé de l’éviter ». D’après une autre, la question du harcèlement sexuel est aussi encouragée par les étudiants du sexe opposé. Comme une étudiante l’a déclaré : « Cela me met mal à l’aise, mais mon silence les décourage ». Le graphique ci-dessus révèle que la plupart des victimes de harcèlement sexuel restent silencieuses ou en parlent à un(e) ami(e). Elles en parlent rarement aux autorités universitaires par peur des représailles. Ces données sont aussi étayées par les données qualitatives des répondantes qui ont admis en être victime. En effet, un nouveau type de caractère déterminé émerge qui permet aux étudiantes de surmonter ces défis.

34

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

Graphique 1.9 Stratégies d’adaptation pour gérer le harcèlement sexuel 3 3 2.5 2 2 2 1.5 1

1

1

1 0.5 0 0

l’a d

écla

0

Hommes Femmes

0

ré a

s’es

0

0 0 am

Aut l’a d n’a is e res rien it à n ga mes int(e un a dit rde ure )às m l ’agr s i utor es p ess aren ités e ur de l ts ’uni vers ité

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t pla

Stratégies d’adaptation

4.2.3 Harcèlement verbal Le harcèlement verbal est une autre forme de harcèlement rencontré par les étudiantes. La majorité des étudiantes interrogées s’est plainte des insultes permanentes pendant les cours, accompagnées de commentaires péjoratifs comme « sac d’os », « sale mocheté », etc. Certaines ont déclaré qu’elles étaient huées quand elles essayaient de répondre à une question ou faisaient un exposé. Une fille a révélé qu’un camarade masculin avait pris une vidéo d’elle et l’avait postée sur Internet pour la ridiculiser. Bien qu’elle se soit sentie humiliée et exposée, elle a déclaré le cas à l’administration et le garçon a été puni. La plupart des répondantes ont conçu des stratégies d’adaptation pour gérer les insultes. Certaines ignoraient simplement les commentaires négatifs, surtout de leurs camarades masculins. Une répondante a dit : « J’évite de m’approcher inutilement des professeurs afin d’éviter toute tentative de harcèlement ». Certaines répondantes ont admis cependant que les insultes et les moqueries en classe les faisaient hésiter à participer en classe. D’autres répondantes ont dit qu’il était nécessaire de s’affirmer et d’avoir confiance en soi. « Il faut s’imposer » a dit l’une d’entre elles, sinon les garçons ne vous laisseront rien faire dans les ateliers. Certaines ont déclaré l’intelligence naturelle donnée par Dieu : « Dieu nous a donné le même cerveau » et ont dit qu’elles ne se laisseraient jamais intimidées par leurs camarades masculins ou quelqu’un d’autre. D’autres enfin ont admis adopter des traits de caractère attribués aux hommes (comme le courage, la force émotionnelle et l’affirmation) pour réussir.


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4.2.4 Comportement des enseignants Bien que la majorité des répondant(e)s ait indiqué que le comportement des enseignants était encourageant dans l’ensemble, certains ont soulevé une grave question morale qui exige que l’on y accorde de l’attention. Citons parmi les aspects déplorables du comportement des enseignants que les étudiant(e)s ont jugé dévalorisant, embarrassant et nuisant à leur participation en classe l’intimidation, l’arrogance, les insultes, l’irrégularité, déléguer l’enseignement du cours à des étudiants sur des sujets qu’ils ne maitrisaient pas eux-mêmes, le refus des enseignants de répondre aux questions en classe, la négligence, le retard aux cours et le manque de respect à l’égard des étudiant(e)s, surtout quand ils leur demandent de s’agenouiller en guise de punition. D’autres ont indiqué que les professeurs faisaient des évaluations continues sans en avertir les étudiants, tandis qu’un autre a signalé le cas alarmant de professeurs qui obligeaient les étudiants à leur donner des pots de vin ou leur faisaient des propositions en échange de bonnes notes.

Graphique 1.10 Les filles doivent-elles choisir la technologie ? 151

140 120 100 80 60 17 2

20 0

Oui Hommes

Femmes

Opinions

70

63

60 50 40

44 31

30

10

4.3.1 Opinion sur le choix de la technologie par les filles Quand on leur a demandé d’estimer si les femmes ingénieurs étaient excellentes, très bonnes, bonnes, assez bonnes ou mauvaises, un total de 187 répondants (167 hommes et 20 femmes) a répondu. Toutes les répondantes les ont naturellement jugées excellentes, très bonnes ou à tout le moins bonnes. La majorité des répondants ont reconnu que les filles étaient bonnes, quand elles n’étaient pas très bonnes ou excellentes et une minorité seulement les a jugées mauvaises ou assez bonnes.

40

Graphique 1.11 Opinions sur les femmes ingénieurs

25

20

4.3 Perceptions et attitudes

160

Le faible taux d’inscription et de participation des femmes peut être lié aux perceptions et aux attitudes. Ceux qui étaient guidés par des préjugés patriarcaux pensaient que la place des femmes était à la maison chargées des responsabilités domestiques comme élever les enfants et nourrir la famille. Bien que les étudiant(e)s aient déclaré que leurs parents étaient heureux de voir leur fille choisir l’ingénierie, les arguments avancés contre leur choix jugeaient les hommes comme héroïques, audacieux, biologiquement faits les tâches extérieures au foyer, énergiques, « plus intelligents que les femmes », etc. Les répondants de sexe masculin ont cependant reconnu les capacités des étudiantes en ingénierie. Sur les 171 qui ont répondu à cette question, la majorité des filles (17) et des garçons (151) ont reconnu le potentiel des étudiantes en ingénierie et respectaient leur choix.

Nombre

La persévérance et la détermination étaient considérées comme le secret de la réussite par certaines répondantes. Cela rejoint la déclaration faite autrefois par la scientifique Mitchell: « Je suis née avec des capacités ordinaires, mais avec une persévérance extraordinaire » (Mitchell dans O’Neill, 1979: 143).

1

0

8

9 3

Excellente

Hommes Femmes

Très bonne

Bonne

0 Assez bonne

4

0

Mauvaise

Evaluation

La majorité des répondants de sexe masculin ont reconnu le potentiel leurs pairs féminins pour étudier l’ingénierie, mais les analyses du contenu des données qualitatives des questionnaires ont aussi révélé que certains répondants masculins jugeaient les femmes inadaptées à étudier l’ingénierie. Certains ont dit que les femmes étaient faites biologiquement pour la sphère domestique et moins adaptées pour les domaines comme l’ingénierie perçue comme exigeant de l’intellect, le sens des priorités, de l’énergie, etc. Beaucoup avaient tendance à banaliser la contribution pratique des femmes et des filles en soutenant que les meilleures personnes avec lesquelles travailler en ingénierie étaient les hommes, naturellement forts, autoritaires, disciplinés, fermes, etc. Ce genre d’idées n’a pas seulement pour conséquence de favoriser les garçons par rapport aux filles. Les réponses de certains garçons ont révélé en particulier que les filles/femmes sont perçues culturellement comme intellectuellement moins cultivées pour convenir aux besoins de la technologie. « Elles n’auront pas le temps de s’occuper de leur famille », ont déclaré certains ; « les femmes ingénieurs sont médiocres » ont déclaré d’autres ; et encore « c’est parce qu’une femme ne peut pas être l’égale d’un homme ».

Non

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4.3.2 3.3 Choix d’une femme ingénieur comme épouse Graphique 1.12 Perception de la capacité des femmes ingénieurs à faire de bonnes épouses

Ceux qui ont été interrogés ont donné leur consentement éclairé. Nous avons pris du temps pour leur expliquer le but de la recherche et les avantages qu’elle présentait pour eux. Les entretiens ont été menés au moment qui leur convenait.

113

120 100 80 60

35 40 20

2

0 Hommes Femmes

0

Oui

Non

Perception

Contrairement à la perception générale des membres de la famille, des ami(e)s et de la société dans son ensemble, le graphique 1.12 montre que la majorité des répondants de sexe masculin n’ont pas de problèmes avec l’idée d’épouser une femme ingénieur. Les données ont aussi révélé que plusieurs femmes étudiant l’ingénierie étaient déjà fiancées, principalement à des hommes également dans la technologie. La plupart des répondantes interrogées ne se sentaient pas moins féminines à cause de leur domaine d’études et leur allure n’était pas moins féminine non plus. En général, comme l’ont révélé de nombreuses femmes interrogées, les proches et la société dans son ensemble pensent qu’elles ne peuvent pas se marier parce qu’elles ne sauront pas s’acquitter des tâches domestiques. 5. Considérations éthiques Nous avons énuméré ci-dessous les questions d’éthique prises en compte dans le cadre l’étude, d’abord pour les participant(e)s à la recherche et ensuite pour nousmêmes en tant que chercheuses. 5.1. Questions d’éthique concernant les participants à la recherche Premièrement, nous avons demandé l’autorisation au directeur de l’IUT de mener une recherche sur la dimension genre dans son établissement. Nous avons également contacté les enseignants et leur avons demandé la permission d’utiliser le temps alloué à leurs cours. Les participants à la recherche ont été informés du but et des avantages de la recherche. Leur consentement éclairé a été demandé par écrit dans une partie du questionnaire. Avant de distribuer les questionnaires, le but et les avantages de la recherche leur ont aussi été expliqués. Quelques étudiants ont refusé de remplir les questionnaires dans deux classes différentes. Dans la première classe (deuxième année de génie industriel et 36

productique), l’enseignant n’était pas très coopératif et n’a pas bien reçu les chercheuses. Dans l’autre classe, l’enseignant n’était pas présent et certains des étudiants ne se sont pas sentis obligés de le faire, tandis que d’autres étaient impatients de rentrer chez eux.

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Les participantes ont été interrogées séparément et individuellement, avec la garantie de la confidentialité et l’anonymat. C’était essentiel puisque leurs noms étaient indiqués sur les formulaires. Des codes ont été utilisés quand les données ont été saisies sur ordinateur. Cela était aussi important afin de gagner la confiance des étudiantes pour discuter des questions relatives au harcèlement sexuel. 5.2. Questions éthiques concernant les chercheuses Nous avons tenté de présenter les résultats tels qu’ils étaient. Nous n’avons caché ni déformé aucune information quantitative ou qualitative pertinente. Les résultats de tous les entretiens ont été produits et analysés dans une perspective de genre et pas simplement comme une recherche ordinaire. Nous pensons avoir utilisé une méthodologie de recherche appropriée. Les perceptions des garçons ont aussi été recueillies par le biais des questionnaires. Le déséquilibre entre les genres a été mis au jour et la plupart des filles de tous les niveaux ont été interrogées. Les conclusions de la recherche ont été présentées de façon à refléter la situation sur le terrain et les opinions des participants. Nous avons essayé de citer les participants afin d’éviter toute interprétation erronée ou falsification des données. Toujours pour des raisons éthiques, nous avons consulté l’article de Tchombe (1994) dans le but de déterminer les aspects de la dimension genre du système éducatif camerounais qui ne sont pas encore exploités et nécessite une attention complémentaire. Etant donné que Tchombe a désigné le système éducatif, la famille et les facteurs socioculturels comme obstacles à l’accès à l’éducation de base au Cameroun, nous avons décidé de nous focaliser sur un domaine moins exploité comme les attitudes, les perceptions et plus important les stratégies de gestion déployées par les étudiantes pour relever les défis. Outre les citations directes, les graphiques sont pris en compte dans les sections analytiques pour éviter toute possibilité de représentation erronée des données de la recherche. Nous pensons qu’aucune information que nous avons obtenue n’a été utilisée contre les participant(e)s. Nous leur avons posé des questions sur le curriculum scolaire, les relations et l’interaction avec les enseignants et le harcèlement sexuel qui leur faisaient craindre de subir des représailles si elles étaient divulguées. L’anonymat


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garanti dans le rapport protège les intérêts des participant(e)s. Les informations obtenues ne seront pas utilisées contre eux, d’aucune façon. Ils ne courent pas le risque d’être la cible des enseignants à cause des informations fournies.

Des unités plus officielles de conseil et d’orientation sont nécessaires, à la fois au lycée et à l’université. De nombreux étudiant(e)s découragé(e)s et moins courageux(ses) pourraient finir par choisir la technologie s’ils étaient bien orienté(e)s.

6. CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS A partir de l’étude sur la sous-représentation des filles à l’IUT de l’Université de Douala, les données secondaires ont révélé que les filles sont effectivement minoritaires dans le domaine de la technologie. Malgré les défis rencontrés par les filles pendant leurs études (comme l’ont révélé les données primaires des questionnaires et des entretiens), elles continuent d’aller de l’avant à l’aide de stratégies d’adaptation qu’elles conçoivent ellesmêmes. Les perceptions traditionnelles de la famille, des ami(e)s et des pair(e)s selon lesquelles la technologie serait une discipline masculine n’ont pas beaucoup changé.

Nous avons examiné jusqu’à présent le harcèlement sexuel, la façon dont il se perpétue à l’institut universitaire de technologie, ses effets sur les victimes qui sont surtout des étudiantes et les stratégies déployées par les victimes pour contrer ce genre de comportement. En raison des effets que l’escalade de ce type de pratiques déviantes peut avoir sur l’inscription de femmes, l’étude suggère certaines recommandations : des mesures qui encouragent les étudiantes à exprimer leurs opinions et leurs idées sur le harcèlement sexuel et les autres défis à l’école, notamment par la mise à leur disposition de lignes d’assistance téléphoniques pour les victimes de harcèlement sexuel à l’institut. Puisque les étudiantes sont celles qui sont les plus affectées quand il s’agit du faible taux d’inscription et du harcèlement sexuel, elles doivent être encouragées à s’inscrire dans les filières, les programmes et les professions dans le domaine de la technologie (qui est toujours considérée au Cameroun comme une prérogative essentiellement masculine) par le biais de programmes de sensibilisation et l’enseignement de disciplines orientées vers la technologie.

Il a été confirmé que le harcèlement sexuel existe et que de nombreuses victimes préfèrent garder le silence. On peut en conclure de l’étude qu’il faut motiver les femmes à tous les niveaux pour accroître leur prévalence dans le domaine de la technologie. Cette étude permettra par conséquent de fournir aux chercheurs et aux responsables politiques, plus spécifiquement des ministères de la Condition féminine et de l’Enseignement supérieur du Cameroun, des informations récentes sur les facteurs de motivation, les expériences sexospécifiques dans les établissements universitaires et les stratégies d’adaptation. Elle fournit des données et des informations actualisées sur les expériences des femmes en ingénierie et en technologie, un domaine qui a reçu peu d’attention en matière de recherche sur l’éducation des filles/ femmes au Cameroun. En termes d’amélioration des pratiques, on espère que les établissements concernés pourront mettre en place un cadre en vue de l’évolution des mentalités, créer plus de cadres d’autonomisation et de sensibilisation des femmes et prendre des décisions et des actions appropriées permettant de contribuer à éliminer les facteurs qui empêchent les femmes d’étudier dans les filières et les programmes de technologie. L’accent mis sur les défis universitaire, moral et psychologique et les stratégies d’adaptation est destiné à diriger l’attention des responsables politiques sur les problèmes sexospécifiques perpétués dans les établissements universitaires et qui nécessitent l’attention. On espère que les initiatives similaires ne se limiteront ou ne se restreindront pas aux défis traditionnels ou socioculturels rencontrés par les femmes en technologie, mais qu’ils aborderont les problèmes sexospécifiques actuels perpétués par les établissements universitaires. Voici ci-dessous les recommandations émanant de l’étude.

Puisque le harcèlement fondé sur le sexe est un domaine de recherche récent qui découvre des informations jusqu’alors cachées (Leo-Rhynie, 1999: 22), les autorités universitaires doivent non seulement encourager les étudiantes à déclarer les agressions fondées sur le genre, mais aussi infliger des sanctions sévères aux étudiants et aux enseignants coupables de ce genre de pratiques. Dans un cadre plus large, la législation sur le harcèlement sexuel doit être étudiée au Cameroun afin que de poursuivre les agresseurs en justice et de mettre fin à leur impunité. Il pourrait être utile de mener des recherches plus approfondies dans d’autres universités ou instituts d’enseignement supérieur au Cameroun afin de déterminer l’étendue de ce type de harcèlement et ses manifestations, en particulier parce que cette étude, comme nous l’avons déjà mentionné, était limitée dans sa portée et dans le temps. Les stratégies d’auto-construction sont le meilleur point de départ de toute tentative pour s’attaquer aux défis universitaires. Il faut encourager les filles à étudier les disciplines scientifiques dans les écoles secondaires. Sur le plan pédagogique, il faut utiliser les professeurs et les modèles féminins en science et en technologie à titre d’exemple dans les discussions en classe. Il faut mettre des photos de modèles féminins en science et en technologie sur les pages de couverture des livres de sciences. De plus, il faut autonomiser les femmes de façon à ce qu’elles autonomisent leurs filles en les orientant vers les disciplines scientifiques. Il faut augmenter le nombre de femmes aux postes de responsabilité dans les cercles gouvernementaux, les organisations non gouvernementales et les unités de conseil de

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façon à ce que les femmes elles-mêmes contribuent à défendre et produire des politiques et des programmes orientés vers le genre pour promouvoir l’éducation et la formation des femmes en technologie. Il faut former et encourager les femmes et les hommes par le biais d’ateliers de sensibilisation au genre et une assistance financière et technique, et ils doivent à leur tour partager leurs connaissances avec d’autres personnes de leur communauté. L’IUT n’applique pas de politique sensible au genre dans le processus de sélection des candidats qui passent le concours d’entrée. Une politique de discrimination positive sensible au genre (comme réserver des quotas aux filles qui réussissent ou les admettre avec une moyenne aux examens légèrement inférieure à celle de leurs homologues masculins) pourrait être introduite à l’IUT et dans les autres écoles de technologie afin d’augmenter le pourcentage de filles et en encourager d’autres à poser leur candidature.

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De façon générale, l’IUT de l’Université de Douala doit élaborer un cadre politique sensible au genre qui encourage la formation des filles dans les filières de technologie. Les femmes en technologie doivent être encouragées au moyen de bourses à suive des formations complémentaires à l’étranger de façon à ce servir de modèles aux autres femmes à qui on aura fait croire que la technologie est une prérogative masculine. Il faut utiliser le gouvernement et les mass-médias comme mode de communication pour orienter les filles vers l’éducation, les filières et les professions technologiques. Le ministère de la Condition féminine doit mettre en place davantage de structures d’intégration du genre qui planifient, mettent en œuvre et suivent les activités qui favorisent l’égalité entre les genres dans les établissements techniques.


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Université de l’éducation, Winneba

Les associations étudiantes ont servi de plateformes et de travail préparatoireaux dirigeants politiques actuels du Ghana. Cependant, la plupart de ces anciens étudiants dirigeants devenus dirigeants politiques sont des hommes.

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Explorer les expériences des femmes aux postes à responsabilité dans les établissements publics d’enseignement supérieur au Ghana

RÉSUMÉ L’étude a été menée avec l’objectif d’examiner les expériences des femmes dirigeantes sur les campus des établissements publics d’enseignement supérieur au Ghana et d’explorer les meilleures façons d’exploiter cette plateforme pour former et préparer plus de femmes à des postes à responsabilité dans le futur. Nous avons adopté une conception de recherche descriptive à méthodologie mixte (quantitative et qualitative) pour cette étude. La taille de l’échantillon utilisé était de 54 (49 étudiantes dirigeantes et cinq étudiants dirigeants). Toutes les femmes cadres du Conseil représentatif des étudiants (SRC) et de l’Union nationale des étudiants du Ghana (NUGS) ont été sélectionnées pour cette étude. Un questionnaire et un guide d’entretien ont été utilisés pour recueillir les données. Un coefficient de fiabilité de 0.81 a été calculé à l’aide du alpha de Cronbach. Les statistiques descriptives et inductives ont été utilisées pour répondre aux questions de recherche, tandis que les données des entretiens ont été analysées textuellement. Les conclusions de la recherche ont révélé que les membres de la famille proche ainsi que les « personnes en vue » à l’extérieur des établissements ont été des sources de motivation directe ou indirecte qui ont incité les étudiantes à se présenter à des postes dans les associations étudiantes. Le soutien à la disposition des étudiantes dirigeantes était très limité. En effet, le soutien financier et logistique venait de leur famille proche et les étudiants masculins ont vraiment soutenu les femmes en tant que directrices de campagne. Pour ce qui est des stratégies d’adaptation, la plupart d’entre elles ont eu recours à la prière, ont consulté leurs dirigeants religieux pour avoir de l’aide et d’autres ont simplement fermé les yeux et fait la sourde oreille aux commentaires décourageants. Les opinions de cinq étudiants dirigeants ont indiqué que certaines étudiantes dirigeantes réussissaient bien, mais que la plupart du temps elles souhaitaient que les hommes se retirent avant de se présenter. Les recommandations de base suivantes ont été formulées : chaque établissement d’enseignement supérieur doit créer sans plus attendre une unité Genre fonctionnelle disposant du personnel approprié et qualifié pour développer le potentiel de leadership des étudiantes par le biais de symposiums et de séminaires. Les systèmes de mentorat au sein des sphères universitaires doivent être étendus au leadership institutionnel des étudiantes


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dans les établissements d’enseignement supérieur. La direction Genre des établissements d’enseignement supérieur doit se concerter avec les organisations non gouvernementales (ONG) basées sur le genre pour offrir un soutien financier et logistique aux femmes dirigeantes potentielles. 1. CONTEXTE DE L’ÉTUDE Au Ghana, les femmes représentent environ 51 pour cent de la population du pays, ce qui correspond à la moyenne mondiale. Pourtant, elles représentent moins de 15 pour cent des parlementaires et moins de 10 pour cent des directeurs généraux des différents ministères d’Etat (Prah, 2002 cité dans Ohene, 2011). Récemment, des efforts délibérés ont été entrepris au niveau national pour améliorer cette situation. Cela s’est traduit par les nominations récentes de femmes à des postes de haut niveau au gouvernement. Citons parmi les nominations les plus en vue celles des femmes suivantes qui ont été les premières à occuper un poste de haut niveau dans le pays : le président de l’Assemblée nationale, le procureur général, le président du tribunal, le dernier président de la Chambre nationale de commerce, l’inspecteur général de police, le directeur du service de l’immigration et la nomination de la première femme président de l’Université de Cape Coast. Conformément à la Déclaration de Beijing de 1995, le gouvernement du Ghana a lancé depuis 1999 une politique de discrimination positive visant à respecter un quota de 40 pour cent de femmes à tous les niveaux de responsabilité dans le secteur éducatif. L’idée consiste à réserver des quotas aux femmes qualifiées pour l’admission ou l’accès aux postes dans le système universitaire. En dépit de tous ces efforts, il reste encore beaucoup à faire pour créer l’égalité des opportunités entre les deux sexes et éliminer les éléments culturels qui constituent des obstacles intimidant les femmes qui ont les mêmes compétences et aptitudes que les hommes. Il existe en outre un domaine auquel on n’a pas accordé beaucoup d’attention et qui n’a pas été exploré pour la création d’opportunités et la formation des femmes pour accéder à des postes à responsabilité et contribuer à la prise de décision au Ghana : les associations étudiantes des établissements d’enseignement supérieur. En général, les associations étudiantes sont considérées comme une priorité dans les établissements contemporains d’enseignement supérieur (Astin & Astin, 2000 ; Boatman, 1999). Les collèges et les universités offrent de nombreuses opportunités aux étudiants. Les universités, les écoles polytechniques et les autres établissements d’enseignement supérieur ont démontré leur engagement à former les étudiants à devenir des citoyens responsables et ils ont encouragé la création d’instances comme le SRC, la NUGS, le Junior Common Room Council (JCRC) dans les différents établissements. Citons entre autres parmi les organisations religieuses trouvées sur les campus l’Union des étudiants méthodistes du Ghana (GHAMSU), les Etudiants pentecôtistes et associés (PENSA), l’Union nationale des étudiants presbytériens (NUPS). Par ailleurs, il existe les associations d’anciens étudiants. Au Ghana, toutes ces voies offrent l’opportunité aux

étudiants de contribuer aux questions les concernant dans les différents établissements et dans le pays dans son ensemble. Elles sont par conséquent une force avec laquelle il faut compter, car leurs activités ont une influence énorme sur les décisions prises par les autorités des différents établissements. Cependant, à l’instar de tous les pays d’Afrique de l’Ouest comme le Togo ou la Côte d’Ivoire, les étudiantes ne semblent pas beaucoup profiter de cette exposition, car elles sont toujours très largement sous-représentées dans les structures de gouvernance des campus. 1.1 Énoncé de la problématique Le développement de capacités comme les compétences de leadership sont des résultats souvent associés à l’expérience universitaire (Mendoza, 1996). Les associations étudiantes comme le SRC et la NUGS ont surtout servi de plateformes et de travail préparatoire aux dirigeants politiques actuels du Ghana. Cependant, la plupart de ces anciens étudiants dirigeants devenus dirigeants politiques sont principalement des hommes. Cela suppose que leur rôle de leadership dans les établissements les a influencés en les dotant des compétences et des aptitudes requises. Parmi les femmes inscrites en premier cycle, on a constaté que l’expérience du leadership avait développé leurs compétences et leur confiance en elle (Astin & Leland, 1991). Ceci étant, peu d’étudiantes sur les campus universitaires ou les écoles polytechniques au Ghana ont l’opportunité de briguer un poste électif dans les associations étudiantes. Toutes les universités et les écoles polytechniques publiques au Ghana sont mixtes et l’on peut attribuer l’incapacité des étudiantes à briguer des postes ou le fait qu’elles occupent des postes moins visibles de trésorière, secrétaire, entre autres, aux nombreux défis présents dans l’environnement des campus mixtes. Mendoza (1996) suppose que les femmes sur les campus mixtes rencontrent de nombreux obstacles sur leur parcours pour devenir dirigeantes. L’un d’entre eux est le traitement partial à leur égard : elles sont moins respectées que les hommes et leur opinion est en conséquence ignorée ou dévalorisée (Leornard & Signall, 1989). Il semble que les gens sont traditionnellement amenés à penser que certains postes conviennent aux hommes. Malheureusement, les femmes qui surmontent les défis et prennent l’initiative sont souvent accusées par leurs pairs, les hommes comme les femmes, d’être trop agressives. Au Ghana, dans la langue akan majoritairement parlée, des expressions comme alomogyata (lionne) et obaadindin (femme dure) sont des formes de stigmatisation utilisées à l’égard des femmes qui osent se présenter à des postes à responsabilité. Ayant à l’esprit ces résultats potentiels démoralisants, les femmes présentes sur les campus semblent penser que le leadership n’en vaut pas la peine. On a ensuite observé que la question de la sousreprésentation des femmes aux postes à responsabilité ne concernait pas seulement les niveaux élevés, mais aussi les niveaux inférieurs qui peuvent être de bonnes plateformes. Par exemple, au Ghana, bien que Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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les étudiantes inscrites à l’Université des sciences de l’éducation représentent presque 45 pour cent de l’ensemble de la population étudiante (Université des sciences de l’éducation de Winneba, rapport annuel du vice-président pour 2009-10), leurs condisciples masculins occupent la majorité des postes à responsabilité du campus. Au mieux, les femmes ont opté seulement pour des postes de secrétaires financières et trésorières. Cela peut être imputable à l’accès et au soutien. Contrairement à leurs condisciples masculins qui sont souvent soutenus par certains politiciens et partis politiques pour briguer les postes les plus élevés au SRC et à la NUGS, il semble que les étudiantes aient des difficultés à solliciter ce genre de soutien. Elles n’en bénéficient que lorsqu’elles sont remplaçantes ou se présentent en tant qu’adjointes. C’est peut-être l’une des raisons qui expliquent qu’elles ne se présentent pas du tout aux postes concurrentiels, mais à des postes moins visibles dans les structures de gouvernance du campus qui n’exigent sans doute pas autant de soutien financier. En outre, certains de ces établissements d’enseignement supérieur ont un bureau ou une direction Genre, mais ils sont plus axés sur le développement du personnel. C’est dans ce contexte que la présente étude a tenté d’explorer les opinions et les expériences des étudiantes dirigeantes sur le leadership dans les établissements publics d’enseignement supérieur du Ghana. 1.2 Objectifs et questions de recherche L’objectif général de l’étude est d’examiner les expériences des étudiantes dirigeantes sur les campus des établissements d’enseignement supérieur au Ghana et d’explorer comment utiliser au mieux cette plateforme pour former et préparer un plus grand nombre de femmes dirigeantes. Les objectifs spécifiques sont de : • Examiner ce qui motive les étudiantes à briguer un poste dans une association étudiante. • Examiner le soutien disponible aux étudiantes dirigeantes. • Etudier les défis que les étudiantes dirigeantes rencontrent et les stratégies qu’elles utilisent pour faire face à la situation. Les questions de recherche suivantes ont guidé l’étude : • Qu’est-ce qui motive les étudiantes à briguer un poste dans une association étudiante ? • Quelles sont les formes de soutien disponibles pour les étudiantes dirigeantes ? • Quels défis sont les défis rencontrés par les étudiantes dirigeantes ? Et, • Quelles stratégies adoptent-elles pour faire face à la situation? 1.3 Importance de l’étude L’atteinte du troisième objectif du millénaire pour le développement (OMD 3) qui vise à promouvoir l’égalité entre les genres et l’autonomisation des femmes dans tous les domaines est cruciale ici. Les unités Genre au sein des universités et des écoles polytechniques disposeront de documents pour les aider à reconnaître les capacités des jeunes femmes leur permettant de briguer des postes concurrentiels de leadership. 42

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Les conclusions de l’étude fourniront aux étudiantes dirigeantes des informations sur la viabilité de la plateforme fournie. Cela les habilitera à se battre pour des postes à responsabilité de niveau plus élevé comme la présidence, en tant que présidente ou vice-présidente d’organisations. De plus, cela encouragera la création de plus nombreuses unités Genre dans les établissements d’enseignement supérieur, en particulier sur les campus des écoles polytechniques, qui étendront leurs activités et incluront une offre de soutien et d’encouragement aux étudiantes en général, et aux femmes briguant des postes à responsabilité en particulier. 2. REVUE DE LA LITTÉRATURE Ce chapitre traite de la revue de la littérature connexe sur les expériences des femmes dirigeantes, leurs motivations, défis et stratégies d’adaptation. Il passe en revue les opinions des auteurs qui sont pertinentes pour l’objet de notre étude à partir de perspectives théoriques et empiriques. Nous examinerons la littérature selon les thèmes suivants : • Cadre conceptuel • Motivation pour le leadership • Accomplissement et motivation • Modèles et les mentors pour préparer les femmes dirigeantes • Entraves/défis/obstacles au développement des femmes • Stratégies d’adaptation 2.1 Cadre conceptuel Le leadership, en tant que concept, a suscité une littérature abondante à différents niveaux de discussion. Cependant, le leadership féminin n’a pas été l’objet d’autant d’attention que celui des hommes. Au vu de cette constatation, nous avons basé notre travail sur le fait qu’il existe une multitude de variables qui interagissent pour produire et préparer les dirigeants en général, et les femmes dirigeantes en particulier, comme le montre le graphique ci-dessous. Graphique 1.13 Cadre conceptuel SOUTIEN (LOGISTIQUE)

• Famille, pair(e)s • Etablissement, Organisation p. ex. ONG, Partis politiques etc. ENVIRONNEMENT INSTITUTIONNEL

MOTIVATION PREPARER ET FORMER DES ETUDIANTES DIRIGEANTES Interne/Intrinsèque • Dimension psychologique (Cadre interne de référence), • Expériences d’enfance, • Réseau familial, • Ambition personnelle. Externe • Modèles.

• Orientation institutionnelle, • Mixte ou unisexe, • Système de gouvernancedes étudiants, • Stéréotypes institutionnels, • Structure institutionnelle.

Ce cadre conceptuel est l’interaction des variables – motivation, soutien (logistique), environnement institutionnel – qui aide à préparer et former les étudiantes


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dirigeantes. Par exemple, la dimension psychologique, les expériences, le soutien familial et les modèles auxquels les individus sont exposés les influencent à devenir ce qu’ils sont. Sur le plan institutionnel, la culture, la mixité de l’enseignement et les postes occupés dans les établissements d’enseignement préuniversitaires, les interactions avec les autres sont autant de facteurs et de sources d’influence qui préparent les femmes dirigeantes. Au Ghana, comme dans la plupart des pays africains, les femmes dirigeantes ont dû affronter des défis à l’intérieur et à l’extérieur de leur domaine d’activités. Malgré ces défis, certaines ont été capables de franchir les obstacles pour parvenir aux plus hauts postes à responsabilité (peu nombreuses). Pour former ces dirigeantes, la motivation, les systèmes de soutien et le facteur chance ont joué des rôles majeurs dans la réussite de leur leadership. 2.2 Motivation pour le leadership La motivation est ce qui donne l’impulsion au comportement en le déclenchant, le nourrissant et le dirigeant vers la réalisation d’un but (Madsen, 1959). On l’explique également comme ce qui implique le comportement dirigé vers un but (Weiten, 1996) et Santrock (2000) la définit comme ce qui implique la question du pourquoi les individus se comportent, pensent et ressentent comme ils le font. Ainsi, le comportement motivé est dirigé et nourri par une énergie. Il existe plusieurs approches théoriques à la motivation qui peuvent intrinsèquement ou extrinsèquement pousser l’individu à assumer un poste à responsabilité. Aux fins de la présente étude, nous discuterons du besoin d’accomplissement de McClelland. 2.2.1 Accomplissement et motivation McClelland (1966) a affirmé qu’il existait trois besoins qui motivent les êtres humains, le besoin de pouvoir, le besoin d’accomplissement et le besoin d’affiliation avec les autres. Plus connu sous le nom de nAch. La publication de McClelland’s (1966), The Urge to Achieve, est la somme de 20 années de travail sur l’idée de nAch. Weiten (1996) a défini le besoin d’accomplissement comme le besoin de relever des défis difficiles pour réussir mieux que les autres et satisfaire à des normes élevées d’excellence. Santrock (2000) le définit aussi comme le désir d’accomplir quelque chose, de déployer beaucoup d’efforts pour exceller. Ainsi, le besoin d’accomplissement implique le désir d’exceller et spécialement en compétition avec d’autres. McClelland (1985) suggère que le besoin d’accomplissement est l’étincelle qui allume en autres le leadership inspirationnel. L’intensité du comportement orienté vers l’accomplissement dépend de nombreux facteurs comme la motivation intrinsèque et extrinsèque et les déterminants situationnels. La motivation extrinsèque dépend de besoins qui doivent être satisfaits par des renforcements externes. Le comportement motivé extrinsèquement est accompli non pour lui-même, mais parce qu’il est considéré comme un élément déterminant d’un objectif séparé (Deci & Ryan 1985). Ainsi, le dirigeant motivé extrinsèquement est celui dont le comportement est dirigé vers les autres et qui cherche la confirmation

de traits personnels, de compétences et de valeurs d’une perception externe. Le moi idéal du dirigeant est fondé sur les attentes de rôle d’un groupe de référence et il se comporte d’une façon propre à satisfaire les membres du groupe de référence, d’une part pour être accepté et une fois cela réussi, acquérir un statut. De son côté, la motivation intrinsèque comprend les comportements adoptés pour eux-mêmes, pour le simple plaisir et la satisfaction procurés par la performance elle-même (Sprinthall, Sprinthall & Oja, 1994). Ainsi, un dirigeant motivé intrinsèquement fixe des critères internes aux traits personnels, aux compétences et aux valeurs qui constituent le fondement de son moi idéal (Leonard, Beauvais & Scholl 1999). Les dirigeants sont alors motivés pour adopter des comportements qui renforcent ces critères et atteignent plus tard un haut niveau de compétence. De nombreux chercheurs pensent que les résultats de la motivation intrinsèque sont plus positifs que ceux de la motivation extrinsèque (Deci & Ryan 1994). Bien qu’ils insistent sur le fait que de nombreux individus qui ont connu une grande réussite sont intrinsèquement motivés, c’est-à-dire qui ont une norme personnelle élevée d’accomplissement et mettent l’accent sur l’effort personnel, ceux qui sont extrinsèquement motivés sont très compétitifs. En ce qui concerne les déterminants situationnels du comportement d’accomplissement, l’approfondissement de la théorie originelle du besoin d’accomplissement de McClelland par Atkinson (1964) a posé l’hypothèse que la tendance à l’approche et à l’objectif à atteindre (T) est le produit de trois facteurs : la motivation vers la réussite ou le besoin d’accomplissement (M), la probabilité subjective de la réussite (P) et la valeur incitative de la réussite (I). On obtient la formule T = M x P x I. Dans cette équation, M représente la motivation vers la réussite, un trait de caractère relativement stable ou durable qui vise la réussite, (M) était censé avoir été appris tôt dans la vie et avoir été façonné par des pratiques éducatives particulières. (P) ou la probabilité subjective de la réussite désigne l’attente cognitive ou l’anticipation qu’une action déterminée conduira au but et (I) est la valeur incitative de la réussite. En d’autres termes, ceux qui réussissent éprouvent un fort besoin de réussir et sont influencés par la formation qu’ils reçoivent; ils sont orientés vers un but et sont incités à la réussite. Mais comment cela affecte-t-il les femmes? Horner (2005? 1965) a traité des femmes et de la façon dont elles réalisent leurs buts. Horner (2005? 1965) a avancé que les femmes tournées vers la réussite sont propulsées dans des directions opposées par des forces puissantes. D’une part, elles sont poussées vers la réussite par leur désir d’obtenir la satisfaction associée à l’accomplissement. D’autre part, elles ont appris dès l’enfance que la réussite pour une femme n’est pas féminin et qu’elle est désapprouvée socialement, surtout par les hommes. Elles sont aussi par conséquent motivées pour éviter la réussite. Toutefois, cette tendance n’est pas valable pour toutes les femmes. Prenons à titre d’exemple les présidentes actuelles et passées de différents pays. La question Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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posée est de savoir ce qui a motivé ces femmes à briser les obstacles artificiels fondés sur les biais attitudinaux ou organisationnels qui empêchent les individus qualifiés de progresser dans une organisation pour occuper les postes de direction, appelé aussi « plafond de verre » ? De nombreuses études ont expliqué les motivations de certaines femmes qui ont excellé à des postes élevés. On peut les regrouper en motivations personnelles/ intrinsèques et motivations extrinsèques (rôle des modèles et du mentorat). 2.2.2 Revue empirique sur les motivations personnelles/intrinsèques L’étude de Harris (2007) sur les motivations des directrices a révélé que les principales motivations des femmes pour le leadership dans l’éducation et les postes de direction incluaient le désir de faire une différence, la capacité à initier le changement, une envie forte d’avoir un impact positif sur les gens et le défi de l’expérience. Selon Scherr (2010), ce sont des buts visionnaires qui sont un outil ou un leadership efficace. Dans l’étude qualitative que Scherr (2010) a menée sur six femmes dirigeantes, les six participantes étaient des personnes passionnées avec une aspiration personnelle à réussir, que ce soit pour elle-même, leur famille, leur entourage ou l’entreprise pour laquelle elles travaillaient. On a noté également le besoin de relever un défi qui était essentiel à leur sentiment de réussite ainsi que leur désir impérieux de faire une différence. Scherr (2010) dit que si l’on considère les nombreuses directions dans lesquelles les femmes sont poussées, il faut de la vision, de l’engagement et du dynamisme pour se motiver à accéder au niveau suivant. Miner (1974) cité dans l’étude de Kalkowski et Fritz (2004) menée sur des directeurs d’entreprise (44 femmes et hommes) et des administrateurs de l’éducation (25 femmes et 194 hommes) a constaté que si les motivations managériales étaient très liées à la réussite des femmes, on ne constatait pas de différences nettes entre les motivations managériales des hommes et des femmes. Miner a conclu : « Cela signifie simplement que les femmes qui sont devenues directrices ont la capacité motivationnelle de le faire tout comme les hommes qui sont devenus directeurs ». Dans une autre étude, Miner (1974b) a testé la motivation de diriger chez les femmes qui sont étudiantes à l’université avec des données recueillies auprès de 56 groupes différents d’étudiants inscrits en science de l’éducation, commerce et économie dans 4 universités différentes. Il a conclu : « Rien n’indique que les femmes ne peuvent pas avoir la motivation nécessaire à la réussite managériale « (p. 249). Cela implique que les femmes peuvent obtenir d’aussi bons résultats que les hommes en matière de gestion et de leadership quand on leur en donne l’opportunité et la motivation.

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2.2.3 Modèles et mentors pour préparer les femmes dirigeantes Un modèle peut être défini comme une personne dont le comportement, par exemple, ou la réussite est ou peut être imité par d’autres, en particulier par des jeunes. Dans l’étude menée par Mayer (2001) sur quatre femmes, directrices de la Cooperative State Research Extension Education Service (CSREES) aux EtatsUnis, les participantes ont défini un modèle comme une personne ayant un certain pouvoir, chez laquelle « ils voyaient des choses fortes », qu’ils « voulaient imiter » et qui jouait un rôle important dans leur carrière. Dans cette étude, les participantes ont déclaré qu’elles voyaient peu de modèles au CSREES et qu’elles devaient donc trouver des modèles ailleurs ou se tourner vers des mentors masculins au CSREES. L’étude a montré que les participantes avaient eu de mentors masculins et féminins. Ces mentors ont cru en leur potentiel, les ont encouragées à prendre des risques, ont participé à des conversations qui ont donné lieu à un libre échange d’idées, les ont écoutées et les ont aidées à définir leurs objectifs de carrière. L’étude de Scherr (2010) qui a exploré le parcours professionnel de six femmes dans des organisations à but non lucratif a révélé que toutes les participantes attribuaient des éléments de leur croissance personnelle, la connaissance de certaines de leurs méthodes préférées de management et une part de leur réussite à différents mentors. Les mentors allaient de membres de leur famille à des patrons, mais chaque participante a déclaré qu’elle ne serait pas là où elle en était sans la contribution, les conseils et les perspectives des personnes de son entourage. Cependant, Scherr (2010), citant Heilman (2001), a exposé un inconvénient du mentorat, en particulier dans les organisations : « Les programmes de mentorat, par exemple, souvent créés pour lutter contre les préjugés sexistes dans les organisations, peuvent les promouvoir sans le vouloir en présentant aux observateurs une explication plausible au fait que la réussite d’une femme n’implique pas sa compétence » (Heilman, 2001, p.665). La véritable raison d’être ou l’idée à l’origine de la réussite de la femme peut ainsi être portée au crédit de son mentor. L’étude que Bearden (2002) a menée sur des femmes en vue en Alabama aux Etats-Unis a révélé que les mentors et les modèles avaient une influence importante dans la vie des femmes. Les enseignants, les parents, les grand-mères et les sœurs étaient cités comme modèles. Chandler (2008) affirme également que les femmes qui développent leur compétence de leadership peuvent rechercher d’autres personnes leur servant de modèle pour les compétences souhaitables en leadership. L’étude qualitative de Chandler (2008) a également révélé que les modèles ayant le plus grand impact sur les participantes étaient les membres de la famille comme les oncles, les tantes, les pères, les mères, les dirigeants communautaires masculins et les leaders d’opinion présents dans les médias comme Mère Thérésa, le Mahatma Ghandi et Martin Luther King Junior.


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2.2.4 Obstacles et défis au développement des femmes Les femmes de toutes les sphères de la vie subissent un stress important lié aux obstacles et aux défis liés à l’effet du plafond de verre, à la discrimination de genre, aux perceptions, aux prophéties auto-réalisatrices et au fait de trouver leur place dans un monde des affaires dominé par les hommes (Brian, 2008) pour parvenir au sommet contrairement à leurs homologues masculins. D’après Buckmaster (2004), les obstacles rencontrés par les femmes qui aspirent à accéder à des postes à responsabilité viennent de l’idée que les femmes n’ont pas l’expérience nécessaire pour occuper les postes les plus élevés. Valian (1998) partage toutefois l’avis contraire et affirme que la question de l’inégalité de traitement touche des variables comme les stéréotypes sexistes et la discrimination à l’égard des femmes lors des entretiens de promotion ou de recrutement aux postes. Le décalage entre les qualités attribuées aux femmes et les qualités jugées nécessaires aux rôles de leadership place les dirigeantes face à deux contraintes et les soumet à une double norme. Alors que les femmes sont considérées comme altruistes, désintéressées, « douces » et protectrices, les femmes en position de pouvoir sont jugées trop agressives ou pas assez agressives et ce qui parait assuré, confiant et entreprenant chez un homme semble souvent cinglant, arrogant, vaniteux chez une femme (pour un examen, voir Heilman & Parks – Stamm, 2007). Les femmes qui réussissent dans des domaines spécifiquement masculins sont jugées compétentes, mais ont moins de chance d’être aimées qu’un homme qui connaît la même réussite. Le simple fait d’être une femme qui réussit dans un domaine masculin peut être considéré comme une violation des normes de genre justifiant une sanction (Heilman & Okimoto, 2007). En résumé, les femmes dans les rôles de leadership sont face à un dilemme : être compétentes ou aimées. On peut également attribuer les défis auxquels les femmes sont confrontées à d’autres facteurs comme l’insuffisance de modèles féminins à leur disposition. Les individus apprennent de nouveaux rôles en s’identifiant à des modèles, en expérimentant des identités provisoires et en évaluant les expérimentations au regard de normes internes et de retours externes (Ibarra, 1999). Par exemple, depuis le retour du Ghana en 1992 à un gouvernement démocratique, bien que certains progrès aient été accomplis, peu de femmes ont été nommées à des postes très élevés et elles sont devenues suffisamment célèbres pour devenir des modèles pour les jeunes dirigeantes. Les statistiques électorales indiquent qu’en 1992, 16 députées seulement sur 200 étaient des femmes. En 1996, 2004 et 2008, seulement 18, 19 et 19 femmes ont été élues au parlement. L’allocution d’ouverture de la Conférence des femmes parlementaires du Commonwealth (CWP), de la région d’Afrique de l’Ouest, à Accra faite par la présidente du parlement du Ghana, Mme Joyce Bamford-Addo, souligne ce fait. Elle a laissé entendre que le pourcentage moyen des femmes parlementaires et ministres d’Etat dans le monde était respectivement de 19 et 16 pour cent. Si l’on se réfère aux établissements d’enseignement supérieur,

seules quelques femmes sont membres du corps enseignant et seules quelques-unes d’entre elles ont pu se frayer un chemin jusqu’au sommet. D’après Ohene (2011), la sous-représentation des femmes dans les universités semble être un phénomène mondial (Dines 1993 ; Singh, 2008). Dines (1993) a brossé par exemple un tableau mondial des universités dans lequel les hommes sont plus nombreux que les femmes avec des ratios allant respectivement de un à cinq et de un à vingt aux niveaux intermédiaire et supérieur de direction. Les statistiques fournies par l’Association des universités du Commonwealth (2008) indiquent que seulement 5,7 pour cent, 14,4 pour cent et 12,6 pour cent du corps enseignant sont des femmes professeurs, professeurs associés/conférenciers, responsables académiques et directeurs. De fait, il existe peu de modèles féminins sur les campus à la disposition des étudiantes. Par ailleurs, la complexité du cadre universitaire rend encore plus difficile aux femmes mentors d’être vues ou entendues par la majorité des étudiantes, puisqu’elles n’enseignent pas les cours qu’elles suivent. Les différences systématiques faites entre les hommes et les femmes dans les postes organisationnels officiels, associées à la préférence qu’ont les gens d’interagir avec des personnes du même sexe qu’eux, engendre des différences dans la composition et la structure des réseaux d’hommes et de femmes (McPherson, SmithLovin, & Cook, 2001). Par ailleurs, les liens noués par les femmes tendent à être moins efficaces : les liens des réseaux d’hommes offrent plus d’aide informelle que ceux des femmes blanches ou noires (McGuire, 2002) et les mentors masculins ont plus de chances de leur obtenir des promotions que les mentors féminins (Ibarra, Carter, & Silva, 2010). En outre, les hommes puissants ayant un statut élevé ont tendance à soutenir et diriger les opportunités de développement de carrière vers leurs subordonnés masculins qu’ils jugent plus à même de réussir que les femmes (McGuire, 2002). Ainsi, les réseaux de femmes produisent moins d’opportunités de leadership, offrent moins de visibilité à leur revendication de leadership et génèrent moins de reconnaissance et d’approbation. La visibilité accrue des dirigeantes : certaines femmes accèdent à des postes à responsabilité malgré ces défis, mais les obstacles structurels et les préjugés culturels continuent de façonner leur expérience du développement et du leadership. A mesure que les femmes s’élèvent dans la hiérarchie, elles se raréfient progressivement, deviennent plus visibles et sont l’objet d’une attention accrue. Les attitudes culturelles à l’égard des femmes en position de pouvoir aggravent le problème. Certaines femmes gèrent le dilemme entre être compétentes ou être aimées en minimisant leurs qualités féminines pour démontrer leur compétence, tandis que d’autres essaient d’atteindre un équilibre parfait entre les deux. Malheureusement, quand les gens sont concentrés sur la façon de prendre leur place parmi les autres, ils détournent leurs ressources émotionnelles et motivationnelles des objectifs plus larges à portée de main (Steele, 2010). Bien que tout dirigeant puisse être Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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excessivement préoccupé par sa préservation et son image, les contradictions de la visibilité accrue peuvent être un déclic particulier pour les femmes. En résumé, les préjugés culturels, organisationnels qui favorisent sans le vouloir les hommes gênent le travail identitaire des femmes talentueuses et ambitieuses occupant ou aspirant à des rôles de leadership. Malgré la structure organisationnelle, qui n’a pas de préjugé précis en faveur des hommes, les unités Genre autonomisent les femmes de façon à ce qu’elles réalisent leurs capacités de façon à les intégrer pour une productivité efficace. 2.3 Obstacles personnels à la réussite On peut expliquer les obstacles personnels comme les obstacles ou les conflits que les dirigeantes connaissent au niveau personnel (Tiao, 2006). Comme le montre le graphique 1.14, les obstacles personnels rapportés par les dirigeantes peuvent être classés en deux catégories : psychologiques et familiaux. Presque tous ces obstacles personnels sont liés directement ou indirectement aux systèmes polarisés de valeur et des rôles de genre des hommes et des femmes dans la société. Graphique 1.14 Obstacles personnels à la réussite Obstacles personnels

Obstacles psychologiques

Limites personnelles ou manque d’inspiration Peur de la réussite ou de l’échec Solitude et isolement

Obstacles familiaux

Contraintes familiales et difficultés à concilier le travail et la famille Rôles multiples ou contradictoires Immobilité géographique

Manque de soutien du conjoint

Source : Tiao (2006)

Psychologiquement, la peur de la réussite et la peur de l’échec sont citées comme des obstacles qui affectent les femmes (Witmer, 1995). Elle avance que dans la mesure où les femmes ne sont pas socialisées pour lutter et se distinguer (positivement ou négativement), elles doivent en faire davantage, qu’elles gagnent ou qu’elles perdent. Comme les femmes prennent habituellement leur travail plus au sérieux que les hommes, elles ont souvent plus de difficultés à séparer l’échec d’une tâche de l’échec en tant que personne (Witmer, 1995). L’étude menée par Flanagan (2002) indique qu’environ huit dirigeantes interrogées ont admis faire face au statu quo en dirigeant différemment, avoir peur lorsqu’on leur résistait fortement. De même, les dirigeantes de haut niveau interrogées par Dietz (1997) ont aussi signalé la question de l’isolement des femmes aux postes à responsabilité les plus élevés. En fait, les stéréotypes de genre peuvent affecter à la fois les hommes et les femmes. Par exemple, alors qu’on attend des femmes d’être la source de la force des hommes qui ont réussi, il n’est pas si simple pour un 46

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homme de servir de catalyseur à la réussite d’une femme (Tiao, 2006). Cette tendance évolue cependant. La sagesse conventionnelle insiste sur le fait que les femmes sont surchargées et préfèrent souvent ne pas gravir les échelons professionnels, pourtant les chercheurs (Moore & Sagaria, 1986 ; Sagaria, 1988) n’adhèrent pas à cette idée. En se basant sur deux enquêtes menées à grande échelle sur les femmes administratrices, ils ont constaté que de nombreuses administratrices étaient non seulement disposées à se déplacer géographiquement, mais qu’elles avaient aussi anticipé ce déplacement en prévision de leur avancement professionnel. Malgré les éventuelles conséquences négatives de l’avancement, environ 84 administratrices principales et membres du corps enseignant interrogées par Zakery (1991) aspiraient toujours à des postes plus élevés. Au Ghana, bien que peu de femmes occupent les postes les plus élevés, le pays peut s’enorgueillir de la précédente vice-présidente de l’Université Cape Coast, de la présidente du parlement, de la ministre de la Justice en autres. Malgré les obstacles personnels comme la famille et les difficultés à concilier travail et famille, des femmes ont accédé aux postes à domination masculine. Des aspirations plus élevées peuvent amener des responsabilités et des défis plus nombreux pour les femmes. Faire déménager toute la famille seulement pour le bien de la carrière de l’épouse reste inacceptable dans la société et constitue donc un obstacle potentiel à l’avancement professionnel des femmes (Touchton, Shavlik, & Davis, 1991). Les études ont montré qu’en raison des exigences qui leur sont imposées, les dirigeantes étaient plus susceptibles de souffrir de « culpabilité maternelle », d’instabilité maritale, de conflits entre les rôles, de problèmes de santé et de stress, à moins d’avoir des systèmes de soutien de qualité (Dietz, 1997 ; Gatteau, 2000 ; Gerdes, 2003 ; Rosynsky, 2002 ; Tiao, 2006). En pratique, au Ghana, de nombreux étudiants, hommes et femmes, et en particulier ceux qui font des études sont en âge d’avoir des enfants ou en ont déjà. Il est par conséquent probable qu’obtenir un poste de haut niveau sera un fardeau supplémentaire et le plus simple est d’éviter la compétition pour un poste à responsabilité au niveau de l’enseignement supérieur et de la reprendre plus tard dans la vie. 2.3.1 Stratégies pour surmonter les obstacles personnels Pour gérer les obstacles psychologiques, les dirigeantes de haut niveau interrogées par Tiao (2006) conseillaient aux femmes aspirant à devenir dirigeantes de centrer leurs efforts sur l’amélioration de leurs points forts et de leur confiance en elles. Par, exemple, les dirigeantes qui ont participé aux thèses de Dietz (1997), Gatteau (2000) et Flanagan (2002) ainsi qu’à l’enquête de Gerdes (2003) ont mis l’accent sur le fait qu’une future dirigeante doit se connaître elle-même, être elle-même, reconnaître ses limites, voir les choses de façon positive, mettre en place des systèmes d’appui à la qualité, avoir confiance, utiliser ses points forts et ses avantages et agir avec autorité. L’étude de Villadsen Tack (1986) qui porte sur la façon dont les femmes cadres dans les établissements publics


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jonglent avec les multiples exigences familiales et professionnelles et dans laquelle 20 femmes cadres ayant au moins un enfant âgé de moins de 18 ans ont été interrogées, a identifié les stratégies équilibrées qui les ont aidées à fixer des limites clairement définies entre la maison et le travail. Ces stratégies incluaient notamment obtenir du soutien, la délégation des tâches ménagères à des domestiques à plein temps, l’amitié et les contacts sociaux, remettre leur publication à plus tard. Ces frontières les ont aidées à faire face avec moins de stress ou les ont aidées à fixer des priorités pour rendre l’équilibre possible. Anglis (1990) a obtenu des conclusions similaires et insisté sur la stratégie de la gestion du temps pour concilier obligations personnelles et professionnelles. Les quatre femmes présidentes d’université interrogées par Rosynsky (2002) ont également insisté sur l’importance des méthodes de négociation efficaces, d’avoir « un partenaire » et des membres de la famille qui vous soutiennent beaucoup et de mettre en place des réseaux de soutien de qualité pour réussir à concilier les vies personnelle et professionnelle. Il est par conséquent important que les femmes aspirant à devenir dirigeantes apprennent à négocier efficacement et à exploiter tous les systèmes de soutien disponibles. Les dirigeantes administratives et académiques de haut niveau qui ont participé à l’étude de Gerdes (2003) ont offert une grande variété de conseils qui peuvent aider les femmes aspirant à devenir dirigeantes, ou les femmes en général, à surmonter leurs obstacles personnels. Citons parmi leurs suggestions : « Affirmez-vous », développez votre confiance en vous, faites ce qui est bon pour vous, suivez vos propres valeurs, soyez vous-même, faites ce que vous aimez, ayez des aspirations élevées, faites de votre mieux et amusez-vous, ayez le sens de l’humour et des amis » (pp. 272-274). Elles ont aussi recommandé aux femmes de choisir leur partenaire attentivement, de négocier et de mettre en place des réseaux de soutien et de n’avoir aucun ou peu d’enfants. Les chercheur(se)s ou praticien(ne)s individuel(le)s ont aussi fait des suggestions comme obtenir le soutien social de mentors ou de réseaux, s’affirmer, s’exprimer et utiliser son temps de manière efficace, y compris en s’accordant du temps pour soulager son stress (O’Laughlin & Bischoff, 2001 ; Dickson, 2000 ; Jones, 1993). L’un dans l’autre, les découvertes disponibles dans les études empiriques et l’expérience des femmes ont confirmé l’existence d’obstacles personnels pouvant gêner la quête des femmes aux postes à responsabilité. 2.4 Obstacles professionnels à la réussite Les femmes à divers postes à responsabilité ont rapporté des expériences négatives à tous les niveaux, à savoir interpersonnels, institutionnels et sociétaux. Tiao (2006) les désigne tous par le terme « d’obstacles professionnels » (p.44). Elle a identifié trois types d’obstacles professionnels : structurels, culturels et politiques comme l’illustre le graphique 1.15.

Graphique 1.15 Obstacles professionnels à la réussite Embauche et écart de salaire

Manque d’aide liée au travail, rôles des modèles et mentors

Exclusion des bons vieux réseaux d’hommes Difficulté à être reconnue et double norme

Obstacles structurels

Obstacles professionnels

Obstacles politiques

Mépris, dévalorisation, blagues déplacées

Obstacles culturels

Inégalités des tâches assignées et marginalisation

Conflit entr e les rôles et double contrainte Attitudes négatives et climat de travail inamical Stéréotypes de genre

Politiques de bureau et manque d’accès au pouvoir

Besoin de montrer une image masculine de dirigeant, attentes incohérentes de l’organisation

Le premier type d’obstacles, les obstacles structurels, incluent la ségrégation selon le sexe en matière de promotions, de postes et de salaires entre autres ; ces obstacles sont plus évidents et peuvent être facilement mesurés. Konrad et Pfeffer (1991), par exemple, ont utilisé les indices de ségrégation de Duncan pour analyser les données annuelles des compensations de 1978 et 1983 du College and University Personnel Association. Quand ils ont examiné les schémas de recrutement, ils ont constaté que certains postes dans les collèges et les universités faisaient l’objet d’une ségrégation selon le genre. Pour introduire l’intégration du genre en 1978, 42 pour cent des hommes et des femmes dans l’administration de l’enseignement supérieur ont dû changer d’emploi. Cinq ans plus tard, ce pourcentage avait baissé légèrement à 37 pour cent. Ils ont également constaté que les femmes avaient plus de chances d’être engagées dans les emplois moins bien rémunérés de niveau inférieur. D’autres chercheurs ont signalé également la stratification par genre des employé(e)s des collèges et des universités (Johnsrud, 1991 ; Johnsrud & Heck, 1994 ; Kulis, 1997 ; Moore, 1984 ; Sagaria, 1988 ; Tinsley, 1986). Après avoir mené une étude nationale sur les administrateurs masculins et féminins dans quatre établissements, Moore (1984) a rapporté que « les femmes …semblent être capables de mener des carrières dans certaines filières plus facilement que dans d’autres » (p. 7), « qu’elles étaient plus susceptibles « d’être enfermées » (p. 13) dans certains postes et qu’elles étaient moins susceptibles d’être promues comme administrateur de premier plan. Après que Tinsley (1986) a examiné la littérature disponible à cette époque, elle a conclu que la plupart des administratrices dans l’enseignement supérieur faisaient toujours « un travail de femmes » et qu’elles étaient beaucoup plus susceptibles « d’être les assistantes de, adjointes ou associées qu’elles ne l’étaient d’être directrices, doyennes, vice-présidentes, Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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ou présidentes » (p. 7). Cela affecte également les systèmes de gouvernance étudiante sur les campus des établissements d’enseignement supérieur. Alors que les hommes occupaient des postes de haut niveau comme la présidence, les femmes étaient souvent leur adjointe, leur secrétaire ou avaient des postes qui les rendaient moins visibles. Par exemple, dans l’étude menée par Ohene (2011), quand on a demandé à une étudiante du Comité exécutif du SRC pourquoi elle ne s’était pas portée candidate pour être présidente du SRC, elle a indiqué qu’elle avait postulé au poste de vice-présidente parce que c’était un poste traditionnellement réservé aux filles et la présidence pour les garçons. Elle a regretté que « cette attitude commence à la maison et même les filles ne voteront pas pour vous ». (p.177) En ce qui concerne l’effet du genre sur les schémas et les résultats en matière de promotion administrative, Johnsrud (1991) a mené une étude de trois ans sur les hommes et les femmes qui occupent un poste d’administrateur dans de grandes universités de recherche et il a constaté que les femmes avaient un retour sur investissement moins important des promotions administratives que les hommes. Une autre analyse des mêmes données faite par Johnsrud et Heck (1994) a montré que le genre avait à la fois un impact négatif, initial et ultérieur, sur le statut et le niveau de responsabilité des employé(e)s même si les femmes de l’étude avaient un niveau d’étude équivalent et plus d’expérience que leurs homologues masculins. Elles assumaient sensiblement plus de responsabilités professionnelles tout en ayant des salaires beaucoup plus bas. Pour aggraver les choses, la stratification et l’écart entre les salaires se perpétuaient et s’élargissaient au fil du temps. De nombreuses femmes cadres interrogées par Thompson-Stacy (1995) pour sa thèse ont également rapporté être moins payées que les hommes pour un travail équivalent. En plus des obstacles structurels visibles, les dirigeantes rencontraient des préjugés culturels immatériels sur le lieu de travail. Les obstacles socio-culturels comme les stéréotypes de genre, les attitudes négatives à l’égard des femmes à des postes de direction ou le climat organisationnel peu accueillant sont souvent les produits d’idées largement acceptées sur les hommes, les femmes et le leadership. Dans l’étude qualitative menée par Jablonski (1996), par exemple, sept présidentes de collèges du nord-est ont décrit l’impact négatif que l’image traditionnelle du dirigeant masculin avait sur les dirigeantes. D’après Jablonski (1996), les présidentes favorisaient un style de leadership participatif pour autonomiser les autres, mais les membres du conseil d’administration et les dirigeants du corps enseignant dominés par les hommes (comprenant des hommes et des femmes) n’ont pas soutenu ce style parce qu’ils attendaient des dirigeants traditionnels forts, affirmés et agressifs. Le conflit entre les rôles sociaux et professionnels des femmes a aussi posé des problèmes aux femmes

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(Sandler, 1986). Par exemple, « la voie sans issue » désigne le dilemme d’avoir à donner une image traditionnelle masculine de dirigeant et aussi celle d’une femme bien (Curry, 2000 ; Jones, 1993 ; Sturnick, 1991 ; Tedrow & Rhoads, 1998). D’un côté, la capacité d’une femme à diriger est remise en question si elle ne suit pas le modèle masculin de leadership, tandis que de l’autre, son leadership fait l’objet de critiques et de résistance si son comportement est en contradiction avec le modèle traditionnel de la femme gentille, bonne et vertueuse (Jablonski, 1996 ; Sandler, 1986 ; Wajcman, 1998). Tandis que les dirigeants masculins peuvent être simplement « eux-mêmes » et imposer facilement leur légitimité, les dirigeantes doivent se battre entre deux rôles incompatibles et trouver un moyen de les concilier habilement. Les six présidentes interrogées par Cline (1996), par exemple, ont exprimé leur frustration parce qu’elles recevaient un retour diamétralement opposé à celui de leurs homologues masculins tout ayant un comportement identique. Par exemple, Ohene (2011) a rapporté qu’au Ghana, les femmes qui montrent des signes de leadership ou qui font respecter les règles ou font faire les choses rapidement sont décrites comme trop directes et affublées du surnom de « Mme Thatcher », l’ancienne premier ministre de GrandeBretagne dépeinte par un journal ghanéen comme une femme forte. Les autres sont aussi appelées alomo dzata « lionnes » ou obaa dindin (femme dure) dans le dialecte akan. Une dernière catégorie d’obstacle a émergé de la lutte pour le pouvoir entre les hommes et les femmes. Les conflits politiques pour les postes, les rangs, les ressources, l’influence, l’information et les alliances entre hommes et femmes sont souvent cachés, pourtant ils sont réels. Stokes (1984), par exemple, a sélectionné 23 obstacles possibles rapportés dans la littérature et a demandé à 240 administratrices travaillant dans neuf universités de Floride d’identifier lesquels elles avaient rencontrés. Sur 168 femmes (70 %) qui ont répondu, la moitié ou plus avaient été confrontée à 19 des 23 obstacles. Sur les 19 obstacles, plus de 80 pour cent des répondantes en avaient vécu quatre. Les quatre obstacles les plus importants étaient un accès moindre au pouvoir (89 pour cent), l’exclusion des réseaux informels (87 pour cent), devoir travailler deux fois plus dur (87 pour cent) et la difficulté à être reconnue (81 pour cent). En termes de fréquence, les deux obstacles les plus couramment rencontrés étaient de devoir travailler deux fois plus dur et l’accès moindre au pouvoir. Avec moins d’accès au pouvoir, à l’information, à la reconnaissance ou aux ressources, ces femmes sentaient qu’elles devaient travailler deux fois plus dur pour être efficaces ou survivre. Certaines participantes de l’étude menée par l’unité d’intégration du genre (2006) de l’Université des sciences de l’éducation de Winneba (UEW) ont exprimé des sentiments similaires, à savoir qu’en tant que femmes elles devaient toujours en faire un peu plus pour prouver leur valeur au travail.


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2.4.1 Stratégies pour surmonter les obstacles professionnels Etant donné l’histoire patriarcale de la structure de la plupart des organisations et des systèmes, l’environnement est plus amical pour les hommes que pour les femmes. En conséquence, pour réussir, les femmes doivent être capables de contourner les obstacles interpersonnels, organisationnels et sociétaux précédemment décrits (Tiao, 2006). Obstacles structurels Les chercheur(se)s et les dirigeantes ont formulé des suggestions utiles qui peuvent aider les femmes à gérer les obstacles structurels comme le recrutement, l’écart entre les salaires et la marginalisation. D’après Johnsrud et Heck (1994), pour éviter les obstacles structurels comme la stratification et la marginalisation, les femmes doivent rechercher activement des opportunités pour démontrer une variété de compétences. Rechercher des parrainages et créer de nouveaux postes étaient deux autres stratégies couramment utilisées par les femmes dans l’étude de Johnsrud (1991). Les solutions de Cook (2001) au problème d’être irremplaçable à un poste étaient de former un successeur ou de restructurer le travail pour que les autres l’exécutent plus facilement. En termes de stratégies pour éviter les préjugés de genre dans les pratiques de recrutement, ThompsonStacy (1995) a interrogé 20 femmes cadres et a conclu par les cinq stratégies suivantes les plus couramment utilisées : améliorer ses compétences en négociation, comparer, améliorer ses compétences de communication interpersonnelle avec les collègues masculins, le réseautage et utiliser des hommes et des femmes comme mentors. Obstacles culturels Dietz (1997) rapporte que de nombreux hommes à des postes de cadres moyens et supérieurs luttent pour accepter les femmes comme leurs paires à de multiples niveaux de conscience bien que ces dernières aient « payé leur dû ». En conséquence, les femmes cadres dans les études de Dietz (1997), Rosynsky (2002), Thompson-Stacy (1995) et Zakery’s (1991) ont toutes insisté sur l’importance de connaître la culture de son établissement, de prendre l’initiative d’aider ses homologues masculins, de se sentir à l’aide en travaillant avec eux et d’éviter l’obstacle de la « voie sans issue » en trouvant un équilibre entre les attentes liées au rôle et au genre (Gerdes, 2003 ; Harter, 1993 ; Tedrow & Rhoads, 1999 ; Twombly & Rosser, 2002 ; Yoder, 2001). Les 84 femmes dirigeantes de haut niveau et membres du corps enseignant de l’enquête de Gerdes (2003), par exemple, ont noté l’importance de ne pas être ni trop féminine ni trop masculine. D’après Tedrow et Rhoads (1998, 1999), de nombreuses administratrices de haut niveau dans les collèges communautaires ont employé la stratégie d’évaluer constamment les dynamiques de genre dans différentes situations ou événements et d’appliquer les connaissances et les compétences entre les genres en conséquence.

Harter (1993) a mis l’accent l’importance pour les femmes de développer et de démontrer des compétences à la fois féminines et masculines et Yoder (2001) était d’avis que le style traditionnel de leadership masculin apportait aux femmes plus de problèmes que d’avantages. Elle pensait que les femmes devaient plutôt utiliser des stratégies de valorisation et de nivellement du statut pour être efficaces. Ses recommandations spécifiques aux femmes incluaient l’écoute active, avoir de l’humour et le respect des autres, adopter le travail d’équipe, se conformer aux procédures du groupe d’abord pour accumuler de la reconnaissance avant d’essayer d’influencer pour changer le groupe, devenir exceptionnellement compétente et éviter d’avoir un discours dominant. Obstacles politiques Ropers-Huilman (1998) a suggéré des stratégies pour que les femmes deviennent futées en politique. Citons parmi elles le fait de connaître d’abord le type de pouvoir qu’elles possèdent et comment elles peuvent utiliser leur influence habilement et efficacement. De même, il a conseillé aux dirigeantes de haut niveau interrogées par Clemons (1998), Cline (1996) et Thompson-Stacy (1995) de bien connaître les bases sur lesquelles reposait leur pouvoir et celui des autres, d’être disposées à passer du temps à identifier et analyser la situation politique et de prévoir une stratégie pour affronter leurs adversaires, le cas échéant. Après que Bashaw et Nidiffer (2002) ont examiné la carrière d’administratrices de l’enseignement supérieur, ils ont constaté trois stratégies politiques utilisées souvent par les dirigeantes pour atteindre leurs buts. Premièrement, ces dirigeantes de haut niveau étaient observatrices et nouaient de solides alliances masculines pour rester au pouvoir et accomplir leurs objectifs. Deuxièmement, elles étaient hautement qualifiées pour lever des fonds. Dernièrement, elles étaient souples avec un éventail de stratégies différentes qui leur permettaient de contourner les différents barrages, ne serait-ce que pour remplir partiellement leurs objectifs. English (2000) a aussi étudié cinq administratrices et constaté qu’elles géraient les barrages en « assumant différents rôles, jouant le jeu et en choisissant leurs batailles de façon avisée » (p. 242). D’autres chercheur(se)s et dirigeantes ont considéré l’art de la négociation comme une stratégie cruciale permettant aux administratrices de surmonter également les obstacles politiques. Pour les dirigeantes de l’étude de Cline (1996), l’art de l’évaluation et de la négociation faisaient partie de leur vie administrative pour savoir quand « faire un pas en arrière, esquiver ou éviter un coup » (p. 136). Pour explorer davantage les « stratégies de combat » utilisées par les femmes, Clemons (1998) a interrogé 10 dirigeantes d’un état de l’ouest. Elle a conclu son étude par ces six stratégies de négociation utilisées : « rassembler l’information, transmettre de l’information, employer des manœuvres, choisir leurs armes ou outils de combat, utiliser des alliés/conseillers et se servir de l’émotion » (p. 83).

