LA LETTRE DES ELUS SOCIALISTES ET REPUBLICAINS N°35

Page 1

de France

N° 35 - 17 octobre 2011

Sommaire  Focus Spécial Intercommunalité Carte intercommunale : les petits reculs du gouvernement 22e Convention de l’Adcf SDCI : les élus dénoncent un débat tronqué

 Focus Territoires Santé publique et territoires : un entretien avec Pascal Terrasse

 L’élu de la semaine François Hollande

OFFRE D’EMPLOI Le groupe des élus socialistes et républicains du Conseil Général de Meurthe-et-Moselle recrute : un(e) chargé(e) de mission (catégorie A – attaché territorial ou contractuel) Cette personne sera particulièrement chargée des missions : - Veille de l’actualité politique locale et nationale afin d’en avoir une vision précise et d’en dégager les enjeux pour le groupe. - Réflexion, évaluation autour du projet départemental et des politiques publiques de la collectivité. - Prospective et analyse des enjeux d’un territoire, valorisation du travail des élus dans leur délégation et sur les territoires. - Approfondissement des dossiers politiques. - Préparation des interventions des élus. Profil recherché : - Bonne connaissance de l’environnement politique et du fonctionnement des collectivités territoriales. - Esprit d’analyse et de synthèse, bonnes capacités rédactionnelles. - Capacité d’anticipation. Esprit d’initiative et de propositions. Catégorie A : attaché territorial / contractuel. Poste à pourvoir immédiatement. Merci d’adresser votre candidature avant le 30 octobre à : Monsieur René Mangin, président du Groupe socialiste et Républicain, Conseil Général de Meurthe-et-Moselle, 48 rue du Sergent Blandan - 54000 Nancy E-mail : ptonin@cg54.fr

Unité, mobilisation, victoire

H

ier, les Français qui se reconnaissent dans les valeurs de la gauche ont décidé que François Hollande serait notre candidat à la prochaine élection présidentielle. Ils ont aussi confié à tous les militants, élus locaux, parlementaires et responsables nationaux, une grande responsabilité collective. La participation, trois fois supérieure à nos espérances, contient à elle seule un message clair : nous devons tout mettre en œuvre pour que la gauche gagne en 2012. C’est un véritable devoir de victoire que nous ont donné tous ceux qui sont venus voter à la primaire. Le chemin vers la victoire commence par l’unité. Le sens de la primaire était d’offrir des choix clairs au terme de débats qui ont passionné les Français. Mais sa réussite ne tient que si nous continuons de prouver que ces débats étaient des débats d’idées qui appellent des arbitrages et non des rivalités de personnes. La primaire citoyenne a également démontré l’influence que les élus locaux socialistes et républicains pouvaient avoir dans la mobilisation du "peuple de gauche". Ne l’oublions pas : la mobilisation de tous nos électeurs est la condition du succès de notre candidat. Et l’implication locale personnelle des élus socialistes et républicains est le gage d’une forte mobilisation en avril et mai prochains. La Maison des élus – FNESR, Condorcet, Communes de France – appuiera et relaiera votre engagement dans la campagne présidentielle. Notre site rénové sera en service dans les jours qui viennent, nos groupes de travail thématiques continuent d’apporter des idées et des exemples concrets au Parti socialiste et à l’équipe de François Hollande, nos formations peuvent vous aider à rendre plus efficace votre communication politique… Recueil des parrainages pour notre candidat, vote massif lors du Congrès des maires, appui aux campagnes pour l’inscription sur les listes électorales, grand rassemblement des élus locaux de gauche autour de François Hollande… les événements ne manqueront pas dans les 188 jours qui nous séparent du premier tour ! Je sais que je peux compter sur vous. Amitiés socialistes et républicaines Marylise Lebranchu, présidente de la Fédération nationale des élus socialistes et républicains

La lettre électronique de Communes de France et de la Fédération nationale des élus socialistes et républicains 8 bis, rue de Solférino - 75007 Paris • Téléphone 01 42 81 41 36 • Fax 01 48 74 00 78 • redaction@mde-communes-de-france.fr


