Recherches et applications - FDLM

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Rédacteur en chef

N.N

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Directeur de la publication

Cynthia Eid – FIPF

Fédération internationale des professeurs de français

RECHERCHES ET APPLICATIONS

SEJER

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Directrice de la publication :

Catherine Lucet

Mél : fdlm@fdlm.org

http : //www.fdlm.org

© CLE International 2025

La reproduction même partielle des articles parus dans ce numéro est strictement interdite, sauf accord préalable.

ISBN : 9782090395792

Recherches et applications

N° 77

JANVIER 2025 PRIX DU NUMÉRO 27,90 €

Recherches sur la parole en FLE/FLS : un miroir sur l’identité

Coordonné par Grégory Miras

Comité de rédaction

Fatima Chnane-Davin (Présidente du conseil scientifique)

Francine Cicurel (Présidente du conseil scientifique)

Jean-Pierre Cuq (Président du conseil scientifique)

Cynthia Eid (Directeur de la publication)

N.N (Rédacteur en chef)

Conseil scientifique

Margaret Bento (Université Paris Descartes, France) ; Patrick Chardenet (Agence Universitaire de la Francophonie, Brésil) ; Fatima Chnane-Davin (Aix-Marseille Université, France) ; Francine Cicurel (Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, France) ; Jean-Pierre Cuq (Université de Nice, France) ; Jean-Marc Defays (Université de Liège, Belgique) ; Enrica Galazzi-Matasci (Université Catholique de Milan, Italie) ; Eliane Lousada (Universidade de São Paulo, Brésil) ; Abdelouahad Mabrour, (Université Chouaïb Doukkali El Jadida, Maroc) ; Samir Marzouki (Université de la Manouba, Tunisie) ; Jean Noriyuki Nishiyama (Université de Kyoto, Japon) ; Valérie Spaëth, (Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle, France) ; Monica Vlad (Universitatea Ovidius din Constanta, Roumanie) ; Tatiana Zagryazkina (Université d’État de Moscou Lomonossov, Russie)

Comité de lecture

Babault Sophie, Université de Lille, France ; Barthelemy Fabrice, Université Paris 3 sorbonne nouvelle, Paris, France ; Bel David, Université Normale du Sud (Chine) ; Bigot Violaine, Université Paris 3 sorbonne nouvelle, France ; Carrasco Perea Encarnación, Universitat de Barcelona (Espagne) ; Causa Mariella, Université Montaigne, Bordeaux, France ; Coffey Simon, King’s College London (Royaume Uni) ; Debono Marc, Université de Tours, France ; De Pietro Jean-François, Institut de Recherche et de documentation pédagogique, Neuchâtel (Suisse) ; Develotte Christine, Institut français de l’Éducation - ENS de Lyon, France ; El Madhi Adil, Université Ibn Zohr, Agadir,Maroc ; Ferreira-Meyers Karen, University of Swaziland (Swaziland) ; Gonçalves Carolina, Escola Superior de Educação de Lisboa (Portugal) ; Gutu Ioan, Université d’État de Moldavie, Chisinau (Moldavie) ; Jamet Marie Christine, Université Ca Foscari, Venise (Italie) ; Klett Estela, Universidad de Buenos Aires (Argentine) ; Kouame Koia Jean-Martial, Université de Cocody-Abidjan (Côte d’Ivoire) ; Laurens Véronique, Université Paris 3 sorbonne nouvelle, Paris, France ; Leclere Malory, Université Paris 3 sorbonne nouvelle, Paris, France ; Le Ferrec Laurence, Université Descartes, Paris, France ; Liddicoat Tony, University of Warwick, Coventry (Royaume Uni) ; Ly Thierno, IFEE, Université Cheikh Anta Diop, Dakar (Sénégal) ; Mangiante Jean-Marc, Université d’Artois, Arras, France ; Meunier Deborah, Université de Liège (Belgique) ; Mendonça Dias Catherine, Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle, Paris, France ; Pambou Jean-Aimé, École Normale Supérieure Libreville (Gabon) ; Parpette Chantal, Université Lumière Lyon 2, France ; Paternostro Roberto, Université de Genève (Suisse) ; Picardo Enrica, Université de Toronto (Canada) ; Rispail Marielle, Université Jean-Monnet de Saint-Etienne, France ; Rivière Véronique, Université de Lyon 2, France ; Ruggia Simona, Université Côte d’Azur, Nice, France ; Sadiqui Mina, École Normale Supérieure, Université My Ismail, Meknès,Maroc ; Sahnoun Mokhtar, Université La Manouba, Tunis (Tunisie) ; Silva Ochoa Haydée, Universidad Nacional Autónoma de Mexico (Mexique) ; Suso Lopez Javier, Universidad de Granada (Espagne) ; Takagaki Yumi, Université préfectorale d’Osaka (Japon) ; Thiam Ousseynou, Université Cheikh Anta Diop, Dakar (Sénégal).

Comité varia

Margaret Bento ; Valérie Spaëth

Cher lecteur de la revue

Recherches et Applications : Le français dans le monde

Que vous soyez étudiant ou doctorant en didactique du français langue étrangère, enseignant exerçant dans l’enseignement primaire, secondaire ou universitaire, dans un pays francophone ou non, directeur de recherche à l’université, tous soucieux de suivre les évolutions de l’enseignement du français à l’échelle du monde, pour vous la revue Recherches et Applications : Le français dans le monde est un repère professionnel incontournable. La revue vous remercie de votre fidélité et de la crédibilité scientifique que vous lui accordez.

Comme elle l’a montré lors de ses derniers congrès, la Fédération Internationale des Professeurs de Français est sensible aux évolutions qui font de l’espace de la connaissance un monde plurilingue, multipolaire, globalisé, mais aussi contextualisé. La revue souhaite y maintenir sa position d’acteur de premier plan, en anticipant, en conduisant ou en accompagnant ces évolutions tout en affirmant la contribution de la langue française à cet espace mondialisé. Pour garantir cette fonction d’excellence, le Comité scientifique de la revue affirme une politique de publication qui reste fidèle à son objectif de toujours : animer le débat en didactique des langues et des cultures, au service d’une diffusion de qualité de la langue française dans le monde, en étant plus que jamais à l’écoute des innovations et des mutations. Dans cette perspective, la revue s’est progressivement ouverte aux équipes de recherche qui contribuent à cet objectif, en leur confiant la coordination d’un numéro, où qu’elles travaillent dans le monde 1 .

Les règles déontologiques du champ scientifique sont rigoureusement respectées : les articles de la revue sont soumis à une double évaluation anonyme prise en charge par un comité de lecture formé de chercheurs reconnus, qui veille à ce que chaque

texte s’appuie sur des données de première main, une originalité des analyses, et des références précises des travaux utilisés.