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Les autres solutions à la question de la dévalorisation du travail des femmes proposées par les chercheur(se) s (Carli, 1998; Cook, 2001) ont inclus de documenter leurs réalisations dès le premier jour, reconnaître leurs idées et leurs réussites, participer et obtenir un soutien des réseaux féminins et mixtes, travailler sur des projets interdépartementaux pour démontrer leur capacité et accroître leur visibilité, trouver des avocats et des mentors, prendre des risques, nouer des liens individuels et institutionnels, la négociation et la délégation et favoriser le statut ainsi que la légitimité des femmes en tant que dirigeantes (Guteck, 2001 ; Sturnick, 1999 ; Lynch, 1990 ; Yoder, 2001). 2.5 Leadership des femmes et vie publique au Ghana On constate ces derniers temps une prise de conscience croissante de la nécessité d’améliorer la participation féminine dans la vie publique au Ghana. Le Ghana a adhéré aux protocoles/conventions internationaux qui font avancer la cause des femmes. Citons à titre d’exemple la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW, 1998), les Objectifs du Millénaire pour le développement, entre autres le troisième (OMD3), et les engagements de la Politique de l’Union africaine en matière de genre adoptée en 2009. La 4ème constitution de la République du Ghana de 1992 (Chap. 5, Articles 11) stipule la participation féminine dans les structures de gouvernance de l’Etat. Afin de garantir la mise en œuvre réussie de l’injonction constitutionnelle, la plupart des établissements publics ont mis en place des politiques visant à aider les femmes qualifiées à gravir l’échelle de l’emploi. Par exemple, en 2005, l’Université des sciences de l’éducation de Winneba a créé une unité d’intégration du genre pour guider les interventions de l’université en vue de combler les différents écarts entre les genres qui ont été identifiés par l’étude de base menée pendant l’année universitaire 2004-05. La politique en matière de genre consistait à guider les interventions de l’université en vue d’éliminer les obstacles et les inégalités entre les genres au sein de la communauté universitaire (Politique de l’UEW en matière de genre, 2009). Elle visait à créer un cadre qui aide l’université à encourager l’égalité entre les genres dans toutes les activités du personnel et des étudiants et d’assurer une participation égale et une représentation appropriée des deux genres tout au long du processus de prise de décision. Le document de la Politique de l’UEW en matière de genre est actuellement mis en œuvre, mais il est surtout axé sur le personnel, enseignant et non enseignant. Les étudiantes reçoivent une aide en matière d’admission et de financement, mais peu est fait en matière de leadership et de politique des étudiants. En conclusion, la littérature a exposé les questions liées à la motivation, aux obstacles et aux études empiriques, à la façon dont ils ont été surmontés par les dirigeantes dans de nombreuses sphères professionnelles. Bien que certaines 50

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données datent de presque une décennie ou plus, elles sont toujours aussi valides que les données contemporaines obtenues et utilisées pour compléter les informations déjà existantes et qui sont pertinentes pour cette étude. Bien qu’il n’existe pratiquement aucune littérature sur les femmes dirigeantes dans l’enseignement supérieur au Ghana, la présente étude comble cette lacune par le choix de son sujet : les expériences des femmes dirigeantes dans les établissements d’enseignement supérieur au Ghana ». 3. MÉTHODOLOGIE L’objectif de l’étude était d’examiner les expériences des étudiantes dirigeantes sur les campus des établissements d’enseignement supérieur au Ghana et d’explorer la façon d’utiliser au mieux ces plateformes pour former et préparer un plus grand nombre de femmes dirigeantes. La recherche a abordé les questions suivantes : • Qu’est-ce qui motive les étudiantes à briguer des postes dans les associations étudiantes ? • Quelle forme de soutien est disponible pour les étudiantes dirigeantes ? • Quels sont les défis rencontrés par les étudiantes dirigeantes ? • Quelles stratégies adoptent-elles pour faire face à la situation ? 3.1 Conception de la recherche L’étude est une enquête descriptive qui a employé une approche de recherche à méthodologie mixte à l’aide du modèle de convergence vers la triangulation. Le modèle de convergence représente le modèle traditionnel de la conception de la triangulation à méthodologie mixte (Creswell, 1998). Conformément à ce modèle, les données d’un même phénomène ont été recueillies et analysées quantitativement et qualitativement séparément et la convergence entre les différents résultats a ensuite été effectuée (en comparant et en mettant en opposition les différents résultats) pendant l’interprétation. Cela a permis l’utilisation des approches quantitative et qualitative pour générer suffisamment de données pour l’étude, les valider et les interpréter à l’aide de principes systématiques (Johnson & Christensen, 2008). L’utilisation de cette conception a permis aux chercheuses de recueillir des données de l’ensemble de l’échantillon afin de fournir des réponses à l’éventail large et complet de questions de recherche ainsi que de produire des données factuelles plus solides à des fins de conclusion grâce à la convergence des résultats. 3.2 Portée de l’étude L’étude a examiné les expériences des étudiantes qui se sont présentées à un poste à responsabilité dans un établissement public d’enseignement supérieur du Ghana et qui ont gagné. Elle n’a impliqué que les étudiantes qui occupent un poste à responsabilité au SRC et à la NUGS dans les universités et les écoles polytechniques du Ghana. L’étude s’est uniquement limitée aux membres de ces deux structures de gouvernance étudiante, car le processus pour briguer les postes les plus élevés est très compétitif et le plus souvent motivé et influencé par les partis politiques. De même, le prestige attaché à ces postes est très élevé, car certains responsables deviennent automatiquement


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membres du conseil représentant les étudiants, en particulier dans les universités publiques. Il convient de noter que bien qu’il existe d’autres organisations sur les campus comme nous l’avons mentionné précédemment, certains membres exécutifs sont parfois même nommés en raison du manque d’intérêt, en particulier de la part des femmes. Les femmes sont aussi par conséquent très largement sous-représentées dans ces sphères. 3.3 Échantillonnage Toutes les étudiantes dirigeantes des universités publiques et des écoles polytechniques du Ghana constituaient la population cible. Toutefois, seules les étudiantes dirigeantes qui se sont présentées à une élection pour obtenir leur poste (SRC et NUGS) dans les établissements publics d’enseignement supérieur (sept universités et dix écoles polytechniques) ont composé la population accessible ainsi que cinq étudiants dirigeants masculins. A l’origine, l’étude était uniquement axée sur les filles, mais sur le terrain les chercheur(se) s ont décidé d’interroger certains étudiants dirigeants masculins parce qu’elles/ils se sont rendu compte que certains d’entre eux s’étaient présentés et avaient été élus à des postes traditionnellement féminins et parce que d’autres travaillaient avec des étudiantes dirigeantes. L’intention était donc de vérifier leurs opinions sur le rôle de leurs homologues féminins aux postes à responsabilité. La population totale accessible était composée de 49 étudiantes dirigeantes et 5 étudiants dirigeants. La justification d’inclure cinq hommes était que les dirigeantes travaillaient avec des hommes et qu’il était donc nécessaire de connaître les opinions des hommes sur la façon dont ils percevaient le rôle joué par les femmes. Une sélection du recensement a été employée puisque les répondant(e)s constituaient l’ensemble de la population accessible. Il a été jugé nécessaire d’impliquer chaque individu de la population, étant donné que le nombre d’étudiantes dirigeantes dans les instances ci-dessus mentionnées a été jugé faible et par conséquent gérable. La taille totale de l’échantillon était de 54 individus, comprenant 27 étudiantes dirigeantes des universités et 22 étudiantes dirigeantes des écoles polytechniques et cinq étudiants masculins occupant des postes électifs qui dans le passé étaient réservés aux femmes. La technique de l’échantillonnage de commodité a été utilisée pour sélectionner cinq étudiants dirigeants au SRC et à la NUGS qui occupaient des postes de trésorier et de secrétaire perçus comme des postes réservés aux femmes. 3.4 Instruments de recherche Un questionnaire et un guide d’entretien (voir les annexes A et B) ont été les principaux instruments utilisés pour l’étude. Tous les items ont été générés par les questions de recherche et la littérature existante. Le questionnaire était principalement composé de questions fermées sur une échelle de type Likert de quatre points (approuve entièrement-AE; Approuve-A, Désapprouve-D, Désapprouve entièrement-DE). Les étudiantes dirigeantes devaient cocher les réponses qui s’appliquaient le mieux à elles. Le questionnaire avait quatre sections (A-D). • La section A du questionnaire posait des questions sur

les caractéristiques démographiques des répondant(e) s, à savoir l’établissement, le domaine de leadership, le poste occupé, le programme suivi à l’université et le milieu familial. • La section B posait des questions sur leurs motivations pour briguer des postes de leadership. Elle comportait 13 énoncés fermés et 4 questions ouvertes. • La section C posait des questions sur le type de soutien qu’elles avaient reçu. Elle comportait 17 énoncés fermés et 2 énoncés ouverts. • La section D posait des questions sur les défis et les stratégies d’adaptation des étudiantes dirigeantes. Elle comportait 21 énoncés fermés. Voici ci-dessous des exemples d’énoncés associés à chaque section : • Les membres de ma famille m’ont encouragée ; J’ai occupé un poste à responsabilité à l’école élémentaire (Motivation) ; • Logistique (matériel, véhicule, papeterie), soutien des deux parents (Soutien) ; • Je me sens intimidée par mes pairs, étudiants dirigeants masculins (Défis) ; • Je ferme les yeux et fais la sourde oreille aux commentaires décourageants (Stratégies d’adaptation). Au vu des intervalles associés aux items fermés pour délimiter les réponses des répondant(e)s, deux guides d’entretien ont aussi été utilisés. Cela a fourni aux femmes et à quelques étudiants masculins suffisamment de latitude pour exprimer leurs points de vue et leurs opinions au cours d’une interaction en face à face avec les chercheur(se)s. Cela a permis aux chercheur(se)s de faire le suivi des questions. Le guide d’entretien des étudiantes dirigeantes a comporté 12 énoncés ouverts et celui des hommes 16 énoncés ouverts. Voici ci-dessous des exemples d’énoncés associés avec respectivement les hommes et femmes étudiants dirigeants : • Comment vos homologues masculins vous traitentils en particulier pendant les réunions et les prises de décision ? (Femmes) ; • Quelle est votre évaluation générale des compétences des étudiantes dirigeantes sur votre campus? (Hommes) Afin de garantir la fiabilité de l’instrument de collecte des données, les instruments ont fait l’objet d’un test pilote avec 15 femmes cadres de l’Université des sciences de l’éducation de Winneba qui ne faisaient pas partie de l’échantillon de l’étude. Des questions sollicitant des commentaires sur la présentation physique du questionnaire, la durée pour le remplir et la façon dont les questions étaient posées ont été incluses dans le guide aux questions pour aider à clarifier certains énoncés du questionnaire. La révision appropriée a été faite ensuite. Un coefficient de fiabilité de 0.81 a été obtenu à l’aide d’alpha de Cronbach. 3.5 Collecte et analyse des données L’aide de 10 assistant(e)s de recherche a été sollicitée pour administrer le questionnaire aux 49 étudiantes dirigeantes Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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(SRC et NUGS) dans les sept universités publiques et les dix écoles polytechniques du Ghana. Les assistant(e) s de recherche ont été réunis et ont reçu une formation intensive sur la collecte des données. Des lettres de présentations signées par la chercheuse principale leur ont été remises pour éviter la suspicion des répondant(e) s et obtenir leur accord pour une audience. Cependant, afin d’assurer la confidentialité des informations fournies, les entretiens avec les 17 étudiantes dirigeantes sélectionnées (une dans chaque établissement) ont été menés par les chercheur(se)s. L’autorisation d’enregistrer l’interaction a été demandée aux répondant(e)s. Cela a contribué à la fluidité de l’interaction au lieu de faire des pauses pour prendre des notes. A la fin de chaque entretien, l’information enregistrée a été repassée aux répondant(e) s et tout malentendu ou méprise a été corrigé. Une technique d’analyse multitype mixte a été utilisée. Cela a permis l’utilisation de techniques variées pour analyser les données quantitatives et qualitatives. La première étape de l’analyse de données de cette étude a été de numéroter les questionnaires remplis, puis ils ont été édités. Les réponses éditées ont ensuite été codées. La version 17.00 du logiciel Statistical Product and Service Solutions (SPSS) a été utilisée pour analyser les réponses du questionnaire. Les statistiques descriptives comme les comptages de fréquence, les pourcentages et le test-t pour échantillons indépendants ont été utilisées pour décrire les différences de motivation, soutien et défis rencontrés par les étudiantes dirigeantes des universités et des écoles polytechniques. Les données des entretiens ont été retranscrites et analysées thématiquement. Les données quantitatives et qualitatives ont été interprétées et discutées en parallèle dans le cadre des questions de recherche. Cette approche a fourni une opportunité de comparaison des données, d’intégration des données et de triangulation. 3.6 Considérations éthiques Les chercheur(se)s ont obtenu la liste des étudiantes dirigeantes de l’ensemble des 10 régions du pays de leur collègue à l’Université des sciences de l’éducation du campus de Winneba. On les a ensuite contacté par téléphone pour obtenir leur consentement de participer à l’étude ; elles ont aussi été informées du caractère volontaire de leur participation, de la confidentialité et du but de l’étude. Une date a été fixée pour les rencontrer en personne sur les campus. Les contacts téléphoniques ont été faits pour s’assurer de leur disponibilité le jour où les assistant(e)s de recherche et les chercheur(se) s se rendraient dans les différents campus et régions. Leurs droits et la protection stipulée ci-dessus leur ont été répétés quand les chercheur(se)s et les assistant(e) s de recherche les ont rencontrées en personne sur leur campus. L’instrument a aussi été conçu de façon à garantir l’anonymat de leurs réponses. Ainsi, elles n’ont pas dû inscrire leur nom sur la question et le guide d’entretien. Pour l’enregistrement des entretiens, le guide d’entretien a été mis à la disposition des répondant(e)s pour qu’elles/ils le consultent à des fins de clarification et les participant(e)s

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qui n’étaient pas satisfait(e)s de la direction des questions pouvaient choisir de ne pas participer ou de demander une modification de ces questions/énoncés. 3.7 Limites de l’étude Bien que les rendez-vous aient été pris très à l’avance, il a néanmoins été difficile d’avoir accès à quelques répondant(e)s pour mener les entretiens en face à face. En conséquence, des entretiens téléphoniques ont été menés. Cela a rendu difficile l’observation des gestes et des signes non verbaux des répondant(e)s qui aurait pu enrichir leur témoignage. La position de chargée de conférence des chercheur(se) s en tant que chargé(e)s de cours a pu influencer les réponses fournies par les répondant(e)s. Certain(e) s ont hésité à fournir des informations potentiellement confidentielles. 4. RÉSULTATS DE L’ÉTUDE Dans cette section, nous présentons les données quantitatives et qualitatives sur les expériences des 49 étudiantes dirigeantes des établissements publics d’enseignement supérieur ainsi que l’évaluation par les cinq dirigeants masculins de leurs homologues féminins. La section quantitative présente les données du questionnaire en réponse aux questions sur la motivation, le soutien reçu, les défis et les stratégies d’adaptation. La section qualitative présente les thèmes et les citations textuelles des entretiens. La présentation suit les questions de recherche. Les informations démographiques des répondant(e)s sont présentées en premier. 4.1 Données démographiques Tableau 1.2 Postes des répondantes Poste occupé

Fréquence

Pourcentage

Vice-président

5

10,2

Secrétaire

16

32,7

Trésorier

2

4,1

Commissaire des femmes

11

22,4

Autres

15

30,6

Total

49

100,0

Dans le tableau 1.2, il a été noté que seulement 10,2 pour cent des répondantes occupaient le poste de vice-présidente ; aucune n’était présidente dans son établissement. La majorité était secrétaires ou commissaires des femmes (apanage des femmes). Il ressort de cela que Ies postes traditionnellement réservés aux femmes (trésorières & secrétaires financières) étaient occupés par des hommes. Par exemple, 4,1 pour cent seulement des répondantes étaient secrétaires financières.


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Tableau 1.3 Profil de l’âge des répondantes Tranche d’âge

Fréquence

Pourcentage

18-22 ans

18

36,7

23-27 ans

24

49,0

28-32 ans

6

12,2

33-37 ans

1

2,0

49

100,0

Total

Combinées, une très grande partie des répondantes appartenaient à la tranche d’âge de 18-27 ans (85,7). Il convient de noter qu’il s’agissait de femmes diplômées du lycée. Les femmes plus âgées semblaient être préoccupées par d’autres priorités comme le mariage et la vie familiale. Tableau 1.4 Ordre de naissance des répondantes Ma position parmi mes frères et sœurs (ordre de naissance)

Fréquence

Pourcentage

1ère

10

20,4

2ème

22

44,9

3ème

4

8,2

ème

4

5

10,2

5ème

4

8,2

6

ème

Total

4

8,2

49

100,0

Le tableau 1.4 ci-dessus indique que jusqu’à 44,9 pour cent des répondantes étaient deuxièmes dans l’ordre de naissance, tandis que 20,4 pour cent étaient premières. Ecrivant sur la relation entre l’ordre de naissance et les relations entre frères et sœurs de Alder, Corey (2009) a noté que « le deuxième enfant typique se comporte comme s’il/elle faisait la course et fonce généralement à toute vitesse tout le temps ». Ils agissent parfois comme s’ils avaient été formés pour dépasser leur ainé. D’après Corey (2009), cette rivalité entre les deux premiers enfants influence la suite de leur vie. Tableau 1.5 Niveau d’études des parents Niveau d’études le plus élevé

Niveau d’études le plus élevé du père

Niveau d’études le plus élevé de la mère

Sans instruction

0

0

2

4,1

Elémentaire

7

14,3

11

22,4

Secondaire

17

34,7

15

30,6

Supérieur

25

51,0

21

42,9

Total

49

100,0

49

100,0

Dans le tableau 1.5, on note que le niveau d’études des parents a eu un impact positif sur elles. On note également que le niveau d’études des parents des femmes façonne leurs capacités ou leur potentiel de leadership : 51 pour cent des répondantes avaient des pères ayant fait des études supérieures. En effet, tous les pères avaient plus ou moins fait des études. On a constaté une tendance presque similaire quand on a demandé le niveau d’études des mères : 42,9 pour cent des répondantes ont eu des mères ayant fait des études supérieures. Cela suggère que plus le niveau d’études des parents est élevé, plus l’appui/

encouragement que les femmes peuvent recevoir de leurs parents pour développer leur potentiel de leadership est élevé. 4.2 Qu’est-ce qui motive les étudiantes à briguer un poste dans une association ? Les différentes formes et sources de motivation que les étudiantes reçoivent sont indiquées dans le tableau 1.6 cidessous. Tableau 1.6 : Distribution de ce qui motive les répondantes a devenir dirigeante Enoncé

AE

A

D

ED

F %

F %

F%

F%

Les membres de ma famille m’ont encouragée

18 (36,7)

17 (34,7)

10 (20,4)

4 (8,2)

Ma mère m’a encouragée

17(34,7)

25(51,0)

3(6,1)

4(8,2)

Mon père m’a encouragée

7(14,3)

28(57,1)

9(18,4)

5(10,2)

Mes frères et sœurs m’ont encouragée

19(38,8)

24(49,0)

2(4,1)

4(8,2)

Mo mari/partenaire m’a encouragée

10(20,4)

7(14,3)

11(22,4)

21(42,9)

Mes amies m’ont encouragée

16(32,7)

21(42,9)

9(18,4)

3(6,1)

Mes amis m’ont encouragée

23(46,9)

22(44,9)

3(6,1)

1(2,0)

Ai occupé une poste à responsabilité à l’école élémentaire

29(59,2)

12(24,5)

3(6,1)

5(10,2)

Ai occupé une poste à responsabilité à l’école secondaire

28(57,1)

7(14,3)

7(14,3)

7(14,3)

Ai occupé une poste à responsabilité à l’école, dans un institut de formation, une école polytechnique, etc.

0(0,0)

6(12,2)

19(38,8)

24(49,0)

Mon éducation familiale

28(57,1)

11(22,4)

9(18,4)

1(2,0)

Des dirigeantes

25(51,0)

15(30,6)

4(8,2)

5(10,2)

9(18,4)

9(18,4)

22(44,9)

9(18,4)

L’unité de genre de mon établissement

Le tableau 1.6 montre que l’encouragement des amis de sexe masculin 45 (90,8 pour cent), des frères et sœurs 43 (87,8 pour cent), des mères 42 (85,7 pour cent), l’influence des postes occupés dans les écoles élémentaires 41 (83,7 pour cent), les femmes dirigeantes 40 (81,6 pour cent), l’éducation familiale 39 (79,5 pour cent) et les amies filles 37 (75,6 pour cent) ont été les facteurs ayant le plus d’influence pour motiver les femmes dirigeantes à se présenter à leur poste. 31 (63,3 pour cent) répondantes n’ont pas approuvé le fait que l’unité Genre de leur établissement les avait motivées à briguer un poste. Cela s’explique par le fait que la plupart des écoles polytechniques au Ghana n’ont pas d’unité Genre et aussi que les universités disposant d’unité Genre n’envisagent Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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pas de soutenir les étudiantes dans leurs efforts pour accéder aux postes à responsabilité. Les étudiantes dirigeantes des universités et des écoles polytechniques du Ghana ont fourni des sources variées de motivation et d’inspiration lorsqu’elles ont été interrogées. Les réponses données sur ce qui les avaient motivées à briguer le poste qu’elles occupaient indiquaient que la plupart d’entre elles avaient été encouragées par des éléments externes : ami(e)s, prédécesseurs et modèles. Des ami(e)s leur avaient dit qu’elles avaient les qualités nécessaires et qu’elles pouvaient y arriver ou elles ont été encouragées à se présenter après avoir discuté de leur intention avec eux. Toutefois, certaines ont aussi indiqué qu’elles avaient été découragées par leurs collègues qui leur avaient dit de se concentrer plutôt sur leurs études ou bien que le poste qu’elles briguaient était pour les hommes. Il est également ressorti de cela que bien que la plupart d’entre elles aient indiqué avoir eu des modèles, deux dirigeantes seulement ont cité comme modèle des femmes universitaires de leur établissement ou des femmes politiques, des professionnelles des médias, d’anciennes chefs d’organisations ghanéennes et des dirigeantes dans le monde. Il est fait tout à fait révélateur de constater que la plupart ont indiqué avoir été plus encouragées par des hommes que par leurs condisciples femmes. Cela est aussi apparu nettement dans les entretiens menés. Une trésorière a laissé entendre que : « Des hommes suivaient ma campagne, j’avais des hommes qui m’encourageaient et m’aidaient. Et c’était la première fois qu’une femme briguait ce poste depuis la création de l’école, je suis la première femme à occuper le poste de trésorière … » Une autre a expliqué : « J’étais dans les parages et le président a pris contact personnellement avec moi, il voulait que je sois sa colistière parce qu’il m’avait remarquée, alors il m’a informé et j’ai aussi informé mes parents. Il m’a donné de bons conseils et j’ai accepté. » Concernant le fait de s’inspirer des expériences passées de leadership, qui s’est aussi révélé être un facteur de motivation important, une femme secrétaire a expliqué que : « …sincèrement, je peux dire que j’ai été une grande dirigeante depuis l’enfance. Je suis l’ainée, donc déjà à la maison on m’a appris à diriger. Et donc j’ai été dirigeante tout au long de l’école primaire, au collège, au lycée, puis ici. Je ne sais pas, mon esprit me pousse à choisir ces postes parce que je sais que je suis bonne pour ça … » Si certaines ont été motivées extérieurement par des ami(e)s et des membres de leur famille, un nombre non négligeable a été encouragé intérieurement : elles voulaient faire une différence et ont vu l’opportunité de briguer le poste. Leurs déclarations sont présentées cidessous :

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« Oui, cela demande beaucoup de courage de s’engager ou de briguer un poste comme ça. Cela demande beaucoup de confiance en soi. Je dois dire que j’ai véritablement brigué ce poste parce que j’ai la passion du service ». « Je suis la femme d’un pasteur et en rencontrant beaucoup de femmes j’ai pensé qu’il était sage de diriger les femmes et combler certains des manques que je vois dans leurs vies ». « Il y a un certain malentendu à l’école. En effet, les femmes ou les dames ne pourraient pas se présenter à certains postes, comme par exemple président. Dans quelques cas, des femmes ont voulu s’y présenter, mais on le leur a refusé en disant qu’elles n’étaient pas capables de faire ce travail. Il est temps maintenant pour nous de dire que ce que les hommes peuvent faire, nous pouvons le faire encore mieux».

Bien qu’il y ait aussi des indications que certaines dirigeantes ont été encouragées par leur mère, des modèles féminins et des amies, ce qui parait naturel, certaines dirigeantes se sont plaintes d’avoir été désagréablement surprises quand leurs propres condisciples féminins les ont découragées. Par exemple, une dirigeante de l’une des écoles polytechniques a déclaré : « …quand j’ai décidé de me présenter à ce poste, certaines amies m’ont dit de ne pas le faire parce que je perdrai mon temps, que je ne pourrai pas étudier et que je ne gagnerai peut-être même pas parce que je me bats contre des hommes… » Bien que certaines aient déclaré n’avoir aucun modèle, plusieurs d’entre elles ont cité les noms de politiciens locaux, d’anciens chefs d’organisation, de leaders d’opinion et de certains dirigeants mondiaux. Elles ont aussi donné les raisons du choix de leur modèle. « Nana Konadu Agyemang Rawlings, c’est une femme qui a excellé dans de nombreuses disciplines. C’est la fondatrice du mouvement des femmes du 31 décembre, elle a aussi été jusqu’à briguer le mandat de présidente du Ghana. Je pense que c’est une femme courageuse et je crois que son comportement mérite de faire des émules ». « Madame Joyce Aryee (ancienne directrice générale de la Chambre des mines du Ghana) pour avoir vu les défis qu’elle a traversés et avoir réussi à être là où elle en est aujourd’hui ». 4.3 Quelles sont les formes de soutien disponibles pour les étudiantes dirigeantes ? Les données du tableau 1.7 ci-dessous fournissent des informations sur les différentes formes de soutien reçues par les étudiantes dirigeantes.


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Tableau 1.7 Distribution du soutien reçu par les répondantes Enoncé

AE

A

D

ED

F%

F%

F%

F%

Soutien financierde mes deux parents

15(30,6)

18(36,7)

10(20,4)

6(12,2)

Soutien financier de ma mère

22(44,9)

11(22,4)

12(24,5)

4(8,2)

Soutien financierde mon père

13(26,5)

18(36,7)

11(22,4)

7(14,3)

Soutien financierde mes frères et sœurs

6(12,2)

16(32,7)

18(36,7)

9(18,4)

Soutien financierde mon mari /partenaire

6(12,2)

9(18,4)

16(69,4)

18(36,7)

Soutien financier de mes amies

1(2,0)

8(16,3)

21(42,9)

19(38,8)

Soutien financierde mes amis

5(10,2)

18(36,7)

15(30,6)

11(22,4)

Soutien financierdes autres membres de ma famille

4(8.2)

13(26.5)

21(42,9)

11(22,4)

Logistique (matériel, véhicule, papeterie, etc.)Soutien logistique des deux parents

11(22,4)

8(16,3)

22(44,9)

8(16,3)

Soutien logistique de ma mère

15(30,6)

15(30,6)

13(26,5)

6(12,2)

Soutien logistiquede mon père

9(18,4)

12(24,5)

18(36,7)

10(20,4)

Soutien logistiquede mes frères et sœurs

4(8,2)

17(34,7)

14(28,6)

14(28,6)

Soutien logistiquedes autres membres de ma famille

1(2,0)

10(20,4)

20(40,8)

18(36,7)

Soutien logistiquede mon mari/partenaire

4(8,2)

9(18,4)

12(24,5)

24(49,0)

Soutien logistiquede certaines organisations (ONG, églises, partis politiques, etc.)

3(6,1)

6(12,2)

12(24,5)

28(57,1)

Appui logistiquede mes amies

6(12,2)

12(24,5)

9(18,4)

22(44,9)

Appui logistiquede mes amis

7(14,3)

24(49,0)

5(10,2)

13(26,5)

D’après le tableau 1.7, les principaux soutiens reçus par les dirigeantes étaient le soutien financier 33 (67.3 pour cent), le soutien logistique 30 (61.2 pour cent) des parents et le soutien logistique des ami(e)s 31 (63.3 pour cent). Un examen rapide ci-dessus suggère que comme pour la motivation, l’ami de sexe masculin jour un rôle important en termes d’offre de soutien pour les femmes aspirant à devenir dirigeantes. Une secrétaire du SRC de l’une des universités a admis que : « mon équipe de campagne n’était composée que d’hommes et ils m’ont beaucoup aidée… »

L’interaction des étudiantes dirigeantes sur les différents campus a révélé qu’elles avaient reçu des soutiens de différentes sources comme les parents, les frères et sœurs, les amis hommes et femmes, les fiancés, les professeurs et les mentors. Les soutiens qu’elles ont reçus a pris la forme d’argent, d’impression d’affiches, de cartes téléphoniques, d’encouragement et faire campagne. Comme l’a déclaré une commissaire des femmes : « Je n’aurais pas pu m’en sortir avec mon argent personnel, j’ai eu le soutien financier de mes parents, de mes amis et de certains mentors que j’ai eus à l’église. De mes parents, j’ai reçu des encouragements et quand j’ai en eu besoin de l’argent, pas tout, mais un peu, ils m’ont soutenue et mon mentor m’a aussi aidé avec de l’argent ; mes amis m’ont aidée pendant la campagne, pas forcément avec de l’argent, mais ils ont fait campagne pour moi ». Une secrétaire du SRC a laissé entendre : « Mon professeur à l’université en a été un, mes frères et sœurs, je les ai appelés pour me donner de l’argent pour faire des affiches, certains de mes amis ont aussi choisi d’imprimer gratuitement certaines affiches dont j’avais besoin pendant ma campagne». En plus de l’offre de soutien financier et logistique, il est évident que certaines dirigeantes ont reçu un soutien de sources surnaturelles. La dirigeante de l’une des écoles polytechniques du nord du Ghana en a témoigné en disant que : « …j’ai reçu un soutien spirituel par la protection de mon père et cela m’a permis d’arriver jusque-là. Les élections dans cet établissement sont une bataille rude et parfois violente. Ce n’est pas facile et vous avez de cet aspect … » Il a été noté, comme l’ont admis certaines étudiantes dirigeantes, que dans certains cas les hommes leur ont apporté un soutien plus important. Une secrétaire du SRC a admis que son équipe de campagne n’était composée que d’hommes. Les réponses recueillies suggèrent que les étudiantes dirigeantes n’ont ni sollicité ni reçu de soutien d’un parti politique et de l’unité Genre de leur établissement. De fait, la plupart des établissements n’ont pas d’unité Genre. 4.4 Quels sont les défis rencontrés par les étudiantes dirigeantes? Les données sur les défis rencontrés par les étudiantes dirigeantes sont présentées dans le tableau 1.8.

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Tableau 1.8 : Distribution des défis rencontrés par les répondantes Enoncé J’ai lutté financièrement pendant ma campagne Je n’ai pas reçu suffisamment de soutien logistique pendant ma campagne

AE

A

D

DE

F%

F%

F%

F%

9(18,4)

13(26,5)

22(44,9)

5(10,2)

13(26,5)

16(32,7)

19(38,8)

1(2,0)

Je me sens découragée par les membres de ma famille en tant que dirigeante

1(2,0)

3(6,1)

20(40,8)

25(51,0)

Je me sens découragée par mes amies en tant que dirigeante

0(0,0)

7(14,3)

23(46,9)

19(38,8)

Je me sens découragée par mes amis en tant que dirigeante

0(0,0)

0(0,0)

27(55,1)

22(44,9)

Je me sens intimidée par mes condisciples féminins

0(0,0)

7(14,3)

19(38,8)

23(46,9)

Je me sens intimidée par mes condisciples masculins

1(2,0)

8(16,3)

22(44,9)

18(36,7)

Je ne suis pas encouragée par mes pairs dirigeants

2(4,1)

13(26,5)

21(42,9)

13(26,5)

Je ne reçois pas d’encouragement des professeurs femmes

2(4,1)

10(20,4)

20(40,8)

17(34,7)

Je ne reçois pas d’encouragement des professeurs hommes

3(6,1)

7(14,3)

20(40,8)

19(38,8)

Je ne reçois pas d’appui des autorités de l’université /de l’école polytechnique

9(18,4)

8(16,3)

18(36.7)

14(28.6)

Le tableau 1.8 montre que le défi majeur rencontré par les étudiantes dirigeantes était de recevoir un soutien logistique suffisant pendant leur campagne 29 (59,2 pour cent) ainsi qu’un soutien financier 22 (44,9 pour cent). Les réponses recueillies auprès des étudiantes dirigeantes pendant les entretiens indiquent qu’elles rencontrent divers défis ; le plus prévalent étant la bureaucratie institutionnelle. La plupart d’entre elles ont admis que la façon dont le système est structuré, associé aux lois sur l’attribution des marchés publics, rendent très difficile l’accès à l’argent pour les projets et les programmes. Les propositions présentées doivent passer par un très long processus avant d’être parfois approuvées. Cela leur rend parfois difficile d’organiser les programmes ou d’achever les projets avant de quitter leur fonction. La représentante d’un foyer a déclaré : « Je sais que les étudiants dirigeants pensent parfois que la comptabilité et les dirigeants sont corrompus et que pour cette raison ils ont mis en place des structures et que ces structures 56

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entravent plutôt le processus de leadership étudiant. Je me souviens d’une fois où j’ai décidé visiter un foyer, j’ai dû marcher, en parler, écrire des lettres ici et là, la bureaucratie était excessive. A la fin, cela a été retardé, le résultat que j’attendais n’a pas été vraiment celui que j’attendais. Je ne dirais pas que c’était de ma faute si je n’ai pas réussi, mais que c’était à cause du système ». Une trésorière a aussi commenté la façon dont la nature bureaucratique du système lui avait valu des surnoms péjoratifs parce qu’elle ne sortait pas d’argent alors que les autres dirigeants le faisaient. Voici ses propos : « Il y a tellement de défis, en particulier l’aspect qui concerne l’argent. Il faut beaucoup d’attention et de prudence parce que certaines personnes pensent que l’argent est juste là et que s’ils veulent de l’argent ils n’ont qu’à vous appeler, Bertha nous avons besoin d’argent et vous prenez l’argent pour eux. Ils ignorent que ça passe par un processus avant que la somme soit décaissée et la plupart des gens pensent « me kyir me ho,oy obaa ei ntsi, s obaa de ob nya position a, okyir noho – ( c’est-àdire, vous êtes arrogante, parce que vous êtes une femme, quand une femme obtient un poste, elle devient arrogante). » Elles sont parfois déçues quand elles sollicitent le parrainage d’une entreprise. Quand elles ne sont pas capables de mener à bien les programmes ou les projets, elles sont accusées d’échec par les étudiants. Les commissaires des femmes de certains établissements se sont plaintes qu’aucune affectation budgétaire n’était même faite pour leur unité. On a aussi découvert que le parrainage des programmes organisés pour des collègues femmes était très faible et très décourageant. Comme une commissaire des femmes d’une université l’a déclaré : « Vous organisez le programme, préparez des réunions et les femmes ne viennent pas. Vous finissez par avoir 20 sur disons 250 femmes sur le campus et vous pensez, mais qu’est-ce que je fais ? A chaque fois, c’est comme être privé du soutien des femmes dont vous avez tant besoin, mais les hommes, même si vous ne les invitez pas, ils viennent nombreux et c’était l’un des principaux problèmes que nous avons eu ». Certaines se sont aussi plaintes des remarques décourageantes des étudiants qui disaient des choses pour saper et ternir leur réputation. Concilier le travail universitaire et les responsabilités de dirigeantes était très fastidieux pour elles. Une secrétaire du SRC a dit : « Le principal défi est académique, parce qu’une fois que vous êtes étudiant dirigeant sur le campus, vous ne devez pas négliger vos études parce que vos professeurs ne vous accorderont pas un traitement de faveur. Il n’y a aucun favoritisme


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pour les étudiants dirigeants, si vous avez zéro, vous avez zéro et vous serez en retard. Donc quand vous êtes étudiant dirigeant, vous devez prendre vos études au sérieux ou vous serez hors-jeu ». Pour une secrétaire particulière du SRC, la crainte de décevoir ses parents en n’ayant pas de bonnes notes la hantait constamment. Plus encore, les étudiantes dirigeantes du nord du Ghana ont indiqué qu’elles étaient parfois intimidées par les hommes. 4.5 Quelles sont les stratégies qu’elles adoptent pour faire face à la situation ? Le tableau 1.9 présente les informations sur les stratégies d’adaptation employées par les étudiantes dirigeantes quand elles rencontrent des défis. Tableau 1.9 Distribution des stratégies d’adaptation rencontrées par les répondantes Enoncé

AE

A

D

DE

F%

F%

F%

F%

9(18,4)

26(53,1)

13(26,5)

1(2,0)

Je contacte la direction/unité Genre de mon établissement

2(4,1)

19(38,8)

14(28,6)

14(28,6)

J’appelle mes parents quand je rencontre des difficultés

17(34,7)

23(46,9)

6(12,2)

3(6,1)

Je parle à mes ami(e) squand je rencontre des difficultés

5(10,2)

35(71,4)

7(14,3)

2(4,1)

Je pleure quand je rencontre des défis/ problèmes

6(12,2)

6(12,2)

14(28,6)

23(46,9)

Je mange beaucoup quand je rencontre des défis/problèmes

1(2,0)

2(4,1)

15(30,6)

31(63,3)

Je prie quand je rencontre des défis/j’ai des problèmes

31(63,3)

16(32,7)

0(0,0)

2(4,1)

Je consulte un dirigeant religieux quand je rencontre des défis/problèmes

17(34,7)

20(40,8)

8(16,3)

4(8,2)

3(6,1)

15(30,6)

19(38,8)

12(24,5)

11(22,4)

22(44,9)

8(16,3)

8(16,3)

Je contacte un collègue étudiant dirigeant quand je rencontre des difficultés

Je consulte l’unité de conseil de l’établissement Je ferme les yeux et les oreilles aux commentaires décourageants

D’après le tableau 1.9, prier 47 (96,0 pour cent), appeler les parents 40 (81,6 pour cent), parler aux ami(e)s 40 (81,6 pour cent), consulter les dirigeants religieux 37 (75,5 pour cent) et fermer les yeux et les oreilles aux commentaires décourageants 33 (67,1 pour cent) étaient certaines des stratégies d’adaptation utilisées par les étudiantes dirigeantes.

Afin de gérer les défis qu’elles rencontraient, les étudiantes dirigeantes avaient recours à diverses stratégies. Une dirigeante a déclaré : « Quand des défis surviennent, je prie et l’appelle parfois le pasteur de mon église, l’église pentecôtiste pour un soutien par la prière. J’appelle aussi mes parents et mes amis et ils m’encouragent beaucoup. » Certaines ont indiqué qu’à cause de la nature bureaucratique du système, elles devaient soumettre les propositions des programmes qu’elles voulaient réaliser très en avance et faire pression pour obtenir un financement. « Pour les questions de financement, j’essaie autant que possible de toujours faire pression pour avancer, c’est la base, il n’y a rien d’autre à faire. C’est la loi d’attribution des marchés publics qui a été adoptée par le parlement, une loi du parlement, alors il n’y a rien que vous puissiez faire et quitte à faire quelque chose alors le mieux est de faire pression auprès des autorités pour que tout se passe bien ». Afin de mieux aborder la question de la faiblesse des parrainages, tous les médias disponibles comme Facebook, les panneaux d’affichage, les SMS et les stations de radio FM sont utilisés pour diffuser l’information aux étudiants. Coopérer avec d’autres membres exécutifs pour que les choses soient faites aide également à diminuer le stress. Une trésorière du SRC a laissé entendre que : « J’ai fait la sourde oreille aux remarques décourageantes sur moi parce que je suis consciente que le leadership apporte son lot de défis et je m’encourage parce que je sais que c’est un terrain pour me préparer à mes futures aspirations. Certaines ont aussi indiqué que quand elles rencontraient des défis elles “priaient Dieu et demandaient conseil aux anciens ». Une autre trésorière d’une école polytechnique a expliqué la façon dont elle faisait face aux remarques désobligeantes à cause de son poste et de son genre : « Je ne suis pas découragée par tous les défis que je rencontre parce que je sais où je vais et que je sais que diriger n’est pas simple et ce qui m’a aidé est que je ne fais pas les choses pour plaire aux gens. Je fais ce qui est juste et fais en sorte que ce que je fais n’est pas pour plaire à quelqu’un … Et à grâce à la vision que j’ai, même quand je traverse des épreuves et des problèmes, je considère que c’est quelque chose qui me prépare bien pour affronter les futurs postes et défis. Je sais que pour diriger on doit de toute façon affronter des défis, mais quand on persévère, on atteint des niveaux plus élevés. » En termes de défis académiques, la secrétaire du SRC d’une université a déclaré : « Vous savez tout est lié à la gestion du temps et à la détermination. Une fois que vous avez décidé de relever le défi de concilier études et leadership vous devez essayer de partager votre temps entre les deux et trouver un moyen ».

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Une analyse exploratoire a été employée pour examiner les différences en matière de motivation, de soutien, de défis et de stratégies d’adaptation des étudiantes dirigeantes des universités et des écoles polytechniques.

Motivation

Soutien

Valeur-p

Valeur-t

SD

Moyenne

Nombre de répondants

Groupe

Thème

Tableau 1.10 : Test-t pour échantillons indépendants des dirigeantes des universités et des écoles polytechniques

Université

27

36,93 7,130 -2,401 ,021

Ecole polytechnique

22

40,77 3,878

Université

27

38,63 8,639 -0,611 ,544

Ecole polytechnique

22

40,14 8,532

Défis et stratégies Université

27

46,33 5,320 -2,232 ,030

d’adaptation

22

49,59 4,876

Ecole polytechnique

Le tableau 1.10 montre une différence significative entre les facteurs qui ont motivé les femmes dans les universités et celles dans les écoles polytechniques à se présenter à un poste. De même, on a constaté une différence significative en matière de défis et de stratégies d’adaptation entre les étudiantes dirigeantes des universités et leurs homologues des écoles polytechniques. 4.6 Opinions des étudiants dirigeants masculins Quand on lui a demandé pourquoi ils se sont présentés à un poste que la plupart des gens considèrent comme réservé aux femmes, un dirigeant masculin a dit : « Vous savez ces derniers temps, les femmes luttent pour l’égalité et je ne pense pas que le poste de secrétaire est destiné aux femmes. Les hommes peuvent aussi faire ce travail et même mieux que les femmes ». Au sujet des contributions des étudiantes dirigeantes en matière de prise de décision, l’un d’entre eux a dit: « Elles viennent aux réunions juste pour voir. La seule chose qui les intéresse c’est l’argent. Quand il s’agit d’argent, elles veulent avoir leur part. Pour ça, vous pouvez leur donner 90 pour cent de contribution. Quand il s’agit de travailler, c’est fini ». Un autre dirigeant masculin a dit : « En vérité, les dirigeantes n’ont pas réalisé grandchose. Elles ne sont pas actives. La plupart du temps quand il s’agit de prendre des décisions, la plupart d’entre elles restent dormantes et elles ne parlent même pas. Il n’y en a que quelques-unes qui avancent. » En général, les étudiants dirigeants masculins interrogés étaient d’avis que les étudiantes dirigeantes réussissaient bien, mais qu’elles manquaient de la capacité à prendre des initiatives, comme l’un l’a dit l’un d’entre eux : « Elles

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réussissent bien, c’est seulement qu’elles veulent toujours que les hommes se lancent en premier avant de suivre. » 5. ANALYSE DES RÉSULTATS DE L’ÉTUDE L’objectif de la présente étude était d’examiner les expériences des étudiantes sur les campus des établissements d’enseignement supérieur au Ghana et d’explorer comment utiliser au mieux cette plateforme pour former et préparer plus de femmes dirigeantes. Les questions de recherche qui ont guidé la recherche étaient : (a) qu’est-ce qui motive les étudiantes dirigeantes à briguer un poste dans une association étudiante ? (b) quelles sont les formes de soutien disponibles pour les étudiantes dirigeantes?, (c) quels sont les défis rencontrés par les étudiantes dirigeantes ?, et (d) quelles stratégies adoptent-elles pour faire face à cette situation? 5.1 Motivations et dirigeantes La première question de recherche s’est penchée sur les motivations des étudiantes dirigeantes pour briguer un poste dans une association étudiante. Les résultats de l’analyse quantitative et qualitative montrent que les participantes étaient à la fois motivées extrinsèquement et intrinsèquement pour briguer un poste. Extrinsèquement, les amis (hommes et femmes), les membres de la famille comme les parents, les frères et sœurs, les oncles et les modèles et les mentors comme les professeurs, les politiciens et les leaders d’opinion ont motivé les étudiantes à choisir un poste à responsabilité. Cette découverte est conforme aux études (Mayer, 2001 ; Scherr, 2010 ; Bearden, 2002 ; & Chandler, 2008) dans lesquelles ces personnes importantes motivaient les femmes à occuper des postes à responsabilité. L’étude de Mayer (2001) a révélé que les participantes ont bénéficié de mentors masculins et féminins qui ont cru en leur potentiel, les ont encouragées à prendre des risques, les ont écoutées et les ont aidées à définir leurs objectifs de carrière, entre autres choses. De même, Scherr (2010), dans son étude sur six femmes dans des organisations à but non lucratif aux Etats-Unis, a révélé que les participantes avaient attribué des éléments de leur croissance professionnelle et de leur réussite à différents mentors qui allaient des membres de leur famille à leurs patrons et l’étude de Bearden (2002) sur des femmes en vue en Alabama a révélé que les modèles et les mentors étaient surtout des enseignants et des membres de la famille comme les pères, les mères, les grands-mères et les sœurs. Chandler (2008) a obtenu des résultats dans lesquels les modèles ayant le plus d’impact étaient les membres de la famille comme les oncles, les tantes, les pères, les mères, les dirigeants masculins de la communauté, les leaders d’opinion des médias et d’autres leaders mondiaux comme Mère Thérésa et Martin Luther King Junior. Au regard de la question des modèles, seulement deux sur les dix-sept étudiantes dirigeantes interrogées ont cité comme modèle des femmes de haut niveau de leur établissement. Cette découverte est conforme à Ohene (2011) et aux autres chercheur(se)s qui ont affirmé que la sous-représentation des femmes dans les universités semblait être un phénomène mondial (Brooks 2001 ;


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Dines 1993 ; Singh, 2008). Dines (1993) a brossé par exemple un tableau complet des universités comme un lieu où les hommes sont plus nombreux que les femmes avec des ratios respectifs de un à cinq et de un à vingt aux niveaux aux niveaux moyen et supérieur de direction. Les statistiques fournies par l’Association des universités du Commonwealth (2008) indiquent que 5,7 pour cent seulement, 14,4 pour cent et 12,6 pour cent du corps enseignant étaient des femmes professeurs/chargés de cours principal et responsables académiques et directeurs. Il existe donc quelques étudiantes dirigeantes sur les campus pouvant servir de modèle aux étudiantes. Par ailleurs, la complexité du cadre universitaire rend même difficile aux femmes mentors d’être vues ou entendues par la majorité des étudiantes, car elles n’enseignent pas les cours qu’elles suivent. Ces affirmations ne diffèrent pas de ce qui se passe dans les établissements d’enseignement supérieur du Ghana. Citons à titre d’exemple le nombre de femmes dans le corps enseignant de l’Université des sciences de l’éducation de Winneba. En 2011, elles étaient 84 représentant 22 pour cent de l’ensemble du personnel enseignant (Rapport du vice-président, 2011). L’une des principales découvertes de cette étude est que les femmes dirigeantes ne parlent pas pendant les réunions. En effet, cette découverte va à l’encontre de Dickson (2000) qui a suggéré que les femmes doivent s’affirmer et s’exprimer pour être visibles et reconnues. Par ailleurs, d’après Mayer (2001), elles devraient être mentorées par des modèles. En terme de motivation intrinsèque, de nombreuses participantes ont répondu qu’elles avaient confiance en elles, avaient l’envie et la passion du service, voulaient aider d’autres femmes qui avaient des besoins et étaient animées de la volonté de prouver aux hommes qu’elles pouvaient réussir aussi bien qu’eux. Ces affirmations sont cohérentes avec l’étude de Harris (2007) sur la motivation des femmes directrices qui a révélé que les motivations principales des femmes en matière de leadership éducatif et de poste de direction incluaient le désir de faire une différence, la capacité d’initier le changement, l’envie d’avoir un impact positif sur les gens et le défi de l’expérience. C’est également similaire à l’étude qualitative de Sherr (2010) sur les femmes dirigeantes dans laquelle les six participantes étaient des femmes passionnées avec un besoin intérieur de réussir, que ce soit pour elles-mêmes ou pour les entreprises dans lesquelles elles travaillaient. D’après ces résultats, il est évident que celles qui étaient extrinsèquement motivées étaient aussi intrinsèquement motivées. Certaines participantes ont déclaré qu’elles avaient l’envie de briguer des postes et qu’elles avaient aussi été contactées ou encouragées par leurs ami(e)s qui les avaient poussés à prendre le formulaire de candidature au poste. 5.2 Soutien aux femmes dirigeantes La deuxième question a examiné les formes de soutien qui étaient disponibles pour les étudiantes dirigeantes. Les résultats quantitatifs et qualitatifs ont révélé que les ami(e)s, les membres de la famille, les professeurs et les mentors étaient les principales personnes qui soutenaient

les étudiantes dirigeantes sous la forme d’argent, d’encouragement, de commissions et de logistique. C’est cohérent avec les études de Mayer (2001) et Scherr (2010). En revanche, cela n’était pas le cas de leurs condisciples masculins qui étaient soutenus par des politiciens et des ONG. La raison expliquant pourquoi les politiciens et les ONG ne soutenaient pas les étudiantes dirigeantes était inconnue de celles qui ont été interrogées. Il est possible que les politiciens veuillent former les étudiants dirigeants pour les aider au niveau local pour leurs activités de campagne électorale et ultérieurement occuper de futurs postes au gouvernement s’ils gagnent les élections. Actuellement, plusieurs parlementaires et ministres d’Etat de l’actuel gouvernement du Ghana ont été des étudiants dirigeants dans les établissements d’enseignement supérieur. D’autres ont aussi reçu un soutien surnaturel comme les prières de leur pasteur ou la protection d’un père, cette forme de protection doit être interprétée comme la protection Juju ou vaudou pour les protéger des attaques spirituelles des autres candidats. Les autres réponses recueillies suggèrent que les étudiantes dirigeantes n’ont ni sollicité ni reçu de soutien des unités Genre de leur établissement. En fait, la plupart des établissements n’ont pas d’unité Genre. Par ailleurs, Gerdes (2003), O’Laughlin et Bischoff (2001) ont recommandé que les femmes choisissent leurs partenaires soigneusement, négocient et établissent des réseaux et obtiennent un soutien social de mentors. Ces réseaux sont des sources de soutien pour les dirigeantes, à côté des pères, mères et des êtres chers. 5.3 Défis La troisième question de recherche a examiné les défis rencontrés par les étudiantes dirigeantes dans leur travail. Les facteurs qui empêchent la quête des femmes vers des sommets plus élevés et le leadership en particulier sont nombreux. Les réponses recueillies auprès des étudiantes dirigeantes des établissements d’enseignement supérieur au Ghana indiquent différents défis : le plus prévalent était la bureaucratie institutionnelle. La plupart d’entre elles ont admis que la façon dont le système était structuré, associée aux lois d’attribution des marchés publics, rendait très difficile d’accéder à l’argent pour les projets et les programmes. Les propositions soumises devaient suivre un processus très long avant parfois d’être approuvées. Cela leur rendait parfois difficile d’organiser des programmes ou d’achever des projets avant de quitter leur fonction. Elles étaient parfois déçues quand elles sollicitaient le parrainage d’une administration centrale. Quand elles n’étaient pas capables de mener à bien les programmes ou les projets exposés, elles étaient accusées d’échec par les étudiants. Les commissaires des femmes de certains établissements se sont plaintes qu’aucune affectation budgétaire n’était même faite pour leur unité. Il est aussi apparu que le parrainage des programmes organisés pour des femmes collègues était très long et décourageant. Certaines se sont plaintes des remarques désobligeantes d’étudiants qui disaient des choses pour saper et ternir leur réputation. Par exemple, la trésorière Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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d’une école polytechnique a été accusée d’arrogance parce qu’elle était trop ferme au sujet du décaissement de fonds à des hommes. Ce résultat va dans le sens de Mendoza (1996) qui a déclaré que les femmes qui surmontaient les intimidations et prenaient l’initiative de briguer des postes étaient critiquées pour être trop agressives par leurs pair(e)s, hommes et femmes confondus. Cela va également dans le sens de l’étude de Ohene (2011) dans lequel il a rapporté qu’au Ghana, les femmes qui montraient des signes de leadership ou d’application des règles et voulaient que les choses soient faites rapidement étaient décrites comme trop directes et traitées de « Margaret Thatcher », l’ancienne premier ministre du Royaume-Uni qui a été dépeinte dans les journaux ghanéens comme une femme forte. D’autres sont appelées alomo dzata (lionne) ou obaa dindin (femme forte) en dialecte Akan. Concilier le travail académique et les responsabilités de dirigeantes était très fastidieux pour la plupart d’entre elles. Certaines ont indiqué qu’elles devaient travailler très dur afin d’obtenir la confiance des étudiants. Pour une secrétaire du SRC, la crainte de décevoir ses parents en n’obtenant pas de bonnes notes la hantait en permanence. 5.4 Stratégies d’adaptation La dernière question de recherche a examiné les stratégies d’adaptation adoptées par les femmes dirigeantes pour surmonter les défis. Les conclusions ont montré que les étudiantes dirigeantes avaient recours à différentes stratégies pour faire face. Certaines ont indiqué qu’à cause de la nature bureaucratique du système, elles devaient envoyer les propositions de programmes et de projets qu’elles voulaient réaliser très en avance et faire pression pour obtenir un financement. Afin d’aborder la question de la faiblesse des parrainages, tous les médias disponibles comme Facebook, les tableaux d’affichage, les SMS et les stations de radio FM étaient utilisés pour diffuser l’information aux étudiants. Coopérer avec d’autres membres exécutifs pour faire avancer les choses a aussi aidé à diminuer leur stress. Pour concilier travail et obligations universitaires, elles ont mentionné l’importance de la gestion du temps, puisque les établissements n’accordent pas d’autorisation spéciale. Ces conclusions correspondent aux études (Anglis, 1990 ; Rosynsky, 2002 ; Dietz, 1997) qui ont suggéré la gestion du temps pour concilier obligations personnelles et professionnelles, la négociation efficace, recueillir et diffuser l’information et recourir à des subordonnés et superviseurs masculins pour surmonter les obstacles. Une trésorière du SRC a laissé entendre qu’elle jouait les sourdes muettes face aux remarques décourageantes sur elle parce qu’elle savait que le leadership comportait de ce genre de défis et qu’elle s’encourageait elle-même parce qu’elle savait que c’était le terrain préparatoire à ses futures aspirations. Certaines ont indiqué que quand elles rencontraient des défis, elles priaient Dieu et demandaient des conseils à des personnes plus âgées. De plus, pour lutter contre les obstacles culturels, comme la marginalisation énoncée respectivement par Johnsrud et Heck (1994) et Rosynsky (2002), il a été suggéré que

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les femmes apprennent à dire « non », à être consciente des attitudes cachées à leur égard, à s’adapter à la culture existante et à faire en sorte que les hommes soient à l’aise pour travailler avec elles. Comme répétition, 67 pour cent des femmes dirigeantes ont fermé les yeux et fait la sourde oreille aux remarques décourageantes, car elles étaient conscientes que le leadership comportait ce genre de défis et elles ont persévéré comme le suggère Tiao (2006). Afin de minimiser les obstacles personnels comme l’intimidation, les insultes et la crainte d’avoir de mauvaises notes, la majorité des femmes travaillaient beaucoup plus dur pour obtenir la confiance des étudiants et de leurs parents ainsi que pour préserver leur estime d’elle-même. Cela a confirmé l’importance la motivation du succès que Weiten (1996) et Santrock (2000) ont défini comme le besoin de relever des défis difficiles et l’envie d’accomplir quelque chose et à déployer des efforts. A l’heure actuelle, le développement du leadership chez les étudiants est considéré comme une priorité dans les établissements contemporains d’enseignement supérieur (Astin & Astin, 2000; Roberts, 2003), mais maintenant il faut encourager davantage la participation féminine. Le leadership peut inclure la façon dont l’étudiant sert un établissement d’enseignement supérieur et la façon dont les individus se perçoivent dans le contexte de la société plus large (Miles, 2011). Les écoles supérieures et les universités contemporaines offrent de nombreuses opportunités de leadership aux étudiants. Ces activités formelles et non formelles de développement du leadership peuvent inclure des expériences en classe et hors de la classe (Boatman, 1999 ; King, 2003) comme cela est pratiqué dans les établissements ghanéens d’enseignement supérieur. Bien que les femmes représentent actuellement approximativement la moitié des étudiants de premier cycle inscrits dans les écoles supérieures et les universités, leurs condisciples masculins occupent la majorité des postes de leadership sur les campus (Leornard & Sigall, 1989 ; Wilkerson, 1989, Mendoza, 1996). La situation des universités et des écoles polytechniques ghanéennes n’est pas différente. Au Ghana, les femmes sur les campus des établissements d’enseignement supérieur représentent environ 45 pour cent de l’ensemble de la population étudiante (UEW, rapport annuel des vice-présidents pour 2009/2010), pourtant on ne les voit pas au premier plan de la politique sur les campus. Au mieux, la plupart de celles qui en trouvent le courage s’installent « en coulisses » à des postes de secrétaire, trésorière et commissaire des femmes, des postes réservés aux femmes, bien que la présente recherche montre que les étudiants masculins briguent aussi ces postes à présent. Ces phénomènes peuvent être attribués à certains défis rencontrés par les femmes sur les campus mixtes. Leornard et Sigall (1989) cités dans Mendoza (1996). Comme cette étude l’indique, les pairs, hommes et femmes confondus, découragent parfois les femmes qui ont l’intention de briguer à des postes clés comme ceux de président ou de vice-président. On leur « fait


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comprendre » que ces postes sont faits pour les hommes ou on leur « conseille » de se concentrer sur leurs études puisque c’est la raison de leur présence à l’école. Cela implique que les femmes font preuve des caractéristiques traditionnellement associées aux hommes, ce qui est en opposition avec les pratiques culturelles stéréotypées. Ayant ces résultats potentiellement démoralisants à l’esprit, les femmes des établissements d’enseignement supérieur semblent trouver que le leadership n’en vaut pas la peine, en particulier sur les campus mixtes. Par conséquent, la plupart des femmes dans les universités et les écoles polytechniques ne semblent pas montrer d’intérêt et n’éprouvent pas d’enthousiasme pour briguer des postes dans les associations étudiantes. Cependant, par le biais d’actions de sensibilisation sur des plateformes permanentes de genre qu’il faudrait créer dans les différentes universités et écoles polytechniques, on pourrait voir l’émergence d’une nouvelle tendance et des étudiantes et des étudiants se présenter à des postes élevés. 6. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS Nous avons tiré les conclusions suivantes de l’analyse des données qualitatives et quantitatives : • Il y a très peu de modèles féminins dans les établissements, ce qui implique que ce sont les membres de la famille proche ainsi que les « personnalités en vue » qui ont directement ou indirectement motivé les étudiantes à briguer des postes dans les associations étudiantes. Il convient de signaler que certaines femmes sont intrinsèquement motivées pour assumer un rôle de leadership dans les établissements d’enseignement supérieur. • Le soutien disponible aux étudiantes dirigeantes est très limité. En effet, le soutien financier et logistique vient de la famille proche ; notons que les femmes ont vraiment été soutenues par les hommes comme directrice de campagne. Les partis politiques, les ONG et les unités Genre des établissements d’enseignement supérieur n’offrent pas de soutien aux femmes qui se présentent à un poste à responsabilité. • L’accès au financement pour la mise en œuvre de projets ou de programmes a été le plus grand défi rencontré par les étudiantes dirigeantes. • En ce qui concerne les stratégies d’adaptation, la plupart d’entre elles ont recours à la prière, consultent

leurs dirigeants religieux pour avoir de l’aide, tandis que certaines ferment simplement les yeux et font la sourde oreille aux commentaires décourageants. Sur la base des conclusions tirées, nous avons formulé les recommandations suivantes : • La sensibilisation sur les questions de genre dans les établissements sensibilisera la société. Bien que les campagnes de sensibilisation sur les campus aient déjà commencé, elles doivent être poursuivies et soutenues par l’administration. • Compte tenu du manque de modèles féminins existants, les établissements d’enseignement supérieur du Ghana doivent veiller à faire entrer plus de femmes qualifiées dans leur corps enseignant. • Il est urgent que chaque établissement d’enseignement supérieur crée une unité Genre fonctionnelle, disposant du personnel approprié et qualifié, pour développer le potentiel de leadership des étudiantes et des étudiants. Les experts de genre peuvent préparer les femmes aux rôles de leadership dans le futur par le biais de symposiums et de séminaires. Par ailleurs, il faudrait élargir le système de mentorat dans les sphères universitaires au leadership institutionnel des étudiantes dans les établissements d’enseignement supérieur. Cela nécessite la formation précoce des étudiantes pour les motiver. Il est urgent que ces femmes aspirent à des rôles de leadership. • Les unités Genre des établissements d’enseignement supérieur devraient se concerter avec les ONG basées sur le genre pour offrir un soutien financier et logistique aux femmes dirigeantes potentielles. • Le soutien institutionnel de bureau du doyen des affaires étudiantes devrait être mis à la disposition des étudiants, en particulier pour libérer des fonds pour la réalisation du/des projet(s) afin de minimiser le long processus bureaucratique des lois sur l’attribution des marchés publics. • Des centres de conseil dans les établissements d’enseignement supérieur devraient offrir une assistance psychologique et affective aux étudiantes qui peuvent avoir des problèmes affectifs et sur la façon de gérer les défis de leadership ainsi que le stress.

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Université d’Afrique du Sud

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La violence sexuelle à l'école constitue une sérieuse menace éducative pour les élèves, avec comme résultat une fréquentation irrégulière de l'école etl’abandon. Lorsque ces conséquences frappent des élèves ayant des besoins spécifiques, cela devient une double violation de leurs droits à l'éducation.

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Violence sexuelle dans les écoles pour élèves ayant des besoins spécifiques en Afrique du Sud

RÉSUMÉ Ce document présente les résultats d’une étude portant sur la violence sexuelle dans les écoles pour élèves ayant des besoins spécifiques en Afrique du Sud. L’étude est de nature qualitative et a été réalisée dans un cadre tenant compte de la dimension genre. Les données ont été recueillies dans six écoles spéciales, auprès des enseignants (20), des éducateurs (35), et d’un ensemble de 134 élèves appartenant aux catégories suivantes : déficiences intellectuelles légères (42), déficiences visuelles (35), déficiences auditives (33), et handicaps physiques (24). Les écoles étaient situées dans les townships noires à l’exception de l’une d’entre elles située dans une zone auparavant réservée aux personnes d’origine indienne. Les élèves étaient tous noirs et âgés de 12 à 21 ans. L’ensemble des données ont été recueillies dans le cadre de groupes de discussion. Il y a eu 15 entretiens en groupes de discussion avec des personnes atteintes de déficiences visuelles (quatre groupes); des élèves souffrant de déficiences intellectuelles (cinq groupes) ; des élèves sourds (quatre groupes) ; et des élèves handicapés physiques (deux groupes). Il y a eu deux entretiens en groupes de discussion avec les enseignants et deux autres entretiens en groupes de discussion avec les éducateurs. Le contenu des données a été analysé et les données ont été classées par thèmes. Les résultats de cette étude laissent entendre que la violence sexuelle est courante chez les élèves handicapés et se produit sous diverses formes. Sont également abordés dans cette étude, les processus scolaires connexes ainsi que les facteurs perpétuant de telles formes de violence, de même que l’analyse de la contribution de ces formes de violence à la marginalisation et au sentiment d’impuissance du groupe concerné. Dans la conclusion, nous formulons des suggestions sur la manière dont les écoles peuvent contribuer à remédier aux dégâts engendrés par l’expérience de violence sexuelle et promouvoir des environnements d’apprentissage sûrs pour les élèves atteints de handicaps en Afrique du Sud.


