Catalogue 2016 - Entrevues

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ENTREVUES BELFORT 31E FESTIVAL INTERNATIONAL DU FILM 26 NOV. AU 4 DEC. 2016

ÉDITOS PRIX JURYS LA COMPÉTITION INTERNATIONALE LES LONGS MÉTRAGES LES COURTS & MOYENS MÉTRAGES PREMIÈRES FICTIONS FRANÇAISES AVANT-PREMIÈRES & SÉANCES SPÉCIALES LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD, DOUBLE JE DOUBLE FEATURE : LE NOUVEAU BURLESQUE FRANÇAIS LA TRANSVERSALE : REMAKES PREMIÈRES ÉPREUVES : SATYAJIT RAY CINÉMA ET HISTOIRE : CECI EST MON CORPS ENTREVUES JUNIOR RENCONTRES PROFESSIONNELLES [ FILMS EN COURS ] LES VISAGES DE LA COMPÉTITION ÉQUIPE ET REMERCIEMENTS INDEX DES FILMS

P. 3 P. 8 P. 10 P. 12 P. 26 P. 34 P. 40 P. 54 P. 78 P. 96 P. 138 P. 154 P. 168 P. 174 P. 176 P. 178 P. 182 P. 199


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ÉDITOS

DAMIEN MESLOT

DÉPUTÉ MAIRE DE BELFORT C’est une belle et longue histoire d’amour qui lie Belfort et le cinéma puisque cette 31e édition fait entrer Entrevues dans sa 4e décennie. Le festival ne vieillit pas, il évolue au fil des ans et affirme sa notoriété. Cette année, neuf cinéastes passés par Entrevues ont été sélectionnés au festival de Cannes. Saluons donc la pertinence des choix de la compétition internationale qui font du festival de Belfort une référence en matière de découverte de talents. Ces cinéastes nous viennent du monde entier : Mexique, Argentine, Chine, Etats-Unis et de nombreux pays européens pour présenter leur film et rencontrer le public belfortain. Le festival évolue aussi par une fréquentation qui ne cesse de croître en s’ouvrant à un public de plus en plus large, amateurs ou simples curieux, petits et grands, tout en maintenant son exigence de qualité. Il se distingue également par les actions menées, notamment auprès des professionnels. En effet, il est devenu au fil des ans une étape incontournable dans le paysage cinématographique du Grand Est en organisant les « Rencontres régionales de la diffusion du cinéma indépendant » et en réunissant les acteurs de l’éducation à l’image. Le festival, c’est aussi un renouvellement constant d’idées et de projets. Ainsi, cette année, « Parcours jeunes talents » donne la possibilité aux jeunes cinéastes de Bourgogne Franche-Comté de présenter leur film et de bénéficier d’un parcours de formation. Cette initiative confirme la volonté de soutien d’Entrevues à la création déjà mise en œuvre avec l’aide à la post production proposée par l’initiative « [Films en cours] ». En 2016, ce sont plus de 50 partenaires qui soutiennent le festival. Leur aide est précieuse et nous les remercions vivement tout comme la formidable équipe d’Entrevues, sans oublier bien sûr ses nombreux bénévoles sans qui ce festival ne pourrait pas exister. Bon festival à tous et vive le cinéma !

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ÉDITOS

FLORIAN BOUQUET

PRÉSIDENT DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL DU TERRITOIRE DE BELFORT

MARIE-CLAUDE CHITRY-CLERC VICE-PRÉSIDENTE EN CHARGE DE LA CULTURE

Du 26 novembre au 4 décembre 2016, le Territoire de Belfort va vivre au rythme du cinéma indépendant grâce au festival Entrevues. Depuis 31 ans, le Département soutient ce festival qui a pris toute son importance localement et qui a acquis une renommée nationale et internationale. Convivial et à taille humaine, Entrevues offre une occasion privilégiée de rencontres et d’échanges entre le public et les professionnels. Il donne leur chance à des premières œuvres et participe à la promotion de talents présents ou futurs. Et cette 31e édition tiendra toutes ses promesses : 9 jours de plaisir, de découvertes et de rencontres autour du cinéma avec plus de 130 films projetés. La compétition internationale mettra à l’honneur les cinéastes de demain. Les films en lice parleront d’amour, sous toutes ses formes : amours éphémères, absolues, manquées, tarifées, familiales, amicales… De quoi mettre un peu de douceur dans ce monde parfois bien brutal, à l’image de l’actualité de ces derniers mois. Nous attachons une importance toute particulière au rôle pédagogique et éducatif d’Entrevues. Le festival pour les enfants « Entrevues junior », permet en effet de faire découvrir aux plus jeunes la diversité des thèmes et des genres cinématographiques, qui traite cette année des créatures en folie : monstres, génies, robots et autres extra-terrestres... Nous tenons enfin à saluer le travail de la Déléguée générale Lili Hinstin et de la Secrétaire générale du Festival, Michèle Demange, et de toute l’équipe qui propose une programmation de qualité en apportant aux Terrifortains de la joie et de la chaleur à l’orée de l’hiver. Le Conseil départemental s’associe au festival Entrevues afin que tous les Terrifortains puissent accéder facilement au 7e art et à la culture en général dans notre département. Place au cinéma, je vous donne rendez-vous à partir du 26 novembre dans les salles obscures pour un voyage à travers le cinéma d’ici et d’ailleurs.


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MARIE-GUITE DUFAY

PRÉSIDENTE DU CONSEIL RÉGIONAL DE BOURGOGNE-FRANCHE-COMTÉ Pour sa 31e édition, le festival Entrevues poursuit sa belle histoire d’amour avec le septième art. Une histoire résolument tournée vers la jeunesse et la création, avec une compétition internationalement reconnue faisant la part belle aux jeunes réalisateurs. Belfort continue ainsi d’être un véritable tremplin pour les jeunes cinéastes français et étrangers. Entrevues sait également mettre le public au cœur du festival, avec des actions variées où chacun trouve sa place : Entrevues Junior, actions en direction des lycéens, rencontres avec des cinéastes et des acteurs, autant de moments de partages pour les amateurs comme pour les professionnels. Cette année, c’est l’acteur, réalisateur et musicien Melvil Poupaud qui est à l’honneur. Une rétrospective permettra de redécouvrir son travail avec les plus grands réalisateurs français et étrangers, de Raoul Ruiz ou Jacques Doillon jusqu’à Xavier Dolan. Surtout, Entrevues n’oublie pas de s’inscrire pleinement dans son époque, en célébrant à sa manière les 60 ans du Planning familial. Le public sera ainsi convié à mettre en lien Histoire et Cinéma, afin de se remémorer des conquêtes fondamentales concernant la place des femmes dans les sociétés modernes. Pendant neuf jours et à travers quelques 140 films, Entrevues fait ainsi de Belfort le cœur battant du cinéma mondial. La région Bourgogne-Franche-Comté est particulièrement fière de s’associer, cette année encore, à ce rendez-vous majeur, et je tiens à remercier en particulier Lili Hinstin et toute l’équipe du festival. La richesse de la programmation comme sa qualité sont l’assurance de riches moments mêlant émotions et découvertes. Bon festival à toutes et à tous !


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ÉDITOS

FRÉDÉRIQUE BREDIN PRÉSIDENTE DU CNC

Dédié à la découverte de la création contemporaine internationale, en particulier aux premières œuvres, et aux rétrospectives d’auteurs, le festival Entrevues a permis de montrer au public depuis sa création en 1986 par Jeanine Bazin, les œuvres de grands cinéastes lorsqu’ils étaient à leurs débuts : celles d’Abdellatif Kechiche, de Yorgos Lanthimos, de Laurent Cantet, de Serge Bozon, de Claire Simon, ou encore celles de Laurent Achard, Brillante Mendoza, Alain Guiraudie, pour ne pas les citer tous. Cette attention particulière accordée au renouvellement du cinéma, le CNC la porte à travers ses différents dispositifs destinés aux premières œuvres : le soutien au scénario, l’Avance sur recettes, l’Aide aux cinémas du monde ou encore le dispositif « Talents en court » qui permet d’accompagner des jeunes cinéastes, ou désireux de le devenir, pour qui l’accès au milieu professionnel est difficile, faute de formation ou d’expérience professionnelle. Par ailleurs, j’aimerais souligner la qualité pédagogique du festival, qui s’inscrit dans la politique de sensibilisation et d’éducation artistique du jeune public conduite par le CNC, à laquelle j’attache une grande importance. Eduquer au cinéma, c’est prendre toute la mesure de l’intentionnalité d’un plan, d’un montage, c’est former un esprit critique, et une faculté de jugement face à la subjugation des images. Ainsi, la manifestation contribue au legs des grandes œuvres du patrimoine cinématographique mondial, et à donner aux jeunes générations les prémisses d'une culture et d'une réflexion critique sur le 7e art. C’est pourquoi, je suis heureuse de soutenir cette nouvelle édition du festival Entrevues. Je tiens particulièrement à remercier ses organisateurs, au premier rang desquels sa déléguée générale, Lili Hinstin et son équipe, ainsi que la ville de Belfort, pour leur formidable action en faveur des nouveaux talents et de la transmission de la culture cinématographique, notamment aux plus jeunes. Excellent festival à tous.


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LILI HINSTIN

DÉLÉGUÉE GÉNÉRALE Corps à vendre, doubles et sosies, gestes amoureux, timides ou maladroits, corps emprisonnés derrière des barreaux ou des idéologies, corps disparus dont la mémoire collective hésite à se souvenir, corps fantômes qui traversent furtivement l’Histoire, œillades, chutes et pas de danse… La 31e édition d’Entrevues auscultera le corps sous toutes ses formes : le corps que l’acteur prête au cinéaste ; le corps inadapté et transgressif du burlesque ; le corps féminin, éternel enjeu de l’oppression masculine, encore et toujours à libérer ; le corps-machine désirante mis en scène par les jeunes cinéastes de la compétition officielle : un corps toujours politique, fil rouge d’une édition dont chaque film incarne la convergence d’un geste et d’un regard. Cette année, nous présentons en compétition 16 longs métrages et 11 courts et moyens métrages, dont 11 premières mondiales et 9 premières internationales ou françaises et nous sommes heureux d’annoncer le retour du Prix Gérard Frot-Coutaz qui a déjà eu son heure de gloire à Belfort de 1993 à 2004 en primant Alain Guiraudie, Patrica Mazuy ou Abdellatif Kechiche… Il récompensera un premier film de fiction français d’un prix de 5.000 euros. Dans cette perspective de soutien à la jeune création, nous avons aussi mis en place un nouveau dispositif d’accompagnement et de formation destiné à des jeunes cinéastes de moins de trente ans originaires de Bourgogne-Franche-Comté, loin des milieux du cinéma ou des grandes écoles : le Parcours Jeunes Talents. Après avoir exploré les questions de mise en scène à travers les rapports d’un cinéaste et des techniciens avec lesquels il travaille, la section « La Fabbrica » se penche cette année sur le métier de comédien. Nous inaugurons cette réflexion avec Melvil Poupaud, l’un des acteurs les plus passionnants du cinéma français qui, la quarantaine à peine passée, a déjà plus de trente ans de carrière derrière lui. Ce sera aussi l’opportunité rare de découvrir son travail de cinéaste, secret et singulier, à son image. La section « Double Feature : Un certain genre » se tournera cette année vers le Nouveau Burlesque français, genre pionnier dont une nouvelle génération de cinéastes s’empare avec un ton grinçant ou mélancolique très contemporain. Nous avons invité ces réalisateurs à choisir le film qui les a fait le plus rire, révélant ainsi une étrange généalogie cinéphilique du rire. La « Transversale » s’emparera du « corps cinéma » puisqu’elle explorera à travers le thème du Remake comment le cinéma s’est nourri de sa propre histoire pour se renouveler. Des plus célèbres aux plus méconnues, ces variations prouveront que l’histoire a beau être la même, « le style, c’est l’homme ». Enfin, le corps féminin sera à l’honneur avec un hommage au génie du cinéma indien Satyajit Ray et les Rencontres Cinéma & Histoire consacrées à la libération du corps féminin dans les années 1960 et 1970. Je souhaite à toutes et tous une très bonne 31e édition, sous la devise d’Entrevues : découverte et liberté !


