FAWE Cahiers de recherche - Volume 2, Version complète (2011)

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FAWE

Forum des éducatrices africaines

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Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

RENFORCER la recherche sur le genre pour améliorer l'éducation des FILLES et des FEMMES en AFRIQUE Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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Renforcer la recherche sur le genre pour améliorer l'éducation des filles et des femmes en Afrique

Les cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 – 2011

Les points de vue et les opinions exprimés dans ce volume sont ceux des auteurs et ne reflètent pas forcément les opinions du FAWE. Ils ne doivent pas être attribués au FAWE, à ses membres, à ses partenaires financiers, ou aux organisations qui lui sont affiliées, ou à toute personne agissant au nom du FAWE.

Les études contenues dans cette publication ont été rendues possibles grâce au généreux soutien financier de l’Agence norvégienne de coopération pour le développement (Norad). ©FAWE 2012

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Table des matières

Introduction ........................................................................................................................................ 3 Remerciements ................................................................................................................................... 4

Liste des tableaux et des graphiques .......................................................................................... 7

Liste des abréviations et des acronymes ................................................................................... 9

Vue d’ensemble ................................................................................................................................... 11

Education de base : l’enseignement sensible au genre et le rôle des enseignants ........................ 14 Femmes enseignantes au Liberia : entre désir et réalité .................................................................... 16

L’impact des initiatives des écoles sensibles au genre au Malawi : données factuelles de six études de cas ............................................................................................................................................. 43

L’impact des écoles amies des enfants au Rwanda ............................................................................. 68

Enseignement supérieur : intégrer le genre pour accroître la participation féminine ................. 99 L’impact des politiques et des programmes en faveur de l’égalité des genres sur la participation des étudiantes dans les universités publiques au Kenya .......................................... 101 Ecart entre les genres : inscription et choix de carrière des étudiants en comptabilité dans les universités nigérianes ............................................................................................................................. 120

Conclusion et recommandations de politiques ............................................................................... 147

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Introduction Le deuxième volume des Cahiers de recherche du FAWE réaffirme notre engagement de contribuer à l’éducation des filles sur le continent africain en produisant des éléments de preuves solides pour éclairer les politiques et les efforts de plaidoyer. Dans ce volume portant sur les questions de genre dans les pratiques de l’enseignement formel, nous reconnaissons que l’éducation des filles continue d’être confrontée à de nombreux défis. Eliminer l’écart entre les genres et atteindre la parité d’ici 2015, conformément aux Objectifs du Millénaire pour le développement, exigera des efforts concertés de la part des ministères de l’Education, des partenaires du développement, des administrateurs scolaires et des groupes de plaidoyer. L’égalité entre les genres est une composante essentielle du développement durable. Les femmes d’Afrique subsaharienne sont non seulement les détentrices de connaissances traditionnelles et locales reconnues et inestimables, mais elles jouent aussi un rôle vital dans l’incubation et le transfert de compétences locales irremplaçables qui sont à la base des stratégies de survie. L’accès à un enseignement de qualité, aux formations et au développement des capacités est la clé de leur autonomisation et permet leur participation au développement de leurs communautés. Pourtant, de nombreuses filles fréquentant l’école secondaire n’acquièrent pas les qualifications et les compétences nécessaires pour réussir sur le marché du travail actuel. Mesurée en termes de résultats d’apprentissage, la qualité des services éducatifs offerts par la plupart des pays africains reste faible, tandis que les inégalités entre les genres persistent, à la fois dans les résultats d’apprentissage et dans les rémunérations. C’est dans ce contexte que le FAWE s’est associé avec des chercheurs(ses) à travers le continent africain afin de promouvoir l’égalité entre les genres par le biais d’une recherche sur l’éducation pertinente pour les politiques. Le FAWE a axé ses travaux sur les domaines dans lesquels les connaissances sont particulièrement lacunaires : ils identifient les liens manquants, les lacunes dans les données, les questions clés et abordent les principaux problèmes. Par ses activités de recherche, le FAWE vise à contribuer à l’amélioration de l’éducation des filles grâce à des projets de recherche et des publications à fort impact qui éclaireront les décisions politiques avec les éléments de preuve issus de la recherche. De plus, le FAWE espère renforcer les capacités de recherche en Afrique subsaharienne en collaborant avec des professeurs et des spécialistes qui, à leur tour, seront les mentors de jeunes chercheurs(ses) en les formant aux méthodologies de recherche les plus récentes. En choisissant des chercheurs(ses) appartenant à des universités et/ou des instituts de recherche sur le genre, le FAWE étend son engagement en utilisant les plateformes de ces institutions pour entrer en contact avec d’autres parties prenantes de l’éducation par le biais de la recherche. En collaborant principalement avec des chercheurs et des experts féminins, le FAWE crée un forum et met en avant le rôle crucial des femmes en matière de production des connaissances, de recherche de solutions et d’amélioration des questions relatives à l’éducation des filles. Dans ce volume, tandis que l’université Kenyatta de Nairobi étudie l’impact des politiques et des programmes d’égalité des genres sur la participation des étudiantes dans les universités publiques du Kenya, le Centre pour la recherche et la formation en éducation (CERT) de la faculté d’Education du Chancellor College de l’université du Malawi, examine l’impact des politiques et des initiatives sur l’égalité entre les genres dans l’éducation et la participation féminine aux activités communautaires. Le Centre pour le genre, la culture et le développement de l’Institut supérieur d’enseignement pédagogique de Kigali analyse l’impact des écoles sensibles au genre sur l’éducation des filles au Rwanda en menant une recherche dans quatre écoles. L’université du Maryland examine les facteurs affectant le choix des femmes à faire carrière dans l’enseignement primaire au Liberia. Enfin, l’université de Covenant étudie l’écart entre les genres des étudiants en comptabilité des universités du Nigeria en matière d’inscription et d’orientation professionnelle. Le FAWE souhaite remercier l’Agence norvégienne de coopération pour le développement (Norad) d’avoir financé les travaux analytiques et les rapports qui forment le volume 2 des Cahiers de recherche du FAWE. Promouvoir l’égalité entre les genres dans l’éducation est une entreprise difficile qui requiert des partenariats institutionnels et communautaires. La Norad s’est révélée un partenaire inestimable par son financement généreux et son appui indéfectible à l’initiative de recherche du FAWE depuis plusieurs années. Le FAWE adresse aussi ses remerciements à tous les partenaires et institutions de recherche pour leurs diverses contributions et pour avoir permis la réalisation de ce volume. Oley Dibba-Wadda Directrice exécutive du FAWE Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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Remerciements Le FAWE souhaite remercier les personnes suivantes de leur précieuse contribution au second cycle de son initiative de recherche et à la production du volume 2 de ses Cahiers de recherche. Appui et conseils financiers Agence norvégienne de coopération pour le développement (Norad) L’engagement de la Norad en faveur de l’égalité entre les genres et de l’éducation ainsi que son généreux soutien à la recherche en éducation ont été les éléments moteurs de l’initiative de recherche du FAWE et de la publication de ses Cahiers de recherche. Le FAWE est redevable à la Norad pour le soutien indéfectible qu’elle lui apporte depuis près de vingt ans.

M. Kunje a été le chercheur principal de ce projet à l’Université du Malawi. Toutes nos condoléances et nos pensées vont à sa famille. Demis Kunje était chargé de recherche principal à la faculté d’Education de l’université du Malawi. Avant d’intégrer l’université, il était enseignant et conseiller méthodologique au ministère de l’Education. Ses recherches portaient sur la formation des enseignants, l’enseignement des sciences et l’éducation des filles. Il avait publié de nombreux ouvrages sur les enseignants et l’éducation des filles et il avait été consultant pour de nombreuses institutions multilatérales dans les domaines du développement des enseignants et des questions relatives à l’éducation des filles.

Université de Covenant, Nigeria Umuren Adebimpe, chercheuse principale Umuren Adebimpe est chef p.i. du département de Comptabilité de l’université de Covenant au Nigeria. Titulaire d’un doctorat en comptabilité, elle est experte-comptable et membre de l’Institut des experts-comptables du Nigeria. Ses domaines de recherche incluent les questions relatives au genre, à la comptabilité et à l’éducation.

Joseph Chimombo, chercheur Joseph Chimombo est maître de recherche au Center for EducationalResearch and Training (Centre de recherche et de formation en éducation) (CERT) de l’Université du Malawi. Il a été directeur du CERT de 2000 à 2010 et avait auparavant travaillé pour la division de la planification du Ministère de l’éducation en tant que chargé de recherche et d’évaluation. Il a également occupé diverses fonctions dans des organisations nationales et internationales. Le travail du Dr Chimombo englobe l’analyse de la politique, le renforcement des capacités et les études d’évaluation.

Dorcas Oyerinde, chercheuse mentorée Titulaire d’un mastère et d’un doctorat en comptabilité, Dorcas Oyerinde est chargée de cours à l’université de Covenant. Elle est experte-comptable et membre de l’Académie internationale du commerce et du développement de l’Afrique. Ses domaines de spécialisation sont la recherche sur la comptabilité et les marchés boursiers et les questions relatives au genre et à l’orientation professionnelle.

Lizzy Chiwala, chercheuse mentorée Lizzy Chiwala est chargée de recherche au Centre pour la recherche et la formation en éducation (CERT) de l’université du Malawi. Elle est titulaire d’un mastère d’études internationales de l’université de Kobe au Japon et d’une licence en science de l’éducation de l’université du Malawi. Avant d’intégrer le CERT, Mme Chiwala travaillait pour le ministère de l’Education en qualité d’enseignante dans le secondaire.

Nwobu Obiamaka, chercheuse mentorée Titulaire d’une licence et d’un mastère de comptabilité, Nwobu Obiamaka est actuellement doctorante et chargée de cours au département de Comptabilité de l’université de Covenant. Ses domaines de spécialisation incluent l’avancement professionnel des femmes, la vérification des comptes, la transparence et l’information financière. Elle est membre associé de l’Institut des experts-comptables du Nigeria (ICAN).

Université du Maryland, USA Nelly P. Stromquist, co-chercheuse principale Nelly Stromquist est professeure de politique d’éducation internationale au College of Education de l’université du Maryland. Elle est spécialisée dans les questions relatives à l’éducation au développement international et au genre qu’elle étudie sous un angle sociologique critique. Ses recherches portent sur la dynamique des politiques et des pratiques éducatives, les relations entre les genres, la justice sociale et les changements sociétaux. Actuellement, elle étudie la façon dont le processus de mondialisation influe sur les structures et les fonctions de l’éducation.

Equipes de recherche

Université du Malawi, Malawi Demis Kunje, chercheur principal C’est avec un immense regret que nous annonçons le décès de M. Demis Kunje survenu en novembre 2012.

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Steven J. Klees, co-chercheur principal Steven Klees est professeur R.W. Benjamin d’éducation internationale et comparative de l’université du Maryland. Les travaux du professeur Klees portent sur l’économie politique de l’éducation et le développement. Sesdomaines de recherche spécifiques sont : la mondialisation, le néo-libéralisme et l’éducation ; le rôle des agences d’aide ; l’éducation, les droits de l’homme et la justice sociale ; l’éducation des populations défavorisées ; le rôle des classes, du genre et de la race dans la reproduction et la remise en question des inégalités éducatives et sociales ; les approches alternatives à l’éducation et au développement. Jing Lin, co-chercheuse principale Jing Lin est professeure associée de l’université du Maryland. Elle a publié de nombreux ouvrages sur l’éducation, la culture et la société chinoises et les changements éducatifs en Chine. Elle a effectué de nombreuses recherches sur l’éducation pour la paix et l’éducation à l’environnement et est l’auteure des ouvrages suivants : Love, peace and wisdom in education: Vision for education in the 21st century (2006), Educators as peace makers: Transforming education for global peace (2008) et Spirituality, religion, and peace education (2010). Elle est corédactrice de deux séries d’ouvrages : L’éducation pour la paix et Transformer l’éducation pour l’avenir. Carol Corneliese, chercheuse mentorée Carol Corneliese est coordonnatrice de programme au bureau du vice-recteur principal pour l’équité et la diversité de l’université du Maryland. Auparavant, le Dr Corneilse a travaillé dans le recrutement et l’orientation des diplômés, les programmes destinés aux étudiants de premier cycle brillants issus des minorités et les commissions du président sur le handicap, les minorités ethniques et les questions de LGBT. Elle a contribué à la production du plan stratégique de l’université pour la diversité : Transformer le Maryland : vers l’excellence en matière de diversité et d’inclusion. Caitlin S. Haugen, chercheuse mentorée Caitlin S. Haugen a obtenu son doctorat à l’université du Maryland en politique d’ éducation internationale. Elle a été volontaire des Corps de la paix en Ouganda et en Thaïlande où elle a été formatrice d’enseignants. Elle a été institutrice et éducatrice environnementale. Sesdomaines de recherche incluent le développement de communautés d’apprentissage dans les établissements d’enseignement supérieur, le développement global des compétences, les effets de l’éducation des filles sur le VIH-sida, l’éducation environnementale des adultes et les effets de la présence d’enseignantes.

Centre pour le genre, la culture et le développement, Institut supérieur d’enseignement pédagogique de Kigali, Rwanda Shirley Randell, chercheuse principale Shirley Randell est directrice du Centre pour le genre, la culture et le développement à l’Institut supérieur d’enseignement pédagogique de Kigali au Rwanda. Elle a mené une carrière distinguée dans l’éducation et la réforme du secteur public et a passé 15 ans à offrir une assistance technique aux gouvernements du monde entier. Elle a été la chef de la mission pour le développement de critères sur le genre, de l’audit du genre, de la politique de genre et des plans stratégiques et d’action sur le genre pour l’université nationale du Rwanda. Elle a aussi dispensé des formations sur la réponse à la violence basée sur le genre et sa prévention pour les organes de sécurité nationaux de 14 pays. Francisca Mujawase, chercheuse mentorée Francesca Mujuwase est titulaire d’une licence de statistiques appliquées. Elle est une statisticienne affiliée au programme de renforcement des capacités Isibalo d’Afrique du Sud, un programme qui renforce les capacités humaines et promeut les activités participatives en cours dans les principaux domaines prioritaires du développement statistique. Sa formation en analyse intégrative lui a permis de mener des projets comme la Participation liée au genre dans la gouvernance des institutions de l’administration locale au Rwanda. Elle est aussi membre du Groupe de statisticiens africains (AGROST). Université Kenyatta, Kenya Violet Wawire, chercheuse principale Violet Wawire est titulaire d’un mastère en éducation de l’université Kenyatta. Depuis dix ans, elle est chargée de cours au département sur les Théories de l’éducation. Ses domaines de recherche incluent le genre et l’éducation, l’égalité en matière d’accès et les questions relatives aux enseignements élémentaire et supérieur dans le contexte kenyan. Elle est la coauteure de plusieurs chapitres de livres et a publié de nombreux articles dans des revues. Elle est membre d’organisations comme le Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique (CODESRIA), le Conseil pour la recherche en sciences sociales en Afrique orientale et australe (OSSREA) et le Collaboratif pour l’enseignement supérieur en Afrique (AHEC). Hedwig Ombunda, chercheuse mentorée Hedwig Ombunda est titulaire d’un mastère en psychologie de l’éducation de l’université Kenyatta. Elle est spécialisée dans les questions relatives à Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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l’éducation, la psychologie et le genre. Ses domaines de recherche incluent le genre, le développement de l’enfant, la personnalité, l’enseignement supérieur et l’enseignement primaire. Lucy Wandiri Mbirianjau, chercheuse mentorée Lucy Wandiri est doctorante à la School of Education de l’université Kenyatta. Sa thèse de doctorat porte sur le genre et l’éducation pour la paix par la science, la technologie et les mathématiques. Elle a présenté des communications lors de conférences sur le genre et est un membre actif des Chercheuses en éducation du Kenya (WERK) qui traite les questions touchant au genre, au plaidoyer et à la recherche. Equipe de revue par les pairs Chi-Chi Undie, associée, Population Council Chi-Chi Undie est une associée des Services de santé reproductive et du Programme de recherche du Population Council. Elle a travaillé comme chercheuse scientifique associée au Centre de recherche sur la population africaine et la santé où elle a été l’enquêtrice principale pour différents projets de recherche sur la santé sexuelle et reproductive. Krystal Strong, doctorante Krystal Strong est doctorante au département d’anthropologie de l’université de Californie à Berkeley. Elle a obtenu une licence en Etudes individualisées de l’université de New York en se spécialisant dans les études de la diaspora africaine. Ses domaines de recherche incluentl’Afrique, l’activisme politique, la jeunesse, l’éducation, l’identité et la culture populaire. Usree Bhattacharya, doctorante Usree Bhattacharya est doctorante à la Graduate School of Education de l’université de Californie à Berkeley. Elle est titulaire d’un mastère en littérature anglaise et d’un autre en enseignement des langues étrangères. Ses recherches explorent le langage et la socialisation des enfants, creusent les idéologies locales du langage et étudient le discours plus large autour de l’apprentissage des langues dans le contexte de la mondialisation. Ayo Coly, titulaire de doctorat Ayo Coly est professeure associée d’études africaines et afro-américaines et de littérature comparée à Darmouth College. Ses domaines de recherche incluent les littératures et le cinéma africains, la théorie postcoloniale, les masculinités coloniales et postcoloniales et les droits de l’homme. Elle est

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l’auteure de The pull of postcolonial nationhood: Gender and migration in francophone African literatures, et elle achève actuellement l’écriture du livre Un/clothing African womanhood: The female body in African visual discourse. Equipe éditoriale Irmin Durand, chargée de la communication, de la recherche et du plaidoyer du FAWE Irmin Durand est responsable du développement et de la coordination de la communication et des activités de recherche du FAWE. Elle a servi de point focal pour la mise en place de l’initiative de recherche et est la rédactrice en chef des Cahiers de recherche du FAWE. Elle a travaillé à l’UNESCO-IIPE, dans l’édition et comme journaliste. Miriam Jones, réviseuse, anglais Miriam Jones a assuré la révision de la version anglaise de ce volume. Elle a travaillé à l’Institut international de planification de l’éducation de l’UNESCO, notamment sur sa collection phare « Les principes de la planification de l’éducation » et sur les rapports du Groupe de travail international sur l’éducation entre autres. Elle a aussi été impliquée dans les publications de l’UNESCO sur l’eau et la paix, la bioéthique et les droits de l’homme. Nathalie Montagu, traductrice, français Nathalie Montagu a assuré la traduction de ce volume. Elle est traductrice indépendante (anglaisjaponais-français) spécialisée dans l’éducation et le développement. Elle a travaillé pour des programmes de l’UNESCO et la BAD comme l’ADEA et le GT-COMED ainsi que pour des ONG comme le FAWE. Photographie Toutes les images de cette publication ont été reproduites avec l’aimable autorisation de Nancy Wong pour le FAWE. Maquette, mise en page et impression Capital Colours Creative Design, Nairobi, Kenya


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Liste des tableaux et des graphiques Liste des tableaux Tableau 1.1

Initiatives à l’école Sungu et leur dimension GEEF ............................................................................... 51

Tableau 1.2

Initiatives à l’école Mponda et leur dimension GEEF ............................................................................ 54

Tableau 1.3

Initiatives à l’école Chiha et leur dimension GEEF ................................................................................. 58

Tableau 1.4

Initiatives à l’école Kavu et leur dimension GEEF ................................................................................. 60

Tableau 1.5

L’initiative PROGE à l’école Chimwe et sa dimension GEEF ................................................................. 62

Tableau 1.6

Les initiatives à l’école Ngolo et leur dimension GEEF ......................................................................... 63

Tableau 1.7

Taux d’abandon, de rétention et de promotion des filles aux niveaux primaire et secondaire, 2008-2009 ...................................................................................................................................................... 71 Composition des répondants selon l’école, le genre, la catégorie et l’instrument de recherche 77

Tableau 1.8 Tableau 1.9 Tableau 1.10

Enseignants dans le district de Rubavu selon le genre, 2010 ............................................................. 79 Inscriptions des élèves dans le district de Rubavu selon le genre, 2010 ....................................... 79

Tableau 1.11

Inscriptions dans le district de Gakenke selon le genre, 2010 ........................................................... 82

Tableau 1.12

Enseignants dans le district de Gakenke selon le genre, 2010 .......................................................... 82

Tableau 1.13

Scolarisation selon le genre, 2011 ............................................................................................................ 83

Tableau 2.1

Base d’échantillonnage de l’étude .............................................................................................................. 106

Tableau 2.2

Etudiants inscrits à KU et JKUAT selon le genre, 2006-2011 ............................................................ 107

Tableau 2.3

Inscriptions selon la distribution des cours et le genre à KU, 2007-2010 ...................................... 107

Tableau 2.4

Inscriptions selon la distribution des cours et le genre à JKUAT, 2006-2010 .............................. 108

Tableau 2.5

Profil des résultats universitaires des étudiants de KU selon le genre, 2006-2010 ...................... 109

Tableau 2.6

Profil des résultats universitaires des étudiants de JKUAT selon le genre, 2006-2010 ............ 109

Tableau 2.7

Etudiantes admises dans les universités publiques grâce programme de DP du JAB par spécialité, 2005-2011 ................................................................................................................................... 110 Liste des universités échantillonnées et leurs abréviations ............................................................... 132

Tableau 2.8 Tableau 2.9 Tableau 2.10 Tableau 2.11 Tableau 2.12

Inscriptions par zone géopolitique, type d’université et établissement, 2004/05-2009/10 ...... 135 Inscriptions par zone géopolitique et genre, 2004/05-2009/10 ....................................................... 136 Inscription par type d’université et genre, 2004/05-2009/10 ........................................................... 137 Taux de réponse des répondant(e)s dans les sept universités sélectionnées ................................ 138

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Liste des graphiques Graphique 1.1 Cadre conceptuel – Choix de l’enseignement comme carrière ............................................................. 21 Graphique 1.2 Parcours scolaire des filles de l’école primaire au lycée au Liberia 2008-2009 ............................... 22 Graphique 1.3 Les inscriptions des garçons et des filles aux niveaux 1 et 5 à l’école Sungu, 2007-2010 ........... 52 Graphique 1.4 Les inscriptions des filles aux niveaux 1, 5 et 8 à l’école Mponda, 2007-2010 ................................. 55 Graphique 1.5 Les inscriptions des garçons aux niveaux 1, 5 et 8 à l’école Mponda, 2007-2010 ............................ 55 Graphique 1.6 Les inscriptions à l’école Chiha par sexe et par niveau, 2007 ............................................................... 58 Graphique 1.7 Les inscriptions à l’école Chiha par sexe et par niveau, 2010 ............................................................... 59 Graphique 1.8 Les inscriptions à l’école Kavu par sexe et par niveau, 2009 ................................................................. 60 Graphique 1.9 Les inscriptions à l’école Kavu par sexe et par niveau, 2010 ................................................................. 60 Graphique 1.10 Les inscriptions à l’école Chimwe par sexe et par niveau, 2007 ........................................................... 62 Graphique 1.11 Les inscriptions à l’école Chimwe par sexe et par niveau, 2010 ........................................................... 62 Graphique 1.12 Les inscriptions à l’école Ngolo par sexe et par niveau, 2007 ............................................................... 63 Graphique 1.13 Les inscriptions à l’école Ngolo par sexe et par niveau, 2010 ............................................................... 64 Graphique 1.14 Dimensions clés des écoles amies des enfants ......................................................................................... 74 Graphique 1.15 Districts du Rwanda, 2011 ............................................................................................................................. 77 Graphique 1.16 Age des élèves commençant l’école selon le genre, 2011 ..................................................................... 83 Graphique 1.17 Age des élèves selon le genre, 2011 ............................................................................................................ 84 Graphique 1.18 Durée du trajet pour aller à l’école, selon l’EAE, 2011 ............................................................................ 84 Graphique 1.19 Problèmes rencontrés par les élèves commençant l’école, 2011 ........................................................ 85 Graphique 1.20 Taux d’abandon dans les quatre EAE, 2011 ................................................................................................ 86 Graphique 1.21 Problèmes rencontrés par les élèves dans les EAE, 2011 .................................................................... 87 Graphique 1.22 Causes des abandons et d’autres problèmes rencontrés à l’école, 2011 .......................................... 88 Graphique 1.23 Résultats des filles par rapport aux garçons, 2011 ................................................................................ 89 Graphique 1.24 Perceptions des élèves des résultats des filles par rapport aux garçons, 2011 ............................. 89 Graphique 2.1 Sensibilisation des étudiants aux politiques de genre de l’université/gouvernement ................... 112 Graphique 2.2 Défis affectant la participation universitaire des étudiants selon le genre ..................................... 114 Graphique 2.3 Réciprocité triadique ....................................................................................................................................... 128 Graphique 2.4

Modèle conceptuel : théorie sociale cognitive, choix de carrière et genre ........................................ 129

Graphique 2.5 Inscriptions des femmes par zone géopolitique, 2004/05-2009/10 .................................................. 136 Graphique 2.6

Inscriptions par type d’université et genre, 2004/05-2009/10 ........................................................... 137

Graphique 2.7 Taux de réponse dans les sept universités sélectionnées ...................................................................... 138

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Liste des abréviations et des acronymes AICPA

Institut américain des experts comptables agréés

ALP

Programme d’apprentissage accéléré

APE

Association de parents d’élèves

CDE

Convention relatives aux droits de l’enfant

CE

Chef d’établissement

CEDAW

Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes

CEO

Responsable de l’éducation du comté

CERT

Centre pour la recherche et la formation en éducation

CES

Conseil de l’enseignement supérieur

CESLY

Compétences scolaires de base pour les jeunes Libériens

CGCD

Centre pour la culture de genre et le développement

CGS

Comité de gestion scolaire

CPD

Développement professionnel permanent

CPE

Comité de parents et d’enseignants

CRECCOM

Centre créatif de mobilisation communautaire

CSCQBE

Coalition de la société civile pour la qualité de l’éducation de bas

DdE

Droits de l’enfant

DEO

Responsable de l’éducation du district

DP

Discrimination positive

EAE

Ecole amie des enfants

EB6A

Education de base de six ans

EB9A

Education de base de neuf ans

EB12A

Education de base de douze ans

EC

Expertise comptable

ECSEL

Appui communautaire en faveur de l’éducation au Liberia

EDC

Centre pour le développement de l’éducation

EDPRS

Stratégie de développement économique et de réduction de la pauvreté 2008-2012

EPT

Education pour Tous

EPU

Enseignement primaire universel

FAWE

Forum des éducatrices africaines

FE

Formation des enseignants

GD

Groupe de discussion

GdK

Gouvernement du Kenya

GdR

Gouvernement du Rwanda

GEEF

Cadre d’égalité des genres dans l’éducation

GOAL

Opportunité des filles à accéder à l’apprentissage

GS

Groupe scolaire

IG

Intégration du genre

IIPE

Institut international de planification de l’éducation

INSET

Formation continue des enseignants

IPAR

Institut d’analyse politique et de recherche

IRC

Comité international de secours Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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ISU

Institut de statistique de l’UNESCO

JAB

Comité d’admission mixte

JAMB

Comité mixte d’admission et d’inscription

JCE

Examens du brevet des collèges

JKUAT

UniversitéJomo Kenyatta d’agriculture et de technologie

KIE

Institut d’enseignement pédagogique de Kigali

KU

Université Kenyatta

LTTP

Programme de formation des enseignants du Liberia

MEN

Ministère de l’Education

MGF

Mutilations génitales féminines

MIGEPROF

Ministère du Genre et de la Promotion de la famille

MINECOFIN

Ministère des Finances et de la Planification économique

MINEDUC

Ministère de l’Education

MMUST

UniversitéMasindeMuliro de science et de technologie

MSCE

Certificat d’études du Malawi

NCST

Conseil national pour la science et la technologie

NTAL

Association nationale des enseignants du Liberia

NU

Nations unies

NUC

Commission nationale des universités

OMD

Objectifs du millénaire pour le développement

ONG

Organisation non gouvernementale

PE

Préfet des études

PROGE

Projet de promotion de l’éducation des filles

PNUD

Programme des Nations unies pour le développement

REE

Ratio élèves-enseignant

RTTI

Institut rural de formation des enseignants

SACMEQ

Consortium d’Afrique australe pour le pilotage de la qualité de l’éducation

SCT

Théoriesociale cognitive

SIDA

Syndrome d’immunodéficience acquise

SPSS

Statistical Package for the Social Sciences

TAR

Théorie de l’action raisonnée

TCP

Théorie du comportement planifié

TIC

Technologies de l’information et de la communication

UNESCO

Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture

UNGEI

Initiative des Nations unies en faveur de l’éducation des filles

UNIBEN

Université du Bénin

UNICEF

Fonds des Nations unies pour l’enfance

USAID

Agence des Etats-Unis pour le développement international

UTME

Examen unifié d’admission à l’enseignement supérieur

VAWOGEDE

Violence contre les femmes et les filles : l’ennemie du développement

VIH

Virus de l’immunodéficience humaine

WAEC

Conseil des examens de l’Afrique occidentale

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R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

Vue d'ensemble Les femmes représentent une grande partie de la base des ressources humaines de chaque nation. Réunies, elles constituent un vivier de talents au service du développement de leur communauté et des sociétés. Comment garantir aux femmes un meilleur accès à une éducation de qualité pour leur permettre de participer à la direction de leurs différentes communautés ? Comment intégrer la perspective du genre dans les agendas de la recherche, dans la recherche et le développement et dans l’élaboration de stratégies, de politiques, de processus etde produits pour soutenir l’agenda du genre et du développement ? Ces préoccupations ont fait l’objet de débats dans plusieurs instances nationales et internationales, notamment celles sur les besoins, les droits et la promotion des femmes ainsi que celles sur le rôle de l’éducation pour soutenir le développement durable et la réduction de la pauvreté. Une année supplémentaire de scolarité dans la vie d’une fille se traduit plus tard par une augmentation de ses revenus de 10 à 20 pour cent, une évolution majeure pour échapper au cycle de la pauvreté. Grâce à l’éducation, les filles peuvent bâtir une vie meilleure pour elles-mêmes et pour leurs enfants, contribuer à la prospérité de leur communauté, faire partie d’une main-d’œuvre de meilleure qualité et enrichir leur pays1. L’accumulation de capacités éducatives permet aux filles non seulement de saisir les opportunités économiques et de générer des revenus, mais aussi de les appliquer pour agir (capacités d’intervention) en vue d’améliorer leur bien-être personnel et celui de la société. Les politiques sensibles au genre prenant en compte l’environnement ainsi que les réalités culturelles et sociales de la vie des femmes et des hommes — tout en visant à éliminer les inégalités et à promouvoir une distribution égale des ressources— sont les moyens les plus efficaces de donner aux filles ces capacités d’intervention. Les gouvernements et les organisations internationales dépendent de plus en plus de la recherche pour concevoir, suivre et évaluer les interventions politiques. Il est par conséquent crucial de disposer de données et de statistiques fiables, ventilées par sexes, pour formuler des politiques visant à la promotion de l’égalité des genres.

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Dans ses efforts pour réduire les écarts persistants et donner aux femmes des capacités d’intervention— les processus par lesquels les individus font des choix et les traduisent en résultats désirés — le FAWE s’est engagé dans la recherche pour apporter des éléments de preuves appuyant ses efforts de collaboration et de plaidoyer avec les gouvernements et les organisations internationales. En partenariat avec les chercheurs(ses) de cinq établissements, le FAWE a mené les études suivantes qui forment le second volume des Cahiers de recherche du FAWE. L’impact des politiques et des programmes d’égalité des genres sur la participation des étudiantes dans les universités publiques du Kenya Cette étude, menée en collaboration avec l’université Kenyatta, examine les politiques et les programmes structurels formels ainsi que les hypothèses, normes et valeurs institutionnelles non formelles profondément enracinées qui ont pour conséquence involontaire l’inégalité entre les genres. Tandis que les chercheurs étudient les façons d’améliorer les programmes et les politiques universitaires existants pour favoriser la participation féminine, l’étude documente aussi les schémas d’inscription et de résultats par genre et par spécialité, met en évidence l’impact des politiques et des programmes d’égalité des genres sur la participation des étudiantes dans les universités publiques et formule des recommandations sur les façons d’améliorer les politiques et les programmes d’égalité des genres existants dans les universités publiques kenyanes. Les conclusions de la recherche révèlent que le nombre et la variété des politiques et des programmes corrigeant les inégalités en matière d’accès et de rétention dans les universités sont limités. En outre, si les politiques sont axées sur l’accès à l’université, elles négligent la rétention, les résultats et l’achèvement des étudiants qui sont des composantes importantes de l’équation de l’égalité. La recherche recommande de revoir les politiques existantes pour les rendre plus holistiques, de susciter une prise de conscience en diffusant activement les politiques et les programmes de genre à un public plus large et de sensibiliser les membres de la communauté universitaires aux questions de genre.

Banque mondiale (2009), Parce que je suis une fille : les filles dans l’économie mondiale, Washington DC.

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Les enseignantes au Liberia : entre désir et réalité Cette étude, menée en partenariat avec l’université du Maryland, porte sur les facteurs qui affectent le choix des femmes à devenir institutrices au Liberia. Elle cherche à exposer les facteurs qui expliquent la domination masculine parmi les enseignants du primaire et les barrières qui dissuadent les femmes de devenir enseignantes. Elle examine également l’expérience des enseignantes et identifie les conditions de travail qui font de l’enseignement une profession difficile. Les chercheurs ont mené des entretiens qualitatifs et semi-directifs avec des fonctionnaires du ministère de l’Education, des enseignants en formations initiale et continue, des administrateurs scolaires, des administrateurs et enseignants dans les centres de formation des enseignants et des professionnels internationaux du développement. Les conclusions de la recherche suggèrent que plusieurs barrières culturelles se dressent entre les femmes et l’accès à l’éducation. Plus spécifiquement, les hypothèses patrilinéaires qui impliquent que la fille est une ressource pour la famille de son mari, l’activité sexuelle précoce et les grossesses précoces, la pression exercée sur les filles de se marier jeunes et les faibles investissements dans le système éducatif au niveau national sont des facteurs qui compromettent tous sérieusement la capacité des filles à aller et à rester à l’école au Liberia. Le fait que peu de filles achèvent leur scolarité signifie que peu de filles sont disponibles pour devenir enseignantes à tout niveau. L’étude propose plusieurs options politiques pour accroître le nombre de femmes dans le corps enseignant. L’impact des initiatives d’écoles sensibles au genre au Malawi : les éléments de preuves tirés de six études de cas Le Centre pour la recherche et la formation en éducation (CERT) de la faculté d’Education du Chancellor College de l’université du Malawi, étudie l’impact des politiques et des initiatives qui aborde les inégalités entre les genres et la participation féminine aux activités communautaires. A l’aide d’une approche en trois volets, l’étude conduit une analyse critique de toutes les politiques de genre formulées depuis 2000. Les chercheurs ont analysé l’efficacité des stratégies élaborées et leur impact. Ils ont aussi évalué deux projets ciblant les filles, ont documenté les changements perçus et évalué l’impact des politiques et des initiatives sur l’accès des filles à l’école, leur participation et leurs résultats. Les conclusions de l’étude révèlent que les initiatives et les projets

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n’abordant qu’un ou deux aspects des besoins des filles ne bénéficient qu’à un nombre limité d’entre elles et n’ont pas d’effets durables sur la participation des filles à l’école. La recherche recommande l’adoption d’interventions et de solutions holistiques appliquées à un large éventail de questions de l’égalité entre les genres. L’écart entre les genres : inscription et orientation professionnelle des étudiants en comptabilité des universités du Nigeria Cette étude, menée en partenariat avec l’université de Covenant au Nigeria, cherche à déterminer les écarts entre les genres dans les taux d’inscription des étudiants de comptabilité des universités du Nigeria et elle examine les facteurs qui influencent leur orientation professionnelle. Elle étudie aussi la façon dont les étudiants perçoivent la comptabilité en tant que choix de carrière et élabore un programme de plaidoyer en vue d’une politique éducative qui influe sur l’orientation professionnelle des femmes et stimule leur admission dans les universités du Nigeria. Les conclusions révèlent que malgré une augmentation progressive des inscriptions des femmes dans les programmes de comptabilité des universités du Nigeria, les taux d’inscription ont varié dans les universités privées, gouvernementales et fédérales. L’étude propose des recommandations sur les façons d’accroître la participation féminine dans des disciplines comme la comptabilité. L’impact des écoles sensibles au genre sur l’éducation des filles au Rwanda Le Rwanda affiche d’excellents résultats au niveau international en matière d’égalité entre les genres et d’autonomisation des femmes. Il reste cependant un écart entre la politique et la pratique en ce qui concerne la rétention, les résultats et la transition des filles vers les enseignements secondaire et supérieur. Dans ce contexte, cette étude, menée en partenariat avec le Centre pour le genre, la culture et le développement de l’Institut supérieur d’enseignement pédagogique de Kigali, analyse l’impact des écoles sensibles au genre sur l’éducation des filles au Rwanda. Les questions de la recherche étaient basées sur les résultats du programme d’école sensible au genre dansles quatre catégories définies par le ministère de l’Education : inscription, rétention, résultats et gestion scolaire/ événements communautaires. Les conclusions sur les inscriptions indiquent que si l’équilibre entre les genres a été atteint, il reste des écarts en matière de résultats. L’étude recommande de lancer un


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programme de sensibilisation et de prise de conscience pour aider les communautés à comprendre la nécessité de l’éducation des filles. Elle défend aussi la mise en place d’infrastructures et d’équipements facilitant l’apprentissage. Eclairer les politiques et le plaidoyer par la recherche L’éducation est le moteur du développement. Alors que de grandes avancées ont été réalisées pour offrir des opportunités éducatives aux filles, les conclusions des études menées dans le cadre de l’initiative de recherche du FAWE indiquent des écarts persistants en matière d’accès, de rétention et de résultats au niveau des enseignements secondaire et supérieur. Comprendre quels sont les écarts qui répondent au développement économique, et pourquoi, est un élément pertinent pour les politiques, car cela aide à distinguer les écarts

entre les genres qui exigent l’attention. Concevoir des politiques appropriées n’est que le premier pas vers une plus grande égalité entre les genres. L’objectif des Cahiers de recherche du FAWE est non seulement de mettre en évidence les questions éducatives toujours d’actualité, mais aussi de fournir des éléments de preuves solides pour éclairer les politiques et le plaidoyer en faveur de programmes éducatifs permettant aux filles de développer tout leur potentiel. Avec la publication du volume 2 de ses Cahiers de recherche, le FAWE reste fidèle à son objectif de diffuser les informations pertinentes essentielles à la conception et à la mise en œuvre de programmes éducatifs qui permettront non seulement aux filles d’être proactives, mais aussi de contribuer à leur développement personnel et à celui de leur communauté.

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Education de base : 14

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l’enseignement sensible au genre et le rôle des enseignants


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Education de base : l’enseignement sensible au genre et le rôle des enseignants S’appuyant sur les recherches passées, les rapports de ce volume établissent un lien entre les pratiques d’enseignement sensibles au genre et les résultats obtenus par les filles dans les enseignements primaire et secondaire. L’étude sur le Liberia souligne la corrélation entre les facteurs qui affectent le choix des femmes à devenir enseignantes, les barrières qui les en dissuadent et les environnements culturels et professionnels dans lesquels les enseignantes évoluent. En réponse à l’argument selon lequel un faible taux de scolarisation des filles implique un nombre limité de femmes disponibles pour devenir enseignantes, l’étude propose plusieurs options politiques pour accroître le nombre de femmes dans le corps enseignant. Les études sur le Malawi et le Rwanda étudient les pratiques sensibles à la dimension genre dans une sélection d’écoles afin d’examiner leur efficacité pour

maintenir les filles à l’école. Tandis que l’étude du Rwanda met en évidence la qualité et la sensibilité de l’enseignant de même que l’équilibre entre les genres dans les postes de direction comme facteurs déterminants pour la réussite des élèves, celle du Malawi insiste sur la nécessité d’adopter une approche holistique pour aborder les multiples facteurs qui font obstacle à l’éducation des filles. Le thème commun à toutes les études est le caractère central du rôle des enseignants dans la réussite des élèves. Il est donc nécessaire de doter les enseignants de méthodes d’enseignement et d’évaluation sensibles au genre pour rendre les cadres d’enseignement formels suffisamment attrayants pour les filles. Cela les encouragera à rester à l’école et pour finir à réduire l’écart entre les genres en matière de résultats.

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Université du Maryland

Le faible taux d’achèvement des filles a pour effet de diminuer le nombre de femmes s’engageant dans la profession enseignante à tous les niveaux

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Femmes enseignantes au Liberia : entre désir et réalité

RESUME Le Liberia est confronté à une situation très difficile. Suite à la fin récente des guerres civiles — la première de 1989 à 1996 et la seconde de 1999 à 2003 —, le Liberia est un pays en situation de post-conflit engagé dans un processus de redressement et de reconstruction. Près de 80 pour cent des écoles ont été détruites pendant la guerre, et les écoles existantes manquent d’infrastructures de base comme l’eau, les latrines, les livres, les tables et les chaises. En conséquence, le Liberia a un faible taux d’alphabétisation de 58 pour cent et les femmes forment la majorité de ceux qui ne savent pas lire. De plus, le Liberia a le pourcentage le plus bas de femmes enseignantes du continent : seulement 12 pour cent des enseignants dans le primaire et 5 pour cent dans le secondaire sont des femmes. Etant donné l’importance des femmes enseignantes pour la scolarisation, la réussite scolaire et la rétention des filles, dans l’éducation, le faible nombre de femmes dans l’enseignement est alarmant. Cette étude porte sur les facteurs qui affectent le choix des femmes à devenir enseignantes dans le primaire au Liberia. Elle cherche à exposer les facteurs qui expliquent la prédominance masculine dans le corps enseignant du primaire et les barrières qui dissuadent les femmes de devenir enseignantes. Cette recherche examine également l’expérience des femmes qui deviennent effectivement enseignantes et identifie les conditions de travail qui font de l’enseignement une profession difficile. Elle propose


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plusieurs options politiques pour accroître le nombre de femmes dans le corps enseignant. Les chercheurs ont mené des entretiens qualitatifs, semi-structurés, avec des responsables du ministère de l’Education (MEN), des enseignant(e)s en formation initiale et continue, des administrateurs scolaires, les administrateurs et le corps enseignant des instituts de formation des enseignants et des professionnels du développement international. Les conclusions de la recherche suggèrent que les femmes sont confrontées à plusieurs barrières culturelles pour bénéficier de l’enseignement. Plus précisément, les aprioris patrilinéaires impliquant que la fille est une ressource pour la famille de son mari, les grossesses adolescentes, les mariages précoces et la faiblesse des investissements réalisés dans le système éducatif au niveau national compromettent tous gravement la capacité des filles à aller et à rester à l’école au Liberia. Le faible taux d’achèvement des filles a pour effet de diminuer le nombre de femmes s’engageant dans la profession enseignante à tous les niveaux. Les femmes qui parviennent à terminer le cycle scolaire et choisissent de poursuivre une carrière dans l’enseignement le font parce qu’elles veulent travailler dans le domaine du savoir et le partager avec d’autres. Cependant, c’est une voie qui n’est pas sans défis. La très grande majorité des enseignantes potentielles ont des enfants et des responsabilités familiales. L’enseignement est une option non viable pour beaucoup d’entre elles en raison des coûts d’opportunités élevés associés à l’achèvement des programmes de formation des enseignants, suivi de la faiblesse du salaire et du mauvais système de paiement des salaires. Les femmes qui s’engagent dans cette profession sont confrontées à des conditions de travail difficiles : longue distance de leur domicile à l’école, mauvais logement, retards de paiement du salaire, grande taille des classes, élèves surâgés et manque de matériel pédagogique. Les femmes libériennes citent les carrières d’infirmière et du commerce comme des options plus attirantes et mieux payées. Les conditions de vie en milieu rural émergent comme un facteur dissuasif majeur : la mauvaise qualité des routes et l’insuffisance des moyens de transport, la pénurie de logements sûrs et le manque de services de garde d’enfants caractérisent la situation en milieu rural. Le statut de fonctionnaire attaché à la profession enseignante et les avantages qui lui sont associés

comme la retraite et la sécurité de l’emploi semblent en faire un choix attirant. De même, dans une société où l’on estime à 15 % le taux d’emploi dans le secteur formel, les postes d’enseignants attirent principalement les hommes. Toutefois, l’enseignement n’en demeure pas moins une carrière choisie en dernier recours en raison de la mauvaise image qui lui est associée. Les politiques et les programmes existants sont prometteurs, mais ils rencontrent des problèmes de mise en œuvre. Les récentes augmentations de salaire ne répondent toujours pas au coût de la vie et de nombreux enseignants ne touchent pas leur salaire à cause de la lenteur de la bureaucratie à les inscrire sur les registres du personnel. Les bourses d’études et les allocations octroyées aux femmes enseignantes en exercice n’arrivent pas, et quand elles arrivent, elles sont insuffisantes pour subvenir aux besoins de leur famille. Considérant les défis auxquels sont confrontées les femmes pour devenir enseignantes au Liberia, la présente recherche propose les recommandations suivantes : • Offrir des incitations aux enseignants des zones rurales ; • Accueillir des enseignantes stagiaires en modifiant les critères d’admission et en leur proposant des possibilités de logements familiaux ; • S’efforcer de rendre l’enseignement plus attractif en offrant des incitations comme des augmentations de salaire et des logements sûrs ; • Revoir complètement les programmes de formation des enseignants de façon à prendre en compte la dimension genre dans la définition des résultats de l’apprentissage ; • Créer davantage d’instituts ruraux de formation des enseignants et encourager la présence de services comme les dispensaires et les magasins à proximité ; • S’assurer que les enseignants sont inscrits dans les registres du personnel de façon à ce qu’ils touchent leur salaire en temps voulu grâce à l’emploi de technologies efficaces ; • Dispenser un enseignement sensible au genre aux filles et aux garçons ainsi qu’aux enseignants à tous les niveaux ; • Concevoir des interventions aux étapes clés du parcours scolaire des filles (transitions vers le collège et le lycée) pour accroître le groupe de candidates potentielles au métier d’enseignante. Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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Aucun de ces programmes ne sera cependant possible sans un investissement financier important. L’engagement actuel, surtout celui affecté à l’éducation des filles, est insuffisant si l’on tient compte des inégalités du système éducatif libérien et de la société dans son ensemble. 1 INTRODUCTION L’éducation est le moteur du développement social, culturel et économique d’une nation. La formule populaire « Eduquer un enfant, c’est construire une nation » renferme une grande sagesse. Depuis 1990, deux politiques mondiales sur l’éducation insistent sur l’importance de l’éducation des femmes : L’Education pour Tous (EPT), initiée à Jomtien en Thaïlande en 1990 et réaffirmée à Dakar au Sénégal en 2000, et les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) des NU également adoptés en 2000. Citons parmi les engagements de l’EPT auxquels ont adhéré les nations et les agences internationales pour le développement de faire en sorte que « d’ici 2015 tous les enfants, notamment les filles, les enfants en difficulté et ceux appartenant à des minorités ethniques, aient la possibilité d’accéder à un enseignement primaire obligatoire et gratuit de qualité et de le suivre jusqu’à son terme » et éliminer « les disparités entre les sexes dans l'enseignement primaire et secondaire d'ici à 2015, en veillant notamment à assurer aux filles un accès équitable et sans restriction à une éducation de base de qualité avec les mêmes chances de réussite » (UNESCO, 2000, pp. 15-16). Ces objectifs sont réitérés dans les OMD. Toutefois, pour accroître l’accès des filles et des femmes à l’enseignement et d’en améliorer la qualité, élargir le champ des carrières à leur disposition et promouvoir des femmes à des postes de leadership national, les femmes et les filles ont besoin du modèle, de l’encouragement et de la compréhension d’autres femmes. Des études empiriques le confirment en montrant que plus la présence de femmes enseignantes est élevée, plus le taux de scolarisation des filles dans l’enseignement primaire est élevé (Haugen et al., 2011). Il est par conséquent vital que les femmes soient suffisamment représentées dans l’enseignement, parmi les enseignants et les administrateurs, et qu’elles considèrent la profession enseignante comme une carrière prometteuse et prestigieuse.

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1.1 Le contexte du Liberia Le Liberia a récemment mis fin à une guerre civile de 14 ans qui a eu un impact dévastateur sur le pays. En tant que pays en situation de post-conflit engagé dans un processus de redressement et de reconstruction, le Liberia est confronté à un taux d’analphabétisme élevé. 58 pour cent seulement de la population sait lire et écrire et la majorité des analphabètes sont des femmes. La participation à l’éducation de base est faible au regard de la plupart des critères ; si 91 pour cent des enfants, tous âges confondus, ont accès à l’enseignement primaire, seuls 58 pour cent le mènent à son terme (ISU, 2010). Bien que le Liberia progresse vers l’égalité des droits entre les hommes et les femmes, tous les groupes endogènes sont patrilinéaires : cela implique qu’une femme doit emménager dans la famille de son mari après le mariage, la rejoindre et quitter la sienne. De ce fait, les filles ne sont pas considérées comme une future ressource économique pour leur propre famille. Les croyances patriarcales établissant des différences profondes entre les femmes et les hommes produisent une forte division du travail. Les femmes ont des rôles domestiques et maternels rigides et les enfants sont vus comme des travailleurs potentiels très désirés et valorisés. Le patriarcat est omniprésent et touche tous les groupes religieux, linguistiques et ethniques (Dahn, 2008; Greenberg, 2009). Dans presque tous les aspects de leur vie, les femmes souffrent de manière disproportionnée par rapport aux hommes en matière de santé, d’enseignement, de situation économique et culturelle. La structure sociale et administrative du Liberia, et donc le pouvoir officiel, est toujours aux mains des chefs traditionnels (à tous les niveaux, du village/ville au district). La politique nationale sur l’éducation des filles (MEN/UNICEF, 2005) note que « la chefferie traditionnelle est actuellement considérée comme le domaine des hommes et il est difficile aux femmes de briser la chaîne. C’est ainsi parce que les normes et les valeurs traditionnelles déterminent le statut des femmes au sein de la structure sociale du gouvernement tribal » (p. 18). Il existe une proposition faisant l’objet d’un débat qui vise à introduire un quota minimum de 13 pour cent de femmes en tant que représentantes à l’Assemblée législative. Une personne interrogée a fait remarquer qu’en raison de la culture locale, «


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les hommes n’encouragent pas les femmes [à faire des études] parce qu’ils n’apprécient pas que leurs épouses soient comme eux. Les hommes veulent être les maîtres ». La polygamie n’est pas illégale au Liberia. Elle est toujours courante dans les zones rurales et cantonne les femmes à s’occuper de leur maison et à élever les enfants. D’après les statistiques nationales, seulement 7 pour cent des hommes et 6 pour cent des femmes appartiennent à un mariage polygame (LIBSGIS, 2009, p. A 4-69). Ces chiffres contrastent avec les propos des personnes interrogées qui ont noté qu’environ 20 à 30 pour cent des hommes pratiquent la polygamie. La plupart des filles se marieraient vers l’âge de 20 ans et beaucoup d’entre elles à partir de 13 ans. C’est indépendant de la religion et se produit plus fréquemment dans les zones rurales. L’enquête sur la démographie et la santé au Liberia (République du Liberia, 2008, p. 53) a révélé que 78 pour cent des femmes ont déjà un enfant quand elles atteignent 2024 ans. Ainsi, au moment où les femmes choisissent d’entrer dans l’enseignement postsecondaire, la plupart d’entre elles sont soit mariées et/ou ont des enfants. Une femme interrogée, spécialiste africaine du genre, a fait remarquer que le concept de mariage précoce est mieux décrit comme « le début précoce de l’activité sexuelle et de l’accouchement », plutôt que comme un simple changement d’état civil. Les pratiques de la polygamie et du mariage précoce obligent les jeunes femmes à rejoindre la famille et la maison de leur mari, leur imposant de nouvelles exigences de travail et très probablement, l’interruption de leurs études. Le début précoce de l’activité sexuelle et le taux de grossesses adolescentes sont plus élevés dans les zones rurales ce qui compromet gravement l’accès des filles à l’enseignement au-delà du primaire et réduit beaucoup leurs chances dans la vie. De même, la violence sexuelle et fondée sur le genre sévit et certaines pensent que les cas de viol ont augmenté depuis la guerre civile. Les femmes des zones rurales sont plus défavorisées que leurs homologues des villes : jusqu’à 70 pour cent sont susceptibles de ne jamais avoir été scolarisées dans les zones rurales reculées (Greenberg, 2009). Le pays est toujours engagé dans le processus de reconstruction scolaire, car pendant la guerre civile presque 80 pour cent des 2.400 écoles existantes ont été détruites (Shriberg, 2008). Les écoles manquent

d’infrastructures de base comme l’eau et les latrines, les tables, les chaises et les manuels (MEN, 2007). Les responsables gouvernementaux disent ignorer le nombre exact d’écoles et d’enseignants, car « les écoles et les enseignants fantômes sont monnaie courante. Pour y remédier, il existe maintenant des initiatives visant à offrir aux directeurs une formation en matière de gestion des registres. Le gouvernement, sur ordre exécutif de la présidente Sirleaf, a introduit l’enseignement primaire gratuit et obligatoire en 2007 comme moyen de diminuer le taux élevé d’abandon des filles. Ainsi, le Liberia a gagné en 2010 le Prix OMD-3 des NU pour ses efforts visant à accroître la scolarisation des filles dans les enseignements primaire et secondaire et le nombre de femmes ayant un mandat politique (Women’s Net, 2010). Sur le plan économique, aujourd’hui, le Liberia appartient à la catégorie des pays très endettés et est donc qualifié pour obtenir une réduction importante de sa dette extérieure. Par ailleurs, dans le cadre de ses efforts pour éviter de s’endetter à nouveau, le gouvernement a décidé de ne pas demander de prêt extérieur dépassant 3 pour cent de son PIB. Ce raisonnement, s’il se justifie dans une perspective financière, signifie également que le pays ne fait pas d’investissements significatifs dans certains domaines sociaux, notamment l’éducation. Etant donné la nature profondément patriarcale de la société libérienne à laquelle s’ajoute le faible niveau d’investissement dans l’éducation, le problème de la sous-scolarisation des filles et du nombre élevé d’abandons est susceptible de persister. 1.2 L’énoncé du problème A l’heure actuelle, le Liberia a plus de 10 programmes de formation des enseignants, dont trois sont résidentiels et situés dans des zones rurales. Ils sont sous-utilisés en raison de leur incapacité à attirer des diplômés du lycée qualifiés, en particulier des femmes, qui sont sous-représentées pour les raisons que nous évoquons dans ce rapport. De plus, un seul des instituts ruraux de formation des enseignants (RTTI) dispose d’équipements informatiques qui fonctionnent et d’une connexion à Internet. Les ressources des bibliothèques sont extrêmement maigres, tout comme les manuels, les ressources pédagogiques, l’équipement et les fournitures (QED Group, 2009). Ainsi, même le processus de formation pour acquérir les qualifications d’enseignant est compliqué. Il faut avoir de fortes dispositions personnelles à l’égard de cette profession pour choisir l’enseignement. Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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Un problème flagrant du système éducatif libérien est le manque de femmes enseignantes dans les écoles. Si de nombreux pays ont un grand nombre de femmes dans l’enseignement primaire, elles sont une minorité dans plus de la moitié des pays africains (ISU, 2010). Le Liberia a le pourcentage le plus faible, seulement 12 pour cent de tous les enseignants du primaire. Tandis que les femmes représentent entre un quart et la moitié des enseignants des collèges et des lycées de nombreux pays africains, seuls 5 pour cent des enseignants des écoles secondaires du Liberia sont des femmes. Cela signifie que la plupart des écoles secondaires du Liberia n’ont pas de femmes enseignantes et par voie de conséquence, que les filles n’ont pas de modèles à suivre. Il est donc important de comprendre ce qui contribue au faible nombre de femmes enseignantes au Liberia. Appuyée par une bourse de recherche du FAWE, une étude a été menée sur les facteurs qui affectent le choix des femmes susceptibles d’envisager de s’engager dans la profession enseignante, en accordant une attention particulière à l’enseignement primaire. La recherche a cherché à répondre aux questions suivantes : • Quels sont les principaux facteurs expliquant la prédominance des hommes dans le corps enseignant du primaire ? • Quels sont les obstacles qui dissuadent les femmes de devenir enseignantes ? • Quelles sont les options politiques pour accroître le nombre de femmes enseignantes dans le corps enseignant ? 2. CONCEPTION DE LA RECHERCHE 2.1 Méthodologie La recherche a employé les méthodes qualitatives. Conformément à l’avertissement de Creswell (2007) selon lequel la réalité est subjective et multiple, nous avons essayé de rassembler les points de vue des multiples acteurs du système éducatif : responsables politiques, formateurs impliqués dans la préparation des enseignants, enseignants en exercice. Dans un effort pour « comprendre un monde complexe d’expériences vécues du point de vue de ceux qui le vivent » (Mertens, 2005, p. 13), l’échantillon des répondant(e)s a englobé

des enseignant(e) en service, de futurs enseignants en formation, des administrateurs d’écoles et d’instituts de formation des enseignants et des fonctionnaires du MEN. Pour comprendre la situation réelle des enseignants dans les écoles, nous avons visité cinq écoles polycycliques élémentaires/secondaires (deux urbaines, une périurbaine et deux rurales) et interrogé leur directeur et leurs enseignants en mettant l’accent sur les femmes enseignantes. Nous avons interrogé des responsables du MEN dans les domaines de l’enseignement primaire et secondaire, de la formation des enseignants et des statistiques ainsi que des administrateurs, le corps enseignant et de futurs enseignant(e)s des programmes de formation, à la fois dans les environnements urbains (Université du Liberia, Université Cuttington et Ecole polytechnique Stella Maris) et ruraux (Instituts ruraux de formation des enseignants). Pour obtenir une meilleure compréhension de contexte éducatif libérien, nous avons eu des conversations avec le personnel responsable de trois projets locaux majeurs visant à aider au développement de l’éducation au Liberia : le Programme de formation des enseignants du Liberia (LTTP), Opportunité des filles d’accéder à l’apprentissage (GOAL) et Compétences scolaires de base pour les jeunes Libériens (CESLY). En outre, nous avons eu des conversations informelles avec plusieurs étudiant(e)s.2 Nous avons aussi eu des entretiens avec des membres du Syndicat des enseignants du Liberia, plusieurs chercheurs dont les projets portaient sur les enseignants, des personnes travaillant dans des organisations non gouvernementales sur l’éducation et un volontaire du Corps de la paix nous a proposé de nous offrir une perspective extérieure sur la situation de l’éducation au Liberia. Vu l’axe de notre étude, nous avons interrogé plus de femmes que d’hommes. Au total, 69 sujets ont participé, parmi lesquels 46 femmes et 23 hommes. La plupart des entretiens ont été menés individuellement, mais il y a eu plusieurs entretiens de groupe. Il s’agissait d’entretiens semi-structurés qui duraient chacun environ une heure. Tous les entretiens étaient consignés manuellement,3 le plus souvent par au moins deux chercheur(se)s. Lors de la collecte de données, les chercheur(se)s ont demandé les raisons qui avaient motivé le choix du métier d’enseignant ainsi que

Nous sommes très reconnaissants à notre coordinateur logistique, Davidson Efetobore, de ses grands efforts pour obtenir les rendez-vous. La tentative d’utiliser un magnétophone s’est avérée peu pratique en raison des bruits environnants et du fait que l’accent en anglais des répondant(e)s exigeait parfois de leur demander de répéter, ce qui rendait préférable de consigner manuellement les réponses, plutôt que de dépendre plus tard d’un enregistrement. 2

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l’expérience des enseignant(e)s en service. Ils/Elles ont aussi cherché à dégager des perspectives ayant trait à ces sujets sur les plans personnel, communautaire, institutionnel et national. Ils/elles ont posé plusieurs questions de clarification pour obtenir des réponses plus approfondies sur plusieurs sujets précis. Il faut reconnaître une limite à l’étude liée aux différences de niveaux de compétences en anglais. La variété des accents des répondant(e)s peut avoir affecté la façon dont certaines réponses ont été interprétées ; de même, l’accent des chercheur(se) peut aussi avoir affecté la façon dont certaines questions ont été comprises. Les données ont été recoupées avec de multiples sources d’information. Les données des entretiens ont été complétées par l’examen exhaustif des principaux documents et rapports, allant de ceux produits par le MEN aux différents rapports et évaluations sur les projets d’aide à l’éducation en cours au Liberia. 2.2 Cadre conceptuel Cette étude porte sur les facteurs sociaux, culturels et économiques qui influent sur le choix d’une carrière. Son cadre conceptuel (exposé dans le schéma 1) est aussi affecté par l’inclination et l’intérêt personnels (Denzler et Wolter, 2009). Pour comprendre les raisons de la faible présence de femmes enseignantes au Liberia, nous utilisons la dimension genre qui met en évidence l’interaction entre les sphères privée (la maison) et publique. Elle reconnaît que les femmes, en raison des valeurs sociétales dominantes, doivent considérer comme les priorités absolues de leurs vies personnelle et professionnelle leurs responsabilités d’épouse, de mère et celles à l’égard de leurs enfants, tandis que ces préoccupations sont minimes pour les hommes. L’analyse des données a suivi les catégories identifiées dans le cadre conceptuel, mais aussi « les catégories d’analyse émergeant des données au fur et à mesure de l’avancée de l’étude » (Mertens, 2005, p. 230). A la suite des entretiens, les détails et les thèmes émergents ont été discutés en profondeur, tout en tenant compte de la parole des femmes enseignantes et en accordant une attention spéciale aux éléments communs soustendant leurs expériences. Il est admis que les chercheur(se)s ont apporté leurs propres valeurs et préjugés à la recherche dans la mesure où ils/elles ont tous/toutes mené et pratiqué l’enseignement et la recherche liés au genre et ont des parcours individuels en Amérique latine, en Asie, en Afrique et aux Etats-

Unis. Cependant, ils/elles ont essayé de réduire l’impact de leurs préjugés potentiels par une réflexion introspective et en étant conscient(e)s de leurs propres aprioris. Ils/elles ont aussi essayé de susciter la confiance des personnes interrogées en expliquant le but et les implications politiques de l’étude et ont jugé les réponses honnêtes et sincères. L’étude procède en plusieurs sections : le contexte de l’éducation pour les filles et les femmes, le processus des femmes qui deviennent enseignantes, la réalité de l’enseignement, les structures de l’offre de formation façonnant le bassin de femmes enseignantes et les politiques actuelles relatives au genre et à l’éducation des filles. L’étude propose ensuite certaines conclusions et recommandations à la fois pour la politique et l’approfondissement de la recherche. Graphique 1.1 : Cadre conceptuel l’enseignement comme carrière Normes culturelles Favorables aux femmes Nature attentionnée Compatibilité de l’emploi avec la famille Profession propre/à faible risque Défavorables aux femmes Ecoles non sûres Ecole éloignées en zones rurales Manque de modèle

Choix

de

Conditions de travail Taille de la classe Satisfaction professionnelle Environnement scolaire (sécurité, harcèlement sexuel, installations en zones rurales) Pratiques de promotion et d’évaluation Incitations à la rétention de l’emploi

Prédisposition individuelle

Offre éducative Bassin de diplômées du lycée Général Bassin de diplômées du lycée Rural Réussite scolaire

Sélection de l’enseignement

Rétention des enseignants

Caractéristiques professionnelles Prestige/statut de l’emploi Stabilité de l’emploi Prestations (vacances/santé/retraite) Protection syndicale Politiques de promotion Rémunération financière Taille de la classe

Facteurs institutionnels Recrutement des instituts de FE Critères d’admission (résultats des examens) Disponibilité d’instituts de FE Environnement institutionnel de la FE (harcèlement sexuel, incitations financières pour les étudiantes) Curriculum sensible au genre

3. L’OFFRE DES FUTURS ENSEIGNANTS 3.1 Achèvement Un facteur majeur de la participation limitée des femmes en tant qu’enseignantes aux niveaux primaire, secondaire et supérieur est que peu de filles obtiennent

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leur diplôme de fin d’études du lycée au Liberia.4 Le recensement récent de l’éducation (MEN, 2010) a mis en évidence la baisse significative du nombre de filles à l’école au fur et à mesure qu’elles progressent vers les niveaux supérieurs (graphique 1.2) de l’enseignement, alors que la condition préalable pour accéder aux programmes de formation des enseignants à l’université, dans les écoles supérieures ou les RTTI est de terminer l’école secondaire.

Les données du graphique 1.2 ne sont pas longitudinales, mais transversales. Bien que les statistiques n’observent pas le même groupe d’élèves tout au long de leur scolarité, certaines observations sont justifiées. Premièrement, les statistiques montrent une baisse marquée de la participation à mesure que les élèves passent aux niveaux supérieurs de l’enseignement. Deuxièmement, le taux net de scolarisation des filles dans les écoles primaires n’est que de 42 pour cent à l’âge stipulé à ce niveau, ce qui reflète le fait que près Graphique 1.2 : Parcours scolaire des filles de l’école de 60 pour cent les filles d’âge primaire n’ont pas accès primaire au lycée au Liberia 2008-2009 à l’enseignement de base. Troisièmement, bien que 76 pour cent des filles inscrites dans le primaire l’achèvent, le nombre de celles qui s’inscrivent au collège diminue considérablement de presque trois quarts, ce qui suggère Nombre d’inscrites à l’école primaire que c’est au moment du passage à l’adolescence que 281.236 de nombreuses filles rencontrent des problèmes pour continuer leur scolarité. Malgré l’accès limité au collège, le taux brut d’achèvement à ce niveau est modeste. Il n’atteint que 36 pour cent. Une autre baisse énorme intervient quand de nombreuses filles ne s’inscrivent pas au lycée, et bien plus encore, quand elles échouent Taux d’achèvement à terminer ce niveau important. Quatrièmement, si 25 76 % pour cent seulement des filles inscrites au lycée le 213.739 terminent (d’après les statistiques officielles), il ne reste que 6.837 jeunes femmes disponibles pour une carrière professionnelle. En d’autres termes, même si la moitié des filles choisissaient la carrière de l’enseignement, il ne resterait au maximum que 3.500 filles disponibles chaque année — une offre très limitée par rapport Nombre d’inscrites au collège aux besoins nationaux encore insatisfaits. Cela laisse 51.067 clairement penser qu’il est impératif de travailler à accroître le nombre de femmes diplômées du lycée si l’on envisage de recruter davantage de femmes dans la profession enseignante. Taux d’achèvement 36 % 18.384

Nombre d’inscrites au lycée 27.350

Taux d’achèvement 25 % 6.837

Dans l’ensemble, le taux de participation du Liberia est faible, filles et garçons confondus. Cela signifie que de nombreux jeunes n’ont pas accès à la lecture et à l’écriture ainsi qu’aux connaissances systématiques transmises en principe par l’éducation formelle. Les taux de scolarisation varient considérablement selon les comtés. Montserrado, le comté le plus développé et celui dans lequel se trouve Monrovia, a le taux de scolarisation le plus élevé du pays. Le taux de scolarisation des filles dans l’enseignement primaire augmente plus rapidement que les années précédentes.