Par ailleurs, la revue a modifié la structure éditoriale jusque-là en usage, pour témoigner de la vigueur des travaux des jeunes chercheurs en y incluant dans sa rubrique

Varia des articles hors de la thématique générale du numéro, sélectionnés pour leur intérêt et leur qualité 2

Enfin, Recherches et Applications est engagée dans un processus de collaborations avec des revues du domaine publiées dans d’autres pays pour des échanges d’articles, permettant d’étendre ainsi les espaces d’accès et la circulation des savoirs (Revue canadienne des langues vivantes/The Canadian Modern Language Review).

Pour le Comité scientifique, les co-présidents

Jean-Pierre Cuq (Université de Nice Sophia Antipolis) jeanpicuq@gmail.com Fati Chnane-Davin (Aix-Marseille Université) fatima.davin@univ-amu.fr Francine Cicurel (Université Sorbonne Nouvelle) francine.cicurel@univ-paris3.fr

1. Pour soumettre une proposition de numéro, voir site fdlm : http ://www.fdlm.org, voir http ://fipf.org/publications/recherchesapplications (Instructions aux coordinateurs)

2. Pour soumettre un article, en tant que jeune chercheur (en fin de thèse ou venant de terminer la thèse de doctorat), voir http ://fipf.org/publications/ recherches-applications (Appel permanent à publication d’articles dans le cadre de la diffusion de recherches menées par de jeunes chercheurs).

Recherches sur la parole en FLE/FLS : un miroir sur l’identité

Présentation

GréGory Mir As

La didactique de la prononciation à la loupe de l’épistémologie

« Diversité », « oralité », « mélanges » ... L’enseignement de la prononciation en FLE à l’ère du postmodernisme

Dans cet article, je propose de comprendre les dernières tendances en didactique des langues, qui promeuvent la « diversité », l’« oralité » ou les « mélanges », comme s’inscrivant dans le paradigme post-moderniste. Cette analyse permet d’expliquer l’apparent paradoxe entre la centration sur l’oralité et le peu de place accordé à l’enseignement de la prononciation, ainsi que de formuler une hypothèse sur le développement futur de cet enseignement, qui explique le désintérêt pour la variation.

В этой статье я предлагаю рассмотреть последние тенденции в методике преподавания иностранных языков, которые продвигают « разнообразие », « устную речь » или « смешение », как часть постмодернистской парадигмы. Этот анализ

позволяет не только объяснить кажущийся парадокс

между ориентацией на устную речь и недостаточным

вниманием к обучению произношению, но и сформулировать гипотезу о будущем развитии этого

Que faire de la diversité de la prononciation en didactique du FLE ?

JéréMi sAuvAGe

Les rapports entre normes et variations sur la prononciation d’une langue constituent un objet de pensée depuis très longtemps désormais, y compris en Didactique des langues étrangères. Dans cet article, nous proposerons dans un premier temps un retour sur les prises en compte des variations articulatoires en français. Puis dans un second temps, nous nous interrogerons sur la nécessité de se saisir en Didactique du FLE

de cette complexité linguistique caractéristique de ce qu’est une langue vivante.

The relationship between norms and variations in the pronunciation of a language has been a subject of study for a very long time now, including in foreign language didactics. In this article, we begin by looking back at how articulatory variations have been taken into account in French. Secondly, we will examine the need to address this linguistic complexity, which is characteristic of a living language, in EFL didactics.

De

la

phonétique appliquée à la didactique de la prononciation contextualisée

Des questions en interaction : les carences de la didactique de l’oral en FLE

Anouchk A Divoux

Cet article cherche à comparer les descriptions grammaticales des manuels de FLE et les analyses de la linguistique interactionnelle. Par l’étude des questions dans un corpus d’interactions en réunions de travail, il met en lumière des lacunes dans la description de ce phénomène à l’oral. Nous présenterons deux formes de questions peu décrites. Enfin, nous exposerons un exemple d’exploitation didactique de ces analyses, soulevant la nécessité de descriptions accessibles des phénomènes oraux.

This article aims at comparing grammatical descriptions in FFL textbooks and analyses carried out on corpora. Using the example of questions and based on analyses drawn from a corpus of business meetings, we will show the existing gaps in the description of this speech act. We will introduce two forms of question not often described. We will then present an example of didactic use of our analyses, raising the need for accessible descriptions of the various oral phenomena.

Intelligibilité, compréhensibilité, accent étranger et prononciation en FLE : évaluateurs natifs vs non natifs

FAbián sAntiAGo, MA xiM bArkov, cor Alie vincent

Nous discutons des résultats de deux tests de perception menés auprès des 61 juges francophones natifs et non natifs. Nos résultats montrent que les juges hispanophones évaluent mieux l’intelligibilité et la compréhensibilité des énoncés produits par d’autres hispanophones en français. L’accent étranger est une dimension dissociée de l’intelligibilité, la compréhensibilité et de la prononciation en général. La prononciation a des effets marginaux dans l’intelligibilité et la compréhensibilité.

Presentamos los resultados de dos tests de percepción realizados con 61 jueces francófonos nativos y no nativos. Los resultados demuestran que los jueces hispanohablantes evalúan mejor la inteligibilidad y la comprensibilidad des los enunciados producidos por otros hispanohablantes en francés. La percepción del acento extranjero es una dimensión disociada de la inteligibilidad y de la pronunciación en general. La pronunciación tiene efectos marginales en la inteligibilidad y la comprensibilidad.

Pour une didactique de la prononciation du français adaptée aux hispanophones : le cas des apprenants de français au Honduras

cArlos solórzAno

Les recherches sur la didactique de la prononciation FLE pour hispanophones sont relativement restreintes en dehors d’une vision homogénéisante. Nous avons ainsi entrepris une étude visant à dresser un inventaire des difficultés de prononciation rencontrées par les apprenants de français au Honduras. Notre objectif est de penser une méthodologie contextualisée pour élaborer des programmes d’enseignement de la prononciation, fondée sur l’approche actionnelle.

Los estudios sobre didáctica de la pronunciación del francés lengua extranjera (FLE) para hispanohablantes son relativamente limitados, más allá de una visión homogeneizadora. Por ello, nuestro propósito es realizar un inventario de las dificultades de pronunciación que enfrentan los estudiantes de francés en Honduras. Nuestro objetivo es desarrollar una metodología contextualizada para la elaboración de programas de enseñanza de la pronunciación, basados en el enfoque orientado a la acción.

Enseignement de la prononciation du français en Chine : une analyse de manuels yi yin, Junk Ai li

De nombreux apprenants chinois du FLE se trouvent dans une confusion perceptive car les francophones ne parlent pas comme dans les manuels de FLE utilisés en Chine. Pour repérer ces écarts, nous avons analysé quatre manuels de FLE : deux rédigés en France et deux en Chine. Les résultats montrent que ces ressources pédagogiques ne reflètent pas complètement le français parlé aujourd’hui, ce qui permettra de repenser l’équilibre entre la norme pédagogique et l’usage réel dans l’enseignement.