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LES PRIX

PRIX DÉCERNÉS PAR LE JURY INTERNATIONAL :

LE GRAND PRIX JANINE BAZIN - 8.000€

LE PRIX D’AIDE À LA DISTRIBUTION CINÉ+

LE GRAND PRIX DU COURT-MÉTRAGE - 3500€

- 15.000€ Décerné à un long-métrage, doté par la Ville de Belfort et soutenu par le GNCR

Achat de droits de 15 000€ pour une diffusion sur Ciné+ Club, au distributeur français du film lauréat.

PRIX DÉCERNÉS PAR LE JURY CAMIRA (CINEMA AND MOVING IMAGE RESEARCH ASSEMBLY) :

LE PRIX GÉRARD FROT-COUTAZ

LE PRIX CAMIRA

Sous l’égide de la Fondation de France, le prix récompense un jeune réalisateur français pour son premier long métrage de fiction/cinéma (compétition « Premières fictions françaises »).

Publication d’une interview et d’un article sur General Intellect, la revue officielle de l’association.

Cinema And Moving Image Research Assembly

– 5.000€

PRIX DÉCERNÉ PAR UN JURY JEUNE ACCOMPAGNÉ PAR UN PROFESSIONNEL DU MONDE DE LA MUSIQUE :

PRIX DÉTERMINÉS PAR LE VOTE DU PUBLIC À L’ISSUE DES PROJECTIONS :

LE PRIX EUROCKS ONE+ONE

LES PRIX DU PUBLIC

– 2.500€

Doté par les Eurockéennes avec le soutien de La Sacem Le prix récompense un film de la compétition internationale dont l’esprit musical est remarquable libre et novateur.

pour le long-métrage - 3000€ pour le court-métrage - 1700€


NOUVEAU !

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LE PRIX GÉRARD FROT-COUTAZ

Le Prix Gérard Frot-Coutaz récompense un film de la nouvelle compétition du festival : Premières Fictions Françaises. Il est décerné par les trois membres du Jury CAMIRA et récompense un jeune auteur réalisateur français pour son premier long-métrage de fiction/cinéma. Il est doté de 5 000 €. Le prix Gérard Frot-Coutaz a été remis au festival de 1993 à 2004. Dans un désir de continuité, la Fondation Gérard Frot-Coutaz, créée fin 2015 sous l’égide de la Fondation de France, a souhaité remettre en place un partenariat avec Entrevues pour poursuivre ce soutien à la jeune création cinématographique.

GÉRARD FROT-COUTAZ

(1951, Chalon-sur-saône – 1992, Créteil) Après des études à HEC Paris en 1974, Gérard Frot-Coutaz débute en tant que critique dans plusieurs revues. Il est assistant-réalisateur sur une douzaine de films dont Barocco d’André Téchiné, Le Théâtre des Matières de Jean-Claude Biette, La Machine et Corps à Cœur de Paul Vecchiali, Les Belles manières de Jean-Claude Guiguet et Simone Barbès ou la vertu de Marie-Claude Treilhou. Il tourne en 1979 son premier court-métrage Jeux d’Ombre. La relation entre le réalisateur et Entrevues débute en 1985, lorsque son 3e court-métrage Le Tiers providentiel est sélectionné en compétition internationale. Cette même année, il réalise son premier long-métrage, produit par Paul Vecchiali (Diagonale) : Beau temps, mais orageux en fin de journée, avec Micheline Presle et Claude Piéplu, présenté au festival de Cannes dans la section « Perspectives du cinéma français » et très bien accueilli par la critique. L’année suivante il est présent à Entrevues en tant que jury aux côtés de Nella Banfi, Fabienne Babe, Pascal Kané, Laurent Spielvogel et Jean-Bernard Menoud. En 1988, il tourne un documentaire sur sa grand-mère pour la télévision, Rose. L’année suivante, il retrouve Micheline Presle et Claude Piéplu pour son second long métrage Après après-demain, dans lequel jouent également Anémone, Agnès Soral et Simon de la Brosse. Le film est présenté à Entrevues en compétition internationale. En 1991, il réalise un court-métrage, Peinture fraîche, et participe au film collectif sur les prisonniers politiques pour Amnesty International, Contre l’oubli (segment « Pour Wang Xizhe, Chine ». Gérard Frot-Coutaz décède brutalement le 12 mars 1992 alors qu’il est sur le point de tourner son troisième long métrage, Il fait meilleur dehors que dedans.


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LES JURYS

JURY DE LA COMPÉTITION INTERNATIONALE AURÉLIA GEORGES

Aurélia Georges est réalisatrice et scénariste de ses films, dont les longs-métrages L’Homme qui marche (2008) et La Fille et le Fleuve (Acid Cannes, 2014) et le court-métrage Le Fleuve Seine (2012). Elle travaille également comme lectrice de scénarios, traductrice et enseignante.

MURIELLE JOUDET

Murielle Joudet est critique cinéma pour le site de Chronic’art et anime également une émission d’entretiens mensuelle sur hors-serie.net. Elle collabore également aux Inrockuptibles et à l’émission La Dispute sur France Culture.

STÉPHANE LIBS

Stéphane Libs nait la même année que Funny Girl dans la ville de naissance de son réalisateur. C’est à Mulhouse city, l’année de C’est arrivé près de chez vous, qu’il devient exploitant/exploité (suivant les jours). Et puis comme en 1999, un Sixième sens n’arrive jamais seul, les cinémas Star de Strasbourg lui tendent les bras durant L’été de Kikujiro. Il casse enfin sa tirelire le jour de son anniversaire pour racheter les cinq écrans de la rue du jeu des enfants et cette année là, De battre (son) cœur s’est (souvent) arrêté. Il devient enfin un peu plus gros et un peu moins riche en rachetant le cinéma Star Saint-Exupéry en 2005 et Oncle Boonmee peut désormais commencer à se souvenir.

JOÃO NICOLAU

João Nicolau vit et travaille à Lisbonne. Réalisateur, monteur, acteur et musicien, il a présenté tous ses films à Entrevues depuis Rapace en 2006 qui a reçu le Grand Prix du court-métrage (ex-aequo) et le Prix du public court-métrage. Puis Chanson d’amour et de bonne santé en 2009 (Grand Prix du court-métrage), L’Epée et la Rose, son premier long-métrage en 2010, O Dom das lagrimas en 2012 et John From, son second long-métrage en 2015.

JEAN-PAUL ROLAND

Jean-Paul Roland est directeur des Eurockéennes de Belfort (depuis 2001) et du festival GéNéRiQ (depuis 2007), président de DeConcert, fédération internationale de festivals (30 festivals indépendants majeurs de Belgique, Suisse, Allemagne, Hongrie, Danemark, Islande, Canada et France), membre du comité festivals au Prodiss (syndicat national des producteurs), administrateur de Issoudun (Ecole nationale d’enseignement et de formation aux métiers du spectacle musical). Graphiste et illustrateur de formation.


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JURY CAMIRA

CAMIRA (CINEMA AND MOVING IMAGE RESEARCH ASSEMBLY) EST UNE ASSOCIATION INTERNATIONALE COMPOSÉE DE CRITIQUES, CHERCHEURS ET PROGRAMMATEURS DU MONDE DU CINÉMA ET DES ARTS VISUELS.

GABRIEL BORTZMEYER

Gabriel Bortzmeyer est à cheval entre la critique et l’université, et se promène régulièrement en festival. Collaborateur de revues comme Trafic ou Vacarme, il est membre du comité de rédaction de Débordements et termine une thèse sur les figures du peuple dans le cinéma contemporain, tout en enseignant à l’Université Paris VIII.

ELINE GRIGNARD

Eline Grignard mène une recherche de doctorat en études cinématographiques à l’Université de Paris 3 – Sorbonne Nouvelle. Elle enseigne actuellement à l’Université de Lille 3. Par ailleurs, elle a travaillé dans l’art contemporain et mène une activité parallèle de critique et de programmation en lien avec différentes revues et lieux d’exposition.

PAULINE DE RAYMOND

À la Cinémathèque française, Pauline de Raymond est la programmatrice du Festival international du Film Restauré, Toute la mémoire du monde, depuis sa création en 2012. Elle fait partie de l’association CAMIRA depuis juillet 2016.

JURY EUROCKS ONE+ONE

EN ASSOCIATION AVEC LES EUROCKÉENNES DE BELFORT

Le Jury est composé de 5 jeunes de 18 à 25 ans du territoire de Belfort accompagnés par le compositeur et musicien Theo Hakola.

THEO HAKOLA

Theo Hakola est né à Spokane, dans l’État de Washington, et vit plus ou moins en France depuis 1978. Fondateur des groupes Orchestre Rouge et Passion Fodder, réalisateur artistique de plusieurs disques dont le premier de Noir Désir, il vient de sortir son septième album solo I Fry Mine In Butter ! (Wobbly Ashes Records/Médiapop). Il a joué aux Eurockéennes de Belfort en 1996. Parallèlement, il a travaillé pour le cinéma et le théâtre comme comédien et musicien avec Patricia Mazuy, Christophe Honoré, Pierre Trividic, Hans Peter Cloos, Nicolas Bigards et Michel Deutsch. Il est également l’auteur de cinq romans publiés en France dont le dernier, Idaho Babylone, est paru chez Actes Sud en septembre dernier.