Source : adapté du MEN (2010). 4 Contrairement aux commentaires de plusieurs répondant(e)s, la participation des filles à l’école n’était pas meilleure avant la guerre civile. Les données de 1989 montraient un taux de scolarisation des filles de 38 pour cent en primaire, tandis qu’il était de 46 pour cent en 2001. Au niveau du lycée, les filles représentaient 37 pour cent des élèves inscrits en 1989 et 42 pour cent en 2001 (Raynor, 2011).

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Il est cependant légèrement plus faible que celui des garçons, ce qui laisse penser que l’écart entre les genres n’est pas près de se résorber dans un avenir proche. A l’heure actuelle, l’indice de parité entre les genres (qui compare la proportion de filles par rapport aux garçons) est de 0,88 à l’école primaire, 0,79 au collège et 0,75 au lycée (MEN, 2010). Dans un effort pour accroître le nombre d’élèves plus âgés bénéficiant de l’enseignement, le MEN a mis en place le Programme d’apprentissage accéléré (ALP) qui propose des cours du soir aux jeunes et aux adultes désirant suivre l’enseignement primaire et ramène le curriculum de six à trois ans. Toutefois, un nombre relativement faible d’individus, environ 68.613, participent à l’ALP (MEN, 2010) ; 15 pour cent d’entre eux seulement sont des femmes. Ce faible taux est un sujet de préoccupation si l’on considère que les femmes représentent 61 pour cent de la population analphabète au Liberia. Il est probable qu’avoir des enfants et assumer les responsabilités domestiques les privent de la possibilité de reprendre des études. 3.1.1 Pauvreté La pauvreté affecte la participation des filles à l’école, car les parents comptent sur la contribution de leurs filles à la productivité et à la gestion de la maison. Elle peut avoir de graves et multiples répercussions, surtout pour les femmes. Il arrive par exemple que certaines filles qui se rendent compte qu’elles sont incapables de nourrir leur famille l’abandonnent et qu’elles s’engagent dans une relation un homme qui peut les entretenir et qui paie parfois leurs frais scolaires. Ces arrangements comportent des risques de grossesse qui abrègent leurs études. D’autre part, les filles pauvres ont souvent des parents sans instruction qui ne comprennent pas l’importance de l’école et, selon les témoignages, feraient pression sur elles pour avoir des enfants très jeunes. Troisièmement, les élèves des familles pauvres arrivent à l’école en ayant faim et sont souvent incapables de se concentrer ; elles prennent du retard sur leurs camarades de classe et finissent par abandonner l’école. Selon une responsable du MEN « le pays est trois plus dangereux qu’avant la guerre ». D’après elle, les cas de viol et de harcèlement sexuel ont grimpé en flèche, y compris une énorme hausse de la prostitution. La peur de ce genre de scénario amène de nombreuses familles à redouter d’envoyer leurs enfants à l’école.

3.1.2 Langue Nous avons constaté des variations linguistiques importantes pendant notre travail sur le terrain. Nous ne savons pas clairement si le fait que les langues locales ne sont pas utilisées en classe affecte la scolarisation et les résultats scolaires des élèves, en particulier ceux des zones rurales, mais cela pourrait avoir un impact. Etant donné que le pays compte 16 groupes ethniques, les habitants du Liberia parlent différentes langues maternelles. Plusieurs répondant(e)s ont trouvé qu’après la guerre civile la plupart des gens parlaient l’anglais et que les différences entre langues maternelles n’étaient pas un problème. Néanmoins, de nombreuses personnes communiquent dans leur langue maternelle et de nombreux élèves ne parlent pas un anglais standard. Il y a quelques dizaines d’années, le gouvernement du Liberia avait demandé à l’UNESCO de mener une étude sur les langues du Liberia (Fafunwa, 1980). Le rapport a approuvé la position de l’UNESCO selon laquelle « le meilleur médium d’instruction pour l’enfant est la langue maternelle » et a aussi fait remarquer que puisque les langues maternelles (excepté le Vai et le Bassa) n’avaient pas de formes écrites, elles devaient être transcrites en alphabet phonétique international. A l’heure actuelle, la question des langues locales n’est pas prise en compte par les responsables du MEN, ni par les instituts de formation des enseignants. A ce sujet, un directeur d’école a noté que « les gens sont bilingues dans leur propre langue et en anglais. Il n’y a pas de langue commune au Liberia ; nous avons essayé, mais chaque tribu veut être supérieure. Là où j’ai été à l’école primaire, très peu d’enseignants parlaient notre dialecte. Apprendre l’anglais a été difficile pour nous. La langue est un problème majeur dans l’arrière-pays ». 3.1.3 Culture La pratique traditionnelle appelée « l’école de brousse » ou « l’école de la société Sande » agit comme un facteur dissuasif supplémentaire à l’éducation des filles. Les garçons fréquentent une école de brousse séparée (dans le cadre de la société Pore) où ils apprennent le leadership et des compétences pratiques. Comme les sociétés Sande et Pore sont des sociétés secrètes, le nombre des filles inscrites n’est pas entièrement connu. Les écoles de la société Sande offrent un enseignement non formel aux filles sur les questions concernant l’histoire et la généalogie, la vie de famille et les relations sexuelles avec les époux ainsi que les compétences domestiques (cuisine, enfants) et Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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les attributs sociaux (chansons, danses). La fonction centrale des écoles de brousse est cependant de pratiquer les mutilations génitales féminines (MGF) qui désignent au Liberia l’excision du clitoris et des petites lèvres (OMS, 2010). La pertinence de cette pratique culturelle pour notre étude sur la participation des filles à l’éducation est que comme les écoles de brousse sont un rite important de passage de l’enfance à l’âge adulte, de nombreuses filles ne retournent pas régulièrement à l’école et sont en fait demandées peu après en mariage — un mariage que beaucoup ont décrit sans le consentement des filles et même contre leur gré (voir aussi Pusah-Twalla, 2008). Fréquenter l’école de brousse est une pratique culturelle qui se produit quelle que soit la religion et qui est plus forte dans les zones rurales. Des informateurs menant des recherches au Liberia, notamment la production d’une cartographie détaillée des élèves, enseignants, écoles, communautés de trois comtés du Liberia, ont déclaré que dans une communauté donnée, sur les 139 filles envoyées à l’école de brousse, une seule est retournée à l’école formelle. Nyanseor et Coleman (2006) ont trouvé que les pratiques de MGF — considérées par la plupart des institutions internationales comme une grave violation des droits de l’homme 5 — sont d’actualité dans 7 des 16 groupes ethniques du Liberia (ils incluent les Kpelle — la plus grande tribu représentant 20 pour cent de la population nationale — les Bassa, les Vai, les Dan, les Ma, les Dei et les Gola). Une source (Département d’Etat américain, n.d.) fait observer que les MGF ont diminué après la guerre civile et sont sans doute pratiquées par 10 pour cent de la population aujourd’hui. D’autre part, les MGF ne sont pas illégales au Liberia. Dans les entretiens menés, plusieurs répondant(e)s ont identifié les écoles de brousse comme le principal facteur affectant la participation des filles rurales dans les écoles formelles. L’une des personnes interrogées a déclaré en fait que « même les gens ayant des diplômes comme le mastère ou le doctorat emmènent leurs enfants à l’école de brousse. Tout le monde doit aller à l’école de brousse — sinon, vous ne faites pas partie de la communauté ». De manière générale, les écoles traditionnelles étaient soutenues. Selon un responsable

du MEN, les écoles de brousse sont approuvées par le ministère parce que « les filles y apprennent bien : tenir une maison, les valeurs culturelles, le respect des anciens, la médecine traditionnelle. Le seul problème est l’excision féminine ». Le directeur de l’une des écoles primaires a déclaré : « Les écoles de brousse développent le corps et l’esprit des jeunes. La plupart des parents connaissent l’importance de l’éducation, mais ils ne veulent pas négliger leur culture. Il est important de transmettre nos traditions aux jeunes ». Pour sa part, la Politique nationale sur l’éducation des filles (MEN/UNICEF, 2005), exposée plus en détail ciaprès, stipule que « la société Sande est un système d’apprentissage culturel. Elle accorde aux femmes un pouvoir et une autorité dans une structure séparée de celle des hommes » (p. 18). Le plan observe que « les normes traditionnelles rendent les choses difficiles aux filles qui aspirent à des postes à responsabilité dans le gouvernement », mais il ne fait aucune référence aux MGF, indiquant seulement que « il y a toujours eu un conflit de temps et de calendrier entre l’enseignement traditionnel (Sande) et l’enseignement régulier occidental du ministère de l’Education » (p. 18, accent ajouté). Paradoxalement, bien que les normes traditionnelles encouragent les relations sexuelles précoces et favorisent l’identité des femmes comme étroitement liée à la maternité, les écoles du Liberia n’abordent pas l’éducation sexuelle dans leur programme. Le sexe est un sujet tabou et il est très difficile d’en discuter avec les parents, surtout dans les zones rurales. Plusieurs formateurs du Liberia ont déclaré que certaines filles ne connaissaient même pas le cycle menstruel et encore moins leur corps. Pour contrôler le VIH et le sida, les autorités éducatives proposent des cours sur ce sujet, mais seulement aux enseignants, qui sont ensuite censés aborder la question avec les élèves de niveau 6. Les programmes scolaires couvrent les questions relatives à l’hygiène et à la santé, mais les questions liées aux grossesses adolescentes, aux agressions sexuelles et à la pression des pairs d’avoir des rapports sexuels sont éludées. Parmi les enseignant(e)s interrogé(e)s, seul un a rapporté avoir suivi un atelier sur la formation sensible au genre.

5 Malheureusement, la Convention des NU sur les droits de l’enfant (1989) est ambiguë sur les MGF. Le paragraphe 3 de l’article 24 stipule : « Les Etats parties prennent toutes les mesures efficaces appropriées en vue d’abolir les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé de l’enfant ». Cependant, le paragraphe 1 de l’article 29 appelle à : « inculquer à l’enfant le respect de ses parents, de son identité, de sa langue et de ses valeurs culturelles, ainsi que le respect des valeurs nationales du pays dans lequel il vit, du pays duquel il peut être originaire et des civilisations différentes de la sienne ». Le mouvement des femmes à travers le monde, en revanche, est unanime à rejeter les MGF comme des pratiques préjudiciables à la santé et dégradantes.

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Le cadre scolaire permet aux filles et aux garçons d’échapper aux tâches domestiques et d’acquérir une plus grande compréhension du monde grâce au contenu du programme scolaire. Néanmoins, plusieurs répondantes ont signalé que le harcèlement sexuel des élèves filles par les enseignants et leurs pairs est fréquent et que les pratiques comme « le sexe pour une note » (les enseignants masculins demandent des faveurs sexuelles en échange de bonnes notes) et les « honoraires flexibles » (contributions pécuniaires qui permettent aux filles et aux garçons d’acheter de bonnes notes) font partie de la culture scolaire. « Les honoraires flexibles » semblent être un problème courant, car les diplômés des programmes de formation continue des enseignants sont souvent sanctionnés par les autorités éducatives pour cette pratique. 3.2 Formation des enseignants Pour accroître le nombre d’enseignants, le MEN (avec l’appui de l’USAID) propose une formation continue aux enseignants dans de nombreux comtés et revitalise la formation initiale des enseignants par le biais des RTTI. L’effort pour accroître le nombre d’enseignants dans le primaire s’accompagne de la prise en charge de l’ensemble des frais de pension et de scolarité ainsi que d’une allocation de 88 US$ par semestre pour couvrir les frais supplémentaires comme l’hygiène personnelle et le transport pour retourner chez eux. De plus, depuis octobre 2010, le MEN offre une allocation mensuelle de 30 US$ à ceux qui s’inscrivent dans les programmes de formation des enseignants au niveau universitaire, même si les paiements sont effectués en retard. Toutefois, l’écart entre les sexes se résorbe lentement. A l’heure actuelle, l’Université du Liberia rapporte avoir 139 femmes et 11 hommes inscrits dans le département de l’enseignement primaire et 550 hommes et 82 femmes dans le département de l’enseignement secondaire. Cela constitue un progrès dans la formation des femmes enseignantes, ce qui pourrait indiquer que les incitations financières sont efficaces. Par ailleurs, de récents programmes de formation continue dans le comté de Grand Cape indiquent que sur les 500 titulaires du certificat C, cinq seulement étaient des femmes. Dans le cadre d’un autre effort visant à offrir une formation en leadership éducatif, sur les 15 femmes recrutées une seule a participé à l’atelier, car les autres étaient dans l’incapacité de laisser leurs enfants à la maison. Les données des RTTI montrent un

schéma similaire. Le nombre total des inscriptions dans les 3 RTTI en 2010 était de 434 étudiants masculins et 44 étudiantes féminines. Etant donné que les RTTI disposent d’une capacité combinée de 700 personnes, ils sont considérablement sous-exploités (QED Group, 2009). Pour accroître le recrutement des femmes, le syndicat des enseignants propose que des diplômées des RTTI soient autorisées à aller à l’université pour poursuivre leurs études à condition qu’elles réussissent l’examen d’entrée. Bien qu’il ne faille qu’une année pour obtenir le certificat C dans les RTTI, certaines femmes continuent à rencontrer des difficultés auxquelles il faut remédier. On cite souvent la politique qui interdit aux mères d’amener leurs enfants et le manque de services de garde d’enfants dans ces instituts comme facteurs dissuadant les femmes de s’y inscrire. Cette politique n’a aucune justification officielle. Les problèmes relatifs au traitement des enseignants en formation initiale par le MEN affectent également la façon dont les gens réagissent à un emploi éventuel en tant qu’enseignant. L’évaluation du programme de formation des enseignants parrainé par l’USAID au Liberia a révélé qu’aucun des diplômé(e)s de la première cohorte du programme de formation continue n’a été officiellement engagé par le MEN (QED Group, 2009). Un autre problème concerne les allocations des enseignants en formation initiale que nombre d’entre eux n’ont pas encore reçues. En fait, de nombreux membres du corps enseignant des RTTI ne sont pas encore inscrits sur les registres du personnel du MEN et doivent se rendre à Monrovia pour toucher leur salaire. Pour entrer à l’institut de formation des enseignants ou à l’université, les étudiants doivent passer l’examen du Conseil des examens d’Afrique occidentale (WAEC). Cet examen, mis en place par le gouvernement colonial britannique en 1952, cherche à garantir des normes de qualité. 6 Le taux de réussite le plus récent du Liberia était de 67 pour cent. 37 pour cent seulement de ceux qui l’ont passé étaient des filles, mais une proportion similaire de ceux qui l’ont réussi était également des filles (Raynor, 2011). Etant donné que les données ne sont ventilées ni par milieu socioéconomique, ni par zones urbaines/rurales, on ne sait pas si les frais

6 Les examens du WAEC se tiennent dans les cinq pays anglophones de l’Afrique de l’Ouest – la Gambie, le Ghana, le Liberia, le Nigeria et la Sierra Leone. Les frais d’inscription à l’examen varient de 1200 L$ pour huit matières à 1500 L$ pour neuf matières.

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d’examen sont un obstacle pour les jeunes femmes — surtout celles des zones rurales — qui cherchent à entrer dans l’enseignement supérieur. Les membres du corps enseignant interrogés dans plusieurs instituts de formation des enseignants et universités ont jugé que plusieurs points de l’examen correspondaient rarement au curriculum auquel les étudiants avaient été exposés à l’école secondaire. Plusieurs répondant(e)s avaient le sentiment que les exigences du WAEC portaient préjudice aux femmes, surtout celles issues de familles pauvres, qui cherchaient à entrer dans la profession enseignante en raison de leur exposition à des écoles de mauvaise qualité et aux frais nécessaires à l’examen. Il faut souligner que bien que les hommes représentent l’immense majorité des enseignants à tous les niveaux de l’enseignement au Liberia, l’enseignement est rarement le choix professionnel préféré. Pendant l’année universitaire 2000, l’Ecole polytechnique Stella Maris, un établissement d’enseignement supérieur catholique prestigieux, n’a eu aucun candidat à son programme de formation des enseignants. De plus, l’attraction limitée — ou les possibilités — de l’enseignement pour les femmes se poursuit. Au moment de la visite des chercheur(se)s au RTTI, 27 sur les 172 étudiants étaient des femmes. Une récente classe de diplômés de 179 titulaires de licence en sciences de l’éducation à l’Université Cuttington, une importante université privée dans le nord du pays, ne comptait que neuf femmes. De son côté, le RTTI Webbo a montré quelques signes de progrès avec 92 hommes et 20 femmes dans sa classe de diplômés de 2011. Non seulement, peu de femmes obtiennent un diplôme d’enseignante, mais le contenu de leur formation ne les préparent pas à aborder les inégalités entre les genres et les questions traitant du genre dans la société. Les conversations avec les formateurs universitaires indiquent que même l’éducation sexuelle ne fait pas partie du programme de formation des enseignants. A l’Université du Liberia, l’éducation sexuelle est couverte par l’un des cours portant principalement sur la santé. Le programme n’inclut pas de cours sur les questions relatives au genre bien que les membres du corps enseignant soient pleinement conscients des difficultés auxquelles les femmes sont confrontées dans la société libérienne et de la façon dont les normes traditionnelles renforcent les relations très inégales entre les hommes et les femmes.

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4. DEVENIR ENSEIGNANT Les femmes libériennes choisissent de devenir enseignantes pour des raisons similaires à celles d’autres régions du monde : l’idée de travailler dans le domaine du savoir et de le partager avec d’autres est importante. Cela est revenu à de multiples reprises dans nos entretiens avec les enseignantes. On dit que « Les enseignants forment les dirigeants ». La phrase « Avoir la passion de l’enseignement » a été citée fréquemment par les futurs(e) enseignant(e)s. Un autre a exprimé le souhait de « faire une contribution pour la jeune génération ». S’il existe des différences et des similarités entre les hommes et les femmes sur les raisons d’intégrer la profession enseignante et les facteurs qui façonnent leur expérience de devenir enseignant, la « passion » mentionnée par de nombreuses personnes interrogées n’est pas spécifique au genre et est une motivation courante rapportée par les administrateurs, le corps enseignant et les étudiants des programmes d’enseignement. 4.1 Service public Les futurs enseignants ont fait remarquer que les enseignants des écoles publiques sont aussi des fonctionnaires, ce qui est une bonne raison de choisir l’enseignement comme carrière. Il y a des avantages à être enseignant du système éducatif public : la sécurité de l’emploi, la participation à une communauté visible au niveau national et une retraite garantie par le gouvernement (Sperandio et Kagoda, 2010, cité dans Molyneaux, 2011). On a observé que c’est précisément l’incitation de la retraite qui se révèle efficace pour garder des individus hautement qualifiés plus tard dans la profession enseignante (Vargas, Loeb, Romaguera, Paglayan et Goldstein, 2010). On pense que c’est l’assurance d’un emploi stable et de l’accès éventuel à une retraite qui fait de l’enseignement une profession attirante pour les hommes, ce qui aiderait à expliquer leur prédominance numérique. A une époque où le taux de chômage au Liberia est élevé et où l’emploi dans le secteur formel de l’économie n’atteint que 15 pour cent (Département d’Etat américain, 2011), un emploi stable pour presque n’importe quel salaire n’est pas une considération secondaire. Cependant, la profession enseignante souffre de la mauvaise réputation sociale assez répandue d’être un emploi « pour les pauvres ». Un responsable du MEN a mentionné « le stigmate de l’enseignement ». Chose intéressante, il est largement


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admis par les participants de l’étude que l’enseignement sert de tremplin à d’autres professions et carrières. 4.2 Revenu Plusieurs facteurs expliquent le faible nombre de femmes entrant dans l’enseignement. D’une part, comme les salaires des enseignants sont bas, les jeunes femmes préfèrent avoir des emplois mieux payés en ville comme infirmière, assistante sociale, employée de banque ou tenir un petit commerce (en fait, le nombre de femmes étudiant l’administration des affaires est élevé). Le doyen de l’un des instituts de formation des enseignants a observé qu’il y a une forte demande d’infirmières aux Etats-Unis, ce qui a généré un grand intérêt et un recrutement au niveau local. L’offre de bourses d’études proposant des allocations est insuffisante pour compenser les coûts matériels et affectifs des étudiantes dans l’enseignement et ne compense pas ce qu’elles perçoivent comme des inconvénients. Inversement, parce que les hommes n’ont pas de responsabilités domestiques, il leur est possible de compléter leur salaire en en ayant deux ou trois emplois d’enseignant, en particulier dans les zones urbaines. Cette distinction entre les revenus potentiels des hommes et des femmes rend l’enseignement plus lucratif pour les hommes et constitue pour eux une plus grande incitation à devenir enseignant. En outre, comme l’a expliqué un chargé de cours masculin, les garçons peuvent être motivés par les enseignants masculins qui sont des modèles parce qu’ils sont soutiens de famille et qu’ils sont bien habillés. 4.3 Mobilité Etant donné les difficultés de transport dans le pays liées au manque de routes, les distances sont importantes. La disponibilité locale limitée d’instituts de formation des enseignants pose un problème important à la fois aux hommes et aux femmes, mais il est particulièrement ressenti par les femmes. Pour les femmes mariées et/ou les mères, les distances induisent des coûts économiques et non économiques (par exemple, la perte des réseaux sociaux, l’isolation et la séparation de leur famille) qui sont difficiles à gérer en l’absence d’une famille élargie à proximité. Citons un exemple de mobilité physique possible chez les hommes : l’un des étudiants de l’Université du Liberia a indiqué que ses études l’avaient séparé pendant cinq ans de sa femme et de ses deux enfants

qui vivaient dans le lointain comté du Maryland. Dans le cas des femmes étudiantes, leur participation aux programmes de formation des enseignants avait été possible parce qu’elle vivait dans leur famille élargie qui pouvait prendre soin de leurs enfants. L’une des étudiantes interrogées dans un institut rural de formation des enseignants était tombée enceinte de son premier enfant d’un homme qui avait proposé de payer ses frais scolaires quand ses parents avaient arrêté de l’aider. Depuis, elle a eu trois autres enfants. En fait, toutes les enseignantes stagiaires interrogées avaient des enfants dans le cadre du mariage ou hors mariage. Si le soutien familial permet aux hommes et aux femmes qui sont parents de poursuivre leurs études, les femmes ont plus de chances que les hommes de retarder l’acquisition de qualifications formelles jusqu’à ce que leurs enfants soient plus âgés. Par exemple, deux étudiantes d’un établissement privé interrogées étaient grands-mères. Toutes les deux avaient ouvert une école dans leur village et avaient enseigné pendant des années sans qualification. Mais le doyen de la faculté des sciences de l’éducation de leur établissement les avait encouragées à profiter du programme gouvernemental permettant aux femmes de s’inscrire dans le programme du certificat C7 sans avoir à payer de frais de scolarité. Bien que l’un des étudiants masculins interrogés ait affirmé que le déploiement dans les zones rurales était un défi autant pour les hommes que pour les femmes, il est aussi vrai qu’un mari peut refuser de se déplacer avec sa femme et qu’elle peut accéder à ses souhaits s’il fait pression sur elle pour qu’elle refuse son affectation en zone rurale, tandis qu’une femme suivra certainement son mari en zone rurale. 4.4 Culture Le choix d’entrer dans l’enseignement est aussi influencé par les croyances culturelles concernant les rôles liés au genre. Dans la présente étude, à la fois les futur(e)s enseignant(e)s et les autorités éducatives ont approuvé les stéréotypes fondés sur le genre sur la compatibilité des femmes à s’occuper d’enfants, à exprimer des attitudes et des comportements attentionnés et à être patientes. Certaines des attentes sexospécifiques relatives à l’enseignement qui soutiennent que l’enseignement primaire convient particulièrement aux femmes sont en opposition avec d’autres facteurs liés au genre dans le contexte libérien.

7 L e certificat C permet d’enseigner dans l’enseignement primaire. Il requiert d’avoir suivi le cycle complet du lycée et habituellement, l’achèvement d’un programme d’une année. Les titres universitaires (AA et BA) permettent aux diplômés d’enseigner à des niveaux plus élevés de l’enseignement.

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Citons notamment les difficultés à être admise dans un programme de formation des enseignants, en trouver un qui soit sensible aux défis spécifiques rencontrés par les mères (comme s’occuper de leurs enfants), accepter la possibilité d’un poste en zone rurale et les difficultés que cela comporte (y compris la possible opposition du mari ou du partenaire masculin) et supporter certains inconvénients chroniques comme les retards de paiement du salaire. 4.5 Qualifications L’obligation de devoir passer des examens qui supposent d’avoir eu accès à un enseignement de bonne qualité, comme les examens du WAEC et ceux conçus par le MEN, réduit encore le nombre de femmes disponibles ou intéressées par l’enseignement. De plus, l’exigence que les enseignants du primaire aient obtenu leur diplôme de fin d’études du lycée élimine un nombre important de femmes qui ont abandonné le lycée, mais qui pourraient continuer leurs études dans le cadre de tutorats ou de formats alternatifs. Ce qui est toutefois remarquable, c’est la persévérance et la détermination de tant de femmes à s’instruire. Malgré l’interruption de leurs études par la guerre, les humiliations et le harcèlement des étudiants masculins, les responsabilités familiales et/ou l’opposition de leur conjoint à leur désir d’avoir un emploi rémunérateur hors de la maison, les femmes interrogées étaient déterminées à devenir enseignantes. 5 LA REALITE DE L’ENSEIGNEMENT La reconstruction suivant la guerre civile a impliqué toutes les institutions, y compris les écoles, qui ont retrouvé progressivement leur normalité. L’infrastructure de nombreuses écoles est en cours de reconstruction. Les enseignants et les administrateurs sont préoccupés par la pénurie de matériels pédagogiques et de manuels. Dans une grande école qui comprenait l’enseignement primaire et secondaire, le directeur et les enseignants se sont plaints de n’avoir reçu que trois ramettes de papier destinées à l’utilisation des élèves pour l’année scolaire entière. Cependant dans d’autres cas, on a pu observer

un nombre assez important de livres entreposés dans les bureaux des directeurs au lieu d’être utilisés dans les classes — un effet imprévu de la mesure visant à rendre les directeurs responsables du bon état des manuels. En plus du manque de matériels et de structures de base, les enseignants sont confrontés à d’autres problèmes graves. 5.1 Faibles salaires Les membres du corps enseignant — à la fois les enseignants et les administrateurs — identifient volontiers la faiblesse des salaires comme étant le principal problème des enseignants. Les administrateurs scolaires se sont plaints que bien qu’il leur faille être présents à l’école de 7 h à 18 h, leurs salaires s’élevaient à 8.000 L$, soit seulement 1.000 L$ 8 de plus que celui des enseignants titulaires. Un administrateur scolaire qui exerçait depuis neuf ans comme enseignant dans un comté isolé a expliqué le problème des revenus limités des enseignants : « Les enseignants ont faim la plupart du temps. Dans la plupart des cas, ils reçoivent de petits cadeaux des élèves ». En outre, « Votre salaire ne vous permet pas de vous nourrir jusqu’à la fin du mois. Un sac de riz [environ 50 kg] coûte environ 36 US$. Vous gagnez environ 75 US$ et vous enlevez 36 US$ pour le riz. En plus, vous devez payer les frais scolaires de vos propres enfants et votre loyer ». C’est ainsi que la corruption émerge et comme ce directeur l’a ajouté : « Certains enseignants demandent de l’argent aux élèves pour passer dans la classe supérieure ». Conscient de cela, le gouvernement s’est engagé dans une augmentation progressive des salaires de 20 US$ par mois en 2006, à 75 US$ en 2009 et à 100 US$ (ou 7.000 L$) d’ici le début 2011 — un montant toujours considéré insuffisant par tous les enseignants, malgré la promesse de la présidente Johnson Sirleaf d’augmenter ce montant à 150 US$ d’ici juillet 20119. La politique actuelle du MEN de payer un montant forfaitaire à tous les enseignants, indépendamment de leurs années d’expérience, comme il le fait pour les administrateurs (directeurs et sous-directeurs) a provoqué un fort mécontentement chez les enseignants, femmes et hommes confondus. Le MEN corrige la situation en mettant en place un système qui

Au moment de l’étude, 1 US$ correspondait à 72 dollars libériens (L$). En septembre 2011, des augmentations de salaire ont été annoncées par le gouvernement. Les enseignants titulaires d’un certificat AA ou B gagnent maintenant 11.600 L$ et ceux titulaires d’un certificat C 9.700 L$. Au moment de l’étude, 1 US$ correspondait à 72 dollars libériens (L$). 8

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distingue cinq niveaux de formation parmi les membres du corps enseignant et en les payant en fonction de ce critère. Le nouveau système est mis en œuvre très lentement et les enseignants et les administrateurs interrogés, à la fois dans les zones rurales et urbaines, n’en bénéficiaient pas encore.

enseignantes ont déclaré qu’elles avaient une petite activité à côté pour s’assurer un revenu supplémentaire suffisant. Par exemple, une enseignante volontaire dirigeait un orphelinat de 16 orphelins et trois enfants placés. Plusieurs autres avaient de petites boutiques sur le bord de la route ou au marché.

5.2 Retards de paiement

L’Association nationale des enseignants du Liberia, un syndicat actif ayant des liens forts avec les responsables du MEN, a plaidé en faveur de meilleures conditions pour les enseignants. Les dirigeants syndicaux ont identifié deux questions principales pendant les entretiens : le traitement rapide du paiement des enseignants et l’inscription rapide et correcte des enseignants dans les registres de la fonction publique. Ils ont signalé que des erreurs du MEN avaient conduit à la radiation de certains enseignants des registres du personnel, créant une catégorie d’enseignants « radiés », une situation qui force les enseignants à se rendre au ministère pour résoudre le problème en personne et demande des mois, voire des années d’efforts à corriger. Les enseignants qui sont radiés par erreur des registres officiels doivent néanmoins continuer à enseigner. L’une des personnes interrogées qui avait été radiée a réussi à survivre grâce aux paiements qu’elle recevait de l’Association des parents d’élèves (APE) pour enseigner après les cours.

Les retards de paiement aggravent encore la question de la faiblesse des salaires — une plainte courante chez les enseignants en exercice. Alors que les responsables du MEN déclarent que ce problème est en passe d’être résolu et pourrait bientôt n’être plus qu’un souvenir, les enseignants interrogés dans les zones rurales et urbaines ont déclaré que même si leurs salaires étaient payés moins en retard que par le passé (lorsque le retard était de 2 à 3 mois), ils continuaient à les recevoir en retard (de 5 à 15 jours). Cette situation est une catastrophe dans les ménages pauvres. Les enseignants ont rapporté devoir recourir à emprunter à des amis ou des parents, mais aussi aux clubs communautaires et à d’autres sources (comme les femmes du marché ou les établissements de prêt) où chaque dollar emprunté leur coûte 25 pour cent. Ce taux d’intérêt très élevé réduit le revenu net déjà faible des enseignants. Cela crée également des problèmes de présence chez les enseignants, car les retards de paiement entraînent des demandes auprès des autorités éducatives aux niveaux plus élevés, ce qui inclut un voyage (qui prend souvent des jours) pour aller voir les responsables du MEN situés dans le bureau du comté, voire à Monrovia. Un chercheur travaillant sur les efforts mis en œuvre pour accroître la réussite des filles au Liberia a constaté que dans certaines zones, les enseignants étaient absents de leur classe presque 50 pour cent du temps pour la raison importante qu’ils devaient aller chercher leur salaire en personne. Selon le MEN, la rapidité des paiements s’est améliorée depuis que les enseignants titulaires peuvent être payés directement sur leur compte bancaire, mais comme de nombreuses femmes enseignantes semblent appartenir aux catégories des « recrutés », « remplaçants » ou « volontaires »10, leur paiement dépend du responsable de l’éducation du district qui apporte personnellement les chèques lors de ses rares visites à leur communauté. Plusieurs femmes

5.3 Recrutement et avancement professionnel Le recrutement des enseignants semble être une décision faisant l’objet de peu de transparence. Un certain nombre de répondant(e)s pensaient qu’elle était souvent basée sur le favoritisme et menait au recrutement d’enseignants sans aucune préparation pédagogique et par conséquent incapables d’enseigner de manière satisfaisante aux élèves. On nous a dit que le favoritisme allait du niveau du district jusqu’au ministère central. Les répondant(e)s ont aussi déclaré que les enseignantes étaient confrontées au choix difficile de rester dans le système à cause du plafond qui empêche la promotion de femmes à des postes administratifs. Le processus de décentralisation de l’éducation commence à se mettre en place au Liberia et certaines délégations de pouvoir sont accordées aux responsables de l’éducation

10 Le terme « recruté » désigne les enseignants nouvellement engagés qui ne sont pas encore inscrits sur les registres du personnel du MEN ; le terme de “déplacé" désigne les enseignants temporaires qui remplacent ceux qui sont absents ; le terme « volontaire » désigne les enseignants ayant un faible niveau d’instruction qui cherchent à obtenir le certificat C pour devenir enseignants titulaires dans le primaire. La paie de ces derniers est très faible et parfois inexistante ; ils enseignent dans l’espoir d’obtenir un engagement permanent un jour.

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du comté (CEO) et aux responsables de l’éducation du district (DEO). Des chercheurs familiers des décisions relatives au personnel au niveau du MEN ont indiqué que plusieurs autorités administratives pensaient que les capacités des femmes n’étaient pas aussi élevées que celles des hommes et n’étaient pas disposées à nommer plus de femmes comme CEO et DEO, même si elles étaient mieux préparées sur le plan académique et avaient de meilleurs dossiers administratifs que les candidats masculins. Les attentes culturelles concernant la maternité et la gestion du foyer empêchent aussi les femmes de se présenter aux postes administratifs. Pour devenir CEO, un mastère est exigé ; il n’est pas surprenant que seulement 1 CEO sur 15 soit une femme. Pour être DEO, une licence en sciences de l’éducation est exigée ; à l’heure actuelle, sept sur 96 DEO sont des femmes (MEN, 2010). 5.4 Déploiement rural Souvent, dans les zones rurales, l’accès à l’électricité, au fioul et à l’eau potable est extrêmement limité (MEN, 2010) ce qui crée des problèmes supplémentaires dans la vie quotidienne. Dans les zones rurales, les enseignants doivent souvent dépendre de moyens supplémentaires pour survivre, ce qui implique de travailler sur des lopins de terre avoisinants pour cultiver des légumes. De plus, de nombreuses écoles rurales n’enseignent que jusqu’au niveau 4, ce qui signifie que certains enseignants ne trouvent pas d’école pour leurs enfants plus âgés. En outre, les enseignants les plus qualifiés vivent à Monrovia (MEN, 2010), ce qui signifie que la qualité de l’éducation des zones rurales est plus faible que celle des zones urbaines. Ces facteurs créent un cercle vicieux qui favorise les postes urbains par rapport aux ruraux. Les affectations dans les zones rurales créent des défis supplémentaires pour les femmes qui n’ont pas autant d’expérience que les hommes. Ce type de déploiement, dans des circonstances caractérisées par de mauvaises infrastructures de communication et routières et où la vie rurale pose des défis à la vie familiale et à la sécurité, est à la fois craint et évité. Comme dans la culture libérienne les femmes doivent s’occuper de leurs enfants et de leur maison, être affectée comme enseignante dans une zone rurale constituera une épreuve et les obligera certainement à laisser derrière elle leurs enfants d’âge scolaire. La distance pour se rendre à l’école peut les obliger à partir de chez elles à 6 h 30 pour être à l’école à 8 h. 30

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Cela les amène à être seules sur la route. La campagne fortement boisée et la faible densité de population rendent les femmes vulnérables aux agressions des hommes ou aux incidents avec des serpents sur leur trajet. La saison des pluies qui dure six mois au Liberia rend aussi les routes rurales impossibles à traverser. Le vêtement traditionnel des femmes et la préférence culturelle pour les longues jupes et la réticence à porter un pantalon rendent leur marche à travers les chemins boueux et isolés difficiles. 5.5 Roulement des enseignants Certains enseignants titulaires utilisent l’enseignement comme un tremplin pour d’autres emplois. D’autres enseignants, étant donné l’afflux d’ONG dans le pays qui offrent des salaires plus élevés et de meilleures conditions de travail, quittent leur poste pour aller travailler dans ces nouveaux organismes. Ce serait particulièrement le cas parmi les enseignants du secondaire. De nos conversations avec divers répondant(e)s, il semblerait que les hommes aient une plus grande mobilité et quitte ainsi le système éducatif plus facilement que les femmes. Les conditions difficiles dans les zones rurales ont pour conséquence un roulement important des enseignants. Certains s’en vont en zones urbaines et d’autres rejoignent des écoles privées et de missionnaires qui offrent des conditions et des environnements meilleurs et attirent de ce fait les enseignants les mieux formés. Certains comtés ont subi de grosses pertes, surtout dans les zones rurales isolées ; citons le cas extrême du comté essentiellement rural de Sinoe où ces pertes se sont élevées à 35 pour cent des enseignants du primaire, 33 pour cent des enseignants des collèges et 50 pour cent des enseignants des lycées (Raynor, 2011). Les données disponibles ne sont pas ventilées par sexe et l’on ne connait pas le nombre de femmes qui quittent le système. Toutefois, parmi les femmes qui finissent par enseigner dans les zones rurales (bien que le pourcentage global des enseignants des zones rurales soit remarquablement faible) beaucoup sont recrutées dans leur propre communauté et ont par conséquent des liens familiaux plus nombreux, ce qui contribue à expliquer leur longévité dans la zone. 5.6 Distance de l’école La distance jusqu’à l’école a émergé comme un facteur ayant un impact négatif chez les enseignants urbains et


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ruraux. Dans le cas des enseignants ruraux, leurs écoles ne sont pas toujours accessibles après une tempête (la saison des pluies dure six mois de l’année) en raison de zones désertes, du manque de routes pavées et des risques d’attaques par des voleurs. Dans le cas des enseignants du primaire, il a été signalé que dans une ville étendue — comme Monrovia le devient — les enseignants doivent payer le transport (un taxi collectif ou une moto taxi) pour aller à l’école. Le coût moyen du transport quotidien en ville est d’environ 20 L$, ou de 50 L$ quand il y a un changement. Pour les enseignants qui gagnent actuellement 7.000 L$ par mois, une dépense mensuelle de transport de 400 L$ équivaut à 6 pour cent de leur salaire. Ce montant représente une petite proportion de leur salaire, mais elle réduit encore leur faible revenu net. Pour minimiser les frais de transport, certains enseignants marchent plusieurs kilomètres, ce qui les conduit à arriver en retard et fatigués. Dans quelques cas, l’absentéisme accru est aussi un moyen de minimiser les frais de transport. 5.7 Incitations insuffisantes Les membres du corps enseignant, femmes et hommes confondus, ont déploré le manque d’incitations pour bien faire leur travail. Comme nous l’avons noté précédemment, le salaire et le logement sont primordiaux, suivis de près par les difficultés de transport. En fait, le logement est l’incitation dont la nécessité a été de loin la plus fréquemment citée, surtout pour les enseignants affectés dans les zones rurales. Les enseignants ont rapporté les conditions de vie très dure en milieu rural et le fait de devoir passer des heures à trouver un logement convenable dans les postes éloignés. Dans le cas des femmes, cette situation se double de la nécessité de trouver un logement sûr et pas trop éloigné de l’école dans laquelle elles enseignent. Mais les femmes enseignantes ont aussi cité les difficultés d’accès à des services de garde d’enfants. Dans la société libérienne où la société attend que les femmes aient des enfants — même à un âge précoce —, la plupart des femmes enseignantes ont des enfants. Pour pourvoir aux besoins de leurs enfants, elles sont amenées à compter sur la structure typique de la famille élargie, ce qui rend difficile leur déménagement (à savoir le déploiement dans des zones éloignées). Ce genre de questions n’est pas un obstacle pour les enseignants masculins, car on attend de leurs femmes qu’elles les aident à gérer la maison et à s’occuper des enfants.

L’un des avantages majeurs que les enseignants masculins ont sur les femmes enseignantes est qu’il leur est plus facile de compléter leur salaire en ayant deux ou trois emplois supplémentaires en dehors de leur emploi régulier d’enseignant (observé également en Ouganda par Molyneaux, 2011). Comme les écoles du Liberia fonctionnent sur la base de deux équipes (matin et après-midi) et que certaines proposent des cours du soir, les hommes ont la possibilité de travailler dans deux équipes ou d’enseigner dans des écoles privées après leur équipe. De même, de nombreux hommes travaillent comme professeur à domicile après les heures de classe. Ces engagements professionnels supplémentaires sont rarement possibles pour les femmes qui doivent rentrer chez elles pour s’occuper des enfants et de la maison. De plus, la pratique d’avoir plusieurs emplois est courante, ce qui conduit à doubler ou à tripler le nombre d’enseignants dans les statiques éducatives (MEN, 2010). On nous a signalé des incitations offertes aux enseignants titulaires travaillant dans les zones rurales, comme une prime de 25 pour cent pour les enseignants titulaires et 10 pour cent supplémentaires aux enseignants de sciences, de mathématiques et de langue. Toutefois, ce genre d’incitations reste à mettre en œuvre. De plus, bien que les autorités éducatives aient affirmé que les enseignants titulaires ont accès à la sécurité sociale et à l’assurance médicale, ces enseignants ont rapporté qu’ils n’avaient pas de prestations d’assurance maladie et de sécurité sociale. Nous ne savons pas si ces enseignants ne comprennent tout simplement pas les déductions qui sont faites sur leur salaire (et si c’est le cas, pourquoi ?) ou si les prestations attendues se concrétisent rarement. D’autre part, le large groupe important d’enseignants comprenant les catégories de recrutés, remplaçants ou volontaires n’ont accès à aucune prestation en dehors de leur salaire. 5.8 Besoins familiaux insatisfaits Les connaissances sur la situation maritale des enseignants sont balbutiantes au Liberia. L’enquête portant sur quelque 400 enseignants menée par Shriberg (2007) a montré que 81 pour cent des enseignants (femmes et hommes confondus) étaient mariés et que 94 pour cent d’entre eux avaient des enfants. Compte tenu des fortes normes culturelles liées à la formation précoce d’une famille, la plupart

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des femmes enseignantes étaient mariées ; pourtant, il n’existe pratiquement aucun cas où les responsabilités actuelles des femmes à la maison sont prises en compte. Plusieurs répondantes ont déclaré qu’elles avaient été réprimandées pour s’être occupées de leurs enfants qui étaient malades et avaient besoin de soins médicaux. Les exigences familiales sont considérées comme strictement privées et ne sont pas reconnues dans la création d’environnements plus sensibles aux femmes. Il convient de noter que si les autorités éducatives ont un discours en faveur d’une participation accrue des femmes dans l’enseignement, en pratique — comme le rapportent les femmes enseignantes ellesmêmes — le soutien n’est pas à la hauteur du discours. Les enseignantes libériennes peuvent bénéficier d’un congé maternité, mais il est laissé à la discrétion du responsable de l’éducation du comté. Les femmes qui ne sont pas mariées n’ont pas droit au congé maternité, bien qu’un grand nombre de femmes en aient besoin. 5.9 Elèves surâgés Les conditions d’enseignement en classe peuvent être difficiles parce que de nombreux élèves sont surâgés, ce qui complique la façon de répondre à leurs besoins cognitifs très différents et à leurs schémas comportementaux. Des enseignants ont rapporté avoir des élèves aussi âgés que 10 ans au jardin d’enfants, 15 ans au premier niveau et 20 ans au niveau 5. Ces observations sont corroborées par les données du recensement qui indiquent que 58 pour cent des élèves de l’enseignement primaire sont surâgés. Le problème de l’âge s’intensifie aux niveaux les plus élevés de l’enseignement, avec 74 pour cent d’élèves surâgés au collège et 78 pour cent au lycée (32 pour cent d’entre eux ont plus de 20 ans) (MEN, 2010, pp. 22, 39 et 56). Si les inscriptions tardives posent des problèmes aux enseignants, elles affectent aussi les élèves les plus âgés. Ils peuvent se sentir embarrassés à cause de leur âge et de leur taille ce qui les pousse à abandonner, ou avoir été affectés par la guerre civile qui a pris fin il y a dix ans à peine. Les blessures psychologiques de la guerre civile se cicatrisent, pourtant un grand nombre d’élèves ne sont pas encore entièrement remis de cette période de violence pendant laquelle la survie personnelle était primordiale. Nous savons que certaines femmes enseignantes se sentent intimidées devant les élèves beaucoup plus âgés de leur classe, en particulier les garçons, par crainte de ne pas être capables de leur faire respecter la discipline ou de leur comportement potentiellement violent. 32

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5.10 Passion de l’enseignement En dépit des nombreux facteurs dissuasifs, l’éducation suscite une grande passion chez le peuple libérien. Les personnes d’une vingtaine et d’une trentaine d’années fréquentent les lycées et les personnes d’une trentaine à une cinquantaine d’années suivent des cours à l’université. A l’évidence, les Libériens considèrent l’éducation comme une voie de promotion sociale et économique. De plus, de nombreux enseignants, hommes et femmes confondus, ont confié aux enquêteurs leur amour et leur passion de l’enseignement. A plusieurs reprises, ils ont déclaré, comme nous l’avons indiqué précédemment, « Eduquer un enfant, c’est construire un pays ». Ainsi, malgré les conditions très difficiles de travail des enseignants, nombreuses sont celles qui entrent dans l’enseignement et qui persévèrent dans cette profession. Nous avons également observé l’impact puissant et positif de l’éducation. Celles qui doivent surmonter des obstacles énormes pour faire des études et qui sont devenues enseignantes espèrent que leurs filles ou leurs sœurs feront aussi des études ; nombreuses sont celles qui désirent entrer dans la modernité et ne veulent pas que les futures générations subissent les mutilations génitales. Elles se considèrent comme des modèles pour leurs enfants ou des pionnières pour leurs sœurs et la future génération. Les enquêteurs ont rencontré de nombreuses femmes responsables au MEN, enseignantes et étudiantes dans les instituts de formation des enseignants et les écoles qui ont manifesté un grand engagement en faveur de la promotion de l’égalité entre les genres. 6 POLITIQUES ET PROJETS AXES SUR LE GENRE 6.1 Politique nationale sur l’éducation des filles L’inégalité flagrante entre l’accès des filles et des garçons à l’enseignement au Liberia résultant des attitudes et des pratiques patriarcales est responsable des niveaux extrêmement bas d’alphabétisation des filles et des femmes. La guerre a aggravé cette situation : moins de jeunes femmes ont repris leurs études après l’arrêt des hostilités parce qu’elles étaient tombées enceintes et que leurs responsabilités de mères leur laissaient peu de temps pour l’école. Dans le cadre de leurs efforts pour aider le Liberia à reconstruire son système éducatif, plusieurs organisations nationales, internationales et non gouvernementales mènent des recherches et élaborent des programmes visant à accroître la participation des filles à l’éducation.


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Citons notamment la promulgation de la Politique nationale sur l’éducation des filles (MEN/UNICEF, 2005 et 2008). Cette politique contient plusieurs stratégies intéressantes : une campagne nationale de sensibilisation sur l’importance de l’éducation des filles, la législation sur les crimes sexuels et le harcèlement et l’offre de conseils sur les questions liées à la santé reproductive et aux autres questions de santé, entre autres. Il existe des objectifs chiffrés de réduction des disparités entre les genres en matière d’accès, d’amélioration de l’équité dans la répartition géographique des opportunités éducatives, d’augmentation du taux d’alphabétisation des filles et des femmes et de la diminution du taux d’abandon des filles. Le Plan national est le fruit d’une collaboration entre l’UNICEF et le MEN. Il a aussi bénéficié de la participation importante de l’Antenne nationale du FAWE au Liberia et de l’Association des avocates du Liberia, une ONG influente qui a joué un rôle clé dans le retour de la paix au Liberia. Malheureusement, la Politique nationale sur l’éducation des filles, malgré les efforts de diffusion, reste inconnue de nombreux enseignants, administrateurs scolaires et même de certains responsables du MEN. La Politique nationale sur l’éducation des filles appelle à ce que l’appui du gouvernement prenne la forme d’une contribution de 25 pour cent du budget national pour garantir la mise en œuvre ou l’application de toutes les lois existantes (MEN/UNICEF, 2005). Ceux qui sont familiarisés avec les politiques de l’éducation et du genre — y compris ceux qui sont impliqués dans la conception de la Politique nationale de l’éducation des filles — conviennent unanimement que « le problème n’est pas le [manque de] politique, mais leur mise en œuvre ». Certaines répondantes ont également fait remarquer que la loi actuelle de l’éducation (promulguée en 2002) stipule que « le ministère de l’Education mettra en place et concevra des programmes spéciaux visant à garantir l’égalité à tous les niveaux scolaires pour apporter la parité et l’harmonie entre les deux sexes » (cité dans MEN/UNICEF, 2005, p. 4). De l’avis des répondantes, la loi actuelle (2002) est plus faible que la précédente parce qu’elle ne contient qu’une seule phrase sur les questions relatives au genre (celle citée ci-devant) et n’identifie pas de cibles, ni de ressources potentielles. L’absence de fonds et le relatif désintérêt de la bureaucratie expliquent la faiblesse de la mise en œuvre de cette politique.

6.2 Investissement dans l’éducation Les enseignants, les administrateurs et les défenseurs gouvernementaux de l’éducation des femmes demandent fréquemment la gratuité de l’enseignement primaire, la diminution des frais scolaires dans le secondaire et l’attribution d’un plus grand nombre de bourses d’études pour permettre aux filles d’affronter la terrible réalité. Cela nécessite un plus grand investissement dans l’éducation, et pourtant des mesures contraires sont mises en œuvre. En juin 2010, le ministre de l’Education a protesté publiquement contre la réduction draconienne de 51 millions à 24 millions d’US$ (c’est-à-dire 53 pour cent) du budget de l’éducation par le ministère des Finances (Binda, 2010). Selon la Loi qui a créé le MEN, 15 pour cent du budget national doit être affecté à l’éducation. Etant donné que le budget national à l’époque était de 300 millions d’US$, le montant correspondant pour l’éducation aurait dû être de 45 millions d’US$. L’impuissance du secteur éducatif par rapport aux autres ministères est malheureusement typique dans de nombreux pays en voie de développement. 6.3 Projets internationaux de développement Pour des raisons historiques remontant à l’origine du Liberia, les Etats-Unis sont le pays qui investit le plus dans son éducation. L’USAID finance trois projets importants à volets multiples. Premièrement, le Programme de formation des enseignants du Liberia (LTTP), gérés par un partenariat entre l’Academy for Educational Development et le Comité international de secours, accroit le nombre d’enseignants qualifiés en proposant une formation continue à ceux qui n’ont pas de titre de qualification dans environ neuf comtés et une formation initiale grâce à l’accès à trois RTTI revitalisées. Le programme LTTP inclut également des programmes pour élaborer de meilleurs curricula de mathématiques et de lecture et proposer une formation continue dans ces matières. Un autre objectif de ce projet est d’offrir un appui au MEN qui travaille à l’amélioration générale du système éducatif et de renforcer les capacités institutionnelles au sein du MEN. Deuxièmement, le programme GOAL, financé par la Millennium Challenge Corporation, mène un projet triennal quasi expérimental pour déterminer quels sont les intrants (bourses d’études, repas, matériels pédagogiques, formation APE) qui génèrent les taux les plus élevés de scolarisation, de rétention et Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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d’achèvement des filles. Quarante écoles dans les comtés de Lofa, Bong et Grand Bassa participent à ce projet qui touche plus de 2.000 filles. Les écoles se trouvent dans des zones urbaines ou semi-urbaines. Les activités relèvent de trois grands domaines : la sensibilisation des communautés et la formation de sensibilisation ; les bourses d’études en nature (uniformes, cartables et fournitures scolaires) et un appui complémentaire à la santé psychosociale et à l’apprentissage ; et le renforcement des capacités des APE. Les clubs de filles où l’éducation à la santé adaptée à l’âge vise à prévenir les grossesses adolescentes et la diffusion du VIH et du sida sont un outil important pour les formations de sensibilisation et l’appui psychosocial. L’USAID et le FAWE Liberia sont partenaires dans le rétablissement et la création des clubs de filles (voir ci-dessous). D’après un membre du personnel de GOAL, l’un des aspects du travail avec les APE est la négociation de « contrats » communautaires stipulant que les APE « doivent veiller à la sécurité des filles ». Tous ces objectifs sont directement liés aux stratégies formulées dans la Politique nationale sur l’éducation des filles. Troisièmement, le programme Compétences scolaires de base pour les jeunes Libériens (CESLY), financé par l’USAID, est principalement mis en œuvre par le Centre pour le développement de l’éducation (EDC) et il est en place dans six comtés. C’est un programme de développement des ressources humaines destiné à tous les jeunes Libériens. Un curriculum non formel apporte aux jeunes les compétences de base en calcul et en lecture, des compétences pour la vie, une orientation professionnelle, une préparation au milieu du travail, des opportunités d’apprentissage par le service, des opportunités de stages et d’apprentissage. Un membre du personnel du CESLY a noté que l’on pouvait atteindre davantage de filles par les programmes d’éducation non formelle. Par conséquent, le projet comporte un volet destiné aux adolescentes coordonné par un spécialiste du genre et de la formation à distance de l’EDC, assisté d’une équipe comprenant un coordinateur genre du MEN. Des clubs de filles ont été créés et leurs membres déterminent quelles sont les questions prioritaires dans leur communauté. Par exemple, les filles ont identifié la violence fondée sur le genre, la maltraitance des enfants et l’absentéisme scolaire (des autres filles et des enseignants) comme questions requérant l’attention. Les clubs offrent aux filles une plateforme pour formuler et exprimer leurs points

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de vue et les activités sont orientées pour mettre l’accent sur la nécessité de l’éducation. Les filles ont déjà pris des initiatives, elles ont enquêté sur l’absence des enseignants et ont servi de médiatrices lors de différends entre garçons et filles. Le CESLY est également impliqué dans la formation des enseignants. Le grand nombre d’enseignants non qualifiés est un grave problème au Liberia et nombreux sont les enseignants ayant enseigné longtemps qui sont réticents à retourner sur les bancs de l’école pour obtenir un titre de qualification. Les programmes CESLY leur apportent des compétences pédagogiques. En consultation avec les DEO, des enseignants titulaires du certificat C sont identifiés pour travailler avec le personnel du CESLY afin d’être formés comme maîtres-enseignants. Les membres du personnel du CESLY ont tiré parti de leur contact avec les DEO (qui sont majoritairement des hommes) en en faisant une opportunité pour les encourager à accroître le nombre de femmes directrices et sous-directrices. Il existe également un projet financé par la Communauté européenne appelé « Appui communautaire en faveur de l’éducation au Liberia » (ECSEL) visant à étendre l’accès à l’éducation et à réduire le déséquilibre entre les genres en matière de scolarité et de taux d’alphabétisation. Ces quatre initiatives internationales sont destinées à fournir des données factuelles sur lesquelles s’appuyer pour la mise à l’échelle au niveau national. Il reste à voir dans quelle mesure ce sera le cas. 6.4 FAWE Liberia L’Antenne nationale du FAWE au Liberia a aussi été active dans l’offre de formations en pédagogie du genre aux enseignants du primaire et du collège. Environ 300 enseignants ont été formés entre 2005 et 2009. Avec la coopération d’Oxfam, l’organisation a également mis en place et géré des clubs de filles — qui semblent très efficaces pour l’autonomisation psychologique des filles — dans quelque 12 écoles à travers le pays. Elle a aussi transmis des compétences professionnelles à 400 filles non scolarisées ayant dépassé l’âge normal (FAWE/Liberia, 2010). Les responsables de l’Association nationale des enseignants du Liberia ont rapporté qu’une initiative à petite échelle d’Education International (la fédération mondiale des syndicats d’enseignant) avait appuyé un programme de démonstration sur l’éducation sexuelle pour les élèves. Alors que le programme «


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prenait de l’élan », il a été arrêté par les sponsors sans explication claire. Compte tenu de l’importance du contenu de ce programme, il serait utile de comprendre les raisons de cette annulation. Au niveau gouvernemental, les changements se mettent progressivement en place, bien que plus lentement qu’on ne le souhaite. Par exemple, des programmes pilotes sont en cours de conception ou de mise en œuvre pour encourager les enseignants de mathématiques et de sciences à aller dans les zones rurales. La politique récente d’attribution de bourses d’études aux femmes et la gratuité de l’enseignement au lycée pour les élèves-enseignants indiquent des changements positifs. Certain(e)s étudiant(e)s ont dit qu’ils ne pourraient pas poursuivre leurs études sans la bourse d’études. Le Programme d’apprentissage accéléré (ALP) du MEN vise à encourager les mères adolescentes et les femmes surâgées à retourner à l’école et y poursuivre leurs études. L’UNICEF et l’IRC étaient les partenaires du MEN pendant la phase pilote de ce programme. Une femme inscrite dans le programme avait 50 ans. Le MEN prévoit de mettre l’ALP en œuvre dans trois comtés. 7 CONCLUSIONS Les conclusions de cette recherche corroborent les résultats précédents de la recherche en sciences sociales sur l’influence des normes culturelles et des conditions économiques sur la définition des attentes professionnelles, mais elles suggèrent aussi la nécessité de réinterpréter les faits déjà connus. Cela implique de donner une interprétation plus sociologique du rôle des institutions et de la culture qui sont toutes deux en constante interaction. Les normes culturelles sont approuvées par les institutions qui présentent ainsi les attentes liées au genre et les pratiques sexospécifiques comme étant naturelles et donc incontestables. Les institutions, tout en étant ostensiblement sensibles aux questions relatives au genre, peuvent faire peu pour y remédier. Il existe également des interrelations complexes entre les notions idéologiques de genre, les conditions matérielles (pauvreté et faibles niveaux de développement des infrastructures) et les pratiques institutionnelles. Les enseignants peuvent contribuer à éliminer les obstacles à l’éducation des filles, mais ils sont eux-mêmes confrontés à des obstacles qui restent à surmonter.