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1. INTRODUCTION Pour les enfants du monde entier, la violence sexuelle fait partie de leur quotidien en milieu scolaire. En Afrique du Sud, pays qualifié de « plaque tournante du viol » (Calitz, 2011), le problème est répandu dans les écoles et/ ou autour des écoles, notamment dans les centres d’éducation. La violence persiste en Afrique du Sud en dépit de l’engagement du pays à protéger ses citoyens vulnérables de toutes formes de mauvais traitements (Constitution de la République d›Afrique du Sud, 1996). Les rapports sur des comportements agressifs et intimidants, un contact physique non sollicité comme les mains baladeuses, des baisers sexuels et des attouchements, la violence sexuelle, la coercion sexuelle et le viol sont autant d’éléments relevant de la violence sexuelle et qui s’appliquent aux relations sexuelles entre des enseignants et des élèves, ou entre les élèves (Unesco, 2003). 1.1 Examen de la littérature connexe Dans le cas de l’Afrique du Sud, l’étude effectuée en 2001 par Human Rights Watch dans huit écoles situées dans trois provinces a attiré l’attention du public sur la violence sexuelle à l’école. D’autres études ont par la suite été menées par : Jewkes, Penn-Kekana, Levine, Ratsaka et Schreiber (2001); Jewkes, Levine, Mbananga et Bradshaw (2002); Haffejee (2006); la Commission sud-africaine des droits de l’Homme (2006); et Prinsloo (2006). Ces études ont toutes un point en commun : aucune n’a étudié la violence sexuelle chez les élèves ayant des besoins spécifiques. Les quelques études qui portent sur la violence sexuelle chez les élèves ayant des besoins spécifiques se sont concentrées sur des cadres autres que l’école. On trouve parmi ces études, la recherche effectuée par Naidu, Haffejee, Vetten et Hargreaves (2005) pour le Centre de violence et le Centre de réconciliation ; celle de Dickman et Roux (2005) et Dickman, Roux, Manson, Douglas, et Shabalala (2006) effectuée dans un établissement pour handicapés mentaux dans la région du Cap occidental. Ainsi, ce vide dans la littérature donne l’impression que la violence sexuelle n’existe pas dans les écoles spéciales et que les élèves fréquentant ces écoles ne sont pas en danger. L’UNICEF (2005) note que les enfants souffrant de handicaps physique, sensoriel, intellectuel ou mental sont chaque année confrontés à des niveaux croissants de violence sexuelle, ce qui vient renforcer des conclusions précédemment établies selon lesquelles toute forme de handicap accroît le risque de violence sexuelle et de victimisation ; et les enfants atteints de handicaps entaux et ayant des problèmes de communication y sont davantage exposés (Sobsey & Doe, 1991; Sherry, 2000). Un rapport de Mencap, la plus grande organisation caritative au Royaume-Uni pour les enfants ayant des problèmes d’apprentissage, affirme que chaque année, 1400 nouveaux cas de sévices sexuels sont rapportés. De même, l’examen de la littérature effectué aux États-Unis indique que les enfants souffrant de diverses formes de handicaps sont susceptibles d’être victimes de violences sexuelles (Sullivan & Knutson, 2000; Sullivan, 2009). Dans une étude menée en Norvège, Kvam (2000) révèle

la tendance chez les enfants sourds à être victimes de violence sexuelle. Une autre étude effectuée en Afrique du Nord a également constaté que les élèves ayant des problèmes d’apprentissage et des problèmes de communication étaient victimes de violence sexuelle (UNICEF-MENARO, 2005). On retrouve les mêmes conclusions au Moyen-Orient (Reiter, Bryen & Schachar, 2010) et à Taiwan (Pan, 2007). Les études sur la violence sexuelle à l’école établissent un lien entre le problème et l’organisation de l’école. D’après Kent (2004), les écoles sont essentielles dans la construction de l’identité masculine et féminine qui finalement engendre la violence sexuelle à l’égard des élèves filles. Pour Ruto et Chege (2006), les normes et les attitudes culturelles bien ancrées qui continuent à socialiser les filles dans des cadres éducatifs les poussant à la soumission et la passivité, et qui poussent les garçons à l’agressivité et à la domination sont responsables de la violence sexuelle en milieu scolaire. Dunne (2007) laisse entendre que les systèmes de gestion et de programmes des écoles autoritaires et axés sur le genre - dans lesquels les enseignants jouissent d’un pouvoir absolu qu’ils utilisent pour exploiter les filles sexuellement et dans le silence - ont un rôle à jouer. Dans certains cas, l’agencement des sièges dans les classes est tel que les filles sont assises à l’avant et les garçons à l’arrière, donnant à ces derniers la possibilité de dominer et de contrôler les filles (Dunne & Leach, 2003). Malheureusement, les stéréotypes machistes et patriarcaux qui prévalent dans la société africaine en général, notamment en Afrique du Sud, se retrouvent également dans les écoles et ont amené les élèves filles à n’avoir pour seule responsabilité que les tâches domestiques telles que le nettoyage des salles de classe, alors que leurs camarades garçons sont affectés à des tâches manuelles comme par exemple s’occuper du jardin de l’école. Lorsqu’il s’agit d’assumer des rôles importants de responsabilité dans l’école, la préférence est également donnée aux garçons (Dunne, Leach, Chilisa, Maundeni, Tabulawa, Kutor Dzama & Assamoah, 2005). En outre, les règles de ces politiques scolaires peu claires qui régissent la manière de s’attaquer aux violences sexuelles contribuent à la violence sexuelle (Phasha & Nyokangi, 2012). Même dans les situations où un enseignant engrosse une fille, aucune action disciplinaire n’est prise et l’auteur n’est pas poursuivi. Souvent, ces enseignants sont simplement transférés dans une autre école où ils reproduisent le même comportement (Leach, 2002). Il est à noter que les manuels scolaires recommandés décrivent les garçons comme des êtres durs et dotés de capacités mentales, aventureux, alors que les filles sont décrites comme des personnes gentilles, douces et aimant les tâches ménagères (Kambarami, 2006). 1.2 Énoncé du problème La violence sexuelle à l’école constitue une sérieuse menace éducative pour l’individu. Les personnes victimisées optent souvent pour une fréquentation irrégulière de l’école et finissent par abandonner l’école Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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pour éviter d’être victimes de ces sévices. Le problème est que lorsque ces conséquences frappent des élèves ayant des besoins spécifiques, cela devient une double violation de leurs droits à l’éducation car de manière générale, le nombre de ces élèves dans les écoles est restreint en raison des préjugés et des pratiques de la société qui leur refuse un environnement sûr et favorable (Edwards, Amstrong & Miller, 2001). Ceci compromet leurs chances d’accéder à une éducation de qualité à l’égal de leurs camarades n’ayant pas de besoins spécifiques, et limite sérieusement leur contribution au développement social et économique. En outre, la littérature existant sur la violence sexuelle dans les écoles sud-africaines n’aborde pas ce problème car il concerne les personnes atteintes de handicaps. Outre le fait que ce vide reflète l’absence d’attention portée par la société aux écoles pour les élèves ayant des besoins spécifiques, il crée l’impression que la violence sexuelle n’existe pas dans les écoles se signale chez les élèves ayant des besoins spécifiques, et que les élèves fréquentant ces écoles ne courent aucun risque à ce niveau. Ce vide actuel dans la littérature signifie que notre enquête sur la violence sexuelle à l’école chez les élèves ayant des besoins spécifiques et fréquentant des écoles spéciales était nécessaire. Nous sommes préoccupés par le fait que si la violence sexuelle s’installe dans de ces écoles sans aucune intervention des autorités scolaires, elle finira par être considérée comme un élément normal de la vie scolaire et les élèves ayant des besoins spécifiques continueront à être victimisés. 1.3 Buts et objectifs Cette étude avait pour objectif d’enquêter sur la violence sexuelle dans les écoles pour élèves ayant des besoins spécifiques (intellectuels, visuels, auditifs et physiques), de manière à proposer aux écoles des moyens de contribuer à remédier à l’impact négatif de ces sévices et à promouvoir la sécurité. Les objectifs de cette étude peuvent se résumer comme suit : • documenter les formes de violences sexuelles dans les écoles accueillant des élèves ayant des besoins spécifiques ; • déterminer les processus et les pratiques scolaires qui motivent un tel comportement ; • analyser la contribution de la violence sexuelle à l’impuissance et la marginalisation du groupe concerné ; et • réfléchir aux moyens par lesquels les écoles peuvent contribuer à remédier aux dégâts générés par l'expérience de violence sexuelle à l’école chez les élèves ayant des besoins spécifiques, et créer des environnements d’apprentissage sûrs. 2. MÉTHODOLOGIE Cette étude est une étude qualitative phénoménologique. De nature phénoménologique, elle porte sur les expériences humaines et les aspects sous-jacents de cette expérience. En termes simples, Denscombe (2008) explique que l’étude porte sur la façon dont les gens 68

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interprètent les événements et donnent un sens à leurs expériences personnelles. L’aspect qualitatif indique que les chercheurs croient en la subjectivité humaine (HesseBiber, 2007), et leur intérêt à offrir aux participants une plate-forme pour s’exprimer sur les questions qui les touchent. Ceci s’explique par le fait que nous croyons que la connaissance est une construction sociale dans la mesure où les situations et les expériences varient. 2.1 Cadre théorique Un cadre féministe a guidé les enquêtes de cette étude. Le choix de ce cadre a été motivé par la croyance que la violence sexuelle est un exemple de la dynamique dans un domaine où s’exerce le contrôle masculin. La violence sexuelle est une forme d’abus de pouvoir intégré dans les schémas culturels patriarcaux et un reflet très net de la tradition qui régit les relations entre les hommes et les femmes dans la société (Sokoloff, Price & Flavin, 2004). Un cadre féministe nous donne la possibilité de mettre en lumière la position des femmes dans la société et d’envisager diverses stratégies d’émancipation qui pourraient s’appliquer à l’ensemble de la population (Paula & Sam, 2003). En regardant de plus près les objectifs de cette étude, on constate que notre intention était d’aller au-delà d’une simple description du phénomène étudié (violence sexuelle à l’égard des élèves ayant des besoins spécifiques) de façon à exposer et transformer les structures qui contraignent et exploitent le genre humain. Selon Seidman (2008), un tel effort est politique par nature, en ce sens qu’il est guidé par un programme pour émanciper les marginalisés (les élèves atteints de handicaps) en divulguant les lieux de conflit (processus et pratiques du milieu scolaire qui permettent que se produise la violence sexuelle) et les perspectives de transformation sociale. 2.2 Sites de recherche L’étude s’est déroulée dans six écoles spéciales dans la province de Gauteng. Cinq de ces écoles se trouvaient dans les townships noires. Seule une école était située dans une zone préalablement réservée aux personnes d’ascendance indienne. Il y avait deux écoles pour sourds, trois écoles pour les élèves handicapés mentaux, et une école pour les personnes souffrant de handicaps visuels, auditifs et physiques. Les écoles accueillant des élèves d’autres origines raciales que les noirs n’ont pas souhaité participer à cette étude, de même que les écoles accueillant spécifiquement des élèves souffrant de déficiciences visuelles. 2.3 Échantillonnage et description des participants Les participants ont été choisis grâce à la méthode d’échantillonnage basée sur des critères. Cela signifie que nous nous sommes uniquement basés sur ce qui avait été identifié par l’école et qui correspondait aux critères suivants : • Les élèves étaient âgés de 14 à 18 ans ; • les élèves étaient scolarisés en 10e, 11e et 12e année ; • les élèves étaient aveugles, sourds, physiquement handicapés ou atteints de légers handicaps mentaux ; • le responsable légal ou les parents ont donné l’autorisation de participer à cette étude.


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Nous avons encouragé les enseignants qui proposaient une éducation à la vie pratique en Afrique du Sud à participer à cette étude. Le programme national révisé de l’Afrique du Sud définit l’éducation à la vie pratique comme un domaine d’apprentissage axé sur l’évolution sociale, personnelle, intellectuelle, émotionnelle et physique des élèves, et sur l’interdépendance de ces divers éléments (MdE, 2000). Ces enseignants font partie des équipes de soutien en milieu scolaire qui gèrent les problèmes scolaires. Beaucoup sont qualifiés de conseillers non professionnels. Nous sommes particulièrement intéressés aux enseignants chargés de l’éducation à la vie pratique, car ils peuvent être ceux à qui seront rapportés des formes de violence sexuelle à l’école. Pour ce qui est des éducateurs, nous avons encouragé le personnel non universitaire à participer. Ainsi, l’échantillon d’éducateurs se composait de : la gouvernante, le responsable du foyer, le cuisinier, le personnel de ménage, l’infirmière scolaire, le jardinier et le personnel de sécurité. 2.4 Méthodes de collecte des données Nous avons effectué un total de 15 entretiens de groupe avec les élèves souffrant de déficicience visuelle (quatre groupes) ; des élèves handicapés mentaux (quatre groupes) ; des élèves souffrant de déficiciences auditives (quatre groupes) et des élèves handicapés physiques (deux groupes). Conformément à la méthode d’entretien en groupe (Marshall & Rossman, 1999), chaque groupe se composait de huit à 10 membres des deux sexes. Pour compléter les données recueillies auprès des élèves, nous avons inclus deux groupes d’enseignants et deux groupes d’éducateurs. Les entretiens en groupe permettaient une flexibilité de l’interrogatoire et d’aborder de questions jamais discutées lorsqu’elles se présentaient au cours de la discussion. Les participants répondaient à leur propre rythme et d’une façon qui leur était propre et teintée par leurs expériences diverses. Les discussions en groupe permettaient également d’approfondir des avis aussi bien similaires que différents chez les participants (Marshall & Rossman, 1999). Les participants pouvaient s’exprimer dans leur langue locale, mais la plupart d’entre eux préférait utiliser l’anglais et/ou un mélange d’anglais et de zoulou ou sotho. Tous les entretiens étaient enregistrés avec la permission des participants, de l’école, des parents et/ou des tuteurs légaux. Les élèves ayant des déficiences auditives nous ont donné l’autorisation écrite d’utiliser les services d’un interprète. Les entretiens de groupe duraient environ une heure. Bien qu’avec les entretiens de groupe il ne soit pas possible de garantir la confidentialité, la stratégie adoptée a permis en peu de temps, de recueillir des données auprès d’un nombre raisonnable de personnes. En outre, les entretiens n’étaient pas conflictuels et ceci facilitait la collecte de données sur un sujet qui pouvait être considéré comme sensible. 2.5 Analyse des données La collecte et l’analyse des données se faisaient simultanément de manière à éviter le problème de collecte de données diffuses. Nous analysions les

données sur le plan du contenu puis les données étaient codées manuellement en fonction des thèmes, catégories et sous catégories et nous établissions le lien entre les données pour raconter une histoire. La première étape de l’analyse des données consistait à écouter les enregistrements plusieurs fois, de manière à identifier ce qui ressortait ainsi que des thèmes éventuels qui étaient peaufinés au cours de la deuxième étape de l’analyse des données lorsque les données transcrites étaient disponibles. Le processus de transcription des données nous a permis de mieux comprendre le sens des données. Identifier des thèmes de recherche qualitative est une tâche importante (Ryan & Bernard, 2006), car les thèmes aident à répondre à la question de recherche et orientent l’organisation des données afin de réfléchir aux problèmes relatifs à ce phénomène. 2.6 Considérations éthiques La violence sexuelle est un sujet sensible. Outre les émotions négatives suscitées chez le chercheur et la personne interrogée, la discussion sur la violence sexuelle est entourée de silence et de stigmates (Lee & Renzetti, 1993). Comme ce sujet touche des expériences personnelles, l’enquêteur peut être mal compris et on peut croire qu’il est en quête d’informations compromettantes. Conscients de cela, nous avons pris les mesures suivantes pour travailler dans le respect de l’éthique de la recherche : • Avant d’essayer de nous rendre dans les écoles, nous avons obtenu auprès du ministère de l’éducation de l’Afrique du Sud, une autorisation de mener l’étude. • L’autorisation éthique nous a été délivrée par les comités concernés de l’Université d’Afrique du Sud (UNISA). • Nous avons identifié les écoles avec l’aide du ministère de l’éducation de l’Afrique du Sud. • Nous avons fourni des détails sur l’étude aux écoles, aux instances de gouvernance des écoles et aux enseignants, et nous les avons invités à nous communiquer leurs réactions sur la proposition et l’ensemble des questions de recherche que nous envisagions d’aborder avec les élèves. • Nous avons photocopié les propositions de recherche que nous avons mises à la disposition des écoles et nous nous sommes penchés sur toutes leurs préoccupations concernant l’étude. • Nous avons autorisé les écoles à nous aider à identifier d’éventuels élèves et à contacter leurs parents pour obtenir leur consentement ou participer à cette étude. • La participation à cette étude était volontaire et impliquait une explication détaillée de l’étude avec l’aide du personnel de l’école (travailleurs sociaux ou le coordinateur de l’équipe de soutien à l›école). • La participation n’était encouragée que lorsque l’on avait la preuve qu’un participant éventuel avait bien compris l’étude et qu’il/elle avait donné son consentement par écrit, confirmant qu’il/elle comprenait l’étude. • Un soutien psychologique à l’intention des participants était prévu. • Des explications détaillées étaient fournies sur Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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• • •

l’étude : les droits des participants, la gratuité de la participation, les avantages, le fait que la discussion pouvait engendrer des émotions négatives. Ces explications étaient répétées avant le début des entretiens, et réitérées tout au long de l’étude. Les participants savaient parfaitement qu’ils participeraient à une discussion de groupe. Les formulaires de consentement à l’intention des élèves aveugles étaient en braille et imprimés par le brailliste de l’université. Les participants, les écoles et les parents des élèves souffrant de déficience auditive nous ont donné la permission d’utiliser un interprète en langue des signes.

3. CONCLUSIONS PRINCIPALES Les conclusions révèlent l’existence de diverses formes de violence sexuelle dans les écoles pour élèves ayant des besoins spécifiques. La violence sexuelle touchait les élèves des deux sexes ; cependant, les filles étaient plus nombreuses à dénoncer cette violence. Par exemple, l’ensemble des participantes ont raconté avoir d’une façon ou d’une autre vécu la violence sexuelle, et/ou avoir été témoin de la violence sexuelle affligée à une amie ou à leurs camarades à l’école. Par contre, sur les 50 garçons qui ont reconnu l’existence d’une violence sexuelle, seuls cinq indiquaient en avoir été victimes (insultes), alors que deux indiquaient connaître des garçons plus jeunes qui en était victimes à l›école ; les autres revendiquaient avoir commis ou été témoins de victimisation. Les formes de violences sexuelles rapportées dans cette étude incluaient : (a) l’attouchement des parties génitales ; (b) baisers sexuels ; (c) des plaisanteries avec des photos pornographiques et des photos prises de sous-vêtements de filles ; (d) la sodomie ; (e)les insultes et (f) les rapports sexuels forcés ou le viol. Le Tableau 1.11 ci-dessous décrit les types de violences sexuelles que les élèves ont vécues ou dont ils ont été témoins. Les formes de violence sexuelle les plus courantes rapportées par les participants masculins étaient : la sodomie, les insultes et l’attouchement des parties génitales, alors que les filles parlaient plutôt d’attouchements des seins et des parties génitales, de baisers sexuels, de pornographie, d’insultes et de rapports sexuels forcés/viols. Tableau 1.11 Types de violence sexuelle rapportée (pas nécessairement vécue) par les élèves ayant des besoins spécifiques

Formes de violence sexuelle rapportée

Handicapés mentaux (42) Filles – 26 Garçons-16 Filles

Garçons

Filles

Garçons

Filles

Garçons

Filles

Garçons

Gestes inappropriés

26

4

21

0

20

4

17

0

Rapports sexuels forcés / viols (y compris la sodomie)

13

2

15

2

12

0

10

0

Sexe pour de l'argent

5

10

6

4

0

0

6

2

Photos pornographiques

20

15

14

8

0

0

0

0

Baisers à connotation sexuelle

14

4

8

0

30

0

15

4

Insultes

24

0

18

4

18

5

16

3

Nombre total de rapports

102

35

82

18

80

9

64

7

Sourds – N=33 Filles -21 Garçons -12

Complètement aveugles - N=35 Filles – 20 Garçons - 15

Handicapés physiques- N=24 Filles – 17 Garçons – 7

Alors qu’il était évident que ces formes de violence sexuelle se produisent dans les écoles pour les élèves atteints de handicaps mentaux, auditifs, physiques et visuels, il apparaissait également que certains comportements étaient coutumiers dans les écoles pour élèves ayant des besoins spécifiques. Par exemple, les élèves souffrant de déficience intellectuelle parlaient couramment de plaisanteries avec à la clef des photos pornographiques (35). Selon les enseignants, dans les écoles pour élèves atteints de déficience intellectuelle, les élèves garçons téléchargeaient des photos pornographiques sur Internet en utilisant leur téléphone mobile, se les échangeaient dans le foyer et les envoyaient aux filles pendant les cours. Certaines filles recevaient même des photos pornographiques pendant les pauses et à l’heure du déjeuner à la cantine. Martin, un élève de 17 ans souffrant de légère déficience mentale a raconté

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que les photos pornographiques étaient utilisées pour se moquer des filles : « Ces photos nous excitent et nous rendent populaires chez les filles. Les autres garçons verront aussi que je suis intelligent. » Kenny, un autre garçon de 17 ans souffrant du même handicap a déclaré : « Elles nous montrent différents styles sexuels et les filles vont nous adorer parce qu’elles verront que nous sommes de vrais hommes et que nous savons des choses. Nous forçons également nos petites amies à imiter ces photos. » Alors qu’il resortait clairement que les élèves considéraient que ces photos renforçaient leur ego d’hommes et les rendaient populaires parmi les filles et leurs camarades garçons, il en allait autrement des filles qui recevaient ces photos sur leur téléphone mobile. Près de 12 élèves filles (sept handicapées mentales ; trois souffrant de déficience auditive et deux présentant des handicaps physiques) ont déclaré qu’elles trouvaient ces images perturbantes. Paduba, (16 ans, fille), s’est plaint du fait que les images lui donnaient le sentiment d’être « rabaissée et nue » et qu’elle ne comprenait pas pourquoi les élèves s’enorgueillissaient de posséder ces images. Il est également apparu que les élèves utilisent leur téléphone mobile pour prendre des photos des sousvêtements des filles en cours. Ils se partagent ensuite ces photos entre eux à l’école et quelquefois mentent en prétendant avoir des relations avec ces filles. Meta (16 ans) a parlé de la honte et de l’humiliation des filles à l’école face à ce type de violation : « Tout le monde à l'école et dans les foyers saura qu'aujourd'hui vous portez des sous-vêtements rouges ou bleus, ou que vous portez un string. Ceci fait mal et vous vous sentez toute petite car vous avez honte de bouger et même d’aller à la cantine aux heures des repas. » Aniekie (15 ans) indique qu’en raison de ce comportement, elle ne prend plus le car pour aller à l’école. Elle préfère prendre un taxi et continuera à le faire jusqu’à ce que ses parents lui trouvent une autre école. Les élèves atteints de déficience visuelle et auditive ont parlé de cas de rapports sexuels forcés/violents (incluant la sodomie) (Voir le Tableau 1.11 ci-dessus). Deux élèves notamment ont indiqué que la sodomie est un problème qui frappe les plus jeunes élèves garçons dans les écoles primaires. Un jeune sourd de 13 ans, Magaga, a indiqué que « les garçons plus âgés suivent les jeunes dans les toilettes pour les sodomiser », un récit confirmé par Toremi (15 ans) qui affirme avoir entendu certains enseignants parler de l’incident en salle des professeurs. D’autres discussions avec deux élèves sourds (Mahlatse, 14 ans; Lulu, 13 ans) ont révélé que les plus jeunes peuvent être facilement menacés et amenés à répondre aux demandes sexuelles d’élèves plus âgés.

Concernant les rapports sexuels forcés, cinq garçons ont indiqué avoir eu des rapports sexuels avec leur petite amie sans son consentement. Apparemment, cela s’est produit lorsque leur petite amie a refusé d’avoir un rapport sexuel avec eux. À ce moment-là, les élèves ont obligé la fille à avoir des rapports sexuels car ils n’acceptaient pas le refus. Maisha (17 ans, sourd), a clairement indiqué cette tendance dans sa réponse : Le chercheur : « Peux-tu m’en dire plus sur les rapports sexuels forcés dont tu viens de parler. » Maisha: « J'ai forcé une fille. » Le chercheur : «Hhmm, tu aimerais m’en dire plus ? » Maisha: « J’ai dit que j’ai forcé une fille à le faire. » Le chercheur : « Je vois. Y avait-il une raison à cela? » Maisha: « Parce qu’elle n’acceptait pas ce que je lui demandais. » Le chercheur : « D’accord. » Maisha: « Elle n’était pas d’accord, et je l’ai donc forcé. » Il était intéressant de noter que Maisha ne considérait pas son comportement comme de la violence sexuelle car il croyait avoir le droit d’avoir des rapports sexuels avec son amie. Ce droit a été clairement exprimé lorsque les cinq autres élèves ont soutenu Lucky (18 ans, sourd) qui disait : « A-t-on jamais vu une fille refuser d’avoir un rapport sexuel avec son homme? Elle doit toujours être prête quand je le suis … c’est du bon sens (applaudissements). » Selon les sept élèves sourds, les cas de rapports sexuels forcés se produisaient dans les cars scolaires, sur le trajet de l’école, à l’aller ou au retour, car les cars étaient toujours bondés et l’enseignant supposé les surveiller ne pouvait se déplacer entre les sièges et voir ce qui se passait au fond du car. A ces moments-là, les garçons poussaient les filles vers le siège arrière et les violaient. Les cibles étaient surtout les meilleures élèves, les nouvelles et celles qui refusaient les avances sexuelles des garçons. Les récits des élèves montraient clairement que forcer les élèves à des rapports sexuels était un moyen d’affirmer leur virilité: Tatome (16 ans): « Nous leur donnons une leçon, parce que les filles ne sont pas supposées avoir de meilleurs notes que les hommes car elles vont commencer à nous manquer de respect et à se vanter comme si elles avaient tout. » Maila (17 ans): « Si elle refuse quand je veux qu’elle soit mon amie, je vais m’en occuper dans le car et demander à mes copains de m’aider. Nous ne devons pas permettre à ces filles de dire simplement non… non quand elles le veulent. Nous devons leur montrer que nous sommes des hommes. » Il est intéressant de constater qu’en dépit des abus sexuels dont ont souffert les filles, la plupart des élèves filles étaient réticentes à en informer les autorités scolaires. Shokana (16 ans, fille, sourde) explique : « la plupart de ces filles ont peur de parler car on se moquerait d’elles, et l’enseignant leur demanderait ce qu’elles faisaient à l’arrière du car. » Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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Les insultes, les attouchements et les baisers sexuels font partie des abus couramment rapportés par les élèves atteints de déficience visuelle. Presque toutes les filles atteintes de déficience visuelle ont raconté avoir été insultées et que cela les avait blessées, avoir fait l’objet de caresses inappropriées, et avoir été embrassées sans leur consentement. Les filles se faisaient insulter lorsqu’elles refusaient les avances sexuelles des garçons et/ou lorsqu’elles décidaient de mettre fin à une relation. Lerata (16 ans, aveugle) se souvient d’avoir été traitée de VaVa (grandes lèvres génitales) par son ex petit ami et ses amis lorsqu’elle a décidé de mettre fin à leur relation. Elle a dit : « cela m'a fait me sentir mal et depuis je ne veux plus avoir de relations à l' école. » Mahlatse (fille, aveugle) décrit le paradoxe auquel sont confrontées les filles en cas de relations avec des élèves garçons : « Vous ne savez pas exactement ce qu’ils veulent ; si vous avez une relation avec eux, ils disent à leurs amis que vous êtes une fille facile aux mœurs légères, et si vous refusez d’en avoir une ils disent que vous êtes moche et que vous sentez mauvais comme un cochon. Et… Vous ne savez plus simplement plus quoi faire. » Comme Lerata, Matheba, a également indiqué qu’elle s’était fait insulter. Elle nous a dit avoir été traitée de sekhebereshe (putain) car elle refusait d’avoir une relation avec un garçon de sa classe. Elle a indiqué que dès que le garçon a découvert qu’elle voyait un chauffeur de taxi : « Il a commencé à agir bizarrement avec moi, il a incité mes autres amis à s’éloigner de moi et m’insulter et me traiter de noms déplaisants. Quelquefois ils crachent par terre lorsque je suis dans les parages. » Pour ce qui est des baisers sexuels, des élèves totalement aveugles ont indiqué que cela se passait dans les couloirs lorsque les élèves changeaient de classe. Mahlodi a expliqué que les baisers « se produisent en un clin d’œil, le garçon introduit juste sa langue dans la bouche de la fille et le temps qu’elle se mette à crier ça c’était déjà produit et que vous ne pouviez plus rien faire. » Il est intéressant de noter ce que dit Mamello : « Les garçons s’en vantent comme s’ils avaient gagné au loto. Ces choses sont gênantes et nous n’aimons pas cela. Quelquefois je souhaiterais pouvoir quitter cette école et aller dans une autre école où on ne me connaît pas. » Lorsque nous avons essayé de comprendre les raisons d’un tel comportement, Randy (garçon, aveugle) a précisé que « ces filles aiment cela Madame. C’est la raison pour laquelle elles ne vont pas se plaindre au bureau et certaines même reviennent et en redemandent. » Mulalo (garçon, aveugle) se range à cet avis : « Ces filles prétendent ne pas aimer cela, ha ha…, elles adorent. Autre chose, si nous ne les

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embrassons pas ici à l’école, les vieux à l’extérieur les embrasseront parce qu’elles vont vers eux. Nous ne pouvons pas les laisser à ces vieux. Nous devons être les premiers à goûter à leur bouche parce qu’elles sont ici avec nous, elles nous appartiennent, elles n’appartiennent pas aux vieux. » L’attouchement des parties intimes était considéré comme la forme la plus fréquente de violences sexuelles. Certaines filles ont même dit qu’elles avaient fini par l’accepter. Maya (aveugle) décrit cela comme « notre pain quotidien qui se produit partout et même pire encore à la cantine, lorsque nous faisons la queue pour nous servir, ou dans les couloirs lorsque nous changeons de classe. » Elle a poursuivi en indiquant : « Les garçons aveugles font comme s'ils avaient besoin d'être guidés. Et en un rien de temps leurs mains se retrouvent sur vos fesses, puis sur vos seins et ensuite sur les parties les plus intimes de votre corps. Ils vont s’excuser mais devinez quoi, ils n’en pensent pas un mot. Ils le referont et diront même à leurs autres amis qu’une telle a de grosses fesses et de gros seins. Plus tard leurs amis essaieront de faire la même chose avec vous. » Alors que les enseignants ont confirmé l’existence de ces comportements, les éducateurs ont rejeté les plaintes des élèves. Une gouvernante dans une école pour aveugles, sourds et handicapés physiques a déclaré « qu'il n'existe pas de violences sexuelles ici, ces enfants aiment beaucoup trop le sexe et le pratiquent partout, dans les toilettes, derrière les bâtiments et dans tous les endroits. » Une autre gouvernante s’est ralliée à ces propos et a déclaré « les élèves aveugles le font à tout moment. » Elle a ensuite insisté sur le fait que « à tout moment peut être à l’heure du thé, parce qu’ils ne voient pas qu’on les voit. » Un responsable de foyer a également dit « avec les élèves sourds vous n’entendez que des bruits … les gémissements ou les grognements. Hé, ces enfants sont différents des enfants normaux. » Il a ensuite déclaré qu’ils vont même jusqu’à casser les fenêtres et avoir des relations sexuelles à travers les portes anti-effraction ou les fenêtres. Les points de vue différents des éducateurs pourraient suggérer une compréhension limitée des handicaps et du développement sexuel des élèves. Ceci renforce le point de vue de l’Unicef (2005) qui considère que le personnel des institutions pour personnes handicapées est mal formé. 3.1 Auteurs de violences sexuelles Les élèves garçons perpétraient toutes les formes de violences sexuelles rapportées par les filles. Des filles ont été accusées de commettre des violences sexuelles dans des cas impliquant cinq élèves garçons dont trois souffrant de déficience visuelle et deux atteints de handicaps physiques. Ce comportement a été confirmé par quatre élèves filles qui ont confessé avoir touché les parties intimes des garçons et les avoir insultés pour se venger. Une des filles, Sarubini (18 ans, souffrant de déficience visuelle) a affirmé :


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« Ha, ha (rires) madame, oui nous les touchons (elle hoche la tête). Oui nous voulons tâter leur virilité. Ces garçons parlent beaucoup trop ; donc s'ils m'embêtent dans les couloirs, je vais cibler cette partie importante de leur corps pour vérifier combien de centimètres « il » fait. S’il est petit, chaque fois que je le rencontrerai ou entendrai sa voix je dirais : Hé, Sipho, tu ne fais que 3 cm ; et je le ferai en présence d’autres personnes… Pour lui donner une leçon. » “ Malawi, nous a indiqué qu’elle ne ciblait que ceux qui l’embêtaient et a dit : « je l'attrape par la taille et me saisis de sa « virilité ». » Les filles ont également déclaré cibler des élèves physiquement handicapés et sans problème de vision, notamment ceux qui sont en fauteuil roulant. Mantwa a déclaré : « Nous sentons qu'ils arrivent dans notre direction parce qu'en général ils se déplacent à notre droite. Nous étendons alors nos bras vers l’avant comme si nous voulions qu’ils nous montrent une direction et nous touchons directement leurs parties intimes. » .” Letsoba qui a déclaré qu’elle aimait toucher le postérieur des élèves garçons aveugles a indiqué que « ça ne me gêne pas d'y mettre la main parce que s’ils en ont l’occasion, ils me font la même chose ; c’est un prêté pour un rendu. » Dans la suite des discussions avec ces quatre filles, il est apparu clairement qu’en touchant les parties intimes des garçons, leur intention n’était pas de les offenser mais de les rabaisser et de sentir la taille de leurs « choses ». Le personnel scolaire a été désigné comme auteur de violences sexuelles dans une affaire impliquant Mahlako, une jeune élève sourde âgée de 14 ans, qui par la suite a déclaré « il semblerait que le professeur n’avait aucune intention de toucher mes seins parce qu’il s’est excusé immédiatement, mais je n’ai pas apprécié. » Dans d’autres cas, deux élèves filles souffrant de déficience visuelle ont indiqué avoir eu des relations avec des enseignants beaucoup plus âgés qu’elles, mais n’ont pas considéré cela comme abusif car il n’y avait pas eu usage de la force. Maisie (17 ans), une des filles, a confessé qu’elle avait une relation avec son professeur d’orthophonie pour réussir cette matière, et que par la suite elle avait commencé à profiter financièrement de cette relation : « Vous donnez et je donne. Mon professeur d’orthophonie vous voyez … C’est que je suis la moins bonne dans la classe ; j’ai toujours de mauvais résultats j’ai toujours deux et un, il le voit et sent ma situation difficile. Il m’a demandé si je voulais réussir le cours, et j’étais désespérée n’est-ce pas ? J’ai alors répondu « oui Monsieur, je veux réussir. » Bon, il m’a demandé de le retrouver dans son bureau à 14 heures après l’école pour en parler … Et il est le sous-directeur et j’ai commencé à flirter avec lui. Il m’a également dit que je suis belle. Je ne suis pas supposée rater cette matière voyez-vous ? Comme j’étais désespérée, j’ai profité de l’occasion pour obtenir son soutien et de l’argent et d’autres choses, et nous avons commencé à sortir ensemble. »

De même, Lesego (aveugle) dit avoir profité financièrement de ses rencontres avec un papa gâteau : « La personne plus âgée paye mes frais de scolarité, sinon je me retrouverai en dernière année à devoir 10 000 R, ce qui fait qu'il me sera difficile d'obtenir mon certificat de fin du secondaire. Donc je préfère demander à mon protecteur de payer mes frais de scolarité et je lui donne ce qu’il veut. » 3.2 Pratiques et processus encourageant la violence sexuelle dans les écoles Dans le cadre de notre tentative d’identifier les processus et les pratiques contribuant à la violence dans les écoles où nous avons effectué notre étude, les participants à la recherche nous ont fait part de ce qui suit : 3.2.1 Surveillance limitée des adultes autour de l’enceinte scolaire et dans les cars Au total, 30 élèves étaient d’avis que la surveillance limitée des adultes autour de l’enceinte de l’école et des lieux rattachés à l’école, contribue à la violence sexuelle dans les écoles. Comme l’indiquait la section précédente, les cars scolaires bondés font qu’il est difficile pour les adultes/les enseignants chargés de la surveillance de voir les comportements inappropriés dans les sièges du fond. De plus, cette situation fait qu’il est difficile pour les enseignants de se déplacer entre les sièges. Une jeune fille de 16 ans, handicapée physique, a expliqué cela : « Les filles qui n'arrivent pas à trouver un siège sont repoussées vers l’arrière du car et avant qu’elles n’aient eu le temps de comprendre, ils sont tous sur leurs vêtements, et en un rien de temps leur jupe est relevée et les mains des garçons sont là où elles ne devraient pas être. » Près de 17 élèves ont parlé de la tendance à entrer dans les dortoirs de filles à travers les fenêtres cassées alors que d’autres trouvent le moyen de s’introduire dans les chambres les filles lorsque les gouvernantes sont occupées au nettoyage de la cantine. D’après 13 élèves garçons (sept sourds, quatre souffrant de déficicience visuelle et trois handicapés physiques), ces incidents sont courants pendant les week-ends, et les élèves sourdes et aveugles en sont les cibles. L’idée de tels comportements était d’avoir des rapports forcés avec les filles. Martha (sourde) nous a dit que « ces garçons savent que même si nous crions, personne ne nous entendra », et comme l’a indiqué Rachel (aveugle) « nous ne pouvons même pas les voir, nous entendons juste qu’ils nous touchent. C’est la raison pour laquelle nous gardons dans nos chambres des sjamboks (bâtons), pour leur donner la leçon de leur vie. » En attendant, dans l’école pour handicapés mentaux, les élèves plus âgés suivaient les plus jeunes dans les toilettes notamment pendant les heures de cours, parce qu’ils savaient que les enseignants étaient occupés à enseigner. Cette tendance a été confirmée par un enseignant qui a déclaré qu’il n’autorisait plus les garçons plus âgés à aller aux toilettes pendant les heures de

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cours. 10 enseignants et 16 éducateurs considéraient que le problème vient de la politique de redéploiement du gouvernement responsable de la réduction du personnel non enseignant/d’encadrement qui a pour tâche essentielle de surveiller les installations scolaires et de faire le nettoyage. Actuellement, les gouvernantes doivent soigner les élèves, faire la cuisine et nettoyer, autant de responsabilités qui leur laissent peu de temps pour suivre les élèves dans l’enceinte de l’école et leur apporter de l’aide lorsqu’ils en ont besoin. 3.2.2 Compréhension limitée de la violence sexuelle Les élèves n’avaient aucune connaissance sur le comportement qualifié de violence sexuelle. De ce fait, il leur était difficile de reconnaître ces comportements lorsqu’ils se produisaient, ce qui explique qu’ils ne les aient pas dénoncés aux autorités scolaires. Ceci est apparu clairement au cours des entretiens dans trois écoles, où les élèves nous ont demandé de préciser ce qu’est un comportement considéré comme sexuellement violent. Mosa (garçon âgé de 15 ans, sourd) a déclaré : « Si j’avais su que toucher les seins des filles était de la violence sexuelle, j’aurais arrêté il y a longtemps. J’ai toujours cru que c’était un simple jeu et qu’il n’y avait même pas lieu pour les filles d’en faire toute une histoire. » 3.2.3 Absence de règles scolaires Parmi toutes les écoles que nous avons visitées, seule une avait des règles sur le harcèlement sexuel et les sévices sexuels. Dans l’énoncé de sa mission, l’école a une phrase qui dit « la sécurité de nos enfants est la première de nos priorités. » En outre, les élèves nous ont dit que les enseignants insistent sur les questions de sécurité pendant les cours d’éducation à la vie pratique. Contrairement aux autres écoles, les élèves ont indiqué que les cours d’éducation à la vie pratique portaient uniquement sur les questions du VIH, de la grossesse des adolescentes et des problèmes de drogue et ne couvraient pas les questions et les informations sur la violence sexuelle et ce qu’il faut faire si on en est victime. 3.2.4 Gestion des cas rapportés Alors qu’il est apparu que les écoles s’occupent rapidement d’incidents de viols rapportés, il est également apparu que si l’auteur allégué est un membre du personnel de l’école, ce rapport « part aux oubliettes » car les autorités l’ignorent ou couvrent l’incident. Les incidents concernant les attouchements des parties intimes, les baisers et la pornographie sont ignorés car considérées comme moins sérieux et sans preuve. Certains élèves atteints de déficience visuelle ont indiqué que lorsqu’ils rapportent un cas de violence sexuelle, les enseignants les accusent de raconter des histoires dans l’intention de nuire à la réputation de l’école. Par exemple, un élève handicapé physique (cloué sur un fauteuil roulant), a noté que : « Les enseignants nous punissent et nous disent que nous cherchons à attirer l’attention, que nous faisons une montagne de pas grand-chose. Et ils nous ont demandé d’être prudents et de ne 74

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pas traîner le nom de l’école dans la boue. C’est pourquoi nous devons simplement nous taire si cela se produit. » Il était également intéressant de noter que dans certains cas, les enseignants disaient aux filles que ce comportement est normal et fait partie du développement et que les garçons finiront par abandonner ces comportements. 3.2.5 Pression des camarades Au total, 22 élèves garçons représentant presque toutes les quatre catégories de besoins spécifiques ont noté qu’ils ne pouvaient résister à la pression les incitant à avoir des relations sexuelles avec leurs camarades à l'école. Parmi eux, 12 ont indiqué qu’ils ont fini par répandre des mensonges sur des relations qu’ils auraient eues avec des filles à l'école, et huit ont indiqué qu’ils se sont mis en colère lorsque les filles ont refusé d'avoir un rapport sexuel avec eux et les ont de ce fait traitées de noms déplaisants. Oupa, un des élèves sourds a dit : « Si je vois une fille qui a refusé d’être ma petite amie marcher avec quelqu’un dans la communauté, ça me rend fou. Je raconterai même des mensonges, comme dire qu'elle se jette dans les bras des hommes pour de l'argent ou qu’elle se déshabille dans un club… Juste pour la blesser. » Bien que la discussion préalable ait été axée sur les facteurs en rapport avec l’école, les élèves et les enseignants ont indiqué d’autres facteurs se produisant dans d’autres systèmes dans lesquels il existe une interaction dynamique entre l’enfant et l’école. Pour bien délimiter ce terme, ce document se contentera de les citer (ils seront développés dans le rapport final qui sera présenté en novembre). Le comportement est identifié comme s’inscrivant dans les grandes catégories suivantes : les facteurs (a) personnels, (b) en rapport avec la famille, et (c) en rapport avec la communauté. 4. SUGGESTIONS POUR REMÉDIER AUX DÉGÂTS GÉNÉRÉS PAR LA VIOLENCE SEXUELLE ET PROMOUVOIR LA SÉCURITÉ DANS LES ÉCOLES 4.1 Politiques claires sur la violence sexuelle et les procédures de rapports Les élèves ont indiqué que les écoles devraient avoir des politiques claires sur la violence sexuelle et les procédures de rapports. Ils considéraient également que ces politiques et procédures devaient être clairement expliquées aux parents et aux élèves éventuels avant leur admission dans l’école. Selon Mogau, « les politiques sur la violence sexuelle devraient être explicites sur le formulaire d’inscription qui devrait être signé par l’élève et par ses parents. » Valérie a ajouté que « la punition pour tous les types de violence, même un baiser, devrait être indiquée clairement sur le formulaire car toutes les formes de comportement sexuellement violent nous frappent durement. » Les élèves pensaient que de telles politiques leur donneraient la confiance nécessaire pour se confier aux écoles et aux autorités concernées lorsque l’école rejette leurs rapports.


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4.2 Un personnel scolaire bien formé Dans cette étude, les élèves percevaient le personnel scolaire comme n’ayant pas les connaissances et la compréhension de leurs besoins spécifiques. Ils se plaignaient du fait que certains membres du personnel scolaire sont intolérants et n’ont pas les capacités nécessaires pour communiquer avec eux. Selon Tsholo (sourd) : « Nous sommes otages de la situation ; notre gouvernante ne peut pas signer, certains enseignants ne peuvent pas signer, l’assistante sociale ne peut pas signer, et il est alors difficile de faire un rapport à d’autres hommes (enseignants), notamment si celui qui peut signer vous rejette. Donc Madame, je considère que chacun ici devrait apprendre à signer. » Mahlodi, un élève handicapé mental s’est plaint du fait que les enseignants font des remarques stupides qui montrent qu’ils ne les comprennent pas : « Ils disent que nous somment fous et que nous aimons trop le sexe. Lorsque que nous leur parlons, ils pensent que nous inventons des choses et que nous ne savons pas de quoi nous parlons. Comment peut-on parler à quelqu’un comme cela ? Le gouvernement devrait les renvoyer à l’école pour leur apprendre à nous comprendre. » 4.3 Renforcer la sécurité autour de l’enceinte des écoles Les élèves comme les enseignants partageaient le sentiment que la sécurité autour des écoles et dans les espaces rattachés à l’école devrait être renforcée. Maloro, un élève handicapé physique, a suggéré : « il devrait y avoir au moins trois ou quatre vigiles patrouillant sur le campus. » De même, un des enseignants a dit : « nous devrions tous être vigilants et avoir davantage de personnel pour surveiller les quatre coins de l’école, les toilettes, et les enseignants ne devraient pas laisser ces enfants sans surveillance. » Seno, (un élève sourd) proposait : « Deux enseignants supplémentaires devraient monter avec nous dans le car ce qui permettrait d’en avoir un assis au milieu, un à l’arrière et un autre devant. » 4.4 Politiques strictes sur l’usage des téléphones portables Les enseignants ont suggéré que les téléphones portables ne soient pas autorisés à l’école car les élèves les utilisent pour enregistrer et recevoir des photos pornographiques dans l’enceinte de l’école. Un autre enseignant a indiqué que les élèves s’envoient des messages pour se retrouver aux toilettes. Cependant, les élèves atteints de déficience visuelle et handicapés mentaux ont suggéré que les téléphones portables soient éteints pendant les cours, alors que ceux qui souffrent de handicaps physiques et de déficience auditive ont suggéré que les téléphones portables sophistiqués et modernes ne soient pas autorisés à l›école car il est plus facile de télécharger

des photos pornographiques, de passer des vidéos et de prendre des photos avec ces téléphones. 4.5 Education à la sexualité appropriée Les élèves sont d’avis que les programmes d’éducation à la vie pratique devraient intégrer l’éducation à la sexualité pour couvrir des questions concernant le sexe et la violence sexuelle. Actuellement, l’accent est davantage mis sur le VIH et selon Maloro, « nous devons avoir des connaissances sur la violence sexuelle, nos droits en tant qu’enfants et des éléments qui nous sensibilisent aux comportements qui blessent d’autres personnes. » Maria a également noté qu’elle était fatiguée d’entendre parler de sujets tels que la grossesse des adolescentes et la consommation de drogue. Elle a besoin «… de choses réelles et nous avons besoin d’entendre d’autres professionnels, parce que nos enseignants ont peur d’aborder certaines questions car eux-mêmes veulent coucher avec nous. » 4.6 Écoles séparées pour les élèves plus jeunes et les élèves plus âgés En guise de stratégie pour protéger les élèves plus jeunes et leur éviter d’apprendre un comportement inapproprié auprès d’élèves plus âgés, et leur éviter d’être leur victime, une dizaine d’élèves ont suggéré que les élèves du primaire et du secondaire ne fréquentent pas les mêmes écoles. Ils considéraient que les jeunes élèves apprennent les comportements de violence sexuelle auprès des plus âgés. Manoko, un élève physiquement handicapé a déclaré : « quand ils voient les élèves plus âgés nous faire des choses bizarres, ils font exactement la même chose parce qu’ils pensent que c’est normal. Nous devons donc avoir des écoles séparées. » Selon Modipadi, « les jeunes ne devraient pas être ici avec nous, parce qu’ils sont pris pour cibles par les garçons plus âgés. » 5. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS La violence sexuelle existe dans les écoles pour élèves handicapés. Conformément à d’autres études sudafricaines menées dans des cadres éducatifs accueillant des élèves n’étant pas handicapés (Human Rights Watch, 2001; Jewkes, Levine, Mbananga & Bradshaw, 2002; Haffejee, 2006; la Commission sud-africaine des droits de l’homme, 2006), les élèves filles sont fréquemment victimisées. Les jeunes élèves garçons sont également victimes de violences sexuelles. Dans cette étude les élèves garçons sont décrits comme étant les auteurs d’actes sexuellement violents contre les filles et les jeunes garçons. Il y a eu des cas où les filles déclaraient avoir agi de manière sexuellement violente envers leurs camarades masculins. Néanmoins, un examen plus approfondi révèle que l›objectif était de se venger des sévices qu’elles-mêmes et/ou leurs camarades auraient subis de la part de ces garçons. Évidemment, les filles ont pris les choses en main parce que les autorités de l’école n’ont rien fait lorsqu’elles leur ont fait part de la violence sexuelle, en partie à cause de l’absence de règles et de politique claires sur la violence sexuelle. Comme l’indiquait Kvam (2000), dans une telle situation

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le personnel de l’école ne sait souvent pas exactement quelle action entreprendre, et ceci n’aide pas à mettre un terme à la violence. L’absence de protection en milieu scolaire peut faire naître un sentiment d’impuissance chez les élèves filles. La violence sexuelle persistera et finira par être acceptée comme normale. Les élèves filles handicapées continueront à supporter les besoins de leurs camarades masculins à affirmer leur pouvoir. Une telle situation pourrait les marginaliser davantage encore, la plupart de leurs institutions étant souvent isolées de la communauté en raison d’une politique très restrictive (Unicef, 2005), leur refusant ainsi la possibilité de rencontrer des personnes (autres que le personnel de l’école) qui pourraient les aider ou intervenir dans leur situation. La conclusion qui établit que les salles de classe vides, les couloirs, les cantines, les dortoirs et les cars scolaires sont des endroits idéals pour la violence sexuelle va dans le sens de l’Unicef (2005) qui indique que les élèves filles atteintes de handicaps subissent la violence sexuelle dans l’enceinte scolaire et autour, ainsi que dans tous les lieux qui y sont rattachés. Évidemment, la situation pourrait être due à une surveillance limitée des adultes s’expliquant par le nombre insuffisant de personnels et le personnel non qualifié dans les institutions éducatives pour élèves handicapés. Comme l’ont révélé certains participants à cette étude, le déploiement et le redéploiement des enseignants et des éducateurs dans certaines écoles a abouti à la réduction du nombre d’éducateurs, laissant les écoles avec uniquement quelques personnes qui doivent non seulement s’occuper des élèves, mais nettoyer les dortoirs et faire la cuisine pour les élèves. Une telle situation leur laisse peu ou pas de temps pour surveiller l’enceinte de l’école et assurer la sécurité des élèves. De même, les enseignants recrutés n’ont pas les qualifications et l’expérience pertinente pour travailler avec des élèves souffrant de handicaps ; d’où la revendication des élèves qui considèrent que certains membres du personnel ne les comprennent pas. Malheureusement, en Afrique du Sud, la violence sexuelle chez les élèves atteints de handicap continuera à être un problème en raison de la rareté des institutions éducatives pour handicapés dans la plupart des communautés qui fait qu’ils doivent passer une bonne partie de leur temps dans des institutions et foyers, et/ ou parcourir de longues distances pour aller à l’école et en revenir. Alors qu’il est évident que la violence sexuelle s’est appliquée sous diverses formes, il est frappant de voir à quel point certaines formes de comportement sont courantes chez les élèves ayant des handicaps particuliers. La pornographie est souvent citée chez les élèves handicapés mentaux, un élément qui va dans le sens de l’étude récemment menée par Nyokangi (2012) dans deux écoles spéciales pour des élèves de cette catégorie dans les banlieues de Johannesburg. Les facteurs sous-jacents étant le désir des garçons de satisfaire leur ego et d’être acceptés par leurs camarades. En tant que groupe le plus marginalisé de la communauté, la nécessité d’être accepté par ses camarades prend une 76

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importance très grande chez les garçons handicapés mentaux (Henderson & Bryan, 1984). De ce fait, le recours à des mesures extrêmes comme l’utilisation de photos pornographiques et le fait de photographier les sous-vêtements des filles sont une stratégie pour affirmer leur virilité. Les relations sexuelles forcées auxquelles ont couramment recours les garçons sourds sont liées à leurs informations limitées concernant les comportements qui caractérisent la violence sexuelle et les conséquences négatives de leurs actes. Il a été indiqué que l’éducation à la sexualité dans leurs écoles ne couvre pas les questions de la violence. Anderson (2012) en personne a également noté que de manière générale, ils n’avaient pas accès aux médias et aux programmes de sensibilisation qui pourraient les sensibiliser à toutes les questions entourant la violence. Cependant, leur tendance à prendre pour cible des filles qui auraient rejeté leurs avances sexuelles ou qui mettent fin à leur relation avec eux suggère que les garçons ne peuvent accepter un « non » comme réponse. Vogelman et Lewis (1993) considèrent que ceci est un signe de pouvoir, c’est-à-dire la capacité d’imposer leur volonté sans le consentement des autres, notamment de leurs camarades filles. Alors qu’il est de notoriété publique que dans la plupart des cas, le rejet crée des expériences émotionnellement et mentalement douloureuses, il est également clair que l›éducation à la sexualité devrait aborder les questions de violence sexuelle et la manière pour les victimes d’y répondre. De même, la fréquence des insultes et des baisers sexuels forcés chez les élèves souffrant de déficience visuelle est un outil pour faire face au rejet. Il a pour intention de faire du mal, d’abaisser et de forcer une personne à se soumettre aux demandes sexuelles de l’auteur de ces actes. Le comportement des garçons envers les élèves filles est le reflet parfait d’un acte de pouvoir motivé par leur intérêt à contrôler et dominer ceux qu’ils perçoivent comme moins puissants, et qui sont des cibles leur permettant d’affirmer leur virilité. Le patriarcat dans la société est à l’origine de la violence en milieu scolaire, car c’est un système social qui définit des différences structurelles dans les privilèges, le pouvoir, la position et l’autorité des hommes. Selon Vogelman et Lewis (1993), les hommes ont été éduqués à définir leur pouvoir en termes de capacité à imposer leur volonté sans le consentement des personnes concernées, notamment des femmes. La conséquence en est que la sexualité féminine est largement entre les mains des hommes qui décident et déterminent comment et quand se produisent les rapports sexuels avec les femmes (Ruto, 2009). Ceci dévalue les femmes soumises à leur subordination, un problème qui s’étend jusque dans l’enceinte de l’école (Goldscheid, 2006). Comme la violence a joué un rôle important dans la résolution des problèmes et des frustrations dans la plupart des communautés sud-africaines et qu’elle continue à être la méthode couramment utilisée pour résoudre des conflits et réaliser certains objectifs dans la famille, dans les relations sexuelles, dans les écoles et dans les groupes de copains (Vogelman & Lewis, 1993),


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il faudrait mettre en place une mesure pour s’attaquer au problème dans les écoles pour élèves handicapés. Ceci pour assurer la protection des élèves filles et s’assurer que leur accès à l’éducation n’est pas limité par ce fait. Les suggestions suivantes ont été avancées : 1. Il est apparu dans cette étude que le personnel scolaire n’a pas la compréhension nécessaire du handicap, ni les connaissances des limites de ces enfants, ni les capacités de communiquer avec ces enfants. Il n’a aucune compréhension de la violence sexuelle et de ses implications. Une telle situation met les écoles spéciales au défi d’envisager de recruter du personnel doté des compétences appropriées, des connaissances et ayant l’attitude nécessaire pour travailler dans les écoles pour élèves handicapés. Il faudrait également prévoir un soutien continu sous forme de programmes de développement du personnel pour lui permettre de se tenir au courant des dernières évolutions et informations. Ces programmes devraient être axés sur l’amélioration de l’environnement scolaire pour les filles. Une partie de ces formations devrait amener le personnel à prendre conscience de ses droits juridiquement reconnus en matière de protection de l’enfant dans le cadre des mandats de la Constitution de la République d›Afrique du Sud. 2. Il faudrait mettre en place des systèmes permettant aux enseignants et au personnel non enseignant d’assurer une surveillance étroite. Selon Allan (2009), identifier les points chauds dans les écoles et accroître le nombre de personnes affectées à la surveillance dans ces points pourrait permettre de réduire le nombre d’incidents de violence sexuelle. C’est une responsabilité qui incomberait aussi bien au personnel masculin que féminin. Il faudrait renforcer la surveillance pendant les pauses déjeuner et chaque fois que les élèves sont à l’extérieur des salles de classe. Les jeunes élèves devraient être accompagnés aux toilettes

à tout moment pour les protéger des élèves pus âgés. Parallèlement à cette stratégie, il faudrait également des règles et des politiques claires sur la violence sexuelle. Ces politiques devraient être clairement expliquées à tous les élèves, les parents et au personnel de l’école. Elles devraient indiquer les procédures qui permettent de les dénoncer et les actions à mettre en place lorsque de tels comportements sont suspectés ou rapportés. Elles devraient également englober les soins et le soutien aux élèves victimisés et les assurer de leur sécurité après avoir dénoncé les faits. Ceci permettra aux élèves de dépasser la peur de représailles par les auteurs (Harber, 2004). 3. Les élèves handicapés ont besoin d’une éducation à la sexualité en rapport avec leur niveau de développement. Une telle éducation pourrait encourager une sexualité positive, les doter de capacités à prendre des décisions et amener les élèves à agir face à des décisions de pression inappropriée de la part de leurs camarades et face à des questions qui relèvent des droits de l’homme (Swango-Wilson, 2011). Dans le même esprit, Hassall et Hanna (2007) ont suggéré d’envisager des jeux de rôle portant sur la santé de la reproduction, les relations entre les personnes, l’affection, l’intimité, l’image du corps et le genre. Certains problèmes pourraient être abordés dans le cadre d›un auditoire unisexe pour permettre des discussions sur des questions difficiles comme par exemple les stéréotypes sur le genre et les rapports sexuels forcés (Brecklin & Forde, 2001). Les programmes à l’intention des garçons seuls pourraient aider à s’attaquer aux pressions de la société et de leurs camarades qui encouragent un comportement abusif et véhiculent des stéréotypes sur les femmes et les hommes (Adair, 2006). Ainsi, les élèves garçons développeront des attitudes positives envers les femmes et les filles tandis que les filles se verront offrir une opportunité de voir se dessiner une ouverture en matière de violence sexuelle.

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renforcer les liens entre l’éducation et le monde du travail


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Le marché du travail : renforcer les liens entre l’éducation et le monde du travail Les quatre études de cette section se penchent sur la transition vers le marché du travail et le rôle joué par l’éducation et le genre dans le niveau de réussite professionnelle atteint par les jeunes femmes. En ce qui concerne la transition vers la vie professionnelle, au Sénégal, 60 pour cent des femmes de l’étude du ROCARE ont trouvé un emploi à l’issue de leur formation, contre 40 pour cent des hommes. Cependant, bien que les femmes trouvent plus souvent un emploi avec un contrat à durée indéterminée que les hommes, les études qu’elles ont suivies ne leur permettent pas toujours d’atteindre le même niveau professionnel que les hommes dans les mêmes disciplines. L’étude de REPOA en Tanzanie a constaté que la probabilité de trouver un emploi ou d’être au chômage est pratiquement la même pour tous les diplômés, hommes et femmes confondus. Cependant, les hommes sont généralement plus dynamiques dans leur recherche d’emploi et un certain nombre d’attitudes et de pratiques discriminatoires ayant un impact sur la transition des étudiantes vers le marché du travail ont été relevées.

En ce qui concerne le monde du travail, en Côte d’Ivoire, bien que les femmes analphabètes ainsi que les femmes instruites travaillent et gagnent des revenus, elles ne représentent que 30 pour cent des employés du secteur formel, qu’il s’agisse du secteur privé ou du secteur public. Le secteur informel est donc le principal employeur des femmes. C’est également le cas au Zimbabwe où l’étude demande aux autorités de sensibiliser les femmes du secteur informel sur les soutiens disponibles pour monter leur affaire et développer leurs compétences, ceci en raison du rôle joué par ce secteur pour soutenir l’éducation des filles. Toutefois, l’étude signale aussi les risques auxquels est exposée l’éducation des filles, car les mères qui travaillent dans le secteur informel ont tendance à déléguer les responsabilités de la maison à leurs filles, entravant leur participation à l’école. Invariablement, ces études réclament des initiatives de sensibilisation sur la transition vers l’activité professionnelle, l’orientation, et les structures de soutien pour la recherche d’emploi et la création d’entreprises et les mesures anti-discriminatoires à appliquer à la fois dans les établissements d’enseignement et sur le marché du travail.

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Centre ivoirien de recherches économiques et sociales (CIRES)

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Un niveau d’éducation faible contribue à faire baisser la probabilité pour les femmes de participer au marché du travail, ce qui conduit à une baisse du revenu agrégé du ménage et par conséquent à l’accroissement du niveau de pauvreté au sein du ménage.

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Education et insertion des femmes sur le marché du travail à Abidjan

RÉSUMÉ Cette étude porte sur l’insertion des femmes sur le marché du travail en Côte d’Ivoire, et plus précisément dans la ville d’Abidjan, avec un accent particulier sur le rôle de l’éducation. En s’appuyant sur des données secondaires provenant de l’Institut national de la statistique (ENV, 2008) et des données d’enquête collectées sur le terrain, l’analyse empirique utilise une méthodologie à la fois quantitative et qualitative. L’étude révèle un fort taux d’analphabétisme parmi les femmes. De plus, elle montre que plus de la moitié des femmes à Abidjan ne sont pas insérées sur le marché du travail et que celles qui sont insérées exercent pour la plupart dans le secteur informel. Les analyses économétriques et sociologiques établissent un lien étroit entre le niveau d’éducation des femmes et leur insertion sur le marché du travail et montrent que le fait d’avoir un niveau d’éducation supérieur accroit la probabilité pour une femme d’exercer un emploi dans le secteur privé. Pour les femmes ayant un niveau d’éducation faible, le secteur informel constitue la principale opportunité d’insertion. En outre, les facteurs idéologiques concernant la place et le rôle de la femme dans la société ainsi que les politiques étatiques influencent fortement l’orientation sectorielle de la femme sur le marché de l’emploi. D’autres facteurs significatifs dans l’insertion de la femme sur le marché du travail relevés par cette étude sont l’utilisation du sexe comme atout de séduction pour la recherche d’emploi ou comme objet de chantage pour l’octroi de l’emploi et le recours au réseau social ou réseau de connaissances. Finalement, la pertinence de l’éducation pour l’émancipation socioéconomique de la femme est discutée. Les résultats montrent que l’amélioration du statut socioéconomique des femmes passe nécessairement par l’éducation qui assure le renforcement de la capacité et du pouvoir de décision des femmes, objectif qui ne peut être réalisé que si on assure aux filles et aux garçons les mêmes conditions d’éducation.


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1. INTRODUCTION 1.1 Contexte et justification Dans toutes les sociétés modernes, l’éducation est au centre du processus de développement économique et social. Le droit à l’éducation est unique et nécessaire puisqu’il donne aux individus les moyens d’exercer tous leurs autres droits (civiques, politiques, économiques, sociaux ou culturels) et ce, en leur donnant la possibilité d’avoir une vie digne, tout en assurant à tous un avenir meilleur (UNESCO, 2004). Toutefois, il apparait que face à l’éducation, les hommes et les femmes ne sont pas égaux : à titre d’exemple, en 2008, le taux d’alphabétisme des adultes (15 ans et plus) en Afrique subsaharienne était de 71,2% pour les hommes et seulement 53,3% pour les femmes (ISU, 2008). Cette disparité de genre vis-à-vis de l’accès à l’éducation peut être le résultat de divers facteurs tels que les coutumes et pratiques traditionnelles (qui font que les parents sont plus enclins à favoriser l’éducation des garçons que des filles), le niveau socioéconomique des parents et divers obstacles que peuvent rencontrer les petites filles à l’école (agressions sexuelles, violences, grossesses précoces, etc.). Les répercussions du faible niveau d’éducation des femmes sont multiples : tout d’abord, cela autoentretient le clivage déjà préexistant entre les hommes et les femmes. Ensuite, cela limite le niveau de participation des femmes à la vie politique et pourrait inexorablement conduire à une augmentation notable de l’indice de la pauvreté. En effet, un niveau d’éducation faible contribue à faire baisser la probabilité pour une femme de participer au marché du travail, ce qui conduit à une baisse du revenu agrégé du ménage et par conséquent à l’accroissement du niveau de pauvreté au sein du ménage. Ceci permet de soulever la question de l’émancipation socioéconomique de la femme comme mécanisme sous-jacent à la réduction de la pauvreté de la femme en Afrique subsaharienne. Dans le contexte d’un pays fragile sortant de dix (10) ans de crise sociopolitique, la question de l’emploi demeure l’un des défis majeurs de la Côte d’Ivoire. En effet, les années de crise ont occasionné la fermeture et/ou la délocalisation de nombreuses entreprises qui opéraient autrefois sur le territoire ivoirien. Cette situation a conduit à la perte d’un nombre important d’emplois, augmentant ainsi le taux de chômage. Aujourd’hui, considérant la volonté des décideurs politiques de réduire ce taux de chômage, il apparait important de tenir compte de la place importante de la femme au sein de la société et dans le processus de développement. Cela passerait sans nul doute par son épanouissement professionnel ou sa participation au marché du travail. Dès lors, cette étude apparait comme une opportunité de présenter la situation actuelle des femmes sur le marché du travail et de contribuer ainsi à une meilleure intégration des femmes aux différents projets de développement.

1.2 Problématique de l’étude La lutte contre la pauvreté demeure le défi majeur qui continue d’interpeller les nations. Relever ce défi, qui constitue l’objectif central des Objectifs du Millénaire pour le développement requiert de façon impérieuse la valorisation des ressources humaines. Autrement dit, le développement économique et social d’une nation est fonction de la qualité de son élite. Si l’accès à l’éducation est un droit universel inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme permettant aux filles et aux garçons de s’émanciper, en Côte d’Ivoire, les inégalités de genre dans le domaine de l’éducation persistent à plusieurs niveaux. Selon le document de Stratégie de relance du développement et de réduction de la pauvreté (DSRP, 2009), le taux d’analphabétisme en Côte d’Ivoire est de 39% chez les hommes contre 54% chez les femmes. En 2006, la proportion de filles inscrites en première année du cycle primaire estimée à 44% est largement inférieure à celle des garçons qui est de 56%. Cette situation pourrait être un des facteurs explicatifs de la position des femmes sur le marché de l’emploi. Dans beaucoup de pays africains, dont la Côte d’Ivoire, la prise de conscience de l’importance de la participation des femmes à l’activité économique se traduit au niveau national par de nombreux débats et travaux sur l’élaboration de la politique nationale de genre et par l’intégration de cette politique dans les stratégies nationales de lutte contre la pauvreté. Pourtant en dépit de la reconnaissance du rôle important de la femme dans le développement économique, les femmes africaines en général et les femmes ivoiriennes en particulier occupent toujours une position défavorable sur le marché du travail. En effet, sur le marché du travail, les femmes sont moins présentes. Le chômage touche plus les femmes que les hommes, avec un taux de 19,8% pour les femmes contre 12,1% pour les hommes en 2008. En outre, sur le marché de l’emploi, seulement 12,71% des emplois modernes étaient occupés par les femmes en 2005. Cette faible représentation des femmes sur le marché du travail est perçue par bon nombre d’observateurs comme une des principales raisons de la vulnérabilité socioéconomique des femmes. Il apparait alors important, dans le cadre de cette étude, de s’intéresser aux facteurs explicatifs de la situation actuelle de l’éducation et de l’insertion des femmes sur le marché de l’emploi en Côte d’Ivoire, plus particulièrement à Abidjan. Pour ce faire, la présente étude se propose, sur la base d’une analyse à la fois quantitative et qualitative, d’apporter des éléments de réponse aux questions suivantes : • Quelle est la situation réelle de la femme dans le secteur de l’éducation et de l’emploi ? • Le niveau d’éducation des femmes influence-t-il leurs choix d’orientation face à l’emploi ? • Comment en Côte d’Ivoire, les représentations sociales de l’éducation et de l’emploi des femmes influencent-elles l’insertion des femmes sur le marché du travail ?

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Quels sont les modes d’insertion et de non-insertion des femmes sur le marché du travail ? L’émancipation socioéconomique de la femme estelle possible sans l’éducation et une participation au marché du travail ?

2. OBJECTIFS DE L’ÉTUDE L’objectif principal de cette étude est de rechercher les facteurs explicatifs de l’insertion des femmes sur les différents segments du marché du travail à Abidjan (public, privé formel et privé informel), tout en mettant un accent particulier sur le rôle de l’éducation. De cet objectif général découlent les objectifs spécifiques suivants : • Présenter la répartition des femmes dans les différents segments du marché du travail relativement à leurs niveaux d’éducation à Abidjan ; • Déterminer le lien entre l’éducation des femmes et leur participation au marché du travail ; • Identifier les modes d’insertion et de non-insertion sur le marché du travail ; • Montrer la pertinence de l’éducation et de l’insertion professionnelle dans l’émancipation socioéconomique des femmes à Abidjan. 3. DÉFINITION DES CONCEPTS 3.1 Secteur formel, secteur informel Les définitions des secteurs formel et informel s’appuient communément sur les critères suivants : le statut juridique ou légal, la comptabilité, la taille de l’activité, l’imposition et l’enregistrement au registre de commerce. Le secteur formel de l’économie est caractérisé par un mode d’organisation bureaucratique qui tient une comptabilité régulièrement reconnue et régulièrement tenue. Bien souvent, ce secteur a recours à une technologie avancée exigeant un capital important qui permette l’achat d’outils de production modernes. Il existe des conditions préalables pour exercer une activité dans le cadre de l’économie formelle ; à savoir : (i) Etre un agent économique reconnu comme tel ; (ii) Exercer des activités économiques reconnues et autorisées ; (iii) Etre soumis à l’imposition de l’Etat sur les activités ; (iv) Etre immatriculé au registre de commerce au tribunal de première instance ou avoir une paternité, délivrée par l’Etat1. Cela dit, il faut noter que dans la plupart des pays en développement, la faible taille du secteur formel de l’économie ne lui permet pas de jouer efficacement son rôle, limitant ainsi la capacité d’absorption du marché de l’emploi. Cette situation a alors suscité l’émergence et le développement d’un secteur alternatif qualifié souvent « d’informel ». L’économie informelle se définit par rapport à l’économie officielle et moderne (secteur formel) qui assure aujourd’hui, dans les pays économiquement développés, l’essentiel de la production des biens et des services. L’expression « secteur informel » (ou « secteur non structuré ») vient du Bureau international du travail. Le

secteur informel se caractérise d’une façon générale « comme un ensemble d’unités produisant des biens et des services en vue principalement de créer des emplois et des revenus pour les personnes concernées. Ces unités, ayant un faible niveau d’organisation, opèrent à petite échelle et de manière spécifique, avec peu ou pas de division entre le travail et le capital en tant que facteurs de production. Les relations de travail, lorsqu’elles existent, sont surtout fondées sur l’emploi occasionnel, les relations de parenté ou les relations personnelles et sociales plutôt que sur des accords contractuels comportant des garanties en bonne et due forme » (BIT, 1993). Aussi, la 15ème Conférence internationale des statisticiens du travail (CIST) de 1993 définit de manière « opérationnelle » le secteur informel comme « un ensemble d’unités de production qui constitue un élément au sein du Système de comptabilité nationale (SCN) du secteur institutionnel des ménages en tant qu’entreprises individuelles ». Les entreprises individuelles se distinguent des sociétés et quasi-sociétés par leur statut légal et le type de comptabilité qu’elles tiennent. Les entreprises individuelles ne constituent pas des entités séparées indépendantes du ménage ou du membre du ménage qui en est propriétaire, et elles ne tiennent pas une comptabilité complète qui permettrait une claire distinction entre les activités de production de l’entreprise et les autres activités du propriétaire. Dans cette étude, nous retenons la définition du secteur informel donnée par le BIT. Nous faisons ainsi la différence entre emploi formel et emploi informel de la manière suivante : • Les personnes en emploi formel sont des personnes qui exercent un emploi principal dans une organisation ou une entreprise privée à caractère légal, soumise au régime d’imposition et qui déclare ses employés à la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS)2. Il s’agit aussi de personnes exerçant dans l’administration publique ivoirienne ; • Les personnes en activité informelle sont des personnes exerçant de petites activités individuelles, en dehors du cadre institutionnel et légal, qui ne sont pas déclarées à la CNPS. 3.2 Femme analphabète, éduquée, scolarisée Cette étude mobilise des concepts comme femme analphabète, femme éduquée, ou encore femme scolarisée. Sur la base de la définition retenue par l’UNESCO, nous identifions les femmes analphabètes comme celles qui ne savent ni lire et écrire, encore moins compter, c’està-dire faire des calculs arithmétiques simples. Il s’agit de femmes qui n’ont jamais été à l’école conventionnelle (UNESCO, 1952). Selon le dictionnaire « Petit Robert 2007 », éduquer est l’action qui consiste à développer les facultés physiques,

Dodo Yav Zeng, (2008), ‘‘Le développement de l’économie informelle et ses conséquences sur l’économie formelle’’. Mémoire de Licence, Catégorie Economie et finances, Université de Lubumbashi. 2 Etre déclaré à la CNPS en tant qu’employé est le gage d’un emploi sûr et sécurisé au sein de l’entreprise. 1

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intellectuelles et morales de quelqu’un, c’est-à-dire le former par l’éducation, l’élever, le discipliner, le façonner. Ce processus peut se dérouler dans un environnement aussi divers que varié avec des normes particulières. Il peut s’agir de la famille, des sociétés secrètes ou d’un centre de formation. Appliqué au cadre de cette étude, il renvoie à l’ensemble des connaissances acquises par les femmes dans le cadre de l’instruction scolaire. Dans notre étude, nous entendons par femme éduquée celle qui a bénéficié d’une instruction scolaire et qui est capable de lire, écrire et calculer.

développement, dans la mesure où les femmes éduquées travailleraient plus que les hommes en termes d’heures consacrées au travail et contribueraient donc plus au développement économique à travers les taxes et les impôts. De plus, l’éducation permet à la femme de se doter des compétences et des outils nécessaires pour mieux subvenir à ses besoins et à ceux de ses enfants. Ainsi, un enfant dont la mère sait lire a 50% de chances d’atteindre son 5ème anniversaire et la probabilité de décès d’un nourrisson diminue de 5 à 10% pour chaque année d’études supplémentaire de sa mère (Yapo, 2006).

La femme scolarisée est celle qui a été à l’école conventionnelle, quel que soit le niveau atteint, et peu importe qu’elle sache ou ne sache pas lire ou écrire.

De ce qui précède, on peut dire que les théories soutenues par Kabeer, Moser, Firebaugh et Chant par exemple sont applicables au contexte de la Côte d’Ivoire dans la mesure où les femmes sont encore confrontées à des disparités dans l’accès et le contrôle des ressources nécessaires à leur épanouissement. Elles ont des besoins spécifiques et stratégiques qui nécessitent d’être véritablement pris en compte dans la politique nationale de développement économique et social de la Côte d’Ivoire. Cependant, il ressort de l’analyse que ces théories se focalisent plus sur une universalisation des questions d’émancipation des femmes. Elles font en vérité une représentation globale et non spécifique des femmes. En d’autres termes, utiliser le terme « femme » comme groupe universel suppose que les femmes sont définies par leur « genre » et non par leurs classes sociales et identités ethniques qui permettent de mieux comprendre les disparités de genre dans l’éducation et leur impact sur l’émancipation socioéconomique des femmes dans un pays comme la Côte d’Ivoire.