COMPÉTITION INTERNATIONALE

longs métrages


ATHÈNES RHAPSODIE DE ANTOINE DANIS BRÜDER DER NACHT DE PATRIC CHIHA DE SAS EN SAS DE RACHIDA BRAKNI EL INVIERNO LLEGA DESPUÉS DEL OTOÑO DE NICOLÁS ZUKERFELD ET MALENA SOLARZ LA NOCHE POLAR DE FLORENCIA ROMANO LE PARC DE DAMIEN MANIVEL QUINZAINE CLAIRE DE ADRIEN GENOUDET SHORT STAY DE TED FENDT SINGING IN GRAVEYARDS DE BRADLEY LIEW THE ILLINOIS PARABLES DE DEBORAH STRATMAN VIEJO CALAVERA DE KIRO RUSSO WHAT’S IN THE DARKNESS DE WANG YICHUN

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14 COMPÉTITION INTERNATIONALE  LONGS MÉTRAGES

ATHÈNES RHAPSODIE ANTOINE DANIS DOC. / 2016 / FRANCE, GRÈCE / 1H18 / COUL. / VOSTF SCÉNARIO SCRIPT Antoine DANIS IMAGE PHOTOGRAPHY Antoine DANIS, Alexandre LÉGLISE, Adrien LECOUTURIER SON SOUND Iasonas THEOFANOU, Antonis SAMARAS, Myriam RENÉ MUSIQUE MUSIC Sylvain MARTY MONTAGE EDITING N icolas MILTEAU PRODUCTION Quentin LAURENT & L’œil sauvage, en coproduction avec la Société des Apaches, Rhône-Alpes Cinéma, le Fresnoy (France) et Minimal Films (Grèce) CONTACT Quentin Laurent (L'oeil sauvage) quentin@oeilsauvage.com

Un homme inconnu arpente une ville en ruine. Il ramasse les restes d’une lutte ancienne qui n’est pas finie. Qui ne finira pas. Cette ville est Athènes, devenue espace mythologique, décor de la gueule de bois de la crise européenne. En suivant ses pas, on entend les voix de ceux qui racontent leur quotidien ou leurs luttes politiques. Cris de dénonciation et cris d’espoir. Antoine Danis compose avec ce premier long-métrage la polyphonie d’une ville hétérodoxe, qui résonne à travers les temps. Au rythme d’un montage organique, Athènes se transforme en récit politique. Celui de la Grèce contemporaine. La rhapsodie peut reprendre ici son sens originel : ce qui annonce le récit d’un poème épique. An unknown man is meandering in a ruined city. He picks up the remainders of an ancient conflict that is not over. That will not end. This city is Athens, which has become a mythological space as well as the set of the hangover of the European crisis. As we follow his steps, we hear the voices of individuals talking about their everyday lives and about their political struggles. Cries of condemnation and cries of hope. With his feature debut, Antoine Danis composes the polyphonic music of a heterodox city resonating throughout times. Following the rhythm of the organic editing, Athens morphs into a political tale. The tale of contemporary Greece. Here, the rhapsody recovers its original meaning: that which announces the telling of an epic poem. (Elena Lopez Riera)

Après avoir été professeur d’économie, ANTOINE DANIS commence une activité de monteur, puis réalise ses premiers films. Antoine Danis was an economics teacher before working as an editor and starting directing his first films. CM / SF : 2013 Traversées (2013), Nierika (2016) Athènes rhapsodie est son premier long-métrage. Athènes rhapsodie is his first feature film.


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BRÜDER DER NACHT BROTHERS OF THE NIGHT

PATRIC CHIHA

DOC. / 2016 / AUTRICHE / 1H28 / COUL. / VOSTF SCÉNARIO SCRIPT Patric CHIHA IMAGE PHOTOGRAPHY Klemens HUFNAGL SON SOUND Atanas TCHOLAKOV MONTAGE EDITING P atric CHIHA PRODUCTION Ebba SINZINGER, Vincent LUCASSEN (WILDart FILM) CONTACT Adrien Boursot (Epicentre Films) adrien@epicentrefilms.com

Dès sa sublime ouverture, envolée lyrique dans un pays qui se dévoile à la nuit tombée, sur un port anonyme où les hommes échangent des regards intenses et portent la marinière, Brüder der Nacht met en place un petit théâtre auquel le merveilleux ne fera jamais défaut. De sa rencontre avec de jeunes hommes d’origine bulgare qui se prostituent en Autriche, Patric Chiha invente un film miroir. D’un côté le reflet de leur vie réelle, remplie de tristesse, d’abandons mais aussi d’une joyeuse fraternité. De l’autre, une véritable traversée du miroir, avec ces scènes d’une vie fantasmée et fantasmagorique qui nous entraînent quelque part vers les territoires de Fassbinder et Pasolini, et définitivement over the rainbow. From its sublime opening scene— a lyrical take-off into a country at dusk, on a anonymous harbour where men wearing sailors’ striped jerseys exchange intense looks —Brüder der Nacht sets up a small theatrical world in which magic is ever-present. Based on his encounter with young men from Bulgaria prostituting themselves in Austria, Patric Chiha has created a mirror-film. On the one hand, there is the reflection of these men’s real life: full of sadness and abandonments, yet also fraternally joyful. On the other hand, we go through the looking glass with scenes that represent a fantasized and phantasmagorical life and take us by the hand somewhere close to the territories of Fassbinder and Pasolini, somewhere that is most definitely ‘over the rainbow’. (Laurence Reymond)

PATRIC CHIHA a d'abord étudié la mode à Paris, puis le montage à l'INSAS à Bruxelles. Patric Chiha studied fashion in Paris, then editing at INSAS in Bruxelles. CM/SF : Casa Ugalde (2004), Les Messieurs (Entrevues 2005), Home (Entrevues 2006), Où se trouve le chef de la prison? (Entrevues 2007) LM/FF : Domaine (Entrevues 2009), Boys like us (2014)


16 COMPÉTITION INTERNATIONALE  LONGS MÉTRAGES

DE SAS EN SAS RACHIDA BRAKNI FICTION / 2016 / FRANCE / 1H22/ COUL. / VOF INTERPRÉTATION CAST Zita HANROT, Fabienne BABE, Samira BRAHIMA, Judith CAEN, Lorette LUGINBUHL, Sacha BOURDO, Meriem SERBAH S CÉNARIO SCRIPT Rachida BRAKNI, Raphaël CLAIREFOND IMAGE PHOTOGRAPHY K atell DJIAN, Nicolas DUCHÊNE SON S OUND David RIT, Séverine RATIER, Julien PEREZ MUSIQUE MUSIC Mehdi HADDAB et SMADJ, Gaëtan ROUSSEL et Rachida BRAKNI, Sharon VAUGHN et Jeff SILBAR DÉCORS PRODUCTION DESIGN Daniel BEVAN MONTAGE EDITING Yorgos LAMPRINOS PRODUCTION Thierry LOUNAS, Capricci CONTACT Louise Fontaine (Capricci) louise.fontaine@capricci.fr CE FILM CONCOURT AUSSI POUR LE PRIX GÉRARD FROT-COUTAZ (PREMIÈRES FICTIONS FRANÇAISES)

Comme un rituel, Nora se prépare, avec sa mère, pour visiter son frère détenu à Fleury Mérogis. L’habitude est là, tout juste perturbée par l’angoisse et la fébrilité jamais guéries. Sur place, tel un ballet perpétuellement déréglé, elles croisent d’autres femmes et partagent avec elles des instants d’une intensité croissante, alors que la chaleur monte dans une interminable succession de sas. Rachida Brakni nous plonge dans un quasi-huis clos cruel, kafkaïen et pourtant terriblement connecté au réel. De Sas en sas est avant tout une histoire de corps, magnifiquement filmés, qui nous renvoient tout autant à leur intimité qu’au corps social, blessé, qu’ils incarnent. Un corps en souffrance, mais un corps résilient. Like a ritual, Nora is getting prepared with her mother to visit her brother, who is detained at the Fleury Mérogis prison. They are accustomed to this, and their habit is disrupted only by the kind of anxiety and restlessness that can never disappear. Once on site, like in a continuously straying choreography, they run into other women with whom they share increasingly intense moments, while the heat rises in the site’s never-ending succession of airlocks. Rachida Brakni makes us travel into a quasi-enclosed world that reveals itself to be cruel, Kafkaesque, and yet completely connected to reality. De Sas en sas is first and foremost a story of bodies, beautifully filmed, that refers to the characters’ intimacy as much as the wounded social body which they incarnate. Suffering bodies but nonetheless resilient. (LR) Pensionnaire de la Comédie Française, RACHIDA BRAKNI a travaillé avec de nombreux cinéastes (Coline Serreau, Yasmine Kassari, HPG, Claire Simon, Régis Wargnier…). Elle est également metteur en scène de théâtre et musicienne. De sas en sas est son premier long métrage. Rachida Brakni is a pensionnaire of the Comedie Française, and has worked with many filmmakers (Coline Serreau, Yasmine Kassari, HPG, Claire Simon, Régis Wargnier..). She is also a stage director and a musician. De sas en sas is her first feature film.


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EL INVIERNO LLEGA DESPUÉS DEL OTOÑO WINTER COMES AFTER AUTUMN

MALENA SOLARZ NICOLAS ZUKERFELD

FICTION / 2016 / ARGENTINE / 1H33 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION CAST Marina CALIFANO, Guillermo MASSÉ SCÉNARIO SCRIPT Malena SOLARZ, Nicolás ZUKERFELD IMAGE PHOTOGRAPHY Fernando LOCKETT SON SOUND Nicoláz PAYUETA, Mercedes GAVIRIA DÉCORS PRODUCTION DESIGN Verónica BALDUZZI MONTAGE EDITING Manuel FERRARI PRODUCTION Rogelio NAVARRO, Fidelia Cine CONTACT Rogelio Navarro (Fidelia Cine) rogelionavarrovitar@gmail.com

Ainsi vont les saisons, les amours. C’est avec l’air d’une chanson populaire qu’ El Invierno llega después del otoño nous entraîne dans une valse à deux temps, suivant deux ex-amoureux bien après que leur histoire soit terminée. Dans ce double mouvement, avec ses rimes et variations, le film déploie une qualité musicale qui nous entraîne dans la complexité de ses personnages, fait résonner leurs faiblesses, et vibrer leur solitude. Malena Solarz et Nicolás Zukerfeld parviennent à une grande transparence dans leur mise en scène, toute en fluidité, et posent un regard d’une grande justesse sur ces trentenaires tout juste un peu moins paumés que des adolescents, déjà tellement plus mélancoliques. Thus pass the seasons and love stories. With the melody of a popular song, El Invierno llega después del otoño leads us into a twofour waltz, allowing us to follow the lives of two ex-lovers well after the end of their story together. Through this double movement, with its rhythms and variations, the film unfolds a musical score that takes the viewer into the complexity of the protagonists, resounds with their weaknesses, and lets their solitude vibrate. Malena Solarz and Nicolás Zukerfeld achieve an impressive transparency and a highly fluid staging in this work. They take a close and truthful look at those young people in their thirties, barely less lost than adolescents, and already so much more melancholic. (LR) NICOLAS ZUKERFELD et MALENA SORLAZ enseignent à l'Universidad del Cine à Buenos Aires. CM/SF Nicolas Zukerfeld : La distancia entre las cosas (2008), Escenas sobre la muerte de los niños (2009). El Invierno llega despues del otono est leur premier long métrage. Nicolas Zukerfeld and Malena Sorlaz teach at the Universidad del Cine in Buenos Aires. El Invierno llega despues del otono is their first feature film.


18 COMPÉTITION INTERNATIONALE  LONGS MÉTRAGES

LA NOCHE POLAR POLAR NIGHT

FLORENCIA ROMANO FICTION / 2016 / ARGENTINE / 1H01 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION CAST Martín SHANLY, Inés URDINEZ, Sol BUSNELLI, Gael POLICANO ROSSI, Gonzalo PASTRANA. SCÉNARIO SCRIPT Florencia ROMANO IMAGE PHOTOGRAPHY Fidel González ARMATTA SON SOUND Nahuel LÓPEZ DÉCORS PRODUCTION DESIGN Denise MARGULES MONTAGE EDITING Juan MORA, Florencia ROMANO PRODUCTION Belén BIANCO, Universidad del Cine Buenos Aires CONTACT Maria Marta Antin (Universidad del Cine) mmantin@ucine.edu.ar

La Noche polar tend vers une éclipse annoncée, événement collectif qui aura bien lieu, suivi par des regards comme possédés par la disparition de l’astre lunaire. Mais le film est avant tout la dérive intime et secrète d’un jeune homme dont on suit une quête opaque. Cette dernière se noue quelque part entre des livres plus ou moins ésotériques, le cosmos tout entier et l’inquiétante étrangeté des rayons de la bibliothèque où il travaille — lieu qui semble perpétuellement guetté par le surgissement de quelque spectre. La trajectoire du personnage est marquée par un flottement mélancolique, un solipsisme témoignant d’un lien distendu aux êtres et aux choses, plus un mouvement vers l’effacement et la disparition que la recherche d’une façon de s’inscrire dans le monde. La Noche polar reaches for an announced eclipse, for a collective event which will undoubtedly take place, and which will be observed by eyes acting as though they were possessed by the disappearance of the moon. But the film constitutes first and foremost the intimate, secret drifting of a young man, whose opaque search is followed. This search develops somewhere between a series of more or less esoteric books, the entire cosmos, and the uncanny shelves of the library in which the protagonist works. The latter seems constantly shadowed by the potential, sudden appearance of a spectre. Indeed, the protagonist’s trajectory is marked by a melancholic wavering, a solipsism that demonstrates the loosening ties between beings and things: more of a movement towards erasure and disappearance than towards the search for a way of being in the world. (Arnaud Hée) FLORENCIA ROMANO est diplômée de l'Universidad del Cine de Buenos Aires. Florencia Romano graduated from the Universidad del Cine in Buenos Aires. CM/SF : Construcciones (2012). La Noche polar est son premier long métrage. La Noche polar is her first feature film.