L’examen des motivations et des capacités des femmes à devenir enseignantes a mis en évidence le bloc culturel du cadre conceptuel graphique 1.1 comme étant le plus décisif. La plupart des femmes enseignantes ont avancé les notions culturelles selon lesquelles les femmes sont plus attentionnées, patientes et adaptées à l’interaction avec les enfants pour expliquer leur décision de devenir enseignantes. Certaines expriment le désir d’accroître leurs connaissances et d’enseigner aux autres, ce qui laisse entendre que l’inclination personnelle joue aussi un rôle. L’idéal que les femmes sont bien armées pour enseigner aux enfants crée cependant une tension décourageante dans le contexte du Liberia entre les conditions matérielles de l’enseignement et les responsabilités des femmes à l’égard de leurs propres enfants. Le fait de travailler dans les zones rurales, une possibilité certaine pour de nombreux enseignant(e)s et enseignant(e) s potentiel(le)s, implique un certain nombre de défis qui sont plus pertinents pour les femmes : la distance de leur domicile, l’inquiétude accrue concernant leur sécurité et les problèmes quotidiens pour s’occuper de leur famille en l’absence d’un logement adéquat, d’électricité, d’eau et de fioul. Certaines femmes vont enseigner dans les zones rurales, mais ce sont celles qui ont eu la chance de pouvoir négocier des avantages en contrepartie de leurs responsabilités familiales et professionnelles ou qui sont originaires de la zone rurale concernée. Certaines ont des familles élargies qui peuvent les aider à s’occuper de leurs enfants ; d’autres sont dans une phase ultérieure de leur vie et n’ont pas de jeunes enfants. L’éducation formelle est une institution qui conduit à l’intégration de valeurs et d’attitudes modernes ; pourtant, son bon déroulement exige des installations modernes. L’enseignement est un métier difficile à exercer dans des environnements aux infrastructures minimales d’information et de transport. La grave pénurie de logements dans les zones rurales affecte la participation des enseignants et influence le choix de l’enseignement par de nouvelles cohortes. La distance des écoles affecte non seulement les élèves, mais aussi les enseignants. L’absence de banques dans les zones rurales et le recours aux transports pour se faire payer en personne exige un investissement en temps substantiel pour toucher son salaire. Considérant ces conditions particulières, l’absentéisme des enseignants doit être reconnu dans toute sa dimension. Il s’agit moins d’un manque d’engagement des enseignants à Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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leur profession ou à une pratique sans éthique qu’une réponse aux difficultés quotidiennes en s’y adaptant par une attention sélective aux devoirs personnels et professionnels. Le mauvais état des routes jusqu’à Monrovia pour se renseigner sur les retards de paiements est une raison courante de l’absentéisme des enseignants. Comme nous l’avons noté précédemment, le manque d’incitations et de conditions de travail satisfaisantes rend difficile de bien faire son travail dans des circonstances aussi difficiles. Pour expliquer les choix de carrière dans les sociétés industrialisées, Freeman (1979) et Betz (1989) (tous deux cités dans Betz, 2004) ont introduit le concept « d’environnement nul » pour désigner un environnement qui n’encourage ni ne décourage les individus, mais les ignore simplement. Ce contexte a pour effet de laisser l’individu vulnérable face à son environnement et complètement dépendant de ses éventuelles relations personnelles. Ce genre d’environnement est reconnu comme une forme de discrimination passive parce qu’il ne répond pas à la situation différentielle dans laquelle se trouvent les hommes et les femmes. Le concept de l’environnement nul semble aussi s’appliquer au Liberia, car le MEN doit faire davantage d’efforts pour promouvoir le choix de l’enseignement chez les femmes. Bien que le MEN se soit engagé dans un processus d’augmentation progressive du salaire des enseignants, il demeure insuffisant pour répondre aux besoins familiaux. A ce jour, le gouvernement n’offre pas d’incitations pour les postes ruraux, le logement ou la garde des enfants. Les enseignants déplorent constamment le schéma du retard de paiement des salaires et de la grande lenteur de l’inscription des nouveaux enseignants sur les registres du personnel de l’Etat. Bien que notre étude n’ait pas exploré cet aspect, il est fort probable que les expériences de ce type vécues par les enseignants en exercice sont observées par d’autres — y compris les élèves — et utilisées comme preuve que l’enseignement n’est pas un domaine très satisfaisant. Comme l’ont mentionné plusieurs personnes de notre échantillon, un signe visible de la pauvreté des enseignants est qu’avec leur maigre salaire, ils/elles ne peuvent pas bien s’habiller et avoir l’air soigné. Si c’est le cas, les enseignants sont le modèle de leur pauvreté au quotidien. Il faut établir une distinction entre choisir une carrière et la poursuivre. Les facteurs identifiés dans le bloc des

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caractéristiques professionnelles du cadre conceptuel du graphique 1.1 sont actifs, pourtant ils ne semblent pas suffisants pour que les femmes abandonnent l’enseignement une fois qu’elles se sont engagées dans cette carrière. Les femmes enseignantes se plaignent de la faiblesse de leur salaire, des retards de paiement et du manque de logement dans les zones rurales, mais elles ne les désignent pas comme des raisons potentielles pour quitter leur emploi. Ce sont des arguments pour réclamer de meilleures conditions et non les facteurs d’un départ imminent de la profession enseignante. Les taux d’attrition des zones rurales sont élevés, mais l’on ne sait pas clairement quels sont le taux des femmes et celui des hommes ; il semblerait que les femmes tendent à renoncer avant d’accepter un poste, tandis que les hommes partent après avoir exercé pendant quelque temps. Un facteur contextuel important qui n’est pas pris en compte dans le cadre conceptuel, mais qui a émergé des entretiens, concerne les conséquences persistantes de la guerre civile, un conflit qui a duré 14 ans et dont les cicatrices profondes causent encore une souffrance psychologique et une fracture sociale. Bien que la participation des filles à l’enseignement avant la guerre civile fût faible, les efforts de reconstruction sont lents et n’ont pas permis l’intégration d’un grand nombre de filles et de garçons. La guerre a retardé l’entrée d’un grand nombre de filles et de garçons dans les enseignements primaire et secondaire. Le phénomène de l’âge a eu des conséquences plus importantes chez les filles parce qu’on attend d’elles qu’elles assument des responsabilités maternelles et familiales en plus de — ou pire, au lieu — d’étudier. La guerre a aussi eu pour effet que les gens entrent plus tard à l’université ; de nombreuses femmes ont manqué des années d’études pendant la guerre quand elles se cachaient dans la forêt ou fuyaient pour sauver leur famille. Pour cette raison, le bassin de femmes disponibles pour la profession enseignante a été affecté. De plus, la guerre a gravement sapé la confiance dans la société ; alors que le Liberia est à présent dans une situation de postconflit, en réalité, les parents ont peur de laisser leurs filles se rendre à pied à l’école. La faiblesse du bassin de femmes diplômées du lycée affecte gravement le nombre de celles qui entrent dans l’enseignement. En même temps, il est évident que la demande d’éducation est très marquée par les


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normes culturelles. L’éducation des filles est souvent considérée comme un gaspillage d’argent ; les parents sont disposés à soutenir l’éducation de leurs fils plutôt que de leurs filles en cas de contraintes financières. La rareté des ressources familiales et les attentes culturelles selon lesquelles les garçons offriront un meilleur rendement de l’investissement familial et devront s’occuper plus tard de leurs parents âgés et de leurs frères et sœurs plus jeunes ont défini les normes culturelles. Souvent, les filles sont mariées avant d’avoir terminé l’école primaire, certaines à 13 ou 14 ans. Bien que le degré d’importance relative du facteur culturel n’ait pas été mesuré, ce type de normes comme le mariage et la maternité précoces, ainsi que la reconnaissance sociale qu’elles ont acquise à travers leurs enfants, servent de facteurs dissuasifs à la visualisation de parcours alternatifs de vie. Alors que les répondantes libériennes voient l’école traditionnelle (l’école de brousse) comme essentiellement positive, leurs conséquences sur la capacité des filles à terminer leur scolarité formelle n’ont pas été suffisamment étudiées. Le soutien apporté dans les instituts de formation des enseignants — gratuité de l’enseignement, allocations et gîte et couvert — n’est toujours pas suffisant, car il ne reconnait pas le fait que nombreuses femmes stagiaires ont des enfants. Il n’est tout simplement pas possible pour de nombreuses femmes de rester à l’institut pendant plusieurs mois, encore moins de un à cinq ans, si elles ont des enfants dont elles doivent s’occuper et d’autres responsabilités familiales. Un parcours scolaire caractérisé par le manque de modèles, des environnements d’apprentissages peu favorables avec des cas fréquents de harcèlement sexuel (impliquant l’argent ou le sexe en échange de notes) et un apprentissage perturbé, entre autres facteurs, entraîne une faible estime de soi des filles. Dans les collèges et les lycées, la pression d’assumer des rôles domestiques augmente ; de plus, à ces niveaux d’enseignement au Liberia, il y a peu de femmes enseignantes pouvant servir de modèles professionnels. De nombreuses filles qui vont à l’école ont des responsabilités familiales, et sans l’appui de leur mari, peu réussissent à obtenir leur diplôme de fin d’études du lycée. Les multiples facteurs aggravants nuisent à l’apprentissage des filles et rend difficile leur réussite aux examens d’entrée aux instituts de formation des enseignants. De fait, il y a une pénurie de femmes qualifiées pour accéder aux RTTI et, selon

les répondant(e)s des projets de développement de l’aide internationale, celles qui viennent par le biais de politiques préférentielles sont en grande partie écartées. 7.1 Recommandations Cette étude propose des recommandations dans quatre principaux domaines : culturel, professionnel, éducatif et administratif. 7.1.1 Dans le domaine culturel L’influence des idéologies du genre sur les pratiques sociales doit être reconnue bien plus profondément au cours des phases de conception et de mise en œuvre des politiques. Ce faisant, la fiction confortable que quelques incitations suffiront doit être abandonnée. Les facteurs identifiés dans cette recherche comme affectant la participation des filles à l’enseignement et le choix ultérieur d’une profession (y compris l’enseignement) ne sont pas de simples aberrations ou « dysfonctionnements », mais des produits culturels, économiques et sociaux concrets. Des campagnes médiatiques importantes sont nécessaires pour modifier la perspective dominante. Les hommes et les femmes doivent apprendre que les femmes sont les égales des hommes et que l’éducation des filles est un investissement et une contribution positive à la nation et la famille. Les hommes doivent être incités à ne pas empêcher leurs femmes ou leurs filles lorsqu’elles veulent poursuivre une carrière, y compris l’enseignement. Les enseignants masculins doivent être incités à respecter leurs homologues féminines. Afin de réduire les disparités entre les genres, les familles doivent comprendre l’importance de l’éducation des filles. Cela suggère d’entreprendre davantage de campagnes en faveur de l’égalité des femmes. Il est aussi nécessaire de mener une campagne nationale permanente pour mettre en évidence le rôle déterminant des femmes enseignantes dans le développement national et l’importance des modèles féminins doit en faire faire partie. En bref, les campagnes sociales doivent précéder les attentes réalistes d’accroître de manière substantielle le nombre de femmes dans le corps enseignant. Il faut développer l’appui aux clubs des filles qui existent maintenant dans un certain nombre d’écoles et qui se sont révélés très efficaces pour transformer les normes culturelles sur le genre chez les jeunes, et Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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essayer de les mettre en place au niveau national. Ils fonctionnent aux niveaux individuel et collectif (pairs) en favorisant le processus fondamental de réflexion sur le genre et ultérieurement l’action progressiste. 7.1.2 Dans le domaine professionnel Les incitations doivent tenir compte de l’impact des normes culturelles sur la disponibilité des femmes pour l’enseignement, et plus particulièrement les implications de leur déploiement dans les zones rurales. Prendre en compte les responsabilités maternelles et domestiques ne doit pas être interprété comme un moyen de consolider les attentes culturelles, mais plutôt comme un moyen de permettre aux femmes de renégocier leurs espaces privé et public. La politique de n’accepter aucun enfant dans les RTTI doit être abandonnée et il fut au contraire offrir des internats élargis. Actuellement, les étudiantes reçoivent 80 US$ par semestre, ce qui est insuffisant, car la plupart des femmes ont une famille à nourrir. De même, il faudrait modifier les critères d’admission des femmes de façon à prendre en compte leur scolarité interrompue dans les écoles primaires et secondaires et leurs responsabilités familiales. Le RTTI de Kakata a adopté la pratique d’offrir aux étudiantes un soutien scolaire avant les examens de mi-semestre, ce qui aide ainsi les étudiantes faibles à améliorer leurs résultats. Il faudrait essayer de mettre cette pratique en place dans d’autres instituts de formation des enseignants. L’idéal serait de donner aux femmes une formation prolongée si nécessaire, et un tutorat individualisé. Comme Vargas et al. (2010) le notent un équilibre délicat doit être établi entre le recrutement d’individus très doués et la constitution d’un corps enseignant culturellement et économiquement diversifié (qualité contre quantité), le second visant nécessairement à réduire la pénurie des enseignants. Enfin, il faut créer davantage de RTTI. Si cela peut sembler contraire à la logique compte tenu du faible nombre d’inscriptions dans les trois instituts, avoir des RTTI plus petits, mais dans un plus grand nombre de comtés ce qui permettrait d’inscrire de plus de femmes rurales, devrait aider à réduire les défis posés par la distance dans les zones rurales. De nombreuses initiatives doivent être entreprises pour rendre la profession enseignante plus attirante. Le niveau des revenus est une question majeure. Une augmentation significative du salaire des enseignants est nécessaire afin qu’ils correspondent à ceux des

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infirmières, des comptables, des fonctionnaires et d’autres professions. Simultanément, les besoins des femmes doivent être traités afin de les attirer et de les garder dans la profession enseignante, par exemple en leur offrant un logement, le transport et une garderie dans les écoles si possible. Les femmes enceintes ne doivent pas être forcées à quitter leur travail et les femmes enseignantes doivent avoir droit à un congé de maternité. L’infrastructure des écoles doit être améliorée de façon à avoir l’eau et l’assainissement ; cela sera utile aux élèves et comme aux enseignant(e)s. Par ailleurs, l’environnement des instituts d’enseignement doit être amélioré ; par exemple, il faudrait une épicerie et une clinique près des instituts de formation des enseignants. Toutes ces améliorations réclament de nouvelles sources de financement et des réévaluations budgétaires pour faire de l’éducation une plus grande priorité, car elle est un investissement pour le futur de la nation. La révision complète des programmes de formation des enseignants de façon à inclure la dimension genre dans la définition des résultats et des choix d’apprentissage est fondamentale. Les enseignants doivent être formés à la théorie du genre et à sa pertinence pour l’éducation. Il faudrait leur apprendre à intégrer du contenu qui porte sur la compréhension des influences positives et négatives des valeurs et des pratiques culturelles par les filles et les garçons. L’éducation sexuelle devrait être une composante explicite du curriculum, car le manque de connaissances sur le processus de la procréation ainsi que sur l’impact des pratiques culturelles et la pression des pairs sont des éléments importants qui influent sur les grossesses adolescentes. 7.1.3 Dans le domaine éducatif Afin d’accroître les candidates potentielles à des postes d’enseignement, des interventions aux étapes clés du parcours scolaire sont essentielles. Les données statistiques montrent que la diminution considérable de la scolarisation des filles intervient lors de la transition vers le collège, et ensuite vers le lycée. Pour éviter les abandons et garantir l’achèvement des filles, il serait important d’adopter des stratégies proposant la gratuité complète de l’enseignement, y compris les repas et les bourses d’études selon les besoins. Pour les filles plus âgées, il faudrait proposer des programmes d’orientation professionnelle. Par-dessous tout, il serait essentiel que le MEN fixe des objectifs chiffrés


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d’achèvement dans les écoles primaires, les collèges et les lycées. Ces objectifs devraient faire avancer le système éducatif vers une parité accrue entre les filles et les garçons ainsi que vers l’accroissement de la proportion de ceux qui ont accès à l’enseignement. Les administrateurs scolaires et les enseignants doivent acquérir une solide compréhension des modes d’apprentissage des filles et organiser des ateliers pour permettre aux administrateurs et aux enseignants de proposer un enseignement et des activités sensibles au genre ; par exemple, organiser des activités d’apprentissage coopératif et encourager les filles à lever la main et partager leurs idées. L’offre de formations sensibles au genre est une étape essentielle nécessaire non seulement aux enseignants et aux administrateurs scolaires, mais aussi aux responsables du MEN et à d’autres membres dirigeants, y compris du ministère des Finances. Le matériel éducatif et les manuels sensibles au genre sont aussi essentiels. Par le biais de programmes traitant de citoyenneté ou d’éducation sexuelle, il faudrait orienter les messages vers les filles et les garçons afin qu’ils comprennent l’importance de l’égalité entre les genres. Le Plan national sur l’éducation des filles constitue un document précieux qui défend d’excellentes mesures. Ce plan doit faire l’objet d’une diffusion plus large dans les comtés et les districts. Les articles de la politique traitant du harcèlement et de la violence sexuels doivent être traduits en lignes directrices spécifiques afin de faciliter leur mise en œuvre. Il faut mettre en place des mécanismes pour motiver les enseignants à rester dans l’enseignement et les élèves à rester à l’école. Par exemple, les écoles doivent être encouragées à tenir des micro-entreprises agricoles afin de compléter le revenu des enseignants et offrir de la nourriture aux élèves pauvres. Les filles doivent être encouragées à s’impliquer dans les différentes activités scolaires, y compris les clubs, les groupes d’étude, la musique, le théâtre et les activités conjointes. Les parents doivent être impliqués dans l’éducation de leurs filles, être informés de leur progrès et de leur potentiel professionnel et jouer un rôle actif dans la direction de l’école sur les questions clés, notamment les filles qui abandonnent l’école pour des raisons de grossesse, de harcèlement sexuel et de pauvreté.

7.1.4 Dans le domaine administratif Les problèmes considérables vécus en matière de recrutement des enseignants, de leur inscription sur les registres du personnel et du paiement à temps de leur salaire doivent être abordés de manière urgente. Il est absolument nécessaire de mettre en place un système de gestion des données à l’aide de la technologie d’Internet. Ce système devrait être utilisé pour gérer le personnel, les budgets locaux, la normalisation des formulaires et la formation des administrateurs aux niveaux inférieurs, à savoir les CEO et les DEO. La centralisation du recrutement et du renvoi des enseignants a été identifiée par certains répondant(e)s comme un élément du problème du recrutement des femmes enseignantes ; pourtant, il n’est pas certain que la décentralisation aidera. Le problème semble être surtout un problème de communication et d’accès aux ressources. Dans le cadre de la décentralisation, de nouveaux problèmes de suivi pourraient émerger. Le Liberia a un nombre important de projets de démonstration. Nombre de ces efforts se chevauchent, ce qui est souhaitable en raison des graves besoins du pays. Toutefois, on a observé dans d’autres pays un schéma inquiétant selon lequel beaucoup de ces projets ne sont pas mis à l’échelle. Le MEN doit s’engager à mettre en œuvre les bonnes pratiques réalisables démontrées par les ONG et les organisations internationales. Les bonnes pratiques doivent être transformées en politiques nationales et institutionnalisées ; par exemple, les bourses d’études pour les étudiantes des RTTI, les clubs de jeunes qui relient les écoles et les communautés, les bourses d’études et les crayons et les livres pour les filles les plus défavorisées. Certaines recommandations identifiées ici réclament une plus grande efficacité de certaines interventions du MEN. Il est cependant admis que la majorité des recommandations appellent des ressources financières supplémentaires. Selon le Plan national d’action de l’EPT 2004-2015, environ 4 millions US$ seront affectés à l’éducation des filles (MEN, 2004). Cette affectation sur plus de 11 ans s’élève à 363.000 US$ annuellement. Ce montant est substantiel dans le contexte du budget de l’éducation du Liberia, mais trop faible par rapport aux immenses besoins des filles et des enseignantes du Liberia. Le défi majeur du gouvernement du Liberia sera d’aborder les questions liées au genre en fonction

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des ressources qu’elles nécessitent pour les résoudre efficacement. Et les déséquilibres entre les genres doivent être corrigés, pas seulement pour des raisons de justice sociale, mais pour la contribution au développement (par exemple, une plus grande égalité a une corrélation positive avec le produit intérieur brut par habitant (Hausmann, Tyson et Zahidi, 2010). 7.2 Approfondir l’étude Les conclusions présentées dans cette étude sont fondées sur un travail intensif mais bref sur le terrain. L’étude a confirmé les facteurs précédemment identifiés dans la documentation, mais elle les a enrichis en proposant une interprétation plus qualitative et par l’utilisation de l’analyse de la dimension genre. Elle a également identifié plusieurs questions qui avaient fait l’objet d’une couverture insuffisante dans le passé. Néanmoins, d’autres questions peuvent être soulevées concernant la dynamique qui affecte le choix des femmes à devenir enseignantes au Liberia. Les questions qui méritent une enquête sont les suivantes : 1. Des études plus détaillées sur la façon dont les femmes et les hommes sont attirés vers l’enseignement (expériences de vie au niveau communautaire prenant en compte l’âge, la classe sociale, l’appartenance tribale et le parcours scolaire). Ces études devraient porter une attention particulière aux rôles des messages positifs et dissuasifs sur l’enseignement comme choix de carrière. 2. Une connaissance plus approfondie et importante de la façon dont les normes culturelles affectent la participation à l’enseignement des filles et des garçons du Liberia. Plus précisément, il est nécessaire d’avoir une meilleure compréhension des différentes pratiques tribales et du rôle des écoles (de brousse) traditionnelles dans la transmission de connaissances culturelles pertinentes ainsi que dans la production d’une interruption de l’enseignement formel des filles dans les zones rurales. 3. L’impact des langues endogènes dans la participation et la réussite scolaire. Comment les enfants ruraux

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répondent-ils aux enseignants qui ne parlent pas leur langue ? Certaines recherches (Rockhill, 1987) indiquent que les femmes, à cause de leur cantonnement fréquent à la sphère domestique, ont moins de chances de parler la langue officielle que les hommes. Comment les enseignants répondent-ils aux élèves qui ne comprennent pas l’anglais standard, en particulier dans des classes nombreuses et multigrades ? 4. Le rôle de l’environnement scolaire qui comprend des caractéristiques positives comme la pédagogie favorisant le genre et des caractéristiques négatives comme le harcèlement et la violence sexuels, les honoraires flexibles et le sexe en échange de bonnes notes. 5. Des études institutionnelles sur le recrutement des enseignants, l’inscription sur les registres du personnel, le déploiement dans les zones rurales, la fixation des salaires et les paiements. L’examen de ces variables nécessiterait des études commençant par des écoles spécifiques et remontant tout le long du système vers le MEN. 6. A un niveau plus macro, mais aux conséquences très importantes, figurent les décisions affectant les budgets nationaux. Des études sur la façon dont les organismes internationaux de prêts fixent les paramètres budgétaires des pays en voie de développement seraient cruciales pour comprendre pourquoi et comment on accorde une très faible priorité à l’éducation nationale. Ces études devraient examiner les réductions des budgets de l’éducation et la façon dont elles ont des répercussions sur le fonctionnement global du système éducatif et sa capacité à répondre aux besoins cruciaux d’un accès accru à l’éducation et à sa grande qualité. Dans toutes ces études, il serait intéressant d’appliquer à la recherche des approches qualitatives mettant au premier plan l’interaction, les tensions et les conflits entre les acteurs sociaux, les institutions, les attentes et les normes sociétales. Il serait très souhaitable de mener des études au niveau des écoles en recueillant des données à la fois quantitative et qualitative.


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Université du Malawi

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L’impact des initiatives des écoles sensibles au genre au Malawi : données factuelles de six études de cas RESUME

Les niveaux élevés de pauvreté obligent de nombreux écoliers, en particulier les filles, à s’engager dans des activités économiques pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille.

Cette étude visait à documenter et évaluer l’impact des politiques et initiatives/interventions en faveur de l’accès à l’éducation, la rétention, la participation et la réussite des filles dans l’éducation de base sur la période de 10 ans de 2000 à 2010. Elle découle de l’observation de l’augmentation du nombre de politiques et d’initiatives mises en œuvre par le gouvernement et les organisations non gouvernementales au Malawi en vue d’améliorer la participation et les droits des filles à l’éducation depuis le Cadre d’action de Dakar. L’étude a employé une conception de recherche à méthodologie mixte qui a permis de recueillir des données quantitativeset qualitatives. Trois districts ont été sélectionnés pour refléter les disparités régionales et géographiques inhérentes au système éducatif du Malawi : Nkhata Bay dans le nord du pays, Salima dans la région centre et Mangochi dans la région sud. Dix-huit écoles ont été choisies pour l’étude, tandis que six écoles primaires ayant bénéficié d’interventions sensibles au genre ont été échantillonnées à dessein pour représenter la participation élevée et faible des filles à l’école. Les données ont été recueillies auprès d’apprenants, d’enseignants, de directeurs d’école, de comités de gestion scolaire, de modèles, de chefs de village, de directeur de l’éducation du district et de partenaires du développement. Elles ont été recueillies à l’aide de groupes de discussion, d’entretiens avec des informateurs clés et des listes de contrôle des Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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écoles. Les données qualitatives ont été analysées par codage et les questions courantes émergeant des données ont été regroupées. D’autre part, les données quantitatives sur les taux d’inscription, de redoublement et d’abandon et la réussite scolaire ont été présentées sous la forme de tableau pour donner des indications sur les tendances et l’impact des initiatives sur la participation des filles à l’éducation. Toutefois, l’analyse finale repose sur les six écoles choisies comme études de cas. Les conclusions de l’étude indiquent que les interventions des organisations, des enseignants, de la communauté et des modèles avaient le potentiel d’améliorer l’accès des filles à la scolarité, de les aider à rester l’école et à exceller dans leurs études. On a constaté un impact plus marqué des initiatives sur l’inscription, la rétention et la réussite scolaire en milieu rural qu'en milieu urbain. Cela suggère que les écoles urbaines offraient un environnement plus propice et que les initiatives ont interagi avec l’environnement de façon positive pour produire des résultats concrets. Cela suggère également que les projets ou les initiatives ciblant les filles en milieu rural doivent être conçus de façon à offrir un éventail complet d’opportunités pouvant être mises à la disposition de la localité. Cependant, dans les autres localités, les conclusions indiquent que les initiatives mises en œuvre pour aborder les problèmes rencontrés par les filles dans les écoles ne correspondaient pas à l’échelle des problèmes. Les niveaux élevés de pauvreté dans certains districts obligent de nombreux écoliers, en particulier les filles, à s’engager dans des activités économiques pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. De plus, les résultats de l’étude indiquent que les initiatives ou les projets qui n’abordent qu’un ou deux aspects des besoins des filles n’ont pas d’effets durables sur la participation scolaire des filles et ne profitent qu’à quelques filles. En conséquence, les filles continuent d’être marginalisées dans l’enseignement. Il est nécessaire d’adopter une approche holistique en vue d’améliorer l’environnement d’apprentissage des garçons et des filles et toute initiative visant à y parvenir doit être conçue pour cibler tous les facteurs d’un lieu et d’un contexte socio-culturel spécifique qui aident à garder les filles à l’école.   1 INTRODUCTION La présente étude a tenté d’enquêter sur l’impact que les politiques et les initiatives en faveur de l’égalité entre les genres dans l’éducation ont eu sur l’accès,

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la participation et les résultats scolaires des filles au Malawi. Elle a impliqué l’analyse de toutes les politiques formulées dans le pays depuis 2000, des stratégies élaborées et de leur mode de mise en œuvre. Elle a évalué l’impact des politiques et des initiatives en faveur de l’égalité entre les genres dans les trois districts les plus défavorisés du Malawi sur la participation des filles à l’éducation.Cette étude s’est inspirée de l’Objectif du Millénaire pour le développement (OMD) numéro 3 et de ceux de l’Education pour Tous (EPT) ayant trait à l’égalité entre les genres dans l’éducation ainsi que du Plan national du secteur de l’éducation du Malawi qui met l’accent sur l’accès équitable à l’éducation (Gouvernement du Malawi, 2008b). 1.1 Le contexte du Malawi L’éducation des filles au Malawi a rencontré un certain nombre de défis en termes d’accès, de rétention et de réussite. En matière d’accès, l’Indice de parité entre les sexes dans l’enseignement primaire du Malawi en 2005 était de 1.0, ce qui indique que le Malawi avait atteint la parité à ce niveau(UNICEF, 2005: 17) ; toutefois, la parité des inscriptions s’expliquait par le taux élevé des inscriptions les quatre premières années. Le nombre de filles inscrites diminuait doucement à mesure qu’elles avançaient dans les classes supérieures, en particulier dans les écoles rurales. A la fin du cycle primaire, au niveau 8, les filles ne représentaient plus que 34 pour cent du nombre des élèves inscrits (CERT, 2004: 12). Les évaluations internationales et nationales du projet Achievement comme «Improving Educational Quality Longitudinal Study » (1999-2002), SACMEQ (Milner et al., 2001), et « Primary Achievement School Study » (2010) ont révélé des différences entre les genres dans les acquis des élèves ; les garçons réussissaient systématiquement beaucoup mieux que les filles dans tous les domaines évalués. De multiples facteurs contribuent à la faiblesse des acquis et de la participation des filles à l’éducation. Il a été démontré que les coûts directs de l’éducation comme les cahiers, les crayons/stylos et les vêtements ont un impact sur l’inscription et la rétention des élèves à l’école. Les familles du Malawi ont tendance à consacrer entre 7,3 et 13 pour cent de leurs dépenses totales à l’éducation (Rose, 2003 dans Kadzamira et Rose, 2003). Cela représente une grande partie des revenus des ménages pauvres et constitue un facteur majeur contribuant aux taux élevés d’abandon (Kadzamira et Rose, 2003: 506).


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La pandémie du VIH et du sida fait des dégâts considérables au Malawi, y compris chez les enfants et les jeunes. On estime à 7 pour cent le nombre d’orphelins de moins de 17 ans qui ont perdu leurs parents à cause du sida (Banque mondiale, 2010). Cela a un impact disproportionné sur l’éducation des filles par rapport à celle des garçons ; d’une part, les filles constituent le groupe de personnes nouvellement infectées qui augmente le plus rapidement, mais elles sont aussi plus susceptibles que les garçons de s’occuper des membres de la famille infectés et affectés par le VIH et le sida (UNICEF, 2005: 17). Il va sans dire que cela affecte leur scolarité. Le manque d’eau et les piètres conditions d’hygiène contribuent également à l’abandon et à l’absentéisme des filles. Selonl’UNICEF (2008), 62 pour cent de la population urbaine et 61 pour cent de la population rurale ont des installations sanitaires inadéquates. Dans les endroits où les installations sanitaires sont inadéquates, les filles sont plus touchées que les garçons. L’emplacement des toilettes et des points d’eau est aussi associé à la violence fondée sur le genre dans les écoles. D’autres facteurs comme la longueur des trajets pour aller à l’école et le manque d’infrastructures affectent également la décision des filles àcontinuer leur scolarité. Le harcèlement sexuel et la violence dans et autour des écoles continuent à être une menace majeure pour l’éducation des filles. Les parents veulent protéger leurs filles des agressions à l’école et sur le chemin en direction et de retour de l’école (UNICEF, 2005: 17). Les agressions verbales et physiques des enseignants et de leurs pairs sont une réalité pour les filles comme pour les garçons et bien que les châtiments corporels soient officiellement interdits au Malawi, ils sont toujours pratiqués. La forme la plus courante est le travail physique : on punit les enfants en leur imposant des travaux physiques pénibles (USAID et DevTech Systems Inc., 2004). Les enfants doivent aussi participer aux projets de développement scolaire en portant des briques ou d’autres matériaux vers les sites de construction des écoles. La culture joue également un rôle important dans l’éducation des filles. Les familles s’inquiètent qu’à la puberté, elles tombent enceintes hors mariage. Les filles sont ainsi contraintes à un mariage précoce, ce qui leur interdit l’accès à l’école. Kainja et Mkandawire (1989) soutiennent que bien que les filles comme

les garçons redoublent plusieurs fois, les filles sont désavantagées parce que le début de l’adolescence leur apporte des demandes contradictoires à l’école, à la maison et dans la communauté. Par exemple, les filles sont impliquées dans des activités comme l’agriculture, les petites activités commerciales et doivent s’occuper de leurs frères et sœurs pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles. De plus, les normes culturelles accordent la préférence aux garçons/hommes par rapport aux filles/femmes et par conséquent, quand il s’agit de l’éducation, la plupart des parents préfèrent envoyer leurs garçons à l’école, tandis que les filles sont forcées de rester à la maison pour s’occuper des tâches ménagères et de leurs frères et sœurs. L’enseignement centré sur l’enfant n’est toujours pas pratiqué dans de nombreuses écoles du Malawi où les enseignants ne sont pas qualifiés et où la taille des classes reste importante. Les ratios élèvesenseignant élevés prédominant depuis l’introduction de l’Enseignement primaire universel compliquent la mise en œuvre de nouvelles approches pédagogiques. Avec des ratios élèves-enseignant dépassant 85:1, la discipline autoritaire demeure la norme de l’enseignement (Kadzamira et Rose dans Evanset Rose, 2007: 907). Dans de telles situations, l’attitude des enseignants et la façon dont ils traitent les filles et les garçons en classe sont importantes. Les recherches les plus récentes suggèrent que ces attitudes seraient en train de changer. L’évaluation de Kendall (2008) des leçons et des meilleures pratiques tirées du projet de développement professionnel « Malawi Teacher Training activity » financé par l’USAID a révélé un environnement bien plus équitable et sensible au genre dans les classes des 10 écoles observées que dans les écoles ne bénéficiant pas de l’intervention. Tout cela suggère fortement que les interventions liées à la dimension genre dans l’éducation au Malawi doivent être documentées et que leur impact sur l’éducation des filles doit être catalogué conformément au Cadre d’égalité des genres dans l’éducation(GEEF) si l’on veut que les responsables politiques, les chercheurs et les pédagogues en tirent des leçons. 1.2 L’énoncé du problème Les indicateurs de l’éducation et de nombreux rapports du Malawi indiquent que la qualité de l’éducation du pays se dégrade et que la participation des filles reste inférieure à celle des garçons (Gouvernement du Malawi, 2008a ; Chimombo, 1999 ; Kadzamira Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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et Chibwana, 1999; Milner, Chimombo, Banda et Mchikoma, 2001). D’après le Plan national du secteur de l’éducation(MEN/CERT,2008), les ratios enseignantélèves sont de 1:90 et les ratios classe-élèves sont supérieurs à 1:107 ; les taux d’abandon sont de14,3 pour cent, les taux de redoublement de 18 pour cent et les taux d’achèvement de 30 pour cent. Les statistiques sont encore plus mauvaises dans les zones rurales que dans les zones urbaines et varient selon les districts. Les études menées par le Consortium d’Afrique australe pour le pilotage de la qualité de l’éducation (SACMEQ) montrent que les résultats scolaires en lecture et en mathématique au Malawi sont inférieurs aux moyennes régionales et que les filles réussissent systématiquement moins bien que les garçons. De plus, l’Enquête 2004 sur la population et la santé a montré que la prévalence du VIH et du sida chez les filles était de 9,1 pour cent comparée à 2,1 chez les garçons. En réponse à ce scénario, le gouvernement a intensifié ses efforts pour aborder la qualité de l’éducation et a proposé des politiques d’orientation en vue de son amélioration. L’accès initial des filles à la scolarité a été effectivement résolu par de nombreux partenariats de développement avec le gouvernement du Malawi et le ministère de l’Education (MEN). Les interventions réussies dans le cadre de ces programmes peuvent être adaptées à la pratique actuelle. Citons entre autres initiatives : les campagnes de mobilisation sociale du projet « Réussite des filles en alphabétisation et éducation de base » qui a travaillé avec les communautés pour créer des plans d’action visant à répondre aux pratiques socioculturelles profondément ancrées qui font obstacle à la scolarité des filles ; l’utilisation du théâtre pour le développement afin de sensibiliser les communautés à la faible scolarisation des filles dans l’enseignement primaire ; les programmes radiophoniques sur les questions relatives au genre diffusés dans tout le pays ; les curricula sensibles au genre et la production de littérature sur les femmes modèles. Outre l’accès, les initiatives les plus récentes sont centrées sur la qualité de l’éducation. Citons notamment Malawi Education Support Activity, Malawi Teacher Training Activity, le programme de soutien à l’école primaire, Tikwere, Read Malawi, les écoles sensibles au genre et le soutien au développement professionnel des enseignants du Malawi. De nombreuses institutions et bailleurs multilatéraux se sont joints aux efforts du gouvernement pour améliorer l’accès et la qualité de l’éducation de base 46

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dans le pays. Les programmes actuels, comme le projet « Soutien à l’école primaire : pilote des frais scolaires » financé par l’USAID qui est actuellement dans sa troisième année de mise en œuvre dans le district de Dowa dans la région du Centre, ont déplacé leur attention de la priorité exclusive aux filles à tous les enfants vulnérables, en particulier les orphelins du sida. Une récente étude d’évaluation a constaté qu’ils ont eu un impact plutôt positif (Williams, Chimombo, Chiuye, Kunje et Selemani, 2008). Plan Malawi a aussi ciblé les enfants vulnérables dans son volet sur l’appui à la qualité de l’éducation. En outre, le Malawi a connu une forte hausse du nombre des organisations non gouvernementales (ONG) et des organisations communautaires dans le domaine de l’éducation, pour passer de 16 avant 1994 pendant le règne du gouvernement autoritaire à 51 en 2006 dans un cadre démocratique(Kadzamira et Kunje, 2002; CSCQBE, 2006). Il était donc important d’enquêter pour savoir si ces efforts, avaient, oui ou non, produit des effets positifs sur l’éducation des filles. Cette étude a visé à documenter et évaluer l’impact des politiques et initiatives mises en œuvre pour améliorer la participation et les droits des filles à l’éducation depuis le Cadre d’action de Dakar, à savoir entre 2000 et 2010. Elle servira de recueil des politiques et des initiatives qui ont abordé la question de l’inégalité entre les genres et de celles qui ont défendu la cause des droits des filles à l’éducation sur une période 10 ans en vue d’atteindre les objectifs nationaux et mondiaux, dont le Malawi est signataire. De plus, elle met en évidence les politiques et les programmes innovants qui ont eu des résultats positifs et qui pourraient être appliqués ou mis à l’échelle avec succès ailleurs. L’étude a porté sur les objectifs spécifiques suivants: • Identifier les politiques formulées pour améliorer la participation des filles à l’éducation en réponse aux objectifs de l’EPT. • Documenter les projets et les initiatives qui ont été essayés et mis en œuvre pour améliorer la participation des filles dans l’éducation dans trois districts du Malawi. • Documenter les différentes stratégies, structures et l’appui associé qui ont été conçus pour la mise en œuvre des politiques et des initiatives. • Examiner l’impact des politiques et des initiatives sur l’accès, la rétention, la participation et les résultats scolaires des filles dans l’éducation de base.


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2. LA CONCEPTION DE LA RECHERCHE 2.1 Le cadre théorique La présente étude d’évaluation a été orientée par le GEEF, un outil élaboré par EQUATE1 et fondé sur les résultats des évaluations des activités éducatives appuyées par l’USAID. Le cadre GEEF est un outil utile pour offrir des opportunités égales permettant aux filles et aux garçons d’aller à l’école, d’apprendre, d’obtenir de bons résultats et de réussir en tant qu’adulte.2 Il offre une plateforme pour l’évaluation des initiatives des écoles sensibles aux filles au Malawi et porte sur quatre domaines d’activités prioritaires : l’égalisation de l’accès, l’égalisation du processus d’apprentissage, l’égalisation de la réussite scolaire et l’égalisation des résultats externes. L’égalisation de l’accès signifie donner des chances égales aux garçons et aux filles, aux hommes et aux femmes d’accéder aux opportunités, installations et capacités éducatives de l’éducation de base, à savoir l’offre de bourses d’études pour les enfants à risque afin de promouvoir une meilleure fréquentation. Le but de cette étude est de trouver la façon dont les politiques et les projets ont contribué à uniformiser les règles du jeu pour les filles et les garçons selon le cadre conceptuel du GEEF. Pour ce qui est de l’égalisation du processus d’apprentissage, le cadre identifie deux facteurs qui influent sur les processus d’enseignement et d’apprentissage et le contexte dans lequel ils se déroulent. L’outil insiste sur la nécessité que les filles et les garçons aient les mêmes curricula et ilappelle à l’utilisation de méthodes et de matériels pédagogiques qui excluent les préjugés et les stéréotypes de genre. L’égalité de la réussite scolaire signifie que les filles et les garçons ont des opportunités égales pour réussir et que les résultats scolaires sont basés sur le talent et les efforts individuels. Ainsi, le cadre aide à analyser les opportunités égales permettant aux filles et aux garçons de démontrer leurs connaissances grâce à leurs efforts et leurs aptitudes. Les interventions pour égaliser la réussite scolaire incluent l’utilisation de techniques d’essais qui impliquent l’utilisation de différents types de questions, d’évaluations

individuelles ou collectives et des exemples et une langue sans préjugés ni stéréotypes de genre. L’égalité des résultats externes se produit quand le statut des hommes et des femmes, leurs biens et leurs ressources et leurs capacités à contribuer, participer et bénéficier des différentes activités sont égaux. Cela implique que les opportunités de carrière, le temps passé pour trouver un emploi après avoir quitté l’école et les revenus des hommes et des femmes ayant des qualifications similaires sont égaux. Si le GEEF offre un cadre pour l’analyse des opportunités des filles dans le domaine de l’éducation, il n’épuise pas le champ des influences qui entrent en jeu pour uniformiser les règles du jeu entre les garçons et les filles. D’autres facteurs peuvent intervenir, mais ne pas être capturés par le GEEF utilisé dans cette étude. 2.2 La méthodologie L’étude a employé une conception de recherche à méthodologie mixte qui a permis la collecte de données quantitatives et qualitatives. Cela a beaucoup contribué à la compréhension de la réalité complexe de l’éducation des filles au Malawi. L’approche de méthodologie mixte est basée sur le concept de la triangulation fondé sur le postulat que tout biais inhérent à une source de données, un enquêteur ou une méthodologie sera minimisé lorsqu’il sera utilisé conjointement aux autres sources de données, enquêteurs ou méthodologies (Jick dans Creswell,2003:174). Trois districts ont été sélectionnés pour refléter les disparités régionales et géographiques inhérentes au système éducatif du Malawi. Les critères de sélection ont inclusles faibles normes éducatives, notamment la faible participation des filles dans les districts qui a motivé les partenaires locaux et internationaux à mettre en œuvre les interventions et les ratios élevés élèves-enseignant (REE) en 2000. Les districts servant échantillons se trouvaient à Nkhata Bay dans le nord du pays, à Salima dans la région du centre et à Mangochi dans la région du sud. D’après les statistiques de l’éducation du Malawi, chaque district avait le taux de REE le plus élevé de sa région. Il était de 118:1 dans le district de Nkhata Bay, de 138:1 dans celui de Salima et de 192:1 dans celui de Mangochi.

EQUATE est un programme du bureau « Femmes pour le développement » de l’USAID qui aide les missions sur le terrain et l’USAID à renforcer leurs capacités pour instaurer des pratiques et des politiques équitables entre les genres dans les activités de l’éducation de base. 2 USAID (2008). Cadre d’égalité des genres. Contrat # GEW-I-00-02-00021-00, Task Order #1 EQUATE : Réaliser l’égalité de l’éducation 1

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Un total de 18 écoles a été choisi pour l’étude. Elles ont été choisies en consultation avec les bureaux des directeurs régionaux de chaque district. Les six écoles primaires qui bénéficiaient d’interventions sensibles aux filles ont été choisies à dessein pour représenter des exemples de participation élevée et faible des filles. Trois écoles avaient des niveaux élevés de participation et de réussite scolaire parmi les filles et les trois autres avaient les plus faibles. Les écoles ont été sélectionnées dans les zones d’impact de projets ou d’initiatives sélectionnés axés sur l’éducation des filles. Une participation élevée désignait une école avec un nombre élevé de filles inscrites au niveau 8 et une faible participation désignait une école avec un nombre faible de filles inscrites au niveau 8 qui est la dernière classe du cycle d’enseignement primaire. L’échantillon de répondants à cette étude a inclus les apprenants, les enseignants, les directeurs, les comités de gestion scolaire, les femmes modèles, les chefs de village, les directeurs de l’éducation des districts et les partenaires du développement. Dans chaque école, un groupe de 10 filles et de 10 garçons des niveaux 6 à 8 ont été sélectionnés pour fournir des informations sur l’impact des politiques et projets liés au genre dans leurs domaines. Les apprenants de ces niveaux ont été choisis parce qu’ils étaient plus susceptibles de contribuer à la discussion que ceux du cours préparatoire. Les apprenants ont été sélectionnés par les enseignants sur la base de leur capacité à s’exprimer sur les questions du genre et de la scolarité. Dans chaque école, six enseignants, trois femmes et trois hommes, ont participé à la discussion thématique de groupe (DTG) portant sur les initiatives qui ont habilité les enseignants à traiter les questions de la dimension genre et de leurs effets sur l’éducation des filles. Les directeurs des écoles de l’échantillon ont été des informateurs clés. Les entretiens ont porté sur la façon dont les filles répondaient aux différentes initiatives et quelles étaient les stratégies qui avaient marché dans le contexte de la communauté environnant l’école ainsi que des suggestions sur la voie à suivre pour promouvoir l’éducation des filles. Les membres du comité de gestion scolaire (CGS) et l’association de parents d’élèves (APE) ont participé à la DTG pour identifier la façon dont les communautés ont intégré les politiques de genre dans leur vie quotidienne en vue d’améliorer la participation des filles dans l’éducation.

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Une femme servant de modèle dans la communauté environnant chaque école a été interviewée comme informateur clé. Le but était de comprendre de quelle façon ces femmes ont utilisé les différentes initiatives de genre pour améliorer la participation des filles à l’éducation. Au niveau communautaire également, les chefs de village, sous la juridiction desquels les écoles sélectionnées se trouvaient, ont été des informateurs clés pour donner une image générale des initiatives de genre dans le temps et de leur impact sur les filles, les femmes et les enfants vulnérables. Les directeurs de l’éducation des districts(DEO)ont aussi servi d’informateurs clés. Comme toutes les initiatives liées à l’éducation et au genre au niveau du district passent par le bureau de l’éducation du district, ces informateurs ont fourni des informations sur les stratégies de mise en œuvre, les ressources disponibles pour ces initiatives et les résultats des différentes interventions dans le district. Ils ont aussi évalué quelles étaient les initiatives qui avaient eu l’impact le plus visible sur l’éducation des filles dans le district. Les partenaires du développement et le personnel du ministère de l’Education soutenant et/ou mettant en œuvre les initiatives ont été interrogés sur leur implication à l’égard du genre etde l’éducation des filles et leur évaluation des initiatives. 2.2.1 La réalisation de l’étude Trois équipes ont mené l’étude, chacune responsable de l’un des trois districts de Nkhata Bay, Salima et Mangochi.Un certain nombre d’instruments ont été employés pour produire les données de l’étude, notamment : • Des calendriers séparés d’entretien des informateurs clés ont été conçus pour les directeurs de l’éducation des districts, les commissaires de district, les chefs de village, les femmes modèles, les directeurs d’école, les partenaires du développement et le directeur de l’éducation de base et les responsables de l’éducation des filles au siège du ministère de l’Éducation. • Des guides de DTG pour recueillir les informations des membres du comité de gestion scolaire ou de l’APE, des instituteurs et des institutrices ainsi que des apprenants garçons et filles. La DTG des apprenants a été menée séparément pour les filles et les garçons et dans la mesure du possible, les répondantes femmes ont été interrogées par des chercheurs femmes.


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• La liste de vérification scolaire utilisée pour dénombrer les inscriptions, les ressources et les autres données de l’école liées à l’éducation des filles. Ces instruments ont aidé à éclairer les questions relatives à l’accès, l’équité et l’égalité de l’éducation dans le cadre EQUATE fondé sur le GEEF.Les équipes ont aussi identifié, compilé et passé en revue la liste des politiques et des interventions ciblant les filles mises en œuvre dans le district depuis 2000. 2.2.2 L’analyse des données L’examen de l’impact des projets de chaque district s’est basé sur une matrice incluant les activités menées dans le cadre de l’initiative ou les stratégies utilisées, la façon dont l’initiative s’inscrivait dans le GEEF ainsi que les résultats et l’impact sur l’éducation des filles. De cette façon, un catalogue des initiatives a été créé. Les données qualitatives ont été codées et les questions communes émergeant des données ont été regroupées. Des vignettes des entretiens ont été identifiées pour appuyer les thèmes au titre du cadre GEEF. Les données des entretiens avec les différentes parties prenantes ont été revérifiées et triangulées pour donner une image générale des niveaux de connaissances, des attitudes prédominantes et des pratiques actuelles résultant des politiques et des projets axés sur le genre. Les données quantitatives sur les inscriptions, les redoublements, les taux d’abandon et les résultats scolaires ont été présentés sous forme de tableau pour donner des indications sur les tendances et l’impact des initiatives liées à la participation des filles dans l’éducation. Si l’analyse finale s’est appuyée sur deux écoles par district qui ont servi d’études de cas, l’analyse de l’ensemble des 18 écoles sélectionnées a contribué à présenter le contexte et l’aperçu des écoles du district. 3 LES DECOUVERTES DE LA RECHERCHE 3.1 Les politiques Toutes les initiatives relevées dans les écoles étaient basées sur les politiques gouvernementales, notamment celles détaillées ci-dessous. Elles ont été mises en œuvre avec l’aide de différents bailleurs et ONG pour attirer les filles à l’école et les y garder jusqu’à la fin du cycle primaire. Les principales politiques sont les suivantes :

1. La politique des frais scolaires : en 1994, le gouvernement a introduit l’enseignement universel gratuit qui a supprimé les frais scolaires pour tous les enfants. Cela a offert l’opportunité égale aux garçons et aux filles de s’inscrire à l’école sans le poids des frais scolaires, permettant ainsi l’égalité de l’accès. Cela a entraîné une forte augmentation des inscriptions, de 1,8 million en 1992/1993 à 2,9 millions en 1994/1995(MEN, 1997). 2. La politique de réadmission : en 1993, le gouvernement a révisé sa politique d’expulsion des écolières enceintes en leur permettant de retourner à l’école après la naissance. Au début, les communautés et les écoles confessionnelles étaient opposées à ce que les jeunes mères retournent à l’école. De plus, la politique n’a pas été largement diffusée et, en conséquence, elle a eu peu d’impact sur la réinscription des filles. En 2006, les directives qui ont simplifié cette politique ont été diffusées et des campagnes intensives de sensibilisation ont été menées à travers le pays.Les communautés et les écoles se sont habituées à l’idée et les filles enceintes retournent à l’école. Récemment, le Fonds des Nations unies pour l’enfance (PNUD) et le Forum des éducatrices africaines (FAWE) du Malawi ont défendu l’idée des groupes de mères qui encouragent désormais les filles qui ont abandonné l’école à y retourner, favorisant ainsi l’égalité de l’accès à l’éducation. 3. La politique de l’uniforme scolaire : en 1994, une nouvelle politique a déclaré que l’uniforme scolaire n’était plus une condition pour la présence à l’école. Cela a supprimé les restrictions pesant sur les enfants qui n’avaient pas les moyens de s’acheter un uniforme et a été ainsi une façon d’égaliser l’accès à l’éducation. 4. L’abolition des restrictions des matières et la révision du curriculum primaire et de l’évaluation : en 1993, le gouvernement a supprimé les restrictions sur les matières que les filles avaient le droit d’apprendre à l’école. Auparavant, les filles devaient se limiter à l’apprentissage de l’économie ménagère, notamment l’alimentation et la nutrition, les vêtements et les tissus et la gestion des ressources familiales, tandis que les garçons devaient obligatoirement apprendre la science et les matières techniques. La nouvelle politique a permis aux garçons et aux filles de choisir toutes les matières sans restriction. En 1998, le curriculum du cycle primaire a fait l’objet d’une révision, au cours de laquelle les matières

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ont été réorientées vers des approches sensibles au genre. Cette révision était un effort d’améliorer l’égalité du processus d’apprentissage en donnant aux garçons et aux filles des règles du jeu égales pour la réussite scolaire. 5. L’enseignement des compétences pour la vie :cette matière a été introduite dans les écoles pour lutter contre le VIH et le sida. Elle est centrée sur les compétences relatives aux droits de l’enfant, au genre, au VIH et au sida, à la santé et à la survie. Elle est devenue obligatoire en 2010 et elle a offert une opportunité égale aux garçons et aux filles d’apprendre des compétences diverses. L’enseignement des compétences pour la vie représente par conséquent une occasion de parvenir à l’égalité dans le processus d’apprentissage dans le cadre du GEFF. 6. La politique de sélection 50-50 des écoles secondaires : le gouvernement a introduit un quota de sélection de 50 pour cent de garçons et de 50 pour cent de filles dans les internats secondaires et dans les externats communautaires secondaires. Bien que cela se soit révélé difficile à mettre en œuvre en raison du manque de place en internat pour les filles, cela a permis à plus de filles d’aller à l’école secondaire et cela aussi augmenté les aspirations des filles à poursuivre leurs études. L’initiative a donc renforcé l’égalité de l’accès à l’éducation ainsi que l’égalité des résultats externes. 3.2 Le district de Mangochi Le district de Mangochiest l’un des plus défavorisés en termes d’indicateurs éducatifs. Son emplacement sur les rives du lac, les plaines fertiles et la culture locale se combinent de façon complexe pour annuler les efforts visant à améliorer les services éducatifs. Mangochi a reçu plus d’attention du gouvernement et des ONG que n’importe quel autre district pour améliorer la situation de l’éducation dans le district. Le système éducatif du district se compose d’écoles publiques et privées. On compte 243 écoles primaires et seules 150 d’entre elles vont jusqu’au niveau 8. Les autres sont des écoles sources allant généralement jusqu’aux niveaux 4 à 6. On a constaté que cela posait un grand problème aux enfants voulant continuer aux niveaux supérieurs qui ne sont disponibles que dans des écoles situées à de longues distances. Il n’existe que 11 écoles primaires privées dans le district. Au moment de l’étude, on comptait un total de 1 579 enseignants, parmi lesquels 513 (32,5 pour cent) femmes. 50

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Certaines activités socioéconomiques du district ont un énorme impact négatif sur le secteur éducatif. L’industrie de la pêche et celle de la culture du tabac, par exemple, attirent les enfants d’âge scolaire. Les garçons sont attirés pour aller en Afrique du Sud, où le travail est apparemment facile à trouver et leur permet de commencer à gagner leur vie bien qu’ils soient en âge d’aller à l’école. En conséquence, le taux d’alphabétisation du district n’est que de 58 pour cent, un taux bien inférieur au taux national de 64 pour cent. Une conséquence particulièrement inquiétante est le taux de prévalence du VIH de 21 pour cent, bien plus élevé que la moyenne nationale de 12 pour cent. Le Plan de l’éducation du district pour 2010 a identifié les obstacles majeurs à l’amélioration de l’offre de services éducatifs. Citons parmi les principaux obstacles le faible soutien des communautés, des dirigeants locaux et desAPE/CGS, la pénurie d’enseignants, la pénurie de logements pour les enseignants, et les matériels d’enseignement et d’apprentissage inappropriés dans les écoles. Les efforts de développement des écoles visaient à améliorer l’environnement d’enseignement et d’apprentissage à travers divers projets comme la construction d’écoles, la réhabilitation et la maintenance des écoles et la construction de latrines et de logements pour les enseignants. Les principaux acteurs identifiés dans le Plan d’éducation du district (2010) étaient l’Agence islandaise de développement international, YouthNet and Counselling, Emmanuel International, World Vision Malawi et le Programme alimentaire mondial. Plusieurs initiatives en rapport avec les fillettes ont été menées à Mangochi au cours des deux dernières décennies. L’étude a identifié certaines de ces initiatives à la fois dans les zones rurales et urbaines.

3.2.1 Etude de cas 1 : l’école de Sungu L’école de Sungu est située dans la partie rurale du district dans une zone parlant majoritairement le Yao et musulmane. Les inscriptions ont diminué de 954 en 2007 à 947 en 2010. Les enseignants comptaient 7 hommes et 1 femme. Le REE était de 119:1. Les infrastructures se composaient de 12 salles de classe permanentes, 4 quatre logements pour les enseignants et seulement 30 tables. Il y avait douze toilettes pour les filles, huit pour les garçons et deux pour les enseignants. L’école avait un puits et une réserve. Toutefois, les bâtiments étaient en mauvais état, car la plupart des classes avaient besoin d’entretien.


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Les élèves ont déclaré que de nombreuses filles des zones rurales ne fréquentaient pas l’école. Les principales raisons données étaient que la plupart des écoles existant dans ces zones étaient des écoles primaires se terminant auniveau 6, sans niveaux 7 ou 8, et que les écoles allant jusqu’au niveau 8 étaient très éloignées, privant les enfants de l’opportunité indispensable d’achever leur scolarité primaire. Les autres enfants préféreraient travailler dans les fermes ou les propriétés pour gagner de l’argent. D’autres seraient paresseux, pas motivés et recevraient peu d’encouragement de leurs parents. On a observé que la pauvreté, qui prive ceux qui ont moins de ressources d’opportunités égales d’accéder à l’éducation, était souvent tenue pour responsable. De nombreuses filles s’étaient inscrites, mais certaines ont abandonné lorsqu’elles ont atteint le niveau 6 pour épouser des garçons qui partaient en Afrique du Sud pour faire des petits boulots. On nous a dit que certaines d’entre elles étaient déjà fiancées à ces garçons et donc qu’elles ne travaillaient pas sérieusement à l’école. Toutes les parties prenantes ont répondu que les parents influençaient fortement les mariages précoces. De

plus, après la puberté, les filles qui revenaient des cérémonies coutumières d’initiation à l’âge adulte changeaient d’attitude ; elles avaient l’esprit au mariage, aboutissant à un taux élevé d’abandon. Dans ce domaine, les parents ne semblaient pas comprendre l’importance de l’école. Un des problèmes évoqués était que les parents et leurs enfants sortaient beaucoup. On a remarqué que les apprenants avaient tendance à manquer l’école pour aller regarder des émissions de télévision et des films dans les établissements de divertissement aux alentours del’école. Il n’y avait pas de femme modèle dans la région, car aucune des personnes interrogées n’a pu citer une femme instruite ayant bien réussi. La pénurie d’enseignants a aussi été considérée comme un facteur contribuant aux abandons. Les apprenants se sont plaints qu’il n’y avait presque rien à faire à l’école. Initiatives à l’école de Sungu Plusieurs initiatives menées à l’école ont été analysées dans le tableau 1.1 ci-dessous à l’aide ducadre GEEF.

Tableau 1.1 : Initiatives à l’école de Sungu et leur dimension GEEF Initiative Activités Campagne pour l’éducation Bourses d’études pour les filles, les orphelins ou les enfants des femmes et des filles vulnérables qui travaillent dur et passent au niveau 8 afin de motiverd’autres enfants.

Dimension GEEF Egalisation de l’accès Egalisation du processus d’apprentissage

YouthNet and Counselling

1. Sensibiliser les garçons et les filles à leurs droits à l’éducation. 2. Les apprenants expriment leurs préoccupations sur l’environnement d’apprentissage. 3. Suivre les raisons à l’origine des abandons.

Egalisation de l’accès Egalisation du processus d’apprentissage

Les éclaireuses

1. Former les filles à des compétences pratiques, par ex. la cuisine, le tricot, la couture. 2. Activités comme les débats, les pièces de théâtre et les conférences pour améliorer la maîtrise de l’anglais. 3. Encourager les filles à travailler dur à l’école.

Egalisation de l’accès Egalisation du processus d’apprentissage

Programme mondial alimentaire

1. Alimentation scolaire. 2. Rations à emporter pour les filles qui viennent régulièrement l’école. 3. Former les enseignants à garder une distance sociale avec les apprenants. 4. Acheter des tableaux portatifs, de la peinture pour tableau noir, des tasses et des seaux en plastique. 5. Encourager les filles à rester à l’école. 6. Mettre l’accent sur de bonnes toilettes.

Egalisation de l’accès Egalisation du processus d’apprentissage

Groupes de mères

Encourager les filles qui ont abandonné l’école à y retourner.

Egalisation de l’accès Egalisation du processus d’apprentissage

Organisation pour l’agriculture et l’alimentation

1. Former les élèves aux compétences agricoles. 2. Récompenser les filles qui travaillent dur avec les produits de la ferme.

Egalisation de l’accès Egalisation du processus d’apprentissage

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la participation des élèves et donner aux apprenants l’opportunité de terminer l’école. Le graphique 1.3 montre les inscriptions de garçons et de filles de 2007 à 2010. Graphique 1.3 : Les inscriptions de garçons et de filles aux niveaux 1 et 5 à l’école de Sungu,2007-2010 250 200 Inscriptions

Il ressort de cette analyse que la majorité des projets a abordé l’égalisation de l’accès et du processus d’apprentissage. Aucun projet spécifique concernant les deux autres aspects du GEEF, à savoir l’égalisation de la réussite scolaire et des résultats externes, n’a été observé à l’école. Cependant, bien que ne prenant pas la forme de projet, certaines activités semblaient aborder l’égalisation de la réussite scolaire. Elles reposaient surtout sur l’introduction du nouveau curriculum qui insisteentre autres sur les aspectsdu genre, des droits de l’homme, de l’enseignement centré sur l’apprenant et de l’évaluation continue. Les enseignants étaient orientés vers l’enseignement de ce nouveau curriculum et cela a été un moyend’égaliser la réussite scolaire des garçons et des filles. Cependant, il a rarement été fait mention de projets ciblant les enseignants et visant à enrichir leurs compétences de différentes méthodes pédagogiques qui amélioreraient les résultats des garçons et des filles.

150 100 50 0 Garçons

2007

Impact sur les tendances de l’éducation Les tendances concernant les inscriptions sont un moyen de montrer la participation des filles dans le temps par rapport à celle des garçons, tandis que les tendances concernant la rétention montrent quels sont les résultats obtenus par les écoles pour accroître

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Garçons Filles

Garçons

2008

Filles Garçons

2009

Filles

2010

Année

Niv. 1

En ce qui concerne l’égalisation des résultats externes, les communautés et les écoles n’ont pas rapporté de projet spécifique visant à améliorer la participation des filles à l’école. Personne ne semblait connaître d’initiatives à l’extérieur de l’école visant à améliorer le statut des hommes et des femmes. Ils n’ont mentionné aucune activité qui augmentait l’accès aux biens et aux ressources, ou les bénéfices des activités économiques, sociales et politiques des zones rurales. Cela suggère l’absenced’influence externe pour inciter les garçons et les filles à rester à l’école. Cependant, la perspective d’aller en Afrique du Sud pour trouver du travail était largement considérée comme le moyen d’échapper à la pauvreté pour les hommes des zones rurales du district. Cela avait un impact très négatif sur l’accès des garçons à la scolarité et affectait à son tour la participation des filles à l’école, car leur priorité était d’épouser ces garçons et elles se fiançaient avec eux. Ainsi, la culture du mariage précoce, associée au manque de travail pour les garçons, a des effets très négatifs sur l’éducation des filles dans les écoles rurales du district.

Filles

Niv. 5

A l’école de Sungu, les inscriptions au niveau 1 étaient bien plus élevées que celles au niveau 5, indiquant des taux de redoublement et d’abandon très élevés entre ces niveaux. Cependant, la persévérance au niveau 5 est passée progressivement en faveur des filles. Plus de filles que de garçons ont persévéré au niveau 5 pendantcette période, bien que les différences entre les garçons et les filles aient été légères. Ce qu’il convient de noter dans l’analyse est le léger changement concernant la persévérance des filles dans les zones rurales, en dépit de toutes les difficultés. Cela semble indiquer que les interventions ont eu un impact positif sur la participation des filles à l’éducation, mais qu’il n’est pas aussi spectaculaire qu’on aurait pu l’espérer. L’absence de classe de niveau supérieur dans les écoles primaires a été un gros obstacle à la motivation des filles et la longueur des trajets pour aller dans les bonnes écoles a représenté un grave problème. L’égalisation de l’accès dans les zones rurales reste donc un problème majeur, car les écoles de ces zones souffrent toujours d’une mauvaise accessibilité. Bien que différentes initiatives aient ciblé l’égalisation du processus d’apprentissage, de la réussite scolaire et des opportunités externes, cela demande toujours beaucoup d’efforts aux filles de se rendre dans des écoles éloignées, quelle que soit leur motivation.


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L’impact perçu par la communauté L’impact des interventions sur l’éducation des filles a aussi été déduit des impressions des différentes parties prenantes de l’école, de la zone et du district. Ces impressions ont largement dépendu de la façon dont le projet a été rendu public et du degré d’implication des parties prenantes dans la mise en œuvre. On a noté les impressions suivantes sur les initiatives ou les projets : • Les directeurs ont rapporté qu’ils connaissaient dans leur établissement peu de cas de fillesqui sont retournées à l’école après avoir accouché ; dans la plupart des cas, les filles qui se sont réinscrites sont allées dans une école différente. Les communautés rurales connaissaient la politique de réadmission, mais elle ne jouait pas un grand rôle. Certains ont déclaré que les groupes de mères avaient aidé les filles à s’ouvrir et à discuter des problèmes qui affectaient leur scolarité. Ces initiatives ont le potentiel d’accroître les opportunités des filles à un accès égal à l’éducation. • Les gens considéraient que les bourses d’études avaient aidé de nombreuses filles à continuer l’école, bien que quelques-unes aient tout de même arrêté l’école pour se marier. Certaines sont allées à l’école secondaire grâce aux bourses. Si les bourses ont accru les opportunités d’accès des filles, elles ont aussi donné l’espoir aux filles des niveaux inférieurs que travailler dur leur permettrait de poursuivre leurs études. Les bourses ont par conséquent accru l’égalité des résultats externes pour les filles des niveaux inférieurs de l’école primaire. • On a remarqué que les filles s’intéressaient aux activités comme la couture, les débats et le théâtre, qui mêlent l’enseignement avec les loisirs et les compétences pour la vie. Les filles ont été encouragées ainsi à aller régulièrement à l’école pour participer à ce genre d’activités. • Avec la construction de nouvelles salles de classe, les élèves apprenaient désormais à l’intérieur par opposition à l’extérieur sous les arbres. Si ce genre de projets ont accru l’accès, ils ont aussi accru l’égalité du processus d’apprentissage pour les garçons et les filles. • L’alimentation scolaire a été jugée efficace pour tenir les élèves éveillés et attentifs en classe. • Les initiatives nouvellement introduites comme l’accompagnement des filles n’avaient pas encore produit d’impact visible sur les élèves. • L’attitude des enseignants à l’égard des filles et leur

travail n’avait pas changé de manière visible, selon les élèves. Néanmoins, les initiatives centrées sur la formation des enseignants en vue d’accroître l’égalité du processus d’apprentissage et d’égaliser la réussite scolaire en améliorant les pratiques d’évaluation peuvent avoir un impact positif sur la façon d’enseigner des enseignants. • Les élèves de l’école ont dit qu’ils constataient peu d’impact des projets sur la rétention parce que le taux d’abandon était en hausse et que peu de filles venaient vraiment à l’école ou continuaient leur scolarité. Si les parties prenantes ont bien accueilli la plupart des initiatives, elles conservaient des doutes sur l’efficacité de certains projets. Par exemple, les enseignants ont constaté peu de changement dans l’attitude des parents à l’égard de leur l’éducation de leurs enfants, ce qui explique que seules de légères augmentations ont été constatées en matière d’accès et de rétention des filles dans les écoles des zones rurales. Plus particulièrement, il a été déploré que les chefs locaux dans la zone autour de l’école n’aient pas mis en œuvre ce qui leur avait été demandé dans les différents ateliers du projet. On a rapporté les propos d’un chef qui aurait préféré avoir un hôpital plutôt qu’une école étant donné l’impact minuscule des projets sur la participation des filles à l’éducation. 3.2.2 Etude de cas 2 : école de Mponda L’école de Mponda a été l’étude de cas d’une école urbaine du district de Mangochi où les inscriptions sont passées de 1 982 en 2007 à 2 319 en 2010. L’école avait 34 enseignants, dont deux non qualifiés et un REE de 72:1. En matière d’infrastructures, l’école avait 16 salles de classe permanentes et 10 logements pour les enseignants. Il y avait 13 toilettes pour les garçons, 12 pour les filles et 2 pour les enseignants. Il n’y avait que 62 tables dans toute l’école. Dans les zones urbaines, les taux d’inscription et d’abandon étaient moins préoccupants que dans les zones rurales. Cependant, les raisons de la nonfréquentation ou de l’abandon des filles étaient similaires, bien que moins marquées. On a également constaté que les inscriptions de filles étaient généralement plus élevées que celles des garçons dans les écoles urbaines. Plusieurs raisons ont été couramment citées par les différents répondants incluant les apprenants, Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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les enseignants, les directeurs et les membres de la communauté pour expliquer que les filles n’allaient pas à l’école. De nombreuses filles envisageraient le mariage plutôt que de poursuivre leurs études. On a évoqué la pression des pairs pour épouser des garçons qui ont travaillé en Afrique du Sud, tandis que certaines filles tombent enceintes, d’autres quittent l’école par choix et d’autres préfèrent monter de petites affaires. Les filles seraient aussi attirées par les nombreuses boites de nuit, les bars et les discothèques des zones urbaines. Le manque d’encouragement des parents a aussi été cité. Les parents qui n’ont pas été à l’école ne comprennent pas l’importance de l’école, malgré les nombreux messages véhiculés de l’église, entre autres. Certaines filles avaient dépassé l’âge scolaire normal de

leur classe, alors que d’autres étaient dans l’incapacité de payer leurs frais scolaires. Les enseignants ne connaissaient pas très bien l’enseignement sensible au genre pour attirer et retenir les filles à l’école. De plus, le gouvernement employait des personnes n’ayant pas terminé leurs études, ce qui signifie que les jeunes apprenants n’avaient pas de modèles pour les stimuler à suivre des études. Initiatives à l’école de Mponda Plusieurs initiatives sont mises en œuvre à l’école pour encourager la participation des filles. Le tableau 1.2 montre ces initiatives et le rôle qu’elles jouent dans l’égalisation de l’éducation selon le cadre GEEF.

Tableau 1.2 : Initiativesà l’école de Mponda et leur dimension GEEF

Initiative Campagne pour l’éducation des femmes et des filles YouthNet and Counselling

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Activités

Dimension GEEF

Bourses d’études pour les filles, orphelins ou • Egalisation de l’accès enfants vulnérables qui travaillent dur et • Egalisation du processus passent au niveau 8 afin de motiver d’autres enfants. d’apprentissage 1. Sensibiliser les garçons et les filles sur leurs droits à l’éducation. 2. Les apprenants expriment leurs préoccupations sur l’environnement d’apprentissage. 3. Suivre les raisons à l’origine des abandons.

• Egalisation de l’accès • Egalisation du processus

Eclaireuses

1. Former les filles à des compétences pratiques, par ex. la cuisine, le tricot, la couture. 2. Activités comme les débats, les pièces de théâtre et les conférences pour améliorer la maîtrise de l’anglais. 3. Encourager les filles à travailler dur à l’école.

• Egalisation de l’accès • Egalisation du processus d’apprentissage

Groupes de mères

Encourager les filles qui ont abandonné à retourner l’école

Mary’s Meals (Repas de Mary)

Alimentation scolaire

• Egalisation de l’accès • Egalisation du processus d’apprentissage • Egalisation de l’accès • Egalisation du processus d’apprentissage

Quest for Learning (Save the Children)

1.Former les enseignants à la distribution égale des questions aux filles et aux garçons. 2.Former les enseignants à garder une distance sociale avec les apprenants. 3.Acheter des tableaux portatifs, de la peinture pour tableaux noirs, des tasses et des seaux en plastique. 4.Encourager les filles à rester à l’école.

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d’apprentissage

• Egalisation de l’accès • Egalisation du processus d’apprentissage


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L’impact sur les tendances de l’éducation Les inscriptions des filles à l’école de Mponda montrent une augmentation des inscriptions aux niveaux 1, 5 et 8. Les graphiques 1.4 et 1.5 montrent les tendances concernant les inscriptions à l’école entre 2007 et 2010. Graphique 1.4 : Les inscriptions de filles aux niveaux 1, 5 et 8 à l’école de Mponda, 2007-2010

300

Inscriptions

250 200

Graphique 1.5 : Les inscriptions de garçons aux niveaux 1, 5 et 8 à l’école de Mponda, 2007–2010

300 250 200 150 100

Niv. 1

50

Niv. 5

0

2007

2008

2009

2010

Niv. 8

Année La rétention des garçons à l’école de Mponda montre une tendance similaire à celle des filles, mais les filles sont plus nombreuses que les garçons à atteindre le niveau 8. Il est évident que les filles de l’école ont un léger avantage sur les garçons en matière d’accès et de rétention dans cette école urbaine. L’impact perçu par la communauté

150 100

Niv. 1

50

Niv. 5

0

jusqu’auniveau 8. La comparaison des inscriptions de garçons à l’école de Mponda au cours de la même période (Graphique 1.5) a servi de base pour évaluer les effets des interventions.