FOCUS ďƒ°ďƒ°ďƒ°ďƒ°ďƒ°

SPÉCIAL INTERCOMMUNALITÉ

Carte intercommunale : les petits reculs du gouvernement

Après le discours de François Fillon le 7 octobre, entretien avec Philippe Baumel, vice-prÊsident de la FNESR, maire du Breuil (Saône-et-Loire) et vice-prÊsident du Conseil rÊgional de Bourgogne

Communes de France. Le Premier ministre a voulu s’adresser aux ĂŠlus locaux dans son discours du 7 octobre. Il a notamment ĂŠvoquĂŠ le calendrier de travail des commissions dĂŠpartementales de coopĂŠration intercommunale. Que fautil en retenir ? Philippe Baumel. Incontestablement, François Fillon a exprimĂŠ son renoncement Ă faire passer aux forceps un redĂŠcoupage des intercommunalitĂŠs avant la fin de l’annĂŠe 2011, comme prĂŠvu pourtant dans le cadre de la loi dite de rĂŠforme territoriale. Contre toute attente – mais il est vrai que la perte du SĂŠnat par l’UMP l’a peut ĂŞtre aidĂŠ Ă rĂŠflĂŠchir – il annonce un rejet des contraintes de calendrier et la rĂŠception par les prĂŠfets de nouvelles instructions ÂŤ pour mieux faire apprĂŠhender une conception partagĂŠe de l’intĂŠrĂŞt gĂŠnĂŠral Âť. Dans ce contexte, comment les ĂŠlus de gauche peuvent ils se positionner ? Comme le prĂŠconise le nouveau prĂŠsident du SĂŠnat Jean-Pierre Bel, il nous faut impĂŠrativement obtenir de chacun des prĂŠfets non seulement un calendrier beaucoup plus relâchĂŠ, après la fin du 1er semestre 2012, mais aussi une nouvelle mĂŠthode de concertation et de dĂŠbats qui permettra Ă chaque commune de l’intercommunalitĂŠ de pouvoir ĂŠvaluer en connaissance de cause son entrĂŠe ou sa sortie de tel ou tel groupement.

Le fait que le Premier ministre renonce Ă la marche forcĂŠe de doit pas nous empĂŞcher d’exiger un vĂŠritable respect des communes et de leurs ĂŠlus Ă travers une mĂŠthode de travail plus transparente. Le Premier ministre a aussi abordĂŠ la question du redĂŠcoupage cantonal, imposĂŠ par la loi votĂŠe par la droite prĂŠvoyant la crĂŠation du "conseiller territorial". Qu’en avez-vous retenu ? LĂ encore, le Premier ministre recule. Jusqu’au 7 octobre, il nous disait qu’il voulait que cette carte soit fixĂŠe par dĂŠcret au plus tard dĂŠbut dĂŠcembre 2011. Depuis cette date, soit 6 jours après la bascule du SĂŠnat, il a changĂŠ de braquet et explique que ÂŤ le gouvernement achèvera cette tâche avant le 1er mars 2013 Âť. Et encore ! A condition d’avoir reçu ÂŤ un avis des 96 dĂŠpartements concernĂŠs Âť. Autant dire que c’est un enterrement de première classe que François Fillon vient d’orchestrer pour un redĂŠcoupage des cantons dont personne ne conteste la nĂŠcessitĂŠ mais qui, lĂ aussi, doit se faire en toute transparence et dialogue avec les associations d’Êlus concernĂŠs – au premier chef l’AssemblĂŠe des dĂŠpartements de France – ainsi que dans un dialogue avec les forces politiques du pays. En la matière, les socialistes sont clairs. Nous abrogerons cette loi de crĂŠation du conseiller territorial, mĂŞme s’il parait utile de redĂŠfinir les compĂŠtences des conseils gĂŠnĂŠraux et des conseils rĂŠgionaux. Une vĂŠritable rĂŠforme institutionnelle est attendue aujourd’hui par nos concitoyens. Mais elle ne peut ĂŞtre prise par le petit bout de la lorgnette, c’est-Ă -dire un simple problème de cartographie politique pour s’assurer un rĂŠsultat partisan. Tout au contraire, il nous faudra, très vite après la prĂŠsidentielle, faire voter un acte 3 de la dĂŠcentralisation qui sera bâti sur la mise en Ĺ“uvre de la paritĂŠ, du respect de la diversitĂŠ et de la clarification des compĂŠtences. Propos recueillis par Philippe Foussier