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LE PARC DAMIEN MANIVEL FICTION / 2016 / FRANCE / 1H11 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION CAST Naomie VOGT-ROBY, Maxime BACHELLERIE, Sobere SESSOUMA SCÉNARIO SCRIPT Damien MANIVEL, Isabel PAGLIAI IMAGE PHOTOGRAPHY Isabel PAGLIAI SON SOUND Jérôme PETIT, Simon APOSTOLOU MONTAGE EDITING W illiam LABOURY PRODUCTION Damien MANIVEL (MLD Films), Thomas ORDONNEAU (Shellac Sud) CONTACT Lucie Commiot (Shellac) lucie@shellac-altern.org

Deux adolescents se retrouvent dans un parc, ils se cherchent en l’arpentant dans une chorégraphie sentimentale désaccordée, timide et maladroite. Damien Manivel filme ces deux corps dans le paysage, il semble aussi en enregistrer l’air et les vibrations. En son cœur, Le Parc dérive et déraille de sa facture prosaïque pour cheminer vers un fantastique onirique. C’est l’heure de la séparation — la garçon s’en retourne chez lui — et de la nuit tombante : l’échange de textos qui s’ensuit se transforme en un bras de fer houleux et haletant. Cet épisode ouvre sur une seconde chorégraphie qui constitue la reprise hallucinée et possédée de la précédente, comme un rite conjuratoire mené avec les éléments et les figures de la nuit. Two teenagers find themselves in a park, where they look for each other by way of a sentimental, shy, gauche, and out-oftune choreography. Damien Manivel films these two bodies in the landscape, and seems to be simultaneously recording the environment’s air and vibrations. At its core, Le Parc drifts away and derails from its prosaic craftsmanship towards an oneiric fantasy. Then comes the time for goodbyes —the boy returns home— and the time for nightfall. The ensuing text message exchange transforms into a breathless and heated power struggle. This episode opens up on a second choreography, which constitutes the hallucinated and possessed rerun of its previous iteration, like a conjuring rite carried out through the elements and figures of night-time. (AH) Après avoir été danseur, DAMIEN MANIVEL a étudié le cinéma au Fresnoy — Studio national des arts contemporains. Damien Manivel was a dancer before studying film at Le Fresnoy — Studio National des Arts Contemporains. CM/SF : Viril (2007), Soit sage ô ma douleur (Entrevues 2008), La Dame au chien (2010), Un dimanche matin (2012) LM/FF : Un jeune poète (2014)


20 COMPÉTITION INTERNATIONALE  LONGS MÉTRAGES

QUINZAINE CLAIRE WAXING MOON

ADRIEN GENOUDET DOC. / 2016 / FRANCE, CAMBODGE / 1H37 / COUL. / VOSTF SCÉNARIO SCRIPT Adrien GENOUDET, Eline GRIGNARD IMAGE PHOTOGRAPHY Emilien AWADA SON Vincent VILLA MONTAGE EDITING M argaux SERRE PRODUCTION Adonis LIRANZA (Quilombo Films), Davy CHOU (Anti-Archive) CONTACT Adrien Genoudet (Quilombo films) adrien.genoudet@gmail.com

Quinzaine claire porte sur le geste créatif de son personnage, Phoussera Ing, dit Séra. Né à Phnom Penh en 1961, khmer par son père et français par sa mère, cet artiste est en charge d’un mémorial représentant la chute de la capitale aux mains des Khmers Rouges le 17 avril 1975. Avec ce film, Adrien Genoudet se pose plus largement la question de la mise en forme, à présent, de ce passé traumatique. Comme cette mémoire cambodgienne, douloureuse et problématique, encore en construction, le film plein d’abnégation intègre la recherche de sa propre forme, arrachant certaines séquences, remettant toujours en jeu sa mise en scène, avec un soin particulier apporté aux agencements entre images, sons et voix. Quinzaine claire relates to the creative gesture of its main character, Phoussera Ing, also known as Séra. Born in Phnom Penh in 1961, Khmer on his father’s side, French on his mother’s side, this artist is in charge of the memorial of the fall of the capital into the hands of the Khmer Rouge on April 17th, 1975. With this film, Adrien Genoudet asks a wider question on the formalisation, in the present day, of this traumatic past. Just like Cambodian memory —sorrowful and problematic, and still in the making— the film is full of abnegations and integrates its own formal research; some sequences are torn apart, the film’s very directing is continuously thrown back into play, while a particular care is given to the arrangement of images, sounds, and voices. (AH) ADRIEN GENOUDET est chercheur en histoire visuelle. Il enseigne le cinéma et les arts à Sciences Po Paris et à l’École européenne supérieur de l'image. Adrien Genoudet is a researcher in visual culture studies. He teaches film and visual arts at Sciences Po Paris and at the European School of Visual Arts. CM/SF : Mains libres² (2014), 1913 (1) et 1913 (2) (2015), À quatre mains (2016) LM/FF : Parler de la mort n'a jamais fait mourir (2014)


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SHORT STAY TED FENDT FICTION / 2016 / ÉTATS-UNIS / 1H01 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION CAST Mike MACCHERONE, Elizabeth SOLTAN, Mark SIMMONS, Marta SICINSKA, Meaghan LYDON SCÉNARIO SCRIPT Ted FENDT IMAGE PHOTOGRAPHY Sage EINARSEN SON SOUND Sean DUNN , Daniel D’ERRICO MONTAGE EDITING Ted FENDT PRODUCTION Ted FENDT, Britni WEST, Blake LARUE, Graham SWINDOLL CONTACT Ted Fendt ted.fendt@gmail.com

Mike est le prototype du trentenaire adulescent. Lorsqu’un ami lui propose de le remplacer dans une coloc à Philadelphie, le banlieusard tente l’aventure de la grande ville. De nouvelles rencontres en petits jobs improbables, Mike avance maladroitement et se retrouve vite confronté à tout ce qui rend la vie si compliquée : les autres. Ted Fendt, avec ce premier long-métrage tendu comme un arc, réinvente la figure du loser, et le transforme en miroir d’un monde qui se révèle d’une cruauté assumée. Derrière ses aspects de comédie douce amère, il y a dans Short Stay une réelle acidité du trait, et une magnifique exigence, aussi bien dans la précision de sa mise en scène que dans la virulence d’un portrait de l’Amérique au vitriol. Mike is the prototype of a thirty-something ‘adulescent’. When a friend offers him his room in a flat-share in Philadelphia, the suburbanite embarks on the great city adventure. From new encounters to small and improbable jobs, Mike evolves awkwardly and, before long, he finds himself confronted with what makes life so complicated: other people. With this first, highly tense feature, Ted Fendt reinvents the figure of the ‘loser’, and turns it into the reflection of a world that is comfortable with its own cruelty. Under its atmosphere of bitter-sweet comedy, Short Stay demonstrates some acerbic traits and a magnificent excellence, both on the level of its precise staging and in the venomous portrait it paints of North America. (LR) TED FENDT travaille comme projectionniste notamment au Film Society of Lincoln Center et à l'Anthology Film Archives, et comme traducteur pour le sous-titrage de films français. Ted Fendt works as a projectionist, at the Film Society of the Lincoln Center and at the Anthology Film Archives, and as a translator for the subtitling of French films. CM/SF : Broken Specs (Entrevues 2012), Travel Plans (2013), Going Home (2015) Short Stay est son premier long métrage Short Stay is his first feature film


22 COMPÉTITION INTERNATIONALE  LONGS MÉTRAGES

SINGING IN GRAVEYARDS BRADLEY LIEW FICTION / 2016 / MALAISIE, PHILIPPINES / 2H21 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION CAST Pepe SMITH, Mercedes CABRAL, Lav DIAZ, Susan AFRICA SCÉNARIO SCRIPT Bradley LIEW, Bianca BALBUENA IMAGE PHOTOGRAPHY Larry MANDA SON SOUND Mickey MACACHOR MUSIQUE MUSIC Pepe SMITH DÉCORS PRODUCTION DESIGN Benjamin PADERO, Carlo TABIJE MONTAGE EDITING Bradley LIEW PRODUCTION Epicmedia Productions Inc. CONTACT Torsten Schulze (M-Appeal) films@m-appeal.com

La vie de Pepe est d’être le sosie de Joey Smith, légende bientôt septuagénaire du rock philippin. Les deux ici ne font qu’un puisque le second interprète le premier, donc un peu lui-même. Le film et le personnage accueillent donc un abîme paradoxal : celui d’être soi tout en jouant perpétuellement à être un autre. Singing in Graveyards fait bientôt intervenir un nouvel enjeu déstabilisant puisque cet individu éparpillé doit écrire, en son nom, une chanson d’amour pour ouvrir un concert de son modèle. Bradley Liew instaure un ton singulièrement rêveur et drolatique pour cette chronique installée dans un quotidien qui ne cesse d’être troué et inquiété par l’imaginaire ; des percées non surlignées mais qui, au contraire, apparaissent bien comme la continuité de la réalité. Pepe’s occupation is to be the impersonator of Joey Smith, the almost seventy-year-old legend of Filipino rock. In this particular case, the two men are one, as the latter interprets the former, thereby somehow interpreting his own self. Hence, the film and its main figure welcome a paradoxical abyss: being oneself while always playing someone else. Soon, Singing in Graveyards builds in a new disruptive challenge when this scattered individual is forced to write a love song, in his own name, for the opening of a concert featuring his very model. Bradley Liew sets a dreamy and humorous tone for this chronicle anchored in an everyday life constantly pierced and hijacked by the imaginary. These imaginary openings are never emphasized; on the contrary, they appear like the continuation of reality. (AH) Réalisateur et chef opérateur, BRADLEY LIEW est également l’assistant de Lav Diaz, dont il produit le prochain film. Filmmaker and directof photography, Bradley Liew is also Lav Diaz’s assistant and is producing his next film. CM/SF : Mack (2012), We need to break up (2014), Xing (2014) Singing in Graveyards est son premier long métrage. Singing in Graveyards is his first feature film.