Inscriptions

Sur les six initiatives menées à l’école Mponda, aucune n’avait de composante directement liée à l’égalisation de la réussite scolaire ou des résultats. Cependant, dans les zones urbaines, les opportunités de travail des filles étaient égales à celles des garçons. Davantage de filles étaient allées à l’école secondaire et certaines filles avaient atteint l’université. La politique permettant aux filles de retourner à l’école après avoir abandonné en raison d’une grossesse a aussi encouragé les filles à voir les avantages de la scolarité, ce qui a abouti à la scolarisation d’un plus grand nombre de filles qu’auparavant. Selon le cadre GEEF, ces activités représentent l’égalisation des résultats externes. L’école attire plus de filles quand les opportunités qu’elle offre pour avancer dans la vie sont évidentes. La rétention accrue des filles à mesure qu’elles progressent auxniveaux 5 et 8 à l’école de Mponda le confirme.

2007

2008

2009

2010

Niv. 8

Année En 2010, les inscriptions de filles au niveau 1 ont chuté par rapport aux années précédentes, mais les niveaux 5 et 8 ont enregistré des inscriptions plus élevées que les années précédentes. Cela indique que plus de filles réussissent aux niveaux inférieurs sans redoubler et qu’elles sont plus nombreuses qu’auparavant à continuer

En plus des données factuelles fournies par les tendances concernant les inscriptions, les parents, les enseignants et les apprenants ont perçu certains effets positifs des diverses interventions sur la participation des filles à l’école de Mponda. Ils ont offert les exemples suivants de la visibilité de l’impact: • Les efforts initiaux pour accroître l’accès ont été jugés réussis. Les campagnes de sensibilisation ont eu pour effets que les parents envoient leurs enfants à l’école, tandis que les chefs de village ont commencé à édicter d’autres règles pour soutenir l’éducation des filles. Les programmes radiophoniques ont encouragé les filles à aller à l’école et à se protéger de l’infection du VIH et du sida. Cependant, bien que de nombreuses filles aient commencé l’école, leur taux d’abandon est resté très élevé, comme celui des garçons.

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• Les bourses d’études accordées aux filles ont fourni de bonnes incitations aux filles pour réussir et poursuivre leurs études. Elles ont accru l’accès et égalisé le processus d’apprentissage.

ciblant les filles dans les environnements ruraux doivent être conçus de façon à offrir un éventail complet d’opportunités pouvant être accessibles à la localité.

• Des toilettes convenables ont apporté un plus grand confort aux filles à l’école et accru ainsi leur participation. La fourniture de tables dans les classes a encouragé les élèves à participer au travail en classe et amélioré ainsi leurs résultats en classe.

3.3 Le district de Nkhata Bay

• Il a été déclaré que les fêtes de fin d’année pour les élèves de niveau 8 et les récompenses décernées aux meilleurs de leur classe encourageaient les autres à travailler dur. • Les APE/CGS et les groupes de mères ont contribué à faire retourner à l’école les filles mariées et celles qui étaient tombéesenceintes. Dans une zone, 15 filles sont retournées à l’école, même si toutes n’ont pas continué jusqu’à la fin du cycle. • Les compétences pour la vie, les initiatives liées au VIH et au sida et la campagne« Learn without Fear » ont eu un certain impact, mais les autorités étaient réservées sur les effets des projets n’impliquant que quelques filles. • On a constaté que les filles participant aux activités des éclaireuses s’affirmaient plus qu’avant. Elles participaient plus en classe, notamment en posant des questions et elles déclaraient les cas de violence. On a dit que les garçons respectaient ces filles. • On a déclaré que plus de filles avaient eu accès à l’école secondaire, ce qui a été attribué aux différentes interventions. Il a notamment été signalé que plus de filles que de garçons avaient été sélectionnées par les écoles secondaires, encourageant les filles des niveaux inférieurs. Les découvertes de l’étude indiquent que les interventions des organisations, des enseignants, de la communauté et des femmes modèles avaient le potentiel d’améliorer l’accès des filles à la scolarité et de les aider à rester à l’école et d’exceller dans leurs études. On a observé que les initiatives liées à l’inscription, la rétention et la réussite des filles avaient un impact plus marqué dans le contexte urbain plus que l’environnement rural. Cela suggère que l’environnement des écoles urbaines a fourni une série plus complète d’éléments GEEF et que lesinitiatives ont interagi avec l’environnement de façon positive pour produire des résultats concrets. Cela suggère aussi que les projets ou les initiatives

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Le district de Nkhata Bay se trouve sur les côtes septentrionales du lac Malawi et sa géographie se compose principalement de collines. La majorité des habitants sont des agriculteurs de subsistance qui cultivent principalement les bananes et le riz comme cultures de rapport. Cependant, le district dispose desindustries lucratives du thé et du caoutchouc qui contribuent à l’économie. De plus, le lac fournit une industrie dynamique de la pêche et du tourisme. Etant un district proche du lac, Nkhata Bay attire de nombreux touristes tout au long de l’année. La prostitution et l’abus de drogue et d’alcool sont marqués dans ce district qui a un taux élevé de prévalence du VIH et du sida. Environ deux tiers (65 pour cent) de la population du district sontalphabétisés, un taux à peine plus élevé que la moyenne nationale de 64 pour cent (MEN/CERT, 2008). D’après le rapport 2010 du Système d’information sur la gestion de l’éducation, le district comptait un total de 183 écoles primaires publiques et 3 écoles primaires privées pour 75 906 apprenants, dont 49 pour cent de filles. Les orphelins représentaient moins d’un cinquième (15 pour cent) des inscriptions totales et environ la moitié (49 pour cent) était des filles. Les inscriptions ne se sont que faiblement développées (3,8 pour cent) entre 2004 et 2010,en grande partie en raison de conditions défavorables comme l’extrême pauvreté, la longueur des trajets jusqu’à l’école, les mariages précoces et les mauvaises infrastructures incapables de supporter les conditions climatiques difficiles. Les femmes représentaient 28 pour cent des 972 enseignants des écoles primaires du district, ce qui signifie que les écoles n’avaient aucune ou peu de femmes enseignantes pour servir de modèle et de conseillère. A 78:1, le REE était meilleur que celui de 2007 (97:1) et légèrement meilleur que la moyenne nationale de 80:1. En ce qui concerne les écoles secondaires, on en dénombrait 44 pour 6 968 apprenants, mais aucune pour quatre des écoles primaires du district. Les filles représentaient 46 pour cent des inscriptions des écoles secondaires, tandis que les 15 pour cent des 266 enseignants étaient des femmes, ce qui impliquait


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l’absence de femmes dans certaines écoles. En 2008, 12 écoles secondaires n’avaient pas de femmes parmi leurs enseignants. Plusieurs questions, y compris certaines déjà mentionnés, affectaient l’éducation en général, et l’éducation des filles en particulier dans le district. Le nombre limité d’écoles secondaires, le terrain montagneux et la vaste étendue d’eau du lac Malawi créent de longues distances entre les écoles. Pendant la saison des pluies, les classes sont souvent interrompues parce que les enfants ne peuvent faire les longues distances à pieds sous la pluie et les classes ne peuvent pas se tenir à l’extérieur des écoles qui manquent de salles de classe. Les défis liés à l’école incluent la pénurie grave d’enseignants. L’absence de logement pour les enseignants signifie que les enseignants manquent aussi l’école parce qu’ils doivent parcourir de longues distances pour aller à l’école. Les facteurs économiques incluent la pauvreté générale des ménages et la faim qui affectent les dépenses consacrées aux coûts directs de l’éducation (transport, contributions financières à l’école, matériels d’écriture, cahiers, uniformes) et les coûts indirects. Les industries du thé, du caoutchouc, du tourisme et de la pêche attirent de nombreux enfants loin de l’école pour gagner de l’argent pour eux et pour leur famille. Les filles sont confrontées aux avances des hommes et des garçons, qui essaient de les inciter à accepter des relations sexuelles contre de l’argent ce qui aboutit à des grossesses et des mariages précoces et, à terme, à abandonner l’école. Un facteur très dissuasif à l’éducation des filles est la pratique d’isoler les filles de la société chaque mois pendant leur cycle menstruel. Cela signifie que les filles manquent au moins cinq jours de scolarité chaque mois et que l’accès et les opportunités d’apprentissage leur sont interdits. A la maison, les tâches ménagères sont assignées aux filles et elles sont fatiguées quand elles arrivent à l’école le matin. S’ajoute à cela la longueur des trajets pour aller à l’école et de nombreuses filles s’absentent d’elles-mêmes de l’école et obtiennent de mauvais résultats, ce qui les amène habituellement à redoublerleur classe. Frustrées par l’échec et le redoublement, de nombreuses filles ont simplement tendance à arrêter l’école prématurément. On a observé dans le district une faible participation de la communauté aux activités de l’école : la moitié des

écoles seulement avaient un CGS opérationnel et moins d’un tiersune APE fonctionnelle. Cela signifie que les filles n’ont pas bénéficié du soutien de la communauté pour aller à l’école et y rester. Les femmes modèles étaient peu nombreuses et peu actives dans les activités scolaires. Tous ces facteurs posent un défi à l’accès, la rétention et la qualité de l’éducation. Plusieurs initiatives ou projets ont été constatés au niveau scolaire pour tenter de contrebalancer ces défis. Deux écoles ont été sélectionnées pour servir d’études de cas du district afin de déterminer la façon dont les initiatives s’attaquaient aux défis existants et l’impact qu’elles avaient sur l’éducation des filles. 3.3.1 Etude de cas 3 : école de Chiha L’école de Chiha est située le long de la partie sud du district de Nkhata Bay. Au moment de l’étude, les infrastructures de l’école étaient inadéquates : elles ne comprenaient que 9 salles de classe, 1 logement pour enseignant et 120 tables pour les apprenants. Des installations sanitaires permanentes étaient disponibles pour les filles et les garçons et les enseignants et un point d’eau temporaire étaient disponibles. L’école avait aussi un terrain de sport, un jardin et une fosse dépotoir pour jeter les déchets. Il y avait 12 enseignants qualifiés, parmi lesquels 75 pour cent de femmes. Les inscriptions sont passées de 1 005 à 1 199 entre 2007 et 2010. Le REE est passé de 84 à 100 au cours de la même période, indiquant des hausses plus élevées que les moyennes du districtestimées à 75 entre 2004 et 2008 (Système d’information sur la gestion de l’éducation 2008).Les activités extracurriculaires incluaient les clubs comme AIDS Toto, l’enseignement des compétences pour la vie, les droits de l’homme/de l’enfant, la santé, le Conseil de la sécurité routière du Malawi et la vie sauvage. Initiatives à l’école de Chiha Il y a eu trois initiatives majeures pour l’éducation des filles à l’école de Chiha : Violence contre les femmes et les filles – L’ennemie du développement (VAWOGEDE), le groupe de mères et les femmes modèles. VAWOGEDE a été mis en œuvre en 2007, avec un pair intervenant et un groupe d’action de village spécialement créé pour la mise en œuvre des activités. Le tableau 1.3 montre ces initiatives menées à l’école ainsi que d’autres visant à favoriser la participation des filles.

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Tableau 1.3 : Initiatives à l’école de Chiha et leur dimension GEEF Initiative Activités Dimension GEEF Groupe de mères 1.Suivre la participation des filles à l’école. 2. Encourager les filles qui ont abandonné à retourner à l’école. • Egalisation de l’accès 3. Faciliter la construction de vestiaires et de toilettes pour les filles. • Egalisation du processus d’apprentissage 4. Acheter une machine à coudre et fabriquer des uniformes scolaires pour • Egalisation des résultats externes les filles pour les vendre à un prix modique. 5. Aider les filles avec des fournitures scolaires et hygiéniques (crayons, stylos, cahiers, serviettes hygiéniques, savon). 6. Mener une campagne de sensibilisation sur l’importance de l’éducation pour les filles et les garçons. 7. Sensibiliser les écoles et les communautés pour prévenir la violence contre les filles. 8. Accroître le statut des filles et des femmes dans la société. VAWOGEDE

1.Sensibilisation à la violence et aux agressions à l’égard des filles et des femmes pour créer des écoles et des communautés sûres. 2. Encourager les mères adolescentes à retourner à l’école. 3. Former les enseignants auxdroits des enfantspour rendre les écoles plus sensibles aux enfants. 4. Former les enseignants à traiter les garçons et les filles sur un pied d’égalité. 5. Sensibilisation à l’importance de l’éducation des filles. 6. Créer un réservoir de femmes instruites pour assumer des rôles de direction, politiques et économiques. 1. Encourager les filles à s’inscrire et à rester à l’école. 2. Partager les expériences de vie et d’éducation pour promouvoir la sécurité, l’estime de soi, la confiance et l’efficacité chez les filles. 3. Inviter les femmes modèles aux campagnes scolaires pour accroître le statut et la valeur des filles et des femmes dans la société.

• Egalisation de l’accès • Egalisation du processus d’apprentissage • Egalisation des résultats externes

Lesclubs scolaires

Faire participer les apprenants aux compétences de santé, de bien-être, de gestion des conflits et calcul.

• Egalisation de l’accès

Le don de tables et de chaises

1.Fourniture de tables pour créer un environnement d’apprentissage propreet promouvoir la participation des filles en classe.

• Egalisation de l’accès • Egalisation du processus d’apprentissage

Les femmes modèles

Comme on peut le voir dans le tableau 1.3, aucune des initiatives à l’école Chiha n’abordait l’égalisation de la réussite scolaire. Elles étaient axées sur l’accès à l’éducation, le processus d’apprentissage et l’égalisation des résultats externes.

• Egalisation de l’accès • Egalisation du processus d’apprentissage • Egalisation des résultats externes

Graphique 1.6 : Les inscriptions à l’école de Chiha par sexe et par niveau,2007 90 80

L’impact sur les tendances de l’éducation Les tendances concernant les inscriptions ont été utilisées comme un indicateur de remplacement des preuves concrètes de l’impact de ces initiatives. Il faut toutefois noter que l’on ne peut pas considérer les changements en matière d’inscriptions comme résultant d’un seul facteur, mais d’une combinaison de facteurs.

Nombre d'élèves

70 60

40

20

Garçons

10 0

Niv. 1 Niv. 2 Niv. 3 Niv. 4 Niv. 5 Niv. 6 Niv. 7 Niv. 8

Niveau

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Filles


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Le graphique 1.6 montre que les inscriptions de filles en 2007 étaient plus élevées que celles de garçons à tous les niveaux, à l’exception du 2 et du 8. Alors que les inscriptions de garçons ont augmenté aux niveaux 1 et 2 et se sont effondrées au niveau 3, les inscriptions de filles sont restées stables aux trois niveaux, avec une légère baisse au niveau 4, avant d’augmenter au niveau 5. Il donc raisonnable de suggérer que les projets ont contribué à l’augmentation des inscriptions de filles. Toutefois, en 2010, les inscriptions de filles ont diminué contrairement à l’impression des participants qui pensaient qu’elles avaient augmenté (Graphique 1.7). Graphique 1.7 : Les inscriptions à l’école de Chiha par sexe et par niveau,2010 100 90 80

Nombre d'élèves

70 60

initiatives aient négligé les facteurs qui encouragent la rétention des filles dans les écoles. 3.3.2 Etude de cas 4 : école de Kavu L’école de Kavuest située à 15 km de la ville de Mzuzu, mais elle relève de la juridiction du district de l’éducation de Nkhata Bay. Les infrastructures de l’école étaient inadéquates au moment de l’étude : elles ne comprenaient que 2 salles de classe, 9 logements pour les enseignants, 82 tables, 12 toilettes pour les apprenants (8 pour les garçons et 4 pour les filles) et 2 toilettes pour les enseignants. Il y a avait huit enseignants, parmi lesquels huit femmes. Sept enseignants avaient les qualifications MSCE et un avait leJCE. Le nombre d’élèves inscrits était de 476 en 2009 et a augmenté légèrement à 509 en 2010. Le nombre de filles inscrites était de 46 pour cent, légèrement inférieur au 50 pour cent de l’objectif du Plan national du secteur de l’éducation.Le REE était élevé, avoisinant 123 élèves pour un enseignant et dépassant la moyenne nationale de 80. Les seules activités extracurriculaires étaientles clubs AIDS Toto et d’éclaireuses.

50 40 30 20

Garçons

10 0

Filles Niv. 1 Niv. 2 Niv. 3 Niv. 4 Niv. 5 Niv. 6 Niv. 7 Niv. 8

Niveau

En 2010, les inscriptions de filles n’ont augmenté qu’aux niveaux 2 et 3, alors qu’elles ont diminué au niveau 5. Moins de filles ont commencé l’école au niveau 1 en 2010 et moins encore moins ont atteint les niveaux 7 et 8. Ces résultats suggèrent que les initiatives ne s’étaient pas encore traduites par des changements positifs visibles ou concrets en matièred’inscriptions pendant la période des projets. Il semblerait que les résultats de ces

Le chef de groupe du village a attribué la faible participation des filles dans cette école aux grossesses. La pratique culturelle de confiner les filles dans une pièce isolée pendant leur cycle menstruel les éloignait del’école pendant environ une semaine chaque mois. Les autres raisons citées incluaient les facteurs économiques comme les parents qui envoient leurs filles faire des courses pendant les heures de classe pour aider à la gestion des petites affaires familiales. Initiatives à l’école de Kavu Plusieurs initiatives étaient en cours de mise en œuvre à l’école de Kavupour aborder l’éducation des filles comme l’indique le tableau. Ces initiatives ont abordé l’éventail complet des dimensions du GEEF.

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Tableau 1.4 : Initiatives à l’école de Kavu et leur dimension GEEF

Initiative

Activités

Dimension GEEF • Egalisation de l’accès

Proximité des pairs

1.Campagnes de porte-à-porte pour encourager les filles et les garçons à aller à l’école. 2. Encourager ceux qui ont abandonné à retourner à l’école.

Installation d’eau par gravité

1. Fournir de l’eau potable à l’école. 2. Motiver les filles et les garçons pour aller à l’école.

Activités sportives

1.Fournir des équipements sportifs et des prix aux joueurs et aux • Egalisation de l’accès • Egalisation du processus équipes. qui gagnent. d’apprentissage 2. Motiver les enfants à aller à l’école. • Egalisation de la réussite 3. Récompenser les meilleurs de la classe. scolaire 4. Récompenser les filles et les garçons sur un pied d’égalité en matière de résultats sportifs. 5. Offrir des moyens alternatifs, autres que les interrogations écrites, pour démontrer les aptitudes.

Femmes modèles

1.Motiver les filles à continuer leur scolarité. • • 2. Donner aux filles des exemples de femmes qui ont réussi pour leur montrer comment obtenir de bons résultats à l’école. 3. Interactionavec des femmes qui ont réussi à l’école pour promouvoir • les droits des filles et des femmes et améliorer leur statut et leur valeur dans la société.

Sorties scolaires

1. Motiver les filles à continuer leur scolarité grâce à l’interaction avec des femmes qui ont réussi à l’école. 2. Améliorer l’application des droits des filles et des femmes ainsi que leur statut et leur valeur dans la société.

• Egalisation de l’accès

Egalisation de l’accès Egalisation du processus d’apprentissage Egalisation des résultats externes

• Egalisation de l’accès • Egalisation du processus d’apprentissage

• Egalisation des résultats externes

L’impact sur les tendances de l’éducation Le graphique 1.8 montre les tendances concernant les inscriptions dans les huit niveaux à l’école de Kavu en 2009. Les inscriptions de filles n’ont dépassé celles des garçons qu’au niveau 3 et sont restées derrière à tous les autres niveaux. Les années suivantes (Graphique 1.9), les inscriptions de filles ont augmenté légèrement aux niveaux 4 et 7, tout en dépassant celles des garçons aux niveaux 3, 4 et 7. Graphique 1.8 : Les inscriptions à l’école de Kavu par sexe

Graphique 1.9 : Les inscriptions à l’école de Kavu par sexe

et par niveau, 2009

et par niveau, 2010

50

80

45

70

Nombre d'élèves

Nombre d'élèves

40 35 30 25 20 15 10

Garçons

5 0

Filles Niv. 1 Niv. 2 Niv. 3 Niv. 4 Niv. 5 Niv. 6 Niv. 7 Niv. 8

Niveau

60

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60 50 40 30 20

Garçons

10 0

Filles Niv. 1 Niv. 2 Niv. 3 Niv. 4 Niv. 5 Niv. 6 Niv. 7 Niv. 8

Niveau


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L’impact perçu par les communautés Les participants ont signalé que les initiatives à l’école de Kavu étaient relativement nouvelles, mais que l’on avait observé que de nombreuses filles venaient à l’école. Ils pensaient aussi que les prix et les autres récompenses encourageaient les filles à travailler dur à l’école. Il a été dit que la violence fondée sur le genre avait diminué parce que le groupe de pairs intervenants et les apprenants avaient reçu le conseil de signaler les cas d’inconduite des enseignants de façon à ce que leurs auteurs soient sanctionnés. Les apprenants ont jugé qu’il y avait égalité entre les genres, car les enseignants enseignaient de la même façon aux filles et aux garçons. Les filles et les garçons apprenaient ensemble, y compris les matières liées à l’éducation sexuelle, ils faisaient les tâches ménagères ensemble et ils recevaient un accompagnement. Les études de cas du district de Nkhata Bay indiquent que les initiatives mises en œuvre pour aborder les problèmes rencontrés par les filles ne sont pas à la hauteur des problèmes. Les niveaux élevés de pauvreté du district forcent de nombreux élèves, en particulier les filles, à mener des activités économiques pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Les coûts indirects du travail à la maison doivent être pris en compte et/ou supprimer complètement pour libérer les enfants du poids de devoir travailler pour soutenir leur famille. Les données des études de cas montrent que les inscriptions de filles aux niveaux inférieurs étaient généralement plus élevées qu’aux niveaux supérieurs et que la rétention et l’achèvement demeuraient des problèmes. Les initiatives ont en grande partie réussi à accroître l’accès à l’école en créant des environnements scolaires sûrs pour les filles et en leur offrant des fournitures scolaires et hygiéniques. Il est clair, cependant, que se focaliser sur une seule dimension de l’éducation des filles n’est pas suffisant pour permettre une amélioration générale. L’accès seul n’est pas suffisant ; d’autres besoins doivent aussi être abordés. Une approche globale prenant en compte plusieurs problèmes qui affectent les filles doit être adoptée. 3.4 Les études de cas du district de Salima Salima est un district près du lac dans la région centrale du Malawi. C’est un district agricole avec un peu de pêche le long du lac et des principales rivières. D’un point de vue géographique, Salima est montagneux à l’ouest

et plat le long de la côte est, ce qui en fait une zone propice aux inondations. Cela affecte le fonctionnement des écoles dans le district : pendant les inondations, les communautés aux alentours de l’école cherchent un abri dans les salles de classe et les cours sont interrompus. De plus, le réseau routier du district devient inaccessible pendant la saison des pluies, ce qui affecte l’accès aux écoles. La pêche, l’agriculture et certaines pratiques culturelles comme les cérémonies d’initiation sont à l’origine des taux élevésd’abandon, d’absentéisme et de redoublement dans les écoles. Salima est divisé en dix zones d’éducation avec un total de 130 écoles primaires. Alors que le nombre de zones a augmenté de sept en 2007 à dix en 2010, le nombre des écoles a diminué de 137 à 130 au cours de la même période. Sur les 130 écoles, 25 était des écoles primaires de premier cycle (passées de 9 en 2002) et 25 des écoles primaires de second cycle et 80 étaient des écoles primaires à part entière (passées de 74). On comptait aussi 7 écoles primaires privées. Le nombre total d’inscriptions dans le district était de 89 498, parmi lesquels 44 862 (50 pour cent) de filles. Il y avait 1 102 enseignants qualifiés, dont 435 (39,5 pour cent) femmes. Cela donnait un REE de 81:1. 3.4.1

Etude de cas 5 : l’école de Chimwe

L’école primaire de Chimwe est une école publique construite en 2001 avec l’aide du British Council. Pendant l’année scolaire 2010, il y avait 1 445 élèves – parmi lesquels 730 (50,5 pour cent) étaient des filles – et 23 enseignants (dont 17 femmes). Cela donnait un REE de 62:1. Tous les enseignants étaient qualifiés. L’école a 16 salles de classe, 1 bureau pour le directeur, 2 logements pour les enseignants, 1 réserve, 1 salle du personnel et un total de 300 tables. Des tables étaient disponibles pour tous les élèves des niveaux 3 à 8. L’école disposait aussi d’un ordinateur et d’une machine à photocopier qui étaient tous deux en état de fonctionnement. En conséquence, la gestion des registres de l’école était très bonne. Initiatives à l’école de Chimwe Le projet de Promotion de l’éducation des filles (PROGE), financé par l’UNICEF et mis en œuvre par leCRECCOM, a été la seule initiative relevée dans cette école ciblant spécifiquement l’éducation des filles. Le tableau 1.5 montre comment les activités du projet s’inscrivaient dans le GEEF.

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Tableau 1.5 : L’initiative PROGE à l’école Chimwe et sa dimension GEEF Initiative PROGE

Activités 1. Acheter des matériaux pour la construction de toilettes adaptées aux filles. 2. Sensibiliser la communauté sur l’importance de l’éducation des filles. 3. Créer des groupes de mères pour faire en sorte que les filles qui ont abandonné l’école y retournent. 4. Financer la construction d’un poulailler pour lever des fonds pour soutenir le projet.

Dimension GEEF • Egalisation du processus d’apprentissage • Egalisation de la réussite scolaire • Egalisation des résultats externes et égalisation de l’accès

Le projet PROGE est un bon exemple des initiatives qui abordent l’éducation des filles en utilisant une approche holistique. Tous les éléments du GEEF sont reflétés dans les activités. Ils sont combinés avec les infrastructures existantes qui engendrent un niveau élevé de participation des filles et des demandes fréquentes de transfert dans l’école. Cependant, la mise en œuvre du projet a rencontré certains défis. Citons parmi eux : la durabilité de l’approvisionnement en serviettes hygiéniques, le manque de transparence et de responsabilité ; le manque d’implication de toutes les parties prenantes (notamment le groupe de mères) et le manque de soutien de la direction de l’école (il n’y avait pas du tout d’eau dans les toilettes des filles pendant la visite).

Graphique 1.11 : Les inscriptions à l’école de Chimwe par

L’impact sur les tendances de l’éducation

L’analyse des données sur les inscriptions del’école a montré une augmentation de 39 pour cent entre 2007 et 2010. Un examen attentif révèle aussi que la progression des filles s’est améliorée, à l’exception du niveau 4 sur le graphique. L’examen des taux d’abandon et de redoublement à l’école n'a révélé presque aucun abandon et une forte diminution des taux d’abandon, de 28 pour cent en 2007 pour passer à 15 pour cent en 2010. Les taux de redoublement des garçons et des filles ont fluctué, mais entre 2007 et 2010, le nombre de garçons ayant redoublé était meilleur que celui des filles (30 pour cent de redoublement chez les filles contre 28 pour cent chez les garçons entre 2007, et 14 pour cent chez les filles contre 15 pour cent chez les garçons en 2010).

Les graphiques 1.10 et 1.11 montrent les taux d’inscription à l’école de Chimwe en 2007 et 2010 respectivement. Graphique 1.10 : Les inscriptions à l’école de Chimwe par sexe et par niveau, 2007 80 70

Nombre d'élèves

60 50 40

80 70

Nombre d'élèves

60 50 40 30 20 10 0 Niv. 1

Niv. 2

Niv. 3

Niv. 4

Niv. 5

Niv. 6

Niv. 7

Niv. 8

Niveau Garçons

Filles

30

3.4.2

20 10 0 Niv. 1

Niv. 2

Niv. 3

Niv. 4

Niv. 5

Niv. 6

Niveau Garçons

62

sexe et par niveau, 2010

Filles

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Niv. 7

Niv. 8

Etude de cas 6 : école primaire de Ngolo

Ngolo est une école primaire sous l’égide de l’Eglise catholique romaine. Pendant l’année scolaire 2009, on comptait 10 enseignants qualifiés et 1 237 inscriptions, soit un REE de 1:123/124. L’école avait 10 salles de classe permanentes, 1 bureau pour le directeur, 8 logements pour les enseignants, 1 réserve et 1 salle du personnel.


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Il y avait 12 toilettes pour les garçons, 12 toilettes pour les filles et 4 pour le personnel. Les registres ont montré que l’école disposait de 118 tables. Initiatives à l’école de Ngolo Le tableau 1.6 montre les initiatives mises en œuvre à l’école de Ngolo pour favoriser l’éducation des filles. Tableau 1.6 : Initiatives à l’école de Ngolo et leur dimension GEEF

Initiative

Activités

Dimension GEEF

FAWE Malawi

1. Former les enseignants et les groupes de mères à la façon de soutenir l’éducation des filles. 2. Fournir des produits hygiéniques aux filles. 3. Renforcer la politique de réadmission des filles. 4. Fournir un accompagnement aux filles pour éviter les facteurs qui peuvent faire obstacle à leur scolarité. 5. Introduire l’utilisation de femmes modèles pour encourager les filles. 6. Encourager la création de clubs de filles.

• Egalisation de l’accès • Egalisation du processus d’apprentissage • Egalisation de la réussite scolaire • Egalisation des résultats externes

Star Fish

1. Mettre en relation les écoles du Malawi à des écoles du Royaume-Uni. 2. Organiser des visites éducatives mutuelles d’enseignants. 3. Soutenir les programmes d’alimentation scolaires par la fourniture de produits agricoles pour la culture du maïs.

• Egalisation de l’accès • Egalisation du processus d’apprentissage • Egalisation de la réussite scolaire • Egalisation des résultats externes

Glad Tidings Orphan Care

1. Offrir de l’aide aux apprenants les plus défavorisés. 2. Encourager les apprenants qui ont abandonné pour retourner à l’école.

• Egalisation de l’accès • Egalisation du processus d’apprentissage • Egalisation de la réussite scolaire • Egalisation des résultats externes

L’impact sur les tendances de l’éducation Les graphiques 1.12 et 1.13 montrent les taux d’inscriptions de 2007 et 2010 respectivement. Graphique 1.12 : Les inscriptions à l’école de Ngolo par sexe et par niveau, 2007 160 140 120

Nombre d'élèves

Bien que les trois projets couvrent tous les aspects du GEEF, l’école est toujours confrontée à certains défis. Ngolo est une école très pauvre où de nombreux problèmes s’ajoutent à la faiblesse de la direction de l’école. L’école est située dans une zone avec de fortes pratiques culturelles et malgré les interventions cidessus mentionnées, la pratique des mariages précoces persiste et les filles continuent d’abandonner l’école en nombre important. Les entretiens et les GTD ont révélé que les cérémonies coutumières d’initiation à l’âge adulte coïncident avec les jours de classe, ce qui perturbe la scolarité des enfants. Plusieurs communautés sont dépendantes d’un petit nombre d’initiateurs et lorsque ces derniers sont disponibles pour organiser les cérémonies, cela entraîne l’absence de nombreux élèves de l’école pendant les cérémonies. En outre, l’étude n’a pas pu identifier de femmes modèles dans les communautés aux alentours de l’école.

100 80 60 40 20 0

Niv. 1 Niv. 2 Garçons

Niv. 3

Filles

Niv. 4 Niv. 5

Niv. 6

Niv. 7

Niv. 8

Niveau

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Graphique 1.13 : Les inscriptions à Ngolo par sexe et par niveau, 2010 160 140

120

Nombre d'élèves

100 80 60 40 20 0

Niv. 1

Niv. 2

Niv. 3

Niv. 4

Niv. 5

Niv. 6

Niv. 7

Niv. 8

Niveau Garçons

Filles

Les graphiques 1.12 et 1.13 nous permettent d’observer que le nombre total des inscriptions a chuté de manière générale de 2007 à 2010. Les données révèlent aussi une certaine augmentation du nombre total des inscriptions des filles et indiquent que les élèves restent un peu plus longtemps à l’école. Globalement, l’école de Ngolo est confrontée à un problème général d’abandon qui semble s’aggraver si l’on en juge par les chiffres des niveaux 1 à 8 de 2007 et 2010 (5,3 et 5,06 respectivement). En 2010, les abandons semblent avoir été plus un problème pour les filles que pour les garçons. Cela peut être une indication que les initiatives en faveur de la promotion de l’éducation des filles à l’école n’ont pas atteint leurs objectifs. De manière générale, les données factuelles de Ngolo ont souligné la nécessité d’impliquer davantage de parties prenantes et d’apporter un soutien holistique permanent à la conception et à la mise en œuvre des projets. Il est aussi nécessaire de renforcer la sensibilisation communautaire en faveur de la promotion de l’éducation des filles. 4 CONCLUSIONS La première dimension des initiatives discutées concerne l’égalisation de l’accès à l’éducation. Les six études de cas montrent que toutes les interventions sont axées sur l’accès. Plus particulièrement, les campagnes de sensibilisation, l’alimentation scolaire, les écoles sources, l’augmentation des salles de classe et l’amélioration des infrastructures ont réussi à amener les filles et les 64

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garçons à s’inscrire au niveau 1. La seconde dimension aborde l’égalisation du processus d’apprentissage en offrant un traitement et des opportunités égaux aux garçons et aux filles. Dans cette étude, elle a été abordée par les initiatives suivantes : PROGE, Star Fish,et Glad Tidings Orphan Care dans le district de Salima; VAWOGEDE à Nkhata Bay; et tous les projets comme les programmes d’alimentation solaire et Quest for Learning dans le district de Mangochi. La troisième dimension, l’égalisation de la réussite scolaire, désigne dans cette étude les compétences, connaissances, attitudes et aptitudes que les apprenants acquièrent par le système éducatif. Seule l’une des interventions citées, l’initiative Quest for Learning à Mangochi, a ciblé l’égalisation de la réussite scolaire en formant les enseignants aux techniques de questionnement sensibles au genre. On peut cependant avancer que si les groupes de mères réussissent à ramener les filles et l’école et à leur fournir des serviettes hygiéniques pour les aider à y rester, cela donne implicitement aux filles des opportunités égales pour obtenir de bons résultats scolaires. La dernière dimension du cadre GEEF porte sur l’égalisation des résultats externes en s’assurant que le statut des hommes et des femmes, leur accès aux biens et aux services et leur capacité à contribuer aux différentes activités sociales et politiques sont égaux. Dans l’étude, un certain nombre d’initiatives ont abordé cette dimension, la plus courante étant l’organisation d’excursion pour les filles sur les lieux de travail afin qu’elles interagissent avec des femmes travaillant dans diverses professions. Les écoles à Salima se sont aventurées un peu plus loin en nouant des liens avec des écoles au Royaume-Uni. Les initiatives des trois districts suggèrent que les communautés et le système éducatif ont reconnu que les filles avaient moins tendance à rester à l’école que les garçons. Les initiatives citées ont donc tenté d’améliorer la rétention en encourageant les filles qui ont abandonné l’école à y retourner. Il a aussi été admis que l’environnement d’apprentissage affecte aussi les résultats scolaires. Les initiatives se sont par conséquent focalisées sur l’amélioration de l’environnement d’apprentissage par la construction d’installations sanitaires et la fourniture de produits sanitaires (savon, serviettes hygiéniques). Cela crée un environnement dans lequel les filles apprennent mieux, ce qui signifie qu’elles ont plus de chances de progresser à des niveaux d’enseignement plus élevés et éventuellement d’achever leur scolarité. Les initiatives ciblant les apprenants et l’école en général, comme les programmes d’alimentation


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scolaire et la fourniture d’enseignants et de matériels d’enseignement et d’apprentissage, profitent aussi aux filles. Cependant, ces efforts n’obtiennent pas toujours le résultat escompté, car de nombreuses filles qui réintègrent le système abandonnent une deuxième fois. Cela suggère quel’approche de projet unique appliquée à la mise en œuvre des initiatives ne répond pas à tous les facteurs qui font obstacle à l’éducation des filles et à la fréquentation scolaire. Dans certaines écoles, on n’a constaté aucune preuve d’initiatives, comme les campagnes et les autres efforts pour améliorer le statut des femmes dans la société, abordant les pratiques culturelles qui empêchent les filles de participer à l’éducation. Dans les zones rurales, l’étude indique que les initiatives ou les projets sont limités ; ce manque a contribué à une certaine inefficacité des projets au niveau des écoles. En plus, l’étude indique que les initiatives ou les projets se limitant à aborder un ou deux aspects des besoins des filles n’ont pasd’effets durables sur la participation des filles à l’école et ne profitent qu’à quelques filles seulement. Il en résulte que les filles continuent à être marginalisées dans l’éducation. Une approche holistique visant à améliorer l’environnement d’apprentissage des garçons et des filles est nécessaire et les initiatives doivent être conçuespour cibler tous les facteurs d’un endroitdonné et du contexte socioculturel spécifique qui aident à garder les filles à l’école.

trouvé difficile de soutenir la mise en œuvre des projets. Par ailleurs, les initiatives aux niveaux du district ou de l’école ont été faibles et surtout mises en œuvre sur une courte période. Elles avaient aussi tendance à cibler quelques filles à la fois. En conséquence, elles ont eu souvent peu d’impact sur l’éducation des filles et un impact généralement de courte durée, surtout dans les écoles rurales. Enfin, dans la plupart des cas, le retour d’information des écoles, des zones ou des bureaux de district ont manqué, car aucun document ou archive n’a été conservé. 4.1 Recommandations Les observations ci-dessus ont donné lieu aux recommandations suivantes pour les politiques et pratiques: 1.

Dans les études de cas, les activités de formation des enseignants visant àles doter des compétences requises en vue d’égaliser de la réussite scolaireont été sporadiques et ont pris la forme d’ateliers d’une journée. De plus, les formations n’ont été dispensées qu’à quelques enseignants de l’école dans l’espoir que les autres enseignants en bénéficieraient par un effet de cascade. C’est rarement le cas dans la pratique. De plus, l’élan constaté au niveau supérieur ne s’est pas traduit dans la mise en œuvre au niveau des communautés et des écoles. Certaines des parties prenantes clés ont démontré une faible connaissance des initiatives et une mauvaise coordination avec les autres parties prenantes. Dans certains cas, les directeurs étaient chargés de surveiller la mise en œuvre des projets,mais généralement sans disposer de l’autorité adéquate pour imposer le respect des normes et des procédures. Dans certaines écoles, les enseignants ne faisaient pas partie des formations ou des mécanismes de mise en œuvre. Dans ce type de cas, les administrateurs scolaires ont

Il est nécessaire d’adopter une approche holistique pour aborder les multiples facteurs qui s’opposent à l’éducation des filles au Malawi. Le cadre GEEF fournit des lignes directrices sur la façon d’approcher les initiatives de façon à ce qu’elles couvrent toute l’étendue des besoins des filles afin de les aider à accéder, rester et réussir à l’école. Une fois qu’un cadre a été accepté pour des initiatives ou des projets qui abordent l’éducation des filles, il est nécessaire de concevoir les initiatives de façon à couvrir tous les aspects ou les éléments du cadre avant de les mettre en œuvre ou elles devraient travailler à compléter d’autres efforts en cours afin deparvenir à une approche holistique. Les projets d’Action Aid à l’école de Kavu et PROGE à Chimwe appuient cette recommandation. Cela nécessiterait que certains projets s’associent ou en complètent d’autres qui portent sur d’autres aspects des besoins des filles. Par exemple, ceux qui traitent des processus de l’accès et de l’apprentissage pourraient faire équipe avec ceux qui traitent de la réussite scolaire ou des résultats externes.

2. Dans toutes les écoles et tous les districts, on a constaté que les abandons aux niveaux 3 à 5 étaient un problème majeur. Il faut vivement encourager la tentative délibérée de centrer les initiatives concernant les filles sur ces niveaux intermédiaires. 3.

Il est nécessaire de renforcer la mise en œuvre des projets existants de façon à ce que l’élan au niveau Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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supérieur/central se transforme en mise en œuvre aux niveaux des écoles et des communautés. Il est aussi nécessaire de mieux suivre et évaluer les initiatives pour améliorer les résultats/l’impact. 4. L’une des recommandations politiques fondamentales est que les écoles doivent être situées dans la distance de marche recommandée des principales zones d’habitation et offrir le cycle primaire complet. Comme l’étude l’a montré, les écoles primaires de premier cycle ou écoles sources des zones rurales donnent l’impulsion permettant aux filles d’accéder à l’école mais échouent à les y retenir, car les écoles disposant des classes supérieures sont à une grande distance de marche de chez elles. Ces écoles ont rempli leur mandat en apportant l’éducation dans les zones rurales et doivent être transformées en écoles primaires complètes. Toute école source devrait par conséquent avoir un programme pour ajouter une nouvelle classe supérieure chaque année jusqu’à ce que l’école devienne une école primaire complète. Un programme de mise à niveau des écoles sources actuelles doit être adopté pour permettre aux filles de terminer l’école près de chez elles. 5. La fourniture d’infrastructures et des ressources d’enseignement/d’apprentissage ont été les initiatives les plus visibles dans les études de cas ciblant le processus d’apprentissage. Si ces efforts aident à promouvoir l’éducation des filles, ils doivent être concentrés sur les niveaux intermédiaires, où les filles abandonnent en plus grand nombre afin d’obtenir des résultats plus importants et un impact durable. 6. La plupart des écoles, surtout dans les zones rurales, manquent d’infrastructures de base et d’installations pour prendre en charge les besoins spécifiques des filles. Il est nécessaire d’appliquer la politique qui n’autorise l’ouverture d’une école que lorsqu’elle remplit une série de conditions prédéterminées. Il faut un ensemble clair de conditions et de normes minimales de qualité des installations dans chaque école et les écoles doivent se conformer à une chartede service

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règlementant la fourniture de services sensibles aux filles. 7. Les enseignants sont le facteur déterminant du processus d’apprentissage. La façon dont ils interagissent avec les apprenants, la façon dont ils les évaluent et communiquent leurs observations sont tous importants pour créer un équilibre entre la participation des filles et des garçons. Par conséquent, la formation continue des enseignants, le développement professionnel permanent etles ateliers d’orientation, qui dotent les enseignants de méthodes pédagogiques et d’évaluation sensibles au genre,devraient faire partie de tous les projets ou initiatives orientés vers les filles. Ils devraient aussi être intensifiés et accessibles à tous les enseignants et pas seulement à un petit groupe comme le montre le modèle de formation en cascade signalé des études de cas. 8. Les facteurs externes de la scolarité sont aussi un élément important de l’égalisation de la participation des filles dans l’éducation. Il est par conséquent impératif que les initiatives qui ciblent les aspects négatifs des pratiques des cultures locales fassent partie du mouvement de scolarisation et de rétention des filles. Le mariage précoce et le manque d’encouragement parental ont été mentionnés comme des obstacles majeurs à l’éducation des filles. Les projets abordant ces questions doivent être encouragés et intensifiés. Comme le montre le projet VAWOGEDE à Nkhata Bay, ce type de projet comporte souvent plusieurs volets pour aborder l’ensemble des besoins des filles. Lorsqu’ils sont correctement mis en œuvre, ils ont un effet durable sur les communautés. 9. Les initiatives qui offrent des filets de sécurité aux familles qui connaissent des difficultés économiques et sociales sont aussi importantes et doivent être soulignées, en particulier en milieu rural, où il existe une image négative de l’éducation des filles. Lorsque les familles et les communautés sont assurées de leur bien-être économique et social, l’éducation des filles devient facile à aborder, comme on le voit dans les zones urbaines.


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Institut supérieur d’enseignement pédagogique de Kigali

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L’impact des écoles amies des enfants au Rwanda

RÉSUMÉ ANALYTIQUE

La qualité et la sensibilité des enseignants et l’équilibre entre les genres aux postes à responsabilité sont essentiels à la réussite scolaire des garçons comme des filles.

Le gouvernement du Rwanda (GdR) a démontré son engagement en faveur de l’égalité entre les genres et l’autonomisation des femmes en priorisant l’éducation des filles. Le ministère de l’Education (MINEDUC) a élaboré une Politique sur l’éducation des filles (MINEDUC, 2008) pour l’aider à atteindre les engagements nationaux, régionaux et internationaux et mettre le secteur éducatif en conformité avec la Politique nationale sur le genre(MIGEPROF, 2011). Dans le passé, les taux de scolarisation, de rétention, de réussite scolaire et de transitiondes filles étaient plus faibles que ceux des garçons (Randell et Fish, 2009). Bien que des progrès considérablesaient été accomplis entre 2006 et 2011pour améliorer l’inscription des filles, leurs taux de rétention, de réussite scolaire et de transition du premier vers le second cycle de l’enseignement secondaire et vers l’enseignement supérieur restent inférieurs à ceux des garçons (MINEDUC, 2010). Le MINEDUC s’est inspiré du programme des écoles amies des enfants (EAE) de l’UNICEF lancé en 2005 pour améliorer la qualité de l’éducation des filles. Ils’est fixé depuis l’objectif de créer 400 écoles amies des enfants et a généralisé les normes de qualité des EAE à toutes les écoles du pays (IPAR, 2010). L’ambition des EAE est d’assurer « à chaque un enfant un environnement sûr aux plans physique, affectif et psychologique. » (Foumba, 2011) Ce rapport analyse l’impact des EAE sur l’éducation des filles au Rwanda en se basant sur les recherches

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entreprises dans quatre EAE. Il est axé sur les résultats du programme EAE dans les quatre catégories définies par le MINEDUC : inscription, rétention, réussite scolaire et gestion scolaire/participation communautaire. L’impact des EAE sur l’éducation des filles a été considérable. Les conclusions de l’étude sur les inscriptions ont confirmé qu’un équilibre a été atteint entre les genres en matière d’inscription dans les enseignements primaire et secondaire ; les inscriptions de filles sont plus élevées que celles des garçons dans trois écoles sur les quatre étudiées et presque égales dans la quatrième. Bien que les registres scolaires sur la rétention des filles indiquent une tendance similaire, l’étude a révélé un taux d’abandon plus élevé des filles, y compris dans les EAE, et les données qualitatives ont révélé que la fréquentation des filles avait tendance à être plus faible et leur taux d’abandon plus élevé que celui des garçons. Les informateurs nous ont donné plusieurs raisons pour expliquer les résultats plus faibles des filles par rapport aux garçons, mais les données quantitatives n’ont pas montré une grande différence en matière de réussite scolaire. Les données quantitatives ont salué l’implication des comités de parents et d’enseignants (CPE) pour soutenir la gestion scolaire et stimuler la participation communautaire, bien que certaines données qualitatives aient indiquéque l’efficacité des CPE pourrait être améliorée. Les données ont également révélé que les chefs d’établissement prenaient la plupart des décisions dans les écoles. Les conclusions de l’étude nous ont amenées à formuler des recommandations politiques sur les résultats du programme dans trois des quatre catégories fixées par le MINEDUC. Il est reconnu que l’inscription des filles a atteint la parité avec celles des garçons et que les efforts doivent être désormais axés sur la rétention et la réussite scolaire ainsi quesur la gestion scolaire et la participation communautaire. Les recommandations formulées dans cette étude visent à améliorer la réussite scolairede tous les enfants, y compris des garçons, et elles ont été adressées au GdR, au MINEDUC, à l’UNICEF, au FAWE, aux organisations non gouvernementales (ONG) et aux dirigeants scolaires à des fins d’examen et de mise en œuvre. En ce qui concerne la rétention des filles dans l’éducation, nous recommandons l’organisation de programmes de sensibilisation et de conscientisation à

l’intention des chefs d’établissement, des enseignants, des parents et des dirigeants communautaires sur l’importance de l’éducation des filles et sa valeur ajoutée pour les familles, la communauté et la nation. La pauvreté étant une contrainte majeure pour de nombreux Rwandais, le gouvernement doit continuer à prioriser les initiatives de développement économique dans les zones rurales, s’assurer que les écoles sont dotées d’un approvisionnement adéquat en eau, encourager les écoles à entretenirdes jardins scolaires pour fournir des produits alimentaires et envisager des programmes d’alimentation scolaire si nécessaire. Les conditions de service et le statut des enseignants sont un enjeu majeur : afin d’entretenir la motivation des enseignants, le GdR/MINEDUC doit améliorer leurs salaires et reconnaître leur contribution à la nation. Il faut accorder de l’attention, surtout dans les écoles rurales, à la qualité du logement des enseignants. Le GdR, le MINEDUC et l’Institut d’enseignement pédagogique de Kigali (KIE) devraient intensifier le nombre d’enseignants qu’ils forment afin d’alléger la charge de travail des enseignants existants et leur donner plus de temps pour préparer les leçons et noter les devoirs. L’UNICEF/GdR doit fournir à chaque EAE un laboratoire TIC (technologies de l’information et de la communication), un laboratoire de science et un centre de documentation/bibliothèque pour permettre aux élèves d’étudier pendant et après les heures de classe. Le GdR doit accélérer la mise en œuvre de ses programmes afin de fournir l’électricité à toutes les écoles et un ordinateur à chaque enfant ainsi que des installations informatiques à la direction de l’école. D’autres recommandations ont été formulées pour implanter les écoles plus près des communautés afin de réduire le temps de marche des enfants pour aller et revenir de l’école, améliorer l’organisation scolaire, proposer des activités extrascolaires et aborder les questions de santé féminine. Certaines de ces recommandations visent la réussite scolaire des filles. La qualité et la sensibilité des enseignants et l’équilibre entre les genres aux postes à responsabilité sont essentiels à la réussite scolaire des garçons comme des filles. Les enseignants doivent faire davantage d’efforts pour améliorer les normes scolaires, donner des interrogations écrites, donner des devoirs et suivre les progrès des élèves. Le gouvernement, la direction des écoles et les partenaires de l’éducation doivent fournir des installations pour les deux sexes dans toutes les écoles (par exemple des toilettes séparées pour les garçons et les filles), Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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mettre à la disposition des filles une salle pour l’hygiène individuelle et des serviettes hygiéniques) et des structures appropriées pour tous les élèves doivent être mises en place, en particulier pour les filles et les élèves ayant un handicap. L’offre de centres d’éducation préscolaires bien géréspermettra aux enfants de commencer l’école primaire mieux préparés. Des clubs Tuseme1 du FAWE doivent être créés dans toutes les écoles. Enfin, la recommandation essentielleliée à la gestion scolaire et à la participation communautaire s’adresse au MINEDUC, à l’UNICEF et au FAWE pour qu’ils offrent une formation en bonne gouvernance et gestion scolaire aux responsables de l’éducation du district (DEO), chefs d’établissement, préfets des études et CPE. De même, nous recommandons des programmes de sensibilisation et de conscientisation des principales parties prenantes sur les besoins spécifiques des filles. Il faut étudier des moyens d’assurer l’équilibre entre les genres à la fois à la direction des écoles et dans les CPE et des programmes pour élever le niveau d’alphabétisation de la communauté. L’équipe de recherche a noté des efforts visibles de toutes les parties prenantes pour améliorer la réussite scolaire des filles et la participation accrue des CPE dans la gestion scolaire. La qualité plus faible de la scolarité dans les zones rurales exige de donner la priorité aux écoles rurales sur les écoles urbaines lors de l’extension du programme EAE. 1 CONTEXTE DE L’ÉTUDE 1.1 Une approche de l’éducation et de l’égalité entre les genres fondée sur les droits Chaque enfant a le droit à l’éducation comme le stipule la Déclaration des droits de l’homme de 1945 et le réaffirment de nombreux accords et réunions, notamment la Convention relative aux droits de l’enfant (1989) et la Déclaration du Millénaire (2000), les conférences régionales de l’UNESCO sur l’éducation (1960-1966) et des conférences comme le Sommet mondial pour les enfants des Nations unies (1990), la Conférence mondiale sur l’éducation pour tous (1990) et le Forum mondial sur l’éducation à Dakar (2000).

L’héritage de l’éducation en tant que droit humain alimente la dynamique actuelle vers la réalisation de l’enseignement primaire universel (EPU) et la promotion de l’égalité entre les genres et l’autonomisation des femmes. Mais le droit à l’éducation intègre et englobe également les préoccupations liées au développement. La promotion des droits de l’homme et la promotion de la croissance économique ne s’excluent pas mutuellement. Toute tension entre l’approche fondée sur les droits et celle qui vise la croissance économique disparait si l’on considère que les droits et la croissance ne s’opposent pas, mais sont des conditions préalables nécessaires. On peut soutenir que l’impossibilité de garantir les droits de l’homme est un obstacle à la croissance économique, mais aussi que sans une économie saine, la pauvreté devient un fléau qui porte atteinte aux droits individuels (UNICEF, 2010). Autonomiser les filles apparait ainsi comme une proposition qui profite à tous. La recherche mondiale a affirmé que l’éducation, en particulier celle des filles, apporte des avantages économiques et sociaux considérables et réduit la pauvreté au sein des pays (UNICEF, 2010). Ces études identifient l’éducation des filles comme l’un des investissements les plus productifs et utiles que puisse réaliserun pays. Elles démontrent l’impact positif de l’éducation des filles sur la taille de la famille, son bien-être, la mortalité infantile, la santé et l’éducation de l’enfant, la productivité agricole, la croissance économique, l’autonomisation de la famille et de la société, la prévention contre le VIH et d’autres variables(Dollar et Gatti, 1999). Dans les pays en voie de développement, suffisamment de faits prouvent qu’investir dans l’éducation des filles, y compris leurs besoins physiques, offre un retour élevé. Une femme instruite a plus de chances de recevoir une éducation sexuelle, ce qui est essentiel pour la prévention de la transmission du VIH, se marier et avoir des enfants plus tard dans la vie et avoir une carrière (Yale, 2011). Ainsi, lorsque les filles sont instruites, leurs droits individuels sont non seulement respectés, mais la société profite aussi des multiples avantages apportés par leur éducation. Cette compréhension est implicite dans les OMD 2 et 3 qui ont pour objectif l’EPU et la promotion de l’égalité entre les genres et l’autonomisation des femmes.

1 Tuseme est un mot Swahili qui signifie « Exprimons-nous ». Le modèle d’autonomisation des jeunes Tuseme du FAWE utilise les techniques du théâtre pour le développement qui permet aux jeunes de s’exprimer eux-mêmes, d’analyser et de discuter des problèmes qui affectent leur bien-être, de chercher des solutions et d’agir pour les résoudre.

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1.2 Le contexte du Rwanda

Tableau 1.7 : Taux d’abandon, de rétention et de promotion

Les observateurs et les universitaires ont noté que le Rwanda était un modèle pour la promotion de l’autonomisation des femmes en Afrique et dans le monde. Le Rwanda est reconnu pour avoir la représentation la plus élevée (56 pour cent) de femmes siégeant au parlement dans le monde. De plus, il a un système électoral bien articulé qui produit des femmes responsables devant leurs électeurs.

des filles aux niveaux primaire et secondaire, 2008-2009

Le GdR a mis en place des mesures pour combler l’écart éducatif entre les garçons et les filles. Ces mesures incluent des politiques et des stratégies qui rivalisent avec les meilleures pratiques aux niveaux international et régional. Le gouvernement est aussi engagé dans la mise en œuvre des accords internationaux et régionaux qui soutiennent l’égalité de l’accès à un enseignement de qualité pour les filles et les garçons ; citons notamment la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), la Convention relative aux droits de l’enfant (CDE), les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), l’Education pour Tous (EPT) et les principes directeurs sur le genre de l’Union africaine (Union africaine, 2005). Grâce à l’existence d’un environnement politique habilitant, le Rwanda a accompli de grands progrès pour améliorer l’accès à l’éducation à tous les niveaux et améliorer la parité entre les genres dans les cycles primaire et secondaire au cours des deux décennies écoulées. Cela signifie que le pays, qui figurait parmi ceux qui avaient les résultats les plus faibles dans le domaine de l’éducation, est devenu l’un des chefs de file de la région en réalisant l’EPU et en montrant une amélioration continue des taux d’inscription dans le secondaire. En 2010, le Rwanda a atteint la parité entre les genres dans les inscriptions du primaire et avait l’un des taux nets de scolarisation les plus élevés d’Afrique subsaharienne. En fait, dans l’enseignement primaire, les inscriptions des filles dépassent légèrement celle des garçons. Avec la Gambie, le Malawi et la Mauritanie, le Rwanda a été identifié comme ayant enregistré un niveau de parité entre les genres supérieur à 1.0 dans l’enseignement primaire, ce qui indique un taux d’inscription des filles plus élevé que celui des garçons dans les écoles primairesde ces pays (PNUD, 2010). En 2010, 94,2 pour cent de garçons et 96,5 pour cent de filles étaient inscrits dans les écoles primaires au Rwanda (MINEDUC, 2010).

Taux d’abandon Taux de rétention Taux de promotion

Primaire 2008 2009 15,2% 12,2% 14,9% 13,5% 70,3% 74,3%

Secondaire 2008 2009 13,3% 0,7% 6,3% 4,8% 80,3% 94,5%

Source: MINEDUC, 2010

En plus des progrès accomplis dans l’éducation des filles au Rwanda indiqués dans le tableau 1.7, le taux d’achèvement général des écoles primaires du pays s’élevait à 76 pour cent en 2010-2011, soit un taux plus élevé que les 59 pour cent ciblés (MINEDUC, 2010). En 2008, le taux d’achèvement était de 53 pour cent. Selon le ministère de l’Education au moment de l’étude, l’assurance de poursuivre sa scolarité tout au long du programme d’éducation de base de neuf ans (EB9A) introduit en 2009 a eu des effets positifs sur l’achèvement (Kwizera, 2011). Avant l’introduction du programme EB9A, les élèves abandonnaient l’école avant d’avoir achevé le cycle primaire, car ils n’étaient pas certains de pouvoir continuer à l’école secondaire. Le ministre a noté que des efforts considérables ont été consentis pour construire des salles de classe afin de faire face à l’augmentation des inscriptions depuis l’introduction du programme EB9A, avec plus de 3000 salles de classe en 2010 pour accroître l’accès au programme et 2 936 supplémentaires en 2011. Le taux de transition des filles de l’enseignement primaire vers le secondaire a dépassé celui des garçons en 2009: 91,6 pour cent 2009 contre un taux de transition général de 90,2 pour cent (MINEDUC, 2010). L’extension du programme d’éducation de base du Rwanda à 9 ans, puis dans un futur proche à 12 ans, a eu un effet marqué sur l’amélioration de la fréquentation des filles au niveau secondaire, bien que cette tendance s’inverse aux niveaux supérieurs de l’éducation (Randell et Fish, 2010). Le pourcentage des filles dans les établissements publics d’enseignement supérieur a augmenté de façon marginale de 32,1 pour cent en 2008 à 32,7 pour cent en 2009 et à 32,9 pour cent en 2010. Dans les établissements privés, la proportion a augmenté de 50,9 pour cent à 53,4 pour cent et à 54,9 pour cent au cours de la même période (MINEDUC, 2010).

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Citons parmi les stratégies qui ont prouvé leur efficacité pour améliorer les résultats des filles au Rwanda : • L’introduction de stratégies de réduction de la pauvreté ; • Le plaidoyer en faveur d’une éducation abordable, notamment la suppression des frais scolaires ; • Les initiatives de mobilisation sociale et de sensibilisation sur l’importance de l’éducation des filles ; • Le plaidoyer contre le travail des enfants ; • Le renforcement des capacités des enseignants et de la direction des écoles ; • La promotion de la participation active des enfants et des jeunes dans la programmation ; • Les contenus éducatifs fondés sur les compétences et sensibles au genre ; • Les processus d’enseignement et d’apprentissage sensibles au genre ; • Les programmes innovants de développement des enseignants et l’appui professionnel continu. L’un des moteurs à l’origine de la réussite du Rwanda dans le domaine de la parité entre les genres dans l’éducation est l’engagement du pays en faveur de l’autonomisation du genre tel qu’il est stipulé dans la Constitution et la Vision 2020 (MINECOFIN, 2000). L’Education pour Tous, atteindre la parité entre les genres dans l’enseignement supérieur et tertiaire et la discrimination positive pour promouvoir les progrès éducatifs et sociauxdes femmes sont désignés comme des priorités politiques en vue de la réalisation des objectifs de développement du pays. 1.3 Les défis à l’inscription, la rétention et la réussite scolaire des filles Malgré les progrès significatifs accomplis par le Rwanda en ce qui concerne l’inscription des filles dans le primaire et leur transition vers le secondaire, les données de la recherche montrent que les filles continuent d’enregistrer des taux d’achèvement plus bas (UNGEI, 2004). Dans leurs efforts pour acquérir une éducation formelle, les filles sont confrontées à de nombreux défis que l’on peut regrouper en cinq catégories principales : sociale et culturelle, économique, géographique, curricula et méthodes pédagogiques, installations scolaires (Randell et Fish, 2010).

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Obstacles sociaux et culturels. Les convictions, les pratiques et les attitudes sociales et culturelles jouent souvent en faveur des garçons plutôt que des filles en ce qui concerne l’éducation ; les normes et les valeurs sociales dévalorisent l’éducation des filles par rapport à celle des garçons. Les valeurs et les normes discriminatoires à l’égard des filles et des femmes sont profondément enracinées dans la culture et la société rwandaises. La tradition du mariage précoce, les avantages ressentis comme incertains d’instruire une fille qui va se marier et s’éloigner de ses racines pour devenir la « propriété » de quelqu’un d’autre et le traitement préférentiel de l’enfant mâle, tous ces facteurs concourent à limiter l’inscription et la fréquentation scolaires des filles. « Pourquoi investir dans une ressource qui appartiendra bientôt à quelqu’un d’autre ? » est l’attitude la plus souvent rencontrée dans de nombreuses communautés (Randell et Fish, 2010). De nombreux parents, surtout dans les zones rurales, ignorent les avantages de l’éducation des filles. Il est souvent difficile pour eux de voir le lien entre l’éducation des filles et le développement économique, une meilleure santé, le développement de l’enfant, le bien-être de la famille et le progrès social en général. De plus, les filles subissent des pressions pour abandonner l’école et assumer des responsabilités familiales (Randell etFish, 2010). Obstacles économiques. Le Rwanda est un pays majoritairement agricole et presque 90 pour cent de la population tire ses revenus de l’agriculture de subsistance. Le revenu annuel par habitant s’élève à 520 USD (Banque mondiale, 2010) et on estime que près de 59 pour cent de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté (Banque mondiale, 2005). La pauvreté est forte dans les zones rurales où vit la majorité de la population. La pauvreté dissuade les familles d’envoyer leurs enfants à l’école. Les enfants, en particulier les filles, restent souvent à la maison si leurs parents sont incapables de payer les frais solaires. Bien que l’enseignement primaire soit officiellement gratuit, les écoles facturent cependant différents frais informels comme les droits d’inscription. Les autres coûts liés à la scolarité, comme les uniformes scolaires et les livres, peuvent dépasser les moyens financiers des pauvres et les coûts d’opportunité de la scolarisation peuvent être même plus élevés dans la mesure où le travail des enfants est important pour de nombreuses familles, incapables de se nourrir si leurs enfants ne participent


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à la production agricole et aux activités du ménage. Traditionnellement, les filles sont censées assumer plus des responsabilités familiales que les garçons et par conséquent, les coûts d’opportunité de l’éducation des filles peuvent être plus élevés. La scolarité exige donc un engagement substantiel en temps et en ressources, ainsi que des sacrifices liés à la production familiale et les filles sont donc plus souvent tenues à l’écart de l’école pour ces raisons.

Manque d’installations. De nombreuses écoles n’ont pas d’installations sanitaires et de dortoirs adéquats ou des installations séparées pour les garçons et les filles. De plus, la pauvreté empêche de nombreuses familles d’acheter des serviettes hygiéniques. Par voie de conséquence, de nombreuses filles restent chez elles pendant leurs règles, ce qui conduit à un taux élevé d’absentéisme. A terme, cela affecte leurs résultats en classe ainsi qu’aux examens nationaux.

Obstacles géographiques. Le Rwanda est un pays montagneux avec un paysage très diversifié. Cette topographie difficile est un défi à l’offre de services aux habitants des collines et des montagnes, généralement les communautés les plus défavorisées et les plus reculées. Les communautés sont très dispersées et lemanque de transports rend très difficile l’accès à de nombreux services, y compris l’éducation. La distance pour aller à l’école est une préoccupation qui affecte tous les enfants et souvent, les parents n’autorisent pas leurs filles à faire de longs trajets à pied pour des raisons de sécurité. Avoir une école à côté de chez soi peut stimuler la scolarisation des filles, non seulement à cause des distances plus courtes, mais aussi parce que les parents se sentent plus rassurés si leurs filles vont à l’école dans leur voisinage. Curricula et méthodes pédagogiques. Un obstacle majeur à l’éducation des filles est l’environnement scolaire essentiellement masculin: le curriculum, les méthodes d’évaluation et les bâtiments scolaires, entre autres, sont plus favorables aux élèves masculins. De plus, les enseignantes sont insuffisantes, en particulier dans le secondaire et dans les matières scientifiques, privant ainsi les filles de modèles qui pourraient leur donner l’espoir d’être indépendantes et de réussir leur vie plus tard. L’inefficacité des méthodes pédagogiques aboutit à un enseignement de mauvaise qualité et le manque de pertinence de ce qui est enseigné à école avec la vie quotidienne des membres de la communauté ont un impact élevé sur la survie à l’école et l’achèvement du cycle primaire. Il est donc nécessaire de s’assurer que le curriculum et les classes sont pertinents pour les filles et de développer un enseignement centré sur l’élève ainsi qu’en environnement d’apprentissage et des pratiques pédagogiques plus équitablesenvers les filles.