4. REVUE DE LA LITTÉRATURE 4.1 Femme et éducation Dans toutes les cultures, le sexe détermine le pouvoir et les ressources des femmes et des hommes. C’est pourquoi pour Kabeer (1995), les normes sociales sont « genrées ». En Afrique, malgré le rôle clé que les femmes jouent dans le processus de développement socio-économique, elles restent toujours confrontées à des difficultés d’accès à l’éducation, aux droits, aux ressources et aux biens ainsi qu’à leur charge relative aux responsabilités de production et de reproduction, conduisant ainsi à une féminisation de la pauvreté (Moser, 1993 ; Firebaugh, 1994 ; Chant, 1997). Cette situation est plus accentuée en milieu rural où les trois quarts des femmes rurales âgées de 15 à 24 ans sont analphabètes, contre moins de la moitié dans les zones urbaines. En effet, certains préjugés comme celui de l’infériorité de la capacité intellectuelle de la fille subsistent. Les filles abandonnent plus tôt l’école, surtout en milieu rural où leur aide est requise pour les tâches domestiques et productives. L’absence de services scolaires, comme le transport de proximité, creuse cet écart en ayant un effet direct sur le taux de fréquentation scolaire des filles. Des raisons économiques peuvent également expliquer le faible niveau d’instruction des filles en Afrique. A ce niveau, la famille va être amenée à faire un choix entre envoyer un garçon ou une fille à l’école. La fille étant appelée à se marier et à fonder un foyer ailleurs, la famille paternelle subit alors une perte, alors que, dans le cas d’un garçon, elle réalise un investissement (Diakité Fatoumata, 2003). Pourtant, bon nombre d’études ont montré que l’amélioration du statut socioéconomique des femmes passe nécessairement par le renforcement de leur capacité et de leur pouvoir de décision, objectif qui ne peut être réalisé que si on assure aux filles et aux garçons les mêmes conditions d’éducation (Ravallion et Wodon, 2000 ; Lee et Barro, 2000). Pour Paul Schultz (2001), l’investissement dans l’éducation des femmes est d’une importance capitale et un impératif de

4.2 Femme et accès à l’emploi Le rapport femme et accès à l’emploi est étroitement lié à celui développé plus haut. En effet, la division sociale du travail, qui émane essentiellement de la domination patriarcale, confère à la femme une place secondaire avec des rôles qu’elle doit remplir tant dans la vie familiale que dans la vie professionnelle. Etant donné que le rôle des femmes dans une société ne peut se concevoir en dehors du statut que lui confère cette société, Germain Nama (2004), à travers la revue qu’il fait de l’analyse de différents auteurs du rôle de la femme dans les sociétés africaines, nous a permis d’observer une polémique suscitée par des chercheurs en sciences sociales sur la question. Ainsi pour certains auteurs, la femme traduit l’image d’une personne opprimée, soumise et réduite dans sa mobilité par ses fonctions reproductives et éducatives. Elle est ainsi confinée à des tâches domestiques qui sont ses attributs naturels. A cet effet, Jacqueline Ki Zerbo soutient que contrairement « à l’époux, dont la mobilité est grande, l’homme fort, qui peut se reposer et se donner du bon temps après avoir gagné le pain de la famille, la femme, elle, peut travailler pour gagner ce pain, mais il faudra qu’elle apprête le repas » (Ki Zerbo3, 1975). Dans le contexte socioculturel ivoirien par exemple, l’analyse faite par Harris Memel Fôté4 relève

Jacqueline Ki Zerbo « Contribution du génie de la femme à la civilisation Négro-Africaine » dans La civilisation de la femme dans la tradition africaine, Colloque d’Abidjan, 3-8 juillet 1972, Paris, Présence Africaine, 1975. Citée par Germain Nama dans « Le rôle des femmes dans les sociétés africaines » dans Eduquer aux droits de l’homme : les repères pour l’action, 2004. 3

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trois institutions qui assurent aux hommes le contrôle sexuel en constituant les femmes en sujets dépendants ou en objets. Il fait état d’un contrôle technique et social qu’exercent les hommes sur la production, la distribution et la consommation des biens matériels et des services limitant ainsi l’indépendance économique des femmes. De la même façon, la société politique est contrôlée par les mâles. D’autres auteurs, dans une analyse anthropologique contraire, identifient la femme africaine comme une force dans la société. D’une part, la femme est une force économique (Sarah Kala Lobé5). Son rôle dans l’activité de production et ses fonctions familiales sont essentiels au bien-être socioéconomique et à l’équilibre de la famille. D’autre part, elle est une force politique (Madeleine Deves6) dans la mesure où dans les sociétés, matriarcales du Sénégal notamment, son pouvoir de décision est mis au service de la gestion politique du pouvoir. Malgré son rôle déterminant dans la vie sociale et l’équilibre de la société, la vision générale de la femme dans la société ivoirienne est celle d’une personne qui est placée sous l’autorité des hommes et à qui incombent les tâches nourricières et de gestion domestique du foyer. Dans la division sociale du travail, la femme est considérée comme le « sexe faible » et l’homme « le sexe fort ». A partir de cette représentation de sexe faible/ sexe fort et des fonctions traditionnelles assignées à la femme et à l’homme (le traditionnel se rapportant ici à des valeurs spécifiques et des matériaux propres à un contexte donné et transgénérationnel7), l’analyse de l’insertion professionnelle de la femme la situe dans les métiers liés à ses fonctions de reproductrice (corps médical : sage-femme, infirmière, médecin) ainsi qu’à ses fonctions nourricières et de gestion du foyer (hôtellerie, restauration, couture, coiffure). De plus, elles occupent des emplois précaires, mal rémunérés, qui contribuent à les rendre plus vulnérables et donc économiquement dépendantes. Doit-on en déduire que les femmes africaines sont condamnées par les pesanteurs socioculturelles dans leur processus d’émancipation socioéconomique et de quête d’autonomie ? Comment comprendre que ces représentations culturelles continuent de peser sur le devenir des sociétés africaines qui, malgré leur complexité, donnent l’impression de ne plus renouveler les fondements du lien social ? A ce sujet, nous rejoignons Akindes (2003)8 pour qui aborder la problématique du changement social revient à la question du lien social 4

4.3 Lien entre niveau d’instruction et insertion des femmes sur le marché du travail en Afrique Le calcul du taux de rendement économique de l’éducation suppose que l’éducation est un investissement dont la valeur dépend directement du coût monétaire de la formation et des avantages futurs anticipés (ou rendement) qu’il procure. Le rendement s’explique par une hypothèse cruciale : le passage par l’école augmente la productivité, donc les revenus. Cette hypothèse a néanmoins été critiquée, car certains théoriciens estiment que l’école ne sert qu’à signaler les individus les plus performants à des employeurs incapables d’observer la qualité des salariés préalablement à leur recrutement, tandis que d’autres pensent que la productivité des individus ne prend réellement d’existence que par l’apprentissage sur le poste de travail. Toutefois, ces différentes approches convergent vers l’idée que l’éducation favoriserait l’accès à l’emploi et accroîtrait la productivité des individus dès leur sortie de l’école ou en facilitant leur adaptation à leur poste de travail. Les compétences et les niveaux d’études influencent donc positivement l’insertion des femmes sur le marché du travail. Le diplôme étant considéré comme un signal en termes d’accès à l’emploi, les chances de trouver un emploi mieux rémunéré diminuent selon le sexe même si le niveau d’instruction est élevé en milieu urbain (Arbache et al, 2010). Les employés ayant atteint l’enseignement supérieur gagnent en moyenne plus de huit fois le salaire de personnes sans instruction, et plus de quatre fois celui d’individus ayant suivi le cycle primaire (Arbache et al, op.cit.). Un niveau d’instruction élevé chez les femmes favorise leur accès sur le marché de l’emploi (Boly et al, 2009).

Harris Memel Fôté, « Les sciences humaines et la notion de civilisation de la femme : Essai sur l’inégalité sociale des sexes dans les sociétés africaines » cité par Germain Nama, op cit. Sarah Kala-Lobé. « Situation de la femme dans la société africaine ». Citée par Germain Nama, op cit.

5

Madeleine Deves. « Le rôle de la femme dans la pratique du droit coutumier. Exemple du Sénégal ». Citée par Germain Nama, op cit.

6 7

Anthony Giddens (2003). Runaway world: how globalization is reshaping our lives. Taylor & Francis

8

Akindès F. : « Le lien social en question dans une Afrique en mutation » dans Souveraineté en crise, pp.379-403. Collection : Mercure du Nord Québec : L’Harmattan et les Presses de l’Université Laval, 2003.

9

Le Lien social selon le Lexique de sociologie, Dalloz, 2007, au sens général, permet aux hommes de vivre ensemble et constitue le fondement de la cohésion sociale. L’expression est utilisée par Durkheim comme synonyme de solidarité sociale. Certains auteurs considèrent qu’il existe trois dimensions au lien social (les liens marchand, politique et communautaire). La crise du lien social conduit à l’exclusion ou à l’anomie.

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en Afrique. Selon lui, « L’étude du lien social9 se veut alors une interrogation sur les capacités des sociétés africaines à se produire… ou à « s’auto-instituer », au sens où l’entend Cornelius Castoriadis (1996 : 196)10 ». Dans cette perspective, l’analyse du changement social sort du cadre bipolaire tradition/modernité dans lequel les sciences sociales africanistes semblent l’avoir enfermé. Son approche s’inscrit dans la perspective actionnaliste qui part du présupposé selon lequel les sociétés sont le résultat d’actions sociales, de décisions ou de transactions diverses. A cet effet, nous pensons que la question de l’autonomisation des femmes africaines et en particulier ivoiriennes pourrait reposer sur les actions de décideurs davantage axées sur les besoins les femmes et leur implication au processus de développement de la société.

Castoriadis (1996 : 196) cité par Akindès op.cit.

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Si les marchés de l’emploi en Afrique semblent très diversifiés, il y a une différence entre les types d’emplois que préfèrent les femmes ou auxquels elles sont capables de concourir. Les aspects spécifiques à un emploi, tels que les connaissances et les compétences, les besoins physiques ainsi que les conditions de travail, peuvent influer sur le type d’emplois qu’obtiennent ou acceptent les femmes. Ces différences en termes de préférences d’emplois, combinées aux normes culturelles et sociales, contribuent probablement aux divisions sectorielles entre hommes et femmes. Cette analyse de l’insertion professionnelle et de l’orientation sexiste des femmes dans des professions spécifiques peut être aussi critiquée sous l’angle abordé par Oyeronke Oyewumi (1997)11 dans The Invention of Woman. En analysant le rapport du système colonial à l’Africain et particulièrement à la femme, elle dénonce la discrimination faite à la femme dans la gestion coloniale qui était considérée comme une affaire politique et donc une affaire d’hommes, particulièrement des colons européens. Dans ce rapport, les femmes africaines étaient infériorisées de par leur situation de femme, et doublement par celle de « natives » africaines. Seule la présence de quelques femmes européennes dans l’administration en tant que « nurses » (infirmières) servait à indemniser les femmes de leur exclusion de l’administration coloniale. Oyeronke Oyewumi montre ainsi comment la colonisation a contribué à dégrader la position de la femme dans la société africaine et à diffuser cette image dans l’idéologie des populations. Il serait intéressant d’analyser les stratégies de gestion du genre sous cet angle dans le cas de la Côte d’Ivoire dont l’administration est un héritage colonial. 5. MÉTHODOLOGIE UTILISÉE Deux approches ont été utilisées pour atteindre les objectifs de cette étude : une approche qualitative (analyse sociologique) et une approche quantitative (analyse statistique et économétrique). 5.1 Méthodologie sociologique Au plan sociologique, l’étude a adopté la méthode exploratoire de collecte de données, qui donne la possibilité d’évaluer, de comparer, et de valider l’information. Cette méthodologie permet la triangulation à l’aide de méthodes comme l’entretien. L’étude a privilégié la compilation de données secondaires collectées dans la recherche documentaire, suivie de la collecte de données primaires de base avec l’enquête sur le terrain. 5.1.1 La recherche documentaire Elle a porté sur la place de la femme dans les politiques et stratégies relatives à l’éducation et à l’emploi, et plus particulièrement à la question de la femme dans le processus de développement national. Pour mieux cerner ces questions essentielles, les ouvrages, les articles scientifiques, les rapports et documents administratifs, les journaux et les sites internet ont été explorés. 11

5.1.2 Le cadre méthodologique Il s’agit ici de rendre compte du choix des zones d’enquête ainsi que de la procédure d’échantillonnage et de collecte de données sur le terrain. Champ géographique L’enquête a été réalisée dans le département d’Abidjan, capitale économique de la Côte d›Ivoire. Le district d’Abidjan compte 6 783 906 habitants, dont 4 351 086 habitants pour la ville elle-même, soit 20% de la population totale du pays. La ville d’Abidjan, en plus de regrouper les différentes caractéristiques de la population ivoirienne, a un poids économique largement dominant sur les autres villes de la Côte d’Ivoire. Abidjan est une ville de forte migration. Ces migrations se sont accentuées avec la rébellion de 2002 même si la crise postélectorale de 2010 a déclenché un mouvement contraire durant les périodes de combat. Plus que toutes les autres villes du pays, Abidjan demeure une ville de forte activité économique. En effet, le district d’Abidjan représente à lui seul 40% du PIB de la Côte d’Ivoire, soit 9,52 milliards de dollars. En outre, il est représentatif de la population ivoirienne par son caractère cosmopolite. (INS 2008) Champ social Les données qualitatives ont été ainsi recueillies auprès de femmes, d’hommes, de décideurs publics et de pourvoyeurs d’emploi des secteurs formel et informel que nous avons jugés à même de nous fournir les informations relatives aux politiques et aux pratiques d’emploi. Pour déterminer les catégories de femmes à enquêter, une matrice mettant en relation les différents secteurs d’activités (secteur formel public et privé et secteur informel) et le niveau de scolarisation des femmes a été construite. Quatre catégories de femmes ont de ce fait été enquêtées, à savoir : • Les femmes scolarisées et insérées (FSI) ; • Les femmes non scolarisées et insérées (FNSI) ; • Les femmes non scolarisées et non insérées (FNSNI) ; • Les femmes scolarisées et non insérées (FSNI). Nous définissons les femmes scolarisées comme celles qui ont bénéficié de l’enseignement conventionnel et qui, à la fin de leur cursus scolaire, savaient lire et écrire. Les femmes insérées sont celles qui exercent une activité, dans le secteur formel ou informel et dont l’activité représente la principale source de revenus. Nous entendons par femmes non scolarisées celles qui ne savent ni lire ni écrire. Il s’agit des femmes qui n’ont jamais été à l’école conventionnelle. Les femmes non insérées sont celles qui n’exercent aucune activité génératrice de revenus, aussi bien dans le secteur formel que dans le secteur informel. Les participantes à l’enquête qui sont insérées proviennent donc des secteurs formel et informel. Sur la base des caractéristiques que nous avons identifiées dans la définition de ces concepts, nous avons enquêté auprès de femmes :

Oyeronke Oyewumi, The Invention of Woman, Presse Universitaire du Minnesota, USA, 1997.

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• Employées dans des entreprises privées et déclarées à la CNPS ; • Employées dans l’administration publique ; • Employées dans des micro-entreprises informelles employant des salariés permanents en dessous d’un certain seuil (5 salariés) ; • Travailleuses indépendantes travaillant à leur propre compte sans employer de salariés permanents, mais employant éventuellement des aides familiales et/ou des salariés occasionnels. Nous avons identifié comme décideurs publics et pourvoyeurs d’emploi les responsables des ministères suivants : • Le ministère de l’Emploi ; • Le ministère de la Fonction publique ; • Le ministère de la Femme ; • Le ministère de l’Enseignement supérieur ; • Le ministère de L’Education nationale. Les gestionnaires des entreprises et des institutions de placement et de gestion de la main d’œuvre (AGEPE, CIFIP, AGEFOP) ont été identifiés en tant que pourvoyeurs d’emploi. La présence des hommes dans le champ social se justifie par le fait qu’il est important d’appréhender la manière dont ils se représentent la femme dans un environnement social en pleine mutation où la place de la femme se reconstruit à travers l’éducation et sa participation au marché du travail. Procédure d’échantillonnage et taille de l’échantillon L’enquête s’est limitée à cinq communes de la ville d’Abidjan. Dans une première approche, nous avons effectué le choix des communes sur une base géospatiale. En effet, afin de tenir compte de la représentation spatiale de la ville, un découpage en zone Nord, Sud, Est et Ouest a été opéré en retenant la commune du Plateau comme le centre. En outre, dans une seconde approche, nous avons déterminé ces communes sur la base de la division fonctionnelle de la ville d’Abidjan marquée par une concentration d’activités professionnelles et de population scolarisée, afin de faire ressortir la pertinence des concepts mobilisés par le thème de l’étude. Il faut dire que cette division fonctionnelle nous permet de révéler l’importance socioéconomique, culturelle et éducative des communes ainsi que leur rôle dans la croissance perpétuelle de la ville d’Abidjan caractérisée par une forte industrialisation et une urbanisation galopante. A cet effet, l’enquête s’est déroulée dans les communes de : Plateau (Centre), Yopougon (Ouest), Cocody (Est), Treichville (Sud) et Abobo (Nord). Des entretiens individuels ont été réalisés auprès de quarante (40) femmes, dix (10) hommes, huit (8) décideurs publics et pourvoyeurs d’emploi et une (1) personne publique, dont le cas illustre le rapport entre l’insertion professionnelle des femmes et l’éducation.

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Au total, les entretiens devaient être menés auprès de soixante (60) personnes. Mais, compte tenu des contraintes de temps, de l’indisponibilité de certains enquêtés, entre autres, le nombre total d’enquêtés s’élève à 59 personnes. L’échantillon a été déterminé à partir de la technique de l’échantillon aléatoire stratifié. Cela a consisté à diviser la population cible (par exemple : les femmes, les hommes) en sous-groupe homogène (FSI-FSNI-FNSIFNSNI), puis à tirer de façon aléatoire et sans remise dans chaque groupe. L’ensemble des échantillons ainsi choisis a constitué l’échantillon final. Pour constituer l’échantillon des autres unités d’enquêtes (pourvoyeurs d’emploi, décideurs publics) nous avons sélectionné dans ces unités les responsables et les personnes ressources capables de nous renseigner sur la réalité de l’insertion professionnelle de la femme en Côte d’Ivoire. 5.1.3 L’entretien L’approche sociologique de la question de l’insertion de la femme a principalement consisté à rechercher les représentations sociales et les pratiques qui tendent à légitimer les difficultés d’insertion professionnelle des femmes. Donc, dans le souci de fournir des données fiables sur les facteurs liés à la faible participation des femmes au marché du travail et d’identifier les représentations sociales des femmes, nous avons opté pour l’entretien individuel et semi-directif comme technique de collecte de données qualitatives. Différents entretiens ont été réalisés à l’aide de guides d’entretien pour prendre en compte la spécificité de chaque élément du champ social. La conception des guides adressés aux femmes a quelque peu varié selon que nous étions en présence de femmes scolarisées ou non, ou en présence de femmes insérées ou non. Les guides ont été structurés autour des rubriques suivantes : • Scolarisation-formation et idéologies ; • Importance du travail et accès/non accès au marché du travail ; • Education et participation/non-participation au marché du travail ; • Statut social et rapports sociaux ; • Suggestions sur la promotion de l’éducation de la femme et son insertion sur le marché du travail. 5.1.4 Méthode d’analyse sociologique L’étude a adopté la méthode exploratoire de collecte de données qui donne la possibilité d’évaluer, de comparer et de valider l’information. Cette méthodologie permet la triangulation à l’aide de méthodes comme l’entretien. L’étude a privilégié la compilation de données secondaires collectées dans la recherche documentaire et la collecte de données primaires. L’exploitation des données s’est faite sur la base de l’analyse de contenu et nous avons opté pour un dépouillement manuel. Ce type de dépouillement constitue un avantage pour nous dans la mesure où il nous permet d’être encore plus en contact avec les données et de conserver le maximum d’informations possibles


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susceptibles d’être utilisées dans notre analyse. L’analyse de contenu, faite de manière thématique, a consisté à découper de manière transversale tout le corpus des entretiens pour rechercher la cohérence inter-entretiens. Le mode de découpage de ce type d’analyse est stable d’un entretien à l’autre. Ceci nous a donc permis de comprendre l’ensemble des enquêtés selon la logique de leurs réponses, de rechercher et de comprendre le lien entre les niveaux d’éducation des femmes et leurs modes d’insertion, entre les représentations sociales du rôle de la femme à Abidjan et les stratégies d’émancipation socioéconomique. La méthode d’analyse retenue pour l’étude est l’Approche orientée sur l’acteur (Actor-Oriented Approach). Cette approche est axée sur les fondations de théories sociologiques basées sur la critique des idéologies et pratiques de développement qui apparaissent structuralistes (Long et Long, 1992). Elle permet d’apprécier et de comprendre les réalités sociales qui forment et sous-tendent les actions des individus dans leur vécu quotidien. Les individus ont différents pouvoirs, moyens et stratégies, différents points de vue et perspectives qui forment et configurent la vie sociale. Ce faisant, l’Approche orientée sur l’acteur permet d’illustrer les interactions entre les acteurs, et leurs institutions et de contribuer à l’émergence de politiques et d’interventions de développement pertinentes. 5.1.5 Les difficultés rencontrées Avant d’énoncer les difficultés rencontrées au cours de l’enquête, il convient de présenter le climat social dans lequel s’est déroulée l’étude. La normalisation de la situation sociopolitique et la tenue de l’élection présidentielle de 2010 avaient été suscité l’espoir d’un environnement économique favorable à une relance de l’activité économique. En effet, à partir de 2007, suite à l’accord de paix entre les forces belligérantes de la crise sociopolitique de 2002, l’économie ivoirienne avait consolidé sa stabilisation grâce à la reprise de la production industrielle et la confirmation du redressement du secteur tertiaire. Cependant, la crise postélectorale de 2011 qui a profondément affecté la ville d’Abidjan (principale zone des affrontements) est venue fragiliser l’économie ivoirienne. Cette situation a entrainé une précarité de l’emploi bien que de nombreuses initiatives soient en cours pour favoriser la reprise de l’activité économique ainsi que la réinsertion post-crise. C’est dans ce contexte que s’est déroulée notre enquête. Les difficultés rencontrées sont principalement liées à la collecte des données. Elles peuvent s’identifier à trois niveaux. Difficultés liées aux catégories des femmes enquêtées Les difficultés liées aux catégories des femmes enquêtées se situent à deux niveaux : l’accès aux femmes et aux différentes catégories interrogées. Initialement, l’enquête s’est intéressée aux femmes sur leurs lieux de résidence. Mais les contraintes de temps

et de disponibilité des femmes ont finalement amené les enquêtrices à interroger les femmes dans les différentes zones de rencontre, peu importe qu’elles y habitent où qu’elles y travaillent. Quant aux différentes catégories interrogées, il faut dire qu’il nous a été difficile de rencontrer la catégorie des femmes non scolarisées et non insérées, notamment dans la commune du Plateau. En effet, présentée comme le centre des affaires, la plupart des personnes rencontrées n’y résident pas. Elles s’y rendent pour exercer leur activité professionnelle ou non. Quant à celles qui pratiquent une activité, le plus souvent elles tiennent un petit commerce, exercent de manière ambulante ou en tant qu’employée de maison. Cette difficulté a été contournée en sollicitant l’aide de certaines personnes résidant dans les zones d’enquêtes afin de nous introduire auprès des catégories de femmes difficiles à trouver. Difficultés liées aux procédures administratives L’une des principales difficultés relatives au déroulement de notre enquête est liée à la lenteur des procédures administratives qui a allongé le temps de collecte des données. En effet, nous avons dû faire face à la lenteur administrative dans la transmission des courriers d’information, à l’indisponibilité de certaines personnes ressources dans les entreprises et ministères sollicités, à de nombreux jours fériés (surtout au mois de mai) entraînant le report d’entretiens. En outre, nous avons été confrontés à une indisponibilité de données liées aux changements dans la nomenclature des ministères qui a entraîné la répartition de certaines activités et responsabilités entre plusieurs ministères. Il nous a fallu adresser des courriers de relance en guise de rappel et des exemplaires du guide d’entretien pour leur permettre de faire des recherches et nous orienter vers les personnes indiquées. Difficultés liées à la situation sociopolitique La situation actuelle de la Côte d’Ivoire qui sort d’une profonde crise sociopolitique constitue, à un certain niveau, une difficulté pour la collecte des données dans la mesure où l’atmosphère de tension et de méfiance générée par la crise est encore une réalité. Cela s’est ressenti dans les différentes administrations et au niveau des femmes enquêtées dont certaines ont refusé de collaborer ou ont émis beaucoup de réserves. Par ailleurs, il s’est posé au sein des différents services de l’administration publique un problème de disponibilité des informations résultant de la destruction des principales sources de documentation suite aux différents actes de vandalisme liés à la crise postélectorale de 2010-2011. 5.1.6 Les considérations éthiques Les considérations éthiques exposées ici sont en relation avec le contexte dans lequel s’est déroulée l’étude. L’enquête s’est révélée difficile par moment dans la mesure où les enquêtés sollicitaient directement l’avis des enquêteurs sur les dernières crises sociopolitiques dans le pays et la gestion politique. Il était alors important de Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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leur repréciser, de manière subtile, le contexte de l’étude et leur préciser qu’il s’agissait non pas de donner notre avis sur la situation, mais de recueillir leur expérience personnelle qui rendrait plus crédible notre travail. Les personnes sollicitées craignant pour leur sécurité sur le plan physique et/ou professionnel, il a donc fallu créer une atmosphère de confiance avec les enquêtées. Pour respecter la vie privée des personnes, seules les personnes ayant consenti ont été enquêtées, notamment pour l’utilisation du dictaphone auquel nous avons eu recours dans un souci de fidélité des données. Elles ont été informées de l’objet de l’étude, des objectifs, des acteurs et partenaires de l’étude. Elles ont également été rassurées sur la confidentialité de leurs propos. En ce qui concerne les agents de l’administration publique, la conduite de l’enquête a occasionné le report de certains entretiens et nécessité la prise de connaissance ou le dépôt de guides d’entretiens au préalable, dans la mesure où certaines questions relatives à la politique nationale de l’éducation et de l’emploi étaient appréhendées en termes de comparaison ou de critiques portées à l’endroit des anciennes ou des actuelles autorités. Afin de garantir une certaine fiabilité des informations recueillies, nous avons utilisé en reprenant certaines questions sous d’autres angles. Nous avons tenté de vérifier les informations entre les structures et également effectué des recoupements entre les informations recueillies. Dans notre rapport, seules les institutions publiques ont été citées dans le cadre de données officielles. Les noms des personnes ainsi que toute information pouvant indiquer l’identité des enquêtées n’ont pas été révélés. Ceux qui sont révélés le sont avec l’accord des enquêtés. 5.2 Analyse statistique Les données secondaires utilisées dans cette étude sont issues de l’Enquête sur le niveau de vie des ménages (ENV) réalisée par l’Institut national de la statistique de Côte d’Ivoire en 2008. Cette enquête a porté sur les strates du pays à savoir Abidjan, les autres villes, la forêt rurale Est, la forêt rurale Ouest et la savane rurale. L’ENV 2008, qui concernait 59 699 ménages pour tout le pays et 10 504 pour le département d’Abidjan, s’est intéressée aux domaines suivants : éducation, santé, emploi, agriculture, pauvreté, impact de la guerre, etc. La présente étude s’intéresse particulièrement à la dimension et aux différences entre les hommes et les femmes en matière d’éducation et d’insertion sur le marché de l’emploi. L’analyse statistique s’attèlera à présenter et analyser les tableaux de parité entre hommes et femmes dans ces deux domaines.

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5.3 Méthodologie économétrique Etant donné que la présente recherche porte sur la rentabilité de l’éducation, nous partirons du fait que le marché du travail est segmenté pour envisager une analyse des choix occupationnels entre les différentes alternatives qui s’offrent aux individus (ne pas participer au marché du travail - chômeurs et inactifs ; participer dans le secteur public, le secteur privé formel, le secteur privé informel). En principe, l’individu doit choisir entre les alternatives suivantes : (1) non-participation au marché du travail, (2) emploi public, (3) emploi privé formel et (4) emploi privé informel. Il devra notamment retenir l’alternative qui maximise son utilité en termes de gain. Mais, étant donné les multiples contraintes inhérentes à la capacité du marché du travail à pouvoir accueillir un individu dans le secteur souhaité, il est indispensable de tenir compte de la probabilité de l’individu à choisir tel ou tel secteur. L’estimation de l’équation réduite de participation au marché du travail se fait généralement par l’utilisation du modèle logistique multinomial. Afin de capter l’effet individuel des différents niveaux d’éducation sur les différents segments du marché du travail, la variable Education sera subdivisée pour obtenir 4 niveaux (analphabète, primaire, secondaire et supérieur). 6. RÉSULTATS 6.1 Statistiques descriptives 6.1.1 La situation des femmes à tous les niveaux de l’éducation Cette situation sera présentée à partir de l’analyse statistique des données secondaires recueillies auprès de l’INS et des données primaires. En ce qui concerne les données secondaires, l’échantillon considéré tient compte des hommes et des femmes de plus de 15 ans vivant dans la ville d’Abidjan. Les statistiques présentées ici sont calculées à partir des résultats d’enquête dans les secteurs de l’éducation et concernent un échantillon total de 3 834 personnes (2 246 hommes et 1 588 femmes) dans la ville d’Abidjan. Les résultats indiquent que sur l’ensemble de la population de la ville d’Abidjan, 37,74% des individus de l’échantillon n’ont aucun niveau d’éducation, 25,59% ont le niveau primaire, 26,94% ont le niveau secondaire et 9,73% ont le niveau supérieur. Le tableau 2.1 ci-dessous présente plus en détail la répartition des individus selon le niveau d’éducation et le genre.


R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

Tableau 2.1 Niveau d’éducation des individus selon le genre (n = 3 834) Proportion des individus selon le niveau d’éducation Niveau

Hommes

Total

Femmes

d’éducation

%

Total

%

Total

%

Total

Analphabète

50,93

737

49,07

710

100,00

1 447

Primaire

52,29

513

47,71

468

100,00

981

Secondaire

69,12

714

30,88

319

100,00

1 033

Supérieur

75,60

282

24,40

91

100,00

373

Total

58,58

2 246

41,42

1 588

100,00

3 834

Sources : auteurs à partir des données secondaires L’analyse du tableau montre qu’en matière d’éducation, les femmes sont moins éduquées comparées aux hommes. A tous les niveaux d’éducation (primaire, secondaire, supérieur), on note une plus faible proportion de femmes. Ces résultats montrent bien que si au départ la différence entre le nombre de filles et de garçons ayant été à l’école primaire n’est pas très grande, peu de filles atteignent le niveau supérieur de l’éducation. Ces taux qui évoluent de manière décroissante du niveau d’éducation analphabète au niveau supérieur sont l’expression d’un taux élevé d’abandon par année d’étude (TA), d’un faible niveau d’espérance de vie scolaire (EVS) et d’un faible taux de transition (TT) dans la population féminine. Cela pourrait s’expliquer aussi par le fait qu’à l’origine, dans les sociétés traditionnelles, les parents étaient plus enclins à favoriser l’éducation des garçons que des filles. En ce qui concerne les données primaires, le niveau d’étude des femmes enquêtées présentent quelques similitudes avec les statistiques ci-dessus présentées dans la mesure où l’on compte plus d’analphabètes dans les 2 échantillons (données primaires, données secondaires). En effet, on compte 40%, 10%, 25% et 25% de femmes respectivement dans les niveaux d’éducation analphabète, primaire, secondaire et supérieur. Cette forte proportion de femmes analphabètes pourrait être justifiée d’une part par les difficultés économiques des familles : « J’envie les femmes scolarisées… je regrette dans mon cœur de ne pas être partie à l’école, mais je n’ai pas honte puisque les parents n’avaient pas les moyens ». [Extrait d’entretien FNSI d’une commerçante à Treichville]. D’autre part, les femmes analphabètes ont souvent été victimes des stéréotypes relatifs aux rôles traditionnels de la femme. Ainsi, certaines n’ont jamais été inscrites à l’école, d’autres ont refusé d’y aller et manqué d’encouragement ou elles ont été simplement retirées de l’école. En effet, selon les enquêtées, les parents résidant en zone rurale ayant estimé que la femme était destinée au mariage, l’école conventionnelle n’avait pas d’importance majeure dans leur éducation. Il en est de même pour celles qui ont abandonné l’école au cours préparatoire. Contrairement à la situation en zone rurale, davantage de filles sont scolarisées en ville. Cela pourrait être d’abord lié à l’existence d’infrastructures scolaires, mais aussi à un effet d’entrainement qui incite les parents à envoyer les enfants à l’école. « En ville ici, tout le monde va à l’école. Donc l’enfant sait qu’il doit aller à l’école, les parents aussi savent que les enfants doivent aller à l’école ». [Extrait d’entretien FNSNI à Cocody]. En outre, les filles ayant des parents éduqués ont plus de chance d’aller à l’école vu que ceux-ci connaissent mieux les avantages liés à l’école : « Mon père était vétérinaire, ma mère secrétaire de direction. Le fait d’être issue d’une famille d’intellectuels a facilité ma scolarisation ». [Extrait d’entretien FSI juriste à Treichville]. Cette situation pourrait être aussi tributaire de certains déséquilibres observés dans le Rapport d’Etat sur le système éducatif national 200912 ainsi que de certaines représentations sociales sur la scolarisation des filles. En effet, l’offre scolaire est un phénomène majoritairement urbain et demeure limitée et inégale sur l’ensemble du territoire aussi bien en qualité qu’en quantité. Par ailleurs, l’analyse des effectifs scolarisés par genre montre que des différences perdurent entre garçons et filles en matière d’accès à l’enseignement. Le taux de scolarisation des filles était de 28,4% en 2009 contre 43,2% pour les garçons. Le constat est le même en ce qui concerne l’achèvement de la scolarisation et la réussite des filles. En Côte d’Ivoire, 55% de la population de 6 à 17 ans, dont 61% de filles de ce groupe d’âge, sont en dehors de l’école. On observe également l’éloignement des écoles des habitations, mais surtout la pauvreté Plusieurs activités de sensibilisation ont été mises en œuvre dans les zones de sous-scolarisation au niveau national et au niveau communautaire, avec l’appui d’organismes internationaux comme l’UNICEF et l’UNFPA, pour promouvoir 12

MEN, Rapport d’Etat sur le Système éducatif national (comprendre les forces et les faiblesses du système pour identifier les bases d’une politique nouvelle et ambitieuse) Abidjan, 2008.

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la scolarisation des filles. Malgré toutes ces initiatives du gouvernement et de ses partenaires, l’effectif des filles scolarisées demeure encore faible par endroits. Selon le document de la Politique nationale sur l’égalité des chances, l’équité et le genre13, ce constat s’explique par la persistance de déséquilibres liés aux croyances et pratiques culturelles telles que le mariage précoce ou forcé, les grossesses précoces, la mutilation génitale féminine. On note aussi d’autres facteurs comme la subordination de la petite fille au petit garçon, les perceptions selon lesquelles il y a plus d’avantages à scolariser le petit garçon compte tenu de son rôle de futur chef et de soutien à la famille ainsi que de la responsabilité de la petite fille dans l’exercice des activités reproductives et communautaires. 6.1.2 La répartition des femmes dans les différents segments du marché du travail Un premier indicateur des inégalités économiques entre les femmes et les hommes est l’insertion sur le marché du travail. Tout comme le secteur de l’éducation, le domaine de l’emploi à Abidjan présente aussi des disparités dans tous les segments du marché du travail (public, privé formel et privé informel). En considérant les données secondaires, les statistiques indiquent que seulement 3,96% des individus sont sans emploi, 7,59% exercent dans le secteur public et 23,76% dans le secteur privé. On note aussi le poids important du secteur informel qui emploie jusqu’à 64,68% des individus de l’échantillon. Le tableau 2.2 ci-après présente la représentativité des femmes sur le marché du travail à Abidjan, comparativement à celle des hommes. Tableau 2.2 Participation au marché du travail selon le genre Proportion des individus selon le niveau d’éducation Secteur d’emploi

Hommes

Total

Femmes

%

Total

%

Total

%

Total

Sans emploi

47,37

72

52,63

80

100,00

152

Public

70,10

204

29,90

87

100,00

291

Privé

76,40

696

23,60

215

100,00

911

Informel

51,37

1 274

48,63

1 206

100,00

2 480

Total

58,58

2 246

41,42

1 588

100,00

3 834

Source : auteurs à partir des données secondaires Les résultats montrent que parmi les individus sans emploi, 52,63% sont des femmes et 47,37% des hommes. D’une manière générale, l’on peut noter une faible représentativité des femmes dans le secteur formel. En effet, que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé, le tableau montre que plus de 70% des employés sont des hommes. Les femmes, lorsqu’elles travaillent, sont plus présentes dans le secteur informel qui emploie 48,63% d’entre elles. Au niveau des femmes enquêtées, les mêmes tendances se confirment. Les résultats montrent que 50% des femmes enquêtées ne sont pas insérées sur le marché du travail. Quant à celles qui travaillent, 55% sont insérées dans le secteur informel. Malgré la forte proportion des femmes qui ne travaillent pas, pour les enquêtées, travailler est très important dans la mesure où le travail constitue un élément majeur de socialisation. Il favorise ainsi la formation de la personnalité qui s’opère à travers les relations sociales et permet l’intériorisation des normes, l’apprentissage des rôles et la formation des motivations. Contrairement à la conception marxiste qui présente le travail de manière négative comme une aliénation, nos enquêtées ont une vision positive du travail et le présentent sous plusieurs angles : le travail vu comme une libération, le travail comme moyen de consolidation du foyer et le travail comme facteur d’intégration sociale et de manifestation de la reconnaissance envers les parents. Ainsi, les femmes insérées (FSI et FNSI) ressentent cette libération dans la mesure où elles ne sont plus réduites à « tendre la main » ; elles acquièrent ainsi une autonomie financière et donc une autonomie d’action qui conduit à une réduction du contrôle masculin. Dans le foyer, elles se sentent plus considérées parce que capables d’apporter une contribution au rôle traditionnel de la femme. Elles acquièrent aussi la capacité de manifester personnellement leur reconnaissance à la famille ascendante et d’intervenir auprès d’elle. Ce point de vue est partagé par les hommes qui relèvent ainsi l’importance d’une émancipation socioéconomique de la femme dans leurs relations interpersonnelles et la construction sociale de leur image. Tout cela, au contraire des femmes non insérées (FSNI et FNSNI) qui ressentent fortement le poids de leur non-insertion. Pour ces dernières, 13

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Ministère de la Famille, de la Femme et des Affaires sociales, Document de la Politique nationale sur l’égalité des chances, l’équité et le genre, DEPG, Abidjan 2009 (a).

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plusieurs difficultés d’insertion se rapportant au regard que la société porte à la femme ont été relevées. Ainsi, certaines sont confrontées à des chantages sexuels parce que la femme est vue comme objet sexuel. Les femmes insérées n’échappent non plus à ce chantage sexuel. Elles en ont parfois été l’objet durant la quête de leur emploi et même une fois en activité ; certaines enquêtées ont cité des cas de connaissances qui en ont été victime dans leur emploi. (Les propositions indécentes de patrons à l’égard des salariées, de douaniers, de transporteurs à l’égard des commerçantes...). D’autre part, c’est la politique nationale de l’éducation et de l’emploi à l’égard des femmes qui est en partie mise en cause. En effet, pour ces dernières, l’Etat n’offre pas assez de possibilités d’emploi aux femmes. En ce qui concerne la politique de l’emploi, il ressort de la DGE (Direction générale de l’emploi) que l’Etat de Côte d’Ivoire ne disposait pas d’outils de projection en termes de loi d’orientation, malgré les plans quinquennaux développés durant les deux premières décennies après l’indépendance du pays. L’objectif majeur était l’accroissement du rythme de la création d’emploi. Cette politique a reposé sur deux stratégies : la première a fait du développement de l’activité économique et précisément du secteur industriel, le moteur de la création d’emplois ; la deuxième s’est appuyée sur des mesures spécifiques visant à faire face aux problèmes structurels rencontrés sur le marché du travail. Concernant la question spécifique de la femme, sa prise en compte dans les politiques et interventions étatiques n’a commencé à se faire de manière sensible qu’à partir de la ratification, la signature et l’adhésion à plusieurs instruments internationaux, régionaux et sous-régionaux relatifs à la démocratie, aux droits de l’homme et au genre. En effet, ce n’est qu’après les conférences internationales comme que la conférence de Beijing que la Côte d’Ivoire a élaboré de véritables plans de développement intégrant la notion du genre. Par ailleurs, l’élaboration d’une nouvelle législation relative à un nouveau système de financement a conduit à la création de caisses d’épargne et de crédits dits adaptés aux besoins des populations féminines : COOPEC, CADEFINANCE, OIKOCREDIT. Durant la période de crise (2002-2010), diverses actions ont été menées pour octroyer des fonds d’aide à des femmes considérées comme victime de la guerre afin de leur permettre d’entreprendre ou de renforcer leurs activités professionnelles. En effet, la dégradation de la situation économique des populations s’est encore accentuée avec les dernières crises que le pays a connues à partir de la crise militaro-politique de 2002. La crise de l’emploi consécutive aux effets directs et indirects de la guerre et les modifications du système productif ont engendré une montée du chômage, une précarité de l’emploi et une forte croissance du sous-emploi, d’où le renforcement de l’emploi informel notamment en milieu urbain (AGEPE, 2008)14. Dès lors, l’insertion des femmes sur le marché de l’emploi s’est avérée plus difficile dans un contexte de précarité de l’emploi. 6.1.3 Le niveau d’éducation et l’insertion sur le marché de l’emploi Cette section présente l’interrelation entre le niveau d’éducation et l’insertion des femmes sur le marché du travail. Sur la base des données secondaires, le tableau 2.3 ci-dessous donne la répartition des femmes selon le niveau d’éducation et le segment du marché du travail dans lequel elles exercent. Les statistiques concernant les hommes sont aussi présentées à titre de comparaison. Tableau 2.3 Insertion sur le marché du travail et éducation selon le genre Proportion des individus selon le secteur d’emploi et le niveau d’éducation(en %) Secteur d’emploi

Hommes

Femmes

Analphab.

Prim.

Second.

Sup.

Analphab.

Prim.

Second.

Sup.

Sans E.

41,67

22,22

27,78

8,33

50,00

28,75

18,75

2,50

Privé

22,70

17,24

39,80

20,26

26,51

23,26

32,56

17,67

Public

8,82

7,35

44,61

39,22

12,64

6,90

45,98

34,48

Informel

41,68

28,41

25,9

4,32

49,92

32,26

16,09

1,74

Source : auteurs à partir des données secondaires

Les résultats montrent par exemple que 49,92% des femmes qui exercent dans le secteur informel sont analphabètes, 32,26% ont un niveau d’étude primaire, 16,09% ont un niveau d’étude secondaire et seulement 1,74% ont un niveau d’étude supérieur. De même, parmi les femmes sans emploi, seulement 2,50% ont un niveau d’étude supérieur. Les femmes ayant les niveaux secondaire et supérieur d’étude sont plus insérées dans le secteur formel (public ou privé). 14

Rapport de situation de l’emploi à Abidjan en 2008

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Au niveau des enquêtées, l’analyse des données primaires montre que les femmes scolarisées insérées sont réparties dans les secteurs formel (public, privé) et informel, dont 40% qui exercent un emploi formel privé ou public (respectivement 30% et 10%). Seulement 10% d’entre elles exercent dans le secteur informel. Les insérées dans le secteur privé ont les niveaux d’étude les plus élevés (BTS, Licence, DESS, DUT). Il est à noter que les femmes scolarisées insérées (FSI) de niveau supérieur se retrouvent toutes dans le secteur privé, tandis que nous retrouvons dans le secteur public et informel les femmes ayant un niveau d’éducation primaire et secondaire. En ce qui concerne les femmes non scolarisées insérées (FNSI), le secteur informel constitue la principale opportunité d’insertion. Aucune de ces femmes n’exerce un emploi formel. D’une part, l’administration publique qui recrute par concours exige un niveau scolaire minimum qui exclut d’office les non scolarisées. D’autre part, les exigences du secteur privé en termes de compétitivité réduisent fortement les chances des femmes non scolarisées de pouvoir s’y insérer. Les moyens dits officiels à savoir les concours, les tests, les stages et l’évaluation des compétences sur le terrain constituent les principaux modes d’insertion professionnelle des femmes scolarisées. Quant aux femmes non scolarisées, la détention d’un capital financier constitue le principal mode d’insertion. Etant défavorisées par défaut de scolarisation, les emplois de type moderne ne leur sont pas accessibles. Ces résultats tendent à montrer qu’il existe une relation forte entre le niveau d’instruction des femmes et leur insertion sur le marché du travail. L’analyse qui suit essaie d’établir cette relation de façon plus empirique. 6.2 Analyse empirique du lien entre éducation et participation des femmes au marché du travail Le rapport existant entre l’éducation et la participation au marché du travail sera présenté selon deux approches : une approche quantitative et une autre qualitative. 6.2.1 L’approche quantitative : l’analyse économétrique Pour établir le lien entre l’insertion des femmes sur les différents segments du marché du travail et leur niveau d’éducation, le modèle logistique multinomial sera utilisé pour un échantillon de 1 539 femmes résidant à Abidjan. En plus de la variable « Niveau d’éducation », d’autres variables expliquant la participation des femmes au marché de l’emploi (Statut matrimonial, Age, Niveau de vie, Enfants de moins de 5 ans, etc.) sont ajoutées à l’analyse afin d’améliorer le pouvoir explicatif du modèle. Le tableau 2.4 ci-dessous présente les résultats de la régression logistique multinomial avec comme variable explicative (variable dépendante) « Insertion sur le marché du travail » considérée ici comme une variable catégorielle avec 4 modalités : sans emploi, emploi dans le secteur public, emploi dans le secteur privé, emploi dans le secteur informel. Les résultats concernant la variable explicative « Niveau d’éducation » sont exposés et analysés. L’échantillon est réduit ici aux femmes vivant à Abidjan et ayant 15 ans et plus. Tableau 2.4 Résultat de la régression logistique multinomial (n = 1539) Variable dépendante : Insertion sur le marché du travail Variables explicatives

Sans emploi

Secteur privé

Secteur public

Secteur informel Référence=Secteur privé

Référence=Secteur informel Niveau d’éducation Analphabète Primaire

Secondaire

Supérieur

Reference

Reference

Reference

Reference

-0,055

0,322

0,085*

-0,322

(0,839)

(0,119)

(0,087)

(0,119)

0,162

1,313***

2,557***

-1,313***

(0,608)

(0,000)

(0,000)

(0,000)

0,354

2,918***

4,428***

-2,918***

(0,640)

(0,000)

(0,000)

(0,000)

Pseudo R2

0,256

0,272

Note : les valeurs entre parenthèses sont les P-value. *** significatif à 1%, * significatif à 10%

Ces résultats montrent les relations (positives ou négatives) qui existent entre le niveau d’éducation des femmes et leur orientation sectorielle sur le marché de l’emploi. Le pouvoir explicatif du modèle est bon avec pseudo R2 supérieur à 25%, ce qui est une valeur acceptable pour les modèles qualitatifs comme celui-ci. 94

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Les interprétations seront fondées sur deux modalités : « secteur informel » pour la variable dépendante et « analphabète » pour la variable explicative. Ainsi, les résultats montrent que le niveau d’éducation n’a pas d’impact significatif sur la probabilité pour une femme d’être sans emploi. Par contre, il existe un effet fortement significatif (à 1%) et positif du niveau d’éducation de la femme sur son orientation sectorielle dans le privé. En effet, les résultats révèlent que le fait d’avoir un niveau secondaire ou supérieur (en comparaison aux femmes analphabètes) accroit la probabilité pour une femme d’exercer un emploi dans le secteur privé. Nous n’avons cependant pas trouvé de relation significative entre le fait pour une femme d’avoir un niveau d’étude primaire et son insertion dans le secteur privé. En ce qui concerne le secteur public, nos résultats laissent apparaître un impact significatif et positif des différents niveaux d’éducation sur la probabilité pour une femme de s’insérer dans le secteur public par rapport aux femmes analphabètes. L’analyse de l’insertion dans le secteur informel se fera en prenant le « secteur privé » comme modalité de référence. Les résultats montrent que le fait pour une femme d’avoir un niveau d’étude secondaire ou supérieur (en comparaison aux femmes analphabètes) diminue la probabilité pour celle-ci de se retrouver dans le secteur informel plutôt que dans le secteur privé. 6.2.2 L’approche qualitative : les motivations des enquêtées Selon les enquêtées, l’éducation est un élément fondamental d’insertion professionnelle, mais ne constitue pas en soi un frein à la participation active au marché du travail. Les femmes enquêtées lient directement la scolarisation à l’insertion sur le marché du travail. Le rapport de causalité direct qui est établi entre la scolarisation et l’insertion socioprofessionnelle a atteint un tel niveau d’ancrage qu’à la question de savoir comment améliorer la participation des filles et des femmes au marché du travail, certaines enquêtées (FSNI) et (FNSNI)) répondent par la scolarisation. Pour les enquêtées, la femme scolarisée a davantage de chances de trouver du travail. Avec son diplôme, elle a l’espoir et l’assurance d’avoir du travail ou d’avoir une connaissance pour l’aider à trouver du travail. Une FSI traduit cela en ces termes « La scolarisation m’a permis d’avoir une orientation dès la base pour avoir un emploi, de m’affirmer, la satisfaction d’avoir appris quelque chose ». Cette position, qui est aussi celle développée par les théoriciens du capital humain, soutient que par l’éducation l’homme acquiert et accumule un ensemble de connaissances générales ou spécifiques, un savoirfaire, etc., qu’il peut valoriser sur le marché du travail. A la question de savoir pourquoi avoir opté pour tel ou tel type d’emploi, les réponses formulées par toutes les catégories d’enquêtées ont mis en rapport le type d’emploi qu’elles exerçaient avec leur formation ou leur niveau de scolarisation. Pour les FSI, l’itinéraire et l’insertion professionnelle se sont faits sur la base 15

des connaissances acquises par l’éducation. Ainsi, une spécialiste en dactylographie-informatique n’a exercé que dans les métiers où s’utilisent ces outils (agent d’identification, dactylographe, etc.). Ou encore, une diplômée en assurance et gestion n’a exercé que dans des sociétés d’assurance en tant que responsable de département ou de directrice. Pour les FNSI exerçant des « petits métiers » dans le secteur informel, deux réponses ont été formulées : le défaut de scolarisation et de formation spécifique ne permet pas de prétendre à un autre type d’emploi. Pour certaines, ces petits métiers constituent en quelque sorte des « maux » et la seule voie d’insertion professionnelle auxquels les exposent ce handicap scolaire : Ainsi, exercer l’un de ces métiers est l’expression d’un moindre mal : « Quand tu n’es pas allée à l’école là qu’est- ce que tu peux faire ? C’est travail comme ça-là (la couture) ». [Extrait d’entretien FNSI à Abobo]. Pour d’autres, c’est l’expression d’une volonté manifeste de travailler. Et la diversité des métiers du secteur informel leur offre autant d’opportunités de s’insérer soit par vocation, soit en fonction de leurs aptitudes personnelles : « Quand tu veux travailler, tu regardes ton niveau et puis le travail que tu peux faire et puis tu choisis. Moi j’ai regardé et j’ai vu que c’est ça (employée de maison) que je pouvais faire et puis j’ai décidé ». [Extrait d’entretien FNSI à Yopougon]. Au regard de ce qui précède, la scolarisation n’est pas forcément un facteur d’insertion. Etre active sur le marché du travail nécessite que les femmes mobilisent d’autres compétences liées à leurs qualités intrinsèques. Il s’agit entre autres de la volonté de lutter contre la pauvreté. La volonté qui se présente comme une démarche individuelle de s’insérer et de s’adapter n’est pas réductible au simple désir. Elle doit permettre à la femme d’être active et non passive. Cette ressource et la détention d’un capital financier contribuent efficacement à l’insertion des femmes non scolarisées dans le secteur informel qui offre de nombreuses opportunités d’emploi du fait de la diversité des activités et des professions (petits métiers et services). L’enjeu est de parvenir à se prendre en charge et à parvenir surtout à l’autonomie financière par le travail. Comme l’exprime une femme FNSI : « Je me bats comme ceux qui sont partis à l’école. Je m’habille, je peux payer mon pagne hollandais15, je suis fière de moi. Je ne sais pas lire c’est tout. Je peux conduire même si je ne suis pas partie à l’école ». [Extrait d’entretien FNSI à Cocody]. 6.3 Les facteurs d’insertion et de non-insertion Différents facteurs influencent l’insertion ou la noninsertion professionnelle des femmes. Le premier qui est au fondement de toutes les stratégies et actions des acteurs reste l’idéologie relative à la place de la femme dans la société. 6.3.1 Le facteur idéologique La représentation sociale des rôles de la femme en Côte d’Ivoire

Pagne hollandais : qualité supérieure de tissu wax porté par les femmes d’Afrique noire occidentale

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La Côte d’Ivoire est un pays à majorité rurale (59% de la population totale)16 où l’idéologie dominante sur la place de la femme dans la société est l’idéologie traditionnelle qui situe la femme dans certains rôles (de production, de reproduction et de collectivité) et la présente comme inférieure ou subordonnée à l’homme. Ainsi, autrefois en Afrique, les cycles d’initiation accueillaient séparément les filles et les garçons. En fonction des régions, les rituels pouvaient changer, mais la constante demeurait les rites de passage. A l’issue de chaque cycle, les fillettes et les garçonnets franchissaient des étapes vers la majorité sociale. Les filles devenaient des adolescentes. Elles subissaient alors les rituels liés à la fécondité et à la procréation. Elles étaient ensuite données en mariage. Tous ces rites se passaient dans le cadre balisé de l’initiation qui était une école à part entière puisque l’on apprenait au cours de cet apprentissage les vertus morales, sociales et spirituelles qui faisaient des filles et des garçons des citoyens à part entière. De nos jours, l’école a remplacé les camps de formation dans les forêts ou les bois sacrés. L’introduction de l’éducation dans la société ivoirienne a quelque peu bouleversé le rapport de la femme au travail. Un retour en arrière de quelques décennies nous fait comprendre que la représentation sociale de la femme accomplie s’est passablement transformée. Dans les années 50, cette image était plutôt celle de la ménagère qui reste au foyer pour élever les enfants. La femme dans la société ivoirienne d’alors est perçue selon l’image de la construction sociale coutumière ou culturelle générale donnée à la femme : une représentation sociale qui la présente comme la subordonnée de l’homme. Les représentations sont un savoir commun à un groupe et comme le souligne Jodelet (1994) : « Une forme de connaissance socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique et concourant à la construction d’une réalité commune à un ensemble social ou culturel »17. En conséquence, c’est à partir des deux processus qui permettent à la représentation sociale de fonctionner que va se mettre en place le système du rapport à la femme. En effet, par le processus d’objectivation qui regroupe et agence les images et les idées sur la femme et par celui de l’ancrage qui correspond à l’enracinement de ce schéma dans la mentalité collective, une identité sociale sera donnée à la femme avec des rôles, des fonctions, des attentes, des droits et devoirs, etc. Dans cette logique, la femme est placée sous la tutelle de l’homme et ses droits sont automatiquement différents de ceux des hommes. Cette image de la femme et le rapport à celle-ci va connaitre une évolution dans le temps. De nos jours, la femme s’insère dans tous les milieux sociaux et l’éducation apparaît comme la voie privilégiée 16

DSRP, 2009

17

Denise Jodelet et al., Les Représentations sociales, Puf, 1994.

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de cet apprentissage de rôle, de déconstruction et de reconstruction de la femme et de son rôle économique dans la société. En effet avec la scolarisation et le développement des idéologies relatives au genre, la société adhère à l’idée selon laquelle elle est composée d’hommes et de femmes qui sont appelés à cohabiter, à collaborer et à échanger sur tous les plans18. Ainsi, dans la vision moderne et actuelle de la femme, celle-ci est présentée comme l’égale de l’homme en termes de compétence intellectuelle19. Ainsi, l’idéologie traditionnelle se trouve confrontée à une idéologie venue de l’extérieur qui entre en conflit avec celle de l’intérieur, conflit qui se ressent dans la mise en œuvre des stratégies étatiques. L’idéologie venue de l’extérieur Les programmes et plans d’action mis en œuvre par les ministères et relatifs au genre s’inscrivent dans le cadre des conventions internationales et sont donc des visions et des orientations venues de l’extérieur et non de l’intérieur. Nous avons par exemple la Résolution 132520 sur les femmes, la paix et la sécurité adoptée par le conseil de sécurité des Nations unies le 31 octobre 2000. Bien que l’Etat ivoirien ait adhéré au principe, élaboré un plan d’action et décidé de sa mise en œuvre pendant la période 2008-2012, il faut dire que le bilan actuel reste mitigé21. Cependant, si l’on considère que tout développement ne peut être effectif que s’il est endogène, le même principe pourrait s’appliquer aux orientations. Dans la mesure où les idéologies n’émanent pas d’une volonté politique interne, mais semblent remplir des obligations internationales, leur réalisation pourrait rencontrer des difficultés sur le terrain. Ce facteur agit de manière transversale dans toutes les stratégies et les actions mises en œuvre par les différents acteurs intervenant dans le système éducatif (Etat, parents, garçons, filles, etc.) et celui de l’emploi (Etat, populations féminines, etc.). Dans notre enquête sur le terrain, nous avons interrogé des enquêtées qui n’ont pas été scolarisées ou n’ont pas franchi le seuil du cours préparatoire sous l’influence de cette idéologie : parents pas assez sensibilisés sur les questions de genre, parents non scolarisés ou réfractaires, manque de suivi et d’encouragement des enfants par ces derniers, etc. En revanche, celles ayant des parents scolarisés (enseignants par exemple) ont toutes passé le cap du secondaire pour entrer dans celui du supérieur (BTS, Licence, DESS). En dépit des actions menées pour sensibiliser sur l’égalité des genres (loi sur l’égalité des sexes, sensibilisation des populations, distribution gratuite d’ouvrages scolaires,

Michelle Tanon Lora, La scolarisation des filles : Quels avantages pour la société, UVICOCI, CRRAE -UMOA, Abidjan, 2008. Voir les différentes conventions et traités internationaux qui prônent l’égalité de genre, l’égalité des droits. La Résolution 1325 du conseil de sécurité de l’ONU sur les femmes, la paix et la sécurité vise à lutter contre les violences faites aux femmes, à les associer aux processus de négociation et à la de prise de décision en temps de conflit.little to take gender issues into account.

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etc.), des disparités persistent dans le domaine de l’éducation. Certains parents estiment que l’école véhicule des valeurs parfois contradictoires avec les constructions socioculturelles ou éloigne la fille de ses attributs qu’ils jugent naturels : se marier et faire des enfants. 6.3.2 Le facteur éducation Comme l’ont montré les données statistiques, les calculs économétriques ainsi que l’analyse des données primaires, l’éducation a un impact sur le mode d’insertion des femmes. L’éducation influence l’insertion socioprofessionnelle des femmes dans la mesure où elle oriente leurs choix et leurs itinéraires professionnels ainsi que la mise en œuvre de leurs stratégies de recherche d’emploi (demande direct, concours ou réseaux sociaux). Qu’il s’agisse des FSI ou des FNSI, l’orientation professionnelle obéit au même principe qui est celui de s’orienter selon sa formation (ou son manque de formation) et/ou sa vocation. Cela leur permettait de maitriser les paramètres de l’activité et de contrôler les zones d’incertitudes, donc d’avoir un pouvoir dans leur domaine d’activité. Pour l’ensemble des femmes non insérées, c’est le défaut de scolarisation qui est à la base de leur condition sociale, de leur « malheur ». Selon elles, la scolarisation leur aurait donné plus d’opportunités en termes d’insertion sur le marché du travail. Elles auraient donc eu une meilleure connaissance et intelligence des choses, une vision plus éclairée et seraient dans une situation moins réductionniste des choses. A l’analyse, on se rend compte que les personnes recherchent une adéquation entre leur formation de base et le type d’emploi, un rapprochement entre les connaissances théoriques et l’application pratique des choses. Ainsi le rapport de connaissance et d’intimité entre les personnes et leur activité professionnelle augmente le sentiment de maîtrise et de confiance en soi. Cependant, ces orientations restent fortement sexuées. Ce qui tend à expliquer la forte concentration des femmes dans certains domaines d’activité, le secteur tertiaire par exemple comme restauratrice ou vendeuse de produits vivriers. 6.3.3 Les facteurs liés aux politiques étatiques L’analyse de la politique étatique relative à l’éducation, à l’emploi et à l’émancipation socio-économique de la femme nous permet de nous rendre compte que de nombreuses actions ont été menées par l’Etat en direction de la femme et de la petite fille en vue de réduire les disparités de genre et les pesanteurs socioculturelles qui pèsent sur elles (constructions d’école, sensibilisations à l’égalité de genre et de chance, création de cadres institutionnels et des cellules genre, etc.). Ces actions ont été menées en collaboration avec des « partenaires » nationaux et internationaux (ONG, Banque mondiale, FMI, 21

etc.). Ainsi, les femmes et les jeunes filles non scolarisées ou déscolarisées ont par exemple accès à l’éducation sous des formes qui leur conviennent (éducation de base, alphabétisation, cours du jour, cours du soir…), l’accès des femmes à des postes de responsabilité, leur contribution au développement alimentaire au plan national, etc. Cependant, en dépit des progrès susmentionnés, il convient de souligner que l’Etat ivoirien s’investit peu dans la réalisation des objectifs qu’il s’est fixés lors de la ratification des conventions internationales et dans la mise en place de ses plans et programmes d’actions. Il ressort de l’enquête que bien qu’ayant connu des avancées notables, les politiques de l’Etat relatives à la femme ont toujours été influencées par l’idéologie traditionaliste relative à la place et au rôle de la femme dans les sociétés africaines. Cette idéologie qui en général la discrimine au niveau de la gestion politique de la cité et lui confère certains rôles spécifiques, s’est diffusée, selon Oyeronke, avec l’Etat colonial patriarcal (Oyeronke, 1997). En effet, les femmes, infériorisées dans l’idéologie coloniale se retrouvaient en nombre très réduit dans la gestion administrative coloniale comme infirmières. La gestion administrative de la Côte d’Ivoire étant tributaire de l’héritage colonial, les pratiques discriminatoires et les orientations sexistes des femmes dans la gestion des activités professionnelles ont été reproduites. Nous pouvons citer à titre d’exemples l’ouverture de l’école aux filles et leur apprentissage scolaire de la puériculture, la création des IFEF (Institutions de formation et d’éducation féminine) pour les filles non scolarisées et déscolarisées formées à la puériculture, la couture, la cuisine, etc. L’alphabétisation est alors mobilisée par l’Etat patriarcal comme moyen de perfectionnement des tâches ménagères. Ces orientations sexistes se sont tellement développées qu’elles deviennent les choix automatiques d’insertion des femmes non scolarisées et/ ou déscolarisées. Il faut dire que le système éducatif ivoirien est influencé par l’héritage colonial dans son esprit comme dans ses fonctions. En outre, l’évolution de la politique de gestion de l’éducation en Côte d’Ivoire s’est exécutée dans un rapport à l’extérieur. Ainsi, la vision du niveau d’éducation, des catégories à scolariser, de l’organisation entre autres sont recommandées de l’extérieur et exécutées par et/ou l’extérieur22. L’analyse des variables temps, budget et suivi des actions traduisent une insuffisance des actions étatiques qui permettraient de changer la situation. En effet, selon les informations recueillies, le temps mis entre les signatures et l’élaboration des plans d’action est long. Les stratégies sont menées par des programmes à court terme et non par des plans à long terme élaborés à cet effet. Les plans et programmes d’action spécifiques en direction de la femme ne semblent donc pas élaborés en vue de réduire les disparités.

En Côte d’Ivoire, le plan d’action 2008-2012 pour la mise en œuvre de cette résolution devrait s’appuyer sur 4 axes d’interventions : (i) Protection des femmes et des filles contre les violences sexuelles et mutilations génitales ; (ii) Inclusion des questions de genre dans les politiques et programmes de développement, (iii) Participation des femmes et hommes au processus de reconstruction et d’insertion national, (iv) Renforcement des femmes au processus de prise de décision, MFFAS-DEPG, 2008. Cependant, à ce jour, beaucoup reste à faire pour atteindre les objectifs fixés par ce plan d’action. Par exemple, la prise en compte du genre dans les politiques et programmes de développement demeure encore assez faible au niveau des activités des ministères.

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Loin d’exprimer une volonté manifeste de l’Etat ivoirien de maintenir les femmes en situation de dépendance ou encore la crainte de mutations sociales liées à l’indépendance économique des femmes, on pourrait dire que cette situation est tributaire de l’orientation ou de la logique économique qui a sous-tendu la politique nationale de l’emploi depuis l’indépendance. La prise en compte de la question du genre ayant suscité l’intérêt au sortir de conventions comme que celle Jomtiem, les orientations et les priorités n’ont pas été pensées par le pays et sont en conflit avec les idéologies contradictoires relatives à la femme sur le terrain. Les investissements et le système restent fragiles et éprouvent des difficultés à se transformer pour devenir de véritables moteurs de développement. C’est plutôt le nouveau document-cadre de la politique nationale de l’emploi qui intègre bien la question du genre. En effet, les programmes sectoriels conduits par la Direction générale de l’emploi font du genre un des critères de sélection des bénéficiaires (un taux de participation de 40% au profit des femmes est exigé pour chaque projet)23. En outre, le budget affecté par l’Etat pour la promotion de la femme est minime. Au ministère de la Famille, de la Femme et de l’Enfant, le budget 2012 représente 0,08% du budget national. En plus, les cellules genre censées être mises en place dans les différents ministères ne fonctionnent pas faute de budget et de hiérarchie. Le manque de suivi des actions ne permet pas d’évaluer les actions de l’Etat en matière de promotion du genre. Cela se présente donc comme un gaspillage de ressources et contribue à pérenniser les inégalités de genre, tant dans l’emploi que partout ailleurs. 6.3.4 Les autres facteurs significatifs Comme autres facteurs principaux d’insertion et de noninsertion, nous avons identifié d’une part l’utilisation du sexe comme atout de séduction pour la recherche d’emploi ou comme objet de chantage pour l’attribution d’un emploi. Sur ce point, certaines femmes au cours de leur formation ou dans leur quête d’emploi subissent les assauts des hommes et mêmes d’autres femmes. En effet, le phénomène du « chantage sexuel » est une réalité dans les milieux scolaires et professionnels et constitue un obstacle à leur insertion quoique certaines femmes l’utilisent comme arguments pour se positionner socialement. D’autre part, il y a la difficulté d’accès aux financements. A ce niveau, il faut dire que la quasi-totalité des femmes qui ont abordé cet aspect ignorait les voies d’accès à un crédit et les structures existantes à cet effet. Le financement de leurs activités (commerce, etc.) provient pour certaines de leurs économies, pour d’autres, de connaissances ou de « personnes de bonne volonté ». Nous avons également l’ensemble des personnes qui constitue les réseaux de connaissances d’un individu : parents, amis, etc. Il s’agit ici de réseaux sociaux qui facilitent l’insertion sur le marché du travail. Il s’agit 23

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précisément du recours à une connaissance (conjoint, parent, ami, etc.). Le besoin d’aide est souvent mobilisé par les femmes pour augmenter leur chance d’accéder à l’emploi, que ce soit à leur initiative ou à celle de leur entourage : « C’est avec le soutien d’un fiancé libanais et les conseils de ma tutrice vendeuse que j’ai eu l’argent et l’idée d’ouvrir le magasin de pagnes ». [Extrait d’entretien FNSI à Treichville]. Il semble que cette situation ne soit pas particulière aux femmes, mais à la précarité de l’emploi due au nombre croissant de demandeurs et à la situation sociopolitique marquée par des crises successives. Ce que rapporte une FSI chef de service en ces termes : « Les femmes postulent comme les hommes, de manière systématique par la voie normale, c’est-à-dire les concours, les entretiens, les dépôts de courriers dans les entreprises privées, après des stages d’essai, ou encore par recommandation des connaissances. Mais avec la crise de l’emploi, il faut le soutien de quelqu’un pour avoir le boulot, l’intervention prime. Tu peux rester longtemps sur les carreaux si tu n’es pas pistonnée ». [Extrait d’entretien FSI à Abobo]. A ce sujet, les avis divergent. Pour certaines enquêtées, en plus des voies conventionnelles, le recours aux réseaux sociaux est un moyen d’augmenter les chances d’insertion : « Ça dépend, chacune à ses relations, surtout en Côte d’Ivoire. Ici, si tu n’as pas de connaissances, quel que soit ton diplôme, tu ne peux pas avoir de boulot. Même lorsqu’on lance les concours, avant même de dire que l’Etat a lancé, ils ont déjà recruté ». [Extrait d’entretien FSI aide-soignante à Yopougon]. Pour d’autres, c’est une pratique non seulement dévalorisante pour la femme, mais qui réduit aussi les chances des personnes les plus méritantes qui n’ont pas de relation : « Des filles qui étaient nulles pendant la formation, pendant les évaluations elles demandaient comment on fait ci ou ça, sont dans de grandes cliniques. Nous comme ça on est restée à la maison pendant longtemps sans travail ». Cette pratique n’est cependant pas sans risque, car elle expose les femmes à certains abus. « Pour avoir du travail, c’est par l’intermédiaire de quelqu’un ou bien en allant à la source ; mais ce n’est pas facile, souvent les hommes demandent à sortir avec la femme ». [Extrait d’entretien FSI secrétaire à Abobo]. 6.4 Pertinence de l’éducation dans l’émancipation socioéconomique des femmes à Abidjan. Si l’on considère les avantages de la scolarisation, les trois éléments fondamentaux qui ressortent de l’enquête sont : l’intelligence verbale et sociale, l’intégration sociale et l’estime de soi. En effet, la scolarisation est un phénomène qui s’est généralisé de sorte que l’organisation de la société est faite à partir de l’outil fondamental de transmission de l’éducation qui est le langage. Le langage est une forme d’expression de la pensée et de communication entre les hommes, mise en œuvre au moyen d’un système de signes

La Politique nationale de l’emploi (PNE), document adopted 7 June 2012 by the Council of Ministers and designed to create one million jobs for young people by 2015. 22 Akindes F. “Dynamique de la politique sociale en Cote d’Ivoire” in Politique sociale et développement. Document for Programme 8, United Nations Research Institute for Social Development, July 2008.