$PNNVOFT MB MFUUSF OĂš


FOCUS ďƒ°ďƒ°ďƒ°ďƒ°ďƒ°

SPÉCIAL INTERCOMMUNALITÉ

IntercommunalitÊ : de l’huile à tous les rouages ! La 22e Convention de l’intercommunalitÊ, organisÊe par l’AssemblÊe des CommunautÊs de France (AdCF) du 13 au 14 octobre à Rennes, marquera le devenir de la rÊforme territoriale‌ Reste à savoir dans quel sens !

Daniel Delaveau a ÊtÊ reconduit à la prÊsidence de l’AssemblÊe des CommunautÊs de France

E

ffet des ĂŠlections sĂŠnatoriales, l’heure est aux assouplissements, aux dĂŠlais, aux ajustements, quitte Ă brouiller, Ă compliquer, Ă reporter la finition de l’intercommunalitĂŠ. Manifestement les prĂŠfets vont devoir changer leurs lunettes, eux qui n’avaient pas vu les mĂŠandres et les subtilitĂŠs qui sont contenus dans la loi. Qu’on en juge, selon Philippe Richert, ministre chargĂŠ des CollectivitĂŠs territoriales : - le seuil minimum de 5 000 habitants pour les communautĂŠs de communes (hors zone de montagne) n’est pas rigide, ÂŤ c’est un objectif, pas un impĂŠratif Âť ; - le seuil de 500 habitants pour le scrutin de liste, ÂŤ le gouvernement s’en remettra Ă la sagesse du Parlement pour relever ce seuil Âť ; - la date du 31 dĂŠcembre 2011 pour boucler les schĂŠmas dĂŠpartementaux de coopĂŠration intercommunale ÂŤ n’est pas un couperet, lĂ oĂš il n’y a pas consensus Âť ; - si des petites communautĂŠs Ă gros portefeuille de compĂŠtences rejoignent des communautĂŠs plus grandes mais moins intĂŠgrĂŠes, elles pourront recrĂŠer un SIVOM pour leurs compĂŠtences extra communautaires orphelines ; - la composition actuelle des exĂŠcutifs des intercommunalitĂŠs pourraient ĂŞtre conservĂŠs jusqu’en mars 2014, ÂŤ si nous trouvons un vecteur lĂŠgislatif Âť ; - le projet de loi n°61 sur la dĂŠmocratie attendra le deuxième semestre 2012 ; - des mesures vont ĂŞtre prises pour revaloriser le statut de l’encadrement supĂŠrieur des cadres territoriaux.

L’Êchelle des solutions Certaines de ces annonces sont rĂŠalistes et ĂŠtaient attendues par l’AdCF, d’autres marquent un recul, comme le relèvement du seuil ĂŠlectoral pour le scrutin de liste Ă 1 000 voire 1 500 habitants