Le GdR s’est engagé à garantir le droit à l’EPU pour tous les enfants au Rwanda. Depuis 2006, le MINEDUC s’est engagé dans l’élaboration de Normes minimales de qualité pour aborder toutes les questions relatives à la qualité, responsables des faibles taux de rétention et d’achèvement, y compris l’environnement scolaire. Le MINEDUC a travaillé sur plusieurs projets de construction d’école et s’est engagé à promouvoir les bonnes pratiques comme l’approche EAE pour améliorer la qualité de l’éducation de base en proposant une approche holistique et multisectorielle. 1.4 Les écoles amies des enfants: une approche visant à promouvoir la qualité de l’éducation Les éducateurs amis des enfants se concentrent sur tous les besoins de l’enfant, notamment sa santé, sa nutrition et son bien-être général. Ils prennent également en compte ce qui se passedans la famille et la communauté de l’enfant avant qu’il ne commence à aller à l’école et après qu’il la quitte (Orkodashvili, 2010). En 2005, l’UNICEF a mis en œuvre le programme des Ecoles amies des enfants(EAE) au Rwanda en tant que mesure pour soutenir les efforts du gouvernement en vue de réaliser ses objectifs dans le secteur éducatif (Ginoulhiac, 2009). L’EAE est un modèle sensible au genre qui promeut le fait d’être centré sur l’enfant, l’inclusivité, la sensibilité au genre, la tolérance, la dignité et l’autonomisation personnelle (UNICEF, 2010). Le modèle est sous-tendu par la conviction que les écoles doivent fonctionner dans l’intérêt supérieur de l’enfant. Les environnements éducatifs doivent être sûrs, salubres, favoriser la santé et protéger les enfants et doivent disposer de ressources adéquates en matière d’infrastructures physiques, d’enseignants qualifiés et de matériels éducatifs afin d’offrir les conditions physiques, affectives et sociales appropriées et propices à l’apprentissage. Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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Les enfants apprennent naturellement, mais cette capacité à apprendre peut être minée et parfois détruite. L’EAE reconnaît, encourage et soutient la capacité croissante des enfants en tant qu’apprenants en leur offrant une culture scolaire, des comportements pédagogiques et un curriculum centré sur l’apprentissage et l’apprenant. Les enseignants étant le facteur le plus important, dans ces écoles, ils sont formés aux droits del’enfant et les méthodes pédagogiques adoptent une approche centrée sur l’enfant. Les leçons aux enfants incluent des compétences essentielles pour la vie visant à les protéger et à développer les compétences qui leur seront nécessaires pour développer leur potentiel et contribuer pleinement à la société. L’UNICEF et ses partenaires ont créé les EAE pour aider les jeunes élèves à profiter d’un environnement où ils sont en sécurité sur les plans physique, affectif et psychologique. Dans ces écoles, les droits del’enfant doivent être protégés et sa voix entendue et respectée. Ces écoles sont à l’écoute des garçons et des filles en leur offrant un environnement d’enseignement et d’apprentissage amélioré ainsi que des services de soutien psychologique comme le mentorat et le conseil. Les apprenants sont informés de l’importance de l’égalité entre les genres. Une caractéristique essentielle de chaque EAE est le club d’autonomisation Tuseme qui cible explicitement les préjugés sexisteset offre aux garçons et aux filles un espaceet les compétences nécessaires pour s’exprimer sur les questions qui affectent leur bien-être. De plus, les EAE rassemblent les élèves et les membres de la communauté pour élaborer et mettre en œuvre des moyens d’améliorer leur environnement scolaire (UNICEF, 2009). La capacité d’une école à devenir amie des enfants est directement liée au soutien, à la participation et à la collaboration qu’elle reçoit des familles (UNICEF, 2009). Les normes des EAE sont fixées dans quatre domaines : des bâtiments appropriés, adéquats et sûrs, un environnement salubre et propre qui protège les apprenants, un environnement sensible à l’enfant sans obstacle, et un équipement éducatif adéquatet approprié. Les écoles doivent prendre en compte six dimensions clés comme le montre le graphique 1.14.

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Graphique 1.14 : Dimensions clés de l’école sensible à l’enfant Fondée sur les droits et inclusif Engagement de la communauté

Sûre et protectrice

Enseignement ENFANT Apprentissage Promeut la santé

Sensible au genre Efficacité de l’enseignement

Les normes de base des EAE au Rwanda sont des salles de classe spacieuses et bien aérées, des matériels éducatifs adéquats pour les élèves, des tables et des bancs, la participation active des enfants, y compris ceux qui ont des besoins spéciaux, de l’eau potable pour boire et se laver,des toilettes séparées pour les filles et les garçons et des enseignants qualifiés qui parlent anglais. Les enseignants maîtrisant l’anglais sont difficiles à trouver au Rwanda en raison du changement récent de la langue d’instruction du français à l’anglais. Bien que les financements soient actuellement insuffisants pour transformer toutes les écoles, des efforts sont faits pour s’assurer que les écoles qui ne peuvent pas être converties immédiatement bénéficientdes conditions indispensables à l’hygiène de base. De nombreuses filles arrêtent d’aller à l’école quand elles atteignent la puberté en raison du manque de toilettes dans leur école. Construire des toilettes séparées pour les garçons et les filles contribue à garder les filles à l’école pendant leur adolescence. Les priorités incluent de rénover les bâtiments et d’améliorer les installations sanitaires, de lutter contre le harcèlement sexuel et d’intégrer la dimension genre dans le curriculum. L’objectif du MINEDUC est de faire de toutes les écoles des écoles amies des enfants. La réussite du programme des Ecoles amies des enfants a incité le GdR à moderniser plus de 50 écoles conventionnelles en EAE, avec l’objectif d’élever ce nombre à 400 et de généraliser les normes de qualité EAE à toutes les écoles du pays (MINEDUC, 2008; UNICEF Rwanda, 2007). Le GdR investit fortement dans cette initiative. Il a construit plus de 5 500 salles de classe et 11 000 toilettes entre 2009 et 2011 avec l’aide de l’UNICEF. Le


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programme d’infrastructures EAE de l’UNICEF Rwanda met en œuvre des activités dans 37 écoles primaires du pays. Le programme prévoit de construire 178 salles de classe, rénover 177 salles de classe existantes, fournir 37 salles de classe spéciales pour les chefs d’établissement, les enseignants et les élèves ayant des besoins spéciaux, créer 61 blocs sanitaires de 12 unités chacun (Ginoulhiac, 2009). 2 L’IMPORTANCE DE L’ÉTUDE 2.1 Enoncé de la problématique Le Rwanda se classe en tête sur le plan international en matière d’égalité entre les genres et d’autonomisation des femmes. Il a déjà atteint l’OMD d’égalité de scolarisation des filles et des garçons dans l’enseignement primaire. Pourtant, bien que l’importance de l’éducation des filles ait été largement reconnue au Rwanda et malgré les progrès remarquables accomplis au fil des ans, l’écart entre les genres existe toujours en ce qui concerne la rétention et la réussite scolaire. Les taux d’achèvement et de résultats scolairedes filles lors de la transition aux niveaux secondaire et supérie urde l’éducation sont toujours inférieurs à ceux des garçons (Rihani, Kays et Psaki, 2006). Bien que les données montrent qu’au Rwanda le taux d’inscription des filles soit similaire à celui des garçons (MINEDUC, 2010), on a observé que leur taux de rétention est plus faible que celui des garçons. Le taux d’achèvement est un élément essentiel pour déterminer les taux de rétention à l’école. Les filles enregistrent un taux d’achèvement plus faible que celui de leurs camarades masculins. Les tendances passées montrent que l’abandon était beaucoup plus élevé chez les filles que chez les garçons lors de la transition du primaire au secondaire et du secondaire au supérieur. Les données indiquent également que la réussite scolaire des filles est inférieure à celle des garçons (Randell et Huggins, 2008; Randell et Fish, 2010). En 2006, seulement 37,9 pour cent des filles ont réussi les examens de fin d’études primairespar rapportà 62,09 pour cent des garçons (Rwanda National Examination Council, 2007). En moyenne, le taux de réussite des filles est de 10 pour cent inférieur à celui des garçons (IPAR, 2009: 5). De plus, les filles comme les garçons manquent d’enseignants compétents et de curricula appropriés. En outre, pour de nombreuses filles au Rwanda, l’école n’est pas toujours une expérience positive. Les études montrent qu’elles subissent des conditions

scolaires difficiles, notamment le manque de serviettes hygiéniques, les mauvaises installations sanitaires, la discrimination fondée sur le genre, le harcèlement et même la violence. Ces conditions ne sont propices ni à l’apprentissage, ni au développement (UNICEF, 2010). Citons quelques faits sur certains défis rencontrés par les filles : • Le manque d’accès aux serviettes hygiéniques et à des toilettes séparées : cela conduit les filles pauvres, à la fois dans les zones rurales et urbaines, à manquer l’école jusqu’à une semaine par mois. Par conséquent, leurs résultats sont inférieur sà ceux de leurs camarades masculins qu’elles ont des difficultés à rattraper. • Le manque de modèles : comme il y a traditionnellement plus d’hommes que de femmes enseignant dans les écoles, les filles manquent de modèles auxquels s’identifier, en particulier dans les écoles secondaires et les matières scientifiques. De plus, de nombreuses filles qui avancent dans les études voient beaucoup de leurs paires abandonner. • La violence fondée sur le genre : les cas familiaux et communautaires de violence fondée sur le genre peuvent conduire de nombreuses filles à abandonner l’école. Cette situation est préoccupante, étant donné l’engagement du Rwanda d’atteindre l’égalité entre les genres dans l’éducation et demande à être examinée pour identifier les facteurs potentiels qui y contribue. Si les rapports du PNUD (2010) et d’autres rapports similaires fournissent des données sur les enfants qui entrent à l’école, ils ne révèlent pas quels sont ceux qui progressent, réussissent et achèventleur scolarité. Cette étude vise à aborder cette lacune de la recherche dans ce domaine. Par ailleurs, depuis le lancement et l’expansion des EAE au Rwanda, aucune évaluation n’a été réalisée sur leur impact sur la rétention, la réussite scolaire et la transition, ni sur la mise en œuvre du programme et la participation communautaire. 2.2 Objectifs de l’étude L’objectif principal de la présente étude était d’examiner l’impact du modèle EAE sur l’éducation des filles au Rwanda. L’étude documente les contributions que les EAE ont apportées à l’amélioration de l’inscription, la rétention, la réussite scolaire et la transition des filles. Elle cherche à identifier les expériences filles dans les EAE, fournir des données empiriques sur l’impact des EAE sur l’éducation des filles et déterminer si les EAE favorisent l’égalité entre les genres conformément aux Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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objectifs nationaux et internationaux (MINECOFIN, 2000; MINECOFIN, 2007). Les objectifs spécifiques étaient de déterminer ce qui suit en ce qui concerne les filles : • L’accès aux EAE ; • La disponibilité d’installations appropriées ; • L’environnement éducatif des EAE favorise-t-il la rétention ? • L’apprentissage et le taux de réussite scolaire dans les EAE ; • Le taux de transition du primaire au premier cycle de l’enseignement secondaire ; • Le style de gestion scolaire et le niveau de participation communautaire. Cette recherche s’appuie sur les études précédentes en expliquant les raisons pour lesquelles les filles abandonnent à un taux plus élevé que celui des garçons et quels sont les changements pouvant être faits pour inverser cette tendance. De plus, l’étude examine le niveau de participation communautaire dans la gestion scolaire et la formation professionnelle suivie par les chefs d’établissement et les enseignants et elle propose des recommandations aux responsables politiques du secteur éducatif. 3 MÉTHODOLOGIE 3.1 Conception de la recherche La recherche apris en compte quatre résultats du programme dans les quatre catégories fixées par le MINEDUC: inscription, rétention, réussite scolaire et participation communautaire. Nous avons choisi une approche comparative à méthodologie mixte combinant à la fois les méthodes qualitatives et quantitatives avec l’objectif d’obtenir des informations approfondies sur les questions de la recherche et permettant la triangulation des résultats. Cette méthodologie a été adoptée comme étant la plus appropriée au cadre conceptuel de l’approche sensible au genre fondée sur les droits. Ainsi, le processus qui refuse aux filles le droit humain à l’éducation a été analysé (Greany, 2008: 556). Des instruments de collecte des données ont été élaborés (questionnaires, entretiens et GD), conçus spécialement pour cette étude et un examen comparatif approfondi de la littérature des rapports gouvernementaux, des documents de politique et 2

Le rapport de cette étude pilote est disponible dans Asemota et Randell (2011).

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des rapports mondiaux sur les EAE. Des données quantitatives et qualitatives ont dû être obtenues à partir des outils de recherche et de l’observation afin de valider les informations complémentaires recueillies de l’analyse des documents et de la revue de la littérature. Une école amie des enfants a été sélectionnée pour tester les instruments et déterminer leur fiabilité et leur validité ; quatre autres EAE ont été identifiées comme études de cas. L’étude pilote a conclu que les outils convenaient de manière générale et seuls de petits ajustements ont été faits pour les études de cas. La collecte des données, visant à examiner l’impact des EAE sur l’éducation des filles au Rwanda, a été principalement centrée sur les quatre études de cas approfondies. Les unités de recherche ont inclus un mélange de répondants afin de définir les personnes et les éléments qui comptaient vraiment dans la réussite des activités liées à l’éducation des filles dans les EAE. Elles ont inclus des élèves, des enseignants, des administrateurs scolaires et du district (chefs d’établissement, préfets des études et DEO), des parents et des dirigeants communautaires (membres des CPE). Un questionnaire d’enquête a été soumis aux élèves et aux enseignants, tandis que des entretiens ont été menés avec les informateurs clés comme les DEO, les chefs d’établissement et les préfets des études. De plus, des GD ont été organisés avec les membres des CPE. La même équipe de recherche a rendu visite à toutes les écoles sélectionnées et les données relatives aux critères des quatre études ont été recueillies à l’aide des trois mêmes instruments. En outre, les membres de l’équipe de recherche ont été tenuesd’observer les infrastructures, les installations, les équipements et le comportement des élèves et d’examiner les registres d’inscription des élèves du district et des écoles. 3.2 Portée de l’étude L’étude s’est limitée à une école amie des enfants (EAE Kanyinya, district de Nyarugenge, province du Centre2) pour tester les instruments de collecte de données et à quatre écoles amies des enfants pour les études de cas. Les contraintes de temps et de coûts n’ont pas permis d’inclure davantage d’écoles dans l’étude. Bien que la conception de l’étude ait tenté de recueillir l’étude de cas d’une école amie des enfants les quatre provinces, nous avons constaté qu’il n’existait pas d’EAE dans la province du Sud et deux écoles de la province de


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l’Ouest ont donc été désignées. Les quatre écoles ont été sélectionnées parmi les 54 écoles amies des enfants existant dans le pays. Deux des quatre écoles faisant l’objet d’une étude de cas se trouvent en milieu urbain et les deux autres en milieu rural. Chaque paire comportait une école performante qui avait obtenu de bons résultats aux examens et une autre moins performante. Les écoles sélectionnées pour les études cas sont les suivantes: • EAE de Umubano II, district de Rubavu, province de l’Ouest : urbaine, performante • EAE du GS Nyagatare, district de Nyagatare, province de l’Est : urbaine, moins performante • EAE de Kigeyo, district Rutsiro, province de l’Ouest : rurale, performante • EAE de St Joseph Munyana, district de Gakenke, province du Nord : rurale, moins performante Graphique 1.15 : Districts du Rwanda, 2011 Province / Région

Rwanda Nouvelle province / région et nouvelles circonscriptions administratives des districts

Nouvelles circonscriptions des districts

inclus que des élèves de P5-P6 et S1-3 dans les écoles des études de cas. Les élèves participant aux études de cas ont été choisis par les chefs d’établissement. L’échantillon de l’étude a été conçu pour inclure 240 élèves (30 en P5-P6 et 30 en S1-S3), quatre DEO, quatre chefs d’établissement, quatre préfets d’étude et tous les enseignants et représentants des CPE disponibles au moment de la visite. La population totale des quatre écoles était de 5 333 élèves (2 558 garçons et 2 775 filles). Parmi eux, 267 qui ont participé à l’enquête : 137 garçons et 130 filles. L’étude a aussi inclus 81 enseignants (43 hommes et 38 femmes), quatre DEO, quatre chefs d’établissement, deux préfets d’étude et huit membres de CPE, soit un total de 366 informateurs. Le tableau 1.8 indique le nombre de participants réellement échantillonnées dans l’enquête selon le sexe, la catégorie et l’instrument de recherche utilisé. Nous avons tenté d’inclure un nombre égal de filles et de garçons, d’hommes et de femmes dans l’échantillon, car nous avons jugé nécessaire de comprendre les perceptions des deux sexes sur le phénomène mesuré dans l’étude. Tableau 1.8 : Composition des répondants selon l’école, le genre, la catégorie et l’instrument de recherche District Ecole

Gakenke St Joseph

Rubavu Umubano II

Rurale,moins Urbaine, performante performante H

F

Enseignants Total

39 13 52

31 8 39

DEO

1

CE PE Total

1 1 3

Elèves

Kilomètres

3.3 Conception de l’échantillonnage L’équipe de recherche a adopté l’approche de l’échantillonnage dirigé, pratique pour sélectionner les chefs d’établissement, les préfets d’étude, les enseignants et les élèves dans les écoles. Dans un premier temps, nous avons jugé que l’échantillon d’élèves devait inclure des élèves des niveaux 4 à 6 du primaire et des niveaux 1 à 3 du secondaire (ciaprès désignés comme P4-6 et S1-3) et trois classes ont été retenues pour l’étude pilote à l’EAEKanyinya. L’étude pilote nous a toutefois montré que les élèves de P4 avaient un niveau de compréhension de l’anglais très limitéet c’est la raison pour laquelle nous n’avons

Membres des CPE Grand total

1 56

F H F Questionnaires 18 23 40 37 7 9 10 10 25 32 50 47 Questionnaires /entretiens 1 1

1 1 27

Nyagatare GS Nyagatare

Total

Rurale, Urbaine,moins performante performante

H

1

39

Rutsiro Kigeyo

1

H

F

H

F

Tous

40 13 53

39 11 50

137 43 180

130 38 168

267 81 348

1

3

1

4

1 1 3

3 2 8

1 0 2

4 2 10

6 194

2 172

8 366

1 1 1 Groupes de discussion 2 2 2 35 53 48 58

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Clé : DEO – responsable de l’éducation du district CE – chef d’établissement PE – préfet des études

3.4 Collecte et analyse des données Deux questionnaires ont été conçus pour les élèves et les enseignants, composés de quatre sections couvrant l’inscription, la rétention, la réussite scolaire et la gestion scolaire/participation communautaire. Des entretiens non structurés ont été menés avec les DEO,les chefs d’établissement, les préfets des études. Les questions discutées ont inclus l’éducation des filles Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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dans les écoles, la langue d’instruction, l’absentéisme des élèves et les taux d’abandon, les facteurs qui y contribuent et les moyens possibles pour retenir les filles à l’école proposés par les responsables politiques, les parties prenantes, les parents, les enseignants et la communauté. Les lignes directrices des GD étaient basées sur l’entretien et les discussions menées avec les membres des CPE pour mieux connaître leur compréhension de leur EAE et de tous les facteurs, favorables ou défavorables, liés à l’éducation des filles dans leur école. De plus, nous leur avons demandé leur avis sur le modèle idéal pour optimiser les interventions EAE et leur impact sur l’éducation des filles. La plupart des données sur l’inscription, la rétention et la réussite scolaire des élèves, les enseignants et les installations et les équipements scolaires ont été obtenues auprès des chefs d’établissement et en examinant les registres scolaires. De plus, des données sur les EAE ont été recueilliesdans chaque district auprès desDEO. Ces informations ont été utilisées pour compléter les données obtenues par les outils de la recherche. En outre, des rapports d’observation de chaque école ont été rédigés. Après la visitede terrain dans les quatre écoles, l’équipe de recherche a analysé les données recueillies à l’aide du logiciel SPSS version 16.0 pour identifier les lacunes qui ont émergé pendant le processus de collecte des données. Après avoir appliqué les pondérations appropriées, l’étude a été jugée représentative des EAE au niveau national. 3.5 Limites de l’étude L’étude a eu quelques limites. La communication en anglais a été un défi majeur, même avec les enseignants. La langue anglaise est devenue la langue d’instruction dans les écoles rwandaises en 2009 et de nombreux enseignants et élèves trouvent très difficiles de lamieux la maîtriser. Dans les écoles rurales, certains élèves et enseignants ont été incapables de lire ou de répondre au questionnaire en anglais. L’équipe de recherche a donc dû les guider en leur lisant et leur expliquant les questions dans la langue locale, le Kinyarwanda. Presque tous les répondants ont répondu en Kinyarwanda, sauf quelques élèves et enseignants de l’EAE de Nyagatare qui maîtrisait l’anglais. 78

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Malgré les critères de l’étude selon lesquels toutes les écoles recommandées pour l’étude devaient être des établissements d’éducation de base de 9 ans (EB9A) et avoir des élèves inscrits en primaire et dans le premier cycle du secondaire, l’EAE de Umubano II s’est révélé être une école P1-P6, sans cycle secondaire. Cela a constitué un grand revers, car Umubano II était la plus performante des écoles au niveau du primaire et il n’a pas été possible de déterminer le taux de transition des élèves de P6 de l’école. L’échantillon a dépendu de la disponibilité des sujets pouvant y participer. De plus, afin d’obtenir l’appui des chefs d’établissement et ne pas perturber l’organisation de l’école, l’équipe de recherche a accepté les élèves et les enseignants choisis par les chefs d’établissement pour participer à l’étude. Comme il s’est avéré difficile pour les chefs d’établissement d’organiser des visites avec les membres des CPE à l’école les jours de la recherche, la participation des CPE s’est limitée à un échantillon composé de huit membres. Seuls deux préfets des études des quatre écoles étaient disponibles pour participer à l’étude. Si l’équilibre entre les genres a été raisonnable parmi les élèves et les enseignants, seules trois femmes ont été interrogées sur les 23 DEO, chefs d’établissement, préfets des études et membres des CPE de l’échantillon. Sur ces trois femmes, deux faisait partie des huit membres de CPE et juste une parmi les dix chefs d’établissement interrogés. L’une des deux femmes membres du CPE de l’EAE Umubano II atrès peu parlé pendant les GD, tandis que la femme DEO n’était pas disponible au moment de la visite et n’a pu être contactéeque par téléphone. Par conséquent, la perspective féminine sur la gestion scolaire et la participation communautaire a été quasiment inexistante. La tenue des registres dans les bureaux de district ainsi que dans les EAE était extrêmement faible. Seules des données très peu ventilées par genre étaient disponibles. En l’absence de données statistiques complètes dans les EAE permettant d’analyser les tendances, la présente étude est un instantané des écoles concernées par l’étude de cas et de leur mode de fonctionnement en 2011. Un examen des tendances nous aurait mieux éclairés.


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4. CONCLUSIONS DE LA RECHERCHE 4.1 Domaine de l’étude 4.1.1 EAE de Umubano II, district de Rubavu, province de l’Ouest : urbaine, performante Le district. Rubavu est un district de la Province de l’Ouest dont Gisenyi est la capitale. Ilse trouve sur les rives du lac Kivu autour de la ville de Gisenyi etjuste après la frontière avec la ville de Goma en République démocratique du Congo. Il est proche du Mont Nyiragongo, un volcan en activité. L’EAE de Umubano II est située dans la zone urbaine de Gisenyi. Les parents sont principalement dans le commerce et ils ont tendance à comprendre l’importance d’une bonne scolarité. Il existe cinq écoles amies des enfants dans la province de l’Ouest parmi les 79 écoles primaires, les 23 écoles secondaires et les deux universités. Le DEO considérait que toutes les EAE avaient eu un impact considérable sur l’éducation des filles, avec une différence marquée sur les résultats des élèves aux examens d’Etat dans le district. Les EAE ont donc été jugées performantes, en particulier Umubano II, « l’une des meilleures écoles du district avec de bons enseignants et de bons élèves ». Bien qu’elle n’ait pas été choisie pour être l’une des 24 écoles EB9A du district, presque tous les élèves en P6 de cette école ont réussi les examens nationaux et ont été admis à passer dans le secondaire. Les quatre autres écoles amies des enfants EB9A ont toutes été désignées pour devenir desécoles d’éducation de base de 12 ans (EB12A) à partir de 2012. On comptait moins de femmes parmi les enseignants tant dans les écoles primaires que dans les écoles secondaires du district. Dans le secondaire, seuls 19,4 pour cent des enseignants étaient des femmes (tableau 1.9). Le manque de modèles féminins posait un problème pour les filles, en particulier en science. On nous a dit que les enseignants y étaient qualifiés, bien plus que les enseignants des autres écoles et qu’ils avaient reçu une formation spécifique en pédagogie et en anglais, ce qui a contribué à améliorer les résultats des élèves. Tableau 1.9 : Enseignants dans le district de Rubavu selon le genre, 2010 Niveau scolaire Primaire Secondaire Total

Hommes %

692 413 1.105

57,1 80,6 64,2

Femmes 518 99 617

% 42,9 19,4 35,8

Total 1.210 512 1.722

De manière générale, dans le district de Rubavu, plus de filles que de garçons étaient inscrites à l’école primaire,

tandis que plus de garçons (55 pour cent) étaient inscrits dans les écoles secondaires que de filles (45 pour cent) (tableau 1.10). Tableau 1.10 : Inscriptions des élèves dans le district de Rubavu selon le genre, 2010 Niveau scolaire Primaire Secondaire Total

% Garçons 38.961 49,7 8.472 54,5 47.433 50,5

Filles 39.415 7.054 46.469

% 50,3 45,4 49,5

Total 78.376 15.526 93.902

Le DEO a rapporté que l’absentéisme des filles dans le district était plus élevé que celui des garçons, ce qui a été en partie attribué à la conviction des parents selon laquelle les filles doivent rester à la maison pour aider aux tâches domestiques et à la ferme. Les garçons étaient aussi enrôlés pour s’occuper du bétail, mais les parents accordaient plus d’importance à leur éducation. Les règles n’étaient pas considérées comme un facteur important d’absentéisme, car une enseignante de chaque école était chargée d’aider les fillespendant leurs règles et le MINEDUC fournissait les produits indispensables comme les serviettes hygiéniques, le savon et le papier toilette pour maintenir l’hygiène. Malgré l’absence de données complètes sur le taux d’abandon des filles, le DEO a déclaré que 849 élèves avaient abandonné l’école primaire et l’école secondaire en 2010. On nous a rapporté que les filles dans le district abandonnaient dès le P1. Au moment de l’étude, environ 10 000 élèves étaient inscrits en P1 et environ 8 000 en P2, soit un taux d’abandon de 20 pour cent. Cela a été attribué aux faibles capacités des jeunes enfants inscrits par des parents « ambitieux » dès l’âge de cinq ans. Etant donné la faible qualité des installations scolaires préprimaires pour les jeunes enfants dans le district, beaucoup de ces enfants étaient incapables de s’adapter et ont été retirés de l’école par leurs parents poury retourner à l’école à sept ans. Les autres raisons justifiant l’abandon dans le district incluent la pauvreté, sans doute la contrainte la plus grave rencontrée par les parents à la fois en ville et à la campagne ; les mariages précoces qui affectent les filles en P5 et en P6, bien que la culture ait changé progressivement au cours des cinq dernières années ; les filles et les garçons en âge d’aller à l’école qui trouvent du travail dans les plantations de thé et de café et les usines ou vendent des produits agricoles au marché et gagnent de l’argent pour leur famille ; et l’attitude des parents qui assignent aux filles de lourdes tâches domestiques. Même si les filles retournaient à l’école et étaient réintégrées, dans certains cas même après huit Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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ans d’absence, la réintégration était problématique à cause de la faible estime d’elles-mêmes des élèves et du manque de soutien pour les accueillir à nouveau dans le système scolaire. Un défi sérieux a été rapporté dans le district : dans les écoles primaires, le chef d’établissement assume le rôle de gestionnaire financieret celui de gestionnaire pédagogique, ce qui lui impose unelourde charge de travail. Il a besoin d’un soutien plus important. L’école. Il y avait plus de filles (518) que de garçons (485) inscrites dans les classes P1-P6 à Umubano II au moment de l’étude. L’école n’avait aucune classe secondaire. Le CPE a rapporté que les élèves qui réussissaient étaient envoyés dans les EB9A voisines pour être placés dans des classes secondaires après leur examen de P6, malgré l’absence de données sur le nombre d’élèves ayant réussi. L’école disposait de bonnes infrastructures ainsi que de toilettes séparées pour les enseignants, même si l’approvisionnement en eau était un problème. Elle avait aussi une salle pour l’hygiène individuelle et des serviettes hygiéniques pour les filles. L’UNICEF a fourni des bâtiments pour l’école et a aussi formé les enseignants, particulièrement en langue anglaise. L’école a l’électricité et fera partie du prochain programme « un ordinateur portable pour chaque enfant ». Elle avait des installations pour le football, le basketball et d’autres sports que l’on a vu utilisées au moment de l’étude. On nous a dit que l’équipe de basketball des filles avait gagné un tournoi régional. Les répondants du CPE ontcitécomme activités extrascolaires le club culturel, le club anti-Sida, le club de danse, le club de l’environnement et le club Tuseme et ils ont noté que ces clubs incitaient les filles à rester à l’école. L’école avait une femme comme chef d’établissement qui assumait de nombreux rôles : administrateur, gestionnaire financier et gestionnaire pédagogique. 4.1.2 EAE du GS Nyagatare, district de Nyagatare, province de l’Est : urbaine, moins performante Le district. On nous a dit que le MINEDUC avait accompli des progrès remarquables pour promouvoir l’EPT en construisant plus de 378 salles de classe dans le district au cours des deux années précédant l’étude. Les élèves n’avaient plus cours dehors sous les arbres. Les partenaires de l’éducation de l’UNICEF ont construit 14 salles de classe dans chaque EAE. De plus, 19 salles de classe ont été reconstruites, des citernes 80

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d’eau fournies et des toilettes construites. Toutefois, les écoles manquaient d’installations sportives et les sports pour les filles étaient inadéquats et devaient être promus. Les partenaires de l’éducation ont fourni des formations aux enseignants afin de perfectionner leurs compétences en science, mathématiques et langue anglaise, ce qui a permis d’améliorer les résultats des élèves. Depuis que l’anglais est devenu la langue d’instruction en 2009, des progrès considérables ont été faits en expression orale et écrite en anglais. Le district a créé récemment un poste de responsable sectoriel de l’éducation pour aider le DEO dans l’administration des écoles au niveau du secteur et améliorer leurs performances. Le DEO a rapporté qu’il n’y avait plus de différence significative entre les inscriptions en P6 et en P1 dans le district grâce aux écoles EB9A. Tous les élèves étaient encouragés à progresser du P6 au P1 et les abandons étaient beaucoup moins nombreux qu’avant l’introduction du programme EB9A. Sur les 6 020 élèves en P6 en 2010, environ 4 000 se sont inscrits en S1 dans ces mêmes écoles et les 2 020 autres qui ont réussi ont été admis dans des internats à travers le pays. Il a été noté que le GdR, avec le soutien des ONG, avait beaucoup contribué à améliorer l’éducation des filles grâce à son engagementen faveur des politiques sur l’éducation des filles. Cependant, il restait encore des améliorations à apporter. Si les inscriptions de filles dans le district étaient plus élevées que celles des garçons, les filles devaient encore être sensibilisées, encouragées et soutenues par leur famille, les communautés et leurs pairs, y compris les garçons, et protégées de la violence afin de leur permettre de rester à l’école. Dans le passé, les filles abandonnaient en P1, mais plus récemment, le taux d’abandon a augmenté en P4 et P5. Malgré l’absence de statistiques sur l’abandon des filles, le manque de conscience des parents sur la valeur de l’éducation des filles était considéré comme un facteur clé contribuant à l’abandon, ainsi que la pauvreté et les problèmes sociaux. Les facteurs contribuant à l’abandon étaient similaires à ceux notés dans le district de Rubavu. Les parents assignaient aux filles de lourdes tâches domestiques, y compris la garde des enfants, car ils considéraient que cela relevait de leur responsabilité. Les mariages précoces contribuaient aussi à l’abandon des filles, bien que dans le district de Nyagatare, aussi, la culture ait


R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

changé progressivement au cours des cinq dernières années. Bien que les parents aient souvent contribué à l’abandon des filles, certaines filles âgées de 12 à 15 ans ont pris la décision de quitter l’école pour avoir leur liberté une fois qu’elles ont atteint la puberté. Les garçons quittaient l’école pour élever du bétail ou travailler dans des plantations de riz, surtout pendant la période saisonnière de commerce transfrontalier. Certaines filles se sont absentées de l’école seulement pendant trois mois et y sont ensuite retournées. De plus, les filles et les garçons en âge d’aller à l’école trouvent du travail dans les plantations de thé et de café et dans les usines ou vendent des produits agricoles au marché et gagnent de l’argent pour leur famille. Le DEO a observé que certaines filles revenaient à l’école après trois ans d’absence après avoir vu la progressionde leurs paires qui avaient continué leur scolarité. Pour cette raison, certaines élèves en P6 étaient âgées de plus de 18 ans. L’école. Le groupe scolaire EAE de Nyagatare est situé dans la région urbaine du district de Nyagatare dans la province de l’Est du Rwanda et est l’un des quatre EAE du district. Le DEO a estimé que les quatre écoles avaient profité du programme EAE et étaient performantes, bien que l’EAE de Nyagatare ne soit pas aux mêmes normes que les autres. Les performances des EAE étaient attribuées aux installations extrascolaires et aux enseignants fournis par l’UNICEF ainsi qu’à leur potentiel d’agrandissement. L’école est devenue une EAE en 2006. Bien que l’EAE du GS Nyagatare ait été classée comme une école moins performante dans cette étude, le chef d’établissement considérait que l’école avait réussi et il a cité les résultats des examens de fin d’études primaires : 43 sur les 83 élèves avaient réussi, parmi lesquels 24 filles. Le DEO, aussi, a considéré que c’était une meilleure école que la plupart des autres écoles non-EAE du district. Le chef d’établissement et le préfet des études de l’écoleétaient tous deux diplômés de l’université et les enseignants du secondaire comptaient six diplômés de l’université et deux titulaires de diplômes. Les résultats des examens s’améliorent régulièrement. L’école avait 12 toilettes et des toilettes séparées pour les garçons et les filles. Les toilettes des enseignants étaient dans le même bloc que ceux des élèves, ce qui était jugé insatisfaisant par le personnel. L’UNICEF a contribué aux infrastructures en construisant un laboratoire informatique, une salle pour le personnel et trois blocs supplémentaires de salles de classe. L’école comptait 12 élèves ayant un handicap visuel (sept filles, cinq garçons), dont deux dans le secondaire.

4.1.3 EAE de Kigeyo, district de Rutsiro, province de l’Ouest – rurale, réussite Le district. On nous a dit que l’âge courant auquel la majorité des filles ont abandonné l’école dans le district de Rutsiro était de 12 ans (niveau P5). Bien que nombreuses filles ne soient pas ravies d’arrêter l’école, les conditions dans lesquelles elles l’ont souvent quitté leur rendent difficile d’y retourner. Le DEO a noté que les facteurs contribuant aux taux élevés de rétention et d’abandon des filles à Rutsiro incluaient la pauvreté, le manque d’installations sanitaires (surtout pour les filles pendant leurs règles), le manque de conscience des parents associé à l’attitude patriarcale, les tâches domestiques qui les éloignent de l’école et le manque de connaissance des politiques gouvernementales sur l’éducation des filles. La pauvreté responsable du manque d’uniformes scolaires et de livres, les activités domestiques et les règles ont aussi été citées comme les principaux facteurs contribuant à l’absentéisme des filles. L’école. L’EAE de Kigeyo est devenue une EAE en 2003 et est la seule du district de Rutsiro. Elle est située une zone rurale montagneuse très reculée, mais elle nous a été recommandée, car elle est considérée comme étant une école plus performante que d’autres écoles du district. Il nous a été rapporté que depuis que l’école est devenue une école amie des enfants, elle a connu une diminution considérable du taux d’abandon des filles et tant les enseignantsque les parents s’efforcent de ramener à l’école les filles déscolarisées à l’école. Aucune statistique n’a été fournie sur l’inscription ou la réussite scolaire des filles au niveau du district ou dans l’EAE. L’équipe de recherche a voyagé plus de trois heures sur des routes difficiles à travers le district de Karongi pour arriver à l’école, ce qui l’a empêché de rencontrer les élèves fréquentant les classes du matin. Cependant, elle a obtenu des données des enfants assistant à la vacation de 12h40-17h00. L’EAE de Kigeyo comptait 32 enseignants et 2 025 élèves. Elle n’avait pas d’électricité. On utilisait un peu l’énergie solaire, mais la pratique courante des familles était d’acheter une petite quantité de pétrole pour éclairer une pièce pendant une courte période, mais pas toutes les pièces. Cela signifiait qu’il n’y avait pas de lumière à l’école et pas de lumière permettant aux élèves d’étudier chez eux le soir. Le GdR s’était engagé à fournir de l’électricité rapidement, mais aucune proposition n’avait encore été faitepour apporter l’eau dans ce secteur. Les enfants arrivaient à l’école en Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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retard parce qu’ils devaient aller chercher l’eau et les maladies étaient monnaie courante parmi eux à cause des problèmes d’hygiène. Néanmoins, une enseignante était chargée des questions de santé et de fournir des serviettes hygiéniques aux filles. Aucun logement n’était fourni aux enseignants qui vivaient chez des membres de la communauté. Le chef d’établissement disposait du seul ordinateur de l’école, mais il n’avait pas accès à l’électricité ou à une connexion Internet dans cette zone. 4.1.4 EAE de St Joseph Munyana, district de Gakenke, province du Nord – rurale, moins performante Le district. Les statistiques tenues par le DEO montraient que les inscriptions des filles dans le district étaient plus élevées que celles des garçons aux niveaux primaire et secondaire (tableau 1.11). Les écoles primaires comptaient légèrement plus d’enseignantes que d’enseignants, mais dans le secondaire, 70,5 pour cent des enseignants étaient des hommes (tableau 1.12). Comme dans les autres districts, peu de femmes enseignaient en en science. Tableau 1.11 : Inscriptions dans le district de Gakenke selon le genre, 2010

Niveau scolaire Garçons % Filles 37.845 49.0 , 39.355 Primaire 6.819 47.6 , 7.500 Secondaire Total

44.664

48,8 46.855

% 50,9 52,4 51,2

Total 77.200 14.319 91.519

Tableau 1.12 : Enseignants dans le district de Gakenke selon le genre, 2010

Niveau scolaire Hommes % Femmes % 651 48.9 679 51.1 Primaire 544 70.5 228 29.5 Secondaire Total

1,195

56.9

907

43.1

Total 1,330 772 2,102

Selon le DEO, les filles du district commençaient à abandonner l’école en P4, mais la plus grande partie des abandons se situaient à la fin du cycle primaire en P6. Cela a été attribué au nombre de places limitéesdisponibles dans les écoles secondaires. En 2010, il y avait 7 000 élèves en P6 dans le district contre 5 000 places disponiblesdans les écoles secondaires en 2011. Au total, 823 filles et 901 garçons ont abandonné dans les écoles primaires et 261 filles et 287 garçons ont abandonné dans les écoles secondaires en 2010. Bien que la pauvreté soit l’une des causes d’abandon, on nous a dit que le chômage touchant les élèves sortant de l’école dissuadait les élèves de continuer leurs études. Les écoles d’enseignement et de formation

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professionnels pouvant aider les étudiants à trouver un emploi à la fin de leurs études étaient très rares. Du côté positif, on peut citer le programme de rattrapage pour les filles qui retournaient à l’école après avoir abandonné pour travailler sur les marchés à vendre les produits de la ferme. Le travail domestique n’était plus un obstacle empêchant les filles d’aller à l’école. De plus, chaque école avait des enseignants chargés d’informer les filles sur la santé reproductive et l’impact des règles sur la fréquentation scolaire n’était plus si important. Le DEO a noté que les CPE des 108 écoles primaires et les CPE des 46 écoles secondaires ne fonctionnaient pas bien et avaient besoin de soutien pour jouer un rôle utile. Citons parmi les défis majeurs rencontrés par les écoles du district : • Les enseignants non qualifiés : seuls 2 sur 19 enseignants du secondaire avaient des diplômes et seuls 80 enseignants du primaire étaient diplômés des instituts pédagogiques. • L’insuffisance des matériels pédagogiques. • Le changement de la langue d’instruction dans le secondaire du Kinyarwanda (enseigné du P1-P4)et du français (P5-P6) à l’anglais. Les enseignants ne maîtrisaient pas ce changement et avaient reçu peu de formation formelle – juste deux semaines par an. • La formation limitée des gestionnaires du district et des écoles qui avaient besoin de mieux maîtriser la gestion, les statistiques, les finances, les technologies de l’information, la langue anglaise et la supervision des enseignants. L’école. L’école St Joseph Munyana est devenue une école amie des enfants en 2008 et est la seule du district. L’école se trouve dans une zone montagneuse reculée à 31 km de la route principale, difficile à atteindre pendant la saison des pluies. Le chef d’établissement avait été récemment remplacé à la suite de problèmes avec la communauté. St Joseph a été recommandé pour l’étude comme une école rurale moins performante parce que très peu d’élèves avaient obtenu de bons résultats aux examens d’Etat. Néanmoins, le DEO considérait que participer au programme EAE avait eu un impact positif sur l’école, en particulier pour les filles, bien que les progrès soient lents. On comptait plus de filles (577) que de garçons (451) inscrits dans cette école auxniveaux préscolaire,


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4.2 Aspects démographiques des participants Genre. Les écoles visitées étaient toutes des écoles mixtes accueillant les filles et les garçons. Les deux sexes ont participé à l’enquête, mais en ce qui concerne les élèves, les enseignants ont sélectionné

La moitié des enseignants étaient âgés de moins de 30 ans, tandis que presque 20 pour cent avaient plus de 40 ans. Graphique 1.16 : Age des élèves commençant l’école selon le genre, 2011

Les marqueurs indiquent les pourcentages Garçons

50.0%

Pourcentage

Enrolment

L’école était adaptée aux élèves ayant un handicap. Trois élèves en P1 (deux garçons et une fille) souffraient d’une déficience auditive, tandis qu’un garçon en P5 avait un handicap physique. Deux enseignants étaient responsables des élèves avec une déficience auditive.L’un de ces enseignants s’est plaint que les installations pour les élèves sourds étaient insuffisantes, que les parents ne mettaient pas leurs enfants sourds à l’école et qu’il lui était difficilede sensibiliser tous les parents du village à l’importance d’envoyer leurs enfants ayant un handicap à l’école. L’école avait un terrain de basketball et un terrain de football où les garçons et les filles faisaient du sport. Cependant, le nouveau chef d’établissement nous a confirmé que le terrain de basket n’avait pas été utilisé depuis son arrivée à l’école deux mois avant l’étude. Il a aussi noté que les garçons faisaient plus de sport que les filles. Le seul club existant dans cette école était le club médias où les élèves prenaient connaissance des événements se passant autour d’eux. L’école n’avait pas de club Tuseme où les élèves pourraient avoir l’opportunité d’exprimer leurs idées sur les questions qui les affectent.

en général plus de garçons que de filles pour répondre au questionnaire. Comme nous l’avons noté, sur les 81 enseignants de l’étude, 43 étaient des hommes et 38 des femmes. Age. Les écoles fonctionnaient toute la journée et avaient des classes du cycle primaire et du premier cycle du secondaire. L’exception était Umubano II qui n’avait que des classes primaires. Presque 81 pour cent des filles et 70 pour cent des garçons enquêtés ont déclaré qu’ils avaient commencé l’école primaire à l’âge de sept ans, ce qui est l’âge normal pour les élèves du primaire au Rwanda (graphique 1.16). Il y avait cependant plus de garçons (24 pour cent) que de filles(18 pour cent) âgés de moins de 15 ans dans les cinq classes (P5-S3) de chaque école. Presque 27 pour cent des filles étaient âgées de 15 à 17 ans contre 20 pour cent des garçons (graphique 1.17). Cela suggère que les filles participant à l’enquête ont mis plus de tempsque les garçons pour avancer dans les classes du primaire et du premier cycle secondaire.

40.0% 30.0% 20.0% 10.0% 0.0% 50.0%

Pourcentage

primaire et secondaire. L’école avait trois blocs d’enseignement contenant six salles de classe chacune, une bibliothèque, une salle des enseignants et un bureau pour le chef d’établissement et une salle de consultation. Trois autres blocs contenant huit salles de classe chacun existaient avant la construction de nouveaux blocs par l’UNICEF. Il y avait deux bâtiments pour les toilettes et des toilettes mobiles qui étaient séparés pour les filles et les garçons. Cependant, les enseignants et les élèves partageaient les toilettes. Il y avait deux grandes citernes de stockage des eaux de pluie et bien que l’eau ne soit pas potable, elle pouvait être utilisée pour le nettoyage. Aller chercher chez de l’eau était un grand problème qui s’aggravait pendant la saison sèche. Le CPE a noté que les plus grands besoins de l’école concernaient les matériels scolaires (livres, uniformes scolaires, ordinateurs), un laboratoire de science, l’électricité, plus de salles de classe et le logement des enseignants.

Filles

40.0% 30.0% 20.0% 10.0% 0.0%

<6or6> 7 8 9 10 11 12 A quel âge avez-vous commencé l’école ?

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Graphique 1.17 : Age des élèves selon le genre, 2011

Fréquence

40 30 20

4.3 Scolarisation

10 0

<10

11

12

13

14

15

16

17

<18

Age des élèves Garçons

Filles

Trajet jusqu’à l’école. Environ 97 pour cent des élèves allaient à pied à l’école, dont la majorité (64 pour cent) en moins d’une demi-heure. La plupart des élèves à l’école (urbaine) de Umubano II mettaient 15 minutes pour aller à pied à l’école, mais les élèves des écoles rurales et de l’école urbaine de Nyagatare faisaient de longues distances à pied. Environ 36 pour cent marchaient une heure ou plus pour aller à l’école (graphique 1.18). Cela indique qu’un tiers des élèves mettaient plus deux heures par jour à marcher pour aller et revenir de l’école, souvent sur des routes difficiles, montagneuses dans les zones rurales. Graphique 1.18 : Durée du trajet pour aller à l’école, EAE, 2011

35.0 30.0 25.0 20.0 15.0 10.0 5.0 0.0 15 mn

30 mn

45 mn

Munyana

Kigeyo

Umubano

Nyagatare

1 heure > 1 heure Total

Qualification des enseignants. Excepté les chefs d’établissement et les préfets des études, seuls 6 pour cent des enseignants étaient titulaires d’une licence. Ils enseignaient tous à Nyagatare où les élèves 84

avaient les meilleurs résultats. De plus, 44 pour cent des enseignants étaient titulaire d’un diplôme, 37 pour cent d’un certificat et 13 pour cent n’avaient étudié que jusqu’en S6. 21 pour cent avaient enseigné dans leur école qu’une année, 63 pour cent pendant trois ans et seulement 5 pour cent pendant sept ans.

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Les répondants ont affirmé que l’équilibre entre les genres dans les inscriptions du primaire et du secondaire s’étaitamélioré et cela a été encore confirmé par les données officielles. Les inscriptions de filles étaient plus élevées que celles des garçons dans les quatre EAE visitées (tableau 1.13). Cependant, il convient de noter que les chiffres ci-dessous indiquent le nombre d’enfants inscrits sur les registres scolaires et ne fournissent aucune information sur leur fréquentation, leur rétention, leur réussite scolaire et la qualité de l’apprentissage qu’ils reçoivent à l’école. Tableau 1.13 : Scolarisation selon le genre, 2011

Ecole Umubano II GS Nyagatare Kigeyo St Joseph Munyana Total

Garçons 485 605 1.010 458 2.558

(%) 19 24 39 18 100

Filles 518 661 1,027 569 2,775

(%) 19 24 37 20 100

Total 1.003 1.266 2.037 1.027 5.333

*Données disponibles les plus récentes Les chiffres des inscriptions présentés par l’EAE de Nyagatare ont montré en particulier que les filles étaient plus nombreuses que les garçons aux niveaux primaire et secondaire. Au niveau secondaire, l’école avait 217 filles et 168 garçons inscrits en S1-S3, maisen P2 et P3, les inscriptions ne présentaient aucune différencesignificative entre les deux sexes. Plus de 96 pour cent des enseignants ont estimé que les filles et les garçons avaient les mêmes opportunités pour s’inscrire à l’école. Le DEO a aussi affirmé que l’inscription des filles s’était beaucoup améliorée dans toutes les écoles de la région. Les DEO, les chefs d’établissement, les préfets d’étude et les membres des CPE ont attribué cette amélioration aux facteurs suivants : • La réforme de l’éducation qui a aboli les frais scolaires en 2003, bien que dans l’enquête, des frais scolaires pour les enseignants, les uniformes et les matériels aient été encore collectés et considérés comme posant un problème aux familles. • Le transfert des ressources directement aux écoles


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dans les différents districts depuis 2005 en fonction du nombre d’élèves. • Le programme d’éducation de base de 9 ans (EB9A) obligatoire introduit en 2009 pour lutter contre le taux d’abandon, en particulier chez les filles. • La création de CPE et l’encouragement à une plus grande participation des parents et des communautés à la gestion des écoles. • L’obligation des classes à double vacation afin de remédier à la surcharge des classes et d’améliorer les ratios enseignant-élèves. • Etendre la construction de salles de classe et la construction de toilettes séparées pour les filles et les garçons. Toutefois, à l’école de St Joseph Munyana où plus de filles étaient inscrites que de garçons, les parents ont attribué cela à la situation démographique de la population qui compte plus de femmes que d’hommes. Les élèves répondants des quatre EAE ont souligné certaines difficultés qu’ils rencontraient quand ils commençaient l’école (graphique 1.19). Si 63 pour cent des élèves ont indiqué ne pas avoir de problèmes, 18 pour cent ont cité le manque de matériels scolaires, 14 pour cent des difficultés financières liées aux frais scolaires et 5 pour cent ont indiqué qu’ils étaient défavorisés parce qu’ils étaient orphelins. Graphique 1.19 : Problèmes rencontrés par les élèves commençant l’école, 2011 60

50

Fréquence

40

30

20

10

0

Munyana

Umubano Kigeyo Nom de l’école

Nyagatare

Problèmes rencontrés par les élèves commençant l’école:

N’avaient pas d’équipements scolaires N’avaient pas de parents

Frais scolaires Aucun problème

4.4 Rétention Environnement scolaire. Etant donné le lien entre la rétention et un environnement scolaire holistique, l’étude a invité les élèves à évaluer leur environnement scolaire. Plus de 97 pour cent des réponses ont été positives. Plus de filles (1,5 pour cent) que de garçons (1,1 pour cent) avaient des perceptions négatives, mais ce n’était pas statistiquement pertinent. Toutes les EAE visitées avaient de grandes salles de classe lumineuses, des toilettes séparées, des terrains de jeu et un centre de documentation pédagogique. Cependant, environ 18 pour cent des enfants impliqués dans notre étude ont déclaré qu’ils avaient été mal préparés à l’apprentissage quand ils ont commencé l’école ; ils n’avaient pas eu de développement de la petite enfance, de soins et de soutien appropriés. Environ 57 pour cent des élèves citaient la façon d’enseigner comme l’élément le plus apprécié de l’environnement scolaire. Plus de 20 pour cent ont cité les jeux joués à l’école et l’utilisation égale des terrains de jeu par les deux sexes. Les 22 pour cent restant ont donné des réponses variées allant de l’environnement scolaire, des groupes de pair(e)s à l’utilisation et à l’accès aux manuels scolaires par ordre décroissant d’importance. Environ 33 pour cent des élèves n’ont rien déclaré ne pas aimer à l’école. Cependant, 33 pour cent ont souligné l’emplacement géographique des écoles par rapport à leur domicile et la longueur du trajet comme étant un défi majeur. Environ 15 pour cent ont cité le manque de propreté, en particulier des toilettes ; 9 pour cent ont signalé le bruit en classes ; 9 pour cent ont cité les agressions entre les élèves et 5 pour cent la mauvaise qualité des terrains de jeu. La présence de clubs Tuseme a été rapportée dans toutes les écoles visitées à l’exception de Munyana, bien que seulement 17 pour cent de l’ensemble des élèves aient déclaré en être membres. Selon les chefs d’établissement, la construction de toilettes nouvelles et séparées pour les garçons et les filles avait joué un rôle important pour garder les élèves à l’école. Cependant, à l’exception de Umubano II, les écoles visitées manquaient d’eau potable à boire. A la place, elles avaient des citernes de stockage de l’eau de pluie, bien que l’eau stockée soit impropre à la consommation et utilisée pour le nettoyage. Les élèves devaient donc apporter de l’eau potable de chez eux. Absentéisme. Les taux d’absentéisme des élèves étaient élevés pour les garçons comme pour les filles, Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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environ 34 pour cent des élèves manquaient l’école chaque semaine et quelques élèves manquaient jusqu’à deux semaines par mois. Si 35 pour cent des enseignants ne pensaient pas que l’absentéisme des filles était plus élevé que celui des garçons, les 65 pour cent restants pensaient que les filles étaient plus souvent absentes que les garçons. En fait, le nombre de garçons manquant l’école était plus élevé en moyenne que celui des filles, bien que cela ne soit pas statistiquement pertinent.

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Graphique 1.20 : Taux d’abandon dans les quatre EAE, 2011 Niveau P1

P2

P3

P4

P6

S1

S2

S3

8

8

7

7

Non

No

Oui

Yes

8

8

7

7 Filles

Abandon. Les enseignants répondants ont déclaré que 60 pour cent des filles abandonnaient l’école en P5 et P6 et 24 pour cent à l’âge de 12 ans. Le CPE de l’école de St Joseph Munyana estimait que les garçons avaient une meilleure fréquentation scolaire que les filles et

Plus de 14 pour cent des 267 élèves qui ont pris part à cette étude ont déclaré avoir abandonné l’école à un moment ou à un autre. Cela représentait 6 pour cent des filles et plus de 8 pour cent des garçons.Le graphique montre une différence statistiquement pertinente entre la distribution sous-jacente des taux d’abandon des garçons et des filles.

Garçons

Les répondants ont estimé que l’absentéisme contribuait aux taux d’abandon. Les filles ont spécifiquement cité le manque de connaissances de leurs parents sur l’importance de l’éducation comme étant un obstacle à la fréquentation scolaire. Les parents assignaient les tâches domestiques aux filles et les impliquaient dans les activités génératrices de revenus (par exemple, aller au marché),ce qui les empêchait de fréquenter l’école régulièrement. Certaines filles ont cherché des moyens de surmonter ces obstacles comme s’impliquer dans les initiatives de conscientisation communautaire pour sensibiliser les parents et les dirigeants sur la valeur de l’éducation des filles. Parmi les enseignants qui pensaient que les filles enregistraient des taux élevés d’absentéisme, 33 pour cent ont cité les activités domestiques comme la première cause d’absentéisme des filles et 13 pour cent les règles. Les répondants du CPE de l’EAEde Kigeyo partageait le point de vue que l’absentéisme des filles était plus élevé que celui des garçons à cause de leurs règles, tandis qu’au GS Nyagatare où il a été rapporté que l’absentéisme avait atteint un niveau très bas, filles et garçons confondus, on ne considérait pas que les règles des filles posaient un problème, car les filles avaient maintenant accès à une pièce spéciale et une enseignante était disponible pourles aider pendant cette période. En ce qui concerne le cycle menstruel et la disponibilité de serviettes hygiéniques, environ 33 pour cent des filles ont déclaré qu’elles avaient eu leurs premières règles. Sur ce groupe, 24 pour cent recevaient des serviettes hygiéniques chez elles, tandis que 6 pour cent utilisaient les méthodes traditionnelles. 3 autres pour cent avaient obtenu des serviettes hygiéniques à l’école, tandis que moins de 1 pour cent les recevaient d’amies. Il y avait une forte corrélation entre la source des serviettes hygiéniques des filles et leur appréciation de l’environnement scolaire.

les filles étaient plus nombreuses à abandonner que les garçons, malgré l’absence de données statistiques pour étayer ce point de vue.

Non

No

Oui

Yes

8 6 4 2 0 2 4 6 88 6 4 2 0 2 4 6 88 6 4 2 0 2 4 6 88 6 4 2 0 2 4 6 88 6 4 2 0

Fréquences du taux d’abandon Barres d’erreur : 95% CI

Les élèves ont donné les raisons suivantes pour expliquer l’abandon : le manque du matériel scolaire indispensable, par exemple les uniformes, les livres, les stylos et les frais scolaires (11 pour cent); la perte des parents (1 pour cent); la maladie (1 pour cent); et des opportunités d’emploi dans les zones urbaines (1 pour cent). Plus de 33 pour cent de ceux qui ont abandonné l’ont fait en P1 (14 pour cent des garçons et 19 pour cent des filles), 15 pour cent en P2 et en P4, 13 pour cent en P3, 8 pour cent respectivement en P5 et en P6 et 3 pour cent en S2. Environ 28 pour cent des élèves ont abandonné à l’âge de 7 ans (11 pour cent des garçons et 17 pour cent des filles). Si l’étude a produit peu de données statistiques sur l’étendue de l’abandon scolaire, les DEO, les chefs d’établissements, les préfets des études et les CPE ont noté que les filles commençaient à abandonner aux niveaux P4-P5. Ces gestionnaires d’école ont cité les raisons suivantes à l’origine de la faible rétention des filles : • La pauvreté. La scolarité était l’une des exigences financières les plus pressantes sur les budgets des


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familles et était une source constante d’anxiété à tous les niveaux de l’échelle sociale. Les parents pauvres n’avaient pas les moyens de payer les fournitures de base nécessaires pour payer les traitements des enseignants, les frais des CPE pour les projets de construction, les uniformes, les livres, les stylos et les équipements pour le travail manuel. De plus, certaines familles sentaient qu’elles n’avaient pas les moyens de perdre le « coût » du travail des filles. • La persistance des attitudes culturelles. Même si ces attitudes changent, les préjugés sexistes étaient omniprésents et jouaient un rôle sur le nombre d’abandons des filles. Les filles continuaient à être mariées et à tomber enceintes jeunes et certaines familles continuaient d’accordaient la préférence à la scolarité des garçons par rapport à celle des filles, cette dernière étant considérée comme moins importante. • La mauvaise qualité des installations sanitaires. L’absence de toilettes séparées pour les filles, de serviettes hygiéniques décentes et d’eau propre au moment des règles. • L’absence d’accompagnement et d’information sur la santé reproductive des adolescents, les droits et les compétences pour la vie des adolescents. • L’absence d’un environnement scolaire sûr. Les filles ont connu des expériences de harcèlement sexuel à l’école et sur leur trajet vers l’école.

déclaré que le taux de retour des filles à l’école après avoir abandonné était très limité. On estimait que 3 filles sur 20 qui avaient abandonné l’école pour cause de grossesse étaient susceptibles de venir reprendre leurs études plus tard. A l’EAE de Kigeyo, on nous a dit que les filles qui avaient abandonné pour cause de grossesse étaient désireuses de retourner à l’école après leur accouchement, mais n’avait pas le soutien nécessaire pour le faire, tandis qu’au GS Nyagatare, certaines filles étaient retournées à l’école quand elles avaient eu de l’aide pour le faire. Dans cette école, bien que le taux d’abandon des filles ait diminué, en partie à cause d’une incidence plus faible des mariages précoces, 13 filles avaient abandonné en 2010. Dans le secondaire, les abandons ont principalement lieu en S2 et S3. Parmi les problèmes scolaires spécifiques identifiés, l’abandon était classé comme le plus élevé par 33 pour cent des élèves de toutes les EAE visitées. Suivaient le manque d’installations sanitaires et de serviettes (environ 24 pour cent), les grosses non planifiées (18 pour cent), le manque d’installations de santé adéquates (14 pour cent), les persécutions (7 pour cent), le harcèlement sexuel (4 pour cent) et la violence fondée sur le genre (1 pour cent) (graphique 1.21). Graphique 1.21 : Problèmes rencontrés par les élèves dans les EAE, 2011

Les enseignants ont cité les raisons suivantes : la pauvreté (40 pour cent), le mariage précoce (16 pour cent), le manque de conscience chez les parents (6 pour cent), l’influence des pair(e)s (6 pour cent), les convictions culturelles (5 pour cent) et la puberté(5 pour cent). En particulier, les enseignants ont noté que le manque de conscience de la valeur de l’éducation avait pour conséquence que les parents accordaient peu de priorité à l’éducation de leurs enfants, préférant les impliquer dans le travail domestique et agricole à la place. Ils ont aussi déclaré que les filles étaient retirées de l’école pour cause de mariage précoce ou quittaient l’école à cause de la mauvaise hygiène ou d’une grossesse non désirée. En ce qui concerne les filles qui avaient abandonné l’école en 2010, les enseignants ont donné les principales raisons suivantes : grossesse non planifiée (33 pour cent, le plus élevé à Nyagatare), la perte des parents et l’obligation d’assumer les responsabilités familiales (14 pour cent), prendre un emploi en ville (11 pour cent), le manque de ressources financières (6 pour cent) et la maladie (5 pour cent). A l’école de St Joseph Munyana, on nous a

Fréquence

30

20

10

0

Munyana

Umubano

Grossesse non désirée Harcèlement sexuel Abandon de l’école Manque de toilettes et d’autres installations sanitaires

Kigeyo

Nyagatare

Manque de serviettes hygiéniques Persécution Violence fondée sur le genre

La pauvreté a aussi été citée par les élèves comme étant la cause principale des abandons et d’autres problèmes identifiés par les élèves, suivis par l’analphabétisme des parents (graphique 1.22). Une forte corrélation statistique a émergé entre l’abandon des filles d’une part, la pauvreté des familles et les parents qui sont analphabètes et n’attachent pas autant d’importance à l’éducation de leurs filles qu’à celle de leurs fils. Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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Graphique 1.22 : Causes de l’abandon et d’autres problèmes rencontrés à l’école, 2011 60

Fréquence

50 40 30 20 10 0

Munyana

Umubano

Pauvreté Analphabétisme

Kigeyo

Nyagatare

Environnement scolaire Environnement scolaire

A l’école urbaine de Umubano II, les élèves en P5 et en P6 reliaient la pauvreté aux grossesses précoces comme cause principale des abandons. Les filles des zones urbaines qui manquaient de ressources financières étaient plus attirées par les hommes qui leur offraient de l’argent, des vêtements et des téléphones portables en échange de sexe. Pour les garçons des zones urbaines, le principal défi était la toxicomanie. A l’école de St Joseph Munyana dans le district de Gakenke, les élèves en S1-S3 ont dit que la pauvreté conduisait certaines filles à quitter leur famille et à travailler comme domestiques. Les filles qui n’étaient pas allées à l’école et travaillaient à la place dans des fermes avaient plus d’argent que celles qui étaient allées à l’école et n’avaient pas d’emploi, ce qui incitait plus de filles à arrêter l’école pour faire la même chose, encouragées par leurs parents. Les membres du CPE de cette école partageaient le point de vue que les parents encourageaient leurs filles à rester à la maison pour aider aux tâches domestiques ou à arrêter l’école pour gagner de l’argent en vendant les produits de la ferme au marché. A l’EAE de Kigeyo, également, les répondants du CPE blâmaient les parents pour l’abandon des filles, car ils étaient préoccupés par les moyens de subsistance de la famille et qu’il était plus facile de les impliquer dans le travail domestique ou comme employées dans des plantations de thé que les garçons qui fuyaient généralement ce genre de travail. Cependant, les garçons abandonnaient aussi l’école pour trouver du travail en ville et on disait que ces garçons déscolarisés étaient plus attirants aux yeux des filles et étaient responsables de nombreuses

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grossesses non planifiées chez les écolières, causant des abandons supplémentaires. Du côté positif, étant donné la priorité donnée à l’égalité entre les genres au Rwanda, le traitement des filles et des garçons avait changé. Les élèves ont dit que de nombreux parents traitaient maintenant leurs garçons et leurs filles sur un pied d’égalité, bien que l’on confie toujours aux filles plus de tâches domestiques qu’aux garçons. Les garçons et les filles étaient également traités sur un pied d’égalité à l’école et avaient des résultats équivalents. En ce qui concerne les objectifs des élèves, plus de 96 pour cent des élèves (100 pour cent des filles) ont dit qu’ils souhaitaient rester à l’école jusqu’à l’obtention du diplôme. Environ 4 pour cent d’entre eux (tous des garçons) ont dit qu’ils voulaient devenir des hommes d’affaires. Les enseignants pensaient aussi que les filles pourraient devenir les agents ou les avocates de leur propre changement, en étant autonomisées par le partage mutuel leurs expériences, en ayant accès au soutien de leurs paires et en comprenant que leur culture ne doit pas les freiner. Les compétences pour la vie étaient considérées comme particulièrement importantes pour les filles en raison des risques et des défis auxquels elles étaient confrontées dans la société pour achever leur scolarité. 4.5 Réussite scolaire Plus de 96 pour cent des enseignants nous ont dit que les filles et les garçons avaient des opportunités égales de participer en classe et sur les terrains de jeu et avaient des résultats égaux. On nous a dit que les garçons et les filles participaient à égalité aux exercices en classe, à la correction des devoirs, au nettoyage de la classe et du tableau et au travail dans le jardin. « Les résultats des filles et des garçons prouvent qu’aucun d’eux n’est exclu d’aucune façon », a dit l’un des répondants. Les réponses des élèves ont confirmé ces perceptions. Bien qu’un plus grand nombre de garçons que de filles aient essayéd’avoir d’excellents résultats à l’examen du premier trimestre en 2011, en moyenne, les filles avaient de meilleurs résultats que les garçons (graphique 1.23). Cependant, cela n’était pas statistiquement pertinent.


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tuteurs (1pour cent). Quatre pour cent n’ont indiqué aucune raison. Il n’y avait pas de pertinence statistique entre le genre et les raisons données pour de bons résultats.

Graphique 1.23 : Résultats des filles par rapport aux garçons, 2011

Excellents

8

Bons

Mauvais

6

Garçons

4 2 0 8 6

Filles

4 2 0

Nyagatare

Kigeyo

Umubano

Munyana

Nyagatare

P5 P6

Kigeyo

Umubano

Munyana

Nyagatare

Kigeyo

Umubano

Munyana

Niveau d’éducation:

S3

S1 S2

Les perceptions des filles et des garçons sur les résultats des filles par rapport à ceux des garçons ont montré que les garçons pensaient que les résultats des filles augmentaient de façon importante entre P4 et P6, tandis que les filles ont dit que c’était entre P4 et P5. Les différences perçues dans les résultats diminuaient de P6 à S3 (graphique 1.24). Graphique 1.24 : Perceptions des élèves des résultats des filles par rapport aux garçons, 2011 Garçons

Filles

40 30

Plus de 49 pour cent des élèves ont dit qu’ils n’avaient pas rencontré de problèmes affectant leurs résultats. Cependant, d’autres ont dit qu’ils n’avaient pas de temps pour réviser à cause des activités domestiques (28 pour cent), que l’école manquait d’équipements (12 pour cent) et que la façon d’enseigner était mauvaise (3,1 pour cent).La faiblesse de l’environnement scolaire et l’absence d’électricité, de laboratoires et de technologies informatiques étaient considérées par certains élèves comme des obstacles à leur scolarité quotidienne. Là encore, il n’y avait pas de pertinence statistique entre le genre et les problèmes affectant les résultats des élèves. Les garçons en S1-S3 ont dit que la politique de discrimination positive aux niveaux inférieurs en faveur des filles les décourageait au lieu de les encourager. Cela a été considéré comme l’une des raisons expliquant le nombre élevé de filles qui n’avaient pas de bons résultats à l’école secondaire. La réussite scolaire est affectée par la façon d’enseigner. Presque 97 pour cent des élèves appréciaient la façon d’enseigner de leurs enseignants, tandis que seulement 2 pour cent ne l’appréciait pas. La présence de modèles peut aussi soutenir la réussite scolaire. Plus de 98 pour cent des élèves ont dit qu’ils avaient des enseignant(e)s ou des pair(e)s auxquels ils aspiraient à ressembler à l’avenir. Moins de 1 pour cent ont dit qu’ils n’avaient pas de modèle dans leur école.