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THE ILLINOIS PARABLES DEBORAH STRATMAN DOC. / 2016 / ÉTATS-UNIS / 1H / COUL. / VOSTF SCÉNARIO SCRIPT Deborah STRATMAN IMAGE PHOTOGRAPHY Deborah STRATMAN SON SOUND Steve BADGETT, Melinda FRIES, Edgar JORGE, Jennifer LANGE, Chris SALVETER, Deborah STRATMAN, Jacob ROSS MONTAGE EDITING D eborah STRATMAN PRODUCTION Deborah STRATMAN (Pythagoras Film) CONTACT Deborah STRATMAN delta@pythagorasfilm.com

Fidèlement au titre de son film, Deborah Stratman déploie un champ allégorique et méditatif en partant de courts récits se déroulant dans cet État de l’Illinois entre l’an 600 — soit bien avant la « naissance d’une nation » — et 1985. Cette traversée de l’histoire se fait par la trace (ou son absence) dans le paysage, mais également des images d’archives. On note aussi la présence d’intertitres renvoyant aux « actualités » que l’écrivain John Dos Passos intégrait dans sa trilogie USA (1938). Précis sensible et généreux, The Illinois Parables agence les matières visuelles, sonores et musicales pour narrer un fragment du grand roman américain, où semblent condamnés à cohabiter l’idéal et la violence, la pureté et la souillure. Faithful to the title of her film, Deborah Stratman sets up an allegorical and meditative field by narrating shorts stories set in the State of Illinois between the year 600 —namely far before the ‘birth of the nation’— and 1985. This crossing over history occurs by way of the trace (or its absence) in the landscape, but also through archival images. The film further incorporates headings that reference the “Newsreel” which the writer Dos Passos had included in his USA trilogy (1938). The Illinois Parables is precise, sensitive, and generous. It organises visual, aural, and musical matter to narrate a fragment of the great American novel, in which ideals and violence, purity and sin seem condemned to cohabitate. (AH) DEBORAH STRATMAN est une artiste et cinéaste dont le travail interroge les relations entre les paysages et les luttes des hommes pour le pouvoir. Elle enseigne à l'Université de l'Illinois à Chicago. Deborah Stratman is an artist and a filmmaker working on the relationship between physical environments and human struggles for power. She teaches at the University of Illinois in Chicago. CM/SF : une trentaine de courts métrages et vidéos d’art. More than thirty shorts and art videos. LM/FF : The BLVD (1999), Kings of the Sky (2004)


24 COMPÉTITION INTERNATIONALE  LONGS MÉTRAGES

VIEJO CALAVERA DARK SKULL

KIRO RUSSO FICTION / 2016 / BOLIVIE, QATAR / 1H20 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION CAST Julio CEZAR TICONA, Narciso CHOQUECALLATA , Anastasia DAZA LÓPEZ, Rolando PATZI , Israel HURTADO , Elisabeth RAMÍREZ GALVÁN SCÉNARIO SCRIPT Kiro RUSSO, Gilmar GONZALES IMAGE PHOTOGRAPHY Pablo PANIAGUA SON SOUND Gilmar GONZALES Marcelo GUZMAN, Peppo RAZZARI, Mechi TENINA, Andres POLONSKY, Kiro RUSSO MONTAGE EDITING K iro RUSSO, Pablo PANIAGUA PRODUCTION Kiro RUSSO, Pablo PANIAGUA, Gilmar GONZALES (Socavón Cine et S.T.M.M.D.H) CONTACT Eulogio Cuevas (Socavon Cine) socavoncine@gmail.com

Dans la région minière de Huanuni en Bolivie, la terre tremble sous les pieds des gens, elle cache des secrets bouleversants, elle garde les traces du passé, elle représente cet espace commun entre les vivants et les morts. C’est en suivant le déplacement déboussolé d’Elder, jeune orphelin qui vit avec sa grand-mère, qu’on s’enfonce dans les profondeurs de ce film minéral. Elder vient de perdre son père et va chercher refuge chez son oncle qui l’introduit au dur métier de mineur. À l’ombre des couloirs souterrains, il apprendra les secrets liés à la mort de son père. C’est dans les entrailles de la terre qu’il commence à faire partie de cette étrange communauté de mineurs, et c’est là bas, qu’il entreprendra un voyage initiatique bouleversant. In the mining region of Huanuni in Bolivia, the earth shakes under people’s footsteps, it hides its shattering secrets, it keeps traces from the past, it stands for the common ground between the living and the dead. By following the flustered roaming of Elder, a young orphan living with his grandmother, we sink into the depths of this mineral film. Elder has just lost his father and seeks refuge with his uncle, who introduces him to the difficult work of mining. In the shadows of the underground corridors, he learns the secrets linked to his father’s death. It is in the bowels of the earth that he begins to incorporate the miners’ strange community, and it is there that he will embark upon an initiatory and earth-shattering voyage.

(ELR)

KIRO RUSSO a étudié à l’Universidad del Cine à Buenos Aires. Kiro Russo studied at the Universidad del Cine in Buenos Aires. CM/SF : Enterprisse (2010), Juku (2012), Nueva Vida (Entrevues 2015) Viejo Calaveja est son premier long métrage. Viejo Calaveja is his first feature film.


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WHAT'S IN THE DARKNESS WANG YICHUN FICTION / 2015 / CHINE / 1H47 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION CAST SU Xiaotong, LU Qiwei, JIANG Xueming, GUO Xiao, LIU Dan SCÉNARIO SCRIPT WANG Yichun IMAGE PHOTOGRAPHY ZHAO Long SON SOUND WU Yue MUSIQUE MUSIC TU Xiaocha DÉCORS PRODUCTION DESIGN ZHANG Xiaobing MONTAGE EDITING CHEN Bingfeng, GUANG Liu PRODUCTION HH Pictures CONTACT Jack Lee (China Film International) jack.lee@cfi-sh.com

En 1991, dans une petite ville de la campagne chinoise, des femmes sont retrouvées assassinées. Une adolescente, Qu, est fascinée par l’enquête que mène son père, policier maladroit. Si le film cite la trame de Memories of Murder de Bong Joon-ho, il s’en éloigne bien vite pour se concentrer sur le portrait d’une adolescente en plein éveil sexuel. Pour son premier long-métrage, Wang Yichun navigue entre conte noir, fable adolescente et éléments autobiographiques qui donnent toute sa profondeur, vertigineuse, au film. Car, de la société patriarcale aux regards concupiscents des hommes sur l’adolescente, le film déploie l’idée d’un mal inhérent à la société, et auquel les femmes sont toutes un jour ou l’autre confrontées. In 1991, in a small Chinese city in the countryside, several women are found murdered. A teenager, Qu, becomes fascinated by the investigation led by her father, a clumsy policeman. While the film quotes the plot of Bong Joon-ho’s Memories of Murder, it quickly takes a step aside from it to focus on the portrait of a teenager experiencing her own sexual awakening. For her debut feature, Wang Yichun navigates between a noir tale, a coming-of-age fable, and autobiographical elements, which give the film its vertiginous depth. Indeed, from the social patriarchy to men’s concupiscent gaze on the young woman, this work unfolds the notion of an evil inherent to society, one with which all women, one day or another, are confronted. (LR) WANG YICHUN a étudié le français avant de s'orienter vers le cinéma. Wang Yichun studied French before working in cinema. What's in the Darkness est son premier film. What's in the Darkness is her first film.


COMPÉTITION INTERNATIONALE

courts métrages


DEAR RENZO DE AGOSTINA GÁLVEZ ET FRANCISCO LEZAMA LE DÉSIR DE RÉMI GENDARME KOROPA DE LAURA HENNO LA MAISON DE ALIONA ZAGUROVSKA MAÑANA VENDRÁ LA BALA DE GABRIEL AZORÍN MIRADOR DE LUCIA MARTINEZ O ESTACIONAMENTO DE WILLIAM BIAGIOLI PASTORALE DE PIERRE DENOITS LE RÉEL PARLE POUR NOUS DE ANTONIN IVANIDZÉ UNE COLLINE DE DIANA MUNTEANU LE VOLEUR DE LISBONNE DE LÉO RICHARD

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COMPÉTITION INTERNATIONALE  COURTS &COMPÉTITION MOYENS MÉTRAGES INTERNATIONALE  COURTS & MOYENS MÉTRAGES

DEAR RENZO AGOSTINA GÁLVEZ FRANCISCO LEZAMA FICTION / 2016 / ARGENTINE / 19 MIN. / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION CAST Laila MALTZ, Renzo COZZA, Miel BARGMAN, David MALONEY, Stephen GUREWITZ SCÉNARIO SCRIPT Francisco LEZAMA IMAGE PHOTOGRAPHY C hristopher MESSINA DÉCORS PRODUCTION DESIGN Agostina GALVEZ, Francisco LEZAM A MONTAGE EDITING Agostina GÁLVEZ PRODUCTION Bingham Bryant CONTACT Maria Marta ANTIN (Universidad del Cine) mmantin@ucine.edu.ar

Deux jeunes Argentins réunis par hasard parcourent les rues de New-York et se retrouvent perdus dans un méandre de taux de change, problèmes de traduction, vocation religieuse et flirt nocturne. Two young Argentines, brought together by chance, wander the streets of New York City and become lost in a maze made up of currency exchange, translation problems, religious vocation, and night-time flirtation. AGOSTINA GALVEZ et FRANCISCO LEZAMA ont tous les deux étudié à l'Universidad del Cine à Buenos Aires, où Francisco enseigne aujourd’hui l’Histoire du cinéma. Agostina Galvez and Francisco Lezama both studied at the Universidad del Cine in Buenos Aires, where Francisco is now teaching history of cinema. CM/SF : Agostina Galvez : El Traje (2012), Francisco Lezama : La Ilusión te queda (2011) Ils ont co-réalisé ensemble La Novia de Frankenstein (2015) They codirected La Novia de Frankenstein (2015)


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LE DÉSIR

KOROPA

RÉMI GENDARME

LAURA HENNO

DOC. / 2016 / FRANCE / 8 MIN. / COUL. / VOF

DOC. / 2016 / FRANCE / 20 MIN. / COUL. / VOF

SCÉNARIO SCRIPT Rémi GENDARME IMAGE SON MONTAGE PHOTOGRAPHY SOUND EDITING C hloé TRUCHON PRODUCTION Rémi GENDARME CONTACT Marie-Odile GAZIN (The Kingdom) mogazin@hotmail.fr

SCÉNARIO IMAGE SCRIPT PHOTOGRAPHY Laura HENNO SON SOUND Laura HENNO, Tristan PONTÉCAILLE MONTAGE EDITING Q utaiba BARHAMJI PRODUCTION Cédric WALTER, Olivier MARBOEUF (Spectre productions) CONTACT Lou JOMARON (Spectre & Phantom) lou.jomaron@lafabrique-phantom.org

Le monde blanc de l'hôpital. La violence surgit. Un besoin absolu, il pense, il filme, il vole. A hospital’s white world. In which violence emerges. A vast and absolute longing. He thinks, he films, he flies.

Après des études de mathématiques, RÉMI GENDARME s'oriente vers la réalisation documentaire. Rémi Gendarme studied mathematics, then started directing documentaries. Il prépare son premier long métrage: Fils de Garches. He’s currently working on his first feature film Fils de Garches. CM/SF : Riolette autopsie (2012), Une affaire de décor (2012)

Au large d'Anjouan, Patron, un jeune orphelin, suit l'apprentissage de son père adoptif pour devenir « Commandant ». D’ici peu, accompagné de son copilote de 15 ans, il emmènera en vedette ses premiers voyageurs clandestins vers Mayotte. Off the coast of Anjouan, Patron, a young orphan, is completing an apprenticeship with his adoptive father to become a ‘Commander’. Before long, he will be bringing clandestine travelers to Mayotte on his speedboat, together with his fifteen-year-old co-pilot.

LAURA HENNO est photographe (lauréate du Prix Découverte des Rencontres Internationales de Photographie d'Arles en 2007.) Koropa est son premier film. Laura Henno is a photographer (winner of the Discovery Award of The Rencontres d’Arles in 2007). Koropa is her first film.