qui nuira Ă la paritĂŠ hommes/femmes et Ă la reprĂŠsentation des minoritĂŠs. En ĂŠvoquant des intercommunalitĂŠs ÂŤ Ă gĂŠomĂŠtrie variable Âť, des ÂŤ intĂŠgrations Ă la carte Âť, des schĂŠmas de l’intercommunalitĂŠ ÂŤ qui peuvent rester incomplets dans un temps Âť, les ĂŠlus intercommunaux les plus engagĂŠs s’interrogent sur une nouvelle couche de complexitĂŠ, sur la remise en cause de leurs travail pĂŠdagogique Ă l’Êgard des communes isolĂŠes, et l’impression de voir privilĂŠgier le chiffre et les pĂŠrimètres, plutĂ´t que les compĂŠtences et le degrĂŠ d’intĂŠgration. D’autres propositions d’adaptations sont ĂŠvoquĂŠes, par exemple pour avancer la clause de revoyure dès 2015 (et non 2018), pour prĂŠserver les syndicats de ramassage scolaire ou des eaux, pour rĂŠunir autant que de besoin les Commissions dĂŠpartementales de coopĂŠration intercommunale pour donner une chance de dĂŠboucher sur un schĂŠma dĂŠpartemental consensuel et respecter pleinement le pouvoir d’amendement Ă la copie des prĂŠfets, tout en refusant ÂŤ un moratoire sine die Âť. Les 1 800 participants de la convention de l’AdCF ont rĂŠaffirmĂŠ leur volontĂŠ ÂŤ d’amplifier l’organisation territoriale du pays et d’être l’Êchelle des solutions Âť. Mais ces annonces et le contexte d’actualitĂŠ de la crise des finances locales leur donne l’impression de naviguer ÂŤ dans un ocĂŠan d’incertitudes Âť. Seule certitude, Ă l’issue de l’assemblĂŠe gĂŠnĂŠrale statutaire, le bureau et le conseil d’administration de l’AdCF, prĂŠsidĂŠs par Daniel Delaveau, maire de Rennes et prĂŠsident de Rennes MĂŠtropole, a ĂŠtĂŠ reconduit Ă l’unanimitĂŠ. François Descamps OĂš $PNNVOFT MB MFUUSF


FOCUS ďƒ°ďƒ°ďƒ°ďƒ°ďƒ°

SPÉCIAL INTERCOMMUNALITÉ

SDCI : les ĂŠlus dĂŠnoncent un dĂŠbat tronquĂŠ La conquĂŞte du SĂŠnat par la gauche fait un victime : le projet de refonte et d’achèvement hâtif de la carte de l’intercommunalitĂŠ. François Fillon a en effet commencĂŠ Ă rĂŠorienter sa stratĂŠgie le vendredi 7 octobre en annonçant un assouplissement du calendrier

Philippe Madrelle, sĂŠnateur et prĂŠsident du Conseil gĂŠnĂŠral de la Gironde

$PNNVOFT MB MFUUSF OĂš

Q

uelques jours plus tĂ´t en effet, Philippe Madrelle, sĂŠnateur de la Gironde et prĂŠsident du Conseil gĂŠnĂŠral, adressait au Premier ministre un courrier dans lequel il demandait d’interrompre sine die le projet de schĂŠma dĂŠpartemental de coopĂŠration intercommunale de la Gironde. En effet, seulement 7% des collectivitĂŠs locales de la Gironde se sont prononcĂŠes en faveur des propositions formulĂŠes par les services de l’Etat, dĂŠmontrant que, dans ce dĂŠpartement au moins, le calendrier est extrĂŞmement resserrĂŠ et le dĂŠbat tronquĂŠ. Les dĂŠbats sur l’avenir des schĂŠmas dĂŠpartementaux de coopĂŠration intercommunale sont encore officiellement en cours et, s’ils sont interrompus, les ĂŠlus ressentiront Ă la fois un goĂťt d’inachevĂŠ et probablement la dĂŠception d’avoir vu un projet inĂŠvitable ĂŞtre successivement baclĂŠ puis abandonnĂŠ en ayant mis des ĂŠlus locaux au travail sur cette question pour les plonger ensuite dans l’embarras. Les ĂŠlus socialistes et rĂŠpublicains membres de commissions dĂŠpartementales de coopĂŠration intercommunale (CDCI) affrontent partout une machine politiquement efficace et juridiquement relativement inattaquable. Le temps laissĂŠ au dĂŠbat a ĂŠtĂŠ extrĂŞmement court. Si le principe d’achèvement de la carte de l’intercommunalitĂŠ n’a jamais ĂŠtĂŠ remis en cause par la FNESR, si l’idĂŠe d’un redimensionnement des intercommunalitĂŠs rĂŠpond Ă une logique d’efficacitĂŠ, il faut bien constater que les dĂŠlais impartis ont ĂŠtĂŠ dĂŠlibĂŠrĂŠment raccourcis de manière Ă avancer Ă marche forcĂŠe vers des objectifs savamment prĂŠdĂŠterminĂŠs. Les cartes ĂŠlaborĂŠes par les prĂŠfets ont donc ĂŠtĂŠ transmises aux maires et prĂŠsidents d’EPCI dans les dĂŠlais lĂŠgaux mais en ne permettant pas – pĂŠriode estivale oblige – au dĂŠbat civique de se dĂŠvelopper pleinement dans les communes et inter-