Oui

20 10 0 40 30

Non

20 10 0

P4 P5 P6 S1 S2 S3

P4 P5 P6 S1 S2 S3

Niveau d’éducation

Parmi les raisons données par les élèves pour expliquer les bons résultats étaient cités les révisions (57 pour cent), les enseignants (25 pour cent), les parents (7 pour cent), les frères et sœurs (6 pour cent) et leurs

Les enseignants ont détaillé les défis auxquels ils étaient confrontés pour assurer la réussite des programmes EAE et obtenir un taux élevé de réussite des élèves. Dans toutes les écoles étudiées, le manque de formation (20 pour cent) et de matériels éducatifs (19 pour cent) était des défis majeurs. Les enseignants répondants se sont aussi plaints du changement permanent des programmes des enseignants et des curricula (16 pour cent), des connaissances insuffisantes sur le programme EAE (14 pour cent), de l’absentéisme des élèves (10 pour cent), de l’emplacement géographique des écoles par rapport à leur domicile (6 pour cent), de la pauvreté (4 pour cent) et de l’obstacle de la langue (3 pour cent).

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4.6 Participation communautaire La création des CPE a eu une place importante dans le développement des EAE. Les chefs d’établissement et les préfets des études apprécient le rôle que les parents jouent dans leurs écoles, en particulier en améliorant le climat de l’école et en augmentant les liens entre les écoles, les familles et les communautés. Les enseignants ont considéré que le rôle principal des CPE était de soutenir la gestion de l’école et d’élaborer des plans d’action (30 pour cent),de s’assurer que tous les enfants aillent à l’école (22 pour cent) et de changer la mentalité des parents à l’égard de l’éducation des filles (20 pour cent). Les autres fonctions considérées importantes étaient la discipline des élèves, s’assurer que les élèves ont un environnement propice à l’apprentissage et participer à lever et suivre les fonds impliqués dans la gestion de l’école (tous 7 pour cent). A Umubano II, le CPE était composé de sept adultes, comprenant trois hommes, quatre femmes et deuxreprésentants des élèves (un garçon, une fille). C’était conforme à la politique gouvernementale d’avoir au moins 30 pour cent de représentation féminine aux postes de responsabilité. Il y avait un président, un vice-président, un secrétaire, un trésorier et deux administrateurs. Les membres du CPE étaient sélectionnés par les parents eux-mêmes et ils avaient tous entre deux et cinq enfants à l’école. Les parents organisaient des réunions une fois par mois où ils avaient la possibilité de discuter des résultats scolaires des élèves et de proposer des solutions ou des suggestions aux défis empêchant les élèves d’obtenir de bons résultats. Le CPE se réunissait au moins une fois par trimestre pour délibérer sur les questions qui affectaient les élèves et la gestion de l’école. Par exemple, il y a eu le problème à l’école des garçons de la rue qui utilisaient le terrain de jeu pour vendre de la drogue et en consommer le soir et représentaient un danger pour les élèves. Les parents ont pris l’initiative de construire une barrière autour de l’école pour protéger les élèves, en particulier les filles, et leur garantir un environnement sûr. Le CPE a également soumis une proposition au MINEDUC pour solliciter des fonds supplémentaires pour la barrière. De plus, comme le rôle du CPE en matière de gestion scolaire a été jugé important, des membres plus alphabétisés ont été recherchés afin d’apporter de la valeur à ces comités à travers le district.

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Les trois membres du CPE d’Umubano II qui ont pris part à l’étude ont considéré que la réussite de l’école était due à sa proximité avec la ville. Comme les parents vivant près et connaissaient de nombreux élèves, ils avaient tendance à leur poser des questions s’ils les voyaient hors de l’école ou arrivaient en retard.Le niveau élevé de réussite scolaire rapporté par le directeur de l’école, les enseignants et le DEO a été attribué par les membres du CPE à l’implication des parents et de la communauté dans la gestion scolaire. Les répondants du CPE de cette école ont cité plusieurs défis existant à l’école. Les changements de programmes scolaires et de curricula ont été faits sans consultation avec la direction des écoles et a affecté les résultats et la rétention des élèves. Par exemple, l’introduction de l’anglais comme langue obligatoire d’instruction a été trop soudaine. Le programme de formation en anglais des enseignants organisé et mené par le MINEDUC une fois par an était inadéquat ; ce type de formation devrait être permanent. Les salaires des enseignants étaient trop bas et pas proportionnels aux temps et aux efforts fournis par les enseignants. Le système de la double vacation était effectuée toute la semaine de 07h00 à 11h40 et de 12h40 à 17h00. La même équiped’enseignant enseignait pendant deux vacations ce qui créait une lourde charge de travail. De plus, de nombreux élèves qui allaient à la vacation du matin allaient s’amuser en ville tout l’après-midi jusqu’au soir. Simultanément, les filles restaient fréquemment chez elles pour s’occuper des tâches ménagères et étaient fatiguées quand elles assistaient à la vacation de l’après-midi. Enfin, l’école n’avait pas d’autres sources de revenus que celles fournies par le MINEDUC et l’UNICEF, bien que le CPE cherche d’autres sources de subvention pour répondre à l’augmentation de l’inflation. A l’EAE de Nyagatare, deux membres du CPE ont pris part à l’étude : le conseiller et le président. De façon générale, le comité a inclus deux femmes pour occuper les postes de vice-président et de trésorier, ainsi que le directeur et deux enseignants de l’école. Le CPE a joué un rôle de soutien, de conseil et de suivi de lagestion scolaire. Les répondants ont estimé qu’ils avaient un rôle à jouer pour élever la prise de conscience des familles et des filles sur l’égalité des droits et des opportunités entre les sexes, y compris l’éducation. Ils ont fait observer que le salaire des enseignants était très bas et ont suggéré que le MINEDUC augmente les


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salaires. On nous a rapporté que le CPE a beaucoup soutenu l’administration scolaire dans tout le district de Nyagatare. Par exemple, il a contribué aux salaires des enseignants payés par le GdR, ce qui a aidé à réduire le roulement parmi les enseignants. Le DEO a jugé que les CPE étaient à présent une bonne pratique à émuler pour l’amélioration des écoles. Le directeur à l’EAE de Kigeyo était un membre du CPE et a pris part à l’étude avec le préfet des études et deux parents. Le CPE a encouragé les parents à soutenir leurs enfants dans le processus d’apprentissage, en particulier les élèves du secondaire. On nous a rapporté qu’à travers le district, le rôle des CPE était un rôle de conseil, de participation et de consultation. Le CPE était impliqué avec la communauté sur l’importance de l’éducation des filles et encourageaient la sensibilisation sur le genre, mettaient les parents au défi de fournir du matériel scolaire et d’envoyer leurs enfants à l’école ; ils ont participé à la gestion de l’école en donnant des conseils et en motivant les enseignants qui avaient la responsabilité d’être des modèles à avoir un comportement sensible au genre et ils ont pris part aux consultations sur les propositions concernant des projets à mener à l’extérieur de l’école. Cependant, l’insuffisance des fonds était un défi majeur pour le CPE. A l’EAE de Kigeyo en particulier, la communication a été un défi. Etant donné l’emplacement géographique, les parents vivaient loin de l’école et il leur était difficiled’assister aux réunions. La pauvreté était aussi un problème parce que les parents n’avaient pas les moyens de payer les uniformes scolaires et les matériels d’apprentissage, malgré la patience de l’école et le temps accordé aux parents pour payer. On demandait aux parents de payer 4 000 RWF (7 US$) pour les dépenses des élèves de l’enseignement primaire et 8 000 RWF (14US$) pour les élèves du cycle secondaire. De plus, on a demandé à tous les parents de payer 5 000 RWF (9 US$) pour aider à construire plus de salles de classe. Le MINEDUC aidait l’école en lui fournissant du ciment et la toiture. Enfin, l’école a eu des problèmes avec certains élèves qui consommaient de l’alcool local. Les parents étaient inquiets de ce problème et se sont tournés vers les dirigeants locaux pour obtenir du soutien. A l’école de St Joseph Munyana, il n’y a que deux femmes sur les 11 membres du CPE. Le comité se réunit quatre fois par an pour délibérer sur les questions affectant l’école et pour recommander des moyens d’améliorer

la situation. Les parents se réunissent une fois par mois pour discuter des défis affectant les garçons et les filles ainsi que sur les stratégies pouvant faire avancer l’école. Le rôle du CPE en matière de gestion scolaire implique aussi la présentation de rapports sur les élèves, le suivi des résultats des élèves et des recommandations pour améliorer la situation et le fonctionnement général de l’école et la proposition de projets au MINEDUC en vue de financements. Le comité mobilise aussi les parents et les élèves pour contribuer à la croissance et l’amélioration de l’école. Quatre membres du CPE ont pris part à l’étude de cette école. Sur les quatre, seul le président du CPE était un représentant de la communauté. Les trois autres étaient des représentants de l’école : un enseignant du primaire, un enseignant du secondaire et un élève. Ils se sont plaints du nombre de défis à l’école, y compris la pauvreté des parents et les membres de la communauté qui sont opposés à l’envoi des enfants à l’école, en particulier les filles, et au paiement des matériels scolaires. Il n’y avait pas assez de matériels d’étude pour les élèves (livres, uniformes scolaires, chaussures pour l’école). De nombreux élèves vivent loin et doivent faire à pied de longues distances pour aller et revenir de l’école, ce qui avait un impact négatif sur leurs résultats scolaires. Comme nous l’avons noté St Joseph Munyana est situé sur une montagne et l’accès est difficile pour les élèves et les enseignants qui doivent pour la plupart aller à l’école à pied. 5 CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS Les quatre domaines clés examinés dans l’étude ont été jugés importants pour améliorer l’éducation des filles : inscription, rétention, réussite scolaire et gestion scolaire et participation communautaire. En se basant les données recueillies sur chacune de ces dimensions, l’EAE de Umubano II a semblé être la plus performante. Toutefois, comme ce n’était qu’une école d’enseignement primaire, la comparaison avec les trois autres écoles d’éducation de base de 9 ans (EB9A)qui avaient un cycle secondaire a été limitée. Bien que les quatre écoles aient été recommandées comme étant performantes ou moins performantes, à la fois en milieux rural et urbain, l’étude a constaté que les répondants de toutes les écoles partageaient des points de vue similaires et étaient confrontés à des défis similaires. Les résultats positifs observés dans l’éducation des filles dans les quatre EAE indiquent que le programme EAE a eu un impact dans les quatre domaines de la recherche. Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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5.1 Conclusions L’étude a examiné les expériences des filles dans les écoles amies des enfants, fourni des données factuelles sur l’impact des EAE sur l’éducation des filles et établi que la promotion de l’égalité entre les genres dans ces écoles est conforme aux objectifs nationaux et internationaux. 5.1.1 Inscription : les EAE sont disponibles et accessibles aux filles ? Malgré la tradition de discrimination à l’égard de l’éducation des filles au Rwanda, l’équipe de recherche a constaté que dans les écoles amies des enfants étudiées,plus de filles étaient inscrites dans l’enseignement primaire que de garçons. Les parties prenantes ont attribué l’amélioration de l’inscription des filles à l’impact du programme EAE. Comme prévu par le GdR, l’introduction de l’EB9A a abouti à une amélioration de l’inscription des filles dans l’enseignement secondaire, bien que les statistiques aient reflété une légère diminution du taux d’inscription des filles dans le primaire. Le défi semble à présent se concentrer sur la rétention des filles inscrites à l’école. En ce qui concerne l’accessibilité, deux écoles rurales (EAE de St Joseph et EAE de Kigeyo)se trouvaient dans des montagnes et les enfants qui vivaient loin devaient faire de longues distances à pied pour aller à l’école. Les parents étaient plus préoccupés par la sécurité de leurs filles devant faire de longues distances à pied que par leur celle de leurs garçons. Il est importantque les écoles soient accessibles aux élèves, bien que cela soit évidemment difficile dans les zones rurales. 5.1.2 Rétention : les filles abandonnent-elles plus que les garçons dans les EAE? Les quatre écoles ont reflété une diminution de l’absentéisme et du taux d’abandon des filles depuis qu’elles sont devenues des EAE. Cependant, la plupart des répondants ont déclaré que les filles abandonnaient toujours plus que les garçons. Le DEO du district de Rubavu a déclaré que les filles abandonnaient dès le niveau P1. Dans certains cas, c’est parce qu’elles avaient été inscrites dès l’âge de cinq ans et que leurs parents les retiraient de l’école lorsqu’ils réalisaient que leurs filles étaient trop jeunes pour s’adapter à l’école. Ces enfants trop jeunes sont souvent retournées à l’école à l’âge de sept ans. Le DEO a dit que l’une des raisons expliquant les faibles capacités des enfants plus jeunes était le manque d’installations scolaires préprimaires adéquates pour les jeunes enfants. Il existait quelques écoles préscolaires dans les villes, mais elles étaient très rares dans les zones rurales. Les membres des CPE 92

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ont cité les niveaux P4-P6 et la tranche d’âge des 12-15 ans comme étant les niveaux et les âges critiques pour l’abandon des filles. La recherche a identifié plusieurs questions qui affectent la rétention. Pauvreté. Les responsabilités familiales étaient la principale cause de l’absentéisme des filles et des abandons qui en résultaient : les tâches domestiques et le travail agricole, surtout dans les zones rurales. Même si les garçons n’allaient pas à l’école pour s’occuper du bétail quand leurs familles subissaient des pressions économiques, ils bénéficiaient néanmoins de la préférence sur les filles en matière de scolarisation. Dans les zones rurales, de nombreux enfants arrivaient le ventre vide à l’école, ce qui affectait leur apprentissage. Certaines familles n’avaient pas les moyens d’acheter les cahiers, les stylos ou les uniformes scolaires et cela diminuait l’estime de soi des élèves qui considéraient qu’ils ne respectaient pas les règles et les pratiques scolaires. Attitude. Les DEO et les chefs d’établissement ont déclaré une diminution des convictions et des pratiques culturelles anciennes et fortement ancrées relatives au mariage précoce des filles età l’importance de la dot à verser à la famille. Néanmoins, les membres des CPE ont fait remarquer que la majorité des enfants qui n’achevaient pas leur scolarité étaient toujours les filles. Dans certaines zones rurales, en particulier à l’EAE de Kigeyo, des élèves ont décidé eux-mêmes qu’ils voulaient arrêter l’école pour aller travailler dans les plantations de thé ou de café, dans les usines et sur les marchés. Certains membres des CPE ont noté que quand les élèves voyaient leurs pairs qui achevé l’école être incapables de trouver du travail, ils n’étaient pas convaincus que des années supplémentaires de scolarité leur assureraient de meilleurs revenus. Bien que les filles qui ont abandonné l’école n’y retournent pas d’ordinaire, à l’EAE de Kigeyo, il existait un programme officiel de rattrapage et environ trois élèves sur les vingt qui avaient abandonné l’école y sont retournées, certaines jusqu’à huit ans plus tard. Cependant, leur réintégration a été problématique à cause de leur faible estime d’elles-mêmes et du manque de soutien apporté la réintégration de ces élèves dans le système scolaire. Salaires et conditions de travail des enseignants. Dans les quatre écoles, il y a eu des plaintes concernant le faible niveau de rémunération reçu par les enseignants (30 000RWF /51 US$ par mois) malgré le système de


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double vacation de 07h00-11h40 et 12h40-17h00 et la longueur des trajets jusqu’à l’école. Dans certaines écoles, les parents devaient acquitter une cotisation supplémentaire pour contribuer à la rémunération des enseignants. L’hébergement des enseignants dans toutes les écoles, en particulier à St Joseph, était inférieur aux normes acceptables. Activités extrascolaires. L’implication dans les clubs scolaires ou les jeux en extérieur ont contribué à garder les enfants à l’école dans les écoles les plus performantes. L’EAE de Umubano II avait plusieurs clubs qui incitaient les filles à rester à l’école, notamment le club Tuseme. Il existait également un programme bien planifié d’activités extrascolaires qui incluait le sport et la musique. St Joseph avait un club média pour sensibiliser les élèves aux événements se passant autour d’eux, mais il n’y avait pas de clubs Tuseme. Il a été suggéré que des clubs de compétences pour la vie seraient très utiles pour les filles et que des conseils supplémentaires pourraient être offert aux filles de l’enseignement secondaire, en dehors des heures de cours sur certains domaines scolaires spécifiques pour assurer leur réussite et entretenir leur motivation à rester à l’école. En plus du tutorat, les réunions pourraient inclure une formation aux compétences utiles pour l’emploi pour les filles inscrites dans le second cycle du secondaire et des présentations données par des femmes leaders. Chaque école avait une équipe de football féminin, mais on n’a pas vu les filles utiliser les terrains de sport ou jouer aux ballons avec la même vigueur ou fréquence que les garçons. A St Joseph Munyana, le chef d’établissement a déclaré qu’il n’avait pas vu d’élèves utiliser les terrains de basketball depuis son arrivée à l’école deux mois plus tôt. Compte tenu de l’obligation des enseignants d’assurer deux vacations par jour, il leur restait peu de temps pour organiser des activités extrascolaires. Règles. Les règles et le manque de serviettes hygiéniques n’étaient plus une cause majeure d’absentéisme ou d’abandon. Les quatre écoles avaient dédié une salle aux filles, une ou deux enseignantes étaient chargées de veiller à la santé et à l’hygiène des filles, de leur fournir les serviettes hygiéniques, le savon et le papier toilette. Elles avaient aussi des toilettes séparées pour les filles pour faciliter la bonne hygiène et le confort des filles pendant leurs règles.

5.1.3 Réussite scolaire : les filles réussissentelles mieux dans les EAE et ont-elles le même taux de transition dans le secondaire que les garçons? Les filles à l’EAE de Umubano II et l’EAE de Nyagatare ont obtenu de très bons résultats en comparaison avec les garçons. Cependant, si certains informateurs nous ont dit que les filles et les garçons avaient d’aussi bons résultats et que dans certains cas les filles avaient même de meilleurs résultats que les garçons, il était clair d’après les examens nationaux que l’on peut encore améliorer les résultats des filles du secondaire dans les écoles étudiées. Les deux écoles rurales, l’EAE de St Joseph Munyana et l’EAE de Kigeyo,avaient de mauvais résultats aux examens d’Etat en comparaison avec les écoles du voisinage. Organisation de l’école. Aucune des écoles n’avait d’école maternelle d’où étaient issus leurs élèves, ce qui aurait eu certainement un impact sur la réussite des élèves et aucune n’avait dans son voisinage d’établissement d’enseignement technique et professionnel centré sur l’emploi que ce soit pour les garçons ou les filles. Le système de double vacation, à la fois aux niveaux primaire et secondaire,avait un impact négatif sur la qualité de l’enseignement et les résultats d’apprentissage des enfants. Financement de l’école. Les prix de tous les biens achetés pour l’école ont augmenté à cause de l’inflation. A l’exception de la subvention forfaitaire par élève du MINEDUC et les frais scolaires, les écoles étudiées avaient peu d’autres sources de revenus, bien que les CPE recherchent d’autres subventions. Des ressources supplémentaires pourraient influencer favorablement la réussite des élèves. Curriculum. Les changements des programmes scolaires (par exemple, le passage d’enseignants généraux à des enseignants par matière) et des curricula (par exemple, l’introduction de l’anglais comme langue d’introduction) sans consultation appropriée avec la direction des écoles ont été estimés avoir affecté la réussite scolaire et la rétention des élèves. Langue. Tous les enseignants ne maîtrisaient pas l’anglais et les élèves du primaire et du secondaire ne le comprenaient pas bien. Dans deux écoles, aucun élève du secondaire ou enseignant participant à l’étude n’a été capable de répondre au questionnaire d’enquête en

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anglais. Bien que la plupart des enseignants de l’étude suivent tous les ans une formation en anglais de deux semaines, ils n’étaient pas compétents dans la langue, une indication que la formation annuelle reçue est insuffisante. Installations et équipements. Les répondants ont déclaré qu’avec l’amélioration des infrastructures, la réussite scolaire générale des élèves s’étaient améliorée et que cela avait motivé les élèves à obtenir meilleurs résultats. Bien que des blocs de salles de classe et de toilettes aient été construits par l’UNICEF dans chacune des EAE, il restait de très gros défis dans les écoles. Seul l’EAE de Umubano II avait accès à l’électricité, alors que Kigeyo dépendait de l’énergie solaire. Munyana (EAE rurale) et Nyagatare (EAE urbaine) n’avaient pas l’électricité et cela avait un impact négatif sur les cours de science et les résultats des élèves. Le GdR et l’UNICEF avaient fourni des citernes d’eau aux écoles, mais il n’y avait pas assez d’eau potable pour les élèves et certains enfants devaient apporter de l’eau potable de chez eux à l’école. L’insuffisance de l’approvisionnement en eau était un problème particulier Munyana à cause de son emplacement géographique dans des collines rocheuses. C’était encore pire pendant la saison sèche quand les chutes d’eau étaient limitées. Les bibliothèques/centres de documentation ayant des matériels éducatifs adéquats étaient limités. Deux écoles disposaient d’un centre de documentation, mais ils n’étaient pas très bien garnis. Les laboratoires de science et de TIC étaient non existants et les élèves du secondaire étudiaient la science sans équipement et sans ordinateur. Dans deux écoles, le seul ordinateur disponible était celui du chef d’établissement et dans trois écoles, le chef d’établissementétait incapable d’utiliser les installations Internet de l’école. Les chefs d’établissement de deux écoles dépendaient de registres manuscrits de présence et de réussite scolaire. La tenue des registres était bien inférieure aux normes. Enfin, il n’y avait pas de mobilier ordinaire comme des armoires, des bibliothèques, des armoires de classement. Modèles. Les filles manquaient de modèles au niveau secondaire, car il y avait peu de femmes enseignant dans les écoles. Plusieurs informateurs ont suggéré qu’un soutien accru de femmes mentors stimulerait encore de meilleurs résultats chez les filles.

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5.1.4 Gestion scolaire et participation communautaire : les directeurs d’école sont-ils formés à la gestion scolaire et les membres de la communauté sont-ils impliqués dans les EAE? Trois des DEO de la présente étude étaient des diplômés de l’Institut d’enseignement pédagogique de Kigali (KIE), tandis que l’un était un diplômé de l’Université nationale du Rwanda. Tous les DEO avaient exercé de trois à cinq ans leur poste actuel et avaient suivi des programmes de formation en gestion pour accroître leurs compétences en gestion scolaire, informatique, anglais et autres domaines. D’autre part, très peu de chefs d’établissement et de préfets des études avaient une licence ou un autre diplôme. La plupart avaient eu une formation continue limitée et de nombreux enseignants n’étaient pas qualifiés. Les chefs d’établissement, en particulier, avaient besoin de plus de soutien pour assumer son double rôle de gestionnaire pédagogique et financier. L’UNICEF fournissait une formation dans les écoles en EAE, mais plus de formations initiale et continue étaient clairement nécessaires. Il a été observé qu’un effort particulier était nécessaire en matière de gestion scolaire et de tenue des registres pour les chefs d’établissement, les préfets des études et les DEO et d’enseignement de l’anglais pour les enseignants. L’un des plus grands résultats du programme EAE s’est révélé être l’introduction des CPE. Ces dernières années, la composition des CPE a changé pour inclure des membres alphabétisés et cela a donné de la valeur à leur rôle. Les CPE ont dit qu’ils ont aidé à la gestion scolaire, aidé les chefs d’établissement à identifier des sources de financement et d’autres soutiens pour l’école, conçu des projets, contacté le MINEDUC pour solliciter des financements pouvant améliorer l’état et le fonctionnement général de l’école, incité les parents/élèves à contribuer à la croissance effective et l’améliorationde l’école, présenté des rapports sur les élèves, suivi les résultats des élèves et recommandé des façons d’améliorer les choses. A l’EAE de Umubano II, les parents se réunissaient chaque mois pour discuter des résultats des élèves. Dans les autres écoles, les parents se réunissaient tous les trimestres. De nombreux parents n’étaient pas impliqués dans l’école, en particulier dans les zones pauvres où les activités agricoles leur laissaient peu de temps. Il a été


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rapporté que certains parents ruraux ne disciplinaient pas leurs enfants et ne vérifiaient pas leurs résultats scolaires. Tous les CPE n’avaient pas les 30 pour cent de femmes requises aux postes à responsabilité et les représentants d’élèves des quatre écoles étaient des garçons avec des filles comme représentantes adjointes. Malgré ces défis, les quatre CPE semblaient fonctionner assez bien. Les parents à Umubano II avaient décidé de construire une barrière autour de l’école pour protéger les élèves, car des garçons qui se droguaient se réunissaient à l’école le soir empêchant les élèves, surtout les filles, d’y rester pour étudier. Le CPE à St Joseph a payé une petite cotisation pour améliorer la cour de l’école. 5.2 Recommandations L’étude a proposé et recommandé plusieurs stratégies et interventions visant à accroître les taux d’accès, de rétention, de réussite scolaire, de transition de tous les enfants, en particulier des filles, à tous les niveaux de l’éducation. Ce type d’interventions pourraient inclure la suppression des frais scolaires, des incitations comme des programmes d’alimentation scolaire, l’accès à des écoles propres et salubres et surtout à l’eau potable et à des installations sanitaires adéquates, des écoles bien gérées et des procédures sui protègent les filles du harcèlement sexuel des enseignants des garçons. L’utilisation des langues maternelles dans les classes et des enseignantes recrutées localement formées au développement d’une première et deuxième langue sont des éléments cruciaux pour rendre les écoles inclusives aux groupes défavorisées, en particulier les filles. Accroître la motivation pour permettre aux filles et leur famille de voir que l’instruction débouche sur un emploi et des revenus les amènera à accorder plus de valeur à la scolarité. Des formations supplémentaires et des modèles féminins forts sont également importants ainsi que la participation des parents dans les écoles pour accroître le sens de la responsabilité des enseignants et des élèves. Les répondants de l’étude pensaient que les futures perspectives des EAE au Rwanda étaient bonnes. Ils jugeaient que ces écoles assuraient une éducation de qualité à la fois aux garçons et aux filles, produisaient de bons résultats scolaires, offraient aux élèves de bonnes perspectives d’avenir, augmentaient la contribution des élèves au développement du pays en offrant une éducation sensible à l’enfant et des modèles.

La présente étude a donc des implications pour les responsables politiques et les ONG qui collaborent avec le GdR à la mise en œuvre de l’EAE au Rwanda. Voici ci-dessous des recommandations à l’intention du GdR, du MINEDUC, des organisations partenaires et à la direction des écoles. 5.2.1 Le Gouvernement du Rwanda/MINEDUC Pour assurer la réussite de la mise en place du modèle EAE dans les écoles du Rwanda, le GdR et les MINEDUC devraient étudier les mesures suivantes: • Mettre en place un système de suivi et d’évaluation pour évaluer régulièrement la mise en place du programme EAE, ainsi que la mise en œuvre de la Politique nationale sur l’éducation des filles. • Continuer à aborder le développement économique dans les zones rurales. • Créer et suivre les programmes d’alimentation scolaire, en particulier dans les zones d’insécurité alimentaire et fournir le matériel scolaire de base aux enfants pauvres. • Accroître la rémunération des enseignants et améliorer le logement des enseignants dans les écoles rurales. • Fournir des programmes d’intégration et de mentorat aux nouveaux enseignants et à tous les enseignants une formation continue à l’instruction en anglais, aux méthodes pédagogiques sensibles au genre et à la conception de curricula pour développer de nouvelles compétences, renforcer les capacités et augmenter le moral. • Offrir un développement professionnel continu sur la gestion scolaire et la bonne gouvernance aux responsables de l’éducation du district, aux chefs d’établissement, aux préfets des études et aux CPE. • S’assurer que plus de femmes sont formées dans les matières scientifiques et technologiques. • Assurer l’équilibre entre les genres des gestionnaires scolaires en augmentant l’objectif de 30 à 50 pour cent. • Remplacer les manuels qui véhiculent des stéréotypes sexistes par des matériels inclusifs des deux sexes. • Réaliser un examen sur l’efficacité du système de la double vacation de façon à ce que les élèves puissent être à l’école toute la journée et que les enseignants puissent avoir plus de temps pour préparer les leçons et noter les copies. • Construire les écoles plus près des communautés qu’elles desservent et/ou créer des internats. Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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• Fournir l’électricité, l’eau potable, des laboratoires de science et d’informatique et des bibliothèques dans toutes les écoles. • Fournir des toilettes séparées aux garçons et aux filles, des serviettes hygiéniques et de l’eau potable dans toutes les écoles. • Encourager les filles qui ont abandonné l’école à y retourner et à achever leur scolarité et sanctionner ceux qui mettent les filles enceintes et mettent leur scolarité en danger. • Créer des centres d’éducation préscolaires dans le cadre de l’EAE. • Prendre en charge les élèves ayant un handicap en leur fournissant des matériels d’apprentissage appropriés et en s’assurant que les enseignants sont adéquatement formés à répondre à leurs besoins. • Proposer des programmes d’alphabétisation et de calcul pour les parents et la communauté. 5.2.2 Recommandations partenaires

aux

organisations

• Soutenir le GdR à mettre en place des programmes d’alimentation scolaire pour les enfants pauvres pour accroître la rétention et la réussite scolaire. • Développer des programmes de sensibilisation et de conscientisation à l’intention de toutes les parties prenantes sur les besoins spécifiques des filles et l’importance de la fréquentation et de la rétention des filles. • Accroître la visibilité des bonnes pratiques en EAE en préparant des fiches d’information sur ce qui marche le mieux pour améliorer l’école. • Etendre le programme de la Fondation Imbuto de la Première Dame qui récompense les filles ayant obtenu les meilleurs résultats aux niveaux du district et du secteur. 5.2.3 Recommandations pour la direction des écoles • Développer des activités génératrices de revenus, y compris des jardins scolaires pour fournir des produits alimentaires, et d’autres entreprises entrepreneuriales.

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• Offrir aux nouveaux enseignants une formation continue sur les méthodes centrées sur l’apprenant. • Encourager une plus grande implication des parents dans l’apprentissage de leurs enfants et la gouvernance de l’école en créant des CPE efficaces. • Elever les normes scolaires en s’assurant que les enseignants donnent des interrogations écrites et des devoirs aux élèves, suivent leurs progrès et leur apportent un soutien à l’école après les cours. • Mettre en œuvre des programmes qui sensibiliseront les CPE, les parents et les dirigeants communautaires sur les questions qui affectent les filles, notamment les avantages de l’éducation des filles et les défis rencontrés par les filles à l’école. • Impliquer les enseignants et les parents dans la sensibilisation des filles, des parents et des membres de la communauté. • Mettre en œuvre des programmes qui renforcent l’estime de soi des filles de façon à ce qu’elles aussi puissent étudier les matières scientifiques et les TIC et contribuent au développement national. • Assurer des activités comme les clubs Tuseme et d’autres clubs et introduire les sports et la musique pour accroître l’intérêt à l’égard de la fréquentation scolaire. • Accroître la proportion de femmes dans les CPE de 30 à 50 pour cent et encourager les enseignantes à occuper des rôles de responsabilité. • Informer les filles sur la santé reproductive et leurs droits et encourager des discussions ouvertes sur les questions relatives aux règles à l’école, chez elles et dans la communauté. • Créer des services de tutorat, de mentorat, d’orientation, de conseil et de formation aux compétences, en particulier dans l’enseignement secondaire. • Reconnaître et récompenser la réussite des filles.


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Enseignement intégrer le genre pour accroître la supérieur : participation féminine Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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Intégrer le genre pour accroître la participation féminine L’enseignement supérieur est l’un des secteurs les plus importants de la formation des ressources humaines dans l’économie mondiale actuelle. En raison des connaissances spécialisées, des compétences etdescapacités de recherche et d’innovation qu’ilstransmettent aux apprenants, on peut considérer cesétablissements comme les principaux agents des progrès sociaux, politiques et économiques. L’économie mondiale actuelle est fondée sur lesavoiret requiert des employés hautement qualifiés. L’enseignement supérieur a pour mission non seulement la formation d’employéshautement qualifiés, mais aussi la production et l’exploitation de connaissances pour le développement économique. Contrairement à la mobilisation en faveur de l’augmentation du nombre d’établissements d’enseignement supérieur en Afrique, il n’y a pas eu suffisamment d’efforts visibles pour accroître la participation féminine etparvenir à une plus grande égalité entre les genres, malgré les appels lancés pour élargir l’accès et améliorer la participation des femmes à tous les niveaux de l’éducation.Les inégalités persistent en dépit de l’adoption de politiques nationales sur ces questions et des déclarations sur l’égalité entre les genres à tous les niveaux de l’éducation.

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Se concentrant sur des universités spécifiques, les travauxde recherche de cette section examinent les types de problèmes qui exigent encore l’attention etproposent des politiques pour optimiser l’intégration du genre dans les établissements d’enseignement supérieur. En réponse aux indicateurs de l’université Kenyatta du Kenya selon lesquels les défis auxquels sont confrontées les femmes pendant leurs études limitent leur apprentissage et leurs résultats, la recherche propose des solutions et des politiques visant à rendre l’enseignement supérieur plus inclusif. De la même manière, la recherche menée à l’université de Covenant au Nigeria examine la sous-représentation des femmes dans des domaines comme la comptabilité et les mathématiques et suggère des domaines d’intervention politique. Les rapports de recherche soutiennent la formulation de politiques sensibles au genre plus inclusives qui attireront et retiendront les femmes dans les établissements d’enseignement supérieur. Si cultiver les capacités humaines nécessite l’inclusion de toutes les couches de la population, y parvenir est alors impossible sans la pleine participation des femmes.


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Institut de recherche, de science et de technologie, Université Kenyatta

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L’impact des politiques et des programmes en faveur de l’égalité des genres sur la participation des étudiantes dans les universités publiques au Kenya 1 INTRODUCTION

L’enseignement supérieur habilite les femmes à participer aux vies sociales, économiques et politiques de leur communauté et de leur pays.

L’inégalité entre les genres demeure l’un des défis les plus importants dans de nombreux établissements d’enseignement supérieur du monde aujourd’hui (Banque mondiale, 2001). La situation est particulièrement critique en Afrique subsaharienne où un tiers seulement des étudiants inscrits à l’université sont des femmes (Morley, 2005 ; Bunyi, 2008 ; Oanda, 2008). Si l’écart entre les genres a diminué dans l’enseignement primaire grâce aux politiques d’enseignement primaire universel (EPU), les réformes mises en place dans l’enseignement supérieur ne semblent pas avoir eu d’impact significatif (Bunyi, 2008). Dans la plupart des pays en voie de développement, l’élargissement de l’accès à l’enseignement primaire par les politiques d’EPU implique des stratégies pour rendre l’enseignement à ce niveau obligatoire, supprimer les frais scolaires, fournir les manuels et des repas scolaires. Pourtant, ces dernières années, l’enseignement supérieur est apparu comme l’un des agents principaux de la mondialisation, de la création de richesses et du développement général de la plupart des nations africaines. Le plaidoyer en faveur de la participation des femmes dans l’enseignement supérieur ne repose pas uniquement sur des raisons liées aux droits de l’homme, mais aussi sur les avantages qu’apporte l’éducation des femmes dans l’enseignement supérieur. Si l’éducation des femmes a en général de nombreux effets sur le développement de la société en relation avec l’éducation des membres de la famille, la fertilité et les revenus, l’enseignement supérieur habilite les femmes à participer aux vies sociales, économiques et politiques de leur communauté et de leur pays en tant que dirigeantes Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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dans les entreprises, les cercles professionnels et la politique (GdK, 2006 ; Morley, 2003). En conséquence, l’accès des femmes à l’enseignement supérieur est non seulement la condition préalable à l’équité et l’égalité entre les genres dans la société, mais aussi une stratégie importante pour la réduction de la pauvreté dans les pays africains (GdK, 2006). Les gouvernements africains et les établissements d’enseignement supérieur ont mis en place des interventions en faveur de l’égalité entre les genres par le biais de politiques et de programmes visant à améliorer l’accès des femmes à l’enseignement supérieur. Les femmes ont été la cible de ces stratégies à cause des obstacles qu’elles rencontrent aux niveaux inférieurs de l’enseignement qui limitent leurs chances de postuler aux places limitées de l’enseignement supérieur. Les politiques de discrimination positive (DP) qui consistent à abaisser les conditions d’admission à l’université pour les femmes sont l’une des stratégies adoptées par la plupart des gouvernements africains (Bunyi, 2008). De plus, chaque établissement d’enseignement supérieur a adopté une stratégie d’intégration du genre (IG) qui trouve son origine dans le Programme d’action de Beijing de la quatrième conférence internationale sur les femmes comme mesure en faveur de l’égalité entre les genres. L’intégration du genre dans l’enseignement supérieur implique des efforts délibérés des établissements pour faire des préoccupations et des expériences spécifiques des femmes et des hommes une dimension à part entière des politiques et des programmes d’enseignement, de façon à leur permettre de profiter sur un pied d’égalité de l’enseignement supérieur et d’éviter que les inégalités soient perpétuées. Etant donné que les femmes sont défavorisées par rapport aux hommes, la plupart des stratégies d’égalité entre les genres visent principalement à assurer aux femmes l’égalité des opportunités dans l’enseignement supérieur en termes d’accès et de rétention et comprennent la formulation d’une politique de genre, l’offre de bourses d’études aux femmes, des programmes de remise à niveau en science et l’intégration du genre dans les curricula (Guanawardena, 2005 ; UNESCO, 2002). Si nous disposons de données empiriques limitées en ce qui concerne l’application de l’intégration du genre dans les universités ougandaises et tanzaniennes, l’expérience du Kenya, où l’écart entre les genres dans l’enseignement supérieur s’élève à 20 pour cent, reste à documenter. De plus, dans de nombreux cas, les politiques de discrimination positive et d’intégration du genre adoptés dans les pays d’Afrique de l’Est n’incluent 102

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pas de suivi et d’évaluation pouvant déterminer leur degré d’efficacité et signaler les éléments à modifier pour optimiser les opportunités d’égalité en faveur des étudiantes (Guanawardena, 2005). En fait, l’analyse préliminaire des discours sur la question de l’intégration du genre indique des processus de mise en œuvre controversés et des problématiques qui exigent la modification des structures bureaucratiques, rigides et dominées par les hommes ainsi que capitaux des budgets déjà tendues des universités africaines (Guanawardena, 2005 ; Morley, 2005). En réponse à cette lacune de la littérature, l’étude actuelle a entrepris de documenter l’impact des programmes et des politiques d’égalité au Kenya en analysant l’influence des stratégies visant à harmoniser les règles du jeu pour les femmes. Elle examine les différences entre les genres en matière d’inscriptions et de résultats au niveau universitaire ainsi que les expériences vécues selon le sexe des étudiants. De plus, elle propose des stratégies permettant d’optimiser l’impact des stratégies d’égalité entre les genres. 1.1 Contexte historique de la participation des femmes dans l’enseignement supérieur au Kenya Comme d’autres pays africains, le Kenya est confronté aux questions liées à la participation des femmes dans l’enseignement supérieur. La sous-représentation des femmes dans l’enseignement supérieur au Kenya trouve son origine dans l’évolution historique de l’enseignement supérieur dans le pays. Pour mettre en évidence la position de la participation des femmes dans l’enseignement supérieur au Kenya, il est impératif d’examiner le développement des établissements d’enseignement supérieur. On peut comprendre la croissance et le développement de l’enseignement universitaire au Kenya, qui a commencé avec une université en 1970, en examinant les trois grandes phrases qui reflètent le contexte socio-politique du pays à des périodes spécifiques (Chege et Sifuna, 2006 ; GdK, 2006). La période entre 1960 et 1970 a été caractérisée par les efforts de décolonisation et la volonté de s’éloigner de l’héritage colonial où l’éducation, entre autres, était distribuée selon des critères raciaux. Les universités remplissaient donc un rôle majeur dans la production de ressources humaines pour l’africanisation et le développement en général (Chege et Sifuna, 2006 ; DGK, 2006). En conséquence, elles ont reçu un niveau d’acceptation et d’appui qui a dynamisé la croissance des établissements d’enseignement supérieur au Kenya. Le gouvernement a augmenté le nombre d’établissements universitaires après l’indépendance en créant de nouvelles facultés et départements pour accueillir un plus grand nombre


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d’étudiants dans différentes spécialités à l’Université de Nairobi, la première université kenyane du pays (Mwiria et al., 2007). Toutefois, étant donné le retard pris par l’éducation des filles pendant la période postcoloniale, très peu de femmes avaient les qualifications nécessaires pour saisir les opportunités émergentes dans les universités (Chege et Sifuna, 2006). Un spécialiste du genre a analysé les racines historiques des carrières selon le sexe au Kenya à travers le système éducatif. L’extrait ci-dessous synthétise les cadres politiques postérieurs à l’indépendance qui ont perpétué les idéaux fondés sur le colonialisme victorien relatifs aux rôles et aux carrières selon le genre. Les responsables politiques postcoloniaux ont aussi utilisé le genre comme critère pour offrir ou limiter les opportunités universitaires débouchant sur une ségrégation supplémentaire des carrières fondée sur le genre. En 1968, le ministère de l’Education a publié une brochure d’information professionnelle intitulée « Vous aider à choisir une carrière » qui énumérait les opportunités d’emploi dans le secteur public et privé. Sur 150 carrières, deux étaient classées comme étant « réservées aux filles » (secrétaire et infirmière), tandis que 112 étaient classées comme étant « réservées aux garçons » (nécessitaient des compétences en physique et en mathématiques) (Kagume, 2010, p. 10). Ce récit appuie l’argument selon lequel l’accès aux formations universitaires et aux carrières connexes est une culture profondément ancrée qui trouve son origine dans l’héritage colonial du Kenya. On peut expliquer le manque d’intérêt manifesté par le gouvernement à l’égard de l’inégalité entre les genres à l’université par la nécessité de se concentrer sur des questions apparemment plus urgentes au moment de l’indépendance : l’élimination de la faim, de la pauvreté et de la maladie (Chege et Sifuna, 2006 ; Bunyi, 2008). Mais plus important, la marginalisation coloniale historique des femmes dans l’éducation s’est perpétuée dans les quelques écoles missionnaires de mauvaise qualité ayant des préjugés sexistes qui ont classé les filles et les femmes dans la catégorie des mères et des femmes au foyer (Chege et Sifuna, 2006; Bunyi, 2008). La seconde phase du développement du secteur de l’enseignement supérieur au Kenya a coïncidé avec la régression économique que le pays a connue dans les années 1980 et 1990. Au cours de cette période, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale ont introduit les programmes d’ajustement structurel

qui défendaient la libéralisation des prix et du marché. Ces ajustements structurels ont abouti à la privatisation des universités, au sous-financement du secteur de l’enseignement supérieur et à l’introduction d’étudiants parrainés par le secteur privé comme mesures génératrices de revenus pour les universités publiques. Néanmoins, ces réformes éducatives ont augmenté l’accès à l’éducation et les opportunités des étudiant(e)s qui avaient le niveau requis pour être admis à l’université, mais qui étaient exclus du système en raison des capacités limitées des universités liées au financement de l’Etat. A première vue, ces deux évolutions des universités ont eu un impact positif sur la participation des femmes dans l’enseignement supérieur dans la mesure où elles formaient la majorité de ceux qui ont rejoint les nouveaux programmes (GdK, 2006 ; Mwiria et al., 2007). Cependant, ces programmes ciblaient les femmes de milieux relativement aisés qui avaient les moyens de payer les frais des universités privées, localement et à l’étranger. De plus, les étudiantes s’inscrivaient en arts et en lettres, spécialités qui ont moins d’ouvertures dans le secteur de l’emploi, atténuant ainsi l’objectif d’égalité que ces programmes devaient aussi atteindre (Oanda, 2008). La dernière phase du développement du secteur de l’enseignement supérieur au Kenya a eu lieu simultanément à l’expansion de l’espace démocratique social et politique dans son ensemble. En réponse aux pressions locales et internationales, le Kenya a adopté la démocratie multipartite et des lois autorisant la liberté d’expression. Cette ouverture démocratique a été étendue aux universités et a été à l’origine de plusieurs réformes et innovations entreprises à cette époque. Citons notamment la nomination des présidents, la syndicalisation du personnel enseignant et non enseignant et l’élection des doyens et même des chefs de département dans certaines universités publiques (GdK, 2006 ; Mwiria et al., 2007). Malheureusement, la plupart de ces postes sont occupés par des hommes. Les questions qui affectent la participation des filles aux niveaux inférieurs de l’éducation n’ont pas été abordées de façon à assurer l’implication des femmes sur un pied d’égalité dans l’enseignement supérieur. Le résultat est l’absence notable des femmes aux postes de responsabilité dans les universités kenyanes, ce qui a des implications sur le niveau de la contribution des femmes dans la gouvernance des universités ainsi que sur le manque de modèles auxquels les filles pourraient s’identifier (Onsongo, 2009). Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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En termes d’égalité entre les genres, le ministère de l’Education (MEN), éclairé par les cadres internationaux comme le Programme d’action de Beijing en 1995 et la Conférence mondiale de l’UNESCO sur l’enseignement supérieur en 1998 à Paris, a fait des efforts pour intégrer le genre dans le fonctionnement des universités publiques au Kenya. Les activités de l’université à cette fin sont guidées par la politique de genre du MEN de 2006 qui fournit des lignes directrices en vue de la mise en œuvre de l’intégration du genre (Onsongo, 2008). 1.2 Enoncé de la problématique En 1992, le gouvernement du Kenya a décidé d’abaisser d’un point le nombre de points requis pour l’admission à l’université en faveur des femmes (Nungu, 1997). Pourtant, bien que les politiques de discrimination positive des universités en faveur des femmes mises en place par le gouvernement soient en application depuis plus de 15 ans, elles n’ont pas encore fait l’objet d’études empiriques pour déterminer leur impact. Il est nécessaire d’étudier l’impact des politiques qui ciblent l’accès des femmes à l’enseignement supérieur et de voir comment les effets de l’égalité affectent les étudiantes de milieux socioéconomiques modestes. En plus des politiques et des programmes, les universités ont instauré au fil des ans des politiques et des programmes visant à améliorer la participation des femmes dans leurs établissements. L’impact des stratégies d’intégration du genre et les programmes similaires ciblant l’accès et la rétention des femmes au Kenya n’ont pas été évalués à ce jour. Ces informations sont cruciales pour la formulation de politiques et de stratégies d’égalité entre les genres par les gouvernements, les organisations non gouvernementales (ONG) et les autres parties prenantes. 1.3 Objectifs de l’étude Cette étude vise à documenter les politiques et les programmes en place pour aborder le déséquilibre entre les genres dans les universités au Kenya. Elle examine l’impact des transformations de l’enseignement supérieur au Kenya sur l’agenda de l’égalité entre les genres et la participation des femmes aux études universitaires. Adoptant l’approche de la méthode critique, l’étude porte sur les effets des stratégies liés au changement de culture dans les établissements d’enseignement supérieur sélectionnés et compare les inscriptions et la réussite des étudiants, femmes et hommes confondus, dans les cours de science et de technologie. De plus, l’étude espère: • Rendre compte des conditions et des processus qui 104

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

encouragent l’application positive de ces politiques et programmes dans les universités. • Documenter les schémas d’inscription et de résultats selon le genre et par spécialité dans les universités publiques sélectionnées au Kenya. • Faire des recherches sur l’impact des politiques et des programmes de genre sur la participation des femmes dans les universités publiques au Kenya. • Recommander des stratégies pour optimiser les politiques et les programmes existants en faveur de l’égalité entre les genres dans les universités publiques du Kenya. 1.4 Revue de la littérature et importance de l’étude De manière générale, la recherche sur l’égalité entre les genres dans l’enseignement supérieur est le domaine de l’Ouest et les pays à revenu faible sont informés par quelques statistiques ventilées par genre et quelques études quantitatives souvent financées par des organisations internationales (Lund, 1998 ; Banque mondiale, 2001). Bien qu’il existe quelques projets isolés et sans financement, ils demeurent dans la littérature grise non publiée qui est difficilement accessible (Nungu, 1994 ; Morley, 2005). Cette étude tente de s’appuyer sur la maigre littérature qualitative et de fournir des explications sur les données existantes ventilées par genre dans les nations à revenu faible en général et au Kenya en particulier. L’accès aux formations universitaires s’est amélioré au fil des années. L’augmentation de la participation féminine dans l’enseignement supérieur est le résultat de l’augmentation du nombre d’établissements, de l’introduction de curricula flexibles et de l’accès à des prêts et à des bourses d’études d’enseignement supérieur. Toutefois, l’impact a été minime, car les femmes ne représentent que 34-38 pour cent du nombre total des inscriptions universitaires dans la plupart des pays (Akodulu et Oanda, 2010). De plus, l’analyse critique des données révèle l’accès limité des femmes aux cours de science et de technologie qui mènent aux carrières stratégiques et cotées (Akodulu et Oanda, 2010 ; Chege et Sifuna, 2006 ; GdK, 2006 ; Morley, 2003 ; Njeru, 2003 ; Rathgeber, 2002 ; Masinja, 2001). Il est nécessaire de mener une enquête approfondie sur la nature des cours de science offerts, généraux ou spécialisés, et sur la réussite universitaire (à savoir, le taux d’obtention des diplômes) des étudiants. Il est en outre essentiel d’analyser les expériences vécues à l’université selon le genre, à savoir comment les femmes sont traitées par le sexe opposé et les professeurs en classe.


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La deuxième préoccupation du débat sur l’égalité entre les genres en Afrique subsaharienne est l’accès et la façon dont il se traduit dans les autres indicateurs d’égalité de la réussite. On a avancé que l’accès des femmes à l’enseignement supérieur ne devait pas être considéré comme une fin en soi, mais comme une chance pour les femmes de profiter d’expériences enrichissantes qui élargissent leurs capacités et leurs aspirations (Oanda, 2005). A cet égard, la réussite et l’achèvement deviennent des indicateurs importants de la réussite des femmes. La faiblesse des résultats des femmes aux examens universitaires a été l’objet d’attaques avec en toile de fond les curricula qui ne prennent pas en compte la dimension genre et les obstacles auxquels les filles sont confrontées pendant leurs études universitaires (GdK, 2006; Morley, 2003 ; Rathgeber, 2002 ; Masinja, 2001). L’étude comparative des résultats universitaires des hommes et des femmes inscrits dans les cours cotés de science et de technologie est un autre domaine qui nécessite analyse et clarté, étant donné que les deux groupes sont en concurrence pour les mêmes opportunités d’emploi après l’obtention de leur diplôme. Dans l’espoir d’améliorer l’accès des femmes aux formations universitaires, les sphères universitaires et politiques ont fait des efforts pour documenter les stratégies qui favorisent l’accès des femmes à ce niveau de l’enseignement (Onsongo, 2010 et 2006 ; Morley, 2003 ; Bunyi, 2003). La littérature rapporte plusieurs efforts réalisés en faveur des femmes, allant de réformes élargies en faveur de l’égalité aux politiques et aux programmes spécifiques d’égalité des genres. Citions notamment les politiques de genre, les bourses d’études en faveur des femmes, les programmes de remise à niveau en science et l’intégration du genre dans les curricula (Guanawardena, 2005 ; UNESCO, 2002). Cependant, l’absence de mécanismes de suivi et d’évaluation de la plupart des programmes fragilise le processus de reproduction par d’autres établissements intéressés sur le continent (Onsongo, 2010 et 2006 ; Morley, 2003 ; Bunyi, 2003). Des informations complémentaires sont par conséquent nécessaires pour expliquer les conditions dans lesquelles chaque stratégie fonctionne le mieux et son impact sur la participation féminine dans les universités en Afrique. L’étude examinera les données existantes pour déterminer l’efficacité des interventions actuelles en faveur de l’égalité entre les genres. Elle documentera également les politiques et les autres cadres structurels qui abordent les différences entre les genres dans les universités et leur impact sur les inscriptions et les résultats universitaires.

1.5 Cadre théorique A l’aide du cadre théorique des relations sociales, l’étude explique les modifications qui se sont produites ou non au sein des établissements d’enseignement supérieur depuis l’introduction des programmes d’égalité des genres au Kenya. La théorie des relations sociales est fondée sur le postulat que le développement est un processus visant à accroître le bien-être de l’être humain. Appliqué à la présente étude, le développement désigne la participation quantitative et qualitative des femmes à l’enseignement supérieur, à la fois en terme de force numérique et d’expériences sociale et universitaire enrichissantes. Ce cadre suppose en outre que les établissements sont des canaux importants de reproduction et de maintien des inégalités sociales, en particulier entre les genres. Les relations sociales sont créées par l’affectation de ressources, les règlementations et les politiques qui orientent le fonctionnement institutionnel et les relations de pouvoir existantes qui font la lumière sur qui a le pouvoir et qui sont les personnes dont les intérêts sont pris en compte lors des prises de décision (Kabeer, 1994). Les modifications formelles, planifiées et structurelles dans les universités sous la forme de politiques et de programmes d’égalité des genres partent toujours du principe que les institutions sont neutres du point de vue du genre et n’ont pas besoin d’ajustements. Pourtant, les organisations ont aussi des systèmes, des pratiques et des normes discriminatoires selon les sexes qui sont informels et cachés. Etant donné que les relations sociales déterminent les droits et les devoirs des individus dans un cadre social donné, l’étude tente de comprendre les relations sociales sous-jacentes entre les hommes et les femmes dans les universités et comment elles ont affecté la mise en œuvre et l’impact des interventions en faveur de l’égalité entre les genres. En conséquence, l’un des aspects clés de la théorie était l’analyse des ressources universitaires selon le genre. De même, les expériences sociale et universitaire des étudiants dans leur interaction avec les professeurs (hommes et femmes) et les administrateurs sont des éléments d’analyse majeurs de l’étude. C’est parce que des progrès efficaces et durables en matière de changement ne sont possibles que lorsque des efforts délibérés sont entrepris pour modifier la culture sousjacente (construite autour des relations sociales entre hommes et femmes) des établissements qui adoptent les interventions d’égalité entre les genres (Tsikata, 2008 ; Morley, 2005). L’étude examine les aspects structurels formels (politiques et programmes) ainsi que les aspects non formels (présupposés, normes et valeurs institutionnels Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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profondément ancrés) des universités qui produisent les situations d’inégalité entre les genres. De plus, en accord avec le cadre des relations sociales, l’étude s’efforce de décrypter la façon dont les programmes et les politiques existantes peuvent être améliorés au bénéfice des femmes. 1.6 Méthodologie L’étude a employé une approche méthodologique mixte de collecte des données en utilisant les méthodes quantitative et qualitative pour produire des données complètes sur l’impact des interventions en faveur de l’égalité entre les genres sur la participation féminine dans les universités kenyanes. Les méthodes quantitatives ont fourni des données normalement inexistantes sur l’impact réel de ces stratégies, notamment le schéma des inscriptions et des résultats universitaires ventilés par sexe et par spécialité et les tendances d’obtention des diplômes. Les méthodes qualitatives ont contribué à déterminer la signification et le processus des schémas statistiques émergents et les tendances dans les universités étudiées. A l’aide de la conception de l’étude de cas, nous avons obtenu des données des universités publiques du Kenya, sites où les politiques et les programmes du gouvernement avaient été instaurés. L’échantillonnage dirigé stratifié a été employé pour sélectionner deux établissements sur les sept universités publiques qui proposent des cours de sciences et d’arts. Les deux établissements représentaient les établissements ayant l’écart entre les genres le plus faible (Université Kenyatta - KU) et le plus élevé (Université Jomo Kenyatta de science et d’agriculture - JKUAT) en matière d’inscriptions dans les universités publiques. Cela a permis la comparabilité des facteurs sociaux, environnementaux et systémiques à l’origine de ces différences. La population de l’étude a inclus des étudiants, hommes et femmes, et des membres clés de la communauté universitaire. Les données de l’étude ont été recueillies auprès des personnes interrogées qui ont inclus deux administrateurs universitaires et quatre directeurs de programmes liés au genre. Ils ont fourni des informations sur les inscriptions et l’obtention des diplômes ainsi que sur les innovations politiques liées au genre instaurées par les universités. Ces données ont été triangulées avec celles des 420 étudiants (hommes et femmes confondus) qui ont aussi communiqué leurs expériences, selon leur sexe, de la vie universitaire dans le contexte des changements politiques et structurels qui avaient eu lieu dans les universités respectives. Les points de vue de 16 professeurs, hommes et femmes, ont fourni des informations sur les attentes des 106

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étudiants et des étudiantes à l’égard des enseignants. Ils ont aussi formulé des recommandations sur la façon d’optimiser les bénéfices des stratégies existantes en faveur de l’égalité entre les genres en application dans les universités kenyanes. Des entretiens semi-structurés ont été menés avec des professeurs, hommes et femmes. Quatre groupes de discussion ont été organisés selon le genre et l’université pour recueillir des informations auprès des étudiants en vue de dégager un consensus et les divergences sur les questions relatives à leurs expériences universitaires. Les entretiens ont été enregistrés et les cassettes retranscrites par écrit pour faciliter le processus d’analyse. De même, pour connaître les effets sur le genre des stratégies en faveur de l’égalité entre les genres au niveau universitaire, les étudiants ont rempli des questionnaires pour éclairer l’analyse de l’impact de ces politiques sur la participation des femmes dans l’enseignement supérieur. Le tableau 2.1 présente le résumé du cadre d’échantillonnage qui a été utilisé par l’étude. Tableau 2.1 : Base d’échantillonnage de l’étude Instrument

Questionnaire Groupe de discussion Guides d’entretien

Population cible

Echantillon Hommes Femmes

Totaux

210 24

210 24

420 48

Professeurs 8 Directeurs de programme

8 4

16 4

Totals

246

488

Etudiant(e)s Etudiant(e)s

242

Les informations de la communauté universitaire ont été analysées par rapport aux données documentaires extraites des sites web des universités, des plans stratégiques, des rapports annuels et des politiques de genre des universités. Les outils qualitatifs et quantitatifs d’analyse des données ont été utilisés pour analyser les données recueillies dans chaque établissement ; les tendances et les schémas émergents ont été déterminés et les conclusions ont été tirées par domaines thématiques de l’étude. A l’aide du logiciel SPSS, les réponses aux items du questionnaire, avec les données sur les inscriptions et l’obtention des diplômes, ont été quantifiées en termes de fréquences et pourcentages pour établir des comparaisons entre les genres. De même, le logiciel Atlas-ti a été utilisé pour organiser et coder les données des entretiens et des discussions de groupe. Des citations représentant les points de vue dominants des personnes interrogées sur des domaines spécifiques ont été utilisées pour répondre aux questions de la recherche et étayer les données quantitatives.


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2 CONCLUSION DE LA RECHERCHE Les conclusions de la recherche sont rapportées selon les domaines thématiques modélisés parallèlement aux objectifs de recherche de l’étude. 2.1 Tendances des inscriptions et des résultats universitaires dans les universités sélectionnées Une des méthodes établies pour évaluer l’impact des interventions en faveur de l’égalité entre les genres est de mener un audit de genre et de déterminer les niveaux d’offre pour chaque sexe. En ce qui concerne l’accès à l’université, les tendances des inscriptions selon le genre dans les deux universités étudiées entre 2006 et 2011 sont présentées dans le tableau 2.2. Tableau 2.2 : Etudiants inscrits à KU et JKUAT selon le genre, 2006-2011 Année

KU

H

F

Total

JKUAT

% femmes

H

F

Total

% femmes

2006 2007

13.084

9.898 22.987

43

1.803

719

2.522

29

2007 2008

13.953

9.974 23.927

42

1.174

499

1.673

29

2008 2009

15.168 10.921 26.090

42

1.184

415

1.599

26

2009 2010

17.617 12.874 30.497

42

1.505

632

2.137

29

_

_

_

_

2010 2011

21.964 16.404 38.374

43

Source: registres des universités

D’après le tableau 2.2, bien que les inscriptions de femmes soient restées constantes dans les deux universités (à l’exception d’une diminution à JKUAT en 2008/2009), la parité entre les genres n’a pas été

atteinte au cours de cette période de quatre ans. Cependant, les deux universités ont maintenu leur moyenne de représentation féminine de 43 pour cent (KU) et de 28 pour cent (JKUAT). Bien que KU ait obtenu de meilleurs résultats avec une marge de 15 points de plus que JKUAT, la différence repose sur la nature des cours offerts par chaque université. De nombreuses étudiantes ont été attirées par l’Université Kenyatta parce qu’elle propose principalement des cours en arts, lettres et science de l’éducation. En comparaison, JKUAT propose surtout des cours de science et de technologie. Les tableaux 2.3 et 2.4 présentent une ventilation détaillée des inscriptions selon le genre et la distribution par spécialité dans les deux universités. Les données des tableaux 2.3 et 2.4 sont conformes à la tendance courante de participation aux cours en Afrique en général et au Kenya selon laquelle les étudiantes sont attirées par les arts, les sciences sociales et les lettres (Oanda et Akudolu, 2010 ; Mwiria et al., 2007). Si l’on se reporte aux chiffres les plus récents des deux universités, l’ingénierie recueille le nombre le plus faible d’étudiantes (15 pour cent), suivi de près par l’informatique (23 pour cent dans les deux universités) et les sciences fondamentale et appliquée (25 pour cent en moyenne dans les deux universités). La majorité des étudiantes s’inscrivent en sciences de l’éducation (49 pour cent) et en lettres et en sciences sociales (49 pour cent). Les femmes obtiennent des scores faibles aux examens de fin d’études secondaires dans les matières scientifiques qui sont la condition préalable à l’admission aux cours d’ingénierie, d’informatique et de sciences fondamentale et appliquée, ce qui explique la faiblesse des taux d’inscription. Par conséquent, les stratégies visant à améliorer l’accès des femmes aux cours de science et de technologie à l’université doivent commencer aux niveaux inférieurs du système éducatif où l’attitude et le goût pour les matières et les carrières se forment.

Tableau 2.3 : Inscriptions selon la distribution des cours et le genre à KU, 2007-2010 Cours 2007-2008 2008-2009 2009-2010 2010-2011

H

F

T

H

F

Education

7,225 6,016 13,241 7,381 6,340 13,722 7,316 6,696 14,043 771

Lettres & Sciences sociales

1,034 768

Ingénierie

1,183 258 1,441 1,206 233 1,439 1,391 247 1,638 1,453 247

Economie/Commerce

1,889 1,089 2,978 2,456 1,281 3,737 3,740 1,935 5,675 4,272 3,089 7,361(42)

1,802 1,038 764

T

H

F

1,802 1,129 953

T

H

F

T (% F)

7,351 15,123(49)

2,082 1,556 1,455 3,011(48) 1,700(15)

Agriculture 1 0 1 22 10 32 88 41 129 334 137 471(29) Sciences fondamentales et appliquées

1,245 466

1,711 1,295 477

1,772 1,627 539

2,166 2,243

791

3,034(26)

Sciences de la santé

456

788

905

1,074 847

536

1,583(34)

332

513

392

631

443

Source : registres des admissions de l’Université Kenyatta. Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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Tableau 2.4 : Inscriptions selon la distribution des cours et le genre à JKUAT, 2006-2010 Cours 2006-2007 2007-2008 2008-2009 2009-2010

H

F

T (%F)

H

F

T (%F)

H

Ingénierie

326

59 385(15) 262 27 289(9) 400 75 475(16) 372 77 499(15)

Agriculture

56

21 77(27) 58 17 75(29) 55 33 88(38) 151 63 214(29)

Sciences

263

132

395(33)

210

83

293(28) 216

90

306(29)

257

81

338(23)

Informatique

187

32

219(38)

73

12

85(14)

53

227(23)

205

41

246(20)

Lettres & Sciences sociales

572

350

92(38)

268

163

413(39) 43

28

71(39)

229

223

452(49)

174

F

T (%F)

H

F

T (%F)

Source : registres d’admission de JKUAT

D’autres informations sur le choix des cours ont été fournies par les entretiens avec les étudiant(e)s et les professeurs impliqués dans les domaines respectifs de spécialisation. On a constaté que les étudiantes étaient intimidées par l’approche pédagogique employée par les enseignants de science et de technologie, les longues sessions de laboratoire sans interruption et les travaux de calcul et de laboratoire perçus comme difficiles et donc comme un défi pour les femmes. Les étudiantes étaient dissuadées par les blouses de laboratoire peu féminines, l’utilisation de prélèvements ou de produits chimiques avec des odeurs fortes et la perspective de devoir soulever des objets lourds comme des métaux. Il semble que la plupart des étudiantes ont tendance à éviter les cours de science et de technologie dans l’enseignement supérieur et que celles qui choisissent ce type de cours abandonnent et s’inscrivent à la place en arts et en lettres. Ce type d’attitude se forme très tôt dans la vie. La socialisation à la maison avec les parents et les membres importants de la famille inculquent aux enfants des attentes et des rôles différents selon les sexes et ces attentes sont renforcées plus tard dans la vie par le système scolaire et l’observation des occurrences sociétales. Par ailleurs, les stéréotypes professionnels dictent que les femmes sont plus adaptées aux arts et aux sciences sociales parce qu’ils sont plus faciles à gérer et à comprendre.