Many Chinese learners of French as a Foreign Language (FLE) experience perceptive confusion because Francophones do not speak as presented in the FLE textbooks used in China. To identify these differences, we analyzed four FLE textbooks: two written in France and two in China. The results show that these pedagogical resources do not fully reflect the French spoken today, prompting a reconsideration of the balance between pedagogical norms and actual language use in teaching practices.

Agentivité, identité et diversité en didactique de la prononciation

« C’est comme un ornement » : discours autour de l’accent en FLE dans l’espace hispanophone

k ArinA ibáñez, GréGory Mir As

Si la dimension socialement construite de l’accent est maintenant bien reconnue, son impact sur les représentations, et donc la manière dont les individus qui les produisent sont considérés, reste une réalité mesurable. Cette réalité est complexe dans le cas du français en milieu hétéroglotte face aux différentes idéologies linguistiques qui coexistent en terrain translingue et transculturel. Le projet PROSOPHON questionne ces réalités dans le cadre professionnel. El acento, una construcción socialmente reconocida, influye en las representaciones de quienes lo producen. En el caso del francés en un entorno heteroglósico, esta influencia se entrelaza con ideologías lingüísticas diversas en un contexto translingüístico y transcultural. El proyecto PROSOPHON investiga estas dinámicas en un marco profesional.

Mobiliser des récits littéraires d’apprentissage pour (re)penser les rapports aux accents des enseignant·es de FLE/S : le cas des ateliers de l’Entre-deux

MyriAM DuPouy

À travers la présentation et l’analyse d’un cycle d’ateliers de l’Entre-deux (projet SAMILS), cet article propose de faire se rencontrer, autour de la thématique des accents, récits littéraires d’apprentissage et récits d’expériences réelles ou fictives d’enseignant·es et apprenant·es de FLE/S. Les thématiques abordées par les participant·es placent les accents aux croisements d’idéologies et problématiques linguistiques, sociales et identitaires.

Through the presentation and analysis of the SAMILS project and its Entre-deux workshops series, this article proposes to bring together, around the research theme of accents, literary accounts of learning and accounts of real or fictitious experiences of French as a foreign or secondary language teachers and learners. The subjects raised by the participants place accents at the crossroads of linguistic, social and identity-related ideologies and issues.

Comment enseigner la diversité des prononciations du français : des élèves apprenants roumains en classe de FLE face à des « accents » régionaux

AleksAnDr A D. sAvenkovA

L’article présente les résultats d’une étude menée auprès d’apprenants débutants et intermédiaires de FLE en Roumanie. L’analyse repose sur les réactions et retours des apprenants face à un matériel audio comportant des «  accents » francophones. L’étude vise à ouvrir une réflexion sur une des voies possibles de l’enseignement de l’oral pour mieux préparer les apprenants aux défis de la communication dans le monde actuel et à la diversité des prononciations multiples des locuteurs francophones.

The present article illustrates the results of a study conducted with beginner and intermediate French as a Foreign Language learners in Romania. The analysis is based on learners’ reactions and feedback to audio material featuring French accents. The study seeks to initiate a reflection on possible approaches to oral teaching, in order to better prepare learners for the challenges of communication in today’s world and the diversity of pronunciations of French speakers.

Représentations et émotions dans la construction identitaire en contexte d’apprentissage de la prononciation

lAur A Abou hAiDAr

Cette contribution s’intéresse aux représentations et émotions (Pekrun et al., 2012 ; Piccardo, 2013) en lien avec l’apprentissage de la prononciation d’une langue étrangère, et à la manière dont ces manifestations pourraient apporter des éléments de compréhension à la construction identitaire (Guérin & Laurens, 2022 ; Catroux & Jamin, 2015). Les résultats montrent que des émotions se manifestent au regard de la prononciation et que celle-ci a un impact transformant sur le plan identitaire.

This contribution focuses on representations and emotions (Pekrun & al, 2012; Piccardo, 2013) in relation to a foreign language pronunciation learning experience. Our aim is to explore how these manifestations could provide elements of understanding for the construction of identity (Guérin & Laurens, 2022; Catroux & Jamin, 2015). Results show that people express emotions (both negative and positive) with regards to pronunciation, and that this has a transforming impact on identity.

P résentation

ATILF (UMR7118), CNRS UNIVERSITÉ DE LORRAINE, FRANCE

Depuis plusieurs années, la didactique des langues francophone se fait le témoin d’un regain d’intérêt scientifique pour les questions autour du discours oral, de la parole ou de la prononciation et de l’ « accent » (Abou Haidar, 2020, 2021; Galazzi & Kottelat, 2023; Miras, 2021a; Sauvage & Billières, 2019; Troncy, Carette et Miras, 2022). Tantôt considéré comme un objet spécifique et modulaire, tantôt reconnu comme une sous-composante du langage comme une autre, l’oral dispose souvent d’une place spécifique dans la didactique du français comme langue additionnelle (modules indépendants, enseignant·e·s spécialistes, laboratoire de langue, etc.). À ce titre, les recherches sur l’oral complètent leur dimension linguistique en s’ouvrant pleinement aux aspects sociolinguistiques et sociophonétiques qui touchent les sentiments d’appartenance et d’affiliation (Dupouy, 2019) relatifs à des espaces agentifs (Miras, 2023).

En effet, regardant l’histoire des méthodes et méthodologies en didactique de la prononciation du FLE/S (Wachs, 2011), il est possible de faire état d’une difficile conciliation épistémologique voire d’une rupture entre une tradition positiviste et instrumentale de la phonétique avec une démarche compréhensive outillée de la didactique des langues francophone (Miras, 2021b). Si cette vision positiviste tend à faire penser qu’elle serait « neutre » et objective, elle laisse paraitre des obstacles épistémologiques (Bachelard, 1967) qui irriguent continuellement la didactique de la prononciation en opposition parfois à l’épistémé de la didactique des langues francophones en général. Foucault (1966, p. 33) définit l’épistémé comme le projet : de retrouver à partir de quoi connaissances et théories ont été possibles ; selon quel espace d’ordre s’est constitué le savoir ; sur fond de quel à priori historique et dans l’élément de quelle positivité des idées ont pu apparaitre, des sciences se constituer, des expériences se réfléchir dans des philosophies, des rationalités se former, pour, peut-être, se dénouer et s’évanouir bientôt.

En didactique des langues, Narcy-Combes (2013) la situe dans une épistémé de l’incertitude où les connaissances sont distribuées et surtout contextuelles.