30 COMPÉTITION INTERNATIONALE  COMPÉTITION COURTS INTERNATIONALE  & MOYENS MÉTRAGES COURTS & MOYENS MÉTRAGES

LA MAISON ALIONA ZAGUROVSKA

DOC. / 2016 / FRANCE / 31 MIN. / COUL. / VOF SCÉNARIO SCRIPT Aliona ZAGUROVSKA IMAGE PHOTOGRAPHY Aurore TOULON SON SOUND Aurore TOULON, Rémi LANGLADE, Clément GHIRARDI MONTAGE EDITING R émi LANGLADE PRODUCTION Lucas Le POSTEC CONTACT Géraldine AMGAR (La Fémis) g.amgar@femis.fr

TOMORROW, THE BULLETT

GABRIEL AZORÍN

FICTION / 2016 / ESPAGNE / 28 MIN. / COUL. / VOSTF

INTERPRÉTATION CAST Jimena MERINO, Rafa ALBEROLA RUBIO SCÉNARIO SCRIPT Rafa ALBEROLA RUBIO, Gabriel AZORÍN IMAGE PHOTOGRAPHY Gabriel AZORÍN Sur les bancs d'un jardin public, les hommes se suivent SON SOUND Alberto CARLASSARE, Lucas VÁZQUEZ de la RUBIA et ne se ressemblent pas. Éric, Alain et les autres nous DÉCORS PRODUCTION DESIGN Rafa ALBEROLA RUBIO, Gabriel AZORÍN, laissent espérer une alternative à l'apathie urbaine, Jimena MERINO une fenêtre sur l’intime, sur leur maison à eux. A por- MONTAGE EDITING Perig GUINAMANT trait gallery of different men, sitting on the benches of PRODUCTION Gabriel AZORÍN, Perig GUINAMANT, Cristina HERGUETA, a park. Éric, Alain, and the others give us faith in an Cristina Hergueta GARDE, Jimena MERINO, Lucas VÁZQUEZ de la RUBIA alternative to urban apathy, opening a window onto CONTACT gabriel.azorin@gmail.com their intimacy and their own home.

Après des études de langues, ALIONA ZAGUROVSKA entre à l‘ESAV Toulouse en 2010, puis à la Fémis en 2014. La Maison est son premier film montré en festivals. Aliona Zagurovska studied foreign languages then enrolled the ESAV in Toulouse in 2010, before starting la Fémis in 2014. La Maison is her fist film shown in festivals.

Une fille et un garçon courent comme si la seule façon de s'en sortir était de se perdre dans la nuit, parmi les arbres, les pavés, les karaokés — et ne jamais revenir. A girl and a boy are running as if the only way of escaping were to become lost in the night, among the trees, the cobblestones, the karaoke clubs —and to never come back.

GABRIEL AZORÍN est diplômé de l'ECAM à Madrid. Gabriel Azorín graduated from ECAM in Madrid. CM/SF : Los galgos (2011), El buen amor (2014) LM/FF : Pas à Genève (film collectif, 2014), Los Mutantes (2016)


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MIRADOR LUCIA MARTINEZ

FICTION / 2016 / SUISSE / 14 MIN. / COUL. / VOF INTERPRÉTATION CAST Lucas MARTINEZ, Yolmai RIONDEL, Lou COHEN, Eléonore CHALIÉ SCÉNARIO SCRIPT Lucia MARTINEZ IMAGE PHOTOGRAPHY A ugustin LOSSERAND MUSIQUE MUSIC Thomas BENARD DÉCORS PRODUCTION DESIGN MANDINE KNÖPFEL MONTAGE EDITING L ucia MARTINEZ PRODUCTION Seob Kim BONINSEGNI (Offshore) CONTACT Yvan ALVAREZ (Offshore) filmsoffshore@gmail.com

Depuis un mirador, Lucas observe, effleure un monde qui se bâtit autour de lui. Le temps d’une sortie de son foyer d'accueil, Lucas navigue entre plusieurs interlocuteurs. Mystérieux, ce personnage dévoile progressivement sa fragilité et sa pudeur. From a mirador, Lucas is observing, touching upon a world that is growing around him. Having just escaped from his foster shelter, he navigates between various interlocutors. This mysterious protagonist progressively reveals his fragility and his modesty.

LUCIA MARTINEZ a obtenu un Bachelor en Arts Visuels à la HEAD à Genève cette année et a débuté un Master Cinéma entre la HEAD et l’ECAL. Mirador est son premier film. Lucia Martinez holds a Bachelor in Visual Arts from the HEAD in Geneva and started this year a Master in Cinema between HEAD and ECAL. Mirador is her first film.

O ESTACIONAMENTO THE PARKING LOT

WILLIAM BIAGIOLI FICTION / 2016 / BRÉSIL / 20 MIN. / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION CAST Daniel FELICE, Edison MERCURI, Domingos SILVA SOUZA, Bruno LOPS, Marcus GENNARI SCÉNARIO SCRIPT William BIAGIOLI IMAGE PHOTOGRAPHY R enato OGATA SON SOUND Thiago BARBOSA MONTAGE EDITING R icardo FARIAS DÉCORS PRODUCTION DESIGN Gabrielle PAIVA PRODUCTION Antônio JUNIOR, Marisa MERLO, William BIAGIOLI (Grafo Audiovisual) CONTACT Amanda SOPRANI (Grafo Audiovisual) contatografoav@gmail.com

Jean est venu d'Haïti au Brésil pour chercher du travail. Il est finalement embauché dans un parking, qui devient aussi sa maison. Jean découvrira que cette routine peut le mener à la folie. Jean has come from Haiti looking for a job in Brazil. He is eventually hired to work in a parking lot, which he also begins to inhabit. Jean will soon find out that his routine in this place could lead him into madness. Réalisateur et producteur, WILLIAM BIAGIOLI travaille également comme programmateur pour le festival Olhar de Cinema. William Biagioli is a filmmaker and a producer as well as a programmer for the Olhar de Cinema film festival. CM/SF : Curitiba: The best city in the world (2014)


32 COMPÉTITION INTERNATIONALE  COMPÉTITION COURTS INTERNATIONALE  & MOYENS MÉTRAGES COURTS & MOYENS MÉTRAGES

PASTORALE PIERRE DENOITS FICTION / 2016 / FRANCE / 20 MIN. / COUL. / VOF INTERPRÉTATION CAST Rémi TAFFANEL, Gilles GUÉRIN, Mélissa BARBAUD, Olivier FARGE SCÉNARIO SCRIPT Pierre DENOITS IMAGE PHOTOGRAPHY Martin RIT SON SOUND Fred DABO MONTAGE EDITING J uliette ALEXANDRE PRODUCTION Ingrid GOGNY (Les Films du dimanche) CONTACT Ingrid GOGNY (Les films du dimanche) ingridgogny@orange.fr

REALITY SPEAKS FOR US

ANTONIN IVANIDZÉ FICTION / 2016 / SUISSE / 29 MIN. / COUL. / VOF

INTERPRÉTATION CAST Alix MERLE, Adrien DETRAZ, Alexandre CANALE SCÉNARIO SCRIPT Antonin IVANIDZÉ IMAGE PHOTOGRAPHY Antonin IVANIDZÉ SON SOUND Sayaka MIZUNO DÉCORS PRODUCTION DESIGN Alice RIVA MONTAGE EDITING A ntonin IVANIDZÉ, Gabriel GONZALEZ Paul a traversé la France pour retrouver Madeleine, PRODUCTION HEAD – Cinéma / cinéma du réel une bergère dont il fut amoureux. Mais sur le chemin CONTACT Antonin IVANIDZÉ anton1_95@hotmail.fr de l'alpage, il ne croise que des moutons éparpillés par l'orage et un berger inquiet. Paul has travelled across France to try to find Madeleine, a shepherdess whom Sandro est un jeune schizophrène interné dans un he loved. But on his way to the mountain pasture, Paul hôpital psychiatrique de la banlieue française de crosses only sheep, scattered by the storm, as well as Genève. Lors d’une balade, il se retrouve avec son a worried shepherd. amie Ada un jour d’élections en Haute-Savoie, en pleine campagne du Front National. Sandro is a young Après des études d’agronomie, PIERRE DENOITS se tourne vers le cinéma. Il a schizophrenic patient living in a psychiatric hospital, travaillé plusieurs années pour la société de distribution Potemkine avant de se in the French outskirts of Geneva. During a walk with consacrer à la réalisation. Pierre Denoits studied agronomics and then worked in his friend Ada on election day in Haute-Savoie, he is cinema. He worked for several years for the distribution company Potemkine before confronted with the campaign of the Front National. starting directing films. ANTONIN IVANIDZÉ étudie depuis 2013 au département Cinéma/cinéma du réel à CM/SF : Adieu Pan (2015). la Haute école d’art et de design de Genève. Le Réel parle pour nous est son premier court-métrage. Since 2013, Antonin Ivanidzé studies in the at cinema departement of the HEAD in Geneva. Le Réel parle pour nous is his first short film.


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UNE COLLINE THE HILL THE LISBON THIEF

LÉO RICHARD

FICTION / 2016 / FRANCE / 32 MIN. / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION CAST Ivan GUEUDET, Marío BARROSO, Sophie RODRIGUES, Jorge Vieira RODRIGUES, Camille POLET SCÉNARIO SCRIPT Léo RICHARD IMAGE PHOTOGRAPHY Cyril CANTE SON SOUND Romain OZANNE, Rémi CARREAU DÉCORS PRODUCTION DESIGN Valentine GAUTHIER MONTAGE EDITING L éo RICHARD PRODUCTION Margaux JUVÉNAL CONTACT Maxime ROY (Collectif COMET) collectif.comet@gmail.com

À Lisbonne, il existe une brigade spéciale dédiée aux vols de caméra. Peu de caméras sont retrouvées, parfois des cassettes, jetées au caniveau comme autant de souvenirs perdus. Des policiers les visionnent, espérant trouver des indices dans ce flot d’images touristiques et intimes. In Lisbon, a whole police squad specializes in investigating camera thefts. Few cameras are recovered but, sometimes, tapes are found thrown in the gutter like piles of lost memories. The policemen watch them, hoping to find evidence and clues in a flood of touristic and private images. Après avoir étudié le cinéma à l'université, LÉO RICHARD devient l’assistant de d’HPG et d’Hubert Viel sur leurs long-métrages. Aujourd’hui, il étudie le montage à la Fémis. Le Voleur de Lisbonne est son premier court métrage. After studying cinema at the University, Léo Richard became the assistant of HPG and Hubert Viel on their feature films. He is currently studying editing at le Fémis. Le Voleur de Lisbonne is his first short film.