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vocaux (parole) et éventuellement de signes graphiques (écriture). Cela désigne tout système de signes permettant la communication et une façon de s’exprimer propre à un groupe ou à un individu. Pour les femmes scolarisées, la scolarisation apparait comme un atout d’insertion et de confiance en soi ou un bonus pour faciliter le bien-être social et l’acquisition d’un emploi. A la question de savoir quelle a été la contribution de la scolarisation à l’insertion des enquêtées, une directrice du préscolaire a répondu : « La scolarisation a constitué un atout pour moi en tant que femme. Elle m’a permis de prendre conscience de mes chances, d’être plus indépendante et de subvenir à mes besoins par moi-même et à ceux de ma famille ».[Extrait d’entretien FSI à Cocody]. Pour les enquêtées non scolarisées, par la non-maîtrise du langage et de la langue officielle (le français), elles ressentent une forme d’exclusion sociale dans la mesure où elles ne partagent pas certaines valeurs avec la société dans laquelle elles vivent : elles ne savent « ni lire, ni écrire ». Elles n’ont par conséquent pas l’intelligence verbale et sociale, ce qui provoque une appréhension quand il s’agit de s’exprimer ou de mener une réflexion en public. En outre, qu’elles soient insérées ou non, les femmes non scolarisées ont un problème d’estime de soi dans la mesure où elles se sentent toujours dépendantes des individus instruits : c’est le cas par exemple de Irié Lou Colette en Côte d’Ivoire.

Etude de cas : Irié Lou Colette en Côte d’Ivoire En Côte d’Ivoire, avec le leadership, des femmes analphabètes ont pu contribuer au développement économique et social du pays à travers des initiatives assurant la création de milliers d’emplois pour les femmes et les jeunes. Le cas de Mme Irie Lou Colette en est une excellente illustration. Avec 6 filles et 4 garçons, Colette a évolué dans une famille au sein de laquelle l’éducation des filles n’était pas une priorité. Pour son père, il était inadmissible qu’une fille parte à l’école. Lorsqu’elle s’y est opposée en scolarisant la benjamine des filles, le père l’a menacée de la bannir de la famille. Mariée à un instituteur exerçant à l’intérieur du pays, dans les années 1980, Collette décide de s’investir dans le commerce de vivriers et de poissons du barrage de Kossou. Contrairement au commerce de vivriers, le début de l’activité du commerce de poissons n’a pas été facile, ditelle, à cause de la réticence de la population à consommer le poisson de Kossou. Durant les cinq (5) premiers voyages de ce commerce de Bouaké à Abidjan, elle se rappelle avoir vendu à perte, soit plus de 2 000 000 CFA non recouvrés. A force de persévérance, Colette réussit à imposer le poisson de Kossou qui a fini par être prisé dans les maquis d’Abidjan. Au bord de la lagune à Treichville où elle avait trouvé un dépôt, Colette a développé l’activité de nettoyage de poissons qui a été une source de création d’emplois pour des jeunes filles qui menaient cette activité. En guise d’exemple, elle cite avec fierté l’une de ces filles nettoyeuses de poissons qui a pu avec les revenus de cette activité s’installer en Allemagne où elle mène désormais une activité de vente de voitures entre l’Allemagne et Abidjan. Convaincue que le secteur du vivrier est un instrument efficace de lutte contre la pauvreté des femmes, Colette va s’engager à mettre en place la Fédération nationale des coopératives de vivriers de Côte d’Ivoire (FENACOVICI) qui regroupe à ce jour 1 802 coopératives sur toute l’étendue du territoire ivoirien ; la taille des coopératives est de 50 à 100 membres. La fédération soutient financièrement les coopératives dans la provision d’intrants agricoles aux producteurs et assure également la collecte, la distribution et la commercialisation des produits vivriers pour les coopératives affiliées. Avec l’usine de traitement de riz qu’elle possède désormais à Tiassalé, la FENACOVICI s’est engagée à développer toute la chaine des valeurs de la production vivrière, c.-à-d. de la production à la commercialisation, en passant par la transformation, et a pu assurer la création de milliers d’emplois pour les femmes et les jeunes notamment dans le secteur du vivrier. A titre d’exemple, la Coopérative de distribution de produits alimentaires (CODIPRAL) est passée de 7 à plus de 1 000 membres à ce jour, actifs pour certains, dans le segment de la production et pour d’autres dans le segment de la transformation ou de la commercialisation de vivriers. En termes de perspectives, la FENACOVICI entend réaliser un projet de production contre-saison de tomates, oignons, aubergines, etc. avec un système d’irrigation qui va créer des milliers d’emplois potentiels pour les femmes et les jeunes dans les différentes régions de la Côte d’Ivoire. En effet, par exemple pour la production de tomates il s’agira de faire 22 hectares, soit 40 tonnes à l’hectare, avec une activité de récolte qui va nécessiter 30 personnes par hectare et par jour qui seront rémunérées pour cette activité. Ainsi, même sans être éduquée, Irié Lou Colette a permis à des milliers de femmes et de jeunes en Côte d’Ivoire de lutter contre l’extrême pauvreté et la faim en leur permettant de générer leurs moyens d’existence, de nourrir leurs ménages et de scolariser leurs enfants. Cependant, face aux difficultés de communication, de compréhension et d’interprétation de documents et à l’ensemble des handicaps liés au manque d’instruction, Irié Lou Colette a dû avoir recours à des personnes extérieures, mais aussi investir dans son alphabétisation pour faciliter son intégration. C’est donc dire que même si sans être éduquées, Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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des femmes à l’image d’Irié Lou Colette peuvent prendre une part active au développement économique et social d’un pays à travers des initiatives de création d’emplois, il apparait que l’émancipation socioéconomique des femmes passe nécessairement par l’éducation.

la gouvernance, le processus démocratique et leur permettent ainsi d’influencer les décisions d’orientation politique de leurs nations. Mieux, l’investissement dans l’éducation des femmes est d’une importance capitale et un impératif de développement.

L’éducation se présente ainsi comme une valeur ajoutée dont ont conscience les populations. D’un point de vue physiologique, la femme apparait comme un être vulnérable, mais avec la scolarisation, elle montre qu’elle est intelligente, détient les mêmes potentialités que l’homme. C’est d’ailleurs pour cette raison que les enquêtées scolarisées ainsi que les non scolarisées s’opposent à une attribution d’emploi spécifique aux femmes : « Elles sont dans l’armée, pilote, député, maître de karaté. Je ne vois pas ce que la femme ne peut pas faire ! Il n’y a pas travail de garçon, il n’y a pas travail de femme. C’est nous même on trie ». [Extrait d’entretien FNSNI ménagère à Yopougon]. Certaines se refusent même le rôle exclusif de femme au foyer. Non que le rôle de femmes au foyer soit péjoratif, mais pour elles, toute femme doit exercer une activité elles en plus de la gestion quotidienne du foyer et des tâches ménagères : « La femme peut assurer une bonne gestion des enfants et de la famille. Mais ça ne doit pas être un choix de vie, une obligation pour la femme ». Certaines FSI du secteur privé trouvent dans ce secteur une occasion plus grande d’affirmer cette intelligence, mais aussi de conquérir des postes à responsabilité plus importants et un pouvoir face aux hommes (Responsable de département, de direction).

L’étude a permis de relever différents points de faiblesse relatifs aux représentations sociales sur l’éducation et l’emploi féminins. Elle nous amène à repenser en profondeur les fondements sur lesquels reposent les stratégies des acteurs ainsi que les objectifs et les moyens mis en œuvre à cet effet. Ainsi, en vue de faciliter l’insertion professionnelle des femmes et une meilleure participation au marché du travail, il est important de revoir à la base les fondements idéologiques relatifs aux rôles de la femme dans la société et les moyens mis à sa disposition pour favoriser son émancipation socioéconomique. Pour ce faire, des actions devraient être menées sur les points suivants :

7. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS Cette étude s’inscrit dans le cadre du débat portant sur l’émancipation socioéconomique des femmes. Elle présente de ce fait la répartition des femmes dans les différents segments du marché du travail à Abidjan en fonction de leur niveau d’éducation et analyse les facteurs explicatifs de l’insertion des femmes sur le marché du travail en mettant un accent particulier sur le rôle de l’éducation. Les résultats montrent un fort taux d’analphabétisme parmi les femmes. L’on note aussi que plus de la moitié des femmes à Abidjan ne sont pas insérées sur le marché du travail. Quant à celles qui travaillent, la majorité est insérée dans le secteur informel. En utilisant à la fois les approches quantitative et qualitative, l’étude a relevé les facteurs structurels, idéologiques et symboliques qui influencent l’insertion des femmes dans les différents secteurs d’activité en fonction de leurs niveaux d’instruction. Elle montre aussi le lien étroit qui existe entre le niveau d’éducation des femmes et leur orientation sectorielle sur le marché du travail. En outre, l’étude révèle que l’amélioration du statut socioéconomique des femmes passe nécessairement par l’éducation, le renforcement de la capacité et du pouvoir de décision des femmes, objectif qui ne peut être réalisé que si on assure aux filles et aux garçons les mêmes conditions d’éducation. L’éducation et la qualification donnent plus de chance aux femmes d’accéder à des postes de décisions qui assurent leur implication dans

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• Retravailler l’idéologie relative à la femme Les autorités étatiques, en collaboration avec les mouvements, les associations et les ONG impliquées dans la question de genre devraient consolider et mettre en œuvre des programmes spéciaux sur la formation au genre. Au niveau national et de manière renouvelée, des campagnes de sensibilisation avec l’appui des médias seront alors menées auprès des populations ciblées (femmes, hommes, parents, filles et garçons, etc.) en vue d’un changement de mentalité et d’une réduction des conflits idéologiques. Cela devrait favoriser l’éradication des préjugés à l’égard de la scolarisation des filles et libérer les filles des pesanteurs économiques ou socioculturelles quant à leurs orientations sectorielles / participation au marché du travail. Cette recommandation ne peut être réalisable que si les acteurs (Etat, mouvements, associations et ONG) s’approprient véritablement l’idéologie de l’égalité de genre. • Donner une base éducative à la fille et la femme Sur ce point, il faudra d’une part faire de l’Education pour Tous (EPT) une réalité en vue de réduire les écarts et les inégalités entre les filles et les garçons et lutter contre l’analphabétisme des femmes. Ainsi, l’Etat doit permettre d’estomper les réticences liées à la scolarisation des filles en réduisant, en plus des obstacles idéologiques, les obstacles économiques des parents et ceux liés aux infrastructures. A cet effet, l’Etat est invité à renforcer sa politique de l’école gratuite, obligatoire et de bonne qualité en rendant effective sur tout le territoire national la suppression des frais de scolarité, la distribution de kits scolaire notamment aux filles ainsi qu’en renforçant les capacités humaines et pédagogiques. Il faut également mettre l’accent sur les zones rurales et les centres périurbains pauvres en construisant des établissements de proximité avec des internats pour améliorer les conditions d’apprentissage et de scolarisation. En outre, il est important de développer la culture de l’excellence


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auprès des filles en poursuivant les initiatives telles que le concours « Miss Mathématiques24 » en vue d’accroitre l’espérance de vie scolaire et le taux de transition chez les jeunes filles. D’autre part, il est important d’amener les femmes qui entreprennent dans l’informel ou celles qui ont une compréhension limitée d’un texte simple à un niveau d’alphabétisation acceptable et à une comptabilité simple pour un meilleur suivi de leurs comptes. Pour ce faire, l’Etat pourrait organiser dans chaque quartier, avec l’aide de bénévoles, des séances de formation à l’intention de ces femmes. Ces bénévoles qui seront eux-mêmes formés par les structures étatiques pourront à leur tour donner les formations en alphabétisation, en comptabilité et en genre. • Développer véritablement des politiques d’égalité de genre Dans cette optique, l’Etat devrait financer régulièrement des enquêtes (sociologiques et économiques) afin de permettre la mise à jour des indicateurs en matière d’emploi et d’éducation. La disponibilité de données et statistiques fiables orientera ainsi les programmes de développement et les éventuelles mesures correctives. Cette recommandation doit amener les autorités à revoir la représentativité de la femme autant dans les instances de décision que dans le budget alloué aux ministères et aux structures chargés de la promotion de la femme afin d’opérer un meilleur ajustement. L’installation ou le renforcement des cellules genre au sien de chaque ministère et de toutes les entreprises privées est également à encourager. Il est aussi important de permettre aux cellules genre de fonctionner correctement en leur allouant un budget et en les rendant autonome. • Reverser des indemnités aux femmes pour les aides de maison A ce niveau, il conviendrait d’alléger le travail des femmes insérées en leur versant des indemnités pour des aides qui s’occuperaient de leur maison pendant qu’elles seront au travail. Cela allègerait le travail de ces femmes qui sont souvent amenées à s’investir de manière combinée autant dans le travail domestique que dans l’activité génératrice de revenus. Pour les femmes non insérées, cette indemnité devrait également leur être reversée dans la mesure où leur temps de quête d’émancipation économique est consacré aux travaux domestiques. Ceci devrait, sur le plan socioéconomique, soutenir une relative autonomie financière en réduisant leur dépendance économique.

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• Suivi des actions menées et états du terrain Les actions menées, que ce soit dans le domaine de l’éducation ou de l’emploi, visent des objectifs et nécessitent une mobilisation de ressources. En vue d’actions efficaces, il est nécessaire de mener un contrôle des actions entreprises afin de vérifier leur impact sur le terrain. Il est donc important d’inclure dans les plans et programmes d’actions, un dispositif de suivi-évaluation qui permettrait de rendre compte des étapes franchies, des obstacles à surmonter et des défis à venir. L’Etat pourrait ainsi mettre en place une structure autonome chargée spécialement de la question du suivi-évaluation. • Faire la promotion des structures de soutien à l’insertion professionnelle Il s’agit ici de faire connaitre d’une part les établissements publics et privés de placement, de formation et de promotion de la main d’œuvre (AGEP, AGEFOP, CIFIP, etc.), mais également ceux qui soutiennent l’initiative privée (FSN, CEPICI, etc.). • La mobilisation des acteurs Les acteurs interpellés ici sont l’Etat, les parents, les femmes, les filles ainsi que toutes les couches sociales pour un changement de mentalités et de pratiques en vue de garantir l’émancipation socioéconomique des femmes : • L’Etat, pour une meilleure intégration de l’égalité de genre en vue de mener véritablement des actions stratégiques et de grande envergure auprès des populations cibles ; • Les parents, pour une meilleure prise de conscience de leur rôle dans l’émancipation socioéconomique des filles à travers leur suivi scolaire et les encouragements qu’elles recevront ; • Les femmes, pour un engagement véritable qui les rendra plus actives dans la lutte pour leur émancipation socioéconomique. Cela devra conduire à des initiatives en matière d’apprentissage et à des stratégies pour s’insérer sur le marché du travail ; • Les filles pour une sensibilisation aux normes et valeurs sociales ainsi qu’aux avantages de la scolarisation. Il s’agit aussi et surtout de les amener à la prise de conscience du rôle qu’elles peuvent jouer dans la société ivoirienne et les encourager à la persévérance évitant ainsi les voies de la facilité qui les rendront plus vulnérables ; • Toutes les couches sociales pour une synergie des actions qui doivent converger vers l’émancipation socioéconomique de la femme et par conséquent réduire le niveau de pauvreté chez la femme.

C’est un concours organisé par la Société Mathématique de Côte d’Ivoire (SMCI) dont l’objectif est d’encourager les jeunes filles à s’intéresser aux matières scientifiques.

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Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Éducation (ROCARE)

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La femme sénégalaise a toujours été d’un apport considérable dans les activités de développement de sa cité. Mais, le manque de formation qualifiante de la femme constitue un énorme frein à son autonomisation et à sa productivité.

Genre, insertion dans le marché de l’emploi et impacts socio-économiques des formations professionnelles dispensées à Dakar

RÉSUMÉ Ce travail est une recherche en genre menée sur des diplômé(e)s en Brevet de Technicien Supérieur (BTS) du sous-secteur de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle (ETFP) issus de deux structures de formation, différentes par leurs conditions sociales, économiques et pédagogiques de Dakar : le groupe Saint-Michel, école privée, et le Centre de Formation Professionnelle et Commerciale (CFPC), école publique. Menée à deux niveaux, l’étude s’est chargée, dans un premier temps, d’analyser les forces, les faiblesses, les opportunités et les menaces des sortants de ces deux écoles, face aux défis du marché de l’emploi. Dans un second temps, il s’est agi de mesurer les impacts économiques et sociaux de la formation sur la vie des diplômés qui se trouvaient en situation d’activité professionnelle au moment de l’enquête, avec une mention particulière pour les femmes. L’étude a révélé d’abord que les filles, d’emblée plus nombreuses à s’inscrire dans les filières du BTS de Saint Michel et du CFPC, trouvent plus facilement un emploi dans le secteur tertiaire que leurs promotionnaires hommes, en raison de qualités telles que l’engagement, la minutie, la passion du travail, en plus de leurs compétences démontrées dans leurs domaines. Aux plans économique et social, les femmes, en plus de leurs fonctions de production et de reproduction, sont en train d’apporter des mutations non négligeables dans la gestion dans la communauté et le développement, grâce à une contribution plus importante et plus attendue dans les dépenses et les décisions majeures.

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1. INTRODUCTION ET CONTEXTE Le contexte mondial actuel, marqué par de profondes mutations socio-économiques, pousse de plus en plus les Etats à adapter leurs systèmes éducatifs aux objectifs et priorités majeurs que la communauté internationale s’est fixés à l’horizon 2015, dont l’Education Pour Tous (EPT). Dès lors, les jeunes filles et garçons devraient bénéficier, sans discrimination, des mêmes chances d’accès aux chemins de la connaissance et de l’apprentissage tout au long de la vie, puis de l’insertion professionnelle. L’intérêt porté ainsi sur l’éducation, plus particulièrement sur celle des filles suivant une approche genre, a permis, selon le Rapport mondial de suivi sur l’EPT de 2010, une participation croissante des filles et des femmes à tous les niveaux du système éducatif. Concernant l’alphabétisme, qui constitue un bien-être social et économique essentiel des adultes, mais aussi celui de leurs enfants, on note que sur les 775 millions d’adultes incapables de lire ou d’écrire dans le monde, plus d’un cinquième se trouvaient en Afrique subsaharienne en 2010. Ainsi, « 140 millions d’adultes en Afrique subsaharienne sont dépourvus des outils d’apprentissage de base permettant de prendre des décisions éclairées et de participer pleinement au développement de leurs sociétés » (UNESCO, 2006, p. 1). Il apparait également qu’au niveau de 81 des 146 pays disposant de chiffres pour la période 2005-2010, l’analphabétisme touche plus les femmes que les hommes (UNESCO, 2012). Graphique 2.1 Comparaison internationale du taux d’alphabétisation

49.7

Lybie Guinée équato Tunisie Afrique du sud Gabon Cap-vert Congo Ghane RDC Nigeria Maroc Mauritanie Côte d’Ivoire RCA Togo Guinée Bissau Sénégal Gambie Bénin Guinée Tchad Burkina Faso Mali

100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0

Source : Rapport PNUD 2011

Le Sénégal est caractérisé entre 2005 et 2010, selon UNESCO (2012), par un taux d’alphabétisation des adultes de 50%. Durant cette même période, le Sénégal semble, à part la Gambie qui affiche 50%, faire mieux que d’autres pays de la Communauté Des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CDEAO) comme le Niger (29%), le Burkina Faso (29%), le Mali (31%), la Guinée (41%), la Sierra Leone (42%), ou encore le Bénin (42%). La réalisation de la parité et de l’égalité entre les sexes dans l’éducation constituant un droit humain élémentaire et un moyen important d’améliorer d’autres résultats socio-économiques, 68 pays sur les 164 concernés par les objectifs de l’EPT n’ont pas encore réalisé la parité entre les sexes dans l’enseignement primaire. Aussi, 1

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la plupart de ces pays présentent-ils des disparités substantielles entre les sexes en matière d’alphabétisme. A ce propos, l’indice de parité entre les sexes (IPS)1 est inférieur à 0,50 au Bénin, au Burkina Faso, au Mali, au Niger et au Tchad, qui figurent tous aussi parmi les pays aux taux d’alphabétisme d’ensemble les plus bas. Le Sénégal, par contre, a fait des progrès extraordinaires (UNESCO, 2012). En effet, l’IPS dans le primaire est passé au Sénégal, de 1,01 en 2004 à 1,07 en 2008 ; ce qui reflète les profondes modifications, en faveur des filles, intervenues dans la composition des effectifs (Diagne, 2012). On note également, dans les enseignements moyen et secondaire, une meilleure représentativité des filles dans les effectifs. L’enseignement supérieur, enfin, ne fait pas exception dans l’accroissement du nombre de filles dans ses effectifs. En effet, au niveau de cet ordre d’enseignement, les étudiantes sont passées de 30,6% en 2005, à 35,3% trois ans plus tard. (ibid.) En résumé, si on raisonne en termes d’indice de parité entre les sexes (IPS) pour apprécier la contribution relative des filles à l’effort global de scolarisation, on constate que des progrès remarquables ont été réalisés au Sénégal vers l’objectif de la parité des sexes. Au Sénégal, les statistiques de 2010 indiquaient une population de 12.509.434 habitants, dont l’âge médian est de 17 ans. Une analyse basée sur le genre fait voir rapidement un nombre très important de femmes, surtout en âge fécond, avec 47,2% de Sénégalaises âgées entre 15 et 49 ans. En 2010, l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) signale, en outre, un coefficient de dépendance particulièrement élevé (89,5%), traduisant le rapport entre l’effectif de la population d’âges généralement inactifs (moins de 15 ans et personnes âgées de 65 ans ou plus) et l’effectif de la population en âge de travailler, c’est à dire (1564 ans). Cette situation sociale a, naturellement, des répercussions négatives sur bien des aspects de la vie tels que l’emploi et la formation. En plus, entre 2005 et 2006, l’Enquête de Suivi de la Pauvreté au Sénégal (ESPS) menée par l’ANSD, nous renseigne que le taux d’analphabétisme serait de 47,9% chez les hommes et 67,1% chez les femmes. En 2004, le Ministère de l’Economie et des Finances (MEF, 2004) nous renseignait qu’à Dakar, la capitale du Sénégal, le taux d’activité global était de 51,1% et que des variations de ce taux étaient également notées suivant le genre et l’âge des actifs. En effet, le taux d’activité des hommes était de 62,1% contre 41,1% pour les femmes. Ces dernières, qui représentent la majorité de la population, sont ainsi moins représentées et souvent impliquées dans des activités marginales et faiblement rémunérées. Toutefois, signalons que leur taux brut d’activité, qui gravitait autour de 34% au milieu des années 70, a connu une forte progression en atteignant les 41,1% en 2005 (Brilleau, Roubaud & Torelli, 2005). A l’instar de tous les pays du monde, le Sénégal dans la perspective d’atteindre les objectifs de l’EPT, tentera

L’Indice de Parité entre les Sexes est égal au rapport entre le TBS des filles et celui des garçons.

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aussi d’adapter son système éducatif aux objectifs et priorités majeurs que la communauté internationale s’est fixés, en activant son secteur de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle (ETFP). D’autant que, selon la Conférence des Ministres de l’Education des pays ayant le français en partage (CONFEMEN,1999), l’EFTP a permis de former, au cours des premières décennies qui ont suivi les indépendances en Afrique, un grand nombre de cadres et la main-d’œuvre qualifiée dont avaient besoin les pays francophones. En 2010 au Sénégal, le Ministère de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle (METFP, 2010) nous apprend que le sous-secteur de la formation professionnelle compte 213 structures en 2010, dont 70 publiques (33%) et 143 privées (67%). Concernant les effectifs des apprenants, ils sont passés au Sénégal de 32 868, en 2007, à 37473, en 2010, (METFP, 2010). Ainsi, de 2006 à 2010, les filières de l’ETFP au Sénégal sont assez bien demandées, avec une présence plus prononcée des femmes (19 524). 2. ÉNONCÉ DE LA PROBLÉMATIQUE Selon Ministère de l’Economie et des Finance (MEF, 2004), la région de Dakar s’étend sur une superficie de 550 km2 (0,3% du territoire national) et abrite environ un quart de la population du Sénégal. En septembre 2002, la population de l’agglomération urbaine de Dakar, renseigne MEF (2004), été estimée à 1 905 600 habitants avec 51,5% de femmes. La femme sénégalaise et africaine, en général, a toujours été d’un apport considérable dans les activités de développement de sa cité dans des secteurs de développement comme les services, l’industrie légère ou encore l’agroalimentaire. Mais, le manque de formation qualifiante de la femme constitue un énorme frein à son autonomisation et à sa productivité, dans la mesure où il est généralement admis que « les ressources humaines qualifiées aux standards internationaux, peuvent contribuer à inciter les entreprises à se développer et à se moderniser. » (M.E.T.F.P.A.L.N., 2002). Toutefois, le Sénégal, suite aux Assises de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle (ETFP) en 2001, qui ont dessiné les grandes orientations de développement des ressources humaines, se trouve dans une phase décisive de redéfinition d’une nouvelle politique de l’ETFP. En effet, l’accès des femmes aux filières de l’ETFP, surtout à celles menant au secteur tertiaire, en ce que cela relève le taux de qualification professionnelle, constitue, a priori, un puissant moyen de stabilité sociale, mais également un levier sûr de développement économique et social. Mais il convient de se demander si les diplômé(e)s de l’ETFP satisfont le marché de l’emploi, en termes de quantité et de conformité avec les besoins réels en main-d’œuvre. A ce sujet, la population sénégalaise active entre 2001 et 2002 s’élevait à trois millions de personnes, d’après Walter (2006). Ainsi, 85,6% environ étaient occupés sur l’ensemble du pays, contre 72,3 % 2

à Dakar. En 2006, METFP faisait remarquer que si l’on estime à 3% le taux annuel moyen de renouvellement de ressources humaines, il faudrait former au moins 20 000 nouveaux ouvriers qualifiés pour la seule agglomération de Dakar, où l’on compte près de 700 000 employés (dont plus de 500 000 appartiennent au secteur informel). D’où l’incapacité actuelle du système de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle à former annuellement autant de ressources. Nous nous demandons alors comment et par quels mécanismes les femmes, qui représentent 19 524 des effectifs inscrits dans le réseau de l’ETFP, parviennent-elles à tirer leur « épingle du jeu » en s’insérant après une formation professionnelle. Quoi qu’il en soit, il doit certainement exister des facteurs plus propices que d’autres, que les diplômé(e)s devraient réunir pour une insertion plus facile dans la vie professionnelle. Par ailleurs, la problématique du devenir des diplômé(e) s de l’ETFP face au monde du travail pose une question d’ « efficacité externe », concept utilisé lorsque l’on cherche à évaluer le rapport entre le nombre d’emplois projetés et le nombre de diplômés occupant effectivement un emploi (Sall et De Ketele, 1997). UNESCO/Pôle de Dakar (2007) nous offre quelques illustrations d’efficacité externe : […] Sur un échantillon de 63 000 individus, identifiés dans l’enquête QUID2, qui ont quitté le système éducatif entre 2000 et 2001, un tiers a pu obtenir un emploi en 2001, 21% étaient en quête d’un emploi, soit un taux de chômage de 40% (le chiffre étant de 48% pour les individus passés par l’enseignement supérieur). Ainsi, pour 40% des sortants du système éducatif prêts à travailler, la durée moyenne de chômage peut excéder 12 mois. (p.3). Cette observation est encore corroborée par un autre constat selon lequel « les difficultés d’insertion qui affectent les jeunes en Afrique concernent plus particulièrement les plus diplômés » (UNESCO/BREDA, 2007, p. 42). Jusqu’à quels niveaux ces constats sont-ils valables ? Ces constats sur la situation de l’ETFP et le marché de l’emploi au Sénégal nous poussent à nous poser la question générale de recherche suivante et les questions spécifiques qui en découlent. 2.1 Questions de la recherche La question générale de la recherche est la suivante : Au Sénégal, le genre détermine-t-il l’insertion dans le marché de l’emploi et les impacts socio-économiques des formations professionnelles et techniques ? Les questions spécifiques sont : 1. Les femmes diplômées des structures de formation professionnelle s’insèrent-elles mieux que les hommes dans le monde de l’emploi, au Sénégal ? 2. L’insertion selon le genre est-elle fonction du type de structure de formation (privé ou public) fréquenté par l’étudiant?

Questionnaire Unifié sur les Indicateurs de Développement

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3. La nature des contrats à l’insertion est-elle liée au genre ? 4. Quel est le niveau des impacts socioéconomiques des formations professionnelles selon le genre ? 3. REVUE DE LA DOCUMENTATION Les principaux thèmes sur lesquels nous nous appesantirons dans cette partie de notre travail sont précisément les trois macro-variables qui sous-tendent cette étude : le thème du genre, que nous aborderons sous l’éclairage du Cadre de Moser ; le thème de l’insertion dans le monde de l’emploi ; le thème des impacts sociaux et économiques. 3.1 Le genre Les femmes peuvent-elles tirer avantage de leur formation pour parvenir à une réelle égalité avec les hommes et dans quelles conditions ? « Le triple rôle des femmes », « les besoins pratiques et les intérêts stratégiques de genre » et « les approches politiques pour une intégration des femmes dans le développement » sont les trois pistes suggérées par Caroline Moser, lorsqu’on réfléchit au problème du genre (March & Smyrth, 1999). 3.1.1 Au plan international Le concept « gender » en anglais a été utilisé par Ann Oakley dans son ouvrage Sex, Gender and Society. Plus tard dans les années 80, le concept se généralise et pose ses marques sur le terrain du développement. Ainsi, de par sa présence sur le champ de la recherche, il apparait comme un terme nouveau qui s’adosse véritablement sur des résultats de recherches féministes. A ce niveau, les contributions des études féministes à la théorie du genre se sont principalement constituées à deux niveaux. Un premier niveau de démonstration du caractère construit, par opposition au caractère naturel des catégories homme/ femme. Et puis, un second niveau s’articulant autour de la prise en compte des rapports politiques et conflictuels c’est-à-dire du pouvoir. En réalité, la question du genre est de nature transversale, la prise en compte de la spécificité culturelle, historique, sociale, économique et politique de chaque peuple est déterminante. L’approche genre vise la construction de rapports sociaux équilibrés au sein de la société. Ainsi, elle permet d’être attentif à toute forme d’iniquité, d’exploitation ou de domination d’une catégorie sociale par une autre, qu’elle soit homme ou femme. Cette approche situe l’origine de l’exploitation des femmes dans l’assignation à chaque sexe, surtout au niveau de la production, des rôles et des responsabilités. Cette assignation relevant parfois bien plus d’une construction sociale que d’un déterminisme biologique (Sarr, Ba, Sourang, 1997). A cela s’ajoute que l’une des bases de cette exploitation semble être la division sexuelle du travail telle qu’elle est définie à l’intérieur des sphères privées, c’est-à-dire dans les familiales et publiques (économiques et politiques). C’est à partir des discours et des pratiques des acteurs sociaux, selon l’approche genre, que les catégories sociales naissent et se redéfinissent constamment. Or, les acteurs ne suivent pas simplement les règles sociales qui leur sont dictées, 106

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ils les actualisent. Ces acteurs ont une certaine marge de manœuvre pour agir sur la structure sociale. C’est certainement la raison pour laquelle, dans une perspective de production de la connaissance dans le champ de la recherche sociale féministe, il est de plus en plus admis de partir du point de vue des femmes et de considérer leurs expériences comme de nouvelles ressources empiriques et théoriques. L’approche genre repose sur un cadre d’analyse structuré autour de la théorie des trois rôles et la théorie des besoins. La théorie des trois rôles est composée des rôles reproductif, économique et social que joue la femme. Au niveau du rôle reproductif, il s’agit en d’autres termes de la perpétuation du groupe. Les femmes sont chargées, à ce niveau, d’une importante partie des tâches comme éduquer les enfants, s’occuper des personnes âgées, nourrir la famille, la soigner, etc. Seulement, ces tâches de reproduction, parce que essentiellement féminines, sont dépourvues de valeur marchande (Sarr & al.1997). Le rôle économique correspond à tout travail générant un produit commercialisable. On distingue à ce niveau trois types d’activités économiques menées par les femmes ; • La production de produits réservés à l’autoconsommation familiale. • La part des travaux que les femmes assument dans les activités génératrices de revenus pour le conjoint ou le groupe familial. • Les activités entreprises par les femmes en dehors de la famille en vue de la commercialisation de leur produit domestique. La dernière composante de la théorie des rôles concerne la dimension sociale. Elle est caractéristique des capacités fédératrices dont jouissent les femmes dans le maintien de la cohésion sociale du groupe aussi bien sur des aspects organisationnels qu’idéologiques. A ce propos, les femmes africaines sont gardiennes des repères traditionnels, culturels et sociaux. Elles assurent l’équilibre moral des sociétés fragiles (Sow, 1997). Pour s’acquitter des tâches à l’intérieur des trois rôles énumérés plus haut, les femmes, aussi bien que les hommes, ont besoin de moyens de réalisation : on parle alors de la théorie des besoins. Maxime Molyneux (1985), en créant le concept de « Gender needs », pose un distinguo entre les besoins pratiques et les besoins stratégiques. Pour cet auteur, les besoins pratiques ou concrets sont d’ordre matériel, alors que les besoins stratégiques, même s’ils peuvent être concrets, sont d’ordre politique. Dans certaines sociétés, les rôles de reproduction, production et gestion de la communauté sont souvent reconnus à la femme. Mais dans le monde de la formation et de l’emploi, ces rôles dévolus à la femme peuvent la désavantager, en ce que la société a tendance à mettre en pratique la « théorie de la reproduction des inégalités sociales (Bourdieu et Passeron, 1970) ; d’où des attitudes de discrimination.


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3.1.2 En Afrique Pour Touoyem (2007), on ne saurait rester indifférent à la problématique du statut épistémologique et/ou philosophique de l’hypothèse de l’existence de deux berceaux de civilisations - le nordique et le méridional - dont le caractère irréductible pourrait expliquer une différence de perception de la femme dans l’évolution de l’histoire. Cissé (2007), prolongeant dans une tentative réflexive ce postulat de Touoyem (2007), se demande si la violence fonctionnelle n’était pas inhérente au patriarcat érigé en paradigme par le modèle nordique et véhiculé par l’ordre juridico-administratif du pouvoir colonial, ou encore s’il ne faudrait pas se ressourcer aux mamelles du matriarcat pour fonder une philosophie plus libératrice de la femme. Le cadre naturel des femmes africaines est le régime matriarcal. Ce système n’instaurait pas une suprématie de la femme sur l’homme. Il organisait plutôt un dualisme harmonieux plus épanouissant, car plus équitable (Diop, 1956). De ce fait, les femmes africaines sont loin d’approuver le patriarcat qui leur est imposé et qui donne aux hommes les rôles institutionnels et l’exercice du pouvoir. Une analyse des causes profondes du changement de paradigme organisationnel dans l’attribution des rênes du pouvoir permet de dire qu’« on ne saurait exagérer le rôle joué dans cette transformation par les facteurs extérieurs, tels que les religions - Islam et Christianisme - et la présence temporelle de l’Europe et de l’Afrique » (Diop, 1956, p. 116). Seulement, la majeure partie des discours culturels et religieux sont de nature à enchainer et à enfermer les femmes, à les soumettre à un ordre culturel et religieux qu’aucun homme ne s’impose lui même (Sow, 1997). Malgré les avancées du droit international et du mouvement des idées, se dresse encore toute une idéologie de « la domination masculine » qui, pour citer Pierre Bourdieu, « apparaît comme une valeur éternelle du terroir, mais qui en réalité n’est que le produit d’un travail d’éternisation qui incombe à des institutions (interconnectées) comme la famille… » ou la société », « ce substitut mondain de Dieu » (Bourdieu, 2002, p. 152). Cependant, autant le développement ne peut être un processus linéaire, autant la transformation des rapports sociaux ne saurait l’être non plus. L’analyse stratégique développée par Crozier et Friedberg (1977) dans L’acteur et le système montre, à bien des égards, les subtilités du jeu auquel les acteurs s’adonnent en permanence dans une organisation, fût-elle sociétale, pour contrôler les zones d’incertitude, sources de pouvoir. D’ailleurs, dans le cadre de la théorie des besoins « Gender needs », une aide qui se limite aux besoins pratiques peut dans certains cas avoir un effet pernicieux de renforcement de la position de subordination ou de domination, considérée comme normal et logique par les groupes sociaux dominants (Jacquet, 1995). Une rencontre organisée en 1976 à Wellesley College aux Etats-Unis, à l’initiative des anthropologues 3 4

féministes américaines sur le thème Les femmes dans le développement national fut un tournant dans le combat féministe des africaines. En effet, les quelques rares Africaines (Fatima Mernissi du Maroc, Achola Pala du Kenya, Philomena Steady de la Sierra-Leone et MarieAngélique Savané du Sénégal) qui avaient été conviées réagirent littéralement au discours dominant et jugé « arrogant » des féministes américaines (Locoh & Puech, 2008). Elles quittèrent la réunion et décidèrent de fonder leur propre association sur le continent. Elles venaient ainsi de poser un acte majeur dans la remise en cause des concepts dominants du féminisme occidental. En réalité, selon Locoh et Puech (2008), le discours sur les Africaines comme objets de l’ethnologie et de l’anthropologie, était complètement accaparé par les féministes occidentales. Les Africaines avaient fortement contesté cette position perçue comme « dominante ». Elles avaient également pris conscience de la différence des besoins et des priorités qui sont les leurs dans la mesure où elles vivaient dans des contextes différents et que leurs objectifs n’étaient pas forcément les mêmes que ceux des féministes occidentales. Même si les motivations de leurs combats étaient souvent similaires3, cette levée de boucliers des africaines face au féminisme de format anglo-saxon, « impérialiste », semblait impérieuse. En effet, elles « étaient d’autant plus tentées de marquer leur différence que les accusations d’aliénation par rapport au féminisme occidental, aliénation assimilée à l’occidentalisation, étaient sévères et souvent insupportables » (Locoh & Puech, 2008, p.14). En 1977, l’Association des Femmes Africaines pour la Recherche et le Développement (AFARD) – Association of African Women for Research and Development (AAWORD) – une initiative commune de chercheures et d’activistes africaines de toute l’Afrique fut créée. Ainsi donc, jusque dans les années 1980, les mouvements féministes africains et occidentaux avaient des objectifs et des discours différents. Chaque peuple étant capable d’assumer, à une période précise de son histoire, les impératifs de son développement, des études (Mianda, 1996 ; Sarr, 1997) montrent qu’en Afrique, les rapports sociaux sont en train de se transformer au sein de la famille. Les femmes en Afrique ne continuent plus à subir, de manière impuissante et résignée, la domination des hommes. Les stratégies qu’elles déroulent renseignent que, malgré des rapports de force qui leur sont encore défavorables, elles ont réussi à développer une plus grande autonomie et à obtenir des résultats. Au Ghana, au Cameroun et au Togo, des tontines4, devenues banques de quartiers, sont à l’origine de la puissance des « Nana Benz », riches commerçantes très connues pour leur sens des affaires et qui règnent dans les grands marchés du textile. Au Sénégal, des femmes issues du secteur informel et parties de peu ont réussi à accéder au monde de l’entreprise (Sarr, 1998). Elles augmentent chaque jour un peu plus un capital qui leur permet de réorganiser, en leur faveur, des positions de pouvoir (Sarr & al. 1997).

C’est le cas dans les années 1990 par exemple ou un débat a émergé autour des violences à l’encontre des femmes. Ce sont des réseaux de solidarité à partir desquels les femmes mettent en commun leurs moyens en versant régulièrement une certaine somme d’argent. Chacune pourra bénéficier à tour de rôle de ce capital, soit pour résoudre des problèmes soit pour entreprendre une activité économique.

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En effet, détenant exclusivement le pouvoir d’enfanter, la femme, africaine surtout, se voit aussi confier l’obligation de veiller sur les maisons et leurs habitants, en tous points de vue. Même « les premières humanités (de l’enfant) sont incontestablement soumises à la gouvernance et à la prévenance maternelles », mentionne Diop (2000), comme, du reste, toutes les civilisations l’ont prouvé. A côté de cette fonction psychoaffective, les femmes produisent aussi des biens, à l’exemple des femmes congolaises qui, selon (Muswamba, n.d.), « dans le cadre de l’économie formelle ou informelle, sont fonctionnaires (ou) dans l’administration, l’enseignement, la médecine, le commerce ; elles sont paysannes, coiffeuses, font de la couture, œuvrent au sein des ONG, etc. ». Toutefois, dans la littérature, la question est souvent posée de savoir si ces travaux ménagers et la charge de l’éducation des enfants ne constituent pas une exploitation à l’encontre des femmes et, par ricochet, un « impôt » trop lourd supporté par la gent féminine. En tous les cas, l’OIT (2007) admet que les femmes « ont du mal à concilier obligations familiales et travail rémunéré sans compromettre leurs chances de promotion ou d’amélioration de leurs compétences ». Pourtant, aujourd’hui plus que jamais, de nombreuses opportunités s’offrent aux femmes qui embrassent maintenant des carrières qui semblaient réservées aux hommes. (ibidem) En effet, en s’inspirant des besoins pratiques et des intérêts stratégiques des femmes, de nouvelles approches politiques sont mises en œuvre, visant à réduire les écarts entre hommes et femmes, pour mieux intégrer ces dernières dans le développement. Faisant le bilan de la Conférence de Beijing, 5 ans après, l’UNESCO note que « des efforts supplémentaires ont été déployés par de nombreux pays pour combattre l’analphabétisme féminin. (...) Le Sénégal (en particulier) indique que la réduction de l’analphabétisme féminin a contribué à augmenter le taux de scolarisation des filles, qui est passé de 35 à 52, 9 %. » (UNESCO, 2000) Quant à l’OIT, elle préconise d’« aider les travailleurs ayant des responsabilités familiales, qu’ils soient hommes ou femmes, à mieux concilier activité professionnelle et responsabilités familiales, dans un monde où (...) l’organisation du travail désavantage les femmes et nuit à leur carrière. » (OIT, 2007). Enfin, des auteurs (Duru-Bellat, 2008 ; Lemistre, 2008) montrent les effets des choix de filières et de niveaux d’études des femmes dans le processus d’accès à l’emploi et au développement. A, ce sujet, la socialisation sacrifie toujours la vie professionnelle sur l’autel de celle familiale ; des formations très générales, moins sélectives et menant à des emplois moins bien payés ou orientées vers le tertiaire, sont choisies par les jeunes filles plutôt que des carrières de haut niveau qui risqueraient de compromettre singulièrement leur vie familiale (DuruBellat, 2004).

3.1.3 Dans le contexte du Sénégal  Aux plans politique et institutionnel En 1962 déjà, Senghor, le premier président du Sénégal indépendant, lors du 3ème congrès de l’UPS à Thiès déclarait : […] On a pu le constater à l’occasion de la discussion du projet de loi sur l’Etat civil. Pour les uns et pour les autres5, la femme est une poupée pour la distraction de l’homme quand elle n’est pas une servante à son service. Ce qu’il faut, si nous voulons réellement construire la nation, en faisant du Sénégal un pays moderne, c’est désaliéner la femme sénégalaise : la rendre à sa dignité et à son rôle naturel. Qu’on ne nous parle pas des préceptes du coran ou de l’évangile. […]. Pour moi, qui lis souvent l’évangile et le coran, je n’y ai jamais lu l’inégalité de l’homme et de la femme, tout au contraire. Il est question, précisément, de revenir aux sources pures des écritures saintes, en les interprétant dans un esprit contemporain de progrès. En 1984, au Sénégal, à la faveur du multipartisme intégral institué par le président Abdou Diouf6, un discours radical naît des flancs des sections féminines des partis politiques de « gauche ». Il est porté par les mouvements « YewwuYewwi7 PLF » (Pour la liberté des femmes) et « Femmes et Société », créés en 1989. Le mouvement féministe radical de gauche Yewwu-Yewwi, dont Angélique Savané était le porte-étendard, ne réclame pas moins, selon Cissé (n.d.) in http://www.codesria.org/IMG/pdf/CISSE.pdf, qu’une transformation profonde des rapports de servilité entre homme et femme. Ses membres prennent position clairement contre ce qu’elles appellent l’oppression maritale, l’oppression des grossesses, l’oppression culturelle, l’exploitation dans les usines, les services, les maisons en tant que domestiques ou par le biais de la prostitution (fippu8, 1987). Mieux, ces femmes s’attaqueront aussi au Code de la famille, adopté en 1972 et trop « patriarcal » à leur goût, mais pourtant décrié par les mouvements religieux qui le trouvent « trop favorable à la femme ». Les militantes du mouvement YewwuYewwi s’insurgent également contre « la liberté donnée au musulman (homme) de pouvoir opter pour la polygamie limitée à Quatre épouses, et les modalités de l’héritage musulman, qui consacre l’inégalité entre homme et femme dans la dévolution des parts » (Quotidien le Soleil du 17 Juillet 1986). Ces femmes précisent toutefois que le combat ne sera pas une lutte individuelle contre les hommes, mais un combat social et politique contre un système idéologique qui aliène les hommes dans leurs privilèges et les femmes dans leur oppression (Savane, 1986). Camara (2007) sera on ne peut plus directe à l’encontre du Code de la famille du Sénégal, en soutenant : […] Le code de la famille sénégalais apparaît comme un mélange hétéroclite de règles contradictoires

Il fait référence aux députés musulmans et chrétiens ayant siégé à l’assemblée nationale lors de la plénière de ce projet de loi. C’est le deuxième président du Sénégal. Il a succéder, au terme de l’article 35 de la constitution, le président Léopold Sédar Senghor. 7 Prendre conscience pour se libérer dans la langue wolof. 8 Journal de Yewwu Yewwi No 1, Juillet 1987. 5

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où le devoir de fidélité côtoie l’autorisation de polygamie, où l’égalité des sexes se réduit à une égalité d’obligations et à une inégalité de droits systématique entre hommes et femmes (p.163). Une remarquable adhésion des femmes sénégalaises à des mouvements de ce genre fut notée. D’ailleurs, il faudrait mettre au crédit de Yewwu-Yewwi deux acquis majeurs : la reconnaissance et la célébration du 08 Mars, journée de la femme au Sénégal, de même que l’indication claire des perspectives que devront emprunter les organisations de femmes pour mener à terme les revendications politiques et citoyennes. Toutefois, il est apparu que le ventre mou du combat des femmes sénégalaises pour la conquête des places qui reflètent le mieux les rôles et potentialités qui sont les leurs dans la société, souffre de deux choses. Premièrement, autant leur capacité de mobilisation est incontestable à travers les nombreuses structures de regroupement et de solidarité, autant elles perdent de vue le caractère stratégique de leur nécessaire présence là où les choses se décident. Voilà en toute logique les soubassements qui constitueront un terreau fertile et favorable aux futures luttes telles que la parité. Entre temps, le Sénégal ratifiera un bon nombre de traités, conventions et protocoles internationaux en faveur du respect des droits de la femme et de l’amélioration de ses conditions de vie. Par exemples : la Déclaration sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes ; la déclaration de Pékin ; la loi n° 2004-35 du 8 janvier 2005, autorisant le Président de la République à ratifier le Protocole à la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux Droits de la Femme en Afrique, adopté à Maputo le 11 juillet 2003. Au plan interne, le Sénégal a aussi mis au point un certain nombre de lois en faveur des femmes : la Loi n° 2007-23 portant introduction de la parité sur la liste des candidats au scrutin de représentation proportionnelle pour les élections législatives ; la Loi constitutionnelle modifiant les articles 7, 63, 68, 71 et 82 de la Constitution ; le Décret n° 2008-1047 du 15 septembre 2008 portant création et fixant les règles d’organisation et de fonctionnement de l’Observatoire National des Droits de la Femme ; le Décret n°2008-1045 du 15 septembre 2008 portant création et fixant les règles d’organisation et de fonctionnement de la Direction nationale de l’Équité et de l’Égalité de Genre ; l’Arrêté ministériel n° 10545 en date du 10 décembre 2008, portant création du Comité de Réflexion sur les Violences faites aux Femmes et aux Enfants (CRVFE) ; l’Arrêté n° 092188 du 20 mars 1998, portant création du comité préparatoire et de pilotage du plan d’action pour l’élimination des pratiques néfastes à la santé de la femme ; et la Loi n° 2010-11, du 28 mai 2010, instituant la parité absolue Homme / Femme dans les instances électives et semi-électives. Cette loi sur la parité a permis aux femmes d’obtenir, lors de la dernière législature tenue en 2012, 65 élues sur 150 députés, soit 43,3 % de l’hémicycle. Dans la précédente législature, seuls 22% des sièges de l’assemblée nationale étaient occupés par des femmes députés. Un tel pourcentage de représentativité au sein de l’hémicycle ne constituait pas une taille

critique suffisante pour influer sur les lois. Cette avancée remarquable du Sénégal le classe, ainsi, troisième en Afrique après le Rwanda et les Seychelles, et sixième au monde concernant la représentation des femmes à l’Assemblée nationale. A propos de cette dernière loi, la Radio France Internationale (RFI) rapporte ces paroles de femmes sénégalaises rencontrées dans les rues, le jour du vote de la loi sur la parité : « Aujourd’hui, c’est un grand jour pour nous, parce que les femmes ont gagné ! », lance l’une d’elles. « Ça fait longtemps qu’on lutte, et on vient d’obtenir gain de cause, estime une autre. Cette loi, c’est bien parce que ça nous permet de mieux évoluer dans la politique. D’habitude, nous accompagnons toujours les hommes. Nous sommes toujours derrière les hommes et maintenant nous serons au même niveau. » Ces paroles de satisfaction de voir une telle mesure politique adoptée sont peut-être l’aboutissement de plusieurs autres actes posés antérieurement, au Sénégal, comme de vastes campagnes de lutte ou de formation pour l’égalité ou l’équité des genres, menées par les gouvernants, le monde de l’éducation (par la prise en compte du genre dans le Nouveau Curriculum de l’Education), les organisations de la société civile ou des mouvements de femmes. Ce qui fait dire à Mme Coulibaly, responsable de la section défense et appui des femmes du Réseau Africain pour le Développement Intégré (RADI) : «Sur le plan de la théorie, le droit sénégalais est apparemment juste avec les femmes». Mais, elle se hâte de préciser que, du fait du «décalage» entre ces textes et les lois internes sociales, beaucoup de droits reconnus à la femme restent encore «théoriques». En effet, les idées d’égalité et d’équité des genres rencontrent souvent l’hostilité de la part de religieux, de traditionnalistes, etc. Même cette loi sur la parité ne fait pas l’unanimité. A preuves, ces paroles rapportées toujours par RFI : « On est dans un pays islamique, les femmes ne peuvent pas être égales aux hommes ». Ou encore : « Je pense que c’est une bonne loi, pourvu qu’on ne l’applique pas dans nos foyers, confie pour sa part un jeune. Ah oui, parce que si la parité doit être appliquée dans nos foyers, ça risque de poser des problèmes ! »  Aux plans économique et social L’étude analytique, qui dresse le bilan de la situation économique et sociale des années 1980-1990 des femmes sénégalaises et qui esquisse des projections pour l’horizon 2015, souligne dans ses conclusions la marginalisation des femmes par rapport aux grandes orientations du développement du pays. Le constat est que les femmes ont été reléguées à la périphérie de la planification et des politiques nationales de développement pendant plusieurs années (Sarr, 1998). Même la différence des réalités socio-économiques entre le milieu rural et le milieu urbain ne change en rien les préoccupations des femmes qui ont partout les mêmes rôles et charges. Ainsi, en dépit de leur participation effective comme masse de manœuvre Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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dans la vie politique, elles n’ont bénéficié que d’une politique par à coup, caractérisée par des actions et de mesures ponctuelles. Aussi, les rôles d’épouse, de mère, de responsable de l’entretien de la famille et de gardienne du patrimoine culturel, qui sont depuis toujours reconnus comme étant ceux de la femme, ne lui confèrent-elle aucun pouvoir de décision sur les conditions d’accès aux ressources pour une insertion dans l’économie. Or, le Prix Nobel d’économie Amartya Sen considère qu’il n’y a aucune priorité aussi brûlante pour l’économie du développement qu’une reconnaissance pleine et entière de la participation et du leadership féminin dans les domaines politique, économique et social. C’est, selon Sen (2000), un aspect crucial du développement. Toutefois, malgré le poids des traditions et des options politiques peu favorables : […] A Médina-Gounass dans la banlieue de Dakar, les femmes ont su mieux que les hommes trouver des stratégies pour gérer l’organisation du circuit économique de leur quartier. Elles ont su, à partir de leurs associations traditionnelles, développer des unités de production et de service nécessaire au quartier. Elles ont ainsi occupé des créneaux porteurs dans des domaines qu’elles maîtrisent. Les habitants de ce quartier ont à leur actif la viabilisation de leur milieu avec le financement des adductions d’eau et l’électrification. Cette capacité de développement est due en grande partie aux femmes, grâce à leur ingéniosité, leur solidarité et leur esprit d’entreprise. A partir du projet collectif, elles ont développé des projets individuels rentables. (Sarr, 1998, p.27). Dans un tout autre aspect, les femmes ont su jouer pleinement leur partition dans la consolidation de la nation. En Casamance, région située au sud du Sénégal, le rôle reproductif de la femme est apparu comme la quintessence de l’action des femmes du Kabonkaetor. En effet, le conflit armé qui secoue cette partie du Sénégal depuis plus de deux décennies a fait monter, au créneau, les femmes du terroir pour un retour définitif de la paix. Pour Marguerite Keny Coly, présidente du Forum des femmes pour la paix en Casamance : […] Depuis nos ancêtres, la femme casamançaise a toujours le rôle de médiatrice, de régler les conflits lorsqu’il y a un litige entre des hommes ou entre villages. La femme étant mère ne saurait se déterminer en fonction des intérêts de telle ou telle autre partie en conflit. Elle doit être au centre pour réconcilier, aider les gens à se pardonner […] (Coly, 2003). On observe ainsi en Casamance cette tendance, perceptible ailleurs sur le continent africain, à reproduire la traditionnelle division sexuelle des tâches dans le domaine de la résolution des conflits, dans lequel les actions des femmes sont le prolongement de leur rôle domestique Association des Femmes Africaines pour la Recherche et le Développement (AFARD, 2000). Plusieurs ressorts interviennent dans la dynamique des mobilisations féminines en Casamance. En plus de 110

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souligner l’invariabilité de leur procédure d’intervention, leur mobilisation est essentiellement préservatrice. Quel qu’en soit le motif, les femmes ont toujours privilégié des formes de luttes comme la prière, la libation, la marche, ou les discussions. Elles ont toujours su, en fonction des nouveaux enjeux, réadapter leurs moyens ou en réinventer d’autres dans la perspective de mieux les instrumentaliser. Ainsi, elles assurent, comme du reste, leurs consœurs du continent, le maintien des repères culturels et sociaux (Sow, 1997). Par ailleurs, Larrivée (1993) renseigne que dans plusieurs pays africains, dont le Sénégal, « l’homme est généralement associé à la production et la femme à la reproduction, stéréotypes que renforcent les médias et les manuels scolaires ». Au Sénégal, déjà toute jeune, la jeune fille habite chez ses parents et seconde sa maman dans les tâches domestiques, si elle n’en est pas complètement chargée. Certes, le Code de la famille sénégalais admet que l’obligation d’entretien de la famille incombe, d’abord, à l’homme, même si des études (Riss, 1989 ; Sarr, 1997, 1998 ; Goerg, 2007 ; FAO, 2008 ; COSEF, 2011) ont révélé la part importante de l’apport de la femme africaine et sénégalaise dans les biens du ménage, grâce aux fruits d’un travail logé, le plus souvent, dans le secteur informel. Mais les femmes sénégalaises se sont formées et sont allées dans le marché de l’emploi formel et rémunéré. « Ce qui a eu pour effet de faire retomber sur leurs épaules, en plus, le partage de la responsabilité financière autrefois entièrement assumée par le mari », souligne Larrivée (1993), qui établissait le rapport de synthèse d’une recherche menée sur 5 pays africains, dont le Sénégal, sur la place et le rôle des femmes dans les administrations africaines. En plus, concernant la composition des ménages, il apparait selon MEF (2004) que, sur les 256 300 ménages ordinaires que comptait en 2002 l’agglomération urbaine de Dakar, près de 27% avait une femme comme chef de ménage. En plus, les ménages mono-parentaux élargis (55,0%) et nucléaires (24,7%) sont très répandus chez les femmes et rares chez les hommes (moins de 3%). Il est également établit que les personnes non mariées sont plus nombreuses chez les femmes (34,9% de veuves et 15,1% de divorcées contre 1,3% de veufs et 1,6% de divorcés). Cette importance relative du nombre de femmes seules peu être perçue comme une forme d’autonomie de ces dernières, même si dans la société sénégalaise on considère une femme autonome plus vulnérabilité. Ainsi, de plus en plus, au Sénégal, et cela surtout dans les centres urbains comme Dakar, des familles mononucléaires (composées essentiellement du père, de la maman, des enfants et de la domestique) prennent la place des larges familles traditionnelles ; ce qui réduit de beaucoup la charge de travail domestique et de production de biens financiers et matériels (Larrivée, 1993). Néanmoins, cette dernière auteure nous rapporte aussi que dans beaucoup de pays africains, « les femmes professionnelles ou salariées se plaignent (...) majoritairement de l’inertie de leurs conjoints dans les responsabilités familiales et domestiques. Les plus aisées d’entre elles peuvent engager du personnel domestique.».


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M’Bow (n.d.) croit bon de lier ces multiples fonctions de la femme à la religion qui, « au Sénégal comme dans la plupart des pays sous-développés, occupe une place centrale (et), a tendance à régir toute la psychologie collective ». En effet, l’Islam, la religion dominante à près de 95%, organise les devoirs de la femme en fonction des différentes étapes de sa vie. La femme est d’abord une fille, puis devient épouse et ensuite mère. A chacune de ces phases correspondent des devoirs spécifiques, qui ne se remplacent pas, mais se complètent. Ce qui laisse voir l’immensité des devoirs de la femme dans les sociétés musulmanes et au Sénégal en particulier. De plus, la crise économique faisant, conjuguée à toutes les autres charges sociales assignées à la femme sénégalaise, Mbow (n.d.) nous signale que « le mariage est une véritable hantise au Sénégal, ce qui explique le nombre de jeunes couples vivant sous la coupe de leurs parents. » 3.2 L’insertion Dans les pays les plus anciennement industrialisés, l’étude de l’insertion professionnelle s’est développée, dans un premier temps, pour juger de l’efficacité des systèmes éducatifs, puis, avec la crise, pour aider les décideurs à atténuer l’impact économique et social du chômage des jeunes. Cette origine empirique de la notion même d’insertion a imposé, en un deuxième temps, un effort de conceptualisation et de théorisation qui n’est pas achevé. Dans la plupart des études consacrées aux situations professionnelles, il est souvent question d’insertion. Ainsi, une clarification de ce concept semble être d’une impérieuse nécessité. Aussi, cela nous permettrait-il d’en saisir davantage les contours pour mieux positionner le champ de notre présente étude. Dans la littérature scientifique, la plupart des auteurs qui ont investi la question semblent accepter le caractère processuel de l’insertion dans la mesure où ils parlent, à l’unanimité, de « période d’insertion ». C’est certainement cette empreinte processuelle de l’insertion qui semble, selon Lemistre (2008), poser de redoutables problèmes à une définition claire et exhaustive du concept. Pour Blasco. S et Givord. P (2010), la première difficulté qui se pose à une tentative de définition de l’insertion, est qu’elle est constituée de multiples facettes qui ne peuvent être appréhendées par un indicateur unique. Si, en 1997, Duru-Bellat et Henrion van Zanten ont retenu que l’insertion était le moment où le jeune accède à un emploi sur la base des savoirs acquis dans sa formation, il n’en demeure pas moins qu’une telle définition semble lier la notion d’insertion à l’existence d’une relation entre une sphère scolaire et une sphère productive. Or, les choses ne se sont pas toujours déroulées ainsi. En 1998, Charlot et Glasman mettent en lumière des périodes de rupture entre le processus d’insertion des sociétés traditionnelles et celles contemporaines. Dans les sociétés traditionnelles, l’éducation et la formation restaient imbriquées. L’espace éducatif se confondait à l’espace professionnel. L’insertion se déroulait sans grande difficulté. Au cours du XIX siècle, une première rupture s’opéra. Les deux sphères se dissocient et le jeune devait apprendre à travailler dans un nouvel

espace différent : l’école. Il lui fallait ensuite négocier le passage de l’espace « école » à l’espace « travail ». Le lien entre ces sphères demeurait, toutefois, très fort. Dans les années 70, à la faveur du premier choc pétrolier, le travail se raréfie et il fallait trouver sa place dans un marché du travail concurrentiel, après la sortie d’un système scolaire en proie, lui aussi, à une rude concurrence. Aussi, « le candidat à l’emploi (devait-il alors) franchir un obstacle, car le niveau d’accès au marché du travail dépend de la dernière classe fréquentée ou du diplôme obtenu» (Vallean 2003, p.284). Il était ainsi question d’articuler deux échelles, une scolaire et une autre sociale. Pour Vallean (2003), c’est le processus d’articulation de ces deux échelles qu’on a nommé insertion. Après les années 70, la crise marquée par le « déficit des finances publiques, de la mondialisation » (Charlot & Glasman 1998, p.25) a créé une précarité professionnelle. Les demandeurs d’emploi éprouvent des difficultés pour trouver un emploi et particulièrement sous la forme d’un emploi stable. L’insertion devient ainsi un problème à cause de la crise de l’emploi. Aussi, relève-t-elle aujourd’hui de la logique du parcours. Ce parcours est généralement nommé trajectoire d’insertion. On distingue alors des insertions directes, des insertions indirectes et des insertions galère. Si les insertions indirectes sont liées à un passage par des situations précaires, les insertions galères sont, elles, ponctuées de va-et-vient entre chômage et emploi temporaire. En 2008, Lemistre fait remarquer que la période d’insertion comprend un certain nombre d’emplois intermédiaires et que supposer un terme à cette dynamique processuel qu’est l’insertion, c’est faire l’hypothèse implicite d’une stabilisation de la trajectoire individuelle. En d’autres termes, la période d’insertion prendrait fin et sens dès lors que la position professionnelle du jeune traduit l’usage qu’il souhaite faire de sa formation initiale. Vernière et al (1994) pensent que l’une des caractéristiques principales de la période d’insertion est de permettre à l’individu d’acquérir l’expérience professionnelle minimale qui, combinée à la formation initiale reçue, lui permettra d’occuper efficacement un poste dans le système productif. L’insertion serait en définitive un processus qui conduit une personne sans expérience professionnelle à occuper une position stabilisée dans le système d’emploi. Un autre aspect - celui-là qualitatif - du concept d’insertion, est mis en exergue par Blasco et Givord (2010). Pour ces auteurs, le salaire, l’adéquation du travail exercé avec les qualifications obtenues, témoigneraient de la qualité de l’insertion. Il arrive, par ailleurs, qu’un certain nombre de facteurs puissent influencer d’une certaine manière le processus d’insertion. Lizé (2000) révèle le caractère déterminant des réseaux sociaux. Ainsi, l’appel aux réseaux serait le premier outil de recrutement devant les candidatures spontanées. Degenne (2004), Lagarenne et Marchal (1995) montrent que ces réseaux concernent aussi bien des relations personnelles ou familiales que des retours dans une entreprise où le salarié a déjà travaillé, chacune de ces deux modalités constituant 20% au moins des cas. Pour les jeunes, le rôle des réseaux sociaux semble particulièrement déterminant. En France, 57% des moins Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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de trente ans en 1997 ont trouvé leur premier emploi stable grâce à leurs réseaux sociaux (Margolis & Simonet, 2005). En 2005, Lemistre fait remarquer que ces réseaux personnels jouent un rôle plus déterminant que les réseaux professionnel. En Afrique, une étude sur l’insertion professionnelle menée par Arestoff (2000) signale qu’en Madagascar, pour une même durée de chômage vécue, l’éducation publique exerce un effet significativement négatif sur la probabilité de trouver un emploi dans le mois qui suit. L’auteure argumente que la déliquescence du système d’enseignement public condamnerait les élèves, choisissant de s’inscrire dans ce type d’école, à rester plus longtemps que les autres au chômage avant l’obtention de leur premier emploi stabilisé. Aussi, une fois entrés sur le marché du travail, les individus issus de l’éducation publique doivent-elle s’attendre à un revenu plus faible que celui de leurs homologues issus de l’éducation privée. En 2012, Mingat dans une étude relève que si on compare la situation professionnelle des individus du groupe d’âge de 25 à 34 ans avec celle de ceux ayant entre 35 et 44 ans au moment de l’enquête, on observe d’une part que 25 % des individus sont sans emploi et en recherchent dans le premier groupe, alors que ce n’est le cas que pour 5 % de leurs homologues dans le second. En résumé, cette recherche sur l’insertion des individus ayant reçu une formation au niveau du supérieur, montre non seulement un significatif effet de génération mais aussi, des difficultés notables d’insertion professionnelle pour les générations plus jeunes. Dans une étude qui renseigne sur l’itinéraire professionnel du jeune africain, Walther (2009) montre que les jeunes africains s’insèrent dans l’activité ou l’emploi essentiellement avec l’appui des réseaux de solidarité familiaux ou sociaux. D’ailleurs au Sénégal, en 2004, Ministère de l’Economie et des Finances (MEF) montre que la plupart des demandeurs d’emploi (2/3) font prévaloir les relations personnelles. Une proportion beaucoup plus faible (1/4) s’adresse directement aux employeurs, soit en se rendant à l’entreprise, soit en déposant une demande. Enfin, ceux qui ont recours aux petites annonces et agences de placement et association représenteraient une minorité. Vue la situation économique des pays du continent africain, il est également noté que le passage d’un nombre important de jeunes par des métiers de production ou de service, paraît incontournable. Ce qui fait que l’insertion professionnelle passe presque nécessairement par l’acceptation d’un emploi qui n’est pas celui souhaité, avant de pouvoir accéder à l’emploi désiré (Walther, 2009). L’absence de moyens pour faciliter le passage de la formation à l’emploi, le manque d’infrastructures adéquates de formation, la faiblesse des soutiens financiers accordés aux projets d’insertion, ou encore la pratique d’une fiscalité trop élevée pour ceux qui ont réussi à créer une activité professionnelle sont autant d’obstacle à une insertion professionnelle en Afrique. Dans une perspective analytique qui se veut fouillée, il serait intéressant d’éclairer la notion d’insertion sous le prisme d’autres théories telles que celle du capital humain, 112

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du signal, ou du filtre. Cela, en effet, nous paraît important d’autant plus que l’insertion est fondamentalement liée aux caractéristiques du marché de l’emploi. La théorie du capital humain (Becker, 1975) suppose, d’une part, que la formation initiale augmente les compétences individuelles directement mobilisables dans l’emploi. D’autre part, cette théorie suppose que le marché du travail et l’enseignement sont en concurrence. Dans cette situation, la formation initiale est un investissement en capital humain et les individus choisissent la durée de la formation en fonction de son rendement attendu. Aussi, pour Guiso et al. (2000) l’aspect clé du capital humain a-t-il trait aux connaissances et compétences possédées par les individus et accumulées au cours de la scolarité, de la formation et des expériences et qui sont utiles pour la production de biens, de services et connaissances nouvelles. Même s’il existe d’autres moyens d’investissement dans le capital humain (santé, migration, etc.), l’éducation constitue par hypothèse la principale composante Ainsi, la théorie du capital humain suppose qu’il existe une triple liaison : éducation-productivité-rémunération. L’éducation, par nature, transmettrait des connaissances utiles et qui vont donc accroître l’efficacité productive de l’individu. S’opposant de façon plus ou moins nette, à certains égards, à cette théorie du capital humain, des théories reposant sur les notions de signal de formation interne, de filtre d’aptitude et d’attitude ont été proposées. C’est Spence (1973) qui pose le premier édifice. L’hypothèse essentielle de son modèle est l’existence d’un coût d’acquisition du signal décroissant avec le niveau d’aptitudes. Thurow (1975) aborde, lui, la question en termes de « concurrence pour l’emploi ». Ainsi, ce ne sont pas les travailleurs qui sont productifs, mais l’emploi qu’ils occupent. Il s’agit d’adapter l’individu à cet emploi ; ce qui nécessite une formation à l’intérieur de l’entreprise. Le coût de cette formation interne, étant plus faible pour les individus éduqués, l’entreprise cherchera en priorité des travailleurs à haut niveau de diplôme pour des emplois nécessitant une formation interne important et dégageant donc une productivité plus élevée et mieux rémunérés. Toutefois, si Spence et Thurow ne remettent pas en cause le rôle de l’éducation dans l’amélioration de la productivité, Arrow (1973) considère, lui, l’éducation comme un simple moyen de donner un label à l’individu, révélant qu’il possède un certain niveau d’aptitude. Ces aptitudes de type scolaire étant fortement corrélées, mais pas confondues, comme le soutient la théorie du capital humain, avec la capacité productive. L’éducation, selon lui, n’a aucun effet direct sur la productivité, mais indique que l’individu doit être capable d’être plus efficace dans son l’emploi ; elle n’ajoute pas de valeur à l’individu, elle ne fait que la garantir pour le futur et sert à ‘filtrer’ les individus susceptible par la suite d’avoir une meilleur productivité.