En effet, le tournant interculturel et la compétence plurilingue (Coste, Moore, et Zarate, 1997) ont très rapidement déconstruit le mythe du natif ou de la native et l’idée d’un·e apprenant·e comme tabula rasa

Cette vision complète l’idée selon laquelle les individus présenteraient une caractéristique liquide (Wei & Lee, 2023) nourrie par la reconnaissance d’un translanguaging (García & Lin, 2017) perçu comme normal chez toute personne maitrisant une ou plusieurs langues. Dans le même temps, les concepts d’« interlangue » ou de « fossilisation » continuent de nourrir un positionnement en faveur d’une phonétique corrective basée sur un modèle et une norme alors même qu’ils sont contestés au regard des connaissances actuelles sur le fonctionnement langagier (Galligani, 2003). Ainsi, des outils politiques comme le Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL) dans sa version originale et ses amplifications représentent largement l’apprenant·e dans sa compétence phonologique comme un·e locuteur·rice illégitime de la langue additionnelle dont la compréhensibilité se fait par rapport à des locuteur·rice·s particuliers, et ce « malgré » un accent perçu comme détrimentaire (Didelot, Racine, Zay et Prikhodkine, 2019; Falkert, 2019; Miras, 2019).

Dans le même temps, la recherche tente d’ouvrir de nouvelles perspectives sur la manière dont la prononciation peut être partie intégrante des curriculums de formation en langues. Darcy (2018) propose de réfléchir à trois dimensions spécifiques :

• La temporalité (time) : il semble pertinent d’intégrer le travail sur la prononciation dès le début de l’apprentissage dans les objectifs généraux langagiers et de le faire remonter dans la liste des priorités (priority) dans l’évaluation.

• La méthode (method)  : une approche double de l’enseignement de la prononciation qui combine une attention simultanée à la forme et à l’intention communicative en visant l’automaticité et la généralisation dans le discours. Les feedbacks explicites et la variété de l’input participent à cet objectif.

• Les priorités (focus) : les facteurs qui jouent le plus sur l’intelligibilité et la compréhensibilité doivent être abordés pour chaque langue. Les difficultés rencontrées par les apprenant·e·s sont indépendantes de leur niveau. Un équilibre entre ces compétences doit être trouvé par chaque enseignant·e face à un groupe d’individus.

On notera cependant que des auteurs (Miras, 2021a; M.-F. NarcyCombes & Narcy-Combes, 2019) soulignent que, dans une approche par tâches, ce sont les tâches sociales qui font émerger – ou non – la nécessité de ce travail d’entrainement.

La question d’un tournant de la correction phonologique vers un objectif plus social de la langue a mis au centre des objectifs de la didactique de la prononciation, l’intelligibilité et la compréhensibilité. Munro et Derwing (2015, p. 14) définissent l’intelligibilité comme « la mesure par laquelle les perceptions des auditeurs correspondent aux intentions des locuteurs (compréhension réelle) », et la compréhensibilité comme « le degré perçu de difficulté éprouvé par l’auditeur à comprendre le discours ». Alburquerque et Alves (2022) précisent

notamment la nécessité de prendre en compte la dimension subjective de ces deux concepts et proposent par conséquent de les penser de manière construite au sein d’interactions. Parmi les voies ouvertes par la recherche, Mairano et al. (2019) ont cherché à objectiver les éléments phonologiques en anglais qui pouvaient participer le plus à une compréhensibilité réduite. Puis, ils ont cherché à voir dans quelle mesure il était possible de construire des outils permettant de se décentrer de l’objectif du « natif » ou de la « native » en traçant l’évolution du système phonologique des apprenant·e·s en lui-même (Mairano, Santiago et Roa, 2023).

En parallèle de cette réflexion autour des objectifs de la didactique de la prononciation, des chercheurs questionnent les dimensions macroscopiques qui traversent ses fondements. Tandis que des chercheurs (Gueye Demba, 2017) contestent la pertinence d’outils européens comme le CECRL pour l’enseignement de l’oral dans d’autres sphères, comme l’Afrique dans son cas, d’autres s’engagent dans une linguistique engagée contre les discriminations sur l’accent. En anglais, le terme accentism (Paterson, 2019) symbolise cet intérêt spécifique. Dans le contexte nord-américain, Ramjattan en appelle à une révision des objectifs autour de l’accent en reconnaissant, d’une part que le capitalisme a conduit à produire de l’insécurité sur l’accent afin de proposer une remédiation monétisée (2023) et d’autre part pour reconnaitre la dimension raciste inscrite dans une colonialité du rapport à certains accents (2022). Il en appelle ainsi à penser une pédagogie de la prononciation anti-raciste (Ramjattan, 2024). Cette approche semble d’autant plus pertinente que dans une société tournée vers la tolérance et la diversité, les comportements négatifs envers les accents ont tendance à être cachés par différentes formes de rationalisation (Roessel, Schoel et Stahlberg, 2020). En France, le rapport spécifique à la norme du français standard s’est propagé sur les autres langues étrangères dans le contexte hexagonal. Cette réalité amène notamment à des terrains glissants quand il s’agit de penser les attendus dans le recrutement des futur·e·s enseignant·e·s de langue lors de concours comme le CAPES ou l’Agrégation (Dupouy & Wilson, 2024).

Au regard de l’ensemble de ces éléments, ce numéro intègre des contributions plurielles dans l’objectif d’offrir au lecteur ou à la lectrice la possibilité de construire une vision transdisciplinaire de la didactique de la prononciation contemporaine en FLE/S. Les études présentées participent à répondre à des questions de recherche telles que : dans quelle mesure les recherches en linguistique appliquée sur le discours oral et la parole permettent de mieux comprendre cette « mise en scène de la vie quotidienne » (Goffman, 1973) que représentent les interactions dans les tâches sociales en didactique ? Comment la didactique de l’oral intègret-elle les enjeux contemporains (approche sensible, complexité et système dynamique, autonomie, contextualisation, etc.) permettant une actualisation de ses principes ? De quelle manière la centration des

dispositifs sur les individus et la variation orale amène-t-elle à repenser les dispositifs pédagogiques en termes de ressources, de rétroactions formatives et d’objectifs ?

L a didactique de la prononciation à la loupe de l’épistémologie

L’article d’Alexei Prikhodkine (Université de Genève) intitulé « « Diversité », « oralité », « mélanges » ... L’enseignement de la prononciation en FLE à l’ère du postmodernisme » propose une réflexion épistémologique sur la place actuelle de l’oral et de la prononciation. Ne se limitant pas au présent, il adopte une démarche prospective par une recherche d’anticipation à l’ère du postmodernisme. Pour ce faire, il analyse en profondeur la manière dont des paradigmes s’imposent en recherche, loin de tout hasard. La globalisation, le capitalisme et l’individualisme sont autant d’attracteurs occidentaux qui peuvent expliquer la photographie de la didactique de la prononciation actuelle au regard de la norme, la variation et les compétences, par exemple. Il identifie ainsi un conflit inévitable dans l’apprentissage des langues non-européennes face à une autre manière de penser la langue et la culture.