communalitĂŠs. Astuce, juridiquement assurĂŠe mais surtout politiquement habile, puisque lorsqu’un maire est ĂŠgalement prĂŠsident d’un EPCI, la carte lui est souvent adressĂŠe en un seul exemplaire en tant que maire, Ă charge pour lui de la diffuser au sein de l’intercommunalitĂŠ qu’il prĂŠside. Cette mĂŠthode que l’on aurait pu penser pĂŠrilleuse pour la validitĂŠ du processus d’Êlaboration du SDCI semble ĂŞtre assurĂŠe juridiquement et a ainsi permis de hâter un peu plus le dĂŠbat. En revanche, si le projet modifiĂŠ n’Êtait pas transmis aux assemblĂŠes avant d’être soumis de nouveau Ă la CDCI, il est plus que probable que le projet serait entachĂŠ d’irrĂŠgularitĂŠ. Il convient donc d’être vigilant sur la seconde ĂŠtape de la modification du pĂŠrimètre des intercommunalitĂŠs. Le fait que la carte ne puisse ĂŞtre modifiĂŠe que par une majoritĂŠ des 2/3 implique que l’on mette au prĂŠalable d’accord les ĂŠlus socialistes et rĂŠpublicains sur un canevas de travail suffisamment cohĂŠrent pour dĂŠfaire la stratĂŠgie gouvernementale : semer la discorde parmi les collectivitĂŠs socialistes. De fait, les prĂŠfets disposent d’une grande latitude pour fusionner des intercommunalitĂŠs. Evidemment, bien souvent, les cartes proposĂŠes par les prĂŠfets reflètent des prĂŠoccupations d’intĂŠrĂŞt parfois quelque peu stratĂŠgiques au regard des situations locales. Les ĂŠlus socialistes et rĂŠpublicains s’efforcent au sein des UDESR de forger des compromis destinĂŠs Ă donner une vision progressiste de l’Êvolution de l’intercommunalitĂŠ. Toujours est-il que, battu aux sĂŠnatoriales, le gouvernement est tentĂŠ de ne pas poursuivre une expĂŠrimentation aussi hasardeuse. En fait si l’abandon prĂŠvisible de cette dĂŠmarche se prĂŠcise, la politique gouvernementale en matière de coopĂŠration intercommunale pourra se rĂŠsumer d’un lapidaire : ÂŤ Tout ça pour ça ! Âť GaĂŤl Brustier


FOCUS ďƒ°ďƒ°ďƒ°ďƒ°ďƒ°

TERRITOIRES

SantĂŠ publique et territoires : un entretien avec Pascal Terrasse

Entretien avec Pascal Terrasse, prĂŠsident du Conseil gĂŠnĂŠral et dĂŠputĂŠ de l’Ardèche, sur les enjeux de la dĂŠsertification, les risques d’inĂŠgalitĂŠs et les atouts de la proximitĂŠ en matière de santĂŠ publique