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Un certain nombre de travaux empiriques ont été menés pour tester ces thèses. L’interprétation des résultats ne conduit pas à une conclusion tranchée sur leur validité. En 1985, les travaux de Jarousse et Mingat ont confirmé assez nettement le phénomène ‘filtre’ ou ‘signal’. Ce qui semble confirmer l’intuition de Spence. Quant à Psacharopoulos et Layard (1973), assez sceptiques sur la possibilité de tester comparativement les théories du capital et du filtre, ils concluent que le différentiel de revenu entre High School et College augmente au cours du temps, alors que « l’effet parchemin » devrait s’atténuer si la théorie du filtre était vérifiée. Taubman et Wales (1973) prouvent que le diplôme est la ‘carte de visite’ nécessaire pour accéder aux salaires élevés. Riley (1979) constate que les individus ‘filtrés’ ont des profils de revenus plus élevés et que l’ajustement revenu-éducation est meilleur pour ce groupe. Enfin, les travaux de Baudelot et Glaude confirmeraient assez clairement l’effet ‘signal’ des diplômés des grandes écoles. Retenons en définitive que les approches, en termes de filtre ou de signal ne remettent pas vraiment en cause la théorie standard du capital humain. Elles semblent plutôt l’enrichir. 3.3 De la notion d’impact ou efficacité externe Selon Gittinguer (1985), l’impact d’un projet est déterminé par sa nature ; d’où la nécessité d’identifier des indicateurs de mesures convenables de l’impact. D’une manière générale, l’impact est défini comme un changement ou l’effet d’une action ou d’un acte. Les études d’impact peuvent être réalisées « ex ante » ou « ex post ». En « ex ante », une étude essaie de prévoir les conséquences d’un projet. En revanche, celle « ex post » observe les effets, une fois le projet réalisé. Dans le cadre du travail de recherche que nous menons, il sera question d’une évaluation « ex post », en considérant comme projet le processus éducatif, formatif des élèves. Il apparaît dans la littérature des sciences de l’éducation, qu’une telle entreprise correspond plus à un exercice d’analyse et de réflexion, articulé autour de l’efficacité externe et de sa mesure. Depover (2010), en parlant de l’efficacité externe, semble planter d’emblée le décor. Pour lui, le concept d’efficacité externe part du postulat « qu’un système éducatif est structuré pour répondre aux besoins qui caractérisent une société à un moment donné de son évolution » (p. 49). Ainsi, Depover (2010) estime que l’efficacité externe pose la problématique des buts, objectifs, ou finalités d’un système éducatif. Autrement dit, les « effets économiques, sociaux et culturels de l’éducation. » (p. 49) Psacharopoulos et Woodhall (1988), cités par Sall (1996), conçoivent l’efficacité externe presque de la même manière que Depover (2010), dans la mesure où ils trouvent que cela « permet de savoir dans quelle mesure l’éducation répond aux objectifs de la société et satisfait les besoins du marché du travail [en plus de permettre] d’apprécier la capacité du système éducatif à préparer les

élèves et les étudiants à leur rôle futur dans la société ». (Sall, 1996. p. 111) Il devient clair, à ce niveau, que l’efficacité externe cherche à établir le rapport entre la formation reçue par l’étudiant et ses possibilités d’insertion dans la vie professionnelle de son pays, de la sous-région et même du monde entier, en tant qu’acteur social, économique et culturel. Depover (2010) nous en offre quelques pistes de réflexions. Il pourrait s’agir de « l’employabilité des individus sortant du système scolaire, de l’adéquation des dispositifs de formation générale et professionnelle par rapport au marché de l’emploi, du rôle des pouvoirs publics et des entreprises privées » (p.49) Par ailleurs Sall et De Ketele (1997) accordent à l’efficacité externe une dimension moins générale, mais plutôt liée à la personne de l’étudiant. Ils posent ainsi le principe de l’utilité de la formation reçue à travers l’épanouissement social et économique du produit formé qui devrait être en mesure de développer sa personnalité dans tous les domaines : cognitif, affectif, psychomoteur, relationnel ou artistique. Sur un autre plan, Sall (1996) nous offre une vision plus détaillée de l’efficacité externe. Il distingue, en effet, l’efficacité externe de nature qualitative de celle de nature quantitative. Selon lui, lorsque le chercheur cherche à établir le « rapport entre les compétences mises en œuvre dans la vie professionnelle ou sociale ou personnelle et les compétences développées par le système », on pourrait alors parler d’efficacité externe qualitative. De même, le « rapport entre compétences nouvellement acquises ou visées par le système éducatif et compétences développées par le système » pourrait tout aussi faire office d’efficacité externe de nature qualitative. Appliquée aux techniques de méthodologie de recherche, cette nature d’efficacité externe semble « se caractériser par une approche qui vise à décrire et à analyser la culture et le comportement des humains et de leurs groupes du point de vue de ceux qui sont étudiés. (…) La vie sociale est vue comme une série d’événements liés entre eux, devant être entièrement décrits, afin de refléter la vie de tous les jours » (ROCARE. 2010. p.7). Encore que, au-delà, l’efficacité externe qualitative pourrait permettre de juger de la participation ou non des systèmes d’enseignement dans l’élévation du niveau culturel de la société, d’où la fonction civilisatrice de l’enseignement (Sall. 1996, tome 1, p. 112). Par contre, l’efficacité externe de nature quantitative cherche à déterminer le nombre de sortants du système, compte tenu des besoins actuels ou futurs. L’efficacité externe quantitative traduit, par exemple, le rapport entre le nombre d’emplois projetés et le nombre de diplômés occupant effectivement un emploi (Sall & De Ketele 1997). Ici les chiffres statistiques semblent occuper une importance de taille, toujours en rapport avec la formation

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reçue et l’emploi. En effet, la recherche quantitative « est basée sur une approche systématique de collecte et d’analyse de l’information obtenue à partir d’un échantillon de la population, afin de fournir des résultats valides sur le plan statistique, généralement utilisés à titre de pourcentages » (ROCARE 2010, p. 8) Une recherche sur l’efficacité externe quantitative d’un système éducatif devrait, toujours selon Sall et Deketele (1997), évaluer l’adéquation ou non entre « le nombre de diplômés exerçant dans des secteurs d’activités », le nombre d’étudiants formés à cet effet et « le nombre de diplômés détournés, soit parce qu’ils travaillent dans des secteurs pour lesquels ils n’ont pas été formés, soit parce que leurs diplômes ont été dépréciés au moment de l’embauche ». Finalement, étudier l’efficacité externe quantitative d’un système éducatif revient à se demander « si le système forme en nombre suffisant ou requis (prévu) les cadres (diplômés) » ; ce qui revient, évidemment, selon ces deux chercheurs, à une « planification des ressources humaines. Par exemple, combien de cadres intermédiaires ou de cadres de haut niveau devront sortir (être produits) du système au cours d’une période déterminée ? » Miala DIAMBOMBA (Etat des systèmes éducatifs dans les pays francophones en développement, in ACCT 1992, p. 119 et svtes), cité par Sall (1996), lie, quant à lui, l’efficacité externe à la qualité des systèmes éducatifs. En effet, pour lui, la notion de qualité va de « de la performance aux tests d’acquis des élèves aux conditions d’insertion sur le marché de l’emploi ». Cette corrélation paraît naturelle puisque les caractéristiques de l’efficacité externe évoquées ci-haut - et faisant état de la cohérence entre formation dispensée et marché du travail, nombre de formés et taux d’absorption par le marché, et même l’adéquation entre l’offre et la demande, etc. – ne sont rien d’autres que des indicateurs de qualité d’un système d’enseignement. L’efficacité externe, que DIAMBOMBA confond ainsi volontairement avec la qualité, se retrouvera intimement liée au « niveau des acquis est, à son tour, (est) affecté par les antécédents socio-économiques des élèves (la situation scolaire et professionnelle de leurs parents), qui ont d’ailleurs un impact sur la situation professionnelle future des élèves». (Sall, 1996, p. 112) Mais comment évaluer l’efficacité externe d’un système d’enseignement ? De la même manière qu’il existe des natures d’efficacité externe (qualitative et quantitative), les indicateurs ou outils de mesure pour apprécier de l’effet externe d’un système éducatif peuvent tout aussi être subjectifs ou objectifs. Pour ce qui est des indicateurs objectifs, ils sont non seulement basés sur des faits, mais sont encore dénués de préjugés et de partialité. Sall et De Ketele (1997) en font état et proposent les indicateurs sociaux comme l’un des outils d’évaluation de l’efficacité externe les plus souvent utilisés. Les angles d’analyse de ces indicateurs sociaux sont généralement « le nombre de diplômés au chômage x mois (ou x années) après l’obtention du diplôme, le nombre de diplômés occupant

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une profession de niveau supérieur, égal ou inférieur à leur diplôme, le nombre de subordonnés sous la responsabilité du professionnel en question, ou l’échelle de salaire » (Sall et De Ketele, 1997) Les indicateurs subjectifs, comme leur nom l’indique, s’appesantiront sur des perceptions individuelles, personnelles des acteurs formés (par exemple, à l’issue d’une formation professionnelle et technique), des chefs d’entreprise à la recherche de personnels, etc. Ces indicateurs sont ainsi des outils de mesure du « degré de satisfaction exprimé d’une part par le professionnel luimême, d’autre part par les responsables. » (ibid.) Sall et De Ketele n’ont pas manqué de citer, en illustration, l’étude de Goldschmid (1990), « comparant la satisfaction professionnelle (mesurée par des indicateurs objectifs et subjectifs) de diplômés en médecine, en droit, en psychologie, en économie et en ingénierie. » Enfin, l’efficacité externe n’étant complète que quand le produit formé trouve son épanouissement dans le marché du travail, l’ouverture à l’autre et l’esprit d’initiative sont autant de critères aptes à faire la différence. Donc, « la mondialisation de l’économie, la mobilité et l’aptitude d’entreprendre » représentent des indicateurs non négligeables. 4. MÉTHODOLOGIE

4.1 Design de la recherche 4.1.1 Population cible La présente étude porte principalement sur des titulaires du BTS (Brevet de Technicien Supérieur), qui est obtenu avec deux ans d’étude après le Bac. Nous avons choisi deux structures de formation professionnelle relativement différentes tant aux plans des conditions sociales, économiques que pédagogiques : le Centre de Formation Professionnelle et Commerciale (CFPC) et de l’institution Saint Michel. Notre population mère est donc composée des diplômés de ces deux structures, sortis entre les années 2007 (promotion qui est sur le marché de l’emploi depuis 5 ans) et 2011, la dernière promotion au moment de nos enquêtes. Le CFPC, situé dans le complexe technique Maurice Delafosse, forme des Secrétaires de direction des deux sexes, des Techniciens supérieurs en gestion comptabilité et des Techniciens supérieurs en commerce international, pour une période de 18 mois, complétée par deux mois de stage. Il est une structure de formation publique, sous la tutelle du ministère de l’éducation nationale, où accèdent les titulaires du baccalauréat toutes séries confondues, par voie de concours) et les titulaires de Licence ou de Maîtrise (par admission sur titre avec possibilité de sélection en cas de nombreuses candidatures). En tant que structure publique, le CFPC ne réclame pas de frais de scolarité mensuels à ses étudiants, qui peuvent même prétendre à des bourses d’études de la part de l’Etat du Sénégal.


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Le groupe Saint Michel de Dakar, affilié à l’Université Catholique de l’Afrique de l’Ouest (UCAO), s’active dans la formation privée au Sénégal depuis 75 ans. Il offre des programmes allant de l’enseignement secondaire technique aux diplômes supérieurs de niveau Bac+5 dans les domaines les plus en vue dans le marché de l’emploi. Pour le niveau du BTS, qui nous intéresse, la section BTS du complexe St Michel forme, en 18 mois, des bacheliers à qui sont proposées les filières suivantes : Comptabilité Gestion, Commerce International et Marketing Communication. Le complexe St Michel est ce que l’on pourrait appeler « une école privée high class », dans la mesure où les étudiants, vêtus tous d’une tenue obligatoire (1 veste, 1 gilet, 2 pantalons ou jupes, 2 chemises, 2 cravates, le tout à 50 000F), paient des frais d’inscriptions s’élevant à environ 60 000francs CFA (133$) avec des frais de mensualité tournant autour de 40 000 francs CFA (88$). Le groupe dispose d’un bureau d’orientation et de placement qui se charge de trouver aux étudiants un stage et un emploi grâce à un réseau dense de partenaires. Les responsables de ces deux écoles de formation ainsi que ceux de deux entreprises où sont employés des diplômés participant à l’étude ont également pris part à l’étude. 4.1.2 Echantillonnage En raison des spécificités de cette recherche (genre et marché de l’emploi), nous avions préparé un plan d’échantillonnage assez fin pour répondre aux objectifs de notre recherche. Mais toutes nos prévisions d’échantillonnage, établies au moment de la confection du projet de recherche, ont été bouleversées, à cause de la réticence de certaines écoles et de certains diplômés à nous apporter leurs témoignages. Finalement, ces trois niveaux d’échantillonnages se sont imposés à nous. • Pour le contact des écoles : Echantillonnage à choix raisonnés. Nous n’avons contacté que 2 types d’écoles. D’une part, des écoles publiques « économiques », accessibles aux couches sociales plutôt défavorisées ; d’autre part, des écoles privées « high class », c’està-dire qui exigent un fort investissement de la part de l’étudiant. • Pour le choix définitif des écoles contactées. Echantillonnage basé sur le volontariat : seules 2 structures de formation ont effectivement accepté de participer à l’étude. • Pour le choix des diplômés : Echantillonnage par quotas, basé aussi sur le volontariat, à partir de la base de sondage (c’est-à-dire la population de diplômés dont nous avions effectivement les coordonnées) qui était de 409 diplômés, dont 276 filles (67,5%) et 133 garçons (33%). Aussi, pour que notre échantillon soit représentatif de la base de sondage, avons-nous tenté de reproduire exactement les pourcentages de filles et de garçons. Finalement, nous avons interrogé 242 diplômés, soit 59% de la base de sondage, dont 163 filles (67,5%) et 79 garçons (32,5%).

4.2 Type de recherche 4.2.1 Recherche exploratoire, enquête de perceptions et étude qualitative Notre recherche est de type exploratoire, dans la mesure où nous cherchons à clarifier une question qui, jusque-là, semble très peu explorée, pour ne pas dire négligée par les chercheurs sénégalais. A ce propos, la question générale de recherche est : Au Sénégal, le genre détermine-til l’insertion dans le marché de l’emploi et les impacts socio-économiques des formations professionnelles et techniques ? La recherche exploratoire viserait ainsi, selon Van der Maren (1995), à combler un vide. L’étude est aussi sur fond d’enquête de perceptions. Il s’agit alors d’une étude qualitative qui cherche les facteurs théoriques qui répondent à nos préoccupations. En effet, les données que nous recueillons sont le fruit d’avis, de vécus et d’impressions des principaux acteurs que sont les étudiants diplômés, les personnels des écoles et les responsables des entreprises. 4.2.2 Etude quantitative Des estimations numériques sont faites autour des indices de tendance centrale et autres indices de dispersion. Par exemple, nous analysons, avec beaucoup d’intérêt, la part des femmes dans notre échantillon par rapport à celle des hommes. Nous nous intéressons aussi au pourcentage de diplômés ayant trouvé un emploi (ou au chômage), au moment de l’enquête ; à l’écart entre hommes et femmes dans la population insérée dans le marché de l’emploi, comme dans la population non insérée ; à la moyenne d’âge des diplômés en activité sur celle des diplômés au chômage, etc. 4.3 Outils de recueil de données 4.3.1 Questionnaires Plus apte à recueillir le maximum de données, ils sont administrés aux étudiants pour recueillir des informations sur le profil de la personne diplômée (civil, matrimonial et professionnel), sur ses rapports au marché de l’emploi (en activité ou au chômage ?), la situation professionnelle et sur les impacts socioéconomiques de la formation. 4.3.2 Guides d’entretien Des focus group ont également été tenus avec des diplômés déjà interrogés par questionnaires et appartenant à une même promotion, en vue de susciter des questions pertinentes sur l’objet de recherche, mais pas assez abordées dans les questionnaires. Les chefs d’entreprises et les administrateurs des structures de formation professionnelle et/ou des bureaux d’orientation et de placement des étudiants nous ont apporté leurs témoignages sur la part des filles dans leurs effectifs, les filières de formation les plus demandées, les réalités de l’insertion dans le marché de l’emploi, etc. Lors de nos visites dans les entreprises et les structures de formation, nous nous sommes aussi munis de grilles d’entretien afin de mieux cerner leurs différentes réalités.

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4.4 Analyse des données Les données quantitatives sont traitées avec les logiciels EXCEL et SPSS version 16.0. Quant aux données qualitatives, nous en avons fait une analyse argumentée, sous l’éclairage du cadre conceptuel et théorique. 5. CONSIDERATIONS ÉTHIQUES Afin d’atteindre les objectifs de la recherche, nous nous sommes prémunis de normes éthiques, que nous avons d’ailleurs fortement insufflées à nos collaborateurs. En effet, tel que suggéré par Kamau (2012), les normes éthiques sont indispensables dans une étude qui rend compte au public. Il était alors opportun, voire crucial, de prendre un certain nombre de dispositions pour s’assurer un recueil de données fiables et des résultats authentiques et incontestables. Dans un premier temps, à l’égard des écoles de formation approchées à l’entame de l’étude, nous avons eu l’honnêteté d’informer clairement les responsables sur les objectifs de l’étude. Nous les avons surtout avertis que l’étude concernait deux types d’écoles, aux réalités diamétralement opposées et que, implicitement, des comparaisons seraient faites entre leur école et d’autres. C’est ainsi que les deux premières écoles qui ont décidé de participer à l’étude (Saint-Michel et CFPC), après plusieurs séances d’échanges, nous ont livré les listes de leurs diplômés dont elles avaient encore les coordonnées, rassurées qu’elles étaient que nous en ferons un usage responsable. Les responsables des bureaux d’orientation et de placement de ces deux écoles n’ont pas hésité à nous demander, si jamais il devait y avoir un malentendu avec les diplômés, de réconforter ces derniers en leur précisant que nous avons l’agrément de la tutelle de leur ancienne structure de formation (CFPC ou Saint Michel). Ensuite, la tâche a été un peu plus ardue avec les principaux participants à l’étude : les 409 diplômés constituant la base de sondage. Nous avons opté de les joindre tous au téléphone, moyen de communication plus vivant et interactif, à la différence du courrier électronique qui risque de rejeter nos messages dans les spam. Il fallait alors faire preuve d’amabilité, de courtoisie, d’ouverture, de correction et surtout de clarté pour réussir ce premier contact et arriver à convaincre le maximum de participants à l’étude. Vu le caractère personnel de certaines données à collecter (âge, situation matrimoniale, salaire, biens, etc.), nous avons bien pris soin, pour gagner la confiance de nos interlocuteurs, de leur garantir la confidentialité des informations recueillies. Finalement, nous avons obtenu l’adhésion de 242 d’entre eux, qui ont tous répondu à un questionnaire. Etant donné que l’équipe de recherche ne pouvait pas, seule, administrer les questionnaires, nous avons aussi cru bon de bien préparer les chercheurs recrutés pour nous apporter un soutien. Après avoir partagé avec eux les objectifs de la recherche, nous les avons particulièrement sensibilisés sur les valeurs qui devraient être les leurs lors de leurs sorties, et sans lesquelles l’étude ne saurait connaitre une réussite : le respect, la patience, la ponctualité, la discrétion. La confiance n’excluant nullement le contrôle, nous nous sommes toujours 116

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assurés que les enquêteurs ont effectivement rencontré les enquêtés pour l’administration des questionnaires. C’est dans cette perspective que nous avons rappelé au téléphone tous les enquêtés, après chaque passage d’enquêteur, pour les remercier de leur coopération. Nous étions d’autant plus poussés à agir ainsi qu’il nous fallait dissuader les enquêteurs de toute idée de fabrication des réponses des questionnaires. Voilà autant de mesures prises pour se garantir une recherche de qualité. 6. PRINCIPALES CONCLUSIONS DE LA RECHERCHE Vu les spécificités de cette étude, nous présenterons, autant que possible, les résultats du point de vue d’une analyse en genre. En effet, pour chacun des deux sexes, nous allons prendre en compte les résultats, les forces, les faiblesses, les opportunités, les besoins, l’accès à l’emploi, etc. Bref, nous nous inspirerons, naturellement, des cadres de recherche en genre, de manière générale, et des théories abordées dans la partie conceptuelle. 6.1 Considérations générales sur l’échantillon Comme cela a été dit dans la partie de méthodologie, notre échantillon comporte un effectif de 242 répondants, dont 79 hommes et 163 femmes ; les hommes constituant environ 33% de l’échantillon, alors que les femmes en représentent les 67%, soit quasiment le double de l’effectif masculins. Il est évident qu’une telle situation peut constituer une limite dans l’analyse des données recueillies. Cela, dans la mesure où il serait difficile d’amorcer une quelconque comparaison entre les deux groupes. Cependant, il serait intéressant d’analyser la dynamique interne qui caractérise ces deux groupes qui constituent notre échantillon. Tableau 2.5 Répartition du statut professionnelle selon le genre Sexe * Statut professionnel Crosstabulation Statut professionnel Total Oui Non 79 32 47 Count Masc. % of Total 13,20% 19,40% 32,60% Sexe Count 97 66 163 Fém. % of Total 40,10% 27,30% 67,40% 129 113 Count 242 Total % of Total 53,30% 46,70% 100%

A titre indicatif, l’interprétation de la situation matrimoniale (graphique 2.2) indique qu’il y a plus de femmes célibataires que d’hommes. En effet, rien que chez la part de notre population qui a réussi à trouver un emploi, plus de 5 (cinq) hommes sur 10 (dix) sont célibataires, au moment où plus de 6 (six) femmes sur 10 (dix) sont dans le même cas. Concernant les marié(e)s, 41% des hommes de notre échantillon se disent mariés, alors que juste 35% des femmes sont dans cette situation. Ainsi donc, les femmes seraient moins enclines à se marier que d’habitude. Cette situation a-t-elle un lien avec leur niveau de formation ou bien cela démontre-t-il une sorte de révolution ? En tous les cas, force est de noter que l’une


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des fonctions premières, voire naturelle, de la femme africaine semble être le mariage et la gestion du ménage. Graphique 2.2 Situation matrimoniale des diplômés actifs

63% 53%

35% 41%

2% 3%

Marié(e) Femmes

Célibataire

Divorcé(e)

3% Vuef(ve)

Hommes

Le choix des filières (graphique 2.3) chez les diplômés actifs dans le marché de l’emploi renseigne de manière globale que des filières comme Secrétariat-Bureautique ou encore son prolongement Assistanat de direction sont davantage courues par les femmes qui s’y orientent à presque 40% contre 19% pour les hommes. Ce qui corrobore l’avis de plusieurs observateurs de la littérature scientifique (Durut-Bellat) ou encore de la littérature grise (le Ministère de l’Enseignement Technique et Professionnel du Sénégal), selon qui les femmes sont plus poussées vers le secteur tertiaire, qui comprend essentiellement le secteur des services. Les hommes, de leur côté, ont plutôt tendance à fréquenter la filière Comptabilité-Finance, où ils représentent 38% des effectifs contre 22% de femmes. Il est à noter, par contre, qu’en Comptabilité Gestion, il y a légèrement plus de femmes (24%) que d’hommes (22%). Pour ce qui est de la filière Gestion des entreprises, les taux qu’on retrouve au niveau des hommes et des femmes n’atteignent pas 10%. En Commerce international, enfin, si 13% des diplômés hommes ont opté pour cette filière, seules 6% des femmes s’y retrouvent. Graphique 2.3 Choix des filières de formation selon le genre

19%

6%13%

G En es tre tion pr ise Se bu cr re ét au ar tiq iat ue Co in m te m rn e at rc io e na l Co Ge m st pt io ab n il ité Co Fi m na p nc tab e ili té

8% 9%

38% 24% 22% 22%

Femmes

1% 0% NR

39%

Hommes

Il apparait, donc, que les filières Assistanat de direction, Secrétariat bureautique, Comptabilité gestion et, dans une moindre mesure, Comptabilité finance, semblent constituer les options les plus choisies par les femmes qui sont arrivées à trouver un travail dans la population de notre étude. 6.2 Sur l’insertion dans le monde de l’emploi Une analyse globale des diplômés en activité selon le genre (Tableau 2.5), révèle que sur les 242 sujets de notre

échantillon, 129 diplômés sont en activité professionnelle, avec 97 femmes et 32 hommes, soit des taux respectifs d’environ 75% et 25%, sans oublier la proportion importante de femmes dans notre population d’étude. A rappeler que, selon la formulation de nos outils de recueil de données, nous considérons qu’un diplômé est en activité dans trois cas : il a un travail rémunéré en Contrat à Durée Déterminée (CDD) ou en Contrat à Durée Indéterminée (CDI), ou bien il se trouve en stage dans une entreprise, ou bien il s’auto-emploie. Si le diplômé n’est dans aucun de ces trois cas, l’on considère alors qu’il est inactif ou au chômage. Ainsi, l’analyse statistique de nos données révèle, sur la base de l’échantillon total, 13,20% d’actifs contre 19,40% d’inactifs chez les hommes. Chez les femmes par contre, celles qui sont en activité, par rapport à la population totale, sont de l’ordre de 40%, tandis que 27,30% sont en situation de chômage. Cette situation du niveau d’absorption de nos diplômés par le marché de l’emploi peut aussi être analysée à partir de la part du ratio de chaque sexe dans l’échantillon total. Il en ressort alors que 40% des hommes sont en activité professionnelle contre 60% chez les femmes. A la lecture de ces derniers chiffres, qui nous écartent de toute plate comparaison, une simple analyse descriptive permet de remarquer que 6 femmes sur 10 ont réussi à décrocher un emploi, alors que seuls 4 hommes sur 10 déclarent être en activité. Ainsi, le chômage semble, toute proportion gardée, frapper plus les hommes que les femmes qui, apparemment paraissent être les préférées des recruteurs. Pour ce qui est de la nature des contrats (graphique 2.4) que les diplômés occupés estiment posséder, il apparait que le nombre de femmes à détenir un Contrat à Durée Indéterminée (CDI) est plus important que celui des hommes dans la même situation. En effet, 4 (quatre) femmes sur 10 (dix) disposent d’un CDI (type de contrat le plus sécurisant pour le travailleur) contre 3 (trois) hommes sur 10 (dix). Par ailleurs, pour ce qui est des diplômés occupés, qui bénéficient d’un Contrat à Durée Déterminée (CDD), l’étude renseigne qu’ils sont à 50% de femmes, alors que du côté des hommes, ils représentent 31%. Pour ce qui est des contrats d’engagement à l’essai ou Stages, l’étude montre que 22% des femmes sont en stage, alors que seuls 3% des hommes sont occupés à ce type de contrat. Enfin, pour ce qui est de l’auto-emploi, les hommes l’emportent sur les femmes, avec 9% contre 1%. Graphique 2.4 Répartition de la nature des contrats selon le genre 46%

50% 38%

31%

22% 3%

CDI Femmes

CDD

Stage

1%

9%

Auto-emploi

Hommes

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Une analyse plus fouillée des résultats liés à la nature des contrats fait apparaitre une forte relation entre le genre et la nature des contrats (Tableau 2.6). En effet, le traitement statistique au moyen du test de chi 2 nous montre que le t calculé est ≥ au t donné par la table. Ce qui, en d’autres termes, veut dire que le test est significatif (on accepte H1). • H0 = la nature des contrats obtenus par les diplômés n’est pas liée au genre. • H1 = la nature des contrats obtenus par les diplômés est liée au genre.

Graphique 2.5 Répartition selon le genre des raisons ayant déterminé l’emploi occupé

Si on rejette H0 et si qu’on accepte H1 au seuil de 1 %. On peut alors considérer que les populations ont des moyennes significativement différentes. Il y a donc moins de 1 chance sur 100 pour que les fluctuations observées soient dues au hasard.

Les diplômés en situation de chômage (graphique 2.6), quant à eux, décrient vigoureusement l’opacité des procédures de recrutement, dans la mesure où ils méconnaissent les critères que recherchent les entreprises chez eux. Ils dénigrent surtout le système d’organisation des stages en entreprises. A ce sujet, la législation en la matière est très peu respectée, d’après nos interviewés. Ils soutiennent qu’après un engagement à l’essai de 6 mois (conformément à l’article L38 du Code du travail sénégalais), généralement non rémunéré, au lieu d’un contrat en bonne et due forme, il ne leur est proposé qu’un renouvellement du stage ou un arrêt définitif ; ce qui constitue, pour eux, une trajectoire galère.

Ainsi, le nombre plutôt important de femmes en Contrats d’engagement à l’essai (22%) semble prédire des lendemains meilleurs pour l’emploi des femmes. En effet, sans trop faire dans l’extrapolation, ce taux, ajouté à celui des femmes qui détiennent un CDD (31%), permettrait d’avoir 53% de femmes en CDD. Tableau 2.6 Test de significativité genre et nature des contrats Value Pearson Chi-Square

df

Asymp. Sig. (2-sided)

13,129a

3 ,004

13,785

3 ,003

Linear-by-linear association

172

1 ,679

N of Valid Cases

129

Likelihood ratio

Pour parler maintenant des raisons que les diplômés interrogés ont avancées pour expliquer leur situation d’activité professionnelle (graphique 2.5), l’étude montre que 2/4 (deux quarts) des femmes et aussi des hommes avouent qu’ils occupent leurs postes grâce à l’intervention d’une personne influente à l’intérieur ou à l’extérieur de leur lieu de travail. En conséquence, l’apport des réseaux, évoqué plus haut dans la partie théorique semble ici se confirmer. Par ailleurs, il semble très intéressant de souligner que 30% des femmes actives de notre échantillon affirment n’être point passées par les réseaux sociaux, mais avoir déposé un dossier de demande d’emploi ; ce qui laisse supposer que le mérite et les compétences de ce groupe - pour lesquels ces femmes auraient été recrutées - peuvent être difficilement niées. Par ailleurs, lors des focus group, les diplômés ont été quasi unanimes à dénoncer le népotisme qui est mis en œuvre dans les entreprises lorsqu’il s’agit de recrutement. Les jeunes utilisent l’expression « bras longs » pour dire que la connaissance ou le parent que l’on peut avoir dans l’entreprise peut toujours mener loin.

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52%53%

N V

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Su

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r

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Femmes

In t_

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28% 30% 11% 9% 1% 3% 2% 3% 3%3% 1% 0%

Hommes

Graphique 2.6 Raisons évoquées pour expliquer la situation de chômage 77%

Manque recom Formation en cours Discrimination liée au sexe Comp exp form insuff

10,60% 7,10% 5,30%

Nous nous sommes aussi interrogés sur les antécédents scolaires de notre échantillon : ceux qui arrivent à trouver un emploi proviennent de laquelle des deux écoles de formation qui servent de cadres à notre recherche ? Là, les plus forts taux sont du côté de la structure privée avec 66% chez les hommes et 53,60% pour les femmes. Ce qui laisse imaginer que l’investissement dans l’éducation ou encore la part des ménages dans l’éducation contribuent pour beaucoup dans la qualité des produits. Néanmoins, la structure publique est bien défendue par les femmes qui en sont sorties avec 46,4% de diplômées insérées sur la part de population active, contre 34% d’hommes. Il reste à signaler, enfin, que le secteur privé absorbe la part la plus importante des diplômés qui constituent notre échantillon (graphique 2.7). En effet, pour respectivement 72% et 75%, les femmes comme les hommes affirment avoir été recrutés par une entreprise privée. A ce sujet, l’étude a le mérite d’apporter un faisceau d’informations dans ce flou total concernant les statistiques du marché de l’emploi au Sénégal. Toutefois, un fait demeure certain : « le ralentissement des recrutements dans la fonction publique », relevé d’ailleurs en 2010 par le Rapport sur


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la Situation Economique et Sociale du Sénégal (p. 121). D’ailleurs, cette suprématie du secteur privé sur le secteur public, se voit surtout à Dakar, la capitale, qui se trouve être le cadre de notre étude. Le service national de Statistiques révélait justement que « la moyenne annuelle de création d’emplois nouveaux directs par le secteur privé est de 30 000 emplois, dont 20 000 dans la région de Dakar seulement. » Graphique 2.7 Répartition des actifs suivant le genre et l’employeur 72% 27%

Graphique 2.8 Répartition des revenus mensuels selon le genre

19%

1% Privé

Etat Femmes

75%

salaire nous a d’ailleurs été confirmée par des responsables de bureaux de recrutement des entreprises que nous avons interrogés. Il s’est ainsi avéré que dans beaucoup d’entreprises sénégalaises, le premier salaire tourne entre 100 000 et 150 000 francs. Au même moment, 44% des hommes gagnent entre 250.000 et 300.000 francs CFA (555 à 666$) et 10% des femmes ont aussi confié qu’elles gagnaient plus de 300.000 francs CFA, ce qui équivaut à 666$. Enfin, 6% des femmes, en situation d’engagement à l’essai, perçoivent moins de cinquante mille francs, qui représentent, selon les responsables d’entreprises, leurs primes de déplacement.

6%

Auto-emploi

Hommes

D’autre part, la faible part d’absorption des diplômés par le Public pourrait justifier le manque de confort et de sécurité, de même que le peu de satisfaction ressentie par les travailleurs de notre échantillon. Ils estiment ainsi, à plus de ¾ (trois quarts), aussi bien les hommes que les femmes, qu’ils exercent le travail qu’ils occupent juste « en attendant de trouver mieux ». Très rares sont donc les travailleurs satisfaits de leur situation, jusqu’à soutenir qu’ils considèrent leur emploi comme définitif : il n’y a que 1 (un) homme ou 1(une) femme sur dix. Enfin, dans la logique de la politique de libéralisation de l’économie enclenchée par le Gouvernement du Sénégal depuis les années 90 et confortées par celles des années 2000 (ANSD, p. 116), l’on s’attendait à ce que, à l’image de l’émergence du Privé, les diplômés se prennent en charge par l’auto-emploi. Mais l’enquête n’a fait ressortir qu’un faible taux d’auto-emploi à l’actif des hommes contre 1% seulement pour les femmes ; ce qui est peu satisfaisant. 6.3 Sur les impacts socio-économiques de la formation reçue Nous rappelons, à ce niveau de l’étude, que cette recherche doit être considérée comme une étude « ex post », qui cherche à observer les effets, une fois le projet réalisé (Gittinguer, 1985). De ce point de vue, l’on ne saurait alors parler d’impact de la formation suivie pour les diplômés n’ayant pas trouvé d’emploi au moment de l’enquête. Donc, l’analyse qui sera faite dans les lignes qui suivent ne concerne que les 129 diplômés en activité professionnelle, dont 97 femmes et 32 hommes. 6.3.1 Impacts économiques Pour la mesure de leurs revenus mensuels (graphique 2.8) de nos diplômés insérés dans le marché de l’emploi, des fourchettes de salaires leur étaient proposées. Les diplômés en activité professionnelle devaient donc, en répondant aux questionnaires, cocher l’intervalle de salaire qui correspondait à leur situation. L’étude a alors montré que 40% des femmes perçoivent entre 100.000 et 150.000 francs CFA (environ 222 à 333$). Cette barre de

44% 40% 25% 21% 16%19% 10% 9% 6% 0% 5% 3% 2% 0% Moins de Moins de Entre Entre Entre Plus de 50 000 100 000 100 000 150 000 250 000 300 000 francs francs et 150,000 et 200 000 et francs CFA CFA CFA francs CFA francs 300 000 CFA francs CFA

NR

Femmes Hommes Plusieurs analyses peuvent être faites sur ce qui précède. D’abord, les travailleurs qui ont entre 222 et333$ de salaire sont dans l’un de ces trois cas : ils sont à moins d’un an dans l’entreprise et perçoivent le salaire minimum de 222$ ; ou bien ils ont fait plus d’un an et ont obtenu une augmentation de salaire de 30 000 francs CFA (66$) ou de 50 000 francs CFA (111$). Lors de nos interviews, en effet, les responsables des personnels interrogés nous ont confié que dans toutes les entreprises sénégalaises, il devrait exister un système d’avancement qui permettrait aux travailleurs et travailleuses de gagner un peu plus. Mais il faut que le travailleur demeure assez longtemps dans le poste pour mieux bénéficier de ce système d’avancement. En gros, les montants ajoutés sur les salaires des travailleurs vont de 30 000 à 50 00 francs CFA (66 à 111$). Ensuite, un fait intéressant mérite d’être relevé : les salaires les plus élevés, 300 000 francs CFA (666$), sont détenus par des femmes qui se trouvent être, en majorité, dans l’assistanat de direction.

En dernière analyse, les diplômés interrogés en focus group, comme d’ailleurs les personnes chargées du recrutement des personnels dans les entreprises, ont admis qu’il n’y a pas de discrimination sur les salaires en fonction du sexe. Ce qui est conforme à l’article L105 du Code travail qui stipule : « A conditions égales de travail, de qualification professionnelle et de rendement, le salaire est égal pour tous les travailleurs, quels que soient leur origine, leur sexe, leur âge et leur statut […] ». Néanmoins, les responsables des personnels ont reconnu que, de plus en plus, les entreprises préfèrent recruter plutôt des femmes que des hommes : « A la maison, ce sont les femmes qui s’occupent de tout : éducation des enfants, marché, repas, entretien de la maison, etc. Ce sont les mêmes qualités que les femmes transfèrent sur leur lieu de travail. Les femmes sont plus sensibles, plus engagées et, donc, plus compétentes que les hommes », a

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témoigné un responsable du personnel d’une banque de la place. Mais le seul couac dans le recrutement des femmes constitue les maternités qui « peuvent décourager les employeurs ». Il apparaît ainsi que des mutations sont en train de s’opérer, au Sénégal, dans les choix de recrutement et de responsabilisation des uns et des autres dans le lieu de travail, au grand bénéfice des femmes. D’aucuns y verraient peut-être une certaine volonté politique du gouvernement précédent, qui a beaucoup œuvré dans la promotion de la femme, en instituant la parité absolue dans les postes électifs. Même si le monde du travail est bien loin du Parlement, l’on peut penser que des mesures du genre (la parité) sont aptes à insuffler un climat de confiance à toutes les femmes du Sénégal. Néanmoins, ces hommes et femmes ont-ils réussi à améliorer leur niveau de vie, grâce à l’emploi qu’ils occupent ? A ce propos (graphique 2.9), 39% des femmes disent n’avoir acquis « aucun » bien ; 41% estiment avoir une « épargne » ; 7% de femmes ont réalisé un « logement familial » ; 5% ont pu bénéficier d’un « investissement à rentabilité financière », et enfin 3% ont pu se payer une voiture. Pour ce qui des hommes : 28% avouent qu’ils n’ont eu « aucun » acquis ; 34% ont pu réaliser une « épargne » ; 13% affirment bénéficier d’un « investissement à rentabilité financière » et 25% disent avoir acquis un « logement familial ». Malgré la disproportion entre hommes et femmes dans notre échantillon, les chiffres précédents semblent confirmer l’idée généralement admise dans beaucoup de pays africains selon laquelle l’acquisition du logement familial, sinon ses frais, reviennent à l’homme. Seulement, le vent de révolution, senti plus haut, semble se préciser encor ici avec la percée des femmes qui s’occupent ici, à 7% d’acquérir un logement, ou même de posséder une voiture qui symbolise, dans l’imaginaire africain, la force, voire la puissance, masculine. Graphique 2.9 Répartition des biens acquis grâce à la formation selon le genre

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Femmes

13%

4% 0% NR

5%

3% 0%

I fin nv r an en c t

7%

39% 28%

34%

cu n

25%

Au

41%

Hommes

Par ailleurs, les témoignages de notre population d’étude sur leur investissement dans les revenus du ménage laissent voir que les hommes ne s’occupent pas tout à fait seuls des charges du ménage, comme le veut « l’obligation d’entretien » qui les engage, selon le Code de la famille du Sénégal. Ainsi, quand 62% des hommes mariés assurent être les principaux producteurs de biens de leur famille (graphique 2.10), cela suppose que le reste (les 38%) est sûrement appuyé en cela par leurs femmes. En effet, la participation de la femme dans la création ou la multiplication des revenus des ménages est nettement apparue dans la littérature et se confirme dans cette 120

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étude à travers ce taux de 12% de femmes qui confient qu’elles représentent les principales productrices de biens de leurs familles. Il existe également 62% de femmes qui déclarent partager la production des biens de leur famille avec leur conjoint. Au même moment, 24% de femmes avouent que ce rôle est exclusivement dévolu à leur mari. L’étude nous donne aussi une idée de la taille des familles ou des charges supportées par les travailleuses et travailleurs : 41% des femmes en activité professionnelle disent qu’elles ont en charge « entre 5 et 10 » personnes. Graphique 2.10 Répartition selon le principal producteur de bien de la famille 62% 24%

0%

Votre conjoint(e) Femmes

12% Vous

62%

39% 3%

Vous deux

0%

Parents

Hommes

6.3.2 Impacts sur la vie sociale Après avoir analysé les effets économiques des formations suivies par notre population d’étude, voyons maintenant si l’emploi obtenu grâce à la formation professionnelle suivie produit des effets sur la vie sociale de ces diplômés de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle (ETFP), c’est-à-dire dans leurs rapports avec les autres, leur conception des règles de vie en société, etc. S’agissant des tâches domestiques (graphique 2.10), il apparait que, sur le total des diplômés en activité, 83,5% avouent qu’ils s’occupent personnellement des tâches domestiques. Pour ce qui est spécialement des femmes, à qui l’entretien de la maison est naturellement dévolu, 8 (huit) femmes sur 10 (dix) pensent que l’accomplissement des tâches domestiques ne constitue pas un obstacle à leur épanouissement professionnel, tout en s’empressant de préciser qu’elles s’en occupent le week-end. Ce qui est contraire, en tout cas, à l’observation de l’OIT (voir cadre théorique) selon laquelle les obligations familiales peuvent nuire à la carrière des femmes. Une question mérite alors d’être posée à ce niveau : qu’est-ce qui fait que les femmes sénégalaises prennent le contre-pied de leurs homologues de tous les pays africains et même des institutions internationales ? En tous les cas, notre avis de chercheurs est qu’il faudrait en trouver la raison dans la psychologie de la femme sénégalaise, qui croit foncièrement qu’elle doit s’occuper de « son homme » et de sa famille, en s’occupant, au moins, personnellement de la cuisine. Il y a aussi un autre fait, non moins important, qui facilite relativement la vie des femmes travailleuses : les domestiques. En effet, rares sont les femmes en activité qui ne font pas recours à leurs consœurs domestiques, qu’elles paient elles-mêmes de leurs salaires. Enfin, les responsabilités domestiques des femmes travailleuses sénégalaises semblent, quelque part, être le « ciment » qui consolide les attributions des femmes dans leurs ménages, en les rendant plus fortes, plus performantes, etc.


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Graphique 2.11 : Acquittement des tâches domestiques 83,50%

13,40%

Oui

Non

3,10% NR

82,40%

11,80%

Oui

5,90% Non

NR

De plus, les diplômés de l’ETFP insérés dans le marché de l’emploi que nous avons interrogés reconnaissent, à plus de ¾ (trois quarts), que leur parcours aurait un effet sur leur décision du nombre de maternités à faire (surtout pour les femmes). Ce fait nous a été réitéré, en entretien, par une jeune femme qui nous a confié que son «employeur n’a pas mis au point de mesure coercitive contre les congés de maternité », mais que c’est plutôt elle-même qui a « décidé d’espacer nettement ses maternités afin de mettre à l’aise ses collègues et ses supérieurs ». Le même lot de diplômés admet aussi un effet sur leur conception de l’éducation des enfants ; ce qui rejoint la thèse de Arrow (1973), développée dans la partie théorique, sur les aptitudes que l’éducation réveille chez l’individu. Pour terminer, nous relèverons que 75% des femmes et 78% des hommes ont répondu « oui », effectivement, la formation a eu des effets sur l’acceptation des règles de conduite morales, traditionnelles ou religieuses en vigueur dans la société sénégalaise, renommée pour ses valeurs de solidarité à travers la mythique « Téranga », un ensemble de principes d’hospitalité, de convivialité, de partage, de vie en communauté. 7. CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS Cette recherche était une analyse en genre, dont l’objectif premier était d’étudier le niveau d’insertion, dans le marché de l’emploi, des filles et garçons diplômé(e) s de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle (ETFP) du Sénégal. Une fois l’insertion constatée, il s’agissait de mesurer, dans un second temps, les impacts économiques et sociaux de la formation suivie. En définitive, on pense pouvoir soutenir, globalement, que le niveau d’insertion dans le marché de l’emploi des diplômés de l’ETFP est plutôt correct, dans la mesure où sur 242 sujets interrogés, 129 sont en activité professionnelle. Toutefois, la prudence est de mise lorsqu’il s’agit de faire une analyse en genre dans la mesure où les femmes raflent les 97 postes. Les enquêtes menées confirment,

ainsi, notre hypothèse générale, selon laquelle « les femmes ou filles qui sont dans les filières de l’ETFP s’insèrent plus facilement dans le marché de l’emploi que les hommes». La première preuve en a été donnée, dès la phase de constitution de la population d’étude, à travers la forte proportion de filles et de femmes inscrites dans le sous-secteur de l’ETFP, aussi bien dans les structures publiques que dans les structures privées. En outre, choisissant pour la plupart les filières du SecrétariatBureautique, de l’Assistanat de Direction ou encore de la Comptabilité-Gestion, les femmes se destinent au secteur tertiaire de l’économie nationale. Une fois le diplôme en poche, les femmes sont les préférées des Chargés des recrutements des entreprises, en raison de « l’engagement et de la passion naturels que la gent féminine met dans ses affaires » ; ce qui révèle une discrimination positive en leur faveur. D’autre part, l’étude a reproduit la tendance selon laquelle le Privé recrute plus que le Public. Mais le fait qui mérite d’être souligné, ici, est l’insatisfaction des travailleurs du secteur privé qui, loin d’y trouver tout à fait leurs comptes, sont perpétuellement à la recherche d’une situation plus avantageuse : d’où une permanente instabilité. En amont, l’investissement consenti par les parents ou par l’employeur dans la formation privée (au détriment du public) ne semble être déterminant que pour les garçons, dans la mesure où les filles, indifféremment issues d’une école publique ou privée, ont gagné l’assentiment des Recruteurs. Pour ce qui est des impacts sociaux et économiques des formations professionnelles, nous retiendrons que les travailleurs et travailleuses sénégalais(es), sont relativement bien traités sur le plan salarial. Mais, pour ce qui est spécifiquement des femmes, l’étude a montré que si elles n’investissent pas entièrement leurs salaires dans l’acquittement des services sociaux de base, tels que les factures d’eau, d’électricité, la nourriture, la scolarité des enfants, etc., les femmes contribuent pour beaucoup dans les dépenses des ménages. Cette participation des femmes dans la production des biens de la famille, attestée dans la littérature, prend dans notre étude un air de révolution dans la mesure où cela amène certains hommes à reconsidérer la fonction de leurs épouses qui peuvent maintenant décider, au même titre que leurs époux, du nombre de maternités, par exemple. Ce qui constitue une mutation dans les pratiques sociales, culturelles, religieuses en vigueur au Sénégal. Ainsi, au plan social, la reconnaissance de la fonction de production et de gestion de la communauté de la femme bouscule certaines règles préétablies ; ce qui pourrait avoir d’autres conséquences sociales. 7.1 Difficultés intervenues lors de la recherche Des obstacles n’ont pas manqué pendant le déroulement de nos enquêtes. Ce qui nous a amené à nous poser un certain nombre de questions : • Qu’est-ce qui explique ce fort taux de femmes dans les effectifs de l’Enseignement Technique et de la

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Formation Professionnelle à Dakar ? En est-il de même dans toutes les régions du Sénégal, en Afrique et dans le monde ? • L’enquête a été rendue impossible dans beaucoup d’écoles de formation contactées au préalable, à cause de l’absence sur place d’un service d’archives des dossiers des promotions des 5 (cinq) dernières années. Quelles stratégies faut-il alors mettre en œuvre pour amener les écoles à se construire une base de données fiables de leurs différentes promotions d’étudiants, surtout dans ce contexte d’informatisation des systèmes ? • Les populations sont toujours réticentes à participer ou à adhérer aux études et autres enquêtes : que faudraitil faire pour qu’elles sachent que les recherches entreprises par les organismes n’ont d’autre but que l’amélioration de leurs conditions de vie ? • Il y a un faible taux de diplômés en activité : comment pousser les entreprises à recruter davantage ?

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7.2 Recommandations pratiques • Elaborer des politiques, pour inciter davantage les filles à s’inscrire dans les filières de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle, ce qui pourrait à long terme réduire la pauvreté en Afrique. • Promouvoir l’auto-emploi par le financement de PME ou de PMI et ainsi multiplier les offres d’emplois provenant du secteur privé. • Amener les états à veiller davantage au respect par les entreprises des droits des travailleurs, et particulièrement des travailleuses, à une protection sociale. • Encourager les écoles de formation à accorder une attention particulière à l’initiation des étudiants et étudiantes aux règles et modalités de l’entretien d’embauche. • Encourager les états à un recrutement plus important des diplômés de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle.


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Research on Poverty Alleviation (REPOA)

Dès le milieu des années 80, le secteur privé n'avait pas la capacité d'absorber le nombre important de demandeurs d'emploi arrivant chaque année sur le marché du travail… Ce décalage a favorisé le chômage et le sous-emploi, notamment chez les jeunes.

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Explorer la nature sexospécifique des liens éducation-marché du travail en Tanzanie : Au-delà des chiffres

RESUME Dans un grand nombre de pays, y compris la Tanzanie, l’inégalité entre les genres reste un sujet de préoccupation dans tous les domaines de l’existence. L’éducation et le marché du travail, deux secteurs dont les liens étroits sont reconnus n’y font pas exception. Utilisant le cadre de l’enseignement supérieur, ce rapport reprend les données d’une étude essentiellement qualitative pour étudier sous l’angle théorique de l’évolution et de la différenciation entre les genres, pourquoi la forte progression de la scolarisation des femmes dans l’éducation n’est pas nécessairement le moyen d’améliorer l’égalité entre les genres sur le marché de l’emploi. Dans cette étude, les éléments d’appréciation s’appuient largement sur des données recueillies lors d’entretiens individuels et qualitatifs avec 28 diplômés ayant un emploi ou étant au chômage et sélectionnés à partir de la méthode boule de neige, et également lors d’entretiens individuels avec des cadres supérieurs universitaires et/ou administratifs dans deux établissements d’enseignement supérieur et quatre entreprises. L’étude utilise également des données quantitatives sur la scolarisation et les résultats universitaires provenant des fichiers officiels des deux universités ainsi que les données de recrutement des quatre employeurs. Les conclusions font état d’une différence beaucoup plus importante entre les genres dans les études scientifiques comme l’ingénierie par opposition aux sciences sociales, et la prévalence d’attitudes et de pratiques qui pourraient avoir un impact différent sur les étudiants et les étudiantes des établissements d’enseignement supérieur et sur leur entrée sur le marché du travail. Les conclusions révèlent des attitudes et des pratiques sexistes sur le marché du travail qui pourraient renforcer l’effet des résultats d’une éducation sexiste, défavorisant davantage encore les femmes sur le marché du travail.


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De plus amples efforts sont nécessaires pour éviter les produits sexistes de l’éducation qui auront un impact sur les résultats sur le marché du travail ; un effort concerté s’avère nécessaire entre autres, pour mettre en place des mesures efficaces qui découragent les processus sexistes et encouragent l’égalité des opportunités pour les garçons et les filles, les femmes et les hommes. Améliorer la disponibilité de données désagrégées par sexe sur les différents produits de l’éducation de toutes les études universitaires de manière à mieux éclairer la politique et l’action, et promouvoir une sensibilisation au genre à tous les niveaux pourraient s’inscrire dans le cadre de cet effort. Une recherche plus approfondie pourrait vouloir examiner si les expériences sexistes et qui semblent contribuer à saper la confiance des étudiantes sont courantes dans le système éducatif, et comment elles affectent les résultats sur le marché du travail et sont à leur tour renforcées par les résultats sur le marché du travail. Nous remercierons les directeurs généraux des entreprises et des établissements universitaires où nous avons effectué notre recherche, de nous avoir accordé la permission d’interviewer des membres de leurs équipes de direction occupant des postes de responsabilité et d’autres employés, et de recueillir des données secondaires sur leurs organisations. Nous sommes extrêmement reconnaissants envers les 22 diplômés au chômage ou ayant un emploi, qui ont donné de leur temps pour des entretiens, alors qu’ils disposaient souvent de très peu de temps. Nous remercions Rehema Tukai pour sa contribution à la première phase de la mise en œuvre de cette recherche. Nous remercierons Johansein Rutaihwa qui nous a apporté le soutien institutionnel nécessaire. Nous remercions également le FAWE pour le soutien financier accordé à cette recherche. Le contenu de ce rapport de recherche n’engage que ses auteurs. 1. INTRODUCTION ET CONTEXTE Dans un grand nombre de pays, notamment la Tanzanie, l’inégalité entre les genres reste un sujet de préoccupation dans tous les domaines de l’existence. Dans l’éducation, cela est notamment le cas dans l’enseignement supérieur qui dans le contexte mondialisé d’une économie basée sur la connaissance, se situe au rang des éléments importants contribuant au développement économique et social de tous les pays (UNESCO, 2009a; Banque mondiale [BM], 2009). Cependant, les données de nombreux pays en voie de développement, notamment celles de l’Afrique subsaharienne (ASS) font état ces dernières années d’une progression constante de l’inscription des garçons et des filles dans les établissements d’enseignement supérieur. Au cours des trois dernières décennies, l’Afrique subsaharienne a enregistré une augmentation de près de 8,7 % des inscriptions dans l’enseignement supérieur. Cette progression concerne aussi bien les garçons que les filles. De ce fait, l’écart entre les sexes dans la région est passé d’une fille sur six étudiants en 1990 à une fille sur trois étudiants en 2009 (BM, 2009). En Tanzanie, l’écart entre les sexes existe à presque tous les niveaux du système éducatif, les filles étant

désavantagées de manière disproportionnée. Cependant, une amélioration s’est dessinée au fil des ans, avec une réduction de l’écart entre les sexes à tous les niveaux de l’éducation. Depuis l’an 2000, les filles représentent systématiquement plus de 48 % des effectifs d’élèves inscrits à l’école primaire. En effet, en 2009, l’indice de parité entre les sexes (IPS) était de un (République unie de Tanzanie [RUT], 2010a, dans les statistiques de l’éducation de base en Tanzanie [B], 2000-2009). A l’école secondaire, le ratio brut de scolarisation (RBS) des filles de la première à la quatrième année d’école a enregistré une progression, passant de 14,3 en 2006 à 39,3 en 2009. Quant aux effectifs dans l’enseignement supérieur, l’écart entre les sexes est encore plus important. Par exemple, en 2010-2011, seuls 33,5 % des étudiants inscrits dans les universités publiques étaient des filles (URT, 2011). Cependant, aux autres niveaux de l’éducation, la scolarisation des filles a enregistré une progression constante et importante, notamment au niveau de l’enseignement supérieur. Par exemple, le pourcentage d’étudiantes a augmenté, passant de 13 % en 2000 à 32 % en 2007 (UNESCO, 2009a). D’importantes disparités persistent néanmoins au niveau de l’inscription des filles dans certains programmes universitaires comme l’ingénierie, l’architecture et la géodésie (faculté des sciences, UDSM citée dans Masanja, 2000). Cette progression de l’inscription des garçons et les filles dans l’enseignement supérieur est largement attribuée à l’expansion de l’enseignement supérieur non seulement en raison de l’augmentation des effectifs dans les établissements existants, mais également du fait de la création de nouveaux instituts d’enseignement supérieur. En effet, alors qu’en 1961 au moment où la Tanzanie a accédé à l’indépendance, il n’existait qu’une seule université, en 2010 ce nombre est passé à 18 universités et 15 collèges et instituts universitaires. De ce fait, le nombre d’étudiants inscrits a également augmenté. En 1997-98, 10 1553 étudiants se sont inscrits dans les établissements publics et privés. Ce nombre est passé à 95 525 en 2008-2009, puis à 118 951 en 2009-2010. En 2010-2011, ce nombre était passé à 139 638 (RUT, 2010b; RUT, 2011). Les diplômés des établissements d’enseignement supérieur cherchent des emplois formels sur le marché du travail. Le marché actuel de l’emploi en Tanzanie s’inscrit dans le cadre d’une économie qui au fil des ans et du fait de la mondialisation, a connu une intégration rapide dans le reste du monde. Ceci a attiré des influences extérieures qui aujourd'hui contribuent à tous les aspects du développement national et du bien-être, les freinant quelquefois. L’économie a enregistré une libéralisation accrue du commerce et de l’investissement avec un afflux plus important de capitaux sous forme d’investissements directs étrangers (IDE). Les programmes d’ajustement structurel (PAS) mis en place en Tanzanie depuis le milieu des années 80 ont également eu des implications sur la structure du marché du travail, car le gouvernement qui jusque-là avait été le principal employeur a mis en place des mesures d’austérité comme le gel de l’emploi pendant plusieurs années, et la privatisation des entreprises Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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publiques. Dans le même temps, le jeune secteur privé n’avait pas la capacité d’absorber le nombre important de demandeurs d’emploi arrivant chaque année sur le marché du travail (Programme des Nations unies pour le développement [PNUD], 1999). Tous ces facteurs ont eu un impact sur le marché du travail au niveau des opportunités d’emploi. Ce décalage a favorisé le chômage et le sous-emploi, notamment chez les jeunes. Les données de l’enquête nationale montrent que dans les catégories professionnelles comme les administrateurs et les professionnels les femmes sont sous-représentées de manière disproportionnée (RUT, 2007). Ce sont en général des domaines qui exigent des connaissances et des compétences acquises dans l’enseignement supérieur. De ce fait, en mettant l’accent sur l’enseignement supérieur, cette enquête aborde le problème sous l’angle du genre pour examiner l’effet des produits de l’éducation sur l’emploi sur le marché du travail. Reconnaissant que le marché du travail est également sexiste, l’étude s’est aussi penchée sur la manière dont les préjugés sexistes sur le marché du travail contribuent à renforcer les inégalités entre les genres dans le domaine de l’emploi. Ce rapport se divise en sept grandes sections. La section une est une introduction qui propose quelques lignes sur l’éducation et le marché du travail en Tanzanie. La section deux contient l’énoncé du problème. La section trois indique les questions qui sont traitées. La section quatre présente une synthèse de la littérature empirique et l’approche théorique qui sert de base à cette étude. La section cinq décrit la méthodologie, et les résultats de cette étude sont présentés et discutés dans la section six. La section sept propose une conclusion et des recommandations. 2. ÉNONCÉ DU PROBLÈME L’emploi a longtemps été considéré comme le principal produit de l’éducation sur le marché du travail. Par conséquent, l’accès limité des filles à l’éducation a été retenu comme un des facteurs qui limitent la participation des filles sur le marché du travail formel (Commission économique Nations unies pour l’Afrique (CEANU), 2011]. En Tanzanie, en dehors de l’agriculture et du travail à la maison, les femmes sont très largement sous-représentées dans tous les autres secteurs et connaissent un taux de chômage considérablement plus élevé dans les régions urbaines (RUT, 2002; RUT, 2007). Les données nationales désagrégées sur l’emploi par profession indiquent que les femmes sont très largement sous-représentées dans des métiers qui exigent des connaissances et des compétences acquises dans l’enseignement supérieur, comme les métiers d’administrateurs et de professionnels (RUT, 2007). En fait, sachant que l’éducation joue un rôle essentiel pour préparer les personnes à entrer sur le marché du travail, la sous-représentation des femmes dans les postes qualifiés et à haut niveau peut être attribuée à leur sous-représentation dans l’enseignement supérieur. Au cours des dernières décennies, dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne (ASS), notamment la Tanzanie, un certain nombre de facteurs comme la libéralisation 128

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croissante de l’économie sont à l’origine de l’évolution de la structure du marché du travail, et il existe de nombreuses preuves du décalage manifeste des compétences, ce qui a soulevé des questions sur la pertinence de l’enseignement universitaire pour le marché. Les préoccupations portant sur les implications de ces changements qui ont entre autres favorisé le chômage et le sous-emploi, sont à l’origine d’un renouveau d’intérêt pour l’étude des liens reconnus depuis longtemps entre l’éducation et le marché du travail, notamment en rapport avec le problème de décalage des compétences (Kaijage, 2001; Atkinson, 1985, Brown et al., 1997; Boateng et Ofori-Sarpong, 2002; Akerele et Opatola, 2004; Pauw et al., 2007; Dabalen et al., 2000; Saint et al., 2004; Pitan et Adedeji, 2012). En effet, des études portant sur les tendances de l’emploi des diplômés dans certains pays d’Afrique subsaharienne, font état de tendances alarmantes au niveau des taux de chômage des diplômés (Leibbrandt, 2004; Akomolafe et Adegun, 2009). Avec une sous-représentation persistante des filles sur le marché du travail, les changements qui favorisent le chômage et le sous-emploi renforceront probablement la discrimination à l’égard des femmes sur le marché du travail. Cependant, on manque sérieusement d’études sur les implications sur le genre des liens entre l’éducation et le marché du travail. Cette étude axée sur l’enseignement supérieur en Tanzanie, cherche à combler cette lacune dans la littérature. Nous affirmons qu’en dépit d’une réduction de la disparité entre les sexes chez les filles et les garçons inscrits dans l’enseignement supérieur en Tanzanie, les attitudes et les pratiques sexistes qui se manifestent de diverses façons dans l’éducation et dans d’autres domaines de l’existence continuent à avoir un impact selon le genre au niveau des autres produits de l’éducation qui à leur tour ont un impact sexiste sur les résultats obtenus sur le marché du travail. 3. QUESTIONS DE RECHERCHE La grande question de cette étude consiste à savoir si une progression de l’inscription des filles dans l’enseignement supérieur est un moyen d’améliorer l’égalité entre les genres sur le marché de l’emploi. Les questions spécifiques figurent ci-dessous : (i) Quelles sont les tendances par sexe en matière d’inscription et de performances dans les établissements d’enseignement supérieur ? (ii) Quelles sont les tendances au niveau de l’emploi sur le marché du travail des diplômés des universités? (iii) Comment se manifestent les attitudes et pratiques sexistes dans les établissements d’enseignement supérieur ? Et, (iv) Comment se manifestent les attitudes et pratiques sexistes sur le marché du travail ? 4. EXAMEN DE LA LITTÉRATURE 4.1 L’éducation et le marché du travail L’emploi a longtemps été considéré comme le principal produit de l’éducation sur le marché du travail. L’éducation peut affecter de diverses façons les résultats sur le marché du travail, notamment au travers des connaissances, des


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compétences et de la réussite universitaire individuelle. Celles-ci peuvent influencer le potentiel d’emploi d’une personne et vice versa (Banque mondiale 2008). En fait, un décalage des compétences (c’est-à-dire la différence entre les compétences acquises dans le cadre des études et celles demandées sur le marché du travail) peut entre autres engendrer chômage ou sous-emploi chez ceux qui avaient acquis certaines compétences (Monk et al., 2007; Nielsen, 2007). Ce décalage s’observe en Tanzanie, où les établissements d’enseignement supérieur sont accusés de ne pas offrir les compétences de base demandées sur le marché du travail dans des domaines comme les communications, l’entreprenariat et la gestion (Kruss, 2004). Dans les études effectuées dans les établissements d’enseignement supérieur, les étudiants ont exprimé des points de vue similaires, indiquant la nécessité d’intégrer dans le programme une formation pratique, ou des programmes de stages de manière à acquérir certaines compétences pratiques (Kaijage, 2001; Olasi, 2008). Les études dans d’autres pays d’Afrique subsaharienne comme le Ghana, le Nigeria et l’Afrique du Sud montrent également que depuis quelques décennies les diplômés des universités sont arrivés sur le marché du travail en étant mal préparés, non seulement sur le plan des compétences techniques mais également des compétences générales (Dabalen, Oni et Adrekola, 2000; Saint et al., 2004; Dabalen et al., 2000; Pitan et Adedeji, 2012; Boateng et Ofori-Sarpong, 2002. L’évolution de l’économie engendre souvent une évolution des connaissances et compétences requises sur le marché du travail. En effet, les études montrent comment ces évolutions qui engendrent un recentrage des secteurs prioritaires favorisent le chômage (Lukyanova et al., 2007; Rutkowski, 2003). Au cours des dix dernières années, l’économie de la Tanzanie a enregistré des changements qui se sont traduits par une évolution sur le plan de la structure, des sources de croissance et des sources d’exportation. Insistant sur la nécessité pour l’enseignement supérieur de répondre à l’évolution de la nature de l’économie, Ndulu (2007) souligne l’importance de l’évolution des universités dont les préférences se détournent des sciences sociales vers les études de science, de technologie et les affaires. Un tel changement devrait créer une cohérence entre le système éducatif et les changements se produisant sur le marché du travail. Parco et Babar (2009) ont avancé des suggestions similaires. D’autres études ont également insisté sur l’importance pour le système éducatif de proposer une formation pertinente pour garantir aux diplômés de ne pas se retrouver sur le marché du travail dépourvus des compétences nécessaires (Lukyanova et al., 2007; Rutkowski, 2003). Le problème du décalage des compétences exacerbe le problème du chômage et du sous-emploi en Tanzanie. La situation soulève des questions concernant la pertinence de l’enseignement supérieur qui peut être évaluée en fonction de l’impact des programmes universitaires sur les connaissances et les compétences demandées sur le marché du travail. On s’attend généralement à ce que les diplômés puissent réussir leur transition des établissements universitaires vers le monde du travail

(UNESCO, 2005). Cette situation a des implications sur le genre étant donné que les femmes en Tanzanie restent très largement sous-représentées dans le secteur formel de l’emploi où les projections pour 2010 indiquent qu’elles représentent 14,5 % des emplois (BM, 2008). En Tanzanie, les femmes sont notamment largement sous-représentées dans le secteur industriel qui bien que ne représentant que 23 % du PIB, est un des secteurs enregistrant une croissance modeste. Dans ce secteur, les données les plus récentes indiquent que les soussecteurs porteurs sont les produits manufacturés (9,3 %), la construction (8 %) et l’exploitation des mines et les carrières (3,3 (RUT, 2012). La proportion de filles et de garçons employés dans l’industrie de la construction est de 2,1 et 0,1 % respectivement. Dans le secteur manufacturier, ces pourcentages sont de 3,4 et 1,9 respectivement (RUT, 2007). 4.2 Attitudes et pratiques sexistes dans l’éducation et sur le marché du travail : approche théorique Les attitudes et pratiques sexistes dans les sphères privées et publiques ont des impacts sur le genre qui débouchent sur des résultats sexistes. Cette étude utilise la théorie cognitive sociale du développement et de la différenciation des genres (Bussey & Bandura, 1999), pour analyser la façon dont les attitudes et pratiques sexistes dans la société en général et dans le système éducatif et sur le marché du travail en particulier, rejaillissent sur les résultats de l’éducation et du marché du travail. Dans cette théorie, les conceptions que les hommes et les femmes ont d’eux-mêmes et des autres sont attribuées au développement et à la différenciation des gens en fonction du genre dans tous les aspects de leur vie. Ceci aura à son tour un impact sur les opportunités et les contraintes auxquelles les hommes et les femmes sont confrontés dans la société, et influencera les décisions concernant leur vie sociale, notamment leur parcours professionnel. Cette théorie considère que les attitudes et pratiques sexistes sont ancrées dans les différents soussystèmes sociétaux, notamment la famille, l’éducation et les professions, et qu’elles façonnent entre autres la croyance que les hommes et les femmes mettent dans leur efficacité dans les études et sur le plan professionnel. Ainsi, Il a été dit par exemple, que même si les étudiants et les étudiantes ne diffèrent pas sur le plan de leurs capacités verbales et quantitatives, les étudiantes ont tendance à être moins bonnes que les étudiants dans la maîtrise des compétences quantitatives requises pour certains emplois (Betz & Hackett, 1981). Ceci à son tour les empêche de s’engager dans toute une série d’études et de professions qui exigent ces compétences. Des études révèlent comment se manifestent les processus de développement et de différenciation des genres dans l’éducation. Certaines des pratiques identifiées impliquent des enseignants qui sous-entendent de diverses manières subtiles que les filles sont moins capables sur le plan des études que les garçons (Dweck et al., 1978), et sont à l’origine de préjugés sexistes dans l’orientation professionnelle (Fitzgerald & Crites, 1980). Ces pratiques renforcent entre autres la perception Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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des capacités intellectuelles des étudiants qui façonne l’orientation de leur choix de carrière (Bandura et al., 1999). Ces pratiques influencent les garçons et les filles de manière différente dans leurs aspirations et leurs choix professionnels. De nombreuses données empiriques indiquent que le marché du travail au niveau mondial est structuré de manière hiérarchique, ce qui fait que les secteurs, les métiers et les activités sont cloisonnés en fonction du genre (Mason & King, 2001). Les données empiriques suggèrent que les femmes ont plus de probabilités d’être fortement défavorisées sur le marché du travail, en raison par exemple des préjugés sexistes entourant certaines compétences. Ceci semble être également le cas en Tanzanie. Un exemple en est l’étude utilisant les données du Ghana et de la Tanzanie et qui fait état de différences plus importantes entre les hommes et les femmes dans les études d’ingénierie et d’autres études scientifiques par rapport aux études de gestion. La réussite est également un facteur clé dans les résultats sur le marché du travail, car ceux qui ont de moins bons résultats universitaires semblent en général moins intéressants aux éventuels employeurs. Il existe un grand nombre d’informations sur la façon dont les préjugés sexistes à l’intérieur et à l’extérieur du système éducatif peuvent affecter les résultats scolaires des femmes de manière négative et disproportionnée. Les études de Frome et Eccles (1998), Furnham (2002) et Li (1999), ont constaté que les stéréotypes qui veulent que les hommes soient naturellement plus forts en mathématiques et sciences et plus intéressés par ces domaines, influençaient les aspirations et la réussite des garçons et des filles, des hommes et des femmes en sciences, en technologie, en ingénierie et en mathématiques. L’éducation est considérée comme jouant un rôle essentiel dans la préparation des personnes à entrer sur le marché du travail ; et donc si les résultats de l’éducation sont fonction du genre, son impact sur le marché du travail sera également fonction du genre. Cependant, le marché du travail lui-même est aussi sexiste. Plusieurs théories expliquent les différences entre les hommes et les femmes dans les résultats sur le marché du travail, comme la ségrégation sexuelle dans le milieu professionnel et les différences de salaire. Les théories économiques comme la théorie du capital humain par exemple, qui attribuent les différences professionnelles à des choix volontaires que font les hommes et les femmes (Blau et al., 2002) ont été critiquées car elles n’ont pas su expliquer par exemple pourquoi à qualifications et expériences égales, les femmes ne jouissent pas de la même reconnaissance que les hommes au niveau du recrutement ou de leur promotion. Par ailleurs, il existe des approches théoriques qui adoptent une perspective sexiste. Certaines études qui ont opté pour cette approche attribuent la ségrégation sexuelle dans le milieu professionnel à une auto sélection des femmes et des hommes qui s’explique par les différences au niveau de la socialisation des hommes et des femmes (Marini et al., 1996; Jacobs, 1989). D’autres, l’attribuent aux préférences de l’employeur pour un sexe et à ses stéréotypes (AUCUNE REFERENCE Glick, 1991; Glick et al., 1988; Scrutawicz & Hunter, 2004)). 130

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Pourtant, d’autres études, bien que ne contestant pas ces points de vue, considèrent que ces explications sont incomplètes et insistent sur la structuration sexiste des entreprises (Acker, 1990; Burton, 1991). Dans ce sens, Steinberg (1992) insiste sur la nature sexiste des pratiques organisationnelles et des politiques institutionnelles. On constate à travers leurs pratiques et leurs structures, que les entreprises appliquent des préjugés sexistes (Burton, 1991). Des études montrent que les femmes occupant des emplois traditionnellement considérés comme « masculins » sont considérées moins compétentes que leurs homologues masculins au même poste, et bénéficient de moins de soutien de la part de leurs collègues (Alban-Metcalfe & West, 1991; Davidson et Cooper, 1984; Mascarenhas, 2007). Cette étude s’inspire de ces fondements théoriques et empiriques pour analyser la nature sexiste des liens entre l’éducation et le marché du travail. Nous considérons qu’en dépit de la progression de l’inscription des filles dans l’enseignement supérieur, les attitudes et pratiques sexistes dans toutes les sphères de la vie privée et publique continuent à avoir un impact sexiste sur d’autres résultats de l’éducation tels que le choix du domaine d’études et les résultats universitaires, qui à leur tour pèseront sur les résultats sur le marché du travail comme l’emploi. Nous pensons également que puisque le marché du travail est également sexiste, les attitudes et pratiques sexistes sur le marché du travail ne font que renforcer la discrimination à l’égard des femmes sur le marché du travail. 4.3 Définitions opérationnelles de termes et concepts clés Vous trouverez ci-dessous les définitions opérationnelles de termes et concepts clés utilisés dans cette étude, de façon à éviter toute ambiguïté liée à des interprétations différentes. Résultats scolaires Dans cette étude, nous considérons que les résultats scolaires incluent les taux de scolarisation ou de participation, les résultats et la réussite universitaires et les compétences acquises liées au choix du cursus universitaire. Résultats sur le marché du travail Nous considérons que les résultats sur le marché du travail sont les choses que les demandeurs d’emploi cherchent à obtenir sur le marché du travail et englobent l’emploi et les salaires. Cette étude est axée sur l’emploi. L’égalité entre les genres L’égalité entre les genres implique que les femmes ont les mêmes opportunités que les hommes dans la vie. Dans cette étude, ceci englobe l’égalité des opportunités sur le plan de l’inscription, du choix des domaines d’études, les processus d’apprentissage, l’obtention d’un emploi et la présence dans différentes professions. Pratiques et attitudes sexistes Dans cette étude, nous définitions les attitudes et les pratiques sexistes comme des expressions et des actions


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courantes s’appuyant sur des normes qui font la différence entre ce que les filles et les garçons, les femmes et les hommes peuvent faire, et le comportement que l’on attend d’eux. Dans les sociétés patriarcales, ces attitudes et pratiques défavorisent généralement les femmes sur le plan de l’accès aux différentes opportunités, y compris l’éducation et le salaire dans le domaine du travail. Impact différencié selon le genre Ce terme est utilisé dans le sens d’une action ou d’un comportement qui a un impact différent sur les filles et les garçons, et sur les femmes et les hommes. Conceptions sexistes Dans cette étude, ce terme est utilisé au sens de définitions préconçues dans l’esprit des gens sur le rôle, les capacités et le comportement « approprié » des femmes et des hommes. De telles conceptions influencent l’accès des femmes et des hommes à différentes opportunités et à différents emplois dans les sphères publiques et privées. L’optique genre Dans cette étude, nous avons indiqué que nous utilisons l’optique genre pour analyser les liens entre l’éducation et le marché du travail. Ceci implique l’analyse des liens sous l’angle du genre, c’est-à-dire s’intéresser lors de l’analyse aux différences entre les hommes et les femmes. 5. MÉTHODOLOGIE 5.1 L’échantillon L’échantillon utilisé dans cette étude se composait de 14 diplômés au chômage (six garçons et huit filles) et 14 diplômés ayant un emploi (cinq garçons et neuf filles) ; tous avaient terminé leurs études dans les cinq dernières années. L’étude englobait également quatre entreprises et deux établissements d’enseignement supérieur, l’un public et l’autre privé. La sélection des diplômés ayant un emploi et de ceux au chômage s’est faite en utilisant les techniques d’échantillonnage de la boule de neige, en s’assurant que ce petit échantillon était varié sur le plan du genre et des cursus universitaires. Les quatre organismes employeurs (une société de télécommunications, une grande institution financière, une société de construction et compagnie paraétatique) ont été choisies dans la ville de Dar-es-Salaam, avec pour objectif d’englober dans une certaine mesure un échantillon représentatif d’employeurs qui engagent des diplômés sortis de l’enseignement supérieur avec diverses qualifications. Les deux établissements d’enseignement supérieur ont été à dessein choisis pour englober les universités scolarisant un nombre relativement important d’étudiants et offrant un large éventail de cursus universitaires. Nous avons choisi un établissement public et un établissement privé pour représenter les divers types d’établissements d’enseignement supérieur. Dans chaque université, nous avons choisi un échantillon de cinq programmes universitaires pour représenter les disciplines dans lesquelles les femmes sont sérieusement sous-représentées, et celles dans lesquelles elles sont relativement mieux représentées.