108

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

2.1.2 Tendances de genre dans les résultats universitaires En plus de déterminer le schéma de l’accès à l’université selon le genre dans les établissements sélectionnés, cette étude a aussi enquêté sur les niveaux de réussite des étudiants selon le genre. Le but était d’établir si l’on offrait aux étudiants de deux sexes un environnement physique et psychologique d’apprentissage propice à l’acquisition des compétences et connaissances requises pour être compétitif sur le marché du travail. Il était important de déterminer le niveau de réussite des étudiantes comparé à celui des hommes dans le contexte kenyan parce que les diplômes universitaires constituent la base des opportunités d’emploi de l’individu une fois sa formation terminée. Ainsi, les chances d’une femme d’avancer dans une société patriarcale dépendent énormément des diplômes qu’elle obtient. Au niveau universitaire au Kenya, la réussite dans chaque matière est mesurée par les examens organisés chaque semestre à la fin des cours. Les résultats cumulés des examens passés pendant la durée des études sont ensuite calculés et classés en quatre catégories de réussite. Les étudiant(e)s ayant d’excellents résultats obtiennent un diplôme avec la mention très bien, suivi par la mention bien supérieure ou inférieure. Les étudiant(e)s ayant des résultats médiocres ont la mention passable. Les tableaux 2.5 et 2.6 présentent les résultats des étudiants selon le genre dans les deux universités étudiées.


R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

Tableau 2.5 : Profil des résultats universitaires des étudiants de KU selon le genre, 2006-2010 Cours Education Ment. TB & B sup. et inf Passable Ingénierie Ment. TB & B sup. et inf Passable Lettres & Sciences sociales Ment. TB & B sup. et inf Passable Econ/Com Ment. TB & B sup. et inf Passable Sc. F& App Ment. TB & B sup. et inf Passable Sc Santé Ment. TB & B sup. et inf Passable

H

2006 F %F

H

2007 F

%F

H

2008 F %F

H

2009 F %F

H

507

550

58

402

446

61

520

722

361

403

42

255

286

39

636

644

33 6

19 8

70 30

115 51

56 26

68 32

21 22

27 11

26 7

79 21

87 84

81 66

51 49

13 13 1

6 1 0

86 14 0

78 43 6

33 21

0 0

2 0

100 0

33 11

81 13

2010 F %F

53

-

-

-

577

671

58

47

-

-

-

487

489

42

18 11

62 38

21 17

32 10

76 24

138 69

82 28

75 25

142 92

97 49

66 34

76 52

66 46

59 41

128 131

78 75

51 49

61 39

119 57

55 28

66 34

-

-

-

97 96

46 52

47 53 25

86 14

53 71

80 50

62 38

6 7

6 1

86 14

89 7

48 0

100 0

Clé : mentions très bien, mention bien supérieure et inférieure et mention passable. Source : registres de l’Université Kenyatta.

Tableau 2.6 : Profil des résultats universitaires des étudiants de JKUAT selon le genre, 2006-2010 Cours

H

2008 F %F

H

2009 F %F

H

2010 F %F

69 31

126 79

31 25

55 45

117 85

40 27

60 40

108 145

93 11

87 13

124 67

43 57

195 124

128 65

66 34

230 217

138 83

65 35

194 213

493 79

86 14

101 48

8 12

40 60

88 81

21 7

75 25

116 63

28 6

82 18

120 77

22 13

63 37

76 24

84 32

64 15

81 19

100 57

113 48

70 30

255 130

220 85

72 28

318 231

253 113

69 31

48 52

112 61

63 55

53 47

168 113

60 57

51 49

244 174

137 81

63 37

142 95

74 91

45 55

H

2006 F %F

H

82 33

38 13

75 25

113 95

60 27

Informatique Ment. TB & B sup. et inf Passable

158 83

138 43

76 24

188 133

Ingénierie Ment. TB & B sup. et inf Passable

71 60

6 4

60 40

Lettres et Sciences sociales Ment. TB & B sup. et inf Passable

14 3

19 6

Sciences Ment. TB & B sup. et inf Passable

67 46

20 22

Agriculture Ment. TB & B sup. et inf Passable

2007 F %F

Clé : mentions très bien, mention bien supérieure et inférieure et mention passable. Source : registres de JKUAT.

Les données des deux universités indiquent généralement que les performances des femmes sont relativement bonnes puisque jusqu’à 87 pour cent d’entre elles obtiennent d’excellentes notes en agriculture. Leurs scores ont été classés dans la catégorie des diplômes avec les mentions très bien et bien supérieure dans les deux universités, même dans les cours de science et de technologie à prédominance traditionnellement masculine. En général, la moitié des femmes qui s’inscrivent en science et en technologie obtiennent les meilleures notes. Ces résultats indiquent que les femmes peuvent réussir aussi bien que leurs homologues masculins. Il faut mettre ces résultats en relation avec le taux d’achèvement des femmes à l’université. Puisqu’il a été constaté que le nombre d’étudiantes diminue à mesure qu’elles approchent de l’obtention du diplôme à cause des défis qu’elles

rencontrent, il est nécessaire d’avoir plus de données sur les tendances d’achèvement des femmes et les facteurs qui affectent ces tendances afin de mieux comprendre le schéma de la réussite universitaire des femmes. 2.2 Impact des stratégies en faveur de l’égalité entre les genres sur la participation des femmes dans les universités Les stratégies qui ont été déployées pour améliorer la participation des femmes à l’université peuvent être évaluées selon leur impact qualitatif ou quantitatif. Dans la présente étude, l’impact est évalué par les indicateurs statistiques d’amélioration tels qu’ils sont présentés par les schémas des inscriptions et des résultats. Comme l’étude montre que les femmes restent en retard sur les hommes dans les domaines Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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de la science et de la technologie, il est impératif que le processus de la scolarité soit documenté, suivi et évalué afin d’éclairer les actions, politiques et programmes futurs. 2.2.1 Politique de discrimination positive en faveur de l’admission des filles à l’université Au Kenya, la discrimination positive a été utilisée comme une stratégie en vue d’assurer l’égalité des opportunités en abaissant les notes scolaires d’un point pour l’admission des femmes à l’université. C’est la mission du Comité d’admission mixte (JAB), l’instance gouvernementale chargée de distribuer les places dans les universités subventionnées par le gouvernement aux diplômés de l’enseignement secondaire qui répondent aux conditions d’admission : avoir obtenu une note C+ au Certificat d’examen de fin d’études secondaires du Kenya. Comme les ressources pour subventionner les universités sont limitées, le JAB sélectionne les entrants sur la base des ressources physiques et humaines disponibles. Par conséquent, les points de blocage sont liés aux capacités existantes des universités publiques et ils interdisent l’admission à l’université de trop nombreux étudiants qui répondent aux critères d’admission et les privent donc de la possibilité de poursuivre leurs aspirations. Abaisser les conditions d’admission d’un point pour les filles leur permet donc d’entrer à l’université. Malheureusement, l’efficacité de la stratégie de discrimination positive au Kenya fait l’objet d’un examen minutieux parce qu’elle

n’est pas inscrite dans la loi et que son utilisation à long terme est incertaine. Cela limite également la disposition d’amendement si et quand cette exigence deviendra nécessaire (Onsongo, 2009). De plus, les stratégies de discrimination positive ont été critiquées comme présentant une image de la femme inférieure sur le plan universitaire puisqu’elle a besoin d’aide pour avancer. L’étude confirme cette perspective comme l’illustre ce répondant masculin: « Cela [DP] semble simplement confirmer que les femmes sont faibles et doivent être aidées pour entrer à l’université » (professeur masculin, KU, 2011). Les femmes participant à l’étude avaient un point de vue contraire qui reflétait le déséquilibre entre les genres dans la distribution des ressources éducatives (en faveur des hommes) qui prédomine dans le pays. Ce point de vue dominant a été exprimé par une répondante : « la discrimination positive aide. Les femmes ont été historiquement défavorisées. Au moins, la baisse d’un point les encourage » (professeure, JKUAT, 2011). En outre, l’étude vise également à examiner l’impact du programme de discrimination positive qui est en application depuis plusieurs années dans les matières dans lesquelles les femmes se sont inscrites et l’impact quantitatif qu’il a sur leur accès à l’université. Le tableau 2.7 présente les résultats entre 2005 et 2011.

Tableau 2.7 : Etudiantes admises dans les universités publiques grâce au programme de DP du JAB par spécialité, 2005-2011

Cours B. Science B. Arts B. Education B. Commerce B. Sciences de l’environnement B. Psychologie B. Travail social B. Musique B. Bibliothéconomie B. Achats & Fourniture B. Agriculture Bus. B. Hôtel & Tourisme B. Arts de la scène B. Gestion d’entreprise B. Journalisme Totaux 110

2005-2006 90 110 82

2006-2007 84 120 99

2007-2008 42 143 70

2008-2009 204 273 222

1

9

3

20

2010-2011 394 429 78 14 2

2 1

3 10

4 1 1 4 1

9

289

321

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

5

1 263

728

930


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Le tableau 2.7 indique qu’à l’exception de la période 2007-2008, le nombre de femmes bénéficiant du programme de discrimination positive a régulièrement augmenté. Toutefois, la contribution générale du programme à l’accès des femmes à l’université est minime. Par exemple, 895 étudiantes ne représentent que 9,9 pour cent du total des 9 048 étudiantes admises dans les universités publiques pendant l’année universitaire 2010/2011. La stratégie de discrimination positive semble perpétuer la tendance existante en matière de carrières féminines. La majorité des étudiantes ont été admises en arts, lettres et sciences sociales. De même, le programme attire les femmes vers les cours de science générale (licence de science) qui ne conduisent pas à des professions spécifiques. Par ailleurs, le programme n’aborde pas le fait que les femmes obtiennent de mauvaises notes dans les matières scientifiques dans l’enseignement secondaire. En conséquence, quand les points d’entrée sont légèrement abaissés, cela n’améliore pas leurs chances d’accéder aux programmes compétitifs basés sur les sciences. Des stratégies plus appropriées doivent cibler le niveau de l’enseignement secondaire et viser à modifier l’attitude culturelle à l’égard de la science et de la technologie dès le plus jeune âge.

notamment la budgétisation, la prise en compte de la dimension genre dans les processus liés aux curricula et à la formation, la participation accrue des femmes à la gestion et la gouvernance, l’amélioration de l’équilibre entre les genres en science et en technologie et l’élimination de la violence fondée sur le genre (GdK, 2006). A l’aide de ces lignes directrices, les universités étaient censées élaborer des politiques et des plans d’action pour intégrer le genre dans leurs établissements et la présente étude a tenté de savoir dans quelle mesure cela avait été réalisé dans les universités sélectionnées. Les résultats sont rapportés dans les sections suivantes. 2.2.3 Politiques de genre des universités

Le gouvernement du Kenya a reconnu la nécessité d’assurer l’égalité des opportunités aux étudiants des deux sexes à tous les niveaux du système éducatif à travers ses politiques et ses commissions éducatives au fil des années. Plus spécifiquement, le document de session n° 1 de 2005, qui est le document d’orientation de politique actuel de toutes les opérations éducatives, propose d’aborder les inégalités en matière d’accès et de rétention dans les universités en offrant des bourses d’études suivant les besoins financiers. L’étude n’a trouvé aucune indication de sa mise en œuvre sur le terrain dans les universités sélectionnées.

Conformément aux exigences de la politique de genre du MEN, les universités (KU et JKUAT) ont élaboré une politique de genre pour servir de cadre aux principes et aux stratégies visant à assurer l’égalité entre les genres dans leur établissement. Les deux documents de politique étaient liés et couvraient de manière exhaustive les principes et les objectifs relatifs aux questions de genre. Ces questions qui touchaient les 12 domaines d’activité des universités incluaient les programmes d’étude, les technologies de l’information et de la communication (TIC), la participation aux cours de science et de technologie et les résultats obtenus dans ces matières, la violence fondée sur le genre et le harcèlement sexuel. De plus, la conceptualisation des deux politiques prend en compte les procédures de mise en œuvre très élaborées dans une section spécifique qui stipule la structure de mise en œuvre. Les termes de référence d’un centre de genre et de suivi ainsi que les exigences en ressources humaines sont bien articulées. KU a été plus loin en élaborant une politique connexe sur la violence fondée sur le genre et le harcèlement sexuel qui propose des lignes directrices et des procédures pour régler les cas de ce genre à l’université.

L’engagement du gouvernement a été appuyé par le lancement en 2007 de la politique d’égalité entre les genres dans l’éducation du MEN pour formaliser les droits et les devoirs des établissements d’enseignement supérieur dans le cadre de leurs efforts visant à éliminer la discrimination entre les genres dans leurs établissements. Les domaines prioritaires sont les suivants : l’intégration du genre dans toutes les politiques et activités programmatiques et

Cependant, les données de terrain indiquent la faible diffusion de la politique du MEN et de celles élaborées par les universités, ce qui nuit à leur efficacité en tant qu’outils d’orientation des activités et du comportement de la communauté universitaire en ce qui concerne les questions liées au genre. Le graphique 2.1 présente les résultats du questionnaire des étudiants sur leur niveau de sensibilisation à la politique de genre des deux universités.

2.2.2

Politique de genre du gouvernement

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

Graphique 2.1 : Sensibilisation des étudiants aux politiques de genre de l’université/gouvernement 70% 60% 50% 40% 30%

58% 42%

20% 10%

29%

21%

29%

21%

0% Hommes Oui

Non

Femmes

% de sensibilisation aux politiques de genre

Le graphique 2.1 indique qu’un pourcentage élevé (42 pour cent) des étudiants des deux sexes ignorait l’existence des politiques de l’université ou du gouvernement relatives à l’égalité entre les genres. Cela corrobore les données issues des entretiens avec les professeurs qui indiquaient que 35 pour cent ne connaissaient pas ces politiques. Cela signale l’inefficacité des mécanismes de diffusion des politiques dans les universités qui limite leur impact sur la participation des étudiant(e)s dans les universités. 2.2.4 Mise en œuvre de la politique de genre des universités et les centres de suivi Comme nous l’avons mentionné plus tôt, les politiques de genre des universités exigent que les établissements d’apprentissage mettent en place des centres de mise en œuvre pour réaliser la vision et les plans articulés dans la politique. Les deux universités étudiées avaient un bureau opérationnel en place. Les activités planifiées essentielles dans les domaines de l’égalité entre les genres en rapport avec la rétention et l’accès à l’université avaient été mises en place. Elles incluaient le suivi des progrès des étudiants par le biais de programmes universitaires, notamment l’abandon des étudiantes, les difficultés à achever leurs programmes, les bourses d’études réservées aux femmes et le mentorat fondé sur le genre. Les activités des deux universités comprenaient également la sensibilisation sur les politiques et un audit de genre des inscriptions qui était réalisé annuellement à JKUAT et trimestriellement à KU. Néanmoins, les programmes de genre des deux universités ont encore un long chemin à parcourir. A l’heure actuelle, la mise en œuvre est gênée par le manque de financement et de personnel qualifié.

112

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

KU, où le bureau avait été mis en place trois années auparavant, était plus avancée en termes de mise en œuvre du programme. Non seulement, elle mettait en œuvre la politique de genre et la politique de violence fondée sur le genre et le harcèlement sexuel, mais elle utilisait également les données ventilées par sexe recueillies pour informer la direction de l’université des progrès de l’université vers la réalisation de l’égalité entre les genres. En plus, une semaine Genre était organisée tous les ans pour accroître les efforts de sensibilisation. Le bureau Genre a aussi été le fer de lance des efforts pour intégrer le genre dans les activités essentielles de l’université comme la conception des curricula et l’affectation des bourses d’études. Le directeur du Genre siège au conseil du Comité d’aide financière qui décide comment les bourses d’études sont attribuées et assure l’équilibre entre les genres en matière d’attribution. Cependant, la faible estime de soi des étudiantes, associée à la méconnaissance de l’existence de ces bourses d’études, est un obstacle à l’utilisation de ces bourses d’études comme en témoigne le faible nombre de demandes. Par exemple, 38 pour cent seulement des demandes de bourses ciblant les orphelins et les étudiants vulnérables (OEV) provenaient de femmes. Ces bourses d’études paient 40% des frais d’inscription des étudiants. Les entretiens menés avant l’attribution des bourses ont indiqué que les étudiantes étaient plus vulnérables que leurs homologues masculins, pourtant, elles n’utilisaient pas les programmes et les activités d’intégration du genre existants parce qu’elles en ignoraient l’existence. Le bureau Genre de la KU a également fait des efforts pour introduire le genre dans les curricula en formant les fonctionnaires chargés des curricula à l’université et en étant représenté aux différents conseils et dans les différents départements et facultés responsables de la mise en œuvre des nouveaux programmes. En dépit de cela, l’examen des cours offerts par l’école d’agriculture, l’école la plus récemment mise en place par l’université, n’a révélé aucune tendance en faveur de la dimension genre. Cela indique que l’impact sur le déséquilibre entre les genres est insuffisant. De même, alors que l’université a fait des efforts pour diminuer la violence fondée sur le genre à KU par l’introduction d’une ligne téléphonique confidentielle auprès de laquelle les victimes de violence sexuelle peuvent déclarer les incidents et recevoir de l’aide, les entretiens avec les étudiantes indiquaient toujours que la plupart des cas n’étaient pas déclarés par peur de la victimisation.


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2.2.5 Politique de discrimination positive appliquée aux programmes d’études En tant qu’activité occasionnelle de l’audit Genre sur les inscriptions universitaires à KU, le bureau Genre a recommandé d’appliquer la politique de discrimination positive pour l’admission à tous les cours et programmes de l’université, plus spécifiquement aux cours où les étudiantes sont moins nombreuses que les étudiants. En conséquence, les conditions d’admission ont été abaissées d’un point pour les étudiantes. Bien que l’impact de cette mesure n’ait pas fait l’objet d’une évaluation rigoureuse permettant de déterminer si elle a amélioré l’inscription des femmes aux programmes de science et de technologie, l’étude a trouvé certains indicateurs d’amélioration des tendances en matière d’inscription à l’école des sciences de la santé centrée sur la pharmacie et la médecine. Le témoignage d’une étudiante en pharmacie confirme l’impact que la politique interne de discrimination positive à KU avait sur les étudiantes intéressées par les cours de science en améliorant l’accès des femmes aux cours de science à prédominance masculine. « Quand je suis entrée à l’université, j’ai été admise à un cours que je n’aimais pas, mais j’ai pu demander un transfert qui m’a permis de suivre la formation en pharmacie. Initialement, j’avais 44 points au lieu des 46 points nécessaires pour cette formation, mais ils ont été abaissés de deux points et je me suis inscrite en pharmacie. » (Etudiante à KU, 2011). 2.3 Défis affectant l’expérience universitaire des étudiantes Afin d’évaluer l’impact réel des différents programmes et politiques ciblant l’égalité entre les genres dans l’enseignement supérieur, l’étude s’est penchée sur les expériences des étudiants, femmes et hommes confondus, dans les domaines clés qui affectent l’apprentissage dans un environnement universitaire. Les méthodes pédagogiques, les défis liés au harcèlement sexuel, les grossesses non planifiées et les naissances ainsi que l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive et à l’information ont ainsi été examinés. Il existe d’autres défis auxquels sont confrontés les étudiant(e)s qui affectent leur apprentissage et qui aboutissent parfois à l’abandon de l’étudiant(e). Le graphique 2.2 résume les défis rencontrés par les étudiantes pendant leurs études. Méthodes pédagogiques Les étudiants ont identifié les approches pédagogiques comme l’obstacle majeur à leur présence, en particulier

aux cours de science et de technologie. A cet égard, les entretiens avec les professeurs ont révélé qu’ils utilisaient des méthodes qui décourageaient les étudiantes de contribuer aux activités en classe, limitant ainsi leurs chances d’assimiler les supports d’apprentissage, surtout quand elles ne le comprennent pas. Quand on leur a demandé lesquels de leurs étudiants – hommes ou femmes – participaient le plus en classe, deux professeurs masculins ont donné les réponses suivantes : « … on doit obliger les filles à parler. Elles sont timides et n’ont pas confiance en elle. Elles sont parfois submergées par la rapidité avec laquelle les garçons réfléchissent. » (professeur à KU, histoire, 2011). « Les garçons posent plus de questions en classe ; seule une femme essaie. » (professeur à JKUAT, ingénierie, 2011). Comme les étudiantes manquent d’assurance pour parler en public, les méthodes pédagogiques du type questions et réponses majoritairement utilisées dans les deux universités ne leur sont pas adaptées. Cette conclusion corrobore les travaux sur le genre et la pédagogie menés par Stofflett (1994) et Twoney (1993) qui, en se basant sur la théorie du constructivisme, recommandent d’employer des méthodes pédagogiques innovantes pour promouvoir l’égalité dans l’enseignement des sciences. Il est ainsi plus efficace de combiner cette méthode avec d’autres approches sensibles au genre comme le travail en groupe. Un professeur qui utilisait le travail en groupe comme méthode pédagogique a rapporté la réussite de cette approche : « Quand les travaux de laboratoire sont faits en groupe, les filles sont forcées de participer. » (professeure à KU, ingénierie, 2011) Toutefois, l’utilisation du terme « forcées » dénote un certain niveau de réticence de la part des étudiantes exigeant une exploration des méthodes pédagogiques sensibles au genre, en particulier dans les domaines de la science et de la technologie. Logements et installations sanitaires Dans l’une des universités, les étudiantes ayant des enfants ont dû chercher un logement dans les bidonvilles à l’extérieur de l’université qui n’étaient pas sûrs. Une étudiante a déclaré : « Quand elles accouchent, les filles doivent déménager du campus pour s’occuper de leur bébé. » (étudiante à KU, 2011). Cette étudiante vivait avec son nouveau-né dans un taudis sans eau potable ni installations sanitaires, mettant en danger sa santé et celle de son enfant. De nombreuses filles des deux universités se trouvaient Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

113


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114

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

femmes

hommes 13% 8%

Harcèlement sexuel

12% 8% 5%

Violence fondée sur le genre

Violence verbale, harcèlement

21%

28% 17% 12%

18% 13% 5%

13% 8% 6%

10% 7% 4%

14% 9% 5%

% parmi

60%

Interruptions : grossesse, mariage précoce

Services de santé sexuelle et reproductive Les questions de logement n’étaient pas la seule cause d’interruption de la fréquentation des étudiantes. L’accès aux installations et aux services publics de

Expériences familiales : enfants à élever

Responsabilités familiales Lorsqu’elles sont enceintes, les étudiantes doivent s’absenter de l’université pour passer des examens médicaux et il arrive à celles qui ont de jeunes enfants de manquer les cours pour s’occuper de leurs enfants.

Accès à des services sanitaires adaptés au genre : serviettes hygiéniques, toilettes propres Accès aux installations de santé reproductive : planning familial

Harcèlement sexuel L’étude a constaté que malgré les politiques de genre visant à réduire les agressions sexuelles, les étudiantes ont confirmé que le harcèlement sexuel était toujours une réalité, surtout pour les étudiantes de première année. Comme nous l’avons noté, la majorité des étudiants ont indiqué qu’elles ignoraient la politique de l’université qui énonce leurs droits et leurs devoirs et les étapes à suivre en cas de harcèlement. Les victimes d’agression sexuelle subissent un stress qui peut les conduire à manquer les cours, à des grossesses non planifiées et/ou à avoir un enfant pendant qu’elles sont à l’université.

Graphique 2.2 : Défis affectant la participation universitaire des étudiants selon le genre

35%

Sécurité Une autre source de préoccupation dans les deux universités qui affectait directement leurs études était l’insécurité ressentie par les étudiantes vivant hors du campus. Dans l’une des universités où l’hébergement sur le campus était très limité, la sécurité était la préoccupation principale, car la criminalité était endémique autour du campus. C’était surtout un problème pour les étudiantes qui n’aimaient pas assister aux cours du soir par peur d’être attaquées.

25%

En ce qui concerne les installations sanitaires, les filles préféraient naturellement utiliser des toilettes propres, en particulier pendant leurs règles. Aux périodes de pénurie d’eau, les étudiantes passaient beaucoup de temps à chercher des toilettes propres. De même, les étudiantes des familles pauvres n’avaient pas les moyens de se payer leurs serviettes hygiéniques mensuelles et cette tension affectait leurs résultats universitaires.

santé sexuelle et reproductive conduisait aussi à l’absentéisme. Les étudiantes des deux universités ont rapporté que si les contraceptifs comme les préservatifs étaient disponibles dans les foyers, il fallait aller chercher les préservatifs féminins et les pilules du lendemain dans un centre situé loin des foyers. Il a aussi été rapporté que les étudiantes qui s’y rendaient étaient qualifiées de « filles faciles », signifiant par là qu’elles avaient une moralité douteuse. En conséquence, il n’était pas rare que des étudiantes demandent la pilule du lendemain à des amies ou l’achètent dans des boutiques à l’extérieur des campus. Un étudiant a déclaré : « Presque tous les matins, les filles finissent par chercher des pilules du lendemain dans les boutiques à l’extérieur du campus parce qu’on ne les trouve pas dans les boutiques du campus. » (étudiant à JKUAT, 2011) Il est important que les étudiantes se sentent à l’aise dans leur vie personnelle en dehors des cours, car la stabilité psychologique joue un rôle important pour favoriser l’apprentissage.

Questions liées au stress

dans des situations similaires. En fait, les étudiantes ont rapporté que les logements n’étaient pas adaptés aux étudiantes avec des familles et recommandaient des alternatives séparées, plus spacieuses, pour rendre leur vie plus supportable.


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2.4 Leçons pour optimiser l’impact des programmes et des politiques en faveur de l’égalité entre les genres Après avoir examiné les politiques et programmes existants mis en place par le gouvernement et les universités échantillonnées pour aborder les inégalités entre les genres à l’université, l’étude a tiré des leçons pouvant être utilisées pour éclairer de futures activités dans ce domaine. 2.4.1 Ancrer les questions de genre dans les structures politiques institutionnelles Ancrer les considérations de genre dans les cadres politiques organisationnels, dans la plupart des cas le plan stratégique, légitime et priorise cet agenda et les activités connexes en s’assurant que les exigences en ressources budgétaires et humaines sont planifiées et satisfaites. Cela a été démontré nettement dans l’étude sur KU. En effet, ses résultats légèrement plus élevés concernant la réalisation de l’égalité entre les genres en matière d’inscription ont été attribués au fait que les questions de genre étaient intégrées à l’agenda de l’université, tel qu’il est articulé dans la déclaration de vision, le plan stratégique et la politique de genre et de harcèlement sexuel. Cela envoie un message clair à la communauté universitaire que l’égalité entre les genres est une question importante pour l’établissement et que les efforts à accomplir doivent être soutenus par tous les membres. 2.4.2 Suivi et évaluation réguliers des indicateurs d’égalité des genres pour les étudiants L’étude a constaté que mener des audits de genre en recherchant et documentant les données ventilées par sexe sur les inscriptions, la rétention et les résultats avait un impact significatif quand ces informations étaient utilisées pour éclairer les interventions en faveur de l’égalité entre les genres. A KU, où les données sur les inscriptions étaient collectées chaque trimestre, les résultats ont été utilisés pour introduire le programme interne de discrimination positive grâce auquel les conditions d’admission à tous les cours ont été abaissées de deux points pour les étudiantes. La littérature suggère également d’utiliser aussi les feuilles de pointage comme des outils pour suivre l’accès des femmes aux différents cours donnés dans un établissement. Un zéro pointé signifierait qu’aucune étudiante n’a été admise dans l’établissement à un cours donné à une période donnée (NCST, 2010). La feuille de pointage peut donc être utilisée pour éclairer

les politiques et les stratégies visant à améliorer l’accès des femmes aux cours spécialisés dans des établissements donnés. Les conclusions indiquent qu’il existe des problèmes liés aux progrès universitaires des femmes, car elles peuvent mettre plus de temps à achever leurs études que les hommes, et dans certains cas abandonner complètement. Il est donc important que les universités conservent des archives sur les tendances de transition d’une année universitaire à l’autre pour déterminer si les femmes achèvent leurs études avec la même cohorte d’étudiant(e)s que celle avec laquelle elles ont commencé leurs études. 2.4.3 Diffusion et sensibilisation des politiques et des programmes L’étude a révélé les différents programmes et politiques des établissements et du gouvernement visant à réduire les inégalités entre les genres à l’université au Kenya. Cependant, ils étaient mal diffusés et il y avait un manque de sensibilisation parmi les étudiants et le personnel. Pourtant, la connaissance des politiques par les parties prenantes concernées est essentielle à l’efficacité de la mise en œuvre et de l’intervention. L’expérience montre que les programmes sont réussis quand les parties prenantes sont impliquées dès le stade de la formulation. La communauté universitaire doit donc être sensibilisée aux cadres politiques en place pour permettre aux étudiant(e)s de tirer parti des opportunités disponibles. Par exemple, si les étudiantes connaissaient l’existence des politiques de harcèlement sexuel, elles pourraient dénoncer les coupables aux autorités compétentes et demander justice. Sur ce point, par conséquent, les efforts de sensibilisation doivent être intensifiés pour présenter aux étudiant(e) s et au personnel les programmes existants et leur expliquer comment en profiter. 2.4.4 Cibler les politiques et les programmes pour les besoins spécifiques des étudiantes Les conclusions de l’étude ont indiqué que les programmes existants ne répondaient pas aux besoins spéciaux des étudiantes et qu’ils n’avaient donc pas d’impact significatif. Par exemple, alors que la recherche montre que les questions relatives aux enfants et aux grossesses non désirées sont un obstacle à la pleine participation des femmes à l’université, il n’y a aucune politique en place pour aborder les questions relatives à l’accès aux services et à l’information sur la santé sexuelle et reproductive. Ce genre de politiques et de programmes pourrait inclure des services offrant des logements séparés et appropriés pour les étudiantes Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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ayant des enfants et l’amélioration de l’accès aux services de planning familial et sanitaires pour les femmes. Un autre domaine ayant besoin d’intervention est l’amélioration de l’accès des femmes aux cours de science et de technologie. Etant donné que le programme actuel de discrimination positive du gouvernement ne facilite pas suffisamment l’accès des femmes aux cours de science et de technologie à l’université, les programmes visant à mettre à niveau les compétences en science des filles diplômées de l’enseignement secondaire (par exemple, par le biais de programmes pré-universitaire en sciences à l’école ou juste avant l’entrée à l’université), pourraient être une approche. Une autre stratégie serait d’introduire des bourses d’études pour les étudiantes intéressées par les cours de science et de technologie à l’université. De même, on pourrait s’attaquer au problème de l’attitude négative à l’égard des matières scientifiques qui est une cause majeure des mauvais résultats des filles dans ces matières dans le secondaire par le biais de programmes efficaces fondés sur le genre et sur les carrières tels que le mentorat, les femmes modèles et l’orientation professionnelle pour développer leurs connaissances, leur estime de soi et la confiance en elles en rapport avec les cours disponibles. 3. CONCLUSIONS 3.1 Importance des conclusions sur les politiques et les pratiques éducatives L’étude a constaté le nombre limité de politiques et de programmes abordant les inégalités entre les genres dans l’enseignement supérieur, ce qui suggère que le secteur ne reçoit pas suffisamment d’attention ou de soutien des ONG ou du gouvernement dans ce domaine. Etant donné que l’enseignement supérieur habilite les femmes à participer activement socialement, politiquement et économiquement à leur communauté, en tant que dirigeantes dans les entreprises et dans les cercles professionnels et politiques, l’accès des femmes à l’enseignement supérieur est la condition préalable pour l’égalité et l’équité entre les genres (GdK, 2006). Pourtant, l’impact limité des politiques et des programmes en place dans les établissements d’enseignement supérieur étudiés attestent de la persistance des inégalités entre les genres. L’étude suggère que la politique de discrimination positive du gouvernement, qui est en application depuis 116

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plus de deux décennies, apporte une contribution minime à l’accès et à la rétention des femmes dans les établissements d’enseignement supérieur. Non seulement, cela pose la question de la pertinence des programmes existants, mais cela indique également l’absence de mécanismes de suivi et d’évaluation qui en assure l’efficacité. A moins d’y mettre fin, cette situation pourrait déboucher sur l’utilisation inefficace des ressources institutionnelles et du gouvernement et le gaspillage d’efforts pour des programmes qui manquent de vision et font peu pour améliorer la participation des femmes dans l’enseignement supérieur au Kenya. Les stratégies existantes se sont concentrées sur l’accès à l’université au détriment de la rétention et de la réussite des étudiant(e)s. Les conclusions indiquent également que les femmes sont confrontées à des défis pendant leurs études qui entravent leur participation efficace à l’apprentissage. Etant donné que les femmes obtiennent d’aussi bons résultats que les hommes sur le plan universitaire, elles devraient avoir des opportunités et des formations appropriées au niveau universitaire afin de leur permettre de participer au marché du travail où elles sont visiblement absentes. Pour corriger ce déséquilibre entre les genres, il est nécessaire d’éliminer les obstacles à la participation des femmes dans l’enseignement supérieur si l’on veut leur permettre de se mesurer aux hommes sur un pied d’égalité. Enfin, les conclusions montrent que les filles ont une attitude stéréotypée à l’égard de l’enseignement supérieur acquise et développée à l’école secondaire. Pour remédier à cet état de fait, des programmes comme le mentorat et les programmes de remise à niveau en science axés sur le changement d’attitude dès l’enfance doivent être mis en œuvre afin d’accroître les chances des filles d’entrer et de réussir à l’université. L’étude recommande les mesures ci-dessous pour améliorer l’accès et la rétention des femmes dans les établissements d’enseignement supérieur au Kenya et ailleurs. 3.2 Recommandations politiques 3.2.1 Recommandations à court terme 1. Les gouvernements et les universités doivent élargir les politiques de discrimination positive de façon à les rendre plus holistiques afin d’aborder les questions affectant l’accès des femmes à l’université. Les politiques de discrimination positive doivent aussi


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être révisées de façon à s’assurer qu’un nombre plus important de femmes suivent les cours de science et de technologie. 2. Les universités doivent nouer des liens avec les écoles secondaires pour encourager la participation féminine aux compétences scientifiques en concevant des programmes qui ciblent à la fois les domaines affectifs et cognitifs de l’apprentissage. Des programmes de mentorat par les pairs mettant en relation des écolières du secondaire et des étudiantes universitaires seraient utiles. 3. Le MEN et chaque université doivent accroître la diffusion et la sensibilisation sur leurs politiques et programmes de genre afin d’améliorer leur impact en matière de lutte contre les inégalités d’accès et de rétention à l’université. Le suivi et l’évaluation des stratégies existantes sont également des conditions préalables pour obtenir des résultats positifs. 4. Les universités doivent prioriser les questions de genre en faisant de l’égalité entre les genres une composante à part entière de l’agenda des établissements de façon à ce qu’elle soit reflétée dans les déclarations de mission et vision, les plans stratégiques et les budgets.

5. Les organisations non gouvernementales et les autres groupes d’intérêt doivent fournir aux étudiant(e)s des installations et des produits sanitaires ainsi que des services et de l’information sur la santé sexuelle et reproductive. 3.2.2 Recommandations à long terme 1. Il faut mettre en œuvre les bourses d’études et les cours en science de base en vue de motiver et de mettre à niveau les compétences des filles intéressées par les programmes de science. 2. Les universités doivent améliorer les environnements au sein desquels les étudiants poursuivent leurs objectifs universitaires en les rendant plus sensibles au genre. Plus spécifiquement, l’accès à des services de santé sexuelle et reproductive, des services de logements sûrs et spacieux, une aide financière en faveur des étudiants venant de milieux socioéconomiques modestes et des services de mentorat et de conseil doivent être instaurés.

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Université Covenant

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Ecart entre les genres : inscription et choix de carrière des étudiants en comptabilité dans les universités nigérianes

RÉSUMÉ

Les universités africaines ont un rôle essentiel à jouer dans la transformation sociale et économique des sociétés africaines.

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Cette étude a analysé les tendances des inscriptions selonle genre et les facteurs influençant le choix de carrière des étudiants en comptabilité dans des universités des six zones géopolitiques du Nigeria. Elle a examiné le schéma des inscriptions des étudiants en comptabilité dans 36 universités de 2004/2005 à 2009/2010. Elle s’est également penchée sur les facteurs influençant le choix de carrière des étudiants en comptabilité de premier cycle universitaire à l’aide de données collectées dans les universités échantillonnées au moyen de questionnaires et de groupes de discussion. Les résultats ont révélé un écart entre les inscriptions des hommes et des femmes en comptabilité et le nombre plus faible de femmesinscrites dans le nord que dans le sud du Nigeria. Citons parmi les facteurs influençant le choix de carrière des étudiants en comptabilité la sécurité de l’emploi, les la disponibilité des offres d’emplois et les salaires élevés. Nous avons aussi découvert que les femmes percevaient la comptabilité comme fondée sur les règles, ennuyeuse, stressante et bornée. Les chercheuses ont recommandé entre autres que le gouvernement nigérian formule une politique globale de genre dans l’enseignement supérieur en faveur des femmes dans le nord du Nigeria. Elles ont également recommandé que le personnel de l’enseignement supérieurrendela comptabilité plus intéressante pour les étudiants à l’aide de méthodes pédagogiques fondées sur la pratique et les études de cas.


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1 CONTEXTE DE L’ÉTUDE Les opportunités éducatives des filles dans de nombreux pays sont limitées, à la fois en terme absolu et en comparaison avec celles des garçons. De même, des différences frappantes ont été observées entre les inscriptions des filles et des garçons aux niveauxprimaire et secondaire en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne, avec un écart plus large dans le supérieur. Cette situation aboutit à une continuité discutable en ce qui concerne l’éducation des filles dans l’enseignement supérieur. D’après Randell et Gergel (2009) : « Lorsqu’on éduque un garçon, on éduque une personne. Lorsqu’on éduque une fille, on éduque une famille et la nation dans son ensemble. » Malgré les recommandations formulées lors des conférences internationales, la majorité des pays du continent africain n’ont pas atteint à ce jour les objectifs des Nations unies, de l’Education pour Tous (EPT) et les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). La plupart des pays africains ne semblent pas avoir inclus les droits des femmes dans leurs politiques éducatives (Adeyemi et Akpotu, 2004). Les femmes des pays développés comme les USA, le Canada et la France bénéficient d’opportunités éducatives étendues, alors qu’en Afrique les obstacles culturels et économiques empêchent les femmes d’accéder au même éventail d’opportunités éducatives que celles offertes aux hommes (Onokala et Onwurah, 2001). Au cours des décennies écoulées, les Nations unies ont fait des efforts pour promouvoir les droits et les opportunités des filles et des femmes. Les conférences mondiales des Nations unies sur les femmes organisées à Mexico (Nations unies, 1975), Copenhague (Nations unies, 1980), Nairobi (Nations unies, 1985) et Beijing (Nations unies, 1995) ont demandé l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. L’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a dirigé le mouvement mondial de l’Education pour Tous (EPT) visant à répondre aux besoins d’apprentissage de tous les enfants, les jeunes et les adultes. Les inégalités entre les genres dans l’enseignement supérieur sont aussi une question récurrente dans bon nombre de travaux de recherche sur les processus politiques en Afrique (Onokala et Onwurah, 2001; Bunyi, 2003; Nyaigotti-Chacha, 2004; Omoike, 2010). En Afrique, l’éducation contemporaine héritée du monde

occidental est principalement fondée sur des méthodes d’apprentissage et de production du savoir mixtes et sans considération de genre. Les universités africaines ont un rôle essentiel à jouer dans la transformation sociale et économique des sociétés africaines. A l’heure de la mondialisation, la participation des femmes dans l’enseignement supérieur est déterminante si l’on veut qu’elles acquièrent les connaissances et les compétences nécessaires pour mener des vies dignes de ce nom. Reflétantle modèle colonial, les établissements d’enseignement supérieur africains, en particulier les universités, étaient traditionnellement dominés par les hommes. Cependant, depuis les années 1960, leur nombre a augmenté parallèlement à l’augmentation de la population, aboutissant à des taux d’inscription plus élevés. Dans un effort pour égaliser les opportunités éducatives au Nigeria, le gouvernement a mis en œuvre le système de l’enseignement de base universel (EBU) gratuit qui couvre l’enseignement primaire et celui du premier cycle de l’enseignement secondaire. Cette politique a beaucoup amélioré le nombre de filles inscrites aux niveaux primaire et secondaire. L’Office fédéral de la statistique (1999) a rapporté que le taux de scolarisation des filles dans le primaire avait augmenté de 43,2 à 44,5 pour cent entre 1990 et 1998 et dans le secondaire de 42,7 à 47 pour cent. D’après Adeyemi et Akpotu (2004), alors que les inscriptions aux deux premiers niveaux de l’enseignement progressent vers une plus grande parité entre les genres, l’examen de l’enseignement supérieur, en particulier au niveau universitaire, semble indiquer le contraire. Le Comité mixte d’admission et d’inscription (JAMB) a été créé principalement pour réglementer les épreuves d’admission aux cours de premier cycle des établissements d’enseignement supérieur au Nigeria. Il a été fondé pour répondre à la nécessité d’un système d’admission juste de façon à assurer une distribution équitable entre les deux sexes de l’espace disponible dans les établissements d’enseignement supérieur. Cependant, le JAMB ne prévoit pas de dispositions spéciales pour les étudiantes. Bien que la comptabilité soit l’un des cours les plus populaires en sciences sociales, des études préalables ont montré une baisse du nombre d’étudiants s’inscrivant aux programmes de comptabilité dans

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le monde ces dernières années (Gungorus et Uyar, 2010). La comptabilité est une profession importante qu’une participation féminine accrue pourrait enrichir. Naturellement, la faiblesse des inscriptions de femmes pourrait conduire à un nombre insuffisant de femmes disponibles dans les effectifs de la comptabilité. Si les filles ont moins tendance à étudier cette discipline, cela pourra nuire au nombre de leurs inscriptions et à leur choix de carrière. 1.1 Enoncé de la problématique Les études ont montré que l’égalité entre les genres à l’université en Afrique n’existait pas et qu’il était nécessaire d’assurer une représentation adéquate des femmes dans l’enseignement supérieur (AssieLumumba, 2006b). Le Nigeria et d’autres pays en voie de développement ont des difficultés à réaliser l’égalité de l’accès à l’enseignement supérieur, surtout dans les universités (Adeyemi et Akpotu, 2004). Au Nigeria, on nous a déclaré que l’enseignement supérieur était presque exclusivement une affaire d’hommes à la fin des années 1990, (Alao, 1998). D’après Omoike (2010), de façon générale, les établissements d’enseignement supérieur s’alignent sur les demandes élargies du développement durable et de la modernisation. Accroître la participation dans l’enseignement supérieur est devenu un axe politique et la priorité du gouvernement nigérian. Cependant, l’augmentation des inscriptions de femmes ne semble pas comparable à celles des hommes. Onokala et Onwurah (2001) ont mis en évidence que l’accès équitable entre les genres à l’enseignement supérieur doit être une composante à part entière de toute stratégie visant à promouvoir le développement à long terme des universités. Par conséquent, les universités doivent être sensibilisées à cette problématique et prendre des mesures spécifiques pour corriger ce déséquilibre. Le taux d’inscription des femmes dans les cours scientifiques au Nigeria est généralement bas, alors qu’il est plus élevé en lettres. Omoike (2010) a noté que « l’accès et l’égalité des femmes aux études universitaires n’ont pas fait l’objet d’une sensibilisation suffisante en vue d’une contribution significative au développement durable du Nigeria et les hommes continuent d’être favorisés en matière d’admission dans l’enseignement supérieur». Il existe généralement un écart important entre les genres dans les inscriptions universitaires

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au Nigeria, mais il est plus grand en science et dans les disciplines scientifiques qu’en lettres (Adeyemi et Akpotu, 2004). De même, on a constaté des variations dans les tendances et le schéma des inscriptions selon le genredans les universités du pays en fonction des zones géopolitiques, avec une différence plus importante dans les régions nord du pays, que l’on pourrait attribuer aux dispositions culturelleset religieuses des populations. Généralement, l’inégalité entre les genres dans le système éducatif nigérian est imputable à plusieurs facteurs qui incluent l’exclusion des femmes des opportunités de développement professionnel, les préjugés à l’égard des femmes (en particulier les mères), la violence fondée sur le genre et les préjugés sur les capacités universitaires des filles. Les femmes restent très sous-représentées dans les domaines d’étude comme la comptabilité, les mathématiques, la science appliquée et l’ingénierie dans le nord du Nigeria. Eshun (1995) a observé que l’inégalité entre les genres est un problème courant dans les universités dans les pays développés comme dans les pays en voie de développement et qu’il y a fréquemment une grande différence entre les matières choisies par les hommes et les femmes. Au Ghana, Ardayfio-Schandorf (1995) a noté que la plupart des filles et des femmes qui atteignaient l’université s’inscrivaient souvent dans les facultés d’arts ou de sciences sociales. Au Nigeria, Onokala et Onwurah (2001) ont constaté une disparité entre les genres dans différents domaines d’étude. Bunyi (2003) a aussi découvert que la majorité des établissements d’enseignement supérieur en Afrique n’avait aucune forme de politique ou d’intervention en faveur du genre pour accroître les inscriptions des femmes. La comptabilité est une profession importante qui nécessite une participation mixtedes hommes et des femmes. Plusieurs études portant sur les inscriptions dans cette discipline ont été menées il y a environ une dizaine d’années ; la plupart d’entre elles ont identifié et rapporté différents schémas de genre en matière d’inscription et de facteurs influençant le choix de carrière (Simons, Lowe et Stout, 2003). Néanmoins, ces résultats ne nous ont pas donné une image claire du contexte nigérian. En dépit de la littérature disponible, dans la limite des connaissances des chercheuses, aucune étude n’a été en mesure de brosser un tableau complet des inscriptions des étudiants en comptabilité


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et des profils de carrière au Nigeria. Il convient donc de réexaminer cette question afin de voir l'évolution des inscriptions de femmes dans programmes de comptabilité.

femmes, considèrent les facteurs qui influencent leurs choix de carrière de façon différente.

1.2 Importance et objectifs de l’étude

1. Dans quelle mesure l’inégalité entre les genres estelle un problème pour l’inscription des étudiants de premier cycle dans les universités nigérianes ?

La présente étude fournit des données utilisables sur les inscriptions permettant aux praticiens et aux responsables politiques de remédier à l’écart entre les genres lorsqu’ils formulent et mettent en œuvre une politique. Cette étude dévoilera les facteurs qui influencent le choix de carrière des étudiantes en comptabilité au Nigeria. Cela devrait permettre aux responsables politiques de mettre en œuvre un curriculum dans les universités prenant en compte les idées des étudiantes. Il est nécessaire d’étudier les perceptions des étudiants en comptabilité afin d’élaborer des stratégies et des lignes directrices appropriées en vue de formuler une politique éducative au Nigeria pouvant inciter les étudiantes à choisir d’étudier la comptabilité. L’étude est également importante en ce sens qu’elle éclaire les professeurs de comptabilité et les conseillers d’orientation professionnelle sur la façon dont les étudiants perçoivent la comptabilité. Cela les aidera à motiver les étudiants et à modifier leurs perceptions. Les objectifs de l’étude sont de : 1. Déterminer s’il existe un écart entre les genres en matière d’inscription des étudiants en comptabilité dans les universités nigérianes. 2. Découvrir les facteurs qui influencent le choix de carrière des étudiantes en comptabilité au Nigeria. 3. Comprendre les perceptions des étudiants de la comptabilité comme choix de carrière. 4. Elaborer un programme de plaidoyer pour une politique éducative pouvant influencer le choix de carrière des femmes et favoriser leur admission dans les universités nigérianes. 1.3 Hypothèses de recherche Les hypothèses alternatives suivantes ont été testées : Hypothèse 1 : Il existe un déséquilibre entre les genres en matière d’inscription dans les universités nigérianes. Hypothèse 2 : Les étudiants en comptabilité, hommes et femmes, considèrent les cours de comptabilités et la profession comptablede façon différente. Hypothèse 3 : Les étudiants en comptabilité, hommes et

Les questions ont donc tenté de répondre aux questions de recherche suivantes :

2. Comment les étudiants perçoivent-ils la comptabilité et la profession comptable ? 3. Quels sont les facteurs qui influencent le choix de carrière des étudiantes en comptabilité au Nigeria? 1.4 Limites de l’étude L’étude se concentre sur les étudiants en comptabilité de 36 universités du Nigeria. Il pourrait être par conséquent difficile de généraliser les conclusions de l’étude aux inscriptions et aux choix de carrière des étudiants en comptabilité de toutes les universités nigérianes. Un échantillon comprenant des étudiants d’autres universités pourrait avoir des résultats différents. Prendre en compte les opinions d’étudiants d’autres disciplines que la comptabilité pourrait aussi déboucher sur des réponses différentes. Cela crée de nouvelles opportunités de recherche sur le sujet. On pourrait approfondir ce travail en incluant davantage d’étudiants d’autres disciplines de différentes universités.   2 REVUE DE LA LITTÉRATURE 2.1 Le Nigeria et l’enseignement supérieur Le Nigeria se trouve en Afrique de l’Ouest, bordé au nord par le Niger, à l’ouest par le Bénin et à l’est par le Tchad et le Cameroun. C’est la nation la plus peuplée d’Afrique et elle est devenue indépendante de la GrandeBretagne en 1960. Depuis lors, l’accent a été mis vers le développement économique. Le pays a connu une augmentation spectaculaire de sa population et de ses établissements d’enseignement supérieur. Au moment de l’indépendance, la population du Nigeria était estimée à 39,2 millions d’habitants, mais le dernier recensement mené en 1996 a révélé un chiffre avoisinant 140 millions (71,7 millions d’hommes et 68,3 millions de femmes). Le premier établissement d’enseignement supérieur, l’Université d’Ibadan, a été créé en 1948. A l’indépendance, le Nigeria ne comptait que deux universités. Une expansion substantielle de Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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l’enseignement supérieur au Nigeria a élargi l’accès, surtout en raison de la participation accrue du secteur privé. A l’heure actuelle, le pays compte 117 universités : 36 fédérales, 36 d’états et 45 privées (NUC, 2011). Cependant, un nombre croissant d’étudiants demandent l’accès aux études universitaires (Emodi, 2010). Le gouvernement nigérian a mis en place des politiques visant à aborder le problème de l’inégalité de l’accès à l’université. L’admission dans un établissement d’enseignement supérieur au Nigeria implique de réussir les épreuves de l’Examen unifié d’admission à l’enseignement supérieur(UTME) et celles de l’examen post-UTME de l’établissement choisi par le candidat. Leseuil de réussite pour chaque discipline est basé sur la moyenne des résultats des étudiants à l’examen, puis leJAMB, l’instance centrale chargée des admissionsdans les établissements d’enseignement supérieur au Nigeria, établit la liste des candidats admis. Le JAMB reconnaît trois critères d’admission dans les établissements fédéraux : le mérite (45 pour cent), la circonscription (35 pour cent) et les états les moins développés sur le plan éducatif (20 pour cent). Il existe d’autres moyens d’être admis dans les établissements d’enseignement supérieur, parmi lesquels l’admission par l’obtention d’un diplôme ou l’entrée pré-universitaire ou directe. L’admission par diplôme est laissée à la discrétion des établissements d’enseignement supérieur. Les procédures d’admission de chaque université permettent aux responsables des admissions d’admettre les étudiants en fonction de leur conformité avec les autres conditions d’admission. Toutefois, l’admission à l’université sur diplôme est plus onéreuse que l’admission par le biais du JAMB. Les universités privées et des états ont également leurs propres politiques d’admission (Asein et Lawal, 2007).

femmespuisque certaines d’entre elles obtiennent des notes suffisamment élevées pour rivaliser avec leurs homologues masculins. Le Nigeria applique actuellement un système de quota en ce qui concerne les programmes de premier cycle des universités. Cependant, malgré l’écart observable dans les politiques d’admission ci-dessus mentionnées, le genre n’est pas considéré comme une priorité dans les critères de sélection. Il pourrait faire partie des critères d’admission aux formations diplômantes, appelées cours d’initiation, de certaines universités nigérianes. Toutefois, étant donné que l’admission par diplôme coûte plus cher que l’admission par le biais du JAMBoù les étudiantes ont un soutien financier approprié, les inscriptions par diplôme ne sont sans doute pas une option possible. Omoike (2010), Adeyemi et Akpotu (2004), Onokala et Onwurah (2001) étudient l’égalité entre les genres en matière d’inscription dans l’enseignement supérieur au Nigeria et les stratégies d’intervention pour gérer cette question. D’après Omoike (2010), l’idée se répand que le taux d’admission des candidats aux universités par le biais du JAMB favorise les hommes. En 2005, le nombre total des femmes inscritesdans le premier cycle universitaire des universités nigérianes s’élevait à 285 179 sur 780 001 (Office national de la statistique, 2009), ce qui a de graves implications pour les responsables politiques puisque cela signifie que 36,6 pour cent seulement des étudiants inscrits en 2005 étaient des femmes. Le nombre général des inscriptions est guidé par les limites approuvées par la Commission nationale des universités (NUC) conforme au ratio science/arts de 70:30 recommandé par le gouvernement fédéral (Asein et Lawal, 2007).

2.2 Les femmes dans les universités nigérianes En appui à l’augmentation de l’inscription des femmes, certains pays africains ont adopté des mécanismes d’intervention pour s’assurer que les femmes disposent de chances égales d’être admises dans les établissements d’enseignement supérieur de leur choix. Citons parmi ces interventions la discrimination positive dans les universités publiques visant à abaisser d’un point les scores d’admission requis en faveur des femmes (Kwapong, 2007). De même, Bunyi (2004) examine l’intervention des universités africaines d’abaisser le nombre de points minimum pour l’admission des 124

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Onokala et Onwurah (2001) ont révélé que l’inégalité entre les genres est un enjeu dans toutes les universités nigérianes, impliquant que les inscriptions dans le premier cycle des universités nigérianes ne sont pas distribuées également entre les sexes. Ils ont noté que dans les universités nigérianes, c’est dans les facultés de science, d’arts, de sciences de l’éducation et de sciences sociales que l’on trouve les pourcentages les plus élevés de femmes inscrites. Leurs études ont cependant révélé que les hommes étaient les plus nombreux dans les domaines scientifiques et techniques


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qui sont les plus susceptibles de déboucher sur des postes à responsabilité bien rémunérés. Par ailleurs, un nombre plus important de femmes a été trouvé dans les facultés de sciences de l’éducation et d’arts, ce que l’on peut considérer conforme à la conception traditionnelle du rôle des femmes en tant que mères et épouses. De même, dans les universités publiques, Ahmad (2009) a constaté que bien que les inscriptions de femmes aient augmenté depuis 1995 jusqu’en 2000, 2005 et 2007, les femmes ont plus tendance à se spécialiser dans les cours traditionnellement jugés mieux convenir aux femmes comme l’art et les sciences de l’éducation. Adeyemi et Akpotu (2004) ont examiné l’écart en matière d’inscription selon la discipline et les zones géopolitiques. Les résultats ont révélé un écart entre les femmes et les hommes dans les disciplines scientifiques et entre les zones nord et sud : les inscriptions de femmes sont plus faibles au nord qu’au sud. Fennema, Wolleat, Pedro et Becker (1981) ont identifié les conditions préalables permettant d’accroître les opportunités des femmes aux carrières scientifiques et technologiques. Les étudiantes doivent acquérir le niveau élevé requis en mathématiques les préparant à l’entrée aux professions liées aux mathématiques, ainsi que les connaissances du cycle secondaire appropriées entenue des comptes et comptabilité. Elles devraient également avoir des tuteurs et des conseillers pour façonner leur développement. Cela implique la nécessité d’avoir plus d’enseignants de comptabilité qualifiés dans les écoles secondaires. Bunyi (2003) a soutenu qu’il existe trois dimensions au problème du faible taux d’inscription des femmes comparé aux hommes : la faiblesse générale des inscriptions, les inscriptions encore plus faibles aux niveaux universitaires supérieurs et la faiblesse des inscriptions dans les matières liées à la science, aux mathématiques et à la technologie. En ce qui concerne la faiblesse générale des inscriptions, Fletcher (2006) a proposé une stratégie d’intervention consistant à étendre les programmes de bourses d’études et de prêts financés par le gouvernement fédéral ou les états ou par les universités ou les écoles d’enseignement supérieur afin d’apporter un appui financier aux étudiants. Kwapong (2007) a noté que le mode de formation à distance, comme celui qui est proposé au Ghana, pourrait

permettre aux femmes d’accéder à l’enseignement supérieur en leur offrant une plus grande flexibilité et des solutions aux contraintes de temps, entre autres, contre lesquelles elles débattent habituellement. Cette étude a monté qu’au Ghana, 63 pour cent des étudiants de l’enseignement à distance étaient des femmes contre 37 pour cent d’hommes, ce qui implique que la formation à distance favorise l’inscription des femmes dans les établissements d’enseignement supérieur. 2.3 La comptabilité dans l’enseignement supérieur au Nigeria Le système universitaire nigérian s’est aligné sur les demandes élargies du développement économique (Omoike, 2010). Cela a abouti au développement de la profession comptable (Aruwa, 2008). La comptabilité en tant que discipline a un rôle essentiel à jouer dans le développement économique de toute nation. Pendant l’époque coloniale, avant les années 1960, la plupart des comptables nigérians étaient basés à l’étranger ; il y avait très peu de comptables dans le pays. Les comptables étaient très demandés dans les entreprises. La comptabilité n’est pas apparue dans les cursus universitaires avant 1960, date à laquelle l’Université du Nigeria, Nsukka, a été créée. A l’heure actuelle, 53 universités proposent des cours de comptabilité au Nigeria. Les écoles polytechniques offrent également des cours de comptabilité. La comptabilité est aussi une formation professionnelle. Pour cette raison, il existe des formateurs hors des établissements d’enseignement supérieur qui forment les candidats à la préparation aux examens professionnels de comptabilité. Au Nigeria, il existe deux instances professionnelles de comptabilité: l’Institut d’experts comptables agréés du Nigeria et l’Association nationale des comptables du Nigeria. Les membres de ces instances ont donné des cours etformés de nombreux étudiants même si ce ne sont pas des établissements qui délivrent des diplômes. Ce groupe d’établissements ne fait partie de notre recherche. L’un des défis de la comptabilité dans l’enseignement supérieur au Nigeria est que ce n’est pas un cours proposé par tous les établissements. Actuellement, la comptabilité dans les établissements d’enseignement supérieur est une formation en quatreans pendant laquelle les étudiants suivent des cours d’audit, de comptabilité de gestion, de comptabilité financière, de

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comptabilité du secteur public, de fiscalité et d’autres domaines spécialisés comme la comptabilité judiciaire et la comptabilité du pétrole et du gaz. 2.4 Les perceptions des étudiants de la comptabilité comme choix de carrière Simons, Lowe et Stout (2003) ont mené une étude exhaustive sur les rechercheseffectuées sur les facteurs qui influencent le choix des étudiants à étudier la comptabilité. Ils ont énoncé que plusieurs facteurs avaient été proposés, dans les études théoriques et non théoriques, comme influençant le choix de la comptabilité comme spécialité. Les résultats de cette étude ont révélé que l’importance relative des facteurs affectant le choix de la spécialité est variable et quelque peu difficile à comparer parce que les différentes études emploient des termes différents pour des facteurs apparemment identiques ou similaires. Les perceptions des étudiants de la profession comptable sont multiples et variées. Elles sont classées selon plusieurs attributs utilisant les six catégories suivantes (Sugahara et Boland, 2006) : les compétences perçues comme nécessaires pour réussir dans la profession comptable, les influences humaines, la valeur intrinsèque, les perspectives de carrière, le facteur du marché de l’emploi, et le coût d’opportunité de devenir comptable. Ces attributs et les catégories ont été principalement sélectionnés dans la littérature antérieuresur le choix de carrière au sein de la profession comptable et le choix des étudiants de se spécialiser en comptabilité. En appliquant les théories de Super à la comptabilité, DeCoster et Rhode (1971) et Buckley et McKenna (1973) ont découvert que les étudiants en comptabilité jugeaient les comptables de façon plus positive et favorable que le grand public. Cependant, Taylor et Dixon (1979) ont constaté que les étudiants des autres disciplines avaient généralement une image moins positive à l’égard de la profession comptable que les étudiants en comptabilité. Cohen et Hanno (1993) ont utilisé la théorie du comportement planifié (TCP) qui spécifie le rapport entre les croyances relatives aux effets escomptés, la pression sociale et le contrôle comportemental et ils ont rapporté que ces variables aidaient à prévoir le choix de la spécialité. Ils ont constaté que les étudiants en 126

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comptabilité classaient parmi les principaux facteurs motivant leur choix de la comptabilité comme spécialité les revenus élevés, les possibilités d’avancement et une carrière dans un domaine excitant. De plus, les compétences en mathématiques et la réussite aux cours de comptabilité ont été identifiées par les étudiants comme le facteur déterminant le choix de la comptabilité comme spécialité. Adams, Pryor et Adams (1994) ont mené une recherche sur le choix de carrière de 238 étudiants en comptabilité et d’autres disciplines dans un même établissement. Les résultats ont révélé que les facteurs les plus importants influençant le choix des étudiants à se spécialiser en comptabilité étaient les opportunités d’emploi, la possibilité de revenus élevés et l’intérêt véritable pour le sujet, alors que chez les étudiants ayant une autre spécialité, seul l’intérêt véritable pour le sujet était retenu comme principal facteur d’influence. Ils accordaient moins d’importance aux revenus et/ou aux opportunités d’emploi. Les instances professionnelles de comptabilité et le monde universitaire se sont efforcés de comprendre pourquoi la profession comptable restait impopulaire chez les étudiants les plus brillants (Sugahara et Boland, 2006). Hermanson, Hermanson et Ivancevich (1995)ont étudié l’efficacité des facteurs d’influence sur le choix de carrière des étudiants et ils ont conclu que le plus grand pouvoir d’influenceprovenait avant tout de la perception de la profession comptable par les étudiants. Les études de Saemann et Crooker (1999) ont constaté que les étudiants étaient plus susceptibles de trouver la profession comptable intéressante quand ils ne la percevaient pas comme fondée sur les règles, très structurée ou solitaire. Les étudiants étaient également plus enclins à choisir de se spécialiser en comptabilité quand ils la trouvaient intéressante. Mauldin, Crain et Mounce (2000) ont cité parmi les principauxfacteurs influençant le choix de la spécialité l’intérêtpour les opportunités de carrière, le formateur, les parents et l’argent. Parmi ces facteurs, le formateur aux principes de la comptabilité a été considéré comme le facteur ayant le plus d’influence. Le rapport AICPA Taylor Group (Taylor, 2000) identifie les facteurs à l’origine de la baisse du nombre d’étudiants en comptabilité et de la nécessité de concevoir des


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moyens d’inverser cette tendance. L’étude a constaté que la plupart des étudiants ignoraient les opportunités de carrière accessibles aux diplômés en comptabilité et avaient des connaissances limitées du travail effectué par les comptables. Elle a aussi constaté que l’intérêt des étudiants pour la comptabilité était faible. Ils avaient une image négative de la nature du travail comptable lui-même. Ils trouvaient les comptables ennuyeux et fastidieux et leur travail comme la manipulation monotone et solitaire des chiffres. Albrecht et Sack (2000) ont mené une recherche pour déterminer quels sont les facteurs qui ont affecté les inscriptions dans les programmes de comptabilité. Ils ont conclu que les candidats potentiels à la comptabilité sont généralement induits en erreur par les conseillers d’orientation et les enseignants et que les cours de comptabilité sont à blâmer de la pénurie de diplômés dans cette spécialité. Dans une étude menée par Belski, Richmond et Brozovsky (2003), l’absence de prestige attaché à la profession comptable était considérée comme un facteur dissuadant les étudiants. Néanmoins, diffuser plus d’information sur la comptabilité en tant que discipline pourrait susciter un intérêt accru des étudiants.

l’aptitude, les enseignants, les pairs, l’expérience professionnelle et la disponibilité des offres d’emploi. Les étudiants en comptabilité se caractérisaient par l’accent qu’ils mettaient surleurs futurs revenus et les possibilités de carrière. En outre, ils ont constaté que les étudiantes en comptabilité jugeaient la nature inhérente de la matière plus importante que leurs homologues masculins. Ces découvertes sont conformes aux études précédemment menéespar Lowe et al. (1995) dans lesquelles les étudiantes en comptabilité citaient l’intérêt de la matière comme facteur primordial. Heiat et Brown (2007), dans leur étude sur les facteurs sous-jacents affectant le choix de la spécialité, ont constaté que les étudiants sont fortement influencés par l’intérêt véritable qu’ils portent à une matière indépendamment du sujet et du genre. Les deux sexes avaient une perception neutre de la comptabilité en tant que profession intéressante. Cependant, en ce qui concerne la disponibilité des offres d’emploi, les hommes étaient plus fortement influencés que les femmes. Cela a été attribué au fait que la société a toujours tendance à considérer les hommes comme la principale source de revenu de la famille et que les femmes sont plus nombreuses que les hommes à quitter le monde du travail pour avoir et élever des enfants.

2.5 Les femmes et la comptabilité Certaines études ci-dessus mentionnées (Adams, Pryor et Adams, 1994; Saemann et Crooker, 1999; Mauldin et al., 2000; Taylor, 2000; Albrecht et Sack, 2000) manquent de fondement théorique et ne prennent pas en compte la dimension genre. En effet, peu d’études ont exploré les facteurs d’influence en relation avec le genre (Lowe, Lowe et Simons, 1994 et 1995; Lowe et Simons, 1997; Leppel, Williams et Waldauer, 2001; Thibodeau et Usoff, 2002; Heiat et Brown, 2007). Lowe et al. (1994) a étudié le rôle de la dimension genre dans le choix d’une carrière de comptabilité. Ils ont constaté que les récompenses intrinsèques de la profession étaient plus importantes pourles étudiantes en comptabilité et les récompenses extrinsèques pour leurs homologues masculins. Lowe et Simons (1997) ont mené une enquête plus approfondie auprès d’étudiants en commerce (comptabilité, marketing, finances et gestion). Les facteurs influençant le choix de carrière incluaient les revenus potentiels, l’association avec d’autres personnes du même domaine professionnel, les parents, le coût de l’éducation, le statut social, la satisfaction professionnelle, les années d’études,

Leppel et al. (2001) ont constaté qu’un père exerçant une profession a plus d’influence (dans le sens de donner des conseils et une orientation aux étudiantes) sur les étudiantes plutôt qu’une femme exerçant une profession, alors que le contraire était vrai pour les hommes. Thibodeau et Usoff (2002) ont constaté que les opportunités de carrière étaient la raison principale citée à la fois par les hommes et les femmes étudiant la comptabilité pour expliquer le choix de la comptabilité comme carrière. Toutefois, les hommes classaient les futurs revenus en deuxième position, tandis que les femmes citaient l’intérêt de la matière. Ces découvertes corroborent celles de Lowe et al. (1994) et de Lowe et Simons (1997). Belski, Richmond et Brozovsky (2003) ont constaté que les étudiantes en comptabilité considéraient la comptabilité comme une profession plus prestigieuse que ne le faisaient leurs homologues masculins. Ils ont soutenu que les étudiantes avaient développé une impression plus favorable de la profession comptable ces dernières années que les étudiants.