Communes de France. Dans son dernier decine de première intention, notamment rapport, la Cour des comptes pointe pour les plus modestes. d’importantes disparitĂŠs territoriales Il existe, bien-sĂťr, des leviers d’action publien matière de dĂŠmographie mĂŠdicale. que, Ă condition que des choix clairs et resLa faute Ă qui ? ponsables soient faits. On doit, par exemple, Pascal Terrasse. Il n’y a jamais eu autant crĂŠer des maisons polyvalentes de santĂŠ de mĂŠdecins et de personnels de santĂŠ en et de soins dont les mĂŠdecins pourraient France. Lorsqu’on parle de disparitĂŠs, il ne ĂŞtre salariĂŠs tout en exerçant leur profess’agit donc pas Ă proprement parler de sion aux cĂ´tĂŠs de personnels soignants et problème de "dĂŠmographie" mĂŠdicale. En du secteur paramĂŠdical et social. Dans ces revanche, on constate que ce personnel maisons pourraient par exemple conversoignant est très mal rĂŠparti sur notre ter- ger des personnels salariĂŠs des CCAS ou ritoire et les solutions apportĂŠes n’ont fait des conseils gĂŠnĂŠraux, des personnels rĂŠqu’aggraver les faits. Plus que de dĂŠmogra- munĂŠrĂŠs en partie ou en totalitĂŠ au forfait, phie, il faut donc parler d’un problème de et dont l’action serait concertĂŠe et menĂŠe dĂŠsertification mĂŠdicale. Il existe en effet de manière complĂŠmentaire. Nous avons des "zones blanches", notamment dans les besoin d’un système de prise en charge territoires ruraux et les banlieues sensibles. plus cohĂŠrent et d’un suivi individualisĂŠ Et, Ă l’opposĂŠ, une concentration très forte des patients par une mĂŠdecine de proxide professionnels dans les centres urbains, mitĂŠ renouvelĂŠe. qui pour beaucoup pratiquent les dĂŠpassements d’honoraiQuel bilan tirez-vous res conventionnĂŠs. de la loi Bachelot, ÂŤ Nous avons besoin d’un Ceux-ci contribuent dite HPST ? de la mĂŞme manière système de prise en charge Il est clairement dĂŠceque les dĂŠserts mĂŠplus cohĂŠrent et d’un suivi vant : ce texte aurait dĂť dicaux Ă aggraver les individualisĂŠ des patients ĂŞtre une grande loi de inĂŠgalitĂŠs d’accès aux santĂŠ et d’organisation soins. Les modes de par une mĂŠdecine territoriale. Mais, il s’est rĂŠgulation du nomde proximitĂŠ renouvelĂŠe Âť rĂŠvĂŠlĂŠ très en-deçà des bre de professionattentes. Les agences nels formĂŠs et des rĂŠgionales de santĂŠ honoraires des pro(ARS) ne sont aujourd’hui pas en charge fessionnels de santĂŠ, et les systèmes d’inde la gestion du risque. Elles sont cantoncitations Ă l’installation qui ont ĂŠtĂŠ mis en nĂŠes Ă un rĂ´le de rĂŠgulateur budgĂŠtaire place ces dernières annĂŠes, ont contribuĂŠ Ă qui ne leur laisse pas la moindre marge ces dĂŠsĂŠquilibres, ou n’ont Ă tout le moins de manĹ“uvre pour amĂŠliorer l’accès aux pas rĂŠussi Ă renverser des tendances "nasoins et maĂŽtriser les dĂŠrives dans les dĂŠturelles". penses de santĂŠ. Il faudra donc envisager, dans le cadre du De quels leviers l’action publique dispotroisième acte de la dĂŠcentralisation que se-t-elle pour lutter contre ce flĂŠau ? propose le Parti socialiste, le transfert des Ce dĂŠsĂŠquilibre gĂŠnĂŠralisĂŠ va poser des ressources et des charges liĂŠes Ă l’hĂ´pital. questions dans les secteurs oĂš les besoins Je pense en particulier Ă la gestion de l’imsont particulièrement importants : je pense mobilier et du personnel non soignant. aux zones rurales, et aux zones dites "sensibles", oĂš les questions de santĂŠ publique Propos recueillis par Bruno Tranchant sont posĂŠes avec acuitĂŠ. C’est lĂ qu’il faudrait des mĂŠdecins gĂŠnĂŠralistes, tout en dĂŠveloppant les dispositifs de prĂŠvention et en permettant un meilleur accès Ă la mĂŠOĂš $PNNVOFT MB MFUUSF