Jérémi Sauvage (Université Paul-Valéry – Montpellier 3) dans son article « Que faire de la diversité de la prononciation en didactique du FLE ? » aborde la question complexe de la diversité des prononciations en didactique du français langue étrangère (FLE). Il porte un regard distancié sur la norme et sur la variation qu’il questionne à la lumière de la différence importante à faire entre les dimensions phonétique et phonologique. Il rappelle notamment qu’en didactique de la prononciation, toute action d’enseignement-apprentissage vise la dimension abstraite des sons. Il rappelle que le recours à des ressources qui rendent audible la diversité des langues n’est pas une contrainte, mais au contraire une nécessité didactique.

D e la phonétique appliquée à la didactique de la prononciation contextualisée

Anouchka Divoux (Université de Lorraine) propose une réflexion intitulée « Des questions en interaction : les carences de la didactique de l’oral en FLE ». S’appuyant sur une approche de corpus, elle cherche à questionner et définir le concept de question dans les interactions afin de réfléchir à la manière dont la didactique de l’oral peut s’en saisir.

Comme pour d’autres points linguistiques, l’analyse des manuels montre un écart entre la norme d’enseignement et l’analyse que l’on peut faire sur des corpus de parole authentique. Ainsi, certaines formes interrogatives sont surreprésentées dans les manuels alors qu’elles apparaissent avec une fréquence très faible dans les corpus. Elle souligne notamment l’intérêt que les manuels investissent plus trois formes de questions : les semi-questions, les questions suspensives et les questions à alternative non réalisée. Si cette recherche ne se veut pas prescriptive, elle ouvre des portes sur la manière d’accompagner les enseignants dans la didactique de l’oral. Partant d’une approche expérimentale avec des tests de perception, Fabian Santiago Vargas (Université Paris 8 Vincennes - Saint-Denis & CNRS), Maxime Barkov (Universidad Nacional Autónoma de México) et Coralie Vincent (CNRS) proposent une réflexion intitulée « Intelligibilité, compréhensibilité, accent étranger et prononciation en FLE : évaluateurs natifs vs non natifs ». Cette contribution permet de confirmer plusieurs acceptions importantes pour la didactique des langues. L’accent étranger n’a pas de lien direct et causal avec des concepts comme l’intelligibilité ou la compréhensibilité. L’intelligibilité et la compréhensibilité sont meilleures dans le cas où des productions sont évaluées par des locuteurs ayant les mêmes activations croisées phonologiques (ici, le français et l’espagnol). Ces points conduisent à repenser les objectifs formatifs sur la prononciation et à prolonger la compréhension de ces mécanismes complexes.

Carlos Roberto Solorzano Membreno (Universidad Nacional Autónoma de Honduras) s’intéresse à un contexte particulier dans son article « Pour une didactique de la prononciation du français adaptée aux hispanophones : le cas des apprenants de français au Honduras ». En effet, partant d’une réflexion située et engagée depuis son terrain d’enseignement et de recherche, il tente de mieux comprendre en quoi le Honduras peut présenter ou non un terrain spécifique d’enseignement de la didactique du français par rapport à une vision homogénéisante de l’apprenant « hispanophone ». Si son approche exploratoire ne semble montrer que quelques spécificités, sa réflexion démontre la nécessité permanente d’ancrer la recherche entre le local et global afin de mieux répondre aux enjeux du terrain. Yin Yi (Université des langues et cultures de Beijing) et Jun-Kai Li (Université de Tianjin) proposent une réflexion intitulée « Enseignement de la prononciation du français en Chine : une analyse de manuels ». Cette réflexion crée un pont entre les centres de productions d’outils pédagogiques européens ancrés dans le CECRL et leurs équivalents produits par des auteurs ou autrices chinoises. L’étude de manuels est importante dans ce contexte puisqu’en Chine, ces derniers ont une place majeure dans l’enseignement des langues et dans la manière dont la langue est perçue. Les résultats montrent qu’il existe une différence de traitement de la compétence phonologique en fonction du

lieu de productions des manuels généralistes. La distance entre la norme pédagogique présente dans les manuels produits en Chine est d’autant plus grande par rapport à un manuel français de référence construit à partir de corpus.

Agentivité, identité et diversité en didactique de la prononciation

« C’est comme un ornement » : discours autour de l’accent en FLE dans l’espace hispanophone » est l’occasion pour Karina Ibáñez et Grégory Miras (Université de Lorraine) de réfléchir au construit d’accent dans le monde hispanophone. Se positionnant dans un paradigme de sociophonétique, ils cherchent à mieux comprendre, dans une approche compréhensive par entretiens, la manière dont les personnes impliquées dans l’enseignement-apprentissage des langues peuvent construire leur rapport professionnel à ces façons de parler. La richesse des profils étudiés met en évidence la complexité des rapports que chacun ou chacune construit avec sa pluriphonie. L’entretien permet également l’expression de discours sur des formes de micro-agressions linguistiques ou de discrimination sur l’accent. Cette recherche exploratoire est une première étape vers un projet plus vaste sur la place de l’accent dans le monde professionnel. Myriam Dupouy (Le Mans Université) apporte un regard agentif sur la construction des compétences des étudiants en didactique du FLE dans l’article  « Mobiliser des récits littéraires d’apprentissage pour (re) penser les rapports aux accents des enseignant·es de FLE/S : le cas des ateliers de l’Entre-deux. » Elle traite, à travers une recherche intervention, de la manière dont un échange sur les idéologies autour de l’accent peut avoir une place dans la formation des futurs enseignants de langues. Elle s’appuie sur une double approche du récit littéraire d’apprentissage et du récit d’expériences pour conduire les individus sur un chemin réflexif sur ces questions. Elle démontre ainsi que les ateliers mis en place en formation ont permis un pas de côté qu’elle compte développer avec la création d’un dispositif permettant de travailler à partir de la réception.

Aleksandra Savenkova (Université Sorbonne Nouvelle) s’interroge sur « Comment enseigner la diversité des prononciations du français : des élèves apprenants roumains en classe de FLE face à des « accents » régionaux ». Pour atteindre cet objectif, elle a mis en place une étude dans des classes de FLE en Roumanie. Elle a notamment cherché à mesurer les représentations et les attitudes des apprenants et apprenantes face à des prononciations marquées par des « accents » régionaux. Cette approche expérimentale in situ souligne l’importance de la

prise en compte de ces attitudes lorsqu’il s’agit d’introduire de la variation en FLE. En effet, les données semblent montrer que les productions non-standards proposées n’impactent pas l’intelligibilité, mais que les auditeurs et auditrices ont réagi (acceptation ou refus) face à ces variations. Les résultats soutiennent l’idée de continuer à développer l’introduction de la variation du français dès les premiers niveaux.