DIANA MUNTEANU FICTION / 2016 / FRANCE / 26 MIN. / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION CAST M aria MITU,Teodor CORBAN,Mircea ANDREESCU, Stefan PAVEL SCÉNARIO SCRIPT D iana MUNTENAU, Adina DULCU IMAGE PHOTOGRAPHY Alexandra de SAINT BLANQUAT SON SOUND Antoine BERTUCCI , Maxence DUSSÈRE, Antonin GUERRE, Lucas DOMÉJEAN DÉCORS PRODUCTION DESIGN Alexandru REMUS GABOR MONTAGE EDITING S ouliman SCHELFOUT PRODUCTION M argaux JUVÉNAL CONTACT Géraldine AMGAR (La Fémis) g.amgar@femis.fr

Dorina se rend en Transylvanie avec son père pour vendre les terres que sa mère leur a laissées en héritage. En arpentant ces collines, elle se confronte à son histoire familiale. Au village, la fête des roues se prépare. Dorina travels to Transylvania with her father in order to sell the land her mother has left them as a heritage. While roaming in the hills, she is confronted with her family’s past. Meanwhile, at the village, people are preparing for the ceremony of the wheels. Après avoir suivi une formation en cinéma à la UNATC de Bucarest, DIANA MUNTEANU intègre le département réalisation de La Fémis en 2012. Une colline est son film de fin d’études. Diana Munteanu studied cinema at the UNATC in Bucarest and then enrolled La Fémis in film directing in 2012. Une colline is her graduation film. CM/SF : Deux ou trois choses à propos d'Ana (2011), Deux rivages (2015)



DE SAS EN SAS DE RACHIDA BRAKNI JOURS DE FRANCE DE JÉRÔME REYBAUD LUMIÈRES D’ÉTÉ DE JEAN-GABRIEL PÉRIOT LA PAPESSE JEANNE DE JEAN BRESCHAND TOMBÉ DU CIEL DE WISSAM CHARAF

P.16 P.36 P.37 P.38 P.39


36 PREMIÈRES FICTIONS FRANÇAISES

JOURS DE FRANCE JÉRÔME REYBAUD FICTION / 2016 / FRANCE / 2H17 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION CAST Pascal CERVO, Arthur IGUAL, Fabienne BABE, Nathalie RICHARD, Laetitia DOSCH, Liliane MONTEVECCHI, Marie FRANCE, Jean-Christophe BOUVET SCÉNARIO SCRIPT Jérôme REYBAUD IMAGE PHOTOGRAPHY Sabine LANCELIN SON SOUND Sébastien EUGÈNE MUSIQUE MUSIC Léonard LASRY MONTAGE EDITING S ébastien EUGÈNE PRODUCTION Chaz Productions CONTACT Léa Belbenoit (KMBO) lea@kmbofilms.com

Pierre (interprété par Pascal Cervo, héros fragile d’une famille de cinéma qui comprend Laurent Achard, Pierre Léon ou Paul Vecchiali), entreprend un road movie à travers la France profonde. Cherchant à fuir son amant — ou lui-même — il sillonne des aires d’autoroute, des stations-service, des cafés secrets. Il quadrille la province de France. Disparaître. Échapper. S’enfoncer dans les profondeurs d’un pays pour effacer les traces d’une vie. D’un amour. Après la fuite de Pierre, Paul se perd à son tour dans la quête désespérée de son compagnon, suivant des traces virtuelles laissées sur des réseaux sociaux comme Grindr. Jours de France est un film qui construit une sorte de portrait comique du couple, un film qui parle autant de la passion amoureuse que de la solitude qu’elle peut provoquer. Pierre (played by Pascal Cervo, the fragile hero of a ‘cinema family’ which includes Laurent Achard, Pierre Léon, and Paul Vecchiali) embarks on a road movie through the heartland of France. As he tries to escape from his lover —or from himself— he roams the country’s highway rest areas, its gas stations, its secret cafés. He covers all of France’s provinces. To disappear. To escape. To sink into the depths of a country in order to erase the traces of a life. Of a love. Following Pierre’s escape, Paul loses himself in turn in the desperate quest for his partner. He follows his virtual traces left on social networks like Grindr. Jérôme Reybaud’s debut film is a work that develops a couple’s comic portrait of sorts, a work that addresses passionate love as much as it tackles the solitude which the latter provokes. (ELR) Après un doctorat sur le poète Philippe Jaccottet et diverses publications critiques, JÉRÔME REYBAUD se tourne vers la réalisation. Jours de France est son premier long-métrage de fiction. Jerôme Reybaud holds a PHD on the poet Philippe Jaccottet and published several critics before starting directing films. Jours de France is his first fiction feature film. CM/SF : Aires 06 (2006), Trois dames pour Jean-Claude Guiguet (2008) LM/FF : Qui êtes-vous Paul Vecchiali ? (2012)


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LUMIÈRES D’ÉTÉ JEAN-GABRIEL PÉRIOT FICTION / 2016 / FRANCE / 82 MIN. / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION CAST Hiroto OGI, Akane TATSUKAWA, Yuzu HORIE, Keiji IZUMI, Mamako YONEYAMA SCÉNARIO SCRIPT Jean-Gabriel PÉRIOT, en collaboration avec Yoko HARANO IMAGE PHOTOGRAPHY Denis GRAVOUL SON SOUND Dana FARZANEPHOUR, Ai MIYATAKE, Laure ARTO MUSIQUE MUSIC Xavier THIBAULT MONTAGE EDITING J ean-Gabriel PÉRIOT, Mona LANFANT PRODUCTION Nicolas BREVIÈRE (Local Films) CONTACT Miliani Benzerfa (Potemkine) miliani@potemkine.fr

À Hiroshima, une survivante de la bombe atomique raconte son expérience lors d’un entretien pour un documentaire télévisé. Elle évoque le souvenir de sa sœur aînée, une jeune infirmière disparue mais qui reste omniprésente dans ses souvenirs. À la fin du tournage, le réalisateur — Akihiro, un Japonais basé à Paris — bouleversé fait la rencontre d’une énigmatique Japonaise. Ils parcourent ensemble les rues de Hiroshima. Entre eux circulent un possible amour à venir et les traces indélébiles de l’histoire de la ville ; le couple s’enfonce dans les profondeurs d’un récit qui brouille les frontières entre le présent et l’histoire, le réel et le fantastique. Un récit doux, qui avance par détails : un visage, une voix, un mot perdu dans la brume des souvenirs comme dans la lumière de l’été. In Hiroshima, a survivor of the atomic bomb speaks about her experience during an interview for a television documentary. She evokes memories of her older sister: a young nurse who has disappeared yet remains omnipresent in the survivor’s thoughts. At the end of the shooting, the filmmaker —Akihiro, a Japanese man based in Paris —is deeply touched, and encounters an enigmatic Japanese woman. Together, they walk through the streets of Hiroshima. Between the two moves the possibility of budding love, as well as the indelible traces the city’s history. The couple sinks into the depths of a tale that blurs the boundaries between present and past, reality and imaginary. A tender tale that moves forward through the details: a face, a voice, a word that becomes lost in the haze of memory as it would in the light of summertime. (ELR) JEAN-GABRIEL PÉRIOT a réalisé une vingtaine de courts métrages (films de montage, fictions, animation) Son travail questionne la Violence et l’Histoire. Jean-Gabriel Périot directed about twenty short films (found footage films, fictions and animation). His work explores the relationship between Violence and History. CM/SF : Eût-elle été criminelle...(2005), 200 000 fantômes (2006), The Devil (2012) LM/FF : Une Jeunesse Allemande (2015) Lumières d'été est son premier long métrage de fiction. Lumières d'été is his first fiction feature film.


38 PREMIÈRES FICTIONS FRANÇAISES

LA PAPESSE JEANNE JOAN THE POPE

JEAN BRESCHAND FICTION / 2016 / FRANCE / 1H29 / COUL. / VOF I NTERPRÉTATION CAST Agathe BONITZER, Grégoire TACHNAKIAN, Sabine HAUDEPIN, Jean-EMMANUEL PAGNI, Nans LABORDE-JOURDAA, Francis COFFINET, Mostefa DJADJAM SCÉNARIO SCRIPT Jean BRESCHAND, François PRODROMIDES IMAGE PHOTOGRAPHY Carlos ALVAREZ SON SOUND Graciela BARRAULT MUSIQUE MUSIC Sylvain KASSAP DÉCORS PRODUCTION DESIGN Brigitte BRASART MONTAGE EDITING Florence BRESSON PRODUCTION Stéphane JOURDAIN (La Huit) De Gaulle EID (Cined Productions). CONTACT Lucie Commiot (Shellac) lucie@shellac-altern.org

Quelque part en Europe au IXe siècle se joue le destin de Jeanne, une jeune femme que l’on découvre naïve et douce. À la mort de son père, elle devient copiste dans un monastère où elle se lie, bientôt amoureusement, avec le joyeux moine Fromentin. Le duo est ensuite amené à traverser un monde perverti dans sa foi et marqué par une violence qui aura raison de ce précieux compagnon. La Papesse Jeanne répond à la question du film historique par une croyance en la capacité de l’acte cinématographique à faire surgir un monde. Jean Breschand compose le portrait d’une figure charismatique, singulière dans sa féminité ; vigoureuse et charnelle, Jeanne chemine vers la conscience et le pouvoir, sans que ne soit surlignée ou décrétée sa dimension subversive. Somewhere in Europe in the IXth century, the destiny of Joan is being played out: that of a naive and gentle young woman. After her father’s death, she begins to work as a copyist in a monastery where she becomes attached and soon falls in love with a cheerful monk named Fromentin. The two are made to face a world that is perverted in its own faith, plagued by a violence which will take the life of Joan’s precious companion. Joan the Pope tackles the question of history in cinema through faith in the cinematic act’s capacity to elicit a world. Jean Breschand draws the portrait of a charismatic figure, singular in her femininity. At once vigorous and carnal, Joan makes her way towards consciousness and power. This occurs without ever highlighting or decreeing the protagonist’s subversive dimension. (AH) Scénariste et critique, JEAN BRESCHAND a réalisé de nombreux documentaires. Il a été rédacteur à Vertigo et a publié aux Cahiers du cinéma, Le documentaire, l’autre face du cinéma.La Papesse Jeanne est son premier long métrage. Scriptwriter and film critic, Jean Breschand has directed many documentaries. He wrote for Vertigo and published for the Cahiers du cinéma, Le documentaire, l’autre face du cinéma.La Papesse Jeanne is his first feature film. CM/SF : Métropolitaines (1995), Le Retour du monde (2003), L'Aménagement du territoire (2006)


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TOMBÉ DU CIEL Un autre récit de la guerre et de ses conséquences est-il encore possible ? C’est ce que Wissam Charaf démontre avec cette comédie mélancolique sur des personnages qui essayent de survivre — et de s’aimer — FICTION / 2016 / FRANCE, LIBAN / 1H10/ COUL. / dans un pays (le Liban) encore noyé sous les répercussions d’une guerre VOST civile longue de quinze ans. De retour après des années d’absence dans la maison familiale où il ne reste qu’un père anéanti par la défaite et un petit frère déboussolé, Samir essaie de reprendre sa place dans INTERPRÉTATION CAST Rodrigue SLEIMAN, un pays qui ne le reconnaît plus (et vice-versa). Tel un fantôme pourRaed YASSIN, Said SERHAN, George MELKI, tant bien charnel, il doit reprendre la main sur une vie interrompue Yumna MARWAN par le conflit armé. Il est ce corps qui occupe un espace singulier, un spectre burlesque qui résiste à disparaître, dérange, désoriente tout. SCÉNARIO SCRIPT Wissam CHARAF, Une sorte d’ange profane qui propose un chemin solaire à prendre Mariette DESERT après les feux. Is another story of war and its aftermath even posIMAGE PHOTOGRAPHY Martin RIT sible? Wissam Charaf demonstrates that it is, through this melancholic SON SOUND Emmanuel ZOUKI comedy about characters trying to survive—and to love—in a country MUSIQUE MUSIC Wissam CHARAF (Lebanon) which is still drowning under the repercussions of a fifteen MONTAGE EDITING W illiam LABOURY year long civil war. After years of absence, Samir returns to his family’s PRODUCTION Charlotte VINCENT (Aurora Films), home where the only people left are, a father devastated by the defeat Pierre SARRAF (Né à Beyrouth) and a disoriented younger brother. Samir tries to recover his place in a CONTACT Adrien Boursot (Epicentre Films) country that no longer recognizes him (and vice-versa). Like a ghost— adrien@epicentrefilms.com though he is certainly corporeal—he must take back control of a life that has been interrupted by armed conflict. He is a body that occupies a singular space, a burlesque spectre resisting its own disappearance, a spectre that bothers and disorients everything. Almost like a lay angel indicating the solar path that must be taken after the fire. (ELR)