5.2 Méthodes de recueil de données Nous avons recueilli des données primaires et secondaires et utilisé des questionnaires semi structurés pour interviewer les diplômés ayant un emploi et ceux au chômage. Les questionnaires étaient conçus pour demander des informations sur les expériences d’attitudes et pratiques sexistes au cours de leurs études dans les établissements d’enseignement supérieur, et les influences sexistes sur leurs décisions concernant leur choix de formation et de carrière. Lors de la préparation du questionnaire, une enquête approfondie a permis de faire le nécessaire pour bien capter l’intensité et le détail de ces expériences. Des guides d’entretien ont été utilisés lors des entretiens individuels avec les responsables administratifs et universitaires de haut niveau dans les établissements d’enseignement supérieur, et avec les gestionnaires chargés du recrutement et de la gestion des ressources humaines dans les quatre organismes employeurs. Les membres de l’équipe de recherche impliqués dans la conceptualisation et la conception des questionnaires ont été chargés de la gestion des questionnaires et des guides d’entretien. Aucune aide supplémentaire n’a été requise pour recueillir des données primaires. Outre la collecte de données primaires, des sources secondaires ont été utilisées pour recueillir des données sur les tendances en matière d’inscription, des résultats et de l’achèvement en fonction du genre dans les deux universités. Des données ont été recueillies sur le total des inscriptions à l’université et dans les cinq cursus universitaires offerts par chaque université. Pour les employeurs, des sources secondaires ont été utilisées pour recueillir des données sur les tendances du recrutement. 5.3 Analyse des données Les données quantitatives sur l’inscription et les résultats dans des programmes sélectionnés dans les deux établissements d’enseignement supérieur, et les données sur le recrutement des diplômés dans des entreprises sélectionnées ont été interprétées en utilisant la méthode descriptive des graphiques et des tabulations croisées. Les données qualitatives ont été codées et triées par thème, puis analysées en les comparant et opposant de manière systématique, pour identifier les schémas et les points communs et/ou les différences au niveau des expériences. Patton (2002) explique en détail cette méthode d’analyse des données qualitatives. Nous avons utilisé cette méthode pour faire une comparaison systématique des réponses en triangulant les sources de données, c’est-à-dire les filles diplômées ayant un emploi, les garçons diplômés ayant un emploi, les garçons diplômés au chômage, les filles diplômées au chômage et les employeurs. L’objectif était d’identifier les similitudes ou les divergences des réponses des diverses catégories de personnes interrogées à des questions similaires posées dans le questionnaire et abordées dans les guides d’entretien, par exemple les préjugés sexistes au cours des études dans les établissements d’enseignement supérieur et en cours d’emploi. Nous avons également effectué une comparaison des données quantitatives obtenues à travers des sources secondaires et des données qualitatives pour voir si les questions Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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6. PRINCIPAUX RESULTATS 6.1 Tendances de la scolarisation : disparités selon les sexes dans les cursus universitaires Dans cette étude, l’analyse des données a révélé une tendance à la progression de l’inscription des étudiants et des étudiantes dans les deux universités (Graphiques 2.12 et 2.13). Cependant, le nombre d’étudiantes est inférieur au nombre d’étudiants au cours des cinq années concernées. En fait, depuis 2009, l’inscription des étudiantes à l’université publique a augmenté dans une moindre mesure alors que celle des étudiants est restée stable, créant de ce fait un décalage encore plus important entre les genres. Par ailleurs, le nombre d’étudiantes inscrites à l’université privée en 2010-2011 se rapprochait de la parité.

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2009/10

2008/09

2007/08

2006/07

Années Source : Dossiers de l’université publique

Graphique 2.13 Nombre total d’étudiants inscrits à l’université privée de 2006 à 2010

Hommes Femmes

2010/11

Total

2008/09

6000 5000 4000 3000 2000 1000 0

2006/07

Cette étude a largement utilisé des approches qualitatives pour étudier la nature sexiste des liens entre l’éducation et le marché du travail. Ainsi, alors qu’elle a bénéficié de la richesse des détails et de la profondeur des études qualitatives, elle a néanmoins souffert des limites de cette même approche. Une de ses limites étant que dans la mesure où nous ne recherchons pas un échantillonnage aléatoire, les résultats de cette étude ne peuvent être généralisés avec un certain degré de certitude. De même, étant donné la nature qualitative de ces études, l’analyse et les conclusions pourraient d’une certaine façon avoir été influencées par les interprétations et les jugements subjectifs des chercheurs. Cependant, la triangulation des sources de données a permis d’en minimiser l’influence, par exemple les réponses des diplômés garçons ont été triangulées avec celles des diplômées filles et les réponses des diplômés ayant un emploi et des diplômés au chômage ont été triangulées avec celles des employeurs aux mêmes questions.

Nombred’étudiants

5.4 Considérations éthiques et limites de l’étude Nous avons fait l’effort de garantir l’anonymat et l’objectivité lors de la collecte des données primaires et de l’analyse des résultats. Les personnes interrogées ont été informées des objectifs de l’étude de manière à obtenir leur consentement éclairé. Les participants ont été assurés que lors de l’analyse des données et la rédaction d’un rapport, les données seraient codées pour protéger l’identité et la vie privée, ce qui a été bien accueilli. Aucune proposition financière ni incitation d’aucune sorte n’ont été utilisées pour recruter des participants pour l’étude. Des lettres ont été envoyées aux employeurs et universités sélectionnées pour présenter les objectifs de l’étude et demander la permission de recueillir des données, obtenir leur autorisation pour effectuer des entretiens, et recueillir des données dans ces établissements. Nous avons confirmé aux établissements notre volonté de partager les résultats avec eux.

Graphique 2.12 Nombre total d’étudiants inscrits à l’université publique de 2006 à 2010 8000 7000 6000 5000 4000 3000 Hommes 2000 Femmes 1000 Total 0

Nombred’étudiants

découlant des données qualitatives venaient appuyer les tendances désagrégées par genre observées, par exemple au niveau des effectifs dans les différents programmes universitaires et des résultats.

Années Source : Dossiers de l’université privée

L’analyse des données sur l’inscription dans les programmes spécifiques offerts par les deux universités fait néanmoins état d’importantes différences entre les programmes scientifiques et les sciences sociales. Tout d’abord, dans les deux universités, le nombre total d’élèves dans les programmes scientifiques est resté nettement inférieur au nombre d’étudiants inscrits en sciences sociales. Deuxièmement, l’écart entre les filles et les garçons reste plus important dans les programmes de sciences (Graphiques 2.14 and 2.15) que dans les programmes de sciences sociales (Graphiques 2.16 and 2.17). Les graphiques de l’Annexe 1 présentant les tendances de l’inscription dans les autres programmes universitaires de sciences et de sciences sociales font état d’une situation identique. En fait, certains programmes en sciences sociales étaient plus fréquentés par les filles que par les garçons. Par exemple, à l’université privée, des données concernant l’inscription dans le programme de sociologie (Graphique 2.17) montrent que sur cinq ans, le nombre d’étudiantes inscrites dépassait celui des étudiants. On observe la même tendance dans les cours de communication de masse dans la même université (Graphique 2.23). Mascarenhas (2007) montre comment la tendance des parents et même des enseignants à décourager les filles à se diriger vers des matières scientifiques à des niveaux plus simples continuent à


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Hommes

100

Total

2010/11

2009/10

2008/09

0

Femmes

Années Source : Dossiers du département d’informatique

Graphique 2.16 Nombre total d’étudiants en commerce inscrits à l’université publique de 2006 à 2010 800 600 400

Hommes

200

Femmes Total

2010/11

2008/09

2006/07

0

Années Source : Dossiers du département Commerce

Graphique 2.18 Résultats selon le genre en génie civil à l’université publique de 2007 à 2010 60 50 40 30 20 10 0

2010/11

Total

2009/10

2010/11

2008/09

2006/07

Femmes

2008/09

Hommes

2007/08

2010/11

2008/09

Total

6.2 Performances et expériences sexistes La réussite est en général associée à de meilleures perspectives d’emploi. Ceux qui réussissent bien ont un avantage sur ceux qui réussissent moins bien, en termes de chances d’obtention d’un emploi. La réussite en tant que produit de l’éducation joue donc un rôle considérable sur les résultats sur le marché du travail au niveau de l’obtention d’un poste, notamment lorsque les opportunités d’obtention d’un poste sont moindres en raison du nombre de chercheurs d’emploi. Les théories sur le genre montrent la prévalence des conceptions sexistes sur les performances académiques qui font que les filles sont souvent perçues comme incapables de réussir aussi bien que leurs homologues masculins. Plus particulièrement, on estime que les étudiantes sont moins capables sur le plan universitaire que leurs camarades garçons dans les matières scientifiques comme l’ingénierie. Dans cette étude, les données désagrégées en fonction du genre sur les résultats des deux universités visitées indiquent des résultats mitigés pour les différentes années. En génie civil à l’université publique, les données sur les performances sur une période de cinq ans (la proportion d’étudiants et d’étudiantes passant avec la mention ‘upper second ‘ ou ‘first class’) montrent que les étudiantes de manière générale ne réussissaient pas aussi bien que les étudiants (Graphique 2.18). Cependant, sur les cinq années que couvrent les données recueillies, il y a trois années au cours desquelles on constate que dans la même université, le nombre d’étudiants en informatique obtenant une mention ‘upper second’ était plus important chez les filles que chez les garçons (Graphique 2.19).

2006/07

Femmes

Nombred’étudiants

Hommes

Graphique 2.15 Nombre total d’étudiants inscrits en informatique à l’université publique de 2006 à 2010 Nombred’étudiants

200

Années

Source : Dossiers du département du génie civil

Nombred’étudiants

300

Source : Dossiers de l’université privée

Années

120 100 80 60 40 20 0

400

2007/08

70 60 50 40 30 20 10 0

2006/07

Nombred’étudiants

Graphique 2.14 Nombre total d’étudiants inscrits en génie civil à l’université publique de 2006 à 2010

Graphique 2.17 Nombre total d’étudiants en sociologie inscrits à l’université privée de 2006 à 2010 Nombred’étudiants

creuser des disparités relativement plus importantes entre les garçons et les filles sur le plan de l’inscription et des performances dans les programmes scientifiques. Ceci a pour conséquence des différences entre les genres encore plus importantes dans les professions exigeant des compétences d’ingénierie que dans d’autres emplois qui exigent des compétences en sciences sociales.

Années Source: Dossiers du département génie civil Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

133


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20 2010/11

2009/10

2008/09

2007/08

Hommes Femmes

2006/07

0

Années

Hommes Femmes

Source: Dossiers du département d’informatique

Années

Source: Dossiers du département Commerce

134

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

2010/11

2009/10

2008/09

2007/08

2006/07

Nombred’étudiants

Graphique 2.20 Résultats en commerce à l’université publique de 2006 à 2010 en fonction du genre

Hommes Femmes

Années

Source: Dossiers de l’université privée

En sciences sociales, les résultats étaient mitigés : certaines années les étudiants avaient de meilleurs résultats que les étudiantes, et d’autres années c’étaient les étudiantes qui avaient de meilleurs résultats que les étudiants. Dans le programme de commerce de l’université publique par exemple, il y avait davantage de garçons (en pourcentage du nombre d’étudiants) qui passaient avec la mention ‘upper second’ ou ‘first class’ pendant trois années sur les cinq années couvertes par les données recueillies sur les résultats (Graphique 2.20). Dans le programme de communication de masse à l’université privée, sur trois des cinq années couvertes par les données il y avait davantage d’étudiantes (en pourcentage du nombre total d’étudiantes) qui obtenaient une mention ‘upper second’ ou plus, que d’étudiants (Graphique 2.21). En sociologie, on ne disposait des données relatives aux résultats que pour deux années uniquement. Au cours d’une de ces années les étudiantes ont réussi relativement mieux que les étudiants et sur l’autre, les étudiants avaient de meilleurs résultats que les étudiantes (Tableau 2.15).

40 35 30 25 20 15 10 5 0

2010/11

40

2009/10

60

100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0

2008/09

Nombred’étudiants

80

2007/08

Nombred’étudiants

100

Graphique 2.21 Résultats en communication de masse à l’université privée de 2006 à 2010 en fonction du genre

2006/07

Graphique 2.19 Résultats selon le genre en informatique à l’université publique de 2007 à 2010

Les conclusions sur les résultats académiques de cette étude sont cohérentes avec les conclusions d’autres études. Une étude effectuée par Sheard (2009) a suivi les résultats des étudiants et leurs progrès depuis la première jusqu’à la dernière année et a constaté que les étudiantes réussissaient mieux que les étudiants. Hedjazi et Omidi (2008) ont apporté des preuves similaires montrant que les étudiantes réussissaient mieux que leurs camarades garçons dans le domaine des sciences agricoles. Ces conclusions suggèrent que les étudiantes ne sont pas intellectuellement moins bonnes que les étudiants comme on le considère quelquefois (Okafor & Endagon, 2011). En fait les conclusions actuelles semblent suggérer que les différences entre les sexes en matière de capacités intellectuelles et d’orientation dans certains domaines d’études pourraient être façonnées par des attitudes et des pratiques sexistes dans différentes sphères de la vie. (Bandura, 1997; Betz & Fitzgerald, 1987; Phillips & Zimmerman, 1990). La question cependant consiste à savoir si les étudiants dans les instituts d’enseignement supérieur sont confrontés à des préjugés basés sur le genre qui peuvent avoir des implications sur les résultats des deux sexes et donc sur les résultats du marché du travail comme l’emploi. Cette étude a essayé d’explorer ceci en gardant à l’esprit le fait que la différenciation entre les sexes se manifeste sous différentes formes à différents niveaux de la société et dans différentes sphères de la vie et que ceci à son tour engendre des impacts et des résultats différenciés en fonction du genre. Ainsi, cette étude a voulu explorer dans quelle mesure les étudiants et les étudiantes ont connu des attitudes et des pratiques sexistes lorsqu’ils étudiaient dans les établissements d’enseignement supérieur, et comment ces expériences ont pu affecter les résultats académiques. En conformité avec les objectifs de cette étude, nous avons demandé aux personnes interrogées ayant un emploi et à celles au chômage si elles avaient rencontré des attitudes et/ou des pratiques sexistes lorsqu’elles étudiaient dans


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les établissements d’enseignement supérieur. La majorité des personnes interrogées ont déclaré qu’elles n’avaient pas subi de préjugés sexistes à l›intérieur ni à l›extérieur des salles de cours. Les personnes interrogées ont observé que les défis et les contraintes rencontrées étaient les mêmes pour les deux sexes et incluaient l’absence d’un engagement sérieux des enseignants dans leur fonction et l’insuffisance de matériel de référence. Ils ont également considéré qu’aucune action ni comportement des enseignants ne reflétaient une discrimination sexiste. Cinq personnes sur les 14 diplômés au chômage ont néanmoins déclaré avoir fait l’expérience de préjugés sexistes lorsqu’elles étudiaient à l’université. Un garçon interrogé a expliqué que les étudiants formaient des groupes de discussions ouverts aux seuls garçons en dehors de la salle de cours, même si pendant les cours les enseignants s’assuraient que les groupes de discussions étaient équilibrés sur le plan de la représentation des genres : « Dans mon cours, les étudiants intelligents avaient l'habitude de s'isoler en groupes de discussions. Ils ne voulaient pas se mélanger aux filles. Par exemple ils disaient que les filles avaient beaucoup de choses à faire … et qu’elles venaient aux discussions en retard. » Un diplômé au chômage La même personne a par la suite expliqué comment ceci amenait les étudiantes à perdre confiance en elles-mêmes, notant qu’au départ elles étaient des participantes actives au groupe de discussions mis en place par les enseignants, mais que par la suite elles devenaient passives. Une fille interrogée a raconté une expérience similaire : «... Certains étudiants n’aimaient pas avoir des filles dans leurs groupes de discussions, disant que nous ne participons pas aux groupes de discussions. Ils avaient l’impression qu’ils étaient les seuls à contribuer aux groupes de discussions et que les filles se taisaient et ne faisaient qu’écouter. » Une diplômée au chômage Une autre fille interrogée a expliqué pourquoi elle pensait que les étudiants ne traitaient pas les étudiantes correctement : « Ils considéraient que les filles n’étaient pas des étudiantes sérieuses. Et même dans les discussions, les étudiants nous regardaient de haut lorsque nous participions aux discussions … » Une diplômée au chômage Comme l’indique le récit ci-dessus, les filles interrogées dans cette étude avaient l’impression que leurs homologues masculins à l’université ne les prenaient pas au sérieux et doutaient en fait de leurs capacités académiques. De même, les étudiantes avaient des conceptions d’ellesmêmes influencées par le genre. Par exemple la même diplômée au chômage qui avait parlé d’expériences de pratiques sexistes dans les groupes de discussions a par la suite indiqué :

«… Par exemple, on pouvait constater que sur 10 devoirs de groupe, sept seraient présentés par des étudiants. Les étudiantes disaient que les étudiants savaient mieux présenter que les étudiantes. » Un garçon interrogé considérait que les préjugés sexistes des étudiants devaient être attribués à l›absence de confiance en elles-mêmes dont font preuve les filles : « Nous les traitons comme des égales. Le grand problème ce sont les étudiantes elles-mêmes. Elles n’ont pas confiance en elles-mêmes. Elles disent que nous connaissons plus de choses qu’elles. Pendant les discussions elles se taisent, attendant que les garçons parlent. » Un diplômé au chômage D’autres études aboutissent à des conclusions similaires. Par exemple, Seymour (1995) a constaté que les étudiantes qui venaient juste de commencer leur cinquième année d’études faisaient montre de plus de confiance, mais que celle-ci diminuait vite. D’autres études montrent également que dans les sociétés patriarcales les femmes ont tendance à être passives, contestant rarement les choses, alors qu’il est plus courant pour les hommes d’être agressifs (Wells 2008). Une telle différenciation se manifeste donc souvent dans différents domaines, y compris l’éducation. Une discussion sur les traditions et les coutumes en Tanzanie animée par Mascarenhas (2007) peut aider à expliquer les éléments sous tendant les pratiques sexistes des étudiantes et des étudiants présentées ci-dessus. Elle décrit les traditions basées sur le pouvoir des hommes et les rôles inégaux des genres qui amènent non seulement les hommes mais également les femmes à considérer les femmes comme le sexe inférieur. Elle a ensuite noté que dans ces traditions, les femmes ne font souvent pas entendre leurs voix lors de réunions rassemblant les hommes et les femmes. Les actions et les attitudes qui semblaient faire des étudiantes des participantes peu actives nous ont intriguées et nous nous sommes demandés si elles pouvaient avoir une influence sur les résultats du marché du travail. Nous sommes donc retournés sur le terrain voir avec les responsables des ressources humaines comment, partant de leurs expériences, ils évalueraient les niveaux de confiance chez les demandeurs d’emploi hommes et femmes au cours des entretiens. Un responsable des ressources humaines (RH) d’un institut paraétatique où nous nous sommes rendus était une personne d’expérience ayant interviewé des diplômés pour différents postes depuis 2002 et il travaillait alors avec un sixième employeur. Lorsqu’on lui a demandé s’il y avait des différences observables dans les niveaux de confiance des demandeurs d’emploi hommes et femmes convoqués pour un entretien, il a déclaré que les hommes interviewés faisaient en général montre de niveaux de confiance plus élevés, même s’il y avait des cas où les femmes faisaient preuve d’un niveau de confiance élevé et sortaient du rang. Il a également noté qu’il y avait des cas où les hommes semblaient manquer de confiance en eux et en arrivaient même à paniquer. Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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Un responsable de la sélection et du recrutement d’une institution financière où nous nous sommes rendus et qui interviewait également des demandeurs d’emploi tout en travaillant pour trois autres employeurs nous a raconté une expérience légèrement différente. Il a noté que si dans le passé, les diplômées semblaient en général moins confiantes en elles-mêmes que leurs homologues masculins, ces dernières années le schéma était plus mitigé et dans son poste actuel, les femmes interviewées semblaient plus confiantes que les demandeurs d’emploi masculins. Il a suggéré que le type d’emploi pourrait en partie expliquer cette variation. Il a par exemple indiqué que lorsqu’il travaillait comme directeur des RH d’une société minière, il interviewait des géologues et les femmes semblaient en général moins confiantes en ellesmêmes que les hommes qui postulaient. Il a également expliqué que parmi les éventuels employés interviewés certains n’avaient pas encore terminé leurs études à l’institut qui formait les géologues, et que même là les étudiantes semblaient faire montre de beaucoup moins de confiance que leurs homologues masculins. Le vécu des deux directeurs ayant une grande expérience dans le recrutement des diplômés suggèrent que les diplômées font preuve de beaucoup moins de confiance lors des entretiens de recrutement que les diplômés. Ceci est particulièrement le cas dans les emplois dominés par les hommes comme par exemple chez les géologues, ainsi que l’a déclaré un des directeurs. 6.3 Domaines d’études et expériences sexistes Dans la section 6.1, nous avons montré que les inégalités entre les hommes et les femmes restent importantes au niveau de l’inscription dans les matières scientifiques comme l’ingénierie où les étudiantes sont largement sous-représentées. En partant de la théorie et d’une expérience empirique préalable, nous avons cherché à analyser les expériences sexistes dans l’éducation et dans d’autres sphères de la vie, qui auraient pu influencer les diplômés de l’échantillon dans leur décision concernant leur domaine d’étude, et nous avons essayé de voir si ceci était renforcé par des attitudes sexistes envers les cursus universitaires dans lesquels ils étaient déjà inscrits dans les établissements d’enseignement supérieur. Dans cet esprit, nous avons demandé aux diplômés qui ont un emploi ou qui sont au chômage si quelqu’un avait influencé leur choix au niveau des études. Sept personnes interrogées ont déclaré que quelqu’un avait soit influencé soit essayé d’influencer leur choix d’études. Cependant, les conseils donnés visaient en grande partie à les diriger vers des cours dans lesquels les étudiants acquièrent des connaissances et des compétences plutôt fortement demandées sur le marché du travail. La forte demande sur le marché du travail semblait être la principale raison motivant les conseils donnés par les parents et la famille concernant le choix des études. Cependant, reproduire ce que les parents et la famille proche ont étudié était également un facteur pesant sur le choix des domaines d’études.

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« J'admirais ce que faisait ma mère. Elle est comptable. Elle a un diplôme d’expert-comptable, et elle m’a donc influencée pour étudier quelque chose en rapport avec ce qu’elle avait elle-même étudié. » Diplômée ayant un emploi Un point mérite d’être mentionné ici, à savoir l›influence des parents comme modèle dans les décisions et les choix que font leurs enfants dans leur vie, notamment des décisions concernant le choix des études et le chemin de carrière. Ceci corrobore en fait d’autres études qui ont constaté une corrélation positive entre les aspirations de carrière des filles et les réalisations de leur mère sur le plan des études (Signer & Saldana, 2001). Les attitudes sexistes étaient également évidentes dans les établissements d’enseignement supérieur, notamment envers les étudiantes inscrites dans des cursus traditionnellement dominés par les hommes. Une diplômée qui avait obtenu une bourse pour des études d’ingénierie en témoigne : «… Dans notre classe, il n’y avait que cinq filles. Les autres étudiants avaient l’habitude de se moquer des étudiantes inscrites en cours d’ingénierie. Ils nous disaient que nous aimions les hommes. » Diplômée ayant un emploi Cette conclusion corrobore la théorie et les preuves empiriques d’autres études. Mascarenhas (2007) note que les garçons et les filles sont socialisés de manière différente et adoptent très jeunes les rôles que l’on attend d’eux. De ce fait, on ne s’attend pas à ce que les filles s’aventurent dans des études que les normes et les valeurs sociétales, qui sont largement patriarcales, considèrent comme étant du domaine des hommes. 6.4 Renforcer les attitudes et les pratiques sexistes sur le marché du travail Dans cette étude, nous avons également étudié la façon dont le marché du travail est influencé par le genre, renforçant l’influence du genre sur les résultats de l’éducation. Nous avons d’abord résumé la nature hautement compétitive du marché du travail sur lequel arrivent les diplômés, car ceci peut également renforcer les pratiques sexistes sur le marché du travail. 6.4.1 Implications sexistes d’une concurrence intense dans la recherche d’un emploi Les conclusions de cette étude ont montré qu’il existait une concurrence féroce entre les diplômés filles et garçons pour les emplois. Ceci est démontré par le temps que passent les diplômés à chercher un emploi après leur diplôme, et le taux de sous-emploi dans ce groupe. Les données du tableau 2.7 montrent le nombre de candidatures envoyées par les diplômés au chômage depuis qu’ils avaient commencé à chercher un emploi, ainsi que le nombre de fois où ils avaient été convoqués pour des entretiens. Les diplômés au chômage étaient dans l›ensemble plus proactifs pour l›envoi de candidature, l’un d’entre eux avait même envoyé plus de


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150 candidatures depuis 2009. Une diplômée au chômage qui avait commencé à envoyer des candidatures la même année, n’en avait envoyé que 50. Tableau 2.7 Répartition par sexe du nombre de candidatures par diplômés au chômage depuis qu’ils ont commencé à chercher du travail et nombre de fois où ils ont été convoqués pour des entretiens (entre parenthèse) Année où le diplômé a Nombre de candidatures commencé à cherchGarçon Fille er un emploi 60 (6) 2011

30 (5)

60 (5) 97 (1)

2010

15 (4)

30 (4)

70 (20)

15 (4) 8 (1) 50 (3)

2009

150 (10)

2008 Source : Interviews sur le terrain

dans une banque ou m’occuper des clients. » Une diplômée au chômage «… Vivre en ville coûte cher et je n’ai personne pour m’aider. Donc tant que je suis payé, je suis prêt à prendre n’importe quel emploi. » Un diplômé au chômage Une étude menée dans 37 pays d’Afrique y compris la Tanzanie (groupe Banque africaine de développement et al., 2012), montre que les taux de chômage varient en fonction du domaine d’études. Les diplômés dans les domaines techniques comme l’ingénierie semblent avoir moins de problèmes à trouver un emploi que leurs homologues en sciences sociales. Et pourtant ce sont des domaines où les femmes sont fortement sousreprésentées. Tableau 2.8 Echantillon d’emplois détenus par des employés sélectionnés dans une institution financière en fonction du genre et du type de diplôme

50 (3)

Titre du poste

Sex

Education Levels

80 (6)

Employé (Documents sécurisés)

Garçon

Bachelor of Laws (licence en droit) (LLB)

Fille

BA Community Development (licence en développement communautaire)

Employé de banque

Fille

MA Business Administration (maîtrise de gestion d’entreprise)

Caissier

Fille

Bachelor of Business Administration (Marketing)(licence en gestion d’entreprise)

Employé (Paiements)

Garçon

BA Environmental Management (licence en gestion environnementale)

Responsable service clientèle

Garçon

Bachelor of Commerce (licence de commerce)

La question du décalage des compétences semblait aggraver les défis rencontrés par les diplômés de cette étude dans leur quête d’emploi. Lors des entretiens, les personnes interrogées ont indiqué qu’un certain nombre de facteurs contribuait à leur chômage. La plupart de ces facteurs concernaient l’absence de connaissances et de compétences pertinentes sur un marché du travail de plus en plus compétitif. Les récits des personnes interviewées concernant les défis rencontrés lors de la recherche d’un emploi étaient cohérents avec les autres données que nous avons rencontrées. Par exemple, notre analyse des données sur les employés recrutés au cours des cinq dernières années, et qui ont été mises à notre disposition par un des employeurs, suggérait qu’obtenir un emploi qui corresponde aux connaissances et compétences acquises dans l’enseignement supérieur était un immense défi. L›analyse des qualifications des personnes recrutées par rapport à leur premier poste montre que beaucoup obtenaient des postes qui demandaient des connaissances et des compétences différentes de celles qu’ils avaient acquises dans l’enseignement supérieur. Le tableau 2.8 qui montre quelques postes choisis dans une institution financière sélectionnée pour cette étude, indique que les employés occupaient des postes sans rapport avec leur domaine d’études. En fait, la majorité des diplômés au chômage interviewés déclaraient également être prêts à accepter n’importe quel emploi, même sans rapport avec leur domaine d’études, comme le montrent les citations ci-dessous : «... Cela fait très longtemps que je cherche un emploi, sans espoir de travailler comme conseiller en genre et sexualité. Ces postes n’existent pratiquement pas dans le pays. Je peux travailler comme caissier

Employé de banque

Responsable des dossiers Garçon

Bachelor in Business Administration (licence en gestion d’entreprise)

Employé (Crédit)

BA Public Administration (licence en administration publique).

Fille

BA Geography and Environmental Studies( Responsable de banque Garçon licence en géographie (Expérience client) et études environnementales) Source : Dossiers de recrutement de l’institution financière

Les employeurs sachant que les demandeurs d’emploi sont désespérés utilisent des moyens moins Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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conventionnels et quelquefois immoraux pour choisir des demandeurs pour les entretiens et par la suite pour le recrutement, certains ayant des implications sexistes. Tout d’abord la concurrence pour l’emploi était rude au point que connaître quelqu’un était plus ou moins devenu le seul critère permettant d’obtenir un emploi. Tous les diplômés au chômage considéraient que le favoritisme était largement répandu et que la majorité des diplômés ayant un emploi l’ont obtenu parce que quelqu’un les y a aidés. Les diplômés ayant un emploi ont également confirmé ces points de vue. Lorsqu’on leur a demandé comment ils avaient obtenu leur emploi, presque tous ont répondu que c’était à travers quelqu’un à l’intérieur de l’entreprise qui pouvait être quelqu’un de la famille, un ami, un ancien camarade de classe, un ancien camarade d’école, l’ami de quelqu’un de la famille, ou l’ami d’un ami. Les employeurs de leur côté ont indiqué que les chasseurs de têtes étaient une des principales méthodes utilisées pour le recrutement des employés. Deuxièmement comme cela a déjà été mentionné, il a été indiqué que certains employeurs demandaient des faveurs sexuelles en échange d’un travail par exemple ; une diplômée nous a dit : « Quand je cherchais un emploi, j’ai rencontré un directeur des ressources humaines qui m’a appelé dimanche soir pour un entretien. Il n’a rien dit concernant le travail. Au lieu de cela, il a demandé des faveurs sexuelles. J’ai refusé. Il m’a donné une deuxième possibilité de lui offrir 200 000 schillings tanzaniens. Je n’avais pas cet argent. Je n’ai pas obtenu le poste.” De même, une autre diplômée au chômage a également indiqué que pendant un entretien pour un emploi il lui a été demandé de payer un dessous-de-table, et lorsqu’elle a dit qu’elle n’avait pas cet argent, la personne qui l’interviewait a demandé des faveurs sexuelles, condition pour obtenir le poste. 6.4.2 Influence du maintien des normes sexistes sur les décisions de recrutement et de rétention En analysant dans quelle mesure les attitudes sexistes sur le marché du travail renforçaient l’effet des résultats d’une éducation sexiste sur les résultats du marché du travail, il a été demandé aux diplômés au chômage et à ceux ayant un emploi si des facteurs comme le sexe de la personne, les différences sur le plan socio-économique, démographique, l’éducation des parents, le métier et le statut marital affectent les résultats sur le marché du travail, c’est-à-dire le fait d’être recruté et retenu pour un emploi. Concernant le sexe de la personne en tant que facteur pesant sur les décisions de recrutement, presque toutes les personnes interrogées au chômage pensaient que le fait d’être un homme ou une femme jouait un rôle important. Les exemples donnés font état d’une tendance à recruter des hommes pour des emplois qui exigent une force physique, et à décider de ne pas recruter les femmes en raison de leur rôle multiple à la maison et au travail. Quelques réponses données par les personnes interrogées sur ces questions figurent ci-dessous :

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« Pour ce qui est du genre, la société a des perceptions sur les rôles des genres qui font qu’il y a des activités réservées hommes et des activités réservées aux femmes. Par exemple, être infirmière, s’occuper des passagers dans les avions sont considérés comme des emplois féminins, alors qu’être médecin, conduire des poids-lourds sont considérés comme des emplois masculins. » Une diplômée au chômage. «… Pour ce qui est du genre, je n’ai jamais entendu parler de femme travaillant dans les mines, et il y a peu d’hommes qui soient des infirmiers. Et tout ceci à cause des rôles de genre construits par la société. Cependant, de nos jours vous trouverez des femmes occupant ce que l’on appelle « des emplois masculins » comme conduire des poids-lourds dans différentes régions et à l’extérieur du pays. » Une autre diplômée au chômage. La même personne interrogée a raconté un incident arrivé à une de ses amies : « Mon amie n’avait pas d’emploi parce qu’elle avait un enfant et la nature du travail lui demandait de travailler jusqu’à tard le soir. On lui a demandé comment elle pouvait travailler jusqu’au soir alors qu’elle avait un enfant la maison. Le lendemain, on l’a appelée pour lui dire qu’elle n’avait pas obtenu le poste. » Une étude menée en Tanzanie (Feinstein et al. 2010) donne deux exemples de la façon dont les normes sexistes portant sur les rôles traditionnels des hommes et des femmes attribuaient à ces dernières tout le travail domestique. En fait, les rôles de ménagère et de soignantes des femmes étaient une barrière à leur entrée et à leur rétention sur le marché du travail (Bond, 2004). Les diplômés ayant un emploi ont exprimé des points de vue similaires lorsqu’on leur a demandé s’ils pensaient qu’il existait des défis spécifiques au genre dans le recrutement et la rétention des employés. Les points de vue d’une personne interrogée travaillant pour une société de télécommunications illustrent clairement les conceptions sexistes à l’égard des emplois physiquement pénibles : «... Nous n’avons pas de femmes dans le département (Base Station System Engineering). Il est difficile pour les femmes de monter sur des tours. » Un diplômé ayant un emploi. L’homme interrogé a poursuivi en disant qu’il était difficile pour les femmes de travailler dans le domaine de l’ingénierie, mais qu’on peut les trouver dans d’autres domaines physiquement moins durs comme l’administration du système de technologie de l’information (TI). Un employeur de la société de construction qui a participé à cette étude a également exprimé des points de vue similaires :


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« Il n'y a pas d'emploi dans lesquels nous préférons un sexe plutôt que l’autre, mais quelquefois la situation même dicte des résultats qui semblent être guidés par des préjugés contre un sexe. Lorsque nous étions dans la construction de bâtiments, nous avions en fait des ingénieurs femmes qui s’occupaient de l’étude quantité. Mais aujourd’hui dans les projets de construction de routes, nous n’avons pas de femmes ingénieurs. La construction des routes implique de travailler dans des zones éloignées et dans des conditions extrêmement dures. Donc peut-être est-ce une raison qui pourrait amener les femmes ingénieurs à trouver que c’est un environnement de travail peu propice. » Employeur d’une société de construction.

années et davantage de femmes recrutées d’autres années. Les données sur les détenteurs d’emploi recrutés par l’institution financière et présentées dans le tableau 2.9 illustrent cette tendance.

Un directeur des ressources humaines interviewé côté employeur a expliqué que les questions de genre peuvent s’avérer un problème lorsque l’on doit décider qui recruter, en dépit de l’engagement de l’entreprise à assurer l’égalité des genres dans le recrutement et la rétention :

Les deux autres entreprises avaient recruté un nombre considérablement moins important d’employés au cours de ces mêmes cinq années. Dans l’entreprise paraétatique, le nombre minimum d’employés au cours d’une année a été de cinq (2007) et le nombre maximum de 33 (en 2011). Comme l’indique le tableau 2.9, alors que l’institution financière avait recruté un nombre relativement élevé d’employés au cours de cette période de cinq ans, certains étaient recrutés pour des postes qui demandaient des connaissances et compétences différentes de celles qu’ils avaient acquises dans l’enseignement supérieur. Aucune tendance claire ne se dessinait qui aurait permis de dire quel sexe était défavorisé. Cependant, les données d›une étude nationale indiquent que les femmes étaient sousreprésentées dans des postes professionnels exigeant un niveau élevé de compétences (RUT, 2007).

“Oui, il y a des problèmes. Par exemple, j’ai huit personnes dans mon département, parmi lesquelles six femmes. Deux sont en congé de maternité et les quatre autres sont enceintes. J’ai également une collègue dans une de nos filiales qui a appelé pour dire que deux membres du personnel affectés à la réception doivent partir en congé de maternité » Directeur principal des RH, institution financière. Interrogée sur les problèmes qu’elle rencontrait en tant que femme dans le travail, une personne ayant deux jeunes enfants et suivant des cours du soir pour passer une licence en administration des affaires (MBA) a déclaré : « Je travaille à temps plein, je vais à l’école et j’ai une famille dont je dois occuper. Je travaille de 8h du matin à 17h, je vais à l’école jusqu’à 21h et ensuite, je rentre et je m’occupe de mes jeunes enfants. Je me couche en général aux alentours de minuit et je dois me lever à 5h du matin. » Une diplômée ayant un emploi. De fait, nombre d’études décrivent des problèmes similaires auxquels sont confrontées les femmes qui travaillent. Par exemple, les données empiriques de l’étude sur l’utilisation du temps en Afrique du Sud, à Madagascar, à Maurice et au Bénin montrent que les hommes accordent beaucoup moins de temps aux travaux domestiques que les femmes (Charmes, J., 2006). De telles différences entre les hommes et les femmes dans l’utilisation du temps sont attribuées aux normes culturelles qui établissent une division du travail rigide entre les hommes et les femmes (Kes & Swaminahan 2006). Seuls deux sur quatre employeurs ont fourni des données de recrutement qui nous ont permis de comparer les tendances du recrutement des diplômés hommes et femmes. Dans deux entreprises, les résultats étaient mitigés avec davantage d’hommes recrutés certaines

Tableau 2.9 Répartition par sexe du nombre de diplômés recrutés par l’institution financière au cours des cinq dernières années Années

2007

2008

2009

2010

2011

Fille

38

45

24

36

39

Garçon

27

37

34

58

33

Total

65

82

58

94

72

Source : Dossiers de recrutement de l’institution financière

7. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS Cette étude a essayé d’enrichir le discours sur les liens entre l’éducation et le marché du travail, en y introduisant la perspective du genre. Nous avons utilisé les données d’une étude essentiellement qualitative pour analyser comment les résultats de l’éducation sont influencés par le genre, et par conséquent dans quelle mesure leurs effets sur les résultats du marché du travail sont influencés par le genre. L’étude a analysé la manière dont les préjugés sexistes fonctionnent sur le marché du travail, renforçant les inégalités entre les hommes et les femmes sur le marché du travail. Partant de la théorie cognitive sociale du développement du genre et de la différenciation, l’étude a plus particulièrement essayé d’illustrer comment en dépit d’une progression de l’inscription des étudiantes dans les établissements d’enseignement supérieur, les attitudes et les pratiques sexistes dans les établissements d’enseignement supérieur découlant d’expériences sexistes préalables dans les sphères publiques et privées continuent à avoir des effets sexistes sur les résultats de l’éducation, qui à leur tour continuent d’avoir un impact sexiste sur l’emploi dans le marché du travail. Reconnaissant que le marché du travail est aussi un système sexiste, nous avons également cherché à analyser comment les pratiques sexistes sur le marché du travail renforcent la discrimination à l’égard des femmes sur le marché de l’emploi.

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Les conclusions montrent une tendance croissante de l’inscription des garçons et des filles en termes d’effectifs inscrits dans chacune des deux universités. Cependant, l’étude a révélé que l’écart entre les garçons et les filles dans les programmes scientifiques comme l’ingénierie reste plus important que dans les sciences sociales. Il est clair que les stéréotypes sexistes sur les différences d’aptitude dans les différentes matières continuent à contribuer à une sous-représentation encore plus disproportionnée des filles dans les programmes scientifiques. Dans les universités, les remarques sexistes sur les étudiantes dans des cursus comme l’ingénierie peuvent démotiver les étudiantes dans ces programmes à encourager d’autres filles à s’inscrire dans les programmes scientifiques. En fait alors que les données désagrégées sur les performances dans les sciences sociales font état de résultats mixtes, dans les programmes de génie civil et d’ingénierie électrique, la proportion d’étudiantes réussissant avec la mention ‘upper second’ ou ‘first class’ était nettement plus faible que celle des étudiants au cours de ces cinq années. Il est important de noter que les résultats des étudiantes dans des programmes que les stéréotypes ont longtemps considérés comme des domaines masculins étaient relativement plus mauvais. De ce fait, sur un marché du travail compétitif qui propose trop peu d’emplois par rapport au nombre de demandeurs d’emploi arrivant sur le marché du travail, ceci peut contribuer à une sous-représentation continue importante des filles dans les emplois que les stéréotypes qualifient de masculins, comme l’ingénierie. Alors que les conclusions actuelles ont montré qu’obtenir un emploi formel sur le marché du travail est un problème aussi bien pour les diplômés que les diplômées, elles ont par la suite révélé que les expériences sexistes différenciées pouvaient défavoriser les diplômées de manière disproportionnée dans leur quête d’emploi et dans les processus de recrutement sur le marché du travail. Sur ce point, les conclusions ont révélé par exemple, que les préjugés sexistes dans les classes contribuaient à saper la confiance en soi des étudiantes, ce qui pesait sur leur participation effective au processus d’apprentissage. Les étudiants qui voulaient éviter l’inclusion d’étudiantes dans les groupes de discussions sont un exemple illustrant l’application de sanctions sociales même dans l’enseignement supérieur ; il montre comment une conduite sexiste qui désavantage les filles dans l’éducation peut venir renforcer des expériences préalables. En fait, il est évident que les femmes ont également une conception d’elles-mêmes sexiste qui contribue à leur discrimination. Ce qu’ont rapporté les personnes interrogées dans le cadre de cette étude concernant des étudiantes qui auraient dit que les étudiants savent mieux présenter en est un exemple. Ceci corrobore les conclusions d’autres études qui montrent par exemple que dans les groupes mixtes, les enfants ont des probabilités d’adopter des comportements stéréotypés sexistes (Martin, 1993). L’étude révèle également que sur le marché du travail il existe des attitudes et des pratiques sexistes qui 140

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renforcent les effets sexistes des produits de l’éducation, défavorisant davantage encore les filles dans l’emploi. Il s’agit d’attitudes sexistes sur les risques par rapport à ce que les femmes peuvent faire ou ce à quoi elles peuvent faire face et ne peuvent pas faire face. De telles perceptions et attitudes peuvent en fait avoir un impact négatif sur la confiance que les femmes ont en leur capacité dans certains postes. Expliquant l’auto efficacité qu’il définit comme « la croyance en ses capacités à organiser et exécuter une action nécessaire pour gérer d’éventuels problèmes », Bandura (1995, 1997) explique comment ceux qui ont un sens très limité de l’auto-efficacité ont tendance à perdre rapidement confiance en leurs capacités et croient que les tâches difficiles dépassent leurs capacités. De plus, Bussey et Bandura (1999) notent que les gens se font une idée de leurs capacités non seulement en fonction de leurs propres expériences mais également des résultats observés vécus par d’autres, tout en étant conscients des conséquences vraisemblables de comportements contraires aux comportements attendus. Les postulats ci-dessus peuvent permettre d’expliquer la sous-représentation encore plus flagrante des filles dans les filières scientifiques comme l’ingénierie, d’où leur sousreprésentation continue dans des postes qui exigent des compétences techniques. On pourrait en fait comprendre pourquoi les femmes continuent à éviter de poursuivre des études qui les orienteraient vers des postes considérées comme des domaines masculins. Pourquoi s’embarquer dans un programme académique et être ensuite ridiculisée par ses collègues qui vous diraient « vous êtes comme un homme ? »- Ou pourquoi s’inscrire dans un programme qui vous orientera vers des postes que les stéréotypes qualifient de masculins et où vos collègues masculins ne vous considéreront jamais comme leur égale ? La direction pourrait aussi se demander si vous êtes aussi capable que vos homologues masculins. Ces questions vous montrent que les différences entre les hommes et les femmes sont établies socialement à travers des normes qui définissent un comportement et des rôles en fonction du genre. Ces normes continuent à défavoriser les femmes dans toutes les sphères publiques et privées, y compris dans l’éducation et sur le marché du travail. 7.1 Recommandations en matière de politique et de pratique Les conclusions de cette étude ont montré que les attitudes et pratiques sexistes dans l’éducation et les sous-systèmes du marché du travail continuent à défavoriser les femmes dans l’emploi. Dépasser ces attitudes et ces pratiques exige des efforts concertés à tous les niveaux pour mettre en place des mesures efficaces qui découragent les processus différenciés en fonction du genre et ouvrent la voie vers l’égalité des opportunités pour les filles et les garçons, les hommes et les femmes. Nous proposons ci-dessous ce que cet effort devrait impliquer. Les statistiques sont importantes pour éclairer les politiques et promouvoir l’action. Pourtant, les données


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désagrégées par sexe pour les différents cursus d’étude ne sont pas facilement disponibles. Il est donc nécessaire que les établissements d’enseignement supérieur disposent de données désagrégées par sexe sur l’inscription, les résultats et l’achèvement des différents cursus universitaires. Les données devraient être facilement disponibles non seulement au niveau des programmes d’études, mais également au niveau institutionnel. Les données désagrégées par sexe et facilement disponibles faisant état de différences entre les programmes sont très importantes pour concevoir des interventions appropriées et ciblées afin de promouvoir l’égalité entre les genres dans tous les programmes d’études universitaires. Nous avons argué qu’il est probable que le problème du décalage des compétences révélé par cette étude défavorise les femmes de manière disproportionnée dans l’emploi car il peut exacerber les problèmes de chômage et de sous-emploi. Il est donc nécessaire de mettre en place un cadre pouvant encourager une approche intégrée de l’élaboration et de la mise en œuvre d’une politique d’éducation et d’emploi. Le système d’éducation doit savoir ce que le marché du travail peut absorber et le type de connaissances et de compétences nécessaires, de manière à éviter la tendance persistante à l’augmentation du chômage et du sous-emploi des diplômés. Ceci peut se faire en instaurant des mécanismes d’interaction et de dialogue entre les instituts universitaires et les acteurs du marché du travail, dont les produits peuvent éclairer les changements qu’il est nécessaire d’apporter régulièrement au contenu des cours. Les données théoriques et empiriques ont révélé comment les choix que les hommes et les femmes font dans la vie sont influencés par des préjugés sexistes qu’ils rencontrent tout au long de leur vie, tant dans les sphères publiques que dans les sphères privées. Des mesures efficaces pour

s’attaquer aux préjugés sexistes devraient aller au-delà de simples cadres réglementaires et politiques appropriés mis en place, pour promouvoir une implication efficace de la communauté dans la promotion de l’égalité entre les genres. Les organisations de la société civile (OSC) devraient adopter un rôle plus proactif pour sensibiliser les communautés aux implications négatives de l’inégalité entre les genres pour les hommes et les femmes individuellement et pour la société dans son ensemble. Les OSC pourront jouer un rôle plus efficace s’il existe une volonté politique claire de soutenir leurs efforts. Les conclusions présentes, corroborant les conclusions d’études similaires, indiquent que les étudiants et les étudiantes peuvent réussir aussi bien. Cependant, la discrimination sexuelle dans l’éducation et sur le marché du travail peut s’avérer négative pour les études universitaires et l’évolution de carrière des étudiantes. Comme l’ont révélé nos conclusions, les étudiantes diplômées se retrouvaient dans des situations où elles étaient découragées de poursuivre dans des filières scientifiques comme l’ingénierie. Celles qui ont réussi à continuer dans ces filières ont trouvé qu’il était difficile par la suite d’entrer sur le marché du travail pour lequel elles avaient été formées, du fait de la perception négative des employeurs envers les capacités des femmes à travailler dans des domaines scientifiques. Il existe également des éléments de preuve concernant des diplômés qui ont dû faire face aux avances sexuelles d’employeurs éventuels, ce qui rendait la chasse à l’emploi encore plus compliquée. Une recherche plus approfondie pourrait vouloir analyser ces conclusions de manière plus détaillée pour évaluer la fréquence de ces expériences dans l’éducation et sur le marché du travail et dans quelle mesure elles affectent les hommes et les femmes de manière différente au niveau des résultats de l’éducation et du marché du travail.

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ANNEXES Annexe 1: L’inscription dans des programmes sélectionnés dans les universités publiques et privées Graphique 2.22 Répartition par sexe des effectifs d’étudiants inscrits à l’université publique en ingénierie électrique de 2006 à 2010

Graphique 2.24 Répartition par sexe des effectifs d’étudiants inscrits à l’université privée en génie civil de 2007 à 2010

Nombre d’étudiants

Années Hommes

Femmes

Nombre d’étudiants

Total

Source : Dossiers du département d’ingénierie électrique

Graphique 2.23 Répartition par sexe des effectifs d’étudiants inscrits à l’université privée en communication de masse de 2006 à 2010

Années Hommes

Femmes

Total

Source :Dossiers de l’université privée

Graphique 2.25 Répartition par sexe des effectifs d’étudiants inscrits à l’université privée en ingénierie électrique de 2006 à 2010

Nombre d’étudiants

Années Hommes

Femmes

Total

Nombre d’étudiants

Source: Dossiers de l’université privée

Années Hommes

Femmes

Total

Source :Dossiers de l’université privée

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

145


R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

Annexe 2 Résultats de programmes universitaires sélectionnés à l’université publique et privée Tableau 2.10 Répartition des résultats par sexe des étudiants en génie civil à l’université publique : 20062010 Année

Genre

Classement des diplômes par mention First

Upper

Lower

Pass

Total

0

8

9

2

19

Garçon 2006/07

0%

42,10%

47,30%

10,50%

100%

0

1

9

0

10

Fille 0%

10

90%

0%

100%

1

6

28

28

63

Garçon 2007/08

1,50%

9,50%

44,40%

44,40%

100%

0

0

4

4

8

Fille 0%

0%

50%

50%

100%

0

12

22

0

34

Garçon 2008/09

0%

35,20%

64,70%

0%

100%

0

0

3

0

3

Fille 0%

0%

100%

0%

100%

0

6

23

3

32

Garçon 2009/10

0%

18,70%

71,80%

9,30%

100%

0

2

7

1

10

Fille 0%

20%

70%

10%

100%

0

18

14

2

34

Garçon 2010/11

0%

52,90%

41,10%

5,80%

100%

0

1

4

0

5

Fille 0%

20%

80%

Source : Dossiers du département de génie civil

146

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

0%

100%

Tableau 2.11 Répartition des résultats par sexe des étudiants en ingénierie électrique à l’université publique de 2006 à 2010 Année

Genre

Classement des diplômes par mention First

Upper

Lower

Pass

Total

0

8

5

0

13

0%

61,5%

38,4%

0%

100%

0

1

4

0

5

0%

20%

80%

0%

100%

0

9

10

0

19

0%

47,3%

52,6%

0%

100%

0

1

3

0

4

0%

25%

75%

0%

100%

0

7

13

0

20

0%

35%

65%

0%

100%

0

0

0

0

0

0%

0%

0%

0%

0%

0

7

10

1

18

0%

38,8%

55,5%

5,5%

100%

0

1

3

0

4

0%

25%

75%

0%

100%

0

4

13

0

17

0%

23,5%

76,4%

0%

100%

0

0

0

0

0

0%

0%

0%

0%

0%

Garçon 2006/07

Fille

Garçon 2007/08

Fille

Garçon 2008/09

Fille

Garçon 2009/10

Fille

Garçon 2010/11

Fille

Source : Dossiers du département d’ingénierie électrique


R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

Tableau 2.12 Répartition des résultats par sexe des étudiants en informatique à l’université publique de 2006 à 2010 Année

Genre

Classement des diplômes par mention First 2

Upper 37

Lower

Pass

Total

9

0

48

Tableau 2.13 Répartition des résultats par sexe des étudiants en commerce à l’université publique de 2006 à 2010 Année

Garçon 2006/07

4%

77%

19%

0%

100%

3

9

1

0

13

2006/07

Lower

Pass

Total

5

78

191

56

330

1,5%

23,6%

57,8%

17,1%

100%

2

27

115

20

164

69,2%

7,7%

0%

100%

1,2%

16,4%

70,1%

12,3%

100%

2

46

19

1

68

3

138

229

24

394

0.7%

35%

58,1%

6%

100%

2

54

106

7

169

1,1%

31,9%

62,7%

4,1%

100%

1

114

272

25

412

0,2%

27,6%

66%

6%

100%

0

39

167

16

222

Garçon 2,9%

67,6%

27,9%

1,4%

100%

0

2

2

0

4

2007/08 Fille

0%

50%

50%

0%

100%

4

38

21

2

65

Garçon

Garçon 6,1%

58,4%

32,3%

3%

100%

1

12

5

0

18

2008/09

Fille

Fille 5,5%

66,6%

27,7%

0%

100%

0%

17,5%

75,2%

7,2%

100%

3

39

23

2

67

3

83

284

28

398

0,7%

9,5%

71,3%

0,7%

100%

0

41

146

16

203

0%

20,1%

72,9%

7,8%

100%

4

87

174

2

267

1,4%

32,5%

65,1%

0,7%

100%

1

64

140

2

207

0,4%

30,9%

67,6%

9%

100%

Garçon

Garçon 4,4%

58,2%

34,3%

2,9%

100%

1

10

3

0

14

2009/10

Fille

Fille 7,1%

71,4%

21,4%

0%

100%

2

34

23

0

59

Garçon 2010/11

Upper

23%

Fille

2009/10

First

Fille

Garçon

2008/09

Classement des diplômes par mention

Garçon

Fille

2007/08

Genre

Garçon 3,3%

57,6%

39%

0%

100%

1

18

3

0

22

Fille

2010/11 Fille

4,5%

81,8%

14%

Source : Dossiers du département d’informatique

0%

100%

Source : Dossiers du département Commerce

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

147


R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

Tableau 2.14 Répartition des résultats par sexe des étudiants en communication de masse inscrits à l’université privée de 2006 à 2010 Année

Classement des diplômes par mention Genre

First

Upper

Lower

Pass

Total

0

21

2

0

23

0%

91%

9%

0%

100%

Tableau 2.15 Répartition des résultats par sexe des étudiants en sociologie inscrits à l’université privée de 2006 à 2010 Année

0

13

3

0

16

0%

81%

19%

0%

100%

0

18

20

0

38

0%

47,3%

52,6%

0%

100%

2008/09

0

13

21

0

34

0%

38%

62%

0%

100%

1

50

97

1

149

1%

33%

65%

1%

100%

0

33

62

0

95

0%

35%

65%

0%

100%

0

32

56

1

89

0%

35,9%

62,9%

1,1%

100%

0

30

86

3

119

0%

25%

72%

3%

100%

1

15

35

0

51

2%

29,4%

68,6%

0%

100%

0

23

38

1

62

0%

37%

61%

2%

100%

Garçon 2008/09 Fille

Garçon 2009/10 Fille

Garçon 2010/11

Fille

Source : Dossiers de l’université privée

148

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

Lower

Pass

Total

0

29

Upper

26

0

55

0%

52.7%

47%

0%

100%

0

35

42

0

77

0%

45%

55%

0%

100%

0

39

63

3

108

0%

36%

58%

6%

100%

1

53

40

4

98

1%

54%

41%

4%

100%

Garçon

Garçon

Fille

First

Fille

Fille

2007/08

Classement des diplômes par mention

Garçon

Garçon 2006/07

Genre

2009/10 Fille

Source : Dossiers de l’université privée


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Université du Zimbabwe

7

Les activités des femmes dans le secteur informel et le soutien à l’éducation des filles à Binga : Perspectives des femmes dans le secteur informel

La prévalence de la pauvreté dans les ménages dirigés par des femmes au Zimbabwe était de 48 pour cent en 1995 et de 68 pour cent en 2003. Des stratégies d’adaptation ont compris l’intensification des activités des femmes dans le secteur informel et la préférence accordée aux garçons sur les filles lorsqu’il s’agit d’envoyer les enfants à l’école.

RÉSUMÉ Cette étude a examiné le lien entre la participation des femmes dans le secteur informel (en particulier dans le secteur de la pêche) et les revenus connexes et l’inscription et la fréquentation des filles à l’école dans la population des Tonga à Binga. Dans un premier temps, elle a cherché à déterminer les facteurs qui font obstacle à l’éducation des filles à Binga, les priorités des femmes quand elles ont des revenus, la façon dont les activités génératrices de revenus ont aidé à aborder à certains obstacles à l’éducation de filles et les autres facteurs ayant favorisé l’éducation des filles à Binga ces dernières années. Elle a aussi clairement établi les perspectives des femmes du secteur informel sur l’éducation des filles. Les données de cette étude ont été recueillies à l’aide de plusieurs outils : un questionnaire Ménages, des entretiens approfondis, des groupes de discussion avec les femmes du secteur informel et des filles inscrites à l’école primaire et secondaire, des entretiens avec des informateurs clés des autorités du secteur éducatif et l’observation. Les conclusions révèlent que les facteurs affectant l’éducation des filles à Binga comprennent l’attitude négative à l’égard de l’éducation des filles, la pauvreté, la polygamie, les familles nombreuses, la distance pour aller à l’école (surtout les écoles secondaires), les pratiques de maturation sexuelle, les tâches domestiques, la participation des mères dans le secteur informel et les grossesses adolescentes. La participation des femmes dans le secteur informel a été retenue comme un facteur contribuant de façon positive à l’éducation des filles en abordant les obstacles qui les empêchent d’aller à l’école. Dans le premier cas, l’amélioration des sources de revenus des ménages leur permet d’envoyer leurs enfants à l’école, y compris les filles. La participation des femmes dans le secteur informel a changé l’attitude à l’égard de l’éducation des filles (car les entrepreneuses comprennent l’importance de l’éducation dans les activités commerciales). Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

149


R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

Ce changement d’attitude a conduit certaines femmes qui avaient abandonné l’école pour diverses raisons à opter pour une éducation de la seconde chance et à sensibiliser les filles sur l’importance de l’éducation. Grâce à leur participation dans le secteur informel, les femmes ont aussi réussi à aborder de façon positive les pratiques de maturation sexuelle. Citons parmi les autres facteurs favorisant l’éducation des filles à Binga l’appui apporté par la Campagne en faveur de l’éducation des filles (Camfed) par le biais des groupes de soutien des mères et l’éducation par les paires. Toutefois, les femmes qui travaillent dans le secteur informel ont des difficultés à mener de front leur travail et leurs tâches domestiques et elles font appel à d’autres membres du ménage, habituellement les filles, pour prendre le relais. S’appuyant sur ses conclusions, l’étude recommande d’organiser des campagnes de sensibilisation sur l’importance des droits des enfants, y compris le droit à l’éducation (pour les filles et les garçons sans distinction) et le droit d’être protégé contre la maltraitance. La sensibilisation doit porter sur les grossesses adolescentes et la politique de réintégration scolaire au vu du taux élevé de grossesses adolescentes dans cette région et de l’appui mis à la disposition des femmes du secteur informel par le ministère des Petites et Moyennes entreprises par le biais de prêts, de formation en gestion d’entreprise et de liens avec le marché pour stimuler leurs activités étant donné le rôle qu’elle joue pour soutenir l’éducation des filles. L’étude recommande également une analyse approfondie des impacts de la participation des femmes dans le secteur informel sur les résultats des filles à l’école et une étude pour déterminer dans quelle mesure les inégalités entre les genres et les stéréotypes dans les écoles dans des domaines comme la distribution des ressources éducatives disponibles influent sur le choix des matières, les rôles entre les genres dans les écoles, entre autres. 1. INTRODUCTION ET CONTEXTE Environ 70 pour cent des travailleurs informels sont autoemployés en Afrique subsaharienne, 62 pour cent en Afrique du Nord, 6 pour cent en Amérique latine et 59 pour cent en Asie (OIT, 2002b). Au Zimbabwe, à mesure que le secteur de l’emploi formel continue de décroître à cause de la crise économique sous-tendue par la désindustrialisation qui a démarré dans les années 1990 et a culminé entre 2000 et 2008, le secteur informel s’est développé, dominé par les femmes et les jeunes (Kanyenze et al., 2011). Environ 75 pour cent des entreprises informelles/micro-entreprises sont possédées par des femmes. Il existe quelques niches dominées par les femmes (Kanyenze et al., 2011). Depuis l’adoption de l’Approche des besoins humains fondamentaux par les agences multilatérales à la fin des années 1970, l’importance de l’éducation dans le processus du développement a été envisagée sous trois angles : « en tant que besoin humain fondamental...l’éducation devient une condition nécessaire pour permettre à l’individu de s’identifier à la culture environnante. En tant que moyen 150

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

de satisfaire à d’autres besoins humains, elle influence et est aussi influencée par l’accès à d’autres besoins fondamentaux. En tant qu’activité qui soutient et accélère le développement général, l’éducation joue plusieurs rôles. » (Banque mondiale, 1980:13) Etant donné que les facteurs économiques figurent parmi ceux qui font obstacle à l’éducation des filles à différents niveaux, on attend que la participation des femmes dans le secteur informel, en générant des revenus dans les ménages, stimule l’éducation des filles et des garçons. En effet, c’est surtout quand les ressources ne sont pas disponibles que les familles préfèrent envoyer leurs fils à l’école en vue du rôle économique présumé que les hommes assument pour la prise en charge du ménage (UNICEF, 2010). Vu sous cet angle, il devient pertinent d’établir une relation entre la participation des femmes dans le secteur informel, en particulier dans le commerce du poisson à Binga, et l’éducation des filles, car il existe peu de preuves empiriques pour démontrer cette relation. Il existe une relation étroite et complexe entre les activités économiques des femmes et l’éducation des filles. D’une part, la génération de revenus a un impact positif sur l’éducation des filles. D’autre part, l’éducation des femmes et des filles a pour effet d’accroître la participation féminine sur le marché du travail et de contribuer à la génération de revenus et à leur émancipation économique. Cette étude explore par conséquent la relation entre la participation des femmes dans le secteur informel et l’éducation des filles à Binga. 2. DEFINITION DES TERMES CLES Le secteur informel L’Etude 2003 sur l’évaluation de la pauvreté au Zimbabwe a défini le secteur informel comme étant composé d’établissements/entreprises ayant une licence et de ceux n’ayant pas de licence ou n’étant pas enregistrés. Les licences désignent l’autorisation accordée à un établissement ou un individu par un pouvoir public comme une municipalité ou un conseil municipal en vue de négocier ou vendre des marchandises (alcools, épicerie, vêtements, matériel, etc.). L’enregistrement désigne les entreprises qui sont enregistrées au titre de la Loi sur les sociétés sur le Registre des sociétés qui délivre un certificat de constitution aux sociétés privées et un certificat de négoce aux sociétés anonymes. Les entreprises du secteur informel exercent des activités à faible contenu technologique. Elles ont généralement un fort roulement en personnel et leur taux de mortalité est élevé. Elles ont également une faible productivité, paient des salaires bas et sont généralement vulnérables aux chocs internes et externes, notamment aux changements politiques. Education L’éducation peut être définie comme le processus par lequel une société transmet des connaissances, des valeurs et des idéologies, et ce faisant, prépare les jeunes à leur rôle d’adulte et les adultes à de nouveaux rôles. La littérature distingue deux types d’éducation : formelle et non formelle.


R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

La présente étude porte sur l’éducation formelle qui, selon Dib (1987), correspond au modèle d’éducation organisée, structurée et administrée en fonction d’un ensemble de lois et de normes données et propose un curriculum plutôt rigide au regard des objectifs, du contenu et de la méthodologie. Elle est caractérisée par un processus éducatif contigu appelé enseignement présentiel qui implique l’enseignant, les élèves et l’établissement. Les établissements d’éducation formelle sont organisés sur les plans administratif, physique et curriculaire ; ils exigent des élèves une présence minimum en classe. L’éducation formelle a une série de caractéristiques bien définies. En revanche, l’enseignement non présentiel et la communication non contiguë caractérisent les systèmes d’éducation non formelle. Dans ce cas, la stratégie adoptée n’exige pas la présence de l’élève, limitant ainsi le contact entre l’enseignant et l’élève, et les activités se déroulent à l’extérieur de l’établissement, par exemple par la lecture et les dissertations. Il convient toutefois de noter que la distinction entre les systèmes d’éducation formelle et non formelle s’estompe à l’ère de la formation à distance.

la pauvreté au Zimbabwe dépassait 80 pour cent de la population totale, avec de nombreux ménages se démenant pour gagner suffisamment d’argent pour s’acheter la nourriture nécessaire en raison de l’augmentation du coût de la vie et du déclin économique persistant (FEWS NET, 2007).

Il est aussi important de clarifier trois caractéristiques majeures de l’éducation formelle, à savoir : l’accès, la rétention et l’achèvement. « L’accès » est le processus permettant aux enfants d’entrer dans une école, alors que la « rétention » garde les enfants à l’école jusqu’à l’achèvement. Le contraire est désigné par les termes « attrition » ou « abandon » lorsque les enfants quittent l’école avant l’âge prescrit (Scott, 2005). Dans cette étude, « l’accès » désigne la facilité avec laquelle les filles peuvent atteindre l’école ou le milieu scolaire au sein de leur communauté ; « la rétention » désigne la durée pendant laquelle les filles restent dans le système éducatif après leur inscription ; « l’achèvement » est la situation des filles qui, après avoir accédé et s’être inscrites à l’école, y restent et achèvent le cycle complet de l’enseignement auquel elles se sont inscrites, comme l’enseignement primaire ou l’enseignement secondaire.