L’article « Représentations et émotions dans la construction identitaire des apprenants de langue : focus sur l’apprentissage de la prononciation » de Laura Abou Haidar (Université Grenoble Alpes) se focalise sur une dimension importante en didactique de la prononciation : les émotions et l’identité. À travers une enquête en ligne par questionnaire, l’étude cherche à dresser une photographie de la manière dont l’identité vient au centre du travail de la prononciation quand il s’agit de penser le rôle des émotions. Transformer sa prononciation, c’est repenser son rapport aux autres, faire bouger le « soi » et faire face à l’émergence d’émotions fortes.

Si ce numéro de Recherche & Application n’a pas vocation à dire comment enseigner la prononciation, il laisse la place à une réflexion indisciplinaire qui questionne les frontières mêmes de ce qu’est prononcer. Les différents auteurs et autrices qui composent ce numéro mobilisent des outils différents pour venir interroger des certitudes sur la didactique de l’oral et de la prononciation.

Bibliographie

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RECHERCHES ET APPLICATIONS / JANVIER 2025

«

Diversité », « oralité », « mélanges »...

L’enseignement de la prononciation en FLE à l’ère du postmodernisme
a lexei P rikhodkine UNIVERSITÉ

DE GENÈVE, SUISSE

Sans doute vivons-nous à une époque intéressante1. Chaque fois que nous nous attelons à la définition de notre objet, nous avons le choix entre différents positionnements épistémologiques à travers les concepts qui leur sont étroitement associés. Qu’on décide de parler de « langue » ou de « répertoire », de « variation » ou de « diversité », de « structure » ou d’« agentivité », d’« accent » ou de « pluriphonie », nous ne conceptualisons pas notre objet de la même manière, tout en rendant compte des mêmes faits langagiers. Ce choix – et l’interprétation qui en résulte – n’est possible que lorsque différentes postures épistémologiques sont encore en concurrence, c’est-à-dire, lorsqu’il y a un changement, un laps de temps avant qu’une nouvelle posture ne s’impose et ne fasse passer ses fondements pour de l’évidence. C’est en effet par le changement que Corinne Weber (2022 p. 45), caractérise l’intérêt porté en didactique à l’oralité et, plus largement, à la diversité des usages langagiers. On constate ainsi un important renouvellement didactique, qui propose une approche « plurielle » du français et qui présente la diversité linguistique non plus comme un problème, mais comme une richesse (Galazzi & Paternostro, 2016). Cette approche s’accompagne de discours prônant, d’une part, une tolérance envers toute forme d’hétérogénéité linguistique (Molinari, 2008) et, d’autre part, une valorisation des différences culturelles (Galazzi, 2015 p. 70). Corollairement, la supériorité du locuteur natif et de la variété standard est remise en question. On est invité à défendre une pédagogie « plurinormée », en mettant à l’œuvre des « normes de comportements langagiers socialement variables » (Weber, 2016 p. 38), ce qui permettrait aux apprenants en français comme langue étrangère (FLE) d’être outillés « contre les fantômes idéologiques d’une normativité homogène et figée » (Weber, 2019 p. 9).

1. Je remercie Grégory Miras, coordinateur de ce numéro, et deux évaluateurs pour leurs commentaires avisés stimulant la réflexion.

Q  ue faire de la diversité de la prononciation en didactique du FLE ?

UNIVERSITÉ PAUL-VALÉRY – MONTPELLIER 3 (LHUMAIN-UR), FRANCE

Dans cet article, nous souhaitons aborder une question qui interroge beaucoup d’enseignants de FLE : comment enseigner la prononciation d’une langue alors qu’il existe une grande variabilité de cette prononciation ? L’une des questions récurrentes que l’on entend lors des formations en didactique de la prononciation en français langue étrangère (FLE) est celle de la prise en compte ou non (et comment) de la diversité de la réalité articulatoire de la langue pour l’enseignement de cette dernière. En se limitant au territoire géographique de la France hexagonale, tout un chacun est à même de prendre conscience de cette diversité sonore dans les multiples usages de la langue française (Detey, Racine, Kawaguchi et Eychenne, 2016). En y ajoutant les départements (DOM) et les territoires (TOM) d’outremer, cette diversité s’accroit de manière exponentielle, notamment en raison des phénomènes de créolisation et du nombre important de langues en contact avec le français, en particulier en Guyane (Léglise & Migge, 2007) et en Nouvelle-Calédonie (Fillol et al., 2017). L’histoire d’un territoire constitué de diverses composantes, auxquelles s’ajoutent ses évolutions sociétales, ainsi que le développement des mobilités, participent grandement au grand brassage des réalités linguistiques, à différentes échelles (macro, méso, micro) et conduit à une prise de conscience de cette diversité (Sauvage & Schweitzer, 2021). Ainsi, une partie de la sociolinguistique issue de la dialectologie rurale qui a émergé au 19e siècle a pour objet d’étudier et de cartographier ces diversités de parler au sein d’un même territoire (une région, un pays, etc.), ce qui atteste cette existence réelle de la diversité langagière (Gilliéron, 1902 ; Grammont, 1914 ; Avanzi, 2017 ; Avanzi, Rey et Vincenti, 2023), jusqu’à la problématisation à propos des « accents » (Gasquet-Cyrus, 2012) et leur perception/ interprétation parfois stigmatisante (Meyer, 2011 ; Blanchet, 2017). À ce constat s’ajoutent également les mobilités internationales

D es questions en interaction : les carences de la didactique de l’oral en FLE

UNIVERSITÉ DE LORRAINE (CREM-UR3476), FRANCE

Depuis les années 2000, la situation de la recherche française en linguistique de l’oral présente une nette amélioration. Loin de la « rareté désolante » décrite par Cappeau (2018, p. 413), de nombreux corpus d’oral sont désormais utilisables à des fins descriptives ou didactiques (FLEURON13, CLAPI-FLE14, FLORALE15). Toutefois, les résultats des recherches actuelles sur les pratiques interactionnelles orales semblent encore difficilement pénétrer en salle de classe, en témoignent les différences entre les descriptions linguistiques présentes dans les méthodes de français langue étrangère (désormais FLE) et les résultats des analyses linguistiques sur corpus. Notre expérience d’enseignement du français langue étrangère en centre de langues nous amène à penser que le traitement de l’oral dans le cadre de l’enseignementapprentissage du FLE est freiné par le manque de descriptions accessibles à des enseignants qui ne seraient pas linguistes, ainsi qu’au manque d’exemples de transpositions didactiques utilisables en formation linguistique. C’est dans ce cadre que nous proposons dans cet article une description linguistique de ce qui constitue une question à l’oral en présentant trois types de questions rarement abordées en formation : les semi-questions, les questions suspensives et les questions à alternative non réalisée. Nous montrerons ensuite la pertinence de ce point linguistique en formation tout en présentant un exemple d’exploitation didactique en cours de FLE.