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La perception courante selon laquelle comptabilité est exigeante, ennuyeuse, sans imagination, asociale et liée aux cours de science et de mathématiques peut décourager les candidates de choisir la comptabilité comme filière professionnelle (Shackleton, 1980). Certaines idées courantes sur les difficultés qu’un tel environnement professionnel crée pour les femmes sont incontestablement vraies. Par exemple, la lourde charge de travail peut impliquer de longues heures pendant les périodes chargées, tandis qu’une spécialisation accrue dans des domaines incluant la comptabilité, le conseil en gestion, les services d’audit et d’assurance, le conseil fiscal, la comptabilité judiciaire et les systèmes d’information comptable implique plus de voyages, ce qui est difficile et exigeant, en particulier pour les femmes ayant des obligations familiales. Les questions de rentabilité sont importantes pour toutes les entreprises, surtout dans le contexte de la diminution des taux de croissance et des pressions de responsabilité civile. Cet environnement développe une éthique professionnelle dont les longues heures de travail et les lourdes charges de travail sont traditionnellement la norme. Ainsi, il a été conclu(Hooks et Cheramy, 1994) que le taux de roulement élevé des femmes continue d’être la conséquence de leur décision personnelle de se retirer d’un environnement professionnel exigeant. Les auteurs soutiennent par ailleurs cette conclusion, car la parité entre les genres semble solide au niveau des admissions. Cette recherche faisait partie d’une étude menée par le Comité exécutif sur les femmes et les questions familiales de l’Institut américain des experts comptables agréés (AICPA). Certains partenaires ont pensé que l’on pouvait supposer que, dans la mesure où les femmes ont constitué la moitié des nouvelles recrues en comptabilité publique ces dernières années, les problèmes pouvant être induits par le comportement de chaque firme étaient résolus (Hooks et Cheramy, 1994). Toutefois, de nombreux partenaires étaient d’avis que les principales questions en suspens — roulement et rétention — dépassaient leur contrôle parce qu’elles résultaient du choix personnel des femmes concernant leur carrière et leur famille. Les données d’enquête recueillies à une autre étape de l’étude ont suggéré que cela et d’autres perceptions erronées pourraient en fait contribuer aux problèmes restants de mobilité verticale. Ces données sont importantes parce que les dirigeants des entreprises mal informés sur la situation et l’attitude de la moitié de ceux qui entrent dans la profession ne sont peut-être pas toujours capables

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d’attirer et retenir certaines personnes les plus douées de la profession. 3 THÉORIE SOCIALE DÉVELOPPEMENT DU GENRE

COGNITIVE

DU

Le psychologue canadien Albert Bandura fut le précurseur de la théorie sociale cognitive (TSC) en 1963. La théorie sociale cognitive affirme que les individus contribuent à leur développement personnel et au changement social par leurs actes agentifs au sein de systèmes d’influenceen interaction (Bandura, 1977; 1986; 1997). Il a développé la théorie de l’apprentissage social de Miller et Dollard (1941) qui ne parvenait pas à prendre en compte la création de nouvelles réponses ou les processus d’imitation retardéeet non renforcée. La TSC considère le comportement humain comme une interaction triadique, dynamique et réciproque de facteurs personnels, comportementaux et environnementaux (voir le graphique 2.3). Ces trois facteurs s’influencent mutuellement en permanence et concourent à créer l’apprentissage. La TSC affirme que les individus ont un système personnel leur permettant d’exercer un certain contrôle sur leurs pensées et leurs actes. Cet auto-système héberge les structures affectives et cognitives des individus leur permettant d’apprendre des autres, de planifier des stratégies alternatives, de réguler leur propre comportement et de s’engager dans une auto-réflexion pour réaliser un résultat attendu. Il explique également comment les gens acquièrent et maintiennent certains schémas comportement aux tout en fournissant également la base de stratégies d’intervention (Bandura, 1997). Graphique 2.3 : Réciprocité triadique COMPORTEMENT

FACTEURS PERSONNELS

FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX

Adapté de Bandura, 1986.

On peut trouver la contribution de la TSC en tant que cadre théorique pour comprendre le développement professionnel dans différentes études (Lent, Brown et Hackett, 1994; Hackett, 1995 ; Lent et Maddux, 1997). On trouve également ses contributions au développement du genre dans les travaux de Bussey et Bandura (1999).


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L’approche sociale cognitive de Bandura forme le cœur du cadre théorique de la présente étude. Les facteurs environnementaux et personnels influencent le développement du genre, alors que les sous-systèmes sociaux (parents, pairs, médias, pratiques éducatives et systèmes professionnels) ont un impact sur le développement du genre. Les facteurs sont illustrés dans le graphique 2.4 et discutés ci-après.   Graphique 2.4 : Modèle conceptuel : théorie sociale cognitive, choix de carrière et genre Sous-systèmes sociaux Parents

Comportement

Facteurs environmentaux Facteurs personnels

Pairs Développement du genre

Médias Pratiques éducatives Systèmes professionnels

Adapté de Bandura, 1986.

3.1 Facteurs environnementaux L’environnement est l’un des facteurs pouvant influencer le comportement d’une personne. Bandura croit que les personnes sont à la fois les produits et les producteurs de leur environnement (Bandura, 1986). Le comportement d’un individu déterminera les aspects de l’environnement auxquels il est exposé et son comportement sera à son tour modifié par cet environnement (Bandura, 1989). Bussey et Bandura (1999) ont expliqué le concept des structures environnementales et le développement du genre en se basant sur la distinction de la TSC entre trois types de structures environnementales, à savoir l’environnement choisi, l’environnement construit et l’environnement imposé (Bandura, 1997). Les environnements choisis sont les choix d’activités, d’associés et d’études (Lent, Brown et Hackett, 1994). Les environnements construits sont des constructions des systèmes sociaux et institutionnels par leurs efforts générateurs (Maccoby, 1990) et les environnements imposés sont certaines conditions physiques et sociostructurelles, à savoir les curricula universitaires obligatoires. Ces environnements (choisi, construit et imposé) déterminent partiellement les types de comportement développés et activés (Bandura, 1999).

Dans la TSC, le développement du genre dans tout environnement est favorisé par trois principaux modes d’influence et la façon dont les informations qu’ils transmettent sont traitées sur le plan cognitif (Bussey et Bandura, 1999). Ces modes d’influence sont : (i) le modelage, (ii) l’expérience active de maîtrise, et (iii) l’apprentissage direct. Ces différents modes d’influence s’exercent de façons interactives et sont orientés vers la promotion des formes traditionnelles de comportement différenciées selon le sexe. Une grande partie de l’information liée au genre est illustrée par les modèles présents dans l’environnement immédiat de l’individu, notamment les parents, les pairs, les enseignants et les autres personnes importantes des milieux sociaux, éducatifs et professionnels(Bussey et Bandura, 1999). Le TSC caractérise l’apprentissage à partir d’exemples comme le modelage. Le modelage est le moyen le plus puissant et pénétrant de transmission des pensées, valeurs, attitudes et schémas comportementaux (Bandura, 1986; Rosenthal et Zimmerman, 1978). Il remplit une variété de fonctions dans le développement du genre. La plupart des théories sur le genre assigne un rôle majeur au modelage dans l’apprentissage des rôles sexospécifiques (Bandura, 1969; Kohlberg, 1966; Mischel, 1970). A force d’être exposé à un modèle unique, l’enfant découvre et apprend le comportement des modèles du même sexe que lui et du sexe opposé. Quand l’enfant peut choisir les modèles auxquels ils s’associent, l’association sélective produit des différences encore plus grandes dans ce qu’il apprend par l’observation (Bandura, 1986). L’expérience active de maîtrise est définie comme l’apprentissage d’un comportement sexospécifique à travers certaines situations. L’expérience active de maîtrise peut aussi être considérée comme le processus permettant de déduire le caractère sexospécifique d’un comportement à partir des résultats découlant de l’action d’un individu(Bussey et Bandura, 1999). L’éventail des expériences actives de maîtrise peut varier de réactions explicites à des réactions moins explicites. Le comportement sexospécifique est lourdement sanctionné socialement dans la plupart des sociétés. Les réactions sociales d’évaluations ont d’importantes sources d’information pour construire les perceptions. Les gens ont généralement des idées sur ce qui est une conduite appropriée pour une fille et un garçon. Plus le type de personnes et les systèmes sociaux auxquels un individu est exposéet avec lesquels il interagit sont Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

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larges, plus les résultats dont il/elle fait l’expérience en rapport avecles différents types de comportement sexospécifique seront diversifiés (Zimmerman, 1989). L’apprentissage direct est le mode d’influence sur les conceptions de genre émanant de l’apprentissage des personnes de son environnement social. C’est quand un enfant découvrele genre par ses tuteurs. Les rôles et les comportements sexospécifiques peuvent être affectés positivement ou négativement par l’apprentissage direct. Il s’agit d’un moyen d’apprendre à l’individu les différents styles de comportement et leur lien avec le genre. L’apprentissage direct est le plus efficace quand il reçoit un large soutien social et qu’il est basé sur des valeurs partagées. Les modèles, la plupart du temps, ne pratiquent pas ce qu’ils prêchent. L’impact de l’apprentissage direct est compromis quand ce qui est enseigné n’est pas conforme avec le modèle (Rosenhan, Frederick et Burrows, 1968; Hildebrandt, Feldman et Ditrichs, 1973). 3.2 Facteurs personnels Les facteurs personnels régulent l’attention, le traitement schématique de l’expérience, la motivation, l’activation émotionnelle, le fonctionnement psychobiologique et l’efficacité avec laquelle les compétences comportementale et cognitive sont exécutées dans les transactions de la vie quotidienne (Bandura, 1999). La TSC affirme qu’au cours processus de développement, la régulation des changements comportementaux passe progressivement de sanctions et d’obligations essentiellement externesà des autosanctions et une auto-direction fondées sur des normes personnelles (Bandura, 1986 et 1991a). Pour exercer une auto-influence, les gens doivent être attentifs à leur comportement et aux circonstances dans lesquelles ils se trouvent. Quand les enfants prennent conscience de la signification sociale attachée au genre, ils sont de plus en plus attentifs à cet aspect de leur comportement (Serbin et Sprafkin, 1986). Dans les groupes mixtes, les enfants sont plus susceptibles de faire attention à leur comportement en fonction de son rapport avec le genre. D’après Martin (1993), les filles font plus attention àleur comportement sexospécifique que les garçons parce qu’elles ont plus susceptibles de subir des reproches quand leur comportement s’écarte de leur genre. Du point de vue agentif socio-cognitif, « les gens sont des organismes qui s’auto-organisent, proactifs, auto-réfléchissent et s’auto-régulent et ne sont pas 130

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simplement façonnés et dirigés par les événements extérieurs » (Bandura, 1999). D’après Bandura (1997), selon l’agentivité humaine de la théorie sociale cognitive, les gens fondent leurs actes sur l’auto-efficacité dans les situations à risque. Fondamentalement, les gens évitent les situations et les activités potentiellement dangereuses parce qu’ils pensent qu’ils ne pourront pas surmonter une situation à risque. L’auto-efficacité est la confiance en soi que l’on a de contrôler une situation difficile comme résister à la tentation, faire face au stress, et mobiliser les ressources requises pour répondre aux exigences situationnelles. D’après Bussey et Bandura (1999), les activités professionnelles sont très différentes selon le genre. Les étudiantes sont efficaces dans les professions dominées par les femmes, mais le sont moins dans les études et les professions traditionnellement réservées aux hommes. En revanche, les étudiants ont une efficacité comparable pour les exigences et les professions dominées par les hommes comme par les femmes (Betz et Hackett, 1981; Bussey et Bandura, 1999). D’après Matsui, Ikeda et Ohnishi (1989), les femmes qui sont très féminines manquent généralement de confiance dans leurs capacités quantitatives et pensent que peu de modèles féminins réussissent dans les professionnellement dominées par les hommes. Les croyances perçues sur l’efficacité déterminée par le genre contribuent plus fortement à leurs préférences professionnelles que leurs croyances sur les avantages potentiels des différentes études. Wheeler (1983) a fait remarquer que certaines femmes basent leurs préférences professionnelles encore plus fortement sur l’efficacité perçue que sur les avantages potentiels que procurent les vocations. Les femmes doivent développer une grande efficacité dans les carrières liées aux sciences et exigeantes comme la comptabilité parallèlement à leurs responsabilités familiales (Betz et Hackett, 1981). Junge et Dretzke (1995) ont mis en évidence le fait que les différences entre les genres disparaissent quand les femmes jugent leur efficacité à réussir les mêmes activités que les hommes dans la vie quotidienne dans des tâches typiquement féminines plutôt que dans les professions dominées par les hommes. Les convictions des femmes sur leurs capacités et leurs aspirations professionnelles sont façonnées par les pratiques sociales sous-jacentes au sein de la famille, du système éducatif, des mass-médias et du système professionnel


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et de la culture dans son ensemble (Bussey et Bandura, 1999). Les pratiques de ces sous-systèmes sociaux sont présentées en détail ci-dessous. 3.3 Sous-systèmes sociaux Dans une perspective théorique, les conceptions et les rôles sexospécifiques sont les produits d’un large réseau d’influences sociales opérant de façon interdépendante dans une variété de sous-systèmes sociaux. A mesure qu’ils grandissent, les enfants sont capables sur le plan cognitif de discerner le lien entre le genre et les centres d’intérêt et les activités quand leur monde social s’élargit. Cette section discute le rôle d’influence joué par chacun des sous-systèmes sociaux dans la différentiation des attributs et des rôles de genre. Ces sous-systèmes sont les parents, les pairs, les médias, les pratiques éducatives et les systèmes professionnels. 3.3.1 Impact des parents Les parents jouent un rôle actif pour déterminer l’orientation du développement sexospécifique de l’enfant en structurant, canalisant, modelant et réagissant à son comportement sexospécifique. Les parents sont les principaux modèles de genre de l’enfant. A mesure que l’enfant se développe, les parents lui apprennent les comportements et les rôles liés au genre. Thomas et Neal (1978) ont mis l’accent sur le fait que les parents et le genre influencent le choix de la carrière et de la profession de leurs enfants. Certains parents juge l’école plus difficile pour leurs filles que leurs fils, même leur réussite scolaire n’est pas différente(Phillips et Zimmerman, 1990). Steinberg (1996) a mis l’accent sur le fait que la famille joue un rôle d’influence dans la réussite de l’enfant à l’école. Les croyances des enfants sur leur efficacité, leurs aspirations scolaires et les capacités professionnelles perçues sont influencées par le sentiment d’efficacité de leurs parents à promouvoir le développement de leurs enfants. Eccles (1989) a constaté que les parents souscrivent généralement au stéréotype culturel selon lequel les garçons sont naturellement plus doués que les filles pour les matières quantitatives. 3.3.2 Impact des pairs Les pairs sont des sources importantes d’apprentissage social A mesure que le monde social de l’enfant quitte le domicile, les groupes de pairs deviennent un autre agent du développement du genre. Dans la théorie sociale cognitive, le groupe de pairs fonctionne comme un

sous-système interdépendant de la différenciation du genre, et non un sous-système désincarné socialement (Bandura, 1986). Les pairs sont à la fois le produit et les producteurs qui contribuent à la différenciation des genres. Ils modèlent et sanctionnent les styles de comportement et servent de références comparatives pour l’approbation et la validation de l’efficacité personnelle (Schunk, 1987; Bandura, 1997). Dans les activités sociales structurantes, les enfants s’associent avec des camarades du même sexe et ont les mêmes intérêts professionnels différents selon le sexe (Huston, 1983). Bussey et Bandura (1999) prétendent que ce sont les orientations inculquées socialement qui conduisent les pairs à instaurer une différenciation entre les genres en favorisant des camarades du même sexe et à faire en sorte que leurs pairs se conforment au comportement attendu de leur sexe. 3.3.3 Impact des médias Les médias sont un autre milieu primordial pour le développement de l’orientation sexospécifique. Thomson et Zerbinos (1997) ont soutenu que les enfants sont continuellement exposés à des modèles de comportement liés au genre dans les lectures, les livres d’histoire, les jeux vidéo et les représentations de la société à la télévision. Les hommes sont généralement dépeints comme dirigeant, aventureux, entreprenants et des individus qui ont une profession et des activités de loisirs. En revanche, les femmes sont généralement montrées comme agissant de façon dépendante, sans ambition et émotive (Bassey et Bandura, 1999). Les personnages télévisuels masculins et féminins sont aussi dépeints comme différents en termes de capacités. Les hommes ont plus de chances d’exercer un contrôle sur les événements et d’avoir des carrières de haut niveau par contraste avec les femmes qui ont plus tendance à être plus à la merci des autres et sont surtout confinées aux rôles domestiques ou d’employées subalternes (Durkin, 1985). Pour les deux sexes, ces représentations professionnelles ne conviennent ni aux vocations de la plupart des hommes, ni à la lourde implication des femmes dans le monde du travail dans la vie réelle (Seggar et Wheeler, 1973). 3.3.4 Impact des pratiques éducatives L’école est le lieu où les enfants développent leurs connaissances et leurs compétences et forment leur sentiment d’efficacité intellectuelle qui est essentiel pour une participation efficace dans la société plus

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

131


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large. Les croyances personnelles et les compétences acquises pendant cette période formative ont un poids particulièrement important parce qu’ils façonnent le choix de la carrière et le développement. Même dès l’école secondaire, les croyances de l’enfant dans l’efficacité professionnelle sont ancrées dans les schémas d’efficacité perçue (Bandura et al., 1999). Les orientations professionnelles stéréotypées par genre sont liées très étroitement à la structure des croyances d’efficacité. Les garçons se perçoivent comme plus aptes aux carrières liées aux cours de science, alors que les filles jugent leur efficacité professionnelle plus axée vers les emplois de service, de secrétariat, d’infirmière et d’enseignement. 3.3.5 Impact des systèmes professionnels Les pratiques sexospécifiques sont aussi exposées dans les structures et les pratiques organisationnelles. Cela inclut la ségrégation importante des emplois en fonction de critères de genre, la concentration des femmes aux postes subalternes, les salaires inéquitables, les opportunités limitées de mobilité verticale et l’obstacle du « plafond de verre » (Stockard et Johnson, 1992). Les femmes entrent en grand nombre dans le monde du travail, pas simplement pour des raisons économiques, mais aussi pour des raisons de satisfaction personnelle et d’identité. Elles sont nombreuses à posséder l’efficacité personnelle, les compétences et l’envie de mener une carrière brillante dans des professions traditionnellement dominées par les hommes. Cependant, les femmes sont aussi représentées dans le domaine informel. Si les contraintes pour accéder à ce type de carrière se sont assouplies, les femmes sont toujours confrontées à des obstacles dans leur progression professionnelle (Jacobs, 1989). Les femmes dans les professions traditionnellement dominées par les hommes sont évaluées de façon plus négative que les femmes dans les professions traditionnellement féminines ou les hommes dans les professions traditionnellement dominées par les femmes (Pfost et Fiore, 1990). Elles ne sont pas jugées aussi bonnes ou compétentes qu’un homme aux compétences comparables au même poste (Alban-Metcalfe et West, 1991). Le défi de modifier les rôles sexospécifiques repose dans la façon de trouver un juste équilibre entre les exigences familiales et professionnelles pour les femmes qui entrent dans le monde du travail. Des systèmes plus équitables nécessitent des changements personnels et sociostructurels. Etant donné l’omniprésence des sanctions négatives à l’égard des hommes qui accomplissent des 132

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activités domestiques depuis les jeux symboliques de l’enfance vers l’âge adulte, les pratiques de socialisation sexospécifiques produisent des hommes ayant une efficacité perçue comme faible pour gérer les exigences combinées du travail rémunéré et de la parentalité (Stickel et Bonett, 1991). La plupart fuient les difficultés de jongler avec ces rôles en évitant les travaux ménagers et de s’occuper des enfants. 4 MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE 4.1 Conception de la recherche L’étude a utilisé les approches quantitative (enquête) et qualitative (groupes de discussion). L’échantillonnage de l’enquête a été effectué en utilisant une approche dirigée à l’aide du cadre de la technique de l’échantillonnage stratifié aléatoire. Le cadre d’échantillonnage de cette étude a consisté en 117 universités divisées en 36 universités fédérales, 36 universités d’états et 45 universités privées. La sélection a été faite en se basant sur les zones géopolitiques du Nigeria, le type d’université (fédérale, d’états et privée) et l’âge de l’université (universités de cinq ans ou plus). Le Nigeria est composé de six zones géopolitiques qui constituent chacune une strate. Les zones géopolitiques du nord sont le nord-est, le nord-ouest et le nord-centre, tandis qu’au sud il y a les zones sud-sud, sud-est et sud-ouest. Trente-six universités ont été sélectionnées pour la collecte des données, tandis qu’une sélection aléatoire a été effectuée au nord et au sud pour le travail de terrain : quatre fédérales, deux d’états et une privée. Tableau 2.8 : Liste des universités échantillonnées et leurs abréviations

AAU AKSUTECH AL-HIKMAH BABCOCK BAYERO BELLS BINGHAM BIU BOWEN BSU CARITAS COVENANT DELSU ESUTECH GSU IMSU KASU LASU

Ambrose Alli University AkwaIbom State University of Science and Technology Al-Hikmah University Babcock University Bayero University Bells University of Technology Bingham University Benson Iadahosa University Bowen University Benue State University Caritas University Covenant University Delta State University Enugu State University of Technology Gombe State University Imo State University Kaduna State University Lagos State University


Bowen University BOWEN Benue State University BSU Caritas University CARITAS Covenant University COVENANT R L A RState E C H E RUniversity C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E DELSU R E N F O R C EDelta Enugu State University of Technology ESUTECH Gombe State University GSU Le guide de terrain a été utilisé pour faciliter deux Imo State University IMSU groupes de discussion composés d’étudiantes dans Kaduna State University KASU deux des sept universités sélectionnées : dans les zones Lagos State University LASU géopolitiques sud-sud et sud-ouest àl’Universitédu Niger Delta University NDU Bénin (UNIBEN) et l’Université de Covenant. L’équipe Novena University NOVENA de recherche avait l’intention d’organiser des sessions Nasarawa State University NSU de GD dans trois universités, mais c’est devenu très ObafemiAwolowo University OAU difficile en raison des troubles politiques dans les zones OnabisiOnabanjo University OOU géopolitiques du nord du Nigeria pendant le travail de Rivers State University of Science terrain. Les GD ont inclus des questions touchant aux and Technology RSUST perceptions de la comptabilité en tant que discipline, les Redeemers University RUN avantages perçus de la comptabilité comme carrière, les UsmanuDanfodio University UDU contraintes perçues de la comptabilité comme carrière, University of Ado-Ekiti UNAD les discriminations perçues au sein de la profession University of Abuja UNIABUJA comptable, les facteurs influençant le choix des University of Benin UNIBEN étudiants de mener une carrière dans la comptabilité UNIILLORIN University of Illorin et les aspirations professionnelles après l’obtention du University of Lagos UNILAG diplôme. University of Maiduguri UNIMAID University of Port Harcourt UNIPORT Les données secondaires des années universitaires de University of Uyo UNIUYO 2004/2005 à 2009/2010 sur le schéma sexospécifique University of Nigeria UNN des inscriptions des étudiants du premier cycle dans les Wukari Jubilee University WUKARI universités nigérianes ont été recueillies aux sièges du NUC et du JAMB à Abuja, auprès du bureau du Registre, de l’unité de planification académique et du dossier 4.2 Instruments de l’étude et sources de données départemental de comptabilité des étudiants des sept Les données primaires ont été collectées au moyen universités étudiées et auprès du ministère fédéral de de trois instruments d’étude : deux questionnaires l’Education à Abuja. Les données sur les inscriptions ont spécialement conçus et un guide de terrain contenant des été collectées auprès de ces multiples sources pour questions ouvertes pour les groupes de discussion (GD). garantir la validité des données, tandis que les groupes Le premier questionnaire a été rempli par le département de discussion ont aussi été utilisés pour accroître la des Registres ou l’unité de planification académique de validité externe. chaque université. Le second questionnaire a été rempli par des étudiants de premier cycle du département 5 CONCLUSIONS DE L’ÉTUDE de comptabilité en 2010/2011 à tous les niveaux universitaires. Il a été conçu pour déterminer les facteurs qui affectent le choix de la comptabilité comme Cette section est divisée en trois parties: la première carrière par les étudiants. Une section concernait les présente les données sur les inscriptions, la seconde les données biographiques des étudiants, tandis que l’autre conclusions relatives au choix de carrière, tandis que la concernait le nombre des inscriptions au cours des dernière présente le résumé des conclusions. années universitairesde 2004/2005 à 2009/2010. Le Inscriptions par zone géopolitique, type questionnaire a aussi inclus des sous-sections saisissant 5.1 les facteurs relatifs aux perceptions de la comptabilité d’université et établissement en tant que discipline, les avantages d’une carrière dans Le tableau 2.9 montre le nombre d’inscriptions de la comptabilité, les contraintes d’une carrière dans femmes dans les programmes de comptabilité dans 36 la comptabilité, la discrimination dans la profession universités nigérianes entre les années universitaires comptable, les motifs du choix de carrière ainsi que 2004/2005 et 2009/2010. Lors de l’année universitaire les aspirations professionnelles après l’obtention du 2004/2005, onze établissements comptaient plus de 50 diplôme. On a demandé aux répondant(e)s de noter ces pour cent de femmes inscrites dans leurs programmes facteurs ou attributs sur l’échelle de cinq points de de comptabilité, parmi lesquels trois avaient plus de 70 pour cent de femmes inscrites en comptabilité. L’année Likert. universitaire suivante, le nombre des établissements Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

133


R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

ayant plus de 50 pour cent de femmes inscrites dans les programmes de comptabilité s’élevait à 13 et deux d’entre eux avaient admis plus de 70 pour cent de femmes dans leurs programmes de comptabilité. Lors de l’année universitaire 2006/2007, une seule université avait plus de 70 pour cent de femmes inscrites dans ses programmes de comptabilité, tandis que 13 autres avaient plus de 50 pour cent de femmes inscrites en comptabilité. En 2007/2008, le nombre des établissements ayant plus de 50 pour cent de femmes inscrites en comptabilité s’élevait à 22, dont cinq enregistrant plus de 70 pour cent de femmes dans leurs programmes de comptabilité.Lors de l’année universitaire suivante(2008/2009), le nombre d’universités dans lesquelles les femmes représentaient 50 pour cent ou plus des inscriptions en comptabilité avait baissé à 14, et une seule atteignait plus de 70 pour cent de femmes inscrites. En 2009/2010, un total de 23 universités avait au moins 50 pour cent de femmes inscrites dans leurs programmes de comptabilité et

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Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

quatre d’entre elles plus de 70 pour cent de femmes inscrites. Les données montrent un écart entre les genres en faveur des hommes en matière d’inscription en comptabilité dans les universités du nord du Nigeria. Cela pourrait s’expliquer par certaines restrictions religieuses et culturelles à l’encontre les filles dans certaines régions du nord, en particulier chez la population musulmanequi est dans certains cas assez opposée à l’éducation occidentale, en particulier pour les filles. Par ailleurs, les données révèlent que filles ont été plus nombreuses à s’inscrire dans les universités privées. Cela pourrait s’expliquer par le fait que les universités privées fournissent, entre autres avantages, de meilleures infrastructures, des années universitaires régulières et des environnements d’apprentissagepropices et que les filles les trouvent par conséquent plus attirantes.


BSU

UNIILLORIN

NSU

UNIABUJA

BINGHAM

AL-HIKMAH

UNIMAID

GSU

WUKARI

KASU

BAYERO

UDU

ESUTECH

CARITAS

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IMSU

UNIUYO

AKSUTECH

NDU

DELSU

AAU

UNIBEN

UNIPORT

RSUST

NOVENA

BIU

OAU

UNILAG

COVENANT

UNAD

LASU

BABCOCK

BOWEN

RUN

BELLS CALEB

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

26

27

28

29

30

31

32

33

34

35 36

N/A

18

6

129

52

N/A

129

96

P

E

F

F

E P

F

E

F

66

189

131

P

F

E

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

P

1.582

N/A N/A

57

F

P

26

F

6

N/A

P

P

3

P

37

25

E

P

51

F

59

N/A

F

P

26

59

E

E

76

E

78

N/A

E

E

43

N/A

F

N/A

105

F

N/A

23

E

P

55

P

37

F

F

E

Type

1.774

N/A N/A

2

23

37

170

206

79

78

14

N/A

3

30

53

N/A

30

74

112

73

75

46

N/A

21

82

17

64

N/A

N/A

N/A

114

N/A

N/A

106

65

62

138

H

3.356

N/A N/A

8

60

96

301

395

145

135

40

N/A

6

55

104

N/A

56

133

188

151

171

175

N/A

73

211

23

82

N/A

N/A

N/A

157

N/A

N/A

211

88

117

175

T

2004/2005

N/A

N/A

3

149

46

31

96

H

6

35

66

88

49

43

60

69

12

49

48

16

40

22

63

22

N/A

1

N/A N/A

19

15

N/A

110

61

15

37

1.011 1.271

N/A N/A

18

20

N/A

76

68

44

30

1

N/A N/A

12

37

64

52

27

17

21

100

19

58

30

22

58

5

19

5

N/A

N/A N/A

N/A

N/A

2

94

19

38

55

F

2.282

N/A N/A

37

35

N/A

186

129

59

67

2

N/A

18

72

130

140

76

60

81

169

31

107

78

38

98

27

82

27

N/A

N/A

N/A

N/A

5

243

65

69

151

T

2005/2006

1.569

N/A N/A

22

54

33

52

59

88

61

34

17

N/A

81

54

63

91

23

33

167

34

84

75

33

124

11

20

6

1

4

20

10

8

38

N/A

143

26

F

T

F

91

3.353

N/A N/A

49

84

67

161

149

125

138

9 10

28

1.842

18 12

17

52

34

62

95

33

63

119

24

21

36

45

70

71

16

70

78

65

18

14

20

52

33

95

9

15

14

112

30

17

142

58

86

126

H

3.543

42 23

38

122

62

126

154

104

93

215

68

55

72

100

138

137

33

116

232

110

52

26

62

172

43

123

18

19

19

174

54

35

266

95

163

182

T

2007/2008

1.701

24 11

21

70

28

64

59

71

30

96

44

34

36

55

68

66

17

46

154

45

34

12

42

120

Sud-Ouest

35

0

151

102

153

191

59

81

258

90

Sud-Sud

150

176

57

200

Sud-Est

35

96

19

4

5

62

24

18

124

37

77

56

Nord-Ouest

4

16

59

Nord-Est

18

15

94

N/A

309

121

Nord-Centre

1.784

N/A N/A

27

30

34

109

90

37

77

57

18

N/A

70

48

90

100

36

48

91

56

66

101

24

76

24

76

13

3

12

39

8

7

56

N/A

166

95

H

2006/2007

1.512

20 20

N/A

104

73

N/A

53

78

32

41

15

12

44

52

70

145

41

53

67

22

151

58

14

83

7

34

13

0

5

46

37

32

12

13

5

60

F

1.671

16 19

N/A

59

68

N/A

50

50

51

83

18

8

59

41

76

145

43

59

33

43

78

62

5

46

36

95

46

3

44

82

30

29

18

42

8

126

H

3.183

36 39

N/A

163

141

N/A

103

128

83

124

33

20

103

93

146

290

84

112

100

65

229

120

19

129

43

129

59

3

49

128

67

61

30

55

13

186

T

2008/2009

1.555

5 34

36

50

55

N/A

107

81

47

72

35

6

33

61

108

N/A

16

N/A

69

32

71

107

3

139

5

38

8

N/A

17

17

6

5

123

57

43

69

F

1.677

6 23

16

33

60

N/A

112

40

57

112

25

2

35

43

115

N/A

18

N/A

48

36

38

96

3

80

27

84

42

N/A

36

18

9

5

132

97

58

171

H

3.232

11 57

52

83

115

N/A

219

121

104

184

60

8

68

104

223

N/A

34

N/A

117

68

109

203

6

219

32

122

50

N/A

53

35

15

10

255

154

101

240

T

2009/2010

8.930

49 65

103

335

248

323

535

428

257

270

111

67

256

337

361

355

173

229

635

248

527

282

166

653

44

157

41

5

31

188

77

65

496

149

361

303

F

10.019

40 54

81

212

233

451

614

254

363

386

85

40

265

296

439

395

230

349

392

287

295

321

89

376

159

477

132

21

106

365

77

61

603

308

411

752

H

18.949

89 119

184

547

481

774

1.149

682

620

656

196

107

521

633

800

750

403

578

1.027

535

822

603

255

1.029

203

634

173

26

137

553

154

126

1.099

457

772

1.055

T

Grand total

R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

Tableau 2.9 : Inscriptions par zone géopolitique, type d’université et établissement, 2004/05-2009/10

Source: JAMB; registres de planification académique de l’université

135


136

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

557

48,4

25,4

257 20,3

258 49,9

515 25,7

403

Source: JAMB; registres de planification académique de l’université

34,3

1.180 25,8

461

31,2

46,6

864

50,3

27,9

474

33,2

1.120 565

12,2

27,4

505

27,4

496

5,65

104

7,44

137

7,65

20,2

306

3,57

54

3,37

51

1,5

48,4

979

53,3

27,8

421

34,5

1.061 521

66,7

312

25,5

184

33,5

212

42,3

23,7

396

31,4

525

11,4

191

10,6

177

7,72

129

15,1

253

T

F

20,6

320

3,28

51

2,19

34

19,5

303

F/∑F

51,5

817

49,8

31,3

487

23,2

1.046 360

61,6

497

23,4

231

28,3

180

38,6

412

F/T

H

27,4

459

19,2

322

12,9

217

9,12

153

3,22

54

28,1

472

H/∑H

T

F

H H/∑H

2,71

242

2,51

224

16,2

7.665

768

4.911

492

22,08

1.451 2.212

F/∑F

10,79 31

27,73

2,772 2,778

18,2

51,5

29,3

26,86

946 2.613 2.688

52,8

682

59,6

537 1,628 1,081

25

204

38,6

88

39,1

775

F/T

T

49,29

5.301

49,95

5.550

60,1

2,709

23,96

1.010

31,28

716

39,61

3.663

F/T

1.582 1.774 3.356 1.011 1.271 2.282 1.569 1.784 3.353 1.701 1.842 3.543 1.512 1.671 3.183 1.555 1.677 3.232 8.930 10.019 18.949

563 35,9

54,2

208

2,76

47

4,17

141

24,9

159

H H/∑H

36,09

777 44,9

15

583

24,7

150

31,6

71

19,8

795

F F/∑F

Total

428 33,7

20,1

267

6,33

113

3.03

79

40,4

459

T F/T

%

349

34,5

52,3

316

2,36

37

1.59

54

18.6

336

H H/∑H

609

864

47,9

12

321

21,3

136

0

25

14.3

557

F F/∑F

Grand Total

571

450

16,6

153

8,42

107

0

0

39

332

T F/T

2009/10

25,4

414

67,5

168

2,87

29

0

0

25.6

225

H H/∑H

2008/09

26,17

8,4

19,6

459

22,9

105

27.4

0

20.6

533

F F/∑F

2007/08

% Sud-Ouest

% Sud-Sud

149

310

81

4,57

24

1.517

6.43

2.718

157

37.2

325

SO

% Sud-Est

% Nord-Ouest

114

20.9

43

13.91

%

Nord-Est

208

SS 2009/10

591

SE 2008/9

371

T

NO 2007/8

F/T

NE 2006/7

H

NC 2005/6

H/∑H

2004/5

220

F

0

F/∑F

200

Nord-Centre

T

300

F/T

400

H

100

2006/07

600

H/∑H

2005/06

Graphique 2.5 : Inscriptions des femmes par zone géopolitique, 2004/05-2009/10

F/∑F

F

2004/05

500

ANNÉE

Le tableau 2.10 décrit le nombre des inscriptions par zone géopolitique et par genre de 2004/2005 à 2009/2010, tandis que le graphique 2.5 montre le nombre des inscriptions de femmes dans les sept zones au cours de la même période. Le sud-est a eu invariablement plus de 50 pour cent de femmes inscrites en comptabilité pendant toute la période, avec une pointe de 67,5 pour cent en 2004/2005. Les zones sud-sud et sud-ouest ont fluctué entre 45 et 53 pour cent de femmes inscrites au cours de la période et les autres zones géopolitiques des taux bien inférieurs à 50 pour cent et, dans de nombreux cas, inférieurs à 30 pour cent. Les données sur les inscriptions indiquent que les étudiantes sont marginalisées dans les zones nord-centre, nord-est et nord-ouest, tandis que les hommes sont désavantagés dans les zones sud-est, sud-ouest et sud-sud.

%

ZONE GEOPOLITIQUE

R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

Tableau 2.10 : Inscriptions par zone géopolitique et genre, 2004/05-2009/10


R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

42,8

1.582 1.774 3.376 1.011 1.271 2.282 1.569 1.784 3.353 1.701 1.842 3.543 1.512 1.671 3.183 1.555 1.677 3.232 8.930 10,019 18.949 Total

47.1 39.6 46.1

1,650 3,536 4,721 890

53.1 48.9 40,1

1.077 760 645

38,6 41,5 28,57

1.605 432 939 1.492 666 880 612 998

42,08 39,01 49,33 41,0 39,15 50,98 45,5

578 1.435 420 789

44,5 45,01 41,54

8.257 646

40,8 %

45,1 %

Fédérale

47,6 40,4 41,2 45,9 33,7 30,8 48,4 49,1 37,86 33,11 51,4 44,64 43,1 43,3 44,04 40,13 48,7 46,8 45,9

713

46,2

58

7.726 1.044 3.675 4.051 565 1.396 479 721 675 1.254 610 1,407 644 716 1.092 691 619 473 1.553

2.966

d’états

820

12,4

1.719 1.247

19,2 58,7

538 222

13,2 20,3

316 710

57,0 18,3

305 405 684

57,2 26,79 15,9

293 391

58,6 22,99

454 188 266

61,5 16,95 10,54

192 74

5,8 11,7

118 388

57,4 9,3

165 223

14,1 %

H/∑H F/∑F F/T H/∑H F/∑F F/T H/∑H F/∑F F/T H/∑H F/∑F F/T H/∑H

T H

2004/05

T

Fédérale

F

d’états

TYPE D’UNIVERSITE

Privée

F/∑F

H H

Femme Hommes Femme Hommes Femme Hommes Femme Hommes Femme Hommes Femme Hommes

Privée

2009/10

2009/10

2008/9

2008/9

2007/8

2007/8

2006/7

2006/7

2005/6

2005/6

2004/5

2004/5

0

F

100

2005/06

T

200

F/T

F

300

H/∑H

400

F/∑F

500

H

2006/07

T

600

F/T

700

F/∑F H/∑H

Total

F T H

2009/10

F T H F

800

%

900

2007/08

ANNÉE

1000

H

T

F

Graphique 2.6 : Inscriptions par type d’université et genre, 2004/05-2009/10

F/T

Tableau 2.11 : Inscription par type d’université et genre, 2004/05-2009/10

2008/09

Les inscriptions dans les programmes de comptabilité selon le type d’université et le genre pendant la période 2004/2005 à 2009/2010 sont présentées dans le tableau 2.11 et le graphique 2.6. Pendant quatre des six années universitaires étudiées, les universités d’états ont compté le nombre le plus élevé d’inscriptions dans les programmes de comptabilité, femmes et hommes confondus, même si les établissements fédéraux se sont taillés la part du lion des inscriptions pendant l’année universitaire 2009/2010. Néanmoins, bien que les universités privées aient compté le nombre total le plus faible d’inscriptions dans les programmes de comptabilité pendant toute la période étudiée, elles ont eu plus de femmes inscrites en comptabilité que d’hommes pour chacune de ces années universitaires. Les universités fédérales ont systématiquement inscrit plus d’hommes que de femmes dans leurs programmes de comptabilité.

Source: JAMB; registres de planification académique de l’université

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

137


R E N F O R C E R L A R E C H E R C H E S U R L E G E N R E P O U R A M É L I O R E R L' É D U C AT I O N D E S F I L L E S E T D E S F E M M E S E N A F R I Q U E

5.2 Perception et choix de carrière Un total de 400 questionnaires a été distribué dans chacune des sept universités choisies comme sites de données primaires. Le taux de réponse par université est présenté dans le tableau 2.12 et le graphique 2.7. Sur les 2 800 questionnaires administrés en tout, 2 047

ont été retournés, remplis et jugés exploitables pour l’analyse. Cela représente un taux de réponse général de 73,1 pour cent. De plus, des groupes de discussion ont été organisés à l’Université du Bénin et l’Université Covenant pour recueillir des données qualitatives supplémentaires.

Tableau 2.12 : Taux de réponse des répondant(e)s dans les sept universités sélectionnées Zone géopolitique

Université

Université Covenant, Ota Université du Bénin, Bénin Université Usmanu Dan Fodio, Sokoto Université d’Etat Adamawa, Mudi Université d’Etat Ebonyi Université Bayero, Kano Universitéd’ Ilorin, Ilorin TOTAL

Type Nbre de questionnaires Nbre de questionnaires d’université distribués relevés

Sud-Ouest Sud-Sud Nord-Ouest

Privée Fédérale Fédérale

400 400 400

329 333 179

82,25% 83,25% 44,75%

Nord-Est

d’états

400

379

94,75%

Sud-Est Nord-Ouest Nord-Centre

d’états Fédérale Fédérale

400 400 400 2.800

146 400 281 2.047

36,5% 100% 70,25% 73,1%

Graphique 2.7 : Taux de réponse dans les sept universités sélectionnées 400 350 300 250 200 150 100 50 0

ta

in

,O

t an

n ve

rs

e

iv

Un

ité

Co

si

er

v ni

si

er

U

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o er

B

v ni

U

I n,

ri

lo

’I

d ité

s er

rin

s er

iv

Un

Cahiers de recherche du FAWE Vol. 2 - 2011

Les répondant(e)s étaient des étudiant(e)s de comptabilité de tous les niveaux universitaires(du niveau 100 au niveau 400). Ils ont été ventilés comme suit : 23,8 pour cent des répondant(e)s étaient des étudiant(e) s de niveau 100, 27,4 pour cent de niveau 200, 24,6 pour cent de niveau 300, et 24,2 pour cent de niveau 400. Trente-trois pour cent des répondant(e)s étaient âgé(e) s de 15 à 20 ans, 48,2 pour cent de 21 à 25 ans, 18,8 pour cent de 25 ans et plus. La plupart des femmes(442) étaient âgées de 15 à 20 ans.

lo

ay

Le mélange des répondants était de 44 pour cent de femmes et de 56 pour cent d’hommes inscrits en comptabilité. Sur ce ratio général femmes-hommes de 44:56, les données ont révélé que les étudiants en comptabilité dans le sud du Nigeria étaient principalement des femmes, tandis que c’était l’inverse dans le nord du Nigeria. La participation féminine la plus élevée était à l’Université de Covenant dans la zone sud-ouest avec 26,3 pour cent de femmes, alors que les plus bas étaient dans les Universités Usmanu Dan Fodio dans la zone nord-ouest avec 31 (3,5 per cent). Cela s’explique certainement par les croyances religieuses et culturelles de la population.

138

Taux de réponse

Les données ethniques montrent que 15,8 pour cent des répondantes étaient Ibo, 27,2 pour cent Yoruba et 16,6 pour cent Hausa. Les 40,4 pour cent restants incluaient lesgroupes minoritaires Fulani, Margi, Edo et Ibibio. Le groupe ethnique ayant le nombre le plus élevé de répondantes était les Yoruba, tandis que celui ayant le nombre le plus de femmes participant était les Hausa. 5.2.1 Caractéristiques perçues de la comptabilité en tant que discipline On a demandé aux répondant(e)s de noter 20 variables liées aux caractéristiques perçues de la comptabilité en tant que discipline. Les tests Mann-Whitney U ont révélé des différences significatives sur ces sept des 20 variables : intéressante, verbale, imagination, pratique, dynamique, pas stressante et nouvelles idées. Les caractéristiques les plus importantes indiquées par les étudiantes sont les règles établies (49,5 pour cent tout


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à fait d’accord, 41,6 pour cent d’accord), mathématique (42,5 pour cent tout à fait d’accord, 49,1 pour cent d’accord) et pratique (47,9 pour cent tout à fait d’accord, 36,6 pour cent d’accord). Pour les étudiants, les facteurs les plus importants étaient pratique (54,6 pour cent tout à fait d’accord, 36 pour cent d’accord), les règles établies (50 pour cent tout à fait d’accord, 41,3 pour cent d’accord) et intéressant (50,3 pour cent tout à fait d’accord, 41,6 pour cent d’accord). Les répondantes dans les universités d’Ilorin, d’Usmanu Dan Fodio et deBayero, toutes situées dans les zones nord du Nigeria, ont aussi indiqué que la comptabilité était une discipline exigeante. C’est peut-être l’une des raisons expliquant pourquoi les programmes de comptabilité sont dominés par les hommes. Ni les femmes ni les hommes ne perçoivent la comptabilité comme ennuyeuse ou sans imagination, mais les deux sexes l’ont considérée comme étant stressante. Inversement, les groupes de discussion menés dans les deux universités sélectionnées ont révélé que presque tous les participants percevaient la comptabilité comme ennuyeuse, exigeante, bornée, basée sur des règles et manquant d’espace pour la créativité et l’imagination. 5.2.2 Avantages perçus d’une carrière dans la comptabilité En ce qui concerne les avantages perçus de la comptabilité comme carrière, les tests Mann-Whitney U révèlent des différences significatives pour trois des variables : revenus à court termes, statut social et capacité à se spécialiser. Cependant, les perceptions des étudiants et des étudiantes ne différaient pas beaucoup en ce qui concerne les autres avantages de la carrière. L’avantage le plus important perçu tant par les répondants hommes que femmes était la sécurité de l’emploi, avec un score respectif moyen de 4.60 et 4.57. Le résultat est conforme aux études de Chagelosi et al. (1995) et Bundy et Norris (1992) qui ont identifié la sécurité de l’emploi comme l’avantage le plus important influençant le choix de la comptabilité comme carrière. Les autres avantages hautement perçus par les étudiants et les étudiantes était la disponibilité des offre d’emploi (moyenne féminine = 4.45, moyenne masculine = 4.38), les revenus élevés (moyenne féminine = 4.39, moyenne masculine = 4.32) et la capacité à se spécialiser (moyenne féminine = 4.47, moyenne masculine = 4.48). Le facteur ayant le moins d’influence pour les répondants et les répondantes était les revenus à court terme (moyenne féminine = 3.32, moyenne masculine = 3.20).

5.2.3 Contraintes perçues d’une carrière dans la comptabilité Des différences significatives ont été notées dans les réponses des hommes et des femmes répondants pour cinq des neuf variables liées aux contraintes perçues de la comptabilité comme carrière. Il s’agissait du coût de qualification en tant qu’expert-comptable agréé, la faiblesse des revenus, le caractère inadapté de la profession, la lourdeur de l’activité professionnelle et les responsabilités familiales. Aucune différence significative n’est apparue pour les quatre autres variables. Les facteurs ayant la plus grande influence négative dans le choix de la comptabilité comme carrière à la fois pour les répondants et pour les répondantes étaient le temps nécessaire pour se qualifier comme expert-comptable agréé (moyenne féminine = 4.37, moyenne masculine = 4.33). La deuxième influence négative la plus forte pour les hommes comme pour les femmesétait le coût pour devenir expert-comptable agréé (moyenne féminine = 4.333, moyenne masculine = 4.20), tandis que le troisième facteur négatif le plus fort était la carrière fondée sur les principes (moyenne féminine = 4.16, moyenne masculine = 4.12). Dans les groupes de discussion menés dans les universités sélectionnées, les contraintes perçues comme affectant les femmes dans la profession comptable incluaient le système et les conditions de travail rigides. 5.2.4 Discriminations perçues dans la profession comptable En ce qui concerne la discrimination perçue dans la profession comptable, des différences significatives sont apparues entre les réponses des femmes et des hommes pour deux des quatre variables. Ni les femmes ni les hommes ne pensaient fortement qu’il y avait une discrimination dans la profession comptable. La moyenne des quatre variables pour les deux sexes allait de 2.36 à 2.85. Cependant, une proportion plus élevée de femmes s’accordaient tout à fait à direque les employeurs préféraient moins les femmes que les hommes (femmes = 17,9 per cent, hommes = 14,5 pour cent),que les femmes n’étaient pas promues aussi rapidement que les hommes dans les entreprises (femmes = 12,3 pour cent, hommes = 8,3 pour cent), et que l’on refusait aux femmes les avantages et les autres privilèges que l’on accordait à leurs homologues masculins (femmes = 11,5 pour cent, hommes = 7 pour cent).

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Pendant les groupes de discussion menés à l’Université du Bénin et à l’Université Covenant, la discrimination perçue affectant les femmes dans la profession enseignante incluait la croyance traditionnelle que les femmes sont faites pour rester à la maison, la responsabilité maritale et les politiques de recrutement qui favorise les comptables masculins sur leurs homologues féminines. 5.2.5 Motivation du choix de carrière En ce qui concerne les facteurs influençant le choix de la carrière, les tests Mann-Whitney U ont révélé des différences significatives entre les répondants et les répondantes dans toutes les variables à l’exception de l’intérêt personnel qui est apparu comme le facteur le plus important influençant le choix de carrière des femmes et des hommes avec des moyennes de 4.29 et 4.24 respectivement. La majorité des répondants ont donné des réponses affirmatives concernant cette variable (femmes = 84,6 pour cent; hommes = 84.8 pour cent). Les second et troisième facteurs d’influence pour les hommes comme pour les femmes étaient la possibilité d’apporter une contribution et la sensibilisation des instances professionnelles. Les trois facteurs les moins importants pour les répondantes étaient la culture, la pression des pairs et les amis de la famille avec la moyenne de l’échantillon s’élevant respectivement à 2.17, 2.19 et 2.41. De même, la culture, la pression des pairs et la pression parentale étaient les facteurs ayant le moins d’influence pour les répondants avec des moyennes de réponses respectivement de 2.72, 2.83 et 2.92. Pendant les deux groupes de discussion, les participants ont cité le prestige, l’abondance de la profession, la disponibilité de l’emploi, l’intérêt personnel, le conseil des parents ou des conseillers d’orientation comme les principaux facteurs ayant influencé leur choix de carrière. 5.2.6 Aspirations de carrière après l’obtention du diplôme Le facteur le plus fréquemment choisi par les répondants et les répondantes en rapport avec les aspirations professionnelles après l’obtention du diplôme était le désir de devenir expert-comptable agréé (femmes = 96,4 pour cent,hommes = 95,7 pour cent). Les autres facteurs les plus fréquemment choisis étaient le désir de commencer leur carrière dès l’obtention de

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leur diplôme et le désir d’atteindre le sommet de la profession comptable. L’aspiration la moins populaire chez les hommes comme chez les femmes (moyenne féminine = 1.70) était d’enseigner la comptabilité. Les autres spécialisations les moins populaires en comptabilité étaient l’insolvabilité (moyenne masculine = 2.00), la comptabilité judiciaire (moyenne féminine = 1.82, moyenne masculine = 2.08) et la fiscalité (moyenne féminine = 1.82, moyenne masculine = 2.09). Une différence significative entre les réponses des femmes et des hommes a été notée sur 10 des 15 variables. On a également noté que plus de répondantes désiraient travailler dans l’industrie que d’hommes, alors que plus d’hommes désiraient se spécialiser comme auditeurs. Cela suggère que les instances de comptabilité professionnelles devraient plaider en faveur de programmes qui encouragent les femmes en les informant des avantages que procurent les différents domaines de spécialisation, en particulier l’audit, les faillites, la comptabilité juridique et la fiscalité, qui sont des domaines distincts de spécialisation dans la profession comptable au Nigeria. Les groupes de discussion menés à l’Université du Bénin et à l’Université Covenant ont aussi révélé que presque toutes les répondantes avaient le désir de mener une carrière en comptabilité. 5.3 Résumé des conclusions L’étude a constaté que les universités détenues par des investisseurs privés et les gouvernements d’états ont les taux les plus élevés d’inscription de femmes en comptabilité au Nigeria. D’après les données primaires, les étudiants en comptabilité dans le sud du Nigeria (sud-est, sud-ouest et sud-sud) sont majoritairement des femmes, tandis que c’est l’inverse dans le cas du nord du Nigeria (nordcentre, nord-est et nord-ouest). C’est conforme aux résultats des données relatives aux inscriptions dans l’enseignement secondaire. Les universités dans les zones géopolitiques du nord-est et du nord-ouest du pays sont caractérisées par un faible taux d’inscription des femmes en comptabilité. La zone de nord-centre est celle où se trouve à Abuja, la capitale fédérale. Cela peut expliquer pourquoi cette zone ne souffre pas d’un niveau aussi bas des inscriptions de femmes que celui des zones du nord-est et du nord-ouest ci-dessus mentionnées. Comme nous l’avons fait remarquer


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précédemment, les filles des zones du nord connaissent des restrictions religieuses et culturelles, en particulier dans les communautés musulmanes qui rejettent l’éducation occidentale, surtout pour les filles. Les étudiantes en comptabilité percevaient la discipline comme basée sur des règles, mathématique, ennuyeuse, sans imagination et stressante. La comptabilité était aussi perçue comme exigeante, bornée, quantitative et basée sur les règles. Néanmoins, l’avantage le plus important d’une carrière en comptabilité pour les répondantes était la sécurité de l’emploi. Les autres avantages perçus étaient la disponibilité des offres d’emploi et les revenus élevés, tandis que les contraintes perçues étaient la durée nécessaire pour se qualifier comme expert-comptable agréé et le coût impliqué. En ce qui concerne les facteurs influençant le choix de carrière, le plus influent pour les répondantes était l’intérêt personnel, suivi par la possibilité de sensibiliser les instances professionnelles. Les autres facteurs influençant le choix de carrière cités étaient le prestige, l’abondance de la profession, le conseil des parents et des enseignants ou du conseiller d’orientation. La plupart des répondantes désiraient devenir des experts comptables agréés et travailler comme comptable dans l’industrie. Elles ne souhaitaient pas cependant enseignerla comptabilité. 6 CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS Malgré l’augmentation progressive des inscriptions de femmes dans les programmes de comptabilité des universités nigérianes, on a observé que les inscriptions des étudiantes variaient selon le type d’université : privée, d’états ou fédérale. Les investisseurs privés et les gouvernements d’états ont le taux le plus élevé d’inscription de femmes en comptabilité, alors que les universités fédérales ont le taux le plus bas d’inscription de femmes. Les universités des zones géopolitiques du nord-est et du nord-ouest sont principalement responsables de la faiblesse des taux d’inscription. Il n’existe aucune différence majeure dans la perception des hommes et des femmes étudiant la comptabilité. La plupart des femmes perçoivent la comptabilité comme étant basée sur des règles, ennuyeuse, sans imagination, stressante et bornée. Elles préfèrent travailler dans l’industrie comme comptable plutôt que dans la pratique professionnelle de la comptabilité. Ces réponses sont à mettre en relation avec l’auto-efficacité, l’auto-concept et l’environnement tels que défendus par Bandura (1986).

6.1 Recommandations et implications politiques Les données empiriques montrent que la disparité entre les genres est un enjeu en matière d’inscription dans l’enseignement supérieur au Nigeria. Des stratégies sont nécessaires pour accroître la participation des femmes dans l’enseignement supérieur au Nigeria et pour la réalisation de l’EPT et des OMD d’ici à 2015. De plus, les politiques doivent permettre aux moins privilégiés d’accéder à l’éducation de qualité offerte par les autorités éducatives nationales et des états, car les frais d’inscription des universités privées sont très élevés et donc inabordables pour beaucoup. 1. Une politique nationale globale de genre dans l’enseignement supérieur soutenant l’inscription des femmes, en particulier dans les zones du nord, doit être mise en place au Nigeria pour compléter la Politique nationale de genre existante dans l’enseignement de base comme suit : i. Accroître les opportunités offertes aux étudiantes par l’attribution d’un système de quota, en particulier en faveur des candidates en comptabilité. Puisque le JAMB, qui est l’instance centrale chargée des admissions dans les établissements d’enseignement supérieur au Nigeria, a reconnu les états et les groupes défavorisés sur le plan de l’éducation en admettant 20 pour cent des candidats lors de chaque année universitaire parmi ces groupes, il faut attribuer 5 pour cent des admissions aux candidats, hommes et femmes, des zones du nord et de l’est, car ils constituent un groupe défavorisé en raison de facteurs culturels et religieux, entre autres. ii. Le gouvernement, à tous les niveaux, doit élaborer des plans stratégiques en faveur du genre dans l’enseignement supérieur. iii. Il faut mettre en place des programmes comme le mentorat et le conseil qui peuvent aider les étudiantes à faire des choix de carrière éclairés cohérents avec l’image qu’elles ont d’ellesmêmes. Le ministère fédéral de l’Education, le JAMB et la Commission des universités du Nigeria pourraient être les véhicules de mise en place de cette politique. Sa mise en œuvre pourrait être fondée sur les politiques connexes existantes et sur la Constitution du Nigeria. 2. Il faut introduire un système de quota qui favorisera les candidates à l’admission dans les universités fédérales du Nigeria.

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3. Le corps enseignant de l’enseignement supérieur doit rendre la comptabilité plus intéressante pour les étudiants. Les cours de comptabilité doivent être enseignés de façon pratique et utiliser des études de cas. 4. Les départements de comptabilité des universités nigérianes doivent amender le curriculum de comptabilité pour laisser de la place à l’innovation et à la créativité.

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5. Les instances professionnelles de comptabilité au Nigeria devraient sensibiliser les étudiants aux différentes spécialisations de la pratique comptable. Cela permettra aux étudiants de connaître les différentes orientations à leur disposition après l’obtention de leur diplôme et adapter leurs aspirations en conséquence.


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Nations unies (1975), Report of the World Conference of the International Women’s Year. Extrait le 27 février 2011 de http://dwww.un.org/womenwatch/daw/beijing/otherconferences/Mexico/Mexico%20conference%20report%20 optimized.pdf. Nations unies (1980), Report of the World Conference of the United Nations Decade for Women: Equality, development and peace. Extrait le 27 février 2011 dehttp://www.un.org/womenwatch/daw/beijing/ otherconferences/Copenhagen/Copenhagen%20Full%20Optimized.pdf. Nations unies (1985), Report of the World Conference to Review and Appraise the Achievements of the United Nations Decade for Women: Equality, development and peace. Extrait le 27 février 2011 dehttp://www.un.org/ womenwatch/daw/beijing/otherconferences/Nairobi/Nairobi%20Full%20Optimized.pdf. Nations unies (1995), Report of the fourth World Conference on Women. Extrait le 27 février 2011 dehttp://www. un.org/womenwatch/daw/beijing/pdf/Beijing%20full%20report%20E.pdf. Walkerdine, V. (1989). Counting girls out. London: Virago Press. Wikipedia, l’encyclopédie libre. Extrait le 9 mars 2011 de http://en.wikipedia.org/wiki/Enrollment. Zimmerman, B.J (1989), « A social cognitive view of self-regulated academic learning ». Dans : Journal of Educational Psychology, 81(3), 329-339.

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Politiques et pratiques : conclusion et recommandations La recherche contenue dans ce volume démontre clairement qu’il est possible d’améliorer l’égalité entre les genres dans l’éducation si les politiques et les interventions appropriées sont mises en place et si les interventions sont évaluées sur la base de données ventilées par sexe. Les éléments de preuves issus de ces travaux de recherche appuient aussi la mission du FAWE de créer des attitudes, politiques et pratiques sociétales positives qui promeuvent l’égalité en faveur des filles en termes d’accès, de rétention, de résultats et de qualité en influant sur la transformation des systèmes éducatifs africains. Les pratiques d’enseignement sensibles au genre Ce qui se passe au cours des processus d’enseignement et d’apprentissage dans les classes joue un grand rôle pour déterminer la façon dont les filles et les garçons participent à l’enseignement et s’ils restent à l’école et réussissent leurs études. Parce que les enseignants sont au centre des processus d’enseignement et d’apprentissage, leur compréhension et leur prise de conscience de la dimension genre sontessentielles à la participation effective des filles et des garçons aux processus d’apprentissage. La recherche contenue dans ce volume s’appuie sur cette notion en étudiant la dimension genre dans une sélection d’écoles formelles de trois pays africains. Elle met en évidence les obstacles qui continuent à entraver la pleine inclusion des filles dans les établissements d’enseignement formels. Au Liberia, l’examen des barrières qui dissuadent les femmes de devenir enseignantes souligne les hypothèses patrilinéaires enracinées dans le tissu culturel de la société. Les idées selon lesquelles les filles sont plus efficaces dans la sphère familiale que dans les rôles institutionnels ont pour effet de limiter le nombre de filles achevant leurs études et de réduire le nombre de femmes disponibles pour devenir enseignantes. Les politiques qui permettent aux écoles de mieux intégrer la dimension genre accroîtront le nombre d’étudiantes et par extension le nombre d’enseignantes potentielles. Dans le même esprit, les deux analyses sur l’impact des écoles sensibles au genre soutiennent que les résultats scolaires des filles dépendentnon seulement beaucoup de la qualité et de la sensibilité des enseignants, mais sont aussi fortement influencés par la présence de femmes à despostes de direction. Il faut à présent, plus que jamais, sensibiliser les principales parties prenantes, articuler les besoins des étudiantes et créer des parcours éducatifs permettant aux femmes d’accéder à des postes de direction au sein de leurs différentes communautés. L’enseignement supérieur, un site de production des connaissances Les systèmes d’enseignement supérieur se caractérisent par une inégalité profondément enracinée entre les genres, pourtant, ils sont l’un des plus importants secteurs de formation des ressources humaines. Bien que l’enseignement supérieur joue un rôle vital dans la production des connaissances et la diffusion de l’information à des fins de développement, le manque de représentation et de participation féminine appropriéedans ce secteur explique l’absence des femmes aux postes de direction de leurs différentes communautés. Alors que les femmes africaines sont les principaux contributeurs de la production économique et sociale, elles disposent d’opportunités limitées pour contribuer ou prendre des décisions importantes. Les rapports de recherche de cette série mettent au défi les responsables politiques de repenser et de reconceptualiser l’enseignement supérieur selon les critères de politique inclusive. Pour ce faire, ils élaborent des plans stratégiques en vue de l’intégration du genre à tous les niveaux, et plus précisément, de l’offre d’environnements sensibles au genre permettant la pleine participation des filles à l’enseignement supérieur. Pour permettre aux femmes de jouer un rôle actif dans le développement social et scientifique de leurs pays, des mesures spécifiques doivent être mises en œuvre pour corriger la sous-représentation flagrante des femmes dans les établissements d’enseignement supérieur. De telles mesures pourraient inclure la création de programmes de mentorat et de conseil sur le genre pour le soutien et l’accompagnement, l’intégration de la dimension genre dans les curricula pour attirer et retenir les étudiantes et l’offre d’espaces d’apprentissage sûrs aux étudiantes leur permettant de développer un sentiment d’appartenance dans ces cadres institutionnels.

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Pour influencer des politiques éducatives plus inclusives prenant en compte les besoins des filles, le FAWE a l’intention d’utiliser ces éléments de preuves dans son engagement et son dialogue permanents avec les gouvernements, les établissements d’enseignement et les parties prenantes de l’éducation. L’égalité entre les genres est un instrument important pour le développement. Parce que l’éducation est le moteur qui anime le développement, il est essentiel que les femmes disposent d’espaces et de ressources leur permettant de développer tout leur potentiel afin de contribuer à leur développement personnel et celui de leurs sociétés.

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L’égalité entre les genres est un instrument essentiel de la croissance économique. Dans les discours nationaux et internationaux, l’éducation est définie comme le moteur de la croissance qui alimente les économies et le développement durable. Cependant, les écarts entre les genres persistent et les filles continuent d’être en retard sur les garçons en matière d’accès, d’opportunités et de résultats. Ce second volume des Cahiers de recherche du FAWE analyse les questions liées à l’éducation des filles en Afrique et souligne la nécessité d’éliminer les barrières empêchant les filles de développer tout leur potentiel. En mettant en évidence certains obstacles entravant l’éducation des filles, la recherche étudie les questions relatives à la parité sous des angles multiples. En utilisant les modèles d’écoles sensibles à l’enfant/sensibles au genre, elle se concentre sur une sélection d’établissements etleurs efforts pour rendre les cadres d’enseignement formel sensibles au genre. Elle examine dans quelle mesure les écoles sont dotées d’infrastructures appropriées, mais aussi les politiques et les programmes de soutien mis en place pour contribuer à garantir des cadres d’apprentissage sûrs, propices et sensibles au genre. Ce volume des Cahiers de recherche du FAWE met aussi en évidence les pratiques sensibles au genre dans les établissements d’enseignement supérieur.Les universités servent de sites de production des connaissances pour la croissance économique et le développement. Dans quelle mesure ces établissements qui jouent un rôle crucial dans la production, l’accumulation et la transmission des connaissances sont-ils inclusifs aux femmes ? Par son dialogue et son engagement permanents avec les gouvernements, les responsables politiques et les partenaires du développement, le FAWE espère produire des recherches qui augmentent les connaissances encore insuffisantes sur l’éducation des filles et qui appuient les politiques et les efforts de plaidoyer visant à réduire les écarts entre les genres et à contribuer à l’égalité entre les genres dans l’éducation et le développement.

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