La recherche a indiqué que la génération de revenus par les femmes a des effets positifs sur l’éducation des filles, mais elle n’a pas déterminé la dynamique du processus de décision sur l’utilisation des fonds provenant des activités génératrices de revenus. La présente étude cherche à combler cette lacune. Au Burkina Faso, l’UNICEF a soutenu des projets générateurs de revenus chez les femmes pour financer l’éducation des filles (UNICEF, 2010). Une femme bénéficiaire de cette initiative a déclaré : « Nous achetons souvent des cahiers et des stylos pour les élèves. Cela n’a pas l’air grand-chose, mais (ne pas avoir ces choses) suffit pour que certains enfants arrêtent l’école. Cela suffit pour qu’une fille soit mariée de force. »

L’examen du lien entre l’entrepreneuriat des femmes et les résultats des filles à l’école dépassait le cadre de cette étude. Elle a toutefois examiné les quatre aspects suivants de l’éducation : accès, inscription, rétention et achèvement. 3. ÉNONCÉ DE LA PROBLÉMATIQUE Le Zimbabwe souffre de l’effondrement de son économie depuis l’an 2000. Le produit intérieur brut a chuté au taux cumulatif de 40 pour cent entre 2000 et 2007 et a encore diminué de 14 pour cent en 2008 (FEWS NET, 2007). On estime que l’inflation a atteint le chiffre record de 500 milliards de pour cent en septembre 2008, alors que les réserves en devises étrangères s’élevaient à 6 millions d’USD pour une dette extérieure de 6 milliards d’USD. L’aide humanitaire en 2008 atteignait le montant considérable de 490 millions d’USD dans un contexte de chômage dépassant 90 pour cent (FEWS NET, 2007). En 1998, environ 63 pour cent des ménages du Zimbabwe étaient considérés comme pauvre (CSO, 1998: 23). En 2004, on estimait que le nombre de personnes vivant dans

La prévalence de la pauvreté dans les ménages dirigés par des femmes était de 48 pour cent en 1995 comparé à 39 pour cent dans les ménages dirigés par les hommes, alors qu’en 2003, ce taux était de 68 pour cent dans les ménages dirigés par des femmes et de 60 pour cent dans les ménages dirigés par des hommes (FEWS NET, 2007). Des stratégies d’adaptation ont été initiées, notamment l’intensification des activités des femmes dans le secteur informel (Muzvidziwa, 2005) et la préférence accordée aux garçons sur les filles lorsqu’il s’agit d’envoyer les enfants à l’école (UNICEF, 2010). Cependant, peu de travaux ont été menés pour déterminer le lien entre la participation accrue des femmes aux activités du secteur informel et l’éducation des filles ainsi que sur leur perception de l’éducation des filles.

Dans cette étude, nous nous sommes intéressées à la façon dont les femmes qui participent à des activités génératrices de revenus dans le secteur informel utilisent leurs activités commerciales et leurs revenus pour améliorer l’éducation des filles dans leur famille et leur communauté. C’est parce que ces projets générateurs de revenus sont censés offrir aux femmes des opportunités exceptionnelles en leur ouvrant des portes vers une meilleure éducation, et par voie de conséquence à leur croissance personnelle et économique et à celles de leur famille grâce à l’instruction. Une autre relation entre l’éducation et les projets générateurs de revenus dans le secteur informel est que l’entrepreneuriat peut être difficile lorsqu’on n’a pas l’instruction permettant de mener à bien ses objectifs commerciaux (Jalbert, 2000). Comme l’a observé Negash (2006), l’éducation est l’un des facteurs affectant les projets des femmes. L’Objectif du Millénaire pour le développement n°3 (OMD3), visant à promouvoir l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes, est reconnu non seulement comme un objectif en soi, mais aussi comme une étape essentielle pour la réalisation de tous les autres objectifs. Avec l’émancipation économique des femmes (dans ce cas, y compris par l’entrepreneuriat Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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féminin), l’égalité entre les genres est déterminante pour réaliser d’autres OMS, à savoir l’enseignement primaire universel (OMD2), la diminution de la mortalité infantile des enfants de moins de cinq ans (OMD4), l’amélioration de la santé maternelle (OMD5) et la diminution des risques de contracter le VIH et le Sida (OMD6) (PNUD, 2005). En Inde, Williams et Gurtoo (2011) ont démontré que la plupart des femmes dans le secteur informel était majoritairement sans instruction et n’avait connu aucune scolarité formelle, mais ils n’ont pas approfondi la question pour comprendre la façon dont le manque d’instruction impactait leurs projets commerciaux. Il existe par conséquent peu de preuves empiriques de la relation entre les projets générateurs de revenus des femmes dans le secteur informel et l’éducation des filles. Par conséquent, le but de cette étude est de déterminer si les activités génératrices de revenus des femmes dans le secteur informel à Binga se sont traduites par une augmentation de la scolarisation des filles et la façon dont le niveau d’éducation des femmes affecte leurs activités commerciales. Elle questionne l’idée selon laquelle la génération de revenus des femmes est la condition préalable à l’augmentation des inscriptions de filles dans les écoles. 4. OBJECTIFS DE L’ÉTUDE L’objectif général de la présente étude est de déterminer la relation entre la participation des femmes dans le secteur informel et la génération de revenus qui en résulte et l’éducation des femmes et des filles à Binga. Les objectifs spécifiques sont les suivants : • Déterminer les facteurs qui favorisent ou qui font obstacle à l’éducation des filles à Binga ; • Déterminer dans quelle mesure la participation des femmes dans le secteur informel est affectée par leur niveau d’éducation ; • Définir la dynamique du processus prise de décision sur les revenus générés par les femmes et sur la priorité donnée à l’éducation des filles ; • Déterminer comment la participation des femmes dans le secteur informel et la génération de revenus à Binga influence (positivement et négativement) l’éducation des filles dans cette zone ; et • Déterminer comment les femmes dans le secteur informel perçoivent l’éducation des filles. 5. CADRE THÉORIQUE : LE CADRE D’AUTONOMISATION DES FEMMES Le cadre d’autonomisation des femmes conceptualise cinq niveaux progressifs d’égalité classés par ordre hiérarchique ; chaque niveau supérieur indique un niveau plus élevé d’autonomisation. Ils constituent la base permettant d’évaluer le degré d’autonomisation des femmes dans tous les domaines de la vie sociale ou économique. Les niveaux d’égalité sont les suivants : le bien-être, l’accès, la conscientisation, la participation et le contrôle. Ils sont expliqués en détail dans le Tableau 2.16.

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Tableau 2.16 Cadre d’autonomisation des femmes Contrôle

Utiliser la participation des femmes dans le processus de prise de décision pour parvenir à l’équilibre des pouvoirs entre les hommes et les femmes sur les facteurs de production, sans que les hommes soient en position de domination.

Participation

Se rapporte à la participation égale des femmes au processus de prise de décision, à l’élaboration des politiques, la planification et l’administration. Dans les projets de développement, elle inclut l’implication dans l’évaluation des besoins, la conception du projet, la mise en œuvre et l’évaluation.

Conscientisation

Se rapporte à la compréhension de la différence des rôles entre les genres et la croyance que les relations entre le genre et le partage du travail selon le genre doivent être justes et agréables pour les deux et ne pas être fondées de l’un sur l’autre.

Accès

Se rapporte à l’accès des femmes aux autres facteurs relatifs à la production, par exemple la terre, le travail, la formation, les circuits commerciaux et tous les services et avantages offerts au public sur un pied d’égalité avec les hommes. L’égalité de l’accès s’obtient en assurant l’égalité des opportunités par une réforme juridique visant à supprimer les articles discriminatoires.

Bien-être

Se rapporte au niveau de bien-être matériel des femmes par rapport aux hommes en ce qui concerne l’alimentation, les revenus et les soins médicaux, sans mentionner si sont elles-mêmes créatrices et productrices actives ou non de leurs biens matériels.

A mesure que les femmes montent dans les niveaux d’autonomisation vers le contrôle, elles ont une confiance en elles et un pouvoir de décision accrus sur leur vie. Dans le cadre de cette étude, cela implique même les décisions sur l’utilisation des revenus issus de leurs activités dans le secteur informel. 6. REVUE DE LA LITTÉRATURE Depuis le tournant du Millénaire, un nombre croissant d’études ont révélé que le secteur informel est considérable, permanent et même en développement dans de nombreuses populations (De Soto, 2001 ; Perry et Maloney, 2007 ; Minard, 2009 ; Small Business Council, 2004 ; Venkatesh, 2006 ; Volkov, 2002 ; Webb, Tihanyi, Ireland et Sirmon, 2009 ; Williams, 2006 ; Williams, 2008; Williams et Round, 2007 ; Williams, Round et Rodgers, 2009) et que la majorité des participants de ce secteur sont des femmes. La plus grande partie de la littérature sur les femmes impliquées dans le secteur informel a pour objet de mesurer le montant et la nature de leur accès au crédit, aux fonds d’assistance, à l’assurance et ainsi de suite ; elle a accordé peu d’attention à la façon dont leur implication peut aider à résoudre les problèmes comme le manque d’accès à l’éducation. Les études ont compris la génération de revenus en termes d’avantages économiques et sociaux comme l’amélioration du mode de vie des individus et des communautés (Sperandio, 2005 ; Petrin, 1994), mais peu d’entre elles ont exploré en détail


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sa contribution à la résolution de problèmes sociaux comme l’amélioration de l’accès à l’éducation. Le ministère de la Condition féminine, du Genre et du Développement communautaire (à paraître) a observé que les profits des femmes sont généralement utilisés au bénéfice de tous les membres du ménage, mais il ne s’est pas attaché à l’utilisation spécifique des revenus. Peu d’attention a donc été accordée aux moyens que les femmes mettent en œuvre dans leurs activités commerciales ainsi que sur l’utilisation des revenus générés par ces activités. 6.1 Les structures économiques enclavée et duale de l’économie du Zimbabwe A l’indépendance, le gouvernement du Zimbabwe a hérité d’une économie basée sur le développement du secteur formel ayant peu de liens avec le reste de l’économie composée du secteur de subsistance et de l’économie informelle. Le gouvernement a renforcé les structures duales (séparées) et enclavées (isolées) de l’économie dont il avait hérité (Chakanya et Muchichwa, 2012). Ainsi, du point de vue de l’absorption du travail, seule une petite partie de la population active avait un emploi rémunéré dans le secteur formel et la majorité était visiblement sans emploi ou sous-employé dans le secteur de subsistance ou l’économie informelle. Cependant, ces dernières années, et spécialement pendant la crise économique, l’économie formelle a diminué fortement, laissant l’économie informelle devenir le pilier de l’économie. Le Graphique 2.26 illustre la nature duale et enclavée de l’économie du Zimbabwe. Graphique 2.26 Structure de l’économie du Zimbabwe Economie mondiale Imports & Exports IDE, Crédits étrangers, Technologie, Travail des expatriés, aide Secteur formel Secteur dominé par les hommes. C’est la priorité de toutes les politiques économiques et de développement

Politiques de développement Politiques monétaires et fiscales Politiques des salaires et de l’emploi Politiques sectorielles Politiques de l’épargne et de l’investissement

Secteur informel

Secteur communautaire

C’est un secteur dominé par les femmes. De plus, il est marginalisé

Les femmes dominent aussi ce secteur. De plus, il est marginalisé.

<20% du marché du travail

>80% du marché du travail

Secteur formel

Secteur non formel

Les femmes demeurent marginalisées dans l’économie formelle conventionnelle à cause de leur accès limité à l’enseignement supérieur et tertiaire, aux compétences et au manque d’opportunités d’emploi. En 2003, les femmes représentaient environ la moitié (47 pour cent) de toutes les personnes impliquées dans le secteur informel, contre 27 pour cent dans le secteur formel. Un pourcentage plus important de femmes (43 pour cent) que d’hommes (24 pour cent) était impliqué dans le secteur informel (PASS, 2003).

6.2 Les activités du secteur informel et l’éducation des filles Offorma (2009) pose comme postulat que l’éducation permet aux individus d’être des membres fonctionnels de leur société, car elle les dote des différences connaissances et compétences les préparant à cette fonctionnalité. Une étude menée au Ghana a exploré l’impact du micro-crédit sur les femmes bénéficiaires dans le district de Lawra dans la région du Haut Ghana occidental. Elle a révélé que ce dispositif permettait aux femmes d’améliorer leurs revenus annuels, de donner une éducation à leurs enfants et d’accroître leurs capacités de décision (Meeder et Cumber, 2011). 6.3 Les disparités entre les genres et l’éducation au Zimbabwe Au Zimbabwe, il existe des disparités entre les genres dans l’éducation à tous les niveaux, à l’exception de l’école primaire où la parité semble avoir été atteinte dans les inscriptions des filles et des garçons. Bien que les inscriptions dans le primaire soient restées stables, les inscriptions dans le secondaire chutent, en particulier celles des filles (UNICEF, 2010). Cette situation peut s’expliquer en partie par les coûts plus élevés de l’enseignement secondaire et la baisse du niveau des résultats scolaires des élèves à la fin de l’école primaire. Les zones rurales sont les plus affectées par cette situation, car il faut faire de longues distances à pied pour être présent à l’école la plus proche (UNICEF, 2010). Bien que la parité entre les genres atteigne presque à 100 pour cent à l’école primaire et au collège, les filles ne représentent que 35 pour cent des élèves du lycée. Selon l’évaluation rapide réalisée par BEAM en 2010, une combinaison de facteurs contribue à cette situation : la pauvreté et le manque de fonds, la nutrition mauvaise ou limitée, la nécessité que les enfants restent chez eux pour aider aux tâches domestiques ou à l’emploi informel, la distance entre l’école et la maison et la perte de leurs parents principalement causée par le VIH et le Sida. Il est particulièrement évident que l’écart entre les genres en matière d’inscriptions devient progressivement plus marqué de la fin du cycle primaire au niveau supérieur. Un rapport de l’UNICEF (2010) a estimé qu’environ 2 millions de jeunes en âge d’aller à l’école secondaire étaient exclus du système éducatif depuis 2010 en raison des frais d’inscription, des fermetures d’école et de la crise économique générale. En cas de problèmes liés aux frais scolaires, la préférence sera souvent accordée aux garçons sur les filles et ces dernières seront privées d’enseignement. La décennie de crise économique a vu les filles comme les garçons abandonner l’école, malgré le pourcentage plus élevé de filles (MESAC, 2010). Ceci malgré le fait que la plupart des femmes ont intensifié leurs activités informelles pendant cette période précise (Muzvidziwa, 2005). Il convient par conséquent de déterminer si la participation des femmes au secteur informel et la génération de revenus qui en résulte sont la condition préalable à l’augmentation des inscriptions de filles dans les écoles.

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En enquêtant sur la relation entre la participation des femmes dans le secteur informel et l’éducation des filles, l’étude implique qu’il est nécessaire que les femmes passent des bénéfices économiques de leurs commerces aux bénéfices sociaux. On attend des preuves que les entrepreneuses encouragent les filles à aller à l’école, soutiennent leur éducation et créent des dispositifs pour leur permettre d’accéder à l’éducation au sein de leur communauté. Si les chercheurs ont accordé suffisamment d’attention aux bénéfices économiques des femmes, leur intérêt dans les bénéfices sociaux n’en est qu’à ses débuts. Etant donné les bénéfices connus de l’éducation, la relation entre les activités économiques des femmes et l’éducation des filles est une relation qui vise à contribuer au changement social au sein de la communauté. 7. DOMAINE D’ÉTUDE L’étude a été menée dans le district de Binga qui est situé dans le nord du Matabeleland à l’extrême nord-ouest du Zimbabwe. Les districts qui le bordent comprennent Kariba, Gokwe Nord, Gokwe Sud, et Hwange comme le montre le Graphique 2.27. Le district partage une frontière nationale avec la Zambie, séparée par le lac Kariba. Il est relativement isolé, à environ 300 kilomètres de la capitale provinciale de Lupane, à 450 kilomètres de Bulawayo qui est le centre urbain important le plus proche et à 791 kilomètres de Harare qui est la capitale du Zimbabwe. Au moment du dernier recensement, le district de Binga comptait une population d’environ 118 842 habitants, dont 52 pour cent était des femmes (Office central des statistiques, 2002). La majorité de la population est constituée de Tonga, avec un faible pourcentage de Shona et de Ndebele (Reynolds, 1991 ; Sisimayi et Masuku, 2009). Graphique 2.27 Carte de Binga

ZIMBABWE

8080000

8080000 8040000 8000000

8000000

8040000

8120000

8120000

490000 520000 550000 580000 610000 N

Quartier de Sikalenge Quartier de Siachilaba Quartier de Kariangwe District de Binga

0 5 10 20 30 40

Kilomètres

490000 520000 550000 580000 610000 154

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7960000

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Légende

Le district relève des régions agro-écologiques III, IV et VI. Les terres ne conviennent pas à l’agriculture, ce qui rend les conditions de vie difficiles pour ses habitants. La plus grande partie de la région est une terre nue, caractérisée par la vie sauvage, la sécheresse et les températures élevées (Cumanzala et Muleya, 2010). 8. MÉTHODOLOGIE 8.1 Conception de la recherche La méthodologie de cette étude est à la fois de nature qualitative et quantitative. La triangulation des méthodes a été utilisée pour avoir une vue plus complète du rôle de la participation des femmes dans le secteur informel et l’éducation des filles à Binga. Les outils de collecte des données ont inclus des entretiens approfondis, des groupes de discussion, l’observation et la revue de la littérature existante. 8.2 Méthodes de collecte des données L’étude a recueilli des données primaires des parties prenantes dans le domaine de l’étude à l’aide de de différentes méthodes. Un total de six groupes de discussion a été organisé avec des femmes impliquées dans des activités du secteur informel, en particulier la vente du poisson, et des filles. Les groupes de discussion ont été utilisés pour la raison exposée par Jennings (2001:172), à savoir enrichir les données recueillies par le questionnement, la demande d’explications, la clarification et la discussion entre les membres du groupe concernant leur position sur le sujet de la discussion. Des entretiens approfondis ont été menés avec des personnes clés de la communauté, notamment le responsable de l’éducation du district, les enseignants, les directeurs d’école, les dirigeants locaux et les représentants des organisations non gouvernementales (ONG) soutenant sur les sites de la recherche comme Camfed, Zubo Trust et Basilizwi. Au total, 11 entretiens approfondis ont été menés. Le questionnaire Ménages a été utilisé pour déterminer la relation entre la participation des femmes dans le secteur informel et l’éducation des filles. Ce questionnaire a capturé les données démographiques des ménages, le niveau d’éducation, l’attitude, les croyances et la perception de l’éducation des filles. Un total de 30 questionnaires a été administré aux femmes et aux filles des ménages qui comptaient des femmes actives dans le secteur informel. Outre la chercheuse principale et de chercheuse mentorée, quatre assistant(e)s de recherche ont été recruté(e) s pour aider à recueillir les données dans la cadre d’un transfert de compétences. L’étude a aussi utilisé des sources secondaires d’information qui ont inclus des livres, des articles de revues, des journaux et des magazines.


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8.3 Echantillonnage Cette étude a ciblé à dessein le district de Binga qui est le foyer d’un groupe minoritaire au Zimbabwe (les Tonga) qui a été le moins étudié à cause de son inaccessibilité liée au mauvais état du réseau routier. L’échantillonnage dirigé est aussi désigné par le terme de « par choix raisonné », car il implique que le chercheur décide de qui ou quelles unités d’analyse inclure dans l’étude. Avec l’échantillonnage dirigé, le chercheur utilise ses connaissances pour déterminer qui ou quelles unités sont les plus appropriées pour l’étude, en se fondant sur la base de connaissances potentielle des unités de l’étude ou la mesure dans laquelle elle remplit les critères associés à l’axe de l’étude (Jennings, 2001:139). Les zones rurales comme Binga sont connues pour attacher moins d’importance à l’éducation des filles, ce qui aboutit à une attitude négative sur l’autonomisation des femmes. Il est donc important de déterminer la relation entre la participation accrue des femmes dans le secteur informel et l’éducation des filles dans cette partie du pays. Dans ce district, l’étude a ciblé à dessein les cantons de Siachilaba, Sikalenge et Kariangwe en raison de la prévalence des activités commerciales informelles là-bas. L’étude a échantillonné à dessein 11 informatrices clés interrogées, des femmes impliquées dans des activités du secteur informel et des filles, pour les six GD, et 30 ménages auxquels un questionnaire Ménages a été adressé. Après avoir utilisé l’échantillonnage dirigé pour accéder aux entrepreneuses et à leurs ménages, l’échantillonnage boule de neige a été utilisé pour accéder aux autres femmes du secteur informel. L’échantillonnage boule de neige porte plusieurs autres noms : recrutement en chaîne, échantillonnage de réputation, en réseau (Neuman, 2000:199) ou échantillonnage rhizome (Stehlik, 1999). L’échantillonnage boule de neige est utilisé pour les participants difficiles à atteindre, parce que le chercheur ne connait pas les relations du réseau formel et informel. Dès que le chercheur a identifié un membre de la population, cette personne en identifie d’autres, qui à leur tour en identifient d’autres, jusqu’à ce que tous les participants nécessaires aient été contactés et que l’« isomorphisme informationnel qualitatif » ait été atteint. Il s’agit du moment où se produit la redondance de l’information, où l’on ne trouve aucune nouvelle donnée, seulement la confirmation des données précédemment recueillies. A la fin de chaque entretien, il a été demandé aux répondantes de recommander les chercheuses à d’autres femmes du secteur informel. Une des faiblesses de la boule de neige est que les répondantes tendent à identifier des personnes qui leur ressemblent. Afin de remédier à cela, de nombreuses boules de neige ont été utilisées. 8.4 Analyse des données Les données qualitatives ont été classées en catégories basées sur des thèmes, des concepts et des caractéristiques similaires. Les relations entre les concepts et les variables ont été définies. Au vu de cela, les données recueillies ont été répertoriées selon les thèmes émergeant. Le cadre d’autonomisation des femmes de Sara Longwe a été utilisé pour analyser les données qualitatives. Les données

quantitatives générées sont présentées sous la forme de tableaux, de fréquences et de graphiques. Les données recueillies ont été codées et saisies à l’aide du Statistical Package for Social Scientists (SPSS). 8.5 Limites de l’étude Les chercheuses ont été confrontées à plusieurs défis au cours de cette étude. L’un d’entre eux était lié au mauvais état des routes dans les différents cantons sur lesquels portait l’étude. En raison de la volatilité de l’environnement politique au Zimbabwe au moment de l’étude causée par les spéculations électorales, l’accessibilité aux zones rurales a été difficile. L’équipe a par conséquent dû prendre contact avec des membres des ONG locales opérant à Binga pour aider à mobiliser la communauté. Un membre principal de l’organisation a été engagé en qualité de mobilisateur de la communauté et assistant de recherche. Cette personne a été déterminante pour obtenir l’autorisation de mener l’étude dans cette région et grâce à son équipe, nous avons obtenu l’autorisation du responsable en chef du Conseil du district de Binga, de l’administrateur du district de Binga, du bureau du président de Binga, de la police de la République du Zimbabwe ainsi que des conseillers locaux et des dirigeants traditionnels. La petite taille de l’échantillon de cette étude constitue une limite, en particulier pour la généralisation des conclusions à d’autres régions. Il en découle que les conclusions de l’étude ne doivent pas être généralisées à d’autres régions, mais on pourrait tout de même en tirer des enseignements. 8.6 Entrée sur le terrain et considérations éthiques Lorsqu’on discute des questions d’entrée sur le terrain, il est impossible d’échapper aux questions éthiques liées à la conduite d’une recherche. Neuman (2000:90) a avancé que l’éthique définit ce qui est ou n’est pas légitime ou la morale impliquée par la procédure de recherche. Sieber (1992:3) a ajouté que la recherche en sciences sociales n’est pas juste une question d’étiquette, ni de ménager le pauvre, le malheureux sujet aux dépens de la science ou de la société. Nous étudions plutôt l’éthique pour apprendre comment faire un travail en sciences sociales au service de toutes les personnes concernées. Nous avons demandé le consentement éclairé du responsable en chef du district de Binga, de l’administrateur du district, du bureau du président, de la police de la République du Zimbabwe, des conseillers, des dirigeants traditionnels et des répondantes elles-mêmes. Il est important de noter ici que la chercheuse a respecté la culture Tonga en demandant le consentement des participantes à l’étude. Une ONG locale travaillant dans la région a été utilisée comme point d’entrée dans les différents cantons. Les participantes sur les sites de la recherche ont été informées que la recherche était menée à des fins académiques, bien qu’il soit possible que des recommandations politiques

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soient formulées pour aider les responsables politiques se concentrant sur l’entrepreneuriat des femmes et l’éducation des filles. On a dit aux participantes qu’elles avaient le droit de se retirer à tout moment de la recherche. « Le consentement éclairé est le principe éthique le plus fondamental impliqué dans la recherche. Les participants doivent comprendre la nature et le but de la recherche et doivent consentir à participer sans coercition » (Burns, 1997:18). Par exemple, Christians (2000:138) a soutenu que le consentement éclairé était en accord avec l’autonomie individuelle. La participation à la présente recherche a été volontaire et les participantes ont été informées du processus de recherche, des conséquences de ce processus sur leur bien-être et leur droit de se retirer du processus à tout moment.

phénomène récent à Binga à cause de l’idée selon laquelle les femmes doivent rester à la maison pour s’occuper de leur mari et de leurs enfants et que la mobilité est associée à la prostitution. Les femmes à Binga sont impliquées dans différentes activités, notamment la vente de paniers Tonga, de poulets, de patates douces, de poisson, de légumes frais et séchés et les marchés aux puces. L’accès aux marchés est un indicateur de l’autonomisation selon le cadre d’autonomisation des femmes. Cependant, dans cette étude, les marchés que fréquentaient les femmes étaient principalement locaux et les marchés à l’extérieur de Binga toujours fréquentés en majorité par les hommes. Cette étude s’est concentrée sur les femmes qui ont participé au secteur informel par l’achat et la vente de poisson à Siachilaba, le marché de poisson local.

L’anonymat et la confidentialité ont aussi été respectés tout au long du processus de recherche. « L’anonymat signifie que le chercheur n’identifiera pas et ne peut pas identifier le répondant. La confidentialité signifie que le chercheur peut associer les noms et les réponses, mais garantit que personne d’autre n’y aura accès » (de Vaus 1995:337). L’anonymat et la confidentialité ont été préservés pour les quatre raisons mentionnées par Vaus : favoriser la nature et la véracité des réponses, encourager l’implication, accroître la taille de l’échantillon et sa représentation de la population générale de l’étude et garantir que l’intimité des participants n’est pas compromise (de Vaus 1995:337). Au cours du processus, les chercheuses ont veillé à ce que les informations fournies soient traitées de manière confidentielle et que l’anonymat des répondants soit préservé autant que possible. Pendant le travail de terrain, les notes ont été conservées séparément des noms des personnes qui avaient fourni les informations et les noms réels des répondantes ne sont pas utilisés dans le rapport final.

Les femmes étudiées ont signalé que la principale raison de leur implication dans l’achat et la vente de poisson était de lutter contre la pauvreté et la faim, ce qui est typique d’un grand nombre de familles et de ménages à Binga. Le degré de pauvreté à Binga a été étudié et confirmé par l’Evaluation de l’économie des ménages 2004 qui a établi que 85-90 pour cent des ménages de Binga étaient pris au piège d’une pauvreté absolue et avaient besoin du soutien permanent de l’aide sociale (Save the Children, 2004). Cette situation est le résultat de l’exclusion générale du peuple Tonga à Binga des processus de développement et d’une décennie de crise économique qui a vu de nombreux hommes perdre leur emploi (Cumanzala et Muleya, 2010). C’est la raison pour laquelle Williams et Gurtoo (2011) ont soutenu que les activités du secteur informel étaient une stratégie économique rationnelle.

Pendant le travail de terrain, l’équipe a perturbé les activités commerciales des entrepreneuses informelles, inconvénient pour lequel elles n’ont pas reçu de compensation. Nous n’avons pas été en mesure d’offrir des incitations aux répondantes à cause de nos obligations envers la communauté scientifique et du dilemme que posent les incitations en rapport avec les données recueillies. Jennings (2001:113) a montré que le chercheur ne peut pas savoir avec certitude si le participant a répondu par véritable intérêt et fourni des réponses véridiques ou bien s’il a participé pour son propre intérêt. Il a été décidé de ne pas offrir d’incitations en partant de l’hypothèse que les scientifiques n’obtiennent aucun financement pour leurs projets et par conséquent, offrir des incitations aurait créé un précédent fâcheux. Les répondantes ont simplement reçu des rafraichissements pendant leur participation. 9. CONCLUSIONS DE LA RECHERCHE 9.1 La participation des femmes dans le secteur informel à Binga La participation des femmes dans le secteur informel, en particulier le commerce local du poisson, est un

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Les autres raisons évoquées pour avoir démarré un commerce informel étaient que les femmes voulaient être indépendantes de leur belle-famille et de leur mari. Il est apparu que les hommes traitent les femmes qui dépendent uniquement d’un homme de « chercheuses d’or ». Les répondantes ont révélé que par l’achat et la vente de poisson elles généraient un revenu allant de 20 USD à 200 USD par mois. 9.2 La relation entre la génération de revenus des femmes dans le secteur informel et l’éducation des femmes et des filles La majorité (65 pour cent) des répondantes de cette étude n’avait suivi que l’enseignement primaire. Cette situation reflète celle de la population générale féminine de Binga. Cumanzala et Muleya (2010) ont fait remarquer que seule une poignée de femmes à Binga avait été à l’école et que la majorité était analphabète. Dans cette étude, 30 pour cent des répondantes avaient atteint le premier cycle de l’enseignement secondaire, tandis que 5 pour cent n’avaient jamais été à l’école (voir le Graphique 2.28). Ce scénario confirme les conclusions d’une étude (2011) menée par Williams et Gurtoo en Inde selon laquelle les femmes les plus instruites entraient dans l’économie informelle parce qu’elles manquaient d’autres opportunités économiques.


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Nous voulons des services d’éducation non formelle ici, mais le gouvernement doit entièrement les prendre en charge parce qu’on ne peut pas être vues entrer en concurrence pour les mêmes ressources que nos enfants. Nous nous battons pour payer les frais scolaires de nos enfants, alors penser à nos propres frais scolaires dans ces conditions, c’est bizarre. Une mère normale fait passer les intérêts de ses enfants avant les siens. De plus, lorsque les services d’éducation non formelle sont disponibles, les femmes du secteur informel ont fait remarquer que les horaires des cours (14h00-17h00) entraient en conflit avec leurs activités commerciales et leurs responsabilités familiales. A Binga, il existait des programmes d’alphabétisation et de formation permanente à mi-temps. Ces derniers proposaient des cours présentiels qui se tenaient généralement dans les écoles secondaires pour aider les élèves qui voulaient compléter les matières de leur brevet ou de leur baccalauréat ou ceux qui voulaient obtenir d’autres titres académiques. En plus de cours élémentaires de lecture, d’écriture et de calcul, le curriculum incluait l’agriculture paysanne, l’économie familiale, l’éducation à la population et à la vie familiale, l’éducation à l’environnement, l’équité entre les genres, les soins de santé primaires et l’instruction civique, pertinents pour les moyens d’existence et le parcours de travail des femmes en question.

90 80 70 60

55

49.7 50.3

50

78

75

73

45

40

27

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22

Hommes

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Femmes

10 0

A

Le faible niveau d’éducation des répondantes et de la population générale des femmes de Binga nécessiterait l’appui de l’éducation non formelle. Cependant, au moment de l’étude, il n’existait pas de services d’éducation non formelle ou accessibles aux filles et aux femmes des cantons étudiés. La raison donnée par les répondantes était qu’elles n’avaient pas d’argent pour payer l’enseignant. A Siachilaba, le centre qui proposait des services d’éducation non formelle a été fermé parce que les parents ne payaient pas les frais scolaires servant à rémunérer les enseignants. Cette observation a aussi faite à travers le pays par le Plan d’action national du MESAC (2005) : en tant que programme communautaire, la communauté doit compléter les appointements payés aux tuteurs par le gouvernement, mais cela n’est guère possible, car les communautés n’ont pas même pas les moyens de joindre les deux bouts. Les femmes de Siachilaba ont déclaré:

e

N’est jamais allée à l’école

nc

Enseignement secondaire

da

Enseignement primaire

Graphique 2.29 Pourcentage des inscriptions dans les programmes d’éducation non formelle selon le genre, 2007

on

5

sp

0

30

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40 30 20 10

or

65

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70 60 50

Sur le plan national, une proportion élevée de femmes sont inscrites aux cours d’éducation non formelle. Cela peut venir du fait qu’elles n’ont pas réussi à trouver d’opportunités éducatives au sein du système formel. Les femmes sont majoritaires dans les programmes d’alphabétisation de base (73 pour cent), d’alphabétisation fonctionnelle (75 pour cent) et d’éducation des adultes (78 pour cent) (voir le Graphique 2.29).

Pa

Graphique 2.28 Niveau d’éducation des répondantes

E

Source : MESAC, 2007b

L’éducation non formelle joue un rôle très important pour réduire le taux d’analphabétisme. Le système d’éducation non formelle a été extrêmement efficace pour réduire le taux d’analphabétisme au Zimbabwe jusqu’à 10 pour cent en 2008 par rapport aux 63 pour cent au moment de l’indépendance (Ministère de la Condition féminine, du Genre et du Développement communautaire, à paraître). Les entrepreneuses ont déclaré qu’elles manquaient à la fois de l’instruction et de l’exposition nécessaires pour appuyer leurs activités commerciales. Comme nous l’avons déjà montré, la majorité des répondantes ont abandonné au niveau du primaire parce que leurs parents jugeaient que l’éducation exposait leurs filles au monde extérieur dominé par les hommes où elles risquaient de s’engager dans des activités comme la prostitution. Dans ce contexte, l’éducation, la mobilité et l’exposition sont liées et les femmes sont privées des éléments essentiels à la réussite de leurs activités commerciales. En effet, la réussite de tout commerce dépend en partie de la mobilité en termes d’accès aux marchés et la connaissance de ces marchés s’acquière à travers les réseaux et l’exposition au monde extérieur. Comme une des répondantes à Kariangwe l’a dit : Je suis née à Kariangwe, j’ai été élevée à Kariangwe, je me suis mariée à Kariangwe, je vis à Kariangwe et je mourrai à Kariangwe. Je ne suis jamais allée dans une autre ville que Binga.

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Je manque d’exposition. Si j’avais de l’instruction, j’aurais été ailleurs que Binga pour une formation quelconque. Mais maintenant quelle raison auraisje d’aller hors de Kariangwe ? Celles qui n’ont jamais été à l’école ont reconnu la valeur de l’éducation pour leurs activités commerciales. Elles avaient vu comment le manque d’éducation leur avait fermé de nombreuses portes et avaient souhaité donner de l’instruction à leurs filles pour leur éviter le même sort. Une femme de 52 ans qui n’avait jamais été à l’école a déclaré : Je fais des affaires et je ne sais ni lire, ni écrire. Parfois on me dit que je dois préparer des propositions commerciales pour obtenir un financement, mais je ne peux pas. Si je n’avais pas donné d’instruction à ma fille comme mon père l’a fait avec moi, qui m’aiderait pour enregistrer mes ventes ? Qui lirait pour moi ce qui je dois lire ? Les données de cette étude révèlent que le niveau d’éducation des entrepreneuses n’a pas influencé de manière négative leur attitude à l’égard de l’éducation des filles. La valeur accordée à l’éducation des filles à Binga est généralement confirmée par les statistiques au niveau du district qui montrent qu’il existe de légères disparités de genre dans les inscriptions tant dans les écoles primaires (50,52 pour cent de garçons et 49,48 pour cent de filles) que dans les écoles secondaires (50,14 pour cent de garçons et 49,86 pour cent de filles) comme on peut le constater dans le Tableau 2.17. Cela montre clairement que l’attitude à l’égard de l’éducation des filles a changé, car la génération des parents des femmes impliquées dans le secteur informel était d’avis que l’école primaire suffisait pour les filles. Tableau 2.17 Pourcentage des inscriptions dans le primaire et le secondaire selon le genre, Binga, 2012 Niveau

Garçons

Filles

Inscriptions à l’école secondaire

50,14

49,86

Inscriptions à l’école primaire

50,52

49,48

Source : Statistiques du district de l’éducation de Binga, Juillet 2012

Dans l’un des GD, des femmes ont soutenu : Dans cette communauté, traditionnellement, les parents ne voulaient pas instruire leurs filles, mais les choses changent. Ils voulaient juste que les fillettes sachent lire et écrire et c’est pour ça qu’ils ne les envoyaient qu’à l’école primaire et s’arrêtaient là. Le changement d’attitude à l’égard de l’éducation des filles est clairement démontré par le profil scolaire des répondantes qui montre que plus la répondante est jeune,

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plus son niveau d’éducation est élevé. Le Graphique 2.30 montre qu’il n’y avait que dans la tranche d’âge des 2024 des femmes qui étaient allées jusqu’au niveau du certificat et aucune n’avait arrêté l’école à la fin du cycle primaire. Inversement, les résultats montrent que plus la répondante est âgée, moins son niveau d’éducation est élevé. Par exemple, toutes les répondantes âgées de 40 à 49 ans avaient arrêté l’école au niveau du primaire, tandis que toutes celles qui étaient âgées de 50 à 54 ans n’avaient jamais été à l’école. Ce tableau dépeint le changement d’attitude à l’égard de l’éducation des filles. Graphique 2.30 Ages des répondantes et leurs niveaux d’éducation 30 24

25

24

20 Primaire Secondaire Certificat

15 10 5 0

66 0 20-24

6 00 25-29

6 0 30-34

0 35-39

6

6

00 40-44

00 45-49

000 50-54

Cette étude a dissipé l’hypothèse selon laquelle le niveau d’éducation d’un individu modèle son attitude à l’égard de l’éducation. Les femmes des GD ont été d’accord avec une femme qui remarquait : Je me fiche de ne pas avoir d’instruction. Mon souhait est que mes enfants fassent mieux que moi à tous les égards ; c’est pour ça que je dors au marché en vendant du poisson. En fait, ma fille a raté deux fois les examens du certificat, mais je n’abandonne pas. Je sais qu’un jour elle y arrivera. A notre époque, l’éducation, c’est la vie. Une entrepreneuse qui n’avait jamais été à l’école a signalé que sa fille lui lisait, faisait les comptes de son commerce et l’informait quand sa licence de colporteur allait expirer. La répondante a déclaré qu’elle attachait beaucoup de valeur à l’éducation de ses enfants, les garçons comme les filles. L’accès aux revenus par la participation aux activités du secteur informel ne s’est pas traduite en pouvoir de décision chez les femmes étudiées. De manière générale, dans les ménages où les femmes contribuent financièrement, on nous a dit que les revenus étaient partagés par les deux conjoints. En ce sens, les femmes ont aussi contribué au processus de décision dans le ménage. Cependant, certaines femmes ont déclaré que leur mari avait exigé l’argent de leurs activités commerciales. Par exemple, une femme a raconté qu’à un moment, elle avait levé l’argent avec l’intention de payer les frais scolaires de ses enfants, mais elle avait été obligée de le remettre à son mari. La répondante a déclaré qu’elle donnait à son mari l’argent par crainte d’être exclue du domicile conjugal si elle ne le faisait pas. L’absence de pouvoir de décision sur les revenus issus des activités commerciales affecte donc l’utilisation prévue des revenus, qui est dans la plupart des cas le


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Quand nous n’avons pas assez d’argent pour couvrir les frais scolaires de nos quatre enfants, nous ne choisissons pas de payer pour un seul d’entre eux et de laisser les autres ; nous payons plutôt de petits montants pour tous de façon à ce qu’aucun ne se sente discriminé. Une étude menée par l’UNIFEM (2009) a confirmé la priorité que les femmes donnaient à l’éducation de leurs enfants par rapport aux hommes. Après avoir gagné de l’argent d’un petit commerce transfrontalier, 39 pour cent des hommes priorisaient l’éducation de leurs enfants contre 58 pour cent des femmes comme le montre le Graphique 2.31.

Pourcentage

Graphique 2.31 Utilisation du petit commerce transfrontalier selon le genre, 2009 80 70 60 50 40 30 20 10 0

67

62 65

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52 39 14

Ont acheté des objets importants pour le ménage

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22

16 5

Ont construit/ Acheté une maison

12

7

Ont acheté une voiture

Principale réalisation

Source : Fonds des Nations unies pour les femmes (UNIFEM), 2009

Note: Réponses multiples

Femmes Hommes Total

9.4 Les obstacles à l’éducation des filles et la façon dont ils ont été abordés Il existe de nombreux obstacles à l’éducation des filles à Binga. Le principal obstacle observé sur les sites de l’étude est la pauvreté comme le montre le Graphique

Graphique 2.32 Perceptions des répondantes des obstacles à l’éducation des filles à Binga 30 17

16

13 7

5

4

4

4

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9.3 Les priorités des femmes quand elles gagnent de l’argent de leurs activités dans le secteur informel Les priorités de l’utilisation des revenus dépendent de la période de l’année. Généralement, la priorité va à l’achat de nourriture pour le ménage : au début de l’année, la deuxième priorité est de payer les frais scolaires, d’acheter les uniformes et les autres exigences scolaires. Quand les parents ont plusieurs enfants scolarisés, ils ont indiqué qu’ils ne privilégiaient pas un enfant en particulier, mais dépensaient plutôt de petits montants pour chacun. Un parent a remarqué :

2.32. Trente pour cent des répondantes ont jugé les facteurs économiques comme étant le premier obstacle à l’éducation des filles.

d’ in st

paiement des frais scolaires des enfants, en particulier des filles que les pères discriminent. Si l’on se base sur le profil des répondantes déjà montré et leur niveau d’éducation, cette conclusion confirme les conclusions du ZIMSTAT (2011) selon lesquelles les femmes ayant un niveau d’instruction supérieur au cycle secondaire sont plus susceptibles de participer aux décisions du ménage et que le nombre de femmes confrontées à des situations de violence diminue brutalement avec l’instruction, de 38 pour cent chez les femmes sans instruction à 15 pour cent chez les femmes ayant dépassé l’enseignement secondaire. Le cadre d’autonomisation des femmes indique la question du contrôle comme l’indicateur final de l’autonomisation ; les femmes qui n’ont aucun contrôle sur leurs revenus ne sont pas habilitées prendre des décisions concernant l’éducation de leurs enfants.

Les femmes et les filles interrogées ont signalé que grâce à l’achat et à la vente de poisson, l’obstacle économique à l’éducation des filles diminuait lentement et que grâce à leur prise de conscience de l’importance de l’éducation des filles et leur participation aux décisions du ménage, la notion de la préférence du fils dans l’éducation s’inversait. Les longues distances pour aller à l’école ont également été citées parmi les obstacles à l’éducation des filles à Binga. Dans le canton de Kariangwe, on nous a cité l’exemple d’élèves qui doivent partir de chez eux à pied à 3h du matin pour commencer à 7h30. Certains élèves ont abandonné l’école à cause de ces distances. Dans certaines régions, des écoles satellites ont été introduites pour aborder cet obstacle. Certaines entrepreneuses interrogées ont déclaré que grâce aux revenus dégagés par leur activité commerciale, elles réussissaient à envoyer leurs filles à l’internat, tandis que d’autres les avaient envoyées chez des parents en ville pour faciliter leur accès à l’école. Le ministère de l’Education, des Sports, des Arts et de la Culture (MESAC) a noté qu’habituellement une école secondaire dessert quatre à six écoles primaires, ce qui est une démonstration claire qu’en l’absence d’internat, les élèves doivent faire de longues distances pour aller et revenir de l’école secondaire. Un autre obstacle à l’éducation des filles est le manque de serviettes hygiéniques qui amène les filles à s’absenter au moins une fois par mois et, à terme, de rater les examens de fin de trimestre parce qu’elles ont trop manqué l’école. Les parents ont déclaré que cela conduisait les filles à abandonner l’école malgré leurs capacités. Ces conclusions confirment celles faites par Integrated Sustainable Livelihoods (ISL), une ONG locale, qui a établi que dans certaines régions rurales du Zimbabwe, les filles restent à la maison dès l’âge de 12 ans pendant leurs règles en raison du manque d’installations. Cette étude a révélé que rester à la maison avait certainement un effet sur la réussite scolaire de nombreuses filles défavorisées, car cela se traduisait pour une fille ayant un niveau moyen à perdre presque un mois de scolarité chaque année. Les entrepreneuses du secteur informel ont avancé que grâce Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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à l’entrepreneuriat elles avaient maintenant les moyens d’acheter des serviettes hygiéniques à leurs filles. Le manque de modèles a aussi été identifié comme un obstacle supplémentaire à l’éducation des filles. Les informateurs clés ont soutenu qu’il y avait très peu de femmes instruites et qui avaient réussi à Binga. Dans le secteur éducatif du district, tous les postes de niveau supérieur étaient occupés par des hommes. Citons notamment les postes de responsable de l’éducation du district et d’inspecteurs de l’éducation Il y avait très peu de femmes directrices et sous-directrices d’école dans ces écoles primaire et secondaire (1,5 percent) comparé aux hommes (98,5 pour cent) comme le montre le Tableau 2.18. Tableau 2.18 Pourcentages des directeurs d’écoles et des sous-directeurs selon le genre, Binga, 2012 Poste Directeurs d’école primaire Sous-directeurs d’école primaire Directeurs d’école secondaire Sous-directeurs d’école secondaire Total

Hommes 104

% 98,1

Femmes 2

% 1,9

104

98,1

2

1,9

28

100

0

0

28

100

0

0

264

98,5

4

1,5

Source : Statistiques du district de l’éducation de Binga, Juillet 2012

Les femmes qui enseignent sont également moins nombreuses que leurs homologues masculins dans le primaire comme dans le secondaire. Les entrepreneuses ont avancé que grâce à l’entrepreneuriat certaines filles de cette région avaient réussi et travaillaient dans la région comme infirmières, enseignantes et chargées de programme dans des ONG. Les entrepreneuses interrogées ont déclaré que généralement, les parents de la région étaient découragés d’envoyer leurs filles à l’école à cause de la prévalence des grossesses adolescentes dans la région. Ceci malgré l’existence de la Politique de réintégration scolaire des mères adolescentes qui stipule qu’après l’accouchement la mère adolescente est autorisée à retourner à l’école pour continuer ses études. Les femmes ont signalé que la communauté ne pouvait rien y faire, car les responsables des grossesses étaient des garçons de la communauté qui avaient quitté l’école et qu’ils épousaient la fille dans la plupart des cas, ce qui lui enlevait toute idée de retourner à l’école. De plus, comme la fille assume son rôle de mère, la possibilité de retourner à l’école est exclue. Il est ressorti nettement des GD que lorsque la fille et le garçon étaient encore tous les deux à l’école, l’application de la Politique de réintégration scolaire des mères précoces était encore limitée en ce qui concernait les filles. Le MESAC a mis en place la circulaire n° 35 de 2001 qui autorise les filles à réintégrer le système scolaire après leur accouchement. La politique accorde

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des congés aux filles qui tombent enceintes à l’école primaire ou secondaire et autorise leur réinscription après l’accouchement. Si le garçon responsable de la grossesse est aussi à l’école, on lui accorde également un congé de la même durée. L’obtention de ce type de congé s’accompagne de conseils aux élèves affectés ainsi qu’à leurs parents par les autorités scolaires. Ainsi, les garçons retournent à l’école, alors que la plupart des filles restent à la maison pour répondre aux exigences de la maternité. Malgré l’impact positif de la participation des femmes dans les activités de commerce informelles, les GD tenus avec les filles ont révélé que les activités commerciales de leur mère les obligeaient à aider aux tâches domestiques pendant que leur mère s’occupait de son commerce. Les filles aidaient également de plusieurs façons au commerce de leur mère : 75 pour cent des femmes interrogées ont dit qu’elles impliquaient leurs filles dans leur commerce d’une façon ou d’une autre. Par exemple, comme les entrepreneuses impliquées dans le commerce du poisson vont au lac vers 4h du matin et reviennent chez elles vers 10h, les filles ont indiqué qu’elles aidaient aux tâches domestiques pendant l’absence de leur mère. Quand leur mère rentre tard, elles doivent s’absenter de l’école pour s’occuper de leurs frères et sœurs. Quand elles ont les moyens d’aller à l’école, une fois rentrées à la maison elles aident au séchage du poisson pour la vente, et dans certains cas, on les envoie au lac (un trajet de six heures) pour s’assurer que les stocks ne s’épuisent pas. En raison de la longueur du trajet, il est exclu qu’elles aillent à l’école le lendemain. Une fille a déclaré : Je dois m’occuper de mes frères et sœurs et de la maison quand ma mère est au lac. Les jours où elle va au lac, je ne vais pas à l’école parce qu’ensuite elle va directement du lac au marché. Ces jourslà, je m’occupe des tâches domestiques pendant qu’elle est au marché jusqu’à minuit environ. Le Conseil ne veut pas voir les enfants de moins de 18 ans sur le marché à vendre du poisson. J’aide donc ma mère en aidant à la maison. La politique du Conseil aide à éviter que les filles achètent et vendent du poisson plus particulièrement à Siachilaba. La politique stipule que personne de moins de 18 ans n’est autorisé à vendre du poisson au marché sous peine d’être arrêté. En conséquence, les filles interrogées ont dit qu’elles restaient à la maison pour aider ou allaient au lac pour acheter du poisson. Les filles interrogées ont avancé que malgré les bénéfices économiques dégagés par le commerce de leur mère qui leur permettent de payer les frais scolaires et les autres exigences scolaires, le fait d’aider aux activités commerciales de leur mère affecte leur fréquentation scolaire. Une fille a signalé qu’elle manquait parfois l’école parce qu’elle devait aller acheter du poisson à vendre. Les filles jouent aussi un rôle important dans leur propre éducation en menant des activités dans le secteur informel pendant le week-end et elles utilisent l’argent qu’elles gagnent pour payer leurs frais scolaires.


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9.5 Les autres facteurs facilitant l’éducation des filles à Binga Les femmes et les filles ont déclaré que participer aux activités du secteur informel apportait des bénéfices de créativité, de travail en équipe, de communication, de consensus, de responsabilité personnelle et de compromis et que c’était des éléments importants dans leurs efforts pour s’instruire. Les femmes ont déclaré qu’elles étaient impliquées dans la rotation des revenus, les économies et les dispositifs de prêt dans lesquels elles puisaient lorsque les temps étaient durs. Elles ont soutenu que ces dispositifs les avaient aidés à répondre aux exigences de l’école pour elles-mêmes et pour leurs enfants. La participation à des activités du secteur informel crée un esprit d’équipe qui accroît le capital social des femmes. Ces femmes s’influencent mutuellement sur les questions de développement du ménage. La Camfed a capitalisé làdessus et créé les groupes de soutien des mères (GSM) pour soutenir l’éducation des filles. Les femmes des GSM sont des entrepreneuses qui contribuent par de l’argent et des produits à l’éducation des filles défavorisées de leur communauté. Les femmes des GSM s’assoient avec une fille et l’encouragent à s’inscrire et à rester à l’école en lui expliquant les avantages de l’éducation. Ces GSM travaillent main dans la main avec des enseignants mentors formés pour encadrer les filles dans les écoles. Dans le district de Binga, il existe 25 GSM. Grâce au soutien financier de la Camfed, les mères adolescentes ont commencé à acheter et à vendre différentes marchandises, y compris du poisson. Les revenus issus de ces activités sont utilisés pour les besoins du ménage et pour payer leurs frais scolaires pour retourner à l’école. Après avoir acquis des revenus, certaines choisissent de retourner dans les écoles formelles, tandis que d’autres suivent des cours par correspondance. Dans le canton de Kariangwe, une mère adolescente avec deux enfants est retournée à l’école formelle où elle est actuellement au niveau 3. Grâce au soutien financier de la Camfed, depuis 1998, 35 femmes qui n’avaient pas achevé leur scolarité pour différentes raisons sont retournées à l’école et ont obtenu leur diplôme d’enseignante ou d’infirmière, entre autres professions. Il est ressorti nettement des GD que des femmes occupaient des postes dans les Comités de développement de l’école (CDE). Leur implication dans les instances de gouvernance des écoles pourrait influencer les politiques sur l’éducation des filles. Le gouvernement, par le biais du MESAC, a élaboré le Livret Genre pour les CDE, utilisé par les membres, qui a beaucoup contribué à inciter les parents et les filles à prendre conscience du potentiel d’autonomisation de l’éducation. 10. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS Les entrepreneuses du secteur informel pensent qu’elles ont servi d’agents de changement dans la promotion de

l’éducation des filles dans la région de l’étude, et ce en dépit de leur faible niveau d’éducation. Les revenus issus de leurs activités dans le secteur informel ont abordé la plupart des obstacles à l’éducation des filles à Binga, notamment en s’attaquant aux pratiques de maturation sexuelle, aux distances pour aller à l’école, à l’attitude à l’égard de l’éducation des filles, aux frais scolaires et aux grossesses adolescentes. Les campagnes en faveur de l’éducation des filles par les groupes de soutien des mères et l’éducation par les paires ont aussi conduit à l’inscription de filles à l’école, y compris celles qui avaient abandonné pour diverses raisons. L’émancipation économique des femmes et la connaissance du droit des filles à l’éducation peuvent aider à améliorer la situation des filles, tout comme les efforts pour répondre aux besoins stratégiques et pratiques des femmes. Cette étude formule les recommandations suivantes pour la pratique : i. Il est toujours nécessaire de mener des campagnes de sensibilisation sur l’importance des droits des enfants, y compris le droit des filles à être instruites et protégées de la maltraitance et des grossesses adolescentes. ii. Les campagnes de sensibilisation sur la Politique de réintégration scolaire des mères adolescentes doivent être intensifiées à Binga au vu du nombre élevé de grossesses adolescentes rapporté dans la région. iii. Le gouvernement doit s’associer avec des organismes de développement comme la Camfed et réintroduire l’éducation non formelle qui tend à soutenir les femmes en offrant une éducation de la seconde chance à celles qui ont abandonné l’école. iv. Il est nécessaire que la Camfed étende les initiatives de GSM et d’éducation par les paires de façon à ce que les femmes et les filles apprennent l’importance de l’éducation par d’autres femmes et voient des modèles qui ont abandonné et sont ensuite retournées à l’école. v. Les activités informelles d’entrepreneuriat des femmes doivent être soutenues par le ministère des Petites et Moyennes entreprises par le biais de prêts, de formation en gestion commerciale et de liens avec le marché pour stimuler les activités au vu du rôle que l’entrepreneuriat joue dans le soutien à l’éducation des filles. Les recommandations suivantes ont été faites aux fins d’approfondissement de la recherche : i. Une analyse approfondie de l’impact de l’entrepreneuriat des femmes sur les résultats des filles à l’école est nécessaire. ii. De plus, parce que les hommes, qui conserve une attitude négative à l’égard de l’éducation des filles dominent dans les écoles en tant que directeurs et chefs des instances de gouvernance scolaire, il est important de déterminer si oui ou non les inégalités entre les genres et les stéréotypes sont perpétués dans ces environnements dominés par les hommes en matière de distribution des ressources éducatives disponibles, d’influence sur le choix des matières, des rôles entre les genres dans les écoles, entre autres.

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Conclusion et recommandations de politiques et de pratiques

Comme nous l’avons indiqué, des systèmes d’éducation et de formation non discriminatoiressontla condition préalable pour permettre aux filles et aux femmes de réussir leur entrée sur le marché du travail, de développer les compétences techniques et personnelles appropriées pour assurer leur avancement professionnel et d’être suffisamment informées des principaux enjeux de leurs cadres de vie et de travail pour prendre des décisions éclairées concernant leur avenir. Les travaux présentés dans ce volume des Cahiers de recherche du FAWE exposent plusieurs mesures pouvant aider à définir des règles du jeu équitables pour les jeunes femmes dans le système éducatif et pour celles entrant ou déjà entrées dans la vie active. Mécanismes pour une plus grande égalité entre les genres Afin de soutenir et motiver les femmes dans les différents domaines universitaires, professionnels et personnels – par exemple, les programmes d’études liés à la technologie, la direction des associations étudiantes, la recherche d’emploi et l’entrepreneuriat – il est nécessaire de disposer de plus d’informations, à jour et pertinentes, sur les expériences fondées sur le genre dans les établissements universitaires, sur les stratégies d’adaptation et d’auto-construction et sur les facteurs de motivation. Le document de recherche du CIRES recommande que les pouvoirs publics financent des études qui produiront des indicateurs à jour sur l’emploi et l’éducation afin d’orienter l’élaboration de programmes et d’autres mesures. Le REPOA souligne qu’il essentiel que les établissements d’enseignement supérieur aient accès facilement à des données ventilées par sexe –au niveau des programmes institutionnels et universitaires – sur les inscriptions, les résultats et l’achèvement ainsi qu’à des données montrant les différences entre les programmes universitaires. Ces informations sont cruciales pour fourniraux responsables politiques, aux établissements d’enseignement et au marché du travail des idéessur la mise en place de mécanismes visant à faire changer les mentalités, la création de plus cadres d’autonomisation des femmes et de sensibilisation et la mise en œuvre des décisions et des interventions pouvant éliminer les facteurs qui empêchent les femmes de réaliser pleinement leur potentiel universitaire et professionnel. REPOA avance égalementque les choix de vie faits par les femmes et les hommes sont influencés par les préjugés de genre auxquels ils sont confrontés au cours de leur existence dans les sphères publiques et privées. Les ministères et le secteur privé doivent par conséquent accélérer l’introduction ou renforcer les structures d’intégration du genre qui planifient, créent et assurent le suivi des mesures favorisant l’égalité entre les genres dans les établissements d’enseignement et le milieu du travail. De même, les établissements d’enseignement supérieur doivent créer des unités de genre fonctionnelles, disposant du personnel approprié et qualifié, pour assurer la compréhension, l’adoption et la promotion de l’égalité entre les genres en vue de l’élimination des attitudes et des comportements discriminatoires à la fois en classe et dans les autres aspects de la vie étudiante. Naturellement, de telles mesures nécessiteront un financement et un personnel appropriés. Afin de renforcer les capacités des femmes en vue de leur émancipation socio-économique, certaines études de ce volume demandent que des mesures spécifiquessoient prises en faveur des femmes auto-employées, plus précisément celles du secteur informel. Citons parmi les mesures proposées en faveur de ces femmes les initiatives d’alphabétisation, en particulier les formations en comptabilité, ainsi queles initiatives d’éducation non formelle de la deuxième chance mises en œuvre dans plusieurs pays. Etant donné l’importance de l’auto-emploi pour les femmes, spécialement dans le secteur informel, et le rôle joué par l’entrepreneuriat des femmes pour soutenir l’éducation des filles, l’étude du ROCARE recommande la promotion de l’auto-emploi par le financement des petites et moyennes entreprises, augmentant ainsi les opportunités d’emploi dans le secteur privé. De même, l’étude de l’Université du Zimbabwe sur les femmes dans le secteur informel plaide pour que les ministères concernéssoutiennent l’entrepreneuriat informel des femmes au moyen de prêts, de formation en gestion d’entreprise et de liens avec le marché pour stimuler leurs activités. Les recherches contenues dans ce volume signalent le manque de mécanismes appropriés et fonctionnels pour faire face au harcèlement et aux agressions sexuelles dans les établissements supérieurs et le monde du travail. Le personnel scolaire manque de compréhension sur la violence sexuelle et ses implications, et dans le cas des apprenants souffrant de handicaps de compréhension sur le handicap, de connaissances sur les limites des enfants handicapés et de capacitésà communiquer avec eux. Les femmes diplômées sont confrontées aux avances sexuelles d’employeurs prospectifs, ce qui complique encore leur recherche d’emploi. Il est essentiel de mettre en place des initiatives et des installations permettant aux étudiantes et aux employées de signaler les cas de harcèlement et d’agressions sexuelles, de demander une aide physique, psychologique et juridique, d’être assurées que dessanctions appropriées seront prises contre ceux qui les harcèlent, leur nuisent et les violent, de quelque façon que ce soit, et d’être protégées d’autres cas d’agression. Le harcèlement et les agressions sexuelles sont des sujets difficiles à évoquer pour les victimes et la confidentialité et la compréhension sont cruciales. Cela implique que les écoles et les entreprises emploient des personnels dédiés, adoptant l’attitude appropriée à l’égard des victimes de violence sexuelle et formés pour les soutenir et prendre les mesures nécessaires pour assurer leur protection. Le développement permanent du personnel dans ce domaine est crucial, car de nouvelles législations, connaissances et approches émergent. Lorsque la législation est absente ou insuffisante, les autorités nationales du travail ou de l’éducation concernées doivent s’assurer de l’introduction et de l’efficacité de politiques, règlementations et mécanismes relatifs à la violence sexuelle. Les états doivent accorder une attention vigilante au respect des droits et de la sécurité des travailleurs, en particulier des femmes, et au droit des étudiant(e)s dans les établissements d’enseignement. Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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Sensibilisation sur les droits, les devoirs et les opportunités Les mesures visant à renforcer la sensibilisation sur les questions de genre au sein des établissements d’enseignement et sur le marché du travail ont émergé comme une recommandation clé de différentes études. En effet, les initiatives qui s’attaquent aux préjugés de genre doivent dépasser la création de cadres politiques et règlementaires et doivent cibler une réelle implication communautaire afin de promouvoir l’égalité entre les genres. Cela exige que toutes les parties prenantes, y compris les OSC, assument un rôle actif de sensibilisation à tous les niveaux sur les implications négatives desinégalités et de la violence à l’égard des filles et des femmessur la société dans son ensemble. Le CIRES appelle les autorités gouvernementales, les associations et les ONG impliquées dans les questions liées au genre à mettre en œuvre des programmes et des campagnes coordonnées sur la sensibilisation au genre ciblant les femmes, les hommes, les parents, les filles et les garçons, soutenues par les médias, afin de provoquer des changements positifs en faveur de l’égalité entre les genres et de la redéfinition des idéologies concernant les femmes. Les parents devraient mieux comprendre leur rôle dans l’émancipation socio-économique des filles et l’importance de l’éducation pour y parvenir ; les filles devraient être mieux informées sur les normes et les valeurs les concernant, les avantages de l’éducation et les différents rôles qu’elles jouent dans la société ; enfin, les femmes devraient être informées des opportunités universitaires, professionnelles et entrepreneuriales qui s’offrent à elles et des politiques et mécanismes existants en leur faveur : tels sont les autres objectifs des efforts de sensibilisation. Ainsi, pour optimiser l’intégration professionnelle des femmes, il conviendrait d’accroître et de faciliter l’accès à l’information sur le recrutement public et privé et les organismes de formation aux jeunes femmes qui entrent sur le marché du travail ainsi qu’à celles qui travaillent déjà et cherchent à améliorer leur situation. Il faudrait également encourager une plus grande sensibilisation sur les services qui soutiennent l’entreprise privée par une information accrue. En ce qui concerne l’éducation, il est important que les étudiantes, les familles et la communauté scolaire comprennent les droits de l’enfant, y compris le droit à l’éducation et à la protection contre la violence ainsi que les politiques de réintégration scolaire qui permettent aux mères adolescentes de retourner à l’école et de terminer leurs études. La prise de conscience est d’une importance particulière dans les situations de harcèlement et d’agressions sexuelles. Tout le personnel enseignant doit être sensibilisé sur ses obligations légales en ce qui concerne le traitement et la protection des élèves qui leur sont confiés, les employeurs doivent comprendre leurs obligations au regard de la sécurité et du bien-être de leurs employé(e)s. Les politiques relatives à la violence sexuelledoivent être clairement expliquées à tous – apprenant(e)s, parents, personnel scolaire, entreprises, employé(e)s – pour s’assurer qu’ils comprennent leurs droits, ce qui constitue un cas de harcèlement ou de violence sexuelle, les mesures à prendre quand de tels cas se produisent ou sont suspectés, les procédures de signalement et le soutien et la protection de la victime. L’orientation, le conseil et la motivation des étudiantes Bien que de nombreuses études indiquent que les étudiants, hommes et femmes, peuvent réussir aussi bien dans les études, les activités extrascolaires et le milieu du travail, les préjugés de genre existant dans l’enseignement et le monde du travail continuent de nuire aux résultats universitaires et à la progression professionnelle des jeunes femmes. Certaines études contenues dans ce volume signalent la nécessité évidente de mécanismes de conseil et d’orientation plus formels, à l’école secondaire et à l’université. L’étude de l’Université de Douala suggère par exemple que les étudiantes découragées par leur expérience d’apprentissage dans les matières scientifiques ou qui se sentent intimidées sont susceptibles de changer leur façon de voir et de s’engager dans des disciplines scientifiques si elles reçoivent une orientation appropriée. En conséquence, les initiatives d’orientation et de motivation encourageant les jeunes filles à choisir les matières scientifiques à l’école secondaire en préparation des études supérieures sont importantes. La recherche de l’Université de Douala avance que le personnel enseignant et les modèles féminins en science et en technologie ainsi que la représentation positive des femmes dans les manuels de science et de technologie sont essentiels pour motiver les filles en faveur de ces disciplines. De même, l’étude du Ghana met en évidence que les membres féminins des facultés sont des modèles importants dans le développement des qualités de leadership et des ambitions chez les étudiantes. Ce document de recherche recommande que les initiatives de mentorat au sein des universités ne se limitent pas seulement à la sphère universitaire, mais ciblent également le développement de fortes caractéristiques de leadership chez les étudiantes. L’Université du Zimbabwe suggère d’impliquer également les modèles dans les initiatives d’éducation par les pairs pour les filles et les femmes du secteur informel, en particulier celles qui reprennent leur scolarité après avoir abandonné l’école. L’étude sur les liens entre l’éducation et le marché du travail en Tanzanie recommande que les établissements d’enseignement supérieur prennent des mesures pour préparer les étudiant(e)s aux entretiens d’embaucheen les exerçant aux règles et aux pratiques de la recherche d’emploi et du marché du travail. La recherche peut jouer un rôle fondamental pour contribuer aux mécanismes d’orientation et de soutien destinés aux jeunes femmes. L’étude de REPOA a révélé que les étudiantes sont soit découragées de poursuivre des études dans des disciplines scientifiques comme l’ingénierie ou trouvent difficiles d’entrer dans le milieu professionnel scientifique à cause de l’image négative des employeurs sur la capacité des femmes à travailler dans ces domaines. Le REPOA a

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suggéré que la recherche approfondisse ces conclusions et évalue dans quelle mesure ces expériences sont communes à l’éducation et au marché du travail ainsi queleur impact sur les résultats universitaires et professionnels des femmes et des hommes. Le conseil est revenu régulièrement comme un facteur essentiel pour améliorer les expériences d’apprentissage et professionnelles des femmes. Plusieurs études, notamment celle de l’Université de l’éducation de Winneba, ont prôné la mise en place de services de conseil dans les établissements d’enseignement afin d’apporter une assistance psychologique et affective aux étudiantes souffrant de harcèlement, de violence, de découragement, de frustration et de stress. Une éducation sexuelle appropriée a été identifiée comme l’une des clés pour lutter contre le harcèlement et les agressions sexuelles, en particulier pour les élèves du second cycle et celles souffrant de handicaps. L’Université d’Afrique du Sud avance que ce type d’éducation devrait encourager une sexualité positive, favoriser l’aptitude à la prise de décision, habiliter les apprenants à agir en cas de pression inappropriée de leurs pairs et d’abus de leurs droits, et aborder les questions liées à la santé reproductive, aux relations interpersonnelles, à l’affection, à l’intimité, à l’image corporelle et aux rôles de genre. Ce type de programmes ont le potentiel de remettre en cause les pressions de la société et des pairs qui favorisent les comportements abusifs et les stéréotypes sur les hommes et les femmes, de permettre aux hommes de développer des attitudes positives à l’égard des femmes et des filles et d’offrir la possibilité aux femmes d’exprimer leurs préoccupations concernant la violence sexuelle. Ces recommandations peuvent éclairer le dialogue et l’engagement et contribuer à la mise en place d’interventions concrètes dans les communautés, les établissements et les pays en vue d’améliorer la participation des filles et des femmes à l’éducation et à l’emploi. La préoccupation primordiale des études contenues de ce volume et des recommandations qu’elles formulent est d’offrir aux filles et aux jeunes femmes d’Afrique subsaharienne une chance équitable d’acquérir des compétences et des caractéristiques qui leur permettront d’être autonomes, productives et épanouies dans le monde du travail.

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 3 - 2013

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R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

L’égalité entre les genres et l’autonomisation des femmes sont les clés de la réduction de la pauvreté et du développement socio-économique et l’éducation y joue un rôle crucial. Pourtant, les expériences et les résultats en matière d’éducation sont très différents pour les garçons et les filles et les hommes et les femmes, généralement au détriment des filles et des femmes.

Les études de ce troisième volume des Cahiers de recherche du FAWE posent plusieurs questions importantes sur l’éducation des filles et des femmes et l’emploi en Afrique. Quels sont les facteurs au sein de l’environnement scolaire qui motivent ou entravent l’inscription des filles et des femmes dans les programmes d’études liés aux sciences ? Qu’est-ce qui motive les étudiantes à briguer des postes dans les associations étudiantes ? Dans les deux cas, quelles sont les formes de soutien disponibles pour ces jeunes femmes, quels défis rencontrent-elles et quelles stratégies adoptentelles pour faire face à ces défis ? Une autre étude se penche sur la façon dont la violence sexuelle à l’école contribue à la perte d’autonomisation et à la marginalisation des filles souffrant de handicaps et comment les écoles peuvent promouvoir des environnements d’apprentissage sûrs pour les enfants ayant des besoins spéciaux.

En ce qui concerne l’emploi, quels sont les mécanismes d’intégration et de non-intégration des femmes sur le marché du travail ? Comment les attitudes et les pratiques sexospécifiques dans l’enseignement supérieur et sur le marché du travail se manifestent-elles ? Les femmes diplômées de l’enseignement professionnel réussissent-elles mieux que les hommes à entrer sur le marché du travail et le genre détermine-t-il la nature des premiers contrats de travail ? Enfin, comment la participation des femmes dans le secteur informel influence-t-elle l’éducation des filles ?

Ces questions et les autres questions clés étudiées dans ce volume de documents de recherche peuvent mettre en lumière des moyens de s’assurer que les approches politiques, les attitudes des communautés, les pratiques d’enseignement et d’apprentissage et les environnements travail sont équitables, propices et aboutissent à l’amélioration des résultats des filles et des garçons et des femmes et des hommes.

©FAWE 2013 www.fawe.org

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