13. André, V. (2016) : https:// fleuron.atilf.fr/

14. http://clapi.icar.cnrs. fr/FLE/

15. Surcouf et Ausoni (2018) : https://florale.unil.ch/

I ntelligibilité, compréhensibilité, accent étranger et prononciation

en FLE : évaluateurs natifs vs non natifs

Fabián santiaGo

UNIVERSITÉ PARIS 8 & CNRS (SFL-UMR 7023), FRANCE

M axiM barkov

UNIVERSIDAD NACIONAL AUTÓNOMA DE MÉXICO (ENALLT), MEXIQUE

coralie vincent CNRS (SFL-UMR 7023), FRANCE

É

valuer la prononciation en L2 : principes et approches

L’évaluation de la prononciation en L2 implique l’interaction complexe de plusieurs phénomènes mesurés avec des données observables et des concepts relevant de champs disciplinaires divers. Toute recherche et pratique didactique consacrée à l’évaluation de la prononciation essaie généralement d’identifier une norme à laquelle sont soumises les propriétés acoustico-perceptives du matériel linguistique des énoncés produits par les apprenants d’une L2 (Detey & Racine, 2012). Pour ce faire, les spécialistes choisissent très souvent une méthode d’analyse objective (ou scientifique) qui s’avère robuste (résistante aux erreurs de mesure), fiable (réplicable et reproductible dans la plupart des conditions) et valide (elle mesure ce qu’elle est censée mesurer). Pour ce faire, les recherches en phonétique et en phonologie

Pour une didactique de la prononciation du français adaptée aux hispanophones

Le cas des apprenants de français au Honduras

UNIVERSIDAD NACIONAL AUTÓNOMA DE HONDURAS, HONDURAS

Dans cette réflexion définitivement exploratoire, nous allons nous intéresser à la didactique de la prononciation pour un public hondurien. L’évolution des méthodologies pour l’enseignement des langues a attribué différents statuts à la phonétique au fil des époques. Dans l’approche communicative, elle a été marginalisée (Champagne-Muzar & Bourdages, 1998, p. 11). Cependant, avec la publication du Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues (dorénavant CECRL) (Conseil de l’Europe, 2021), la prononciation a regagné de l’importance, devenant un élément important pour la compréhension et la production orales. Dans le contexte hispanophone, les recherches portant sur la didactique de la prononciation pour le public hondurien demeurent limitées.

L’intérêt de cet article réside précisément dans le fait que le Honduras, en tant que terrain du français comme langue étrangère (FLE), présente des défis spécifiques qui influencent l’enseignement de la prononciation. Il est en effet essentiel de clarifier dès l’introduction l’intérêt de mener cette étude au Honduras. Ce pays présente des caractéristiques spécifiques qui influencent directement l’apprentissage du FLE. Par exemple, la prononciation du /h/ aspiré, qui se substitue souvent au /s/ (caractéristique de l’espagnol parlé au Honduras), affecte la manière dont le /s/ est prononcé en français (Hernández, 2010, p. 126). D’autre part, la coexistence de plusieurs langues autochtones et l’impact croissant de l’anglais, notamment dans certaines régions, représente une spécificité à prendre en compte.

E nseignement de la prononciation du français en Chine : une analyse de manuels

yi yin

UNIVERSITÉ DES LANGUES ET CULTURES DE BEIJING, CHINE

Junkai l i22

UNIVERSITÉ DE TIANJIN, CHINE

La Chine constitue un fort contingent avec plus de 100 000 apprenants de français dans le système éducatif chinois (Zhang, 2018). Ces apprenants sinophones de français langue étrangère (FLE) s’approprient cette langue dans un contexte hétéroglotte. Lorsqu’ils ont l’occasion de séjourner dans des pays francophones, de nombreux apprenants chinois expérimentent une certaine confusion perceptive, car les francophones ne parlent pas de la même manière que ce qu’ils ont appris dans les manuels de FLE en Chine. Cette confusion se reflète à deux niveaux différents : segmental et suprasegmental. Ce constat révèle un écart entre la théorie (telle qu’elle est enseignée aux apprenants) et la pratique (telle qu’elle se trouve parlée par les locuteurs experts francophones). Cela nous amène à une réflexion sur les normes pédagogiques de la prononciation et sur les variations linguistiques rencontrées tout au long de l’apprentissage du FLE.

La question de la norme est au centre de tout enseignement-apprentissage : les enseignants s’appuient sur les contenus à enseigner, sur les types d’input à proposer aux apprenants ainsi que sur les usages, considérés comme « corrects », à respecter et à encadrer. Il paraît relativement plus simple de définir les usages « corrects » par rapport à la norme à l’écrit qu’à l’oral, étant donné que le bon usage à l’écrit est défini par « un ensemble de textes d’auteurs illustres dans lesquels puisent dictionnaires et grammaires (descriptives et prescriptives) » (Detey et al., 2016, p. 23). En revanche, à l’oral, les normes sont moins stables, et ce que nous apprenons dans les manuels ne correspond pas toujours à la réalité langagière. Concernant les normes phonétiques du français, elles sont loin d’être simples à établir car « leur interprétation passe nécessairement par les filtres (syntaxique, morphologique et

22. Auteur de correspondance : 216130@tju.edu.cn

C ’est comme un ornement » : discours

autour de l’accent en FLE dans l’espace hispanophone

k arina ibáñez

UNIVERSITÉ DE LORRAINE CNRS (ATILF-UMR7118), FRANCE

GréGory Miras

UNIVERSITÉ DE LORRAINE CNRS (ATILF-UMR7118), FRANCE

L’« accent » en langues additionnelles est un construit complexe qui convoque des idéologies linguistiques souvent nourries par des normes subjectives. Dans le domaine de l’enseignement-apprentissage des langues, idéologies linguistiques et didactiques (Burrows, 2021) s’entremêlent et complexifient davantage ces réalités multiples. La perception d’un « accent » conduit à des réactions contrastées, positives ou négatives, dans une partie de la société qui cherche encore à promouvoir l’interculturel, le plurilinguisme et la tolérance pour le vivre ensemble. En tant que terrain professionnel, le français langue étrangère (FLE) convoque ces représentations qui peuvent directement impacter les acteurs et actrices du domaine ainsi que leur recrutabilité, qu’il s’agisse des enseignants et des enseignantes ou des autres personnalités en charge de la promotion du français. Cette étude exploratoire tentera d’analyser, dans une approche compréhensive, la manière dont cette complexité émerge du discours d’individus quand il s’agit de penser l’accent sur le domaine FLE en milieu hispanophone. Afin d’amorcer cette réflexion, le projet PROSOPHON constituera un terrain d’appui puisqu’il s’intéresse à la manière dont l’ « accent » peut être convoqué dans l’insertion socio-professionnelle. Un sous-corpus qualitatif ciblé sur cinq informant·e·s s’exprimant sur leurs expériences en lien avec le monde hispanophone (Mexique, Argentine et Espagne) permettra d’analyser la complexité idiosyncrasique de représentations sur l’accent.