L’ÉLU DE LA SEMAINE 

FRANÇOIS HOLLANDE

François Hollande : « Restaurer la confiance entre l’Etat et les collectivités » Communes de France. Si chacun à l’égal accès de nos concitoyens aux gauche s’accorde sur la nécessité de services publics locaux. Les ressourrelancer la décentralisation, quelle ces issues de la fiscalité, ainsi que les serait selon vous la mesure priorifinancements que l’État continuera à taire à mettre en application dans les attribuer aux collectivités territoriales, premiers mois suivant l’élection prédevront être répartis plus équitablesidentielle ? ment entre les collectivités. Il n’est pas normal que les collectivités doivent François Hollande. La première priorité calibrer le service rendu au citoyen en est de restaurer la confiance entre l’État et fonction de leur potentiel fiscal et que les collectivités. J’ai la conviction que les les territoires pauvres ne puissent discollectivités sont une solution aux diffiposer de services publics essentiels, cultés auxquelles notre pays est confronde places en crèche, d’une bibliothèté, plutôt qu’un problème. Leur action de que, de transports urbains réguliers, proximité et leur ancrage démocratique de rues propres et bien éclairées, d’un sont en effet des atouts déterminants peu d’animation pour la jeunesse et pour mener les actions nécessaires à noles anciens, non par choix politique tre redressement collectif. Candidat élu lors des Primaires du 16 octomais par manque de potentiel fiscal. C’est pour cela que je juge prioritaire bre pour l’élection présidentielle, François l’adoption d’un nouvel acte de décentra- Hollande est député et président du Conseil La droite a substitué la compétilisation venant renforcer les libertés et les général de la Corrèze tion entre les territoires à l’améresponsabilités locales. Cette réforme esnagement et au développement du sentielle devra être conduite en association étroite avec les élus territoire. Que doit faire la gauche dans ce domaine ? pour ne pas répéter les erreurs de la majorité actuelle. Certaines réformes récentes, tout particulièrement la création Sur le fond, il m’apparaît particulièrement nécessaire de ren- programmée du nouveau conseiller territorial, devront être forcer et de clarifier les compétences des collectivités territo- supprimées tant elles sont porteuses de confusion et d’ineffiriales. La Région devra par exemple devenir l’acteur majeur du cacité dans l’action publique. Au-delà, c’est par le contrat que développement économique en exerçant des responsabilités la gauche pourra restaurer une ambition partagée d’aménageaccrues en matière d’emploi et de formation mais aussi de ment et de développement du territoire. Ces documents seront transports. le support d’une volonté stratégique commune à l’État, garant de la cohésion nationale, et aux collectivités, responsables de la conduite de nombreuses politiques publiques dans nos terLa situation financière des collectivités locales est, au ritoires. Enfin, les communes, échelon de proximité essentiel à mieux, considérée comme préoccupante. Quelles disposinotre vie démocratique, devront avoir les moyens de réaliser tions faudrait-il prendre pour enrayer cette évolution ? effectivement les politiques publiques de proximité. L’une des Le financement de la décentralisation est aujourd’hui à bout de solutions pour cela est de renforcer encore la légitimité et les souffle et doit être remis à plat. Je crois qu’il faut avoir une triple capacités d’actions des intercommunalités afin qu’elles puisambition de lisibilité, d’équité et de solidarité. Il faut tout d’abord sent, effectivement, mener des actions ambitieuses et réduire de nouvelles ressources fiscales, sous la forme de parts addi- les inégalités communales. tionnelles à des impôts d’État, pour financer la décentralisation. Propos recueillis par Philippe Foussier Cette réforme, qui sera une composante de la réforme fiscale que j’appelle de mes vœux, rendra plus équitable notre fiscalité locale et permettra de redonner du sens au lien nécessaire entre les contribuables et les élus locaux. Il faut ensuite permettre * Entretien paru dans notre Lettre "Spécial Primaires" du 30 septembre

Gérant - Directeur de la publication : Serge Bossini - Rédacteur en chef : Philippe Foussier - Conception réalisation : Brigitte Bossu ont participé à ce numéro : Gaël Brustier - François Descamps - Bruno Tranchant - Photos : Pascal Lebrun & D.R


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.