M obiliser des récits littéraires d’apprentissage pour (re)penser les rapports aux accents des enseignant·es de FLE/S

Le cas des ateliers de l’Entre-deux

Myria M duPouy, LE MANS UNIVERSITÉ (CREN-UR2161), FRANCE

Langue et identité : ce duo terminologique résonne fortement pour un grand nombre de personnes dans le monde. S’il s’agit bel et bien ici d’un « binôme » résolument ancré en sciences humaines et sociales, il est particulièrement mobilisé dans l’étude des rapports aux langues, en sociolinguistique (Costa, 2021) et en didactique des langues. C’est par cette double entrée épistémologique que nous choisirons de creuser ce duo terminologique, mais puisque les études sont nombreuses à ce sujet, nous y entrerons par le prisme des discours et rapports aux accents présentés comme matérialisations ou illustrations de la complémentarité entre langue(s) et identité(s).

En effet, la mobilisation des « accents » comme objets de sens commun renvoyant à des questions identitaires est foisonnante, et cela est encore plus sensible dans des contextes d’appropriation langagière (Dupouy, 2019) et de contact de langues en général, mais encore davantage dans des situations formelles d’enseignement-apprentissage des langues additionnelles. Ce contexte particulier offre l’avantage de faire la part belle aux réflexions et discours métalinguistiques, offrant alors un terreau fertile pour discuter des objets protéiformes, complexes et politiques tels que langue et identité. Les accents ici sont entendus en tant que catégories de sens commun et comme concepts sociolinguistiques (Gasquet-Cyrus, 2010) que l’on peut analyser d’un point de vue critique et pragmatique (Candea, Planchenault et Trimaille, 2019; Planchenault &

C omment enseigner la diversité des prononciations du français.

Des élèves apprenants roumains en classe de FLE face à des « accents » régionaux
a leksandra d. savenkova,

Dans le domaine de l’enseignement-apprentissage du FLE, l’écart entre le français enseigné en classe, souvent dépourvu de diversité (socio)linguistique, et la pluralité des formes de la langue observable en dehors des classes est flagrant. Traditionnellement, l’enseignement peut véhiculer une seule forme de français oral standard, en tant qu’output, mais aussi en tant qu’input. Cela donne aux apprenants la vision d’une prononciation hexagonale fantasmatique perçue comme homogène. Le fait d’insérer en input de la variation diatopique permet d’indexer la diversité des prononciations, y compris celles régionalement34 marquées. Cette approche permettrait aux apprenants de se construire une représentation intrinsèquement variable des prononciations d’une langue, plus en adéquation avec la réalité et plus cohérente avec les connaissances déjà acquises sur leur L1 dans une optique de didactique du plurilinguisme (Candelier, 2008).

La richesse des voix francophones n’est pas pleinement mise en valeur, et encore moins exploitée dans les pratiques d’enseignement-apprentissage du FLE, la représentation des « accents » du français est souvent stéréotypée avec des idéologies sous-jacentes rarement remises en question (voir entre autres Duchemin (2017) et Falkert (2019)). L’intégration de la variabilité dans l’enseignement-apprentissage du FLE demeure un défi majeur. Les manuels de FLE véhiculent une norme « centralisatrice » et hiérarchisante : « la langue présentée dans les manuels

34. Dans cet article nous définissons le terme « régional » (prononciation régionalement marquée) dans un sens large, englobant non seulement les régions françaises, mais également celles du monde entier.

R eprésentations et émotions dans la construction identitaire en contexte d’apprentissage de la prononciation

l aura a bou h aidar

UNIVERSITÉ GRENOBLE ALPES (LIDILEM-UR609), FRANCE

L’apprentissage de la dimension phonique d’une langue a ceci de particulier qu’il engage l’individu dans la multiplicité de ses facettes : langagière, mais également kinésique, proxémique, émotionnelle, et identitaire. Comme nous le soulignons en nous référant à l’approche ethnographique de la communication (de Salins, 1992) : « L’oral engage la face, au sens propre et au sens figuré […]. À l’oral, l’apprenant est « à nu », le visage et la face se présentent avec un risque maximal » (Abou Haidar, 2016, p. 1). À travers l’acte d’oraliser, l’individu s’engage dans la plénitude de sa sensori-motricité : en langue cible cela relève d’un défi lié à des éléments de différente nature dont l’apprenant n’a pas nécessairement conscience et qui peuvent avoir un impact réel sur le processus d’apprentissage.

La dynamique articulatoire induite par la production du flux de parole dans un contexte d’apprentissage d’une langue amène l’apprenant à réaliser une succession de mouvements particulièrement élaborés et à mobiliser des muscles et des postures articulatoires totalement inhabituelles. Dans nos langues premières, les commandes motrices ne deviennent de l’ordre du réflexe qu’à l’issue d’une longue période d’appropriation, de manipulation phonique, de jeux sonores : autant d’activités que l’enfant a tout le loisir d’accomplir pendant sa petite enfance (suscitant souvent des réactions d’attendrissement de son entourage), alors que dans un contexte d’apprentissage d’une langue, cette période est réduite à une portion congrue, et les activités motrices peuvent être vécues par des personnes en situation

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Pour toute question : sferrand@sejer.fr ou +33(1) 72 36 30 67

« Les informations sont recueillies à partir de ce bon pour le compte de CLE INTERNATIONAL, 92 avenue de France – 75013 Paris, une maison d’édition SEJER, SAS au capital de 9 898 330 €, 92 avenue de France – 75702 Paris cedex 13 - RCS Paris 393 2910 42. Ces informations sont enregistrées dans un fichier automatisé et sont nécessaires pour le traitement, le suivi de votre demande d’abonnement, pour l’émission de votre facture de souscription et son envoi. Conformément à la Loi Informatique et Libertés de n°78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, au Règlement Européen (RGPD) 2016/679 et à la Loi pour une République numérique du 7 octobre 2016, vous disposez du droit d’accès, de rectification, de limitation, d’opposition, de suppression, du droit à la portabilité de vos données, de transmettre des directives sur leur sort en cas de décès. Vous pouvez exercer ces droits en adressant un mail à contact-donnees@sejer.fr. Vous avez la possibilité de former une réclamation auprès de l’autorité compétente. »

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