WISSAM CHARAF

WISSAM CHARAF a été monteur et cadreur pour des reportages l’ayant mené dans de nombreuses zones de conflit. Tombé du ciel est son premier long-métrage de fiction. Wissam Charaf worked has worked as an editor and a cameraman for TV reports, which led him to many war zones countries. Tombé du ciel is his first fiction feature film. CM/SF : Hizz Ya wizz (Entrevues 2004) , Un héros ne meurt jamais (2007), L'Armée des fourmis (Entrevues 2007), Après (2016) LM/FF : It's all in Lebanon (2011)


avantpremières séances spéciales


BELLE DORMANT D’ADO ARRIETTA CERTAIN WOMEN DE KELLY REICHARDT LE CONCOURS DE CLAIRE SIMON LES DERNIERS PARISIENS D’HAMÉ ET EKOUÉ MADAME B, HISTOIRE D’UNE NORD-CORÉENNE DE JERO YUN PANIQUE TOUS COURTS DE VINCENT PATAR ET STÉPHANE AUBIER LE RUISSEAU, LE PRÉ VERT ET LE DOUX VISAGE DE YOUSRY NASRALLAH LA VENGERESSE DE BILL PLYMPTON ET JIM LUJAN CINÉ-CONCERT : CENDRILLON, FELIX, OSWALD ET LES AUTRES MASTERCLASS : ÉCRIRE LA MUSIQUE D’UN FILM PARCOURS JEUNES TALENTS AFTERS À LA POUDRIÈRE

P.42 P. 43 P. 44 P. 45 P. 46 P. 47 P. 48 P. 49 P. 50 P. 51 P. 52 P. 53


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SÉANCES SPÉCIALES

AVANT-PREMIÈRE

BELLE DORMANT ADO ARRIETTA FICTION / 2016 / FRANCE, ESPAGNE / 1H22 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION N iels SCHNEIDER, Agathe BONITZER, Mathieu AMALRIC, Serge BOZON SCÉNARIO Ado ARRIETTA IMAGE T homas FAVEL SON Mathieu DESCAMPS, Alexandre HECKER, Christophe VINGTRINIER MUSIQUE Benjamin ESDRAFFO, Ronan MARTIN DÉCORS Erwan LE FLOC’H MONTAGE Ado ARRIETTA PRODUCTION P araiso Production DISTRIBUTION Capricci

Dans le royaume de Letonia, le prince Egon passe ses nuits à jouer de la batterie. Le jour, il n’a qu’une idée en tête : pénétrer le royaume de Kentz pour retrouver la belle dormant et briser le charme. Son père, le roi, qui ne croit pas aux contes de fées, y est fermement opposé. C’est Maggie, une archéologue de l’Unesco, qui va lui donner la clef. Dans Belle Dormant, les personnages, plutôt que de « dire », « annoncent » ce qu’ils vont faire, et le font. Cette simplicité est très belle, c’est ce que je recherchais. Pour cela, le découpage des scènes était très précis dès le scénario. La princesse arrive à la tour, monte les escaliers, trouve une clé, ouvre une porte, rencontre une sorcière maléfique qui lui donne un fuseau, elle se pique le doigt… Le classicisme du découpage correspond parfaitement à la dimension du conte. (…) C’est un film serein, harmonieux et sensuel sans pour autant être érotique comme l’est Flammes. Belle Dormant est parsemé de passions amoureuses discrètes et platoniques. Ado Arrietta (Dossier de presse du film, 2016)


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SÉANCE SPÉCIALE : FILM DE CLÔTURE

CERTAIN WOMEN KELLY REICHARDT FICTION / 2015 / ÉTATS-UNIS / 1H46 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION Laura DERN, Kristen STEWART, Michelle WILLIAMS, Lily GLADSTONE SCÉNARIO Kelly REICHARDT, d’après la nouvelle de Maile Meloy "Both Ways Is the Only Way I Want It" IMAGE Christopher BLAUVELT SON Jeff GRACE, Smokey HORMEL MUSIQUE Jeff GRACE, Smokey HORMEL MONTAGE Kelly REICHARDT PRODUCTION Filmscience

Les vies de trois femmes se croisent dans une petite ville de l’Ouest Américain : une avocate doit gérer un client compliqué qui se considère victime de son employeur ; une jeune femme ambitieuse désire construire sa maison malgré des tensions avec son mari et sa fille adolescente ; une jeune fille solitaire travaillant dans un ranch se lie à une jeune avocate enseignante surmenée. Filmé dans un cadre éblouissant — les montagnes du Montana et ses paysages bucoliques aux grands ciels, dans un 16mm renversant ­­— le film de Reichardt se structure en plusieurs épisodes qui nous plongent abruptement dans la vie de quatre femmes fortes, vivant toutes intensément, mais qui manifestent aussi une certaine solitude tandis qu’elles tentent de comprendre et d’influer sur le monde qui les entoure. Suprêmement élégants et férocement intelligents, les portraits de Certain Women s’associent pour former une toile composée de vastes étendues et de gestes minuscules mais éloquents, de désirs silencieux et de subtile catharsis. Avec son magnifique casting, Reichardt a réalisé un film magistral, plein d’une profonde empathie envers les déceptions du quotidien et les victoires mineures qui constituent une existence — un film qui révèle ces « certaines femmes », à la fois douloureusement vulnérables et mystérieusement résistantes devant les innombrables incertitudes de la vie. Andréa Picard (Toronto Film Festival, 2016)


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SÉANCES SPÉCIALES

AVANT-PREMIÈRE

LE CONCOURS CLAIRE SIMON DOC. / 2016 / FRANCE / 1H59 / COUL. / VOF SCÉNARIO, IMAGE Claire SIMON PRODUCTION Andolfi DISTRIBUTION Sophie Dulac Distribution

C’est le jour du concours d’entrée à la Fémis, la prestigieuse école de cinéma. De l’arrivée des candidats, où chacun rêve de cinéma mais aussi de réussite, aux interrogations et délibérations des jurés, le film explore la fabrication de l’élite à travers le processus de sélection d’une grande école publique française. Prix du meilleur documentaire au festival de Venise. J’ai fait ce film aussi par ce que je vois que la jeunesse est continuellement et mondialement soumise à des sélections et qu’il me semble que ce processus est un trait très important de notre façon de vivre et qu’il convient de l’observer, de tenter de le décrire, en gardant la distance de cette institution, sans faire croire que parce qu’on fait un film on a accès à tout. Pour citer un grand maître : « essayer de filmer ce qui se passe entre ». Entre les candidats et les jurys, entre les jurys, Bref comment on ENTRE dans cette école. L’avantage d’une école de Cinéma est que ce qu’on y travaille, tous les spectateurs du monde en ont une idée, tous ceux qui ont déjà vu un film dans leur vie. Dans les concours des autres grandes écoles on y parle des langues qu’il faut apprendre : le commerce, la politique, les mathématiques, etc. Ici ce sont les histoires qui flottent de toutes parts et qui forment la langue que chacun parle et connaît. Claire Simon (Note d’intention du film, 2016)


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AVANT-PREMIÈRE

LES DERNIERS PARISIENS HAMÉ EKOUÉ FICTION / 2016 / FRANCE / 1H45 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION R eda KATEB, Slimane DAZI, Mélanie LAURENT, Constantine ATTIA SCÉNARIO HAMÉ, EKOUÉ IMAGE L ubomir BAKECHEV SON Eric ROPHÉ, Cédric LIONNET, Vincent MONTROBERT MUSIQUE DEMON, PEPPER ISLAND MONTAGE K arine PRIDO PRODUCTION L a Rumeur Filme DISTRIBUTION Haut et Court Précédé d'une Masterclass “Écrire la musique d'un film” avec les réalisateurs Hamé et Ekoué et les compositeurs Jérémie Mondon (Demon) et Ayélé et Laurent Griffon (Pepper Island). Voir en p. 51

Tout juste sorti de prison, Nas revient dans son quartier, à Pigalle, et y retrouve ses amis et son grand frère, Arezki, patron du bar Le Prestige. Certains ont changé de vie, d’autres sont restés les mêmes. Tandis qu’Arezki travaille péniblement pour maintenir son bar, Nas, est de son côté décidé à se refaire un nom et Le Prestige pourrait bien lui servir de tremplin… Pigalle, c’est la bête ronflante du film, qui fait agir les personnages. Pigalle les traverse. On a vraiment voulu faire le portrait de ce quartier tel qu’on le connaît. La difficulté avec un lieu comme Pigalle qui a été représenté, photographié, filmé des centaines et des centaines de fois, c’est de savoir si on a vraiment quelque chose de singulier à dire, quelque chose qui n’a pas été dit. Je pense qu’on a réussi à capter quelque chose de singulier. C’est le Pigalle des banlieusards. C’est le Pigalle qu’on a connu. La Rumeur est née à Pigalle. C’est un Pigalle qui n’existe plus et on l’a joué et réincarné le temps d’un film. C’est un Pigalle très empreint par ce qu’on y a vécu dans les années 90 et 2000. C’est un film qui veut tenir un discours aussi sur Paris. Documenter les trottoirs parisiens comme on aimerait qu’ils le soient plus souvent. Hamé (Allociné.fr, Octobre 2016)


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SÉANCES SPÉCIALES

AVANT-PREMIÈRE COUP DE CŒUR DE L'ACID

DOC. / 2016 / FRANCE / 1H11 / COUL. / VOSTF IMAGE J ERO Yun, TAWAN Arun SON JERO Yun, TAWAN Arun MUSIQUE Mathieu REGNAULT MONTAGE N adia Ben RACHID, Pauline CASALIS, Sophie POULEAU, Jean-Marie LENGELLÉ PRODUCTION Z orba Productions, Su:m DISTRIBUTION New Story

Alors qu’elle quitte clandestinement la Corée du Nord, Madame B est vendue à un paysan chinois par ses passeurs. Devenue passeuse à son tour, elle se lance dans une bataille pour retrouver ses enfants qui l’amène jusqu’en Corée du Sud. Mais les services secrets s’en mêlent… Madame B, Histoire d’une Nord-Coréenne nous happe d’entrée dans un tourbillon, celui de la fuite, du danger, des corps que l’on ne voit pas, des paysages qu’il ne faut pas reconnaître. Lorsque nous reprenons pied, c’est pour nous retrouver échoués sur les terres d’une famille de petits paysans pauvres, avec Madame B et son mari, un Chinois qui l’a achetée. À l’image de ce début déboussolant, le film ne cessera de mettre à mal nos certitudes, de nous amener là où l’on ne s’y attend pas. C’est dans ce maelström géopolitique entre la Corée du Nord, la Chine et la Corée du Sud, fantasme absolu des frontières infranchissables, de la paranoïa ultime, qu’il nous installe pour nous parler de liens humains, de liberté, d’amour. Que Madame B soit avec sa famille chinoise ou nord-coréenne, les scènes évoquent le même havre d’union, de souci de l’autre. Marie-Pierre Brêtas et Nathan Nicholovitch (Texte de soutien de l’ACID, 2016)


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FICTION / 2017 / BELGIQUE / 45 MIN. / COUL. / VOF DISTRIBUTION GEBEKA FILMS

E

VINCENT PATAR STÉPHANE AUBIER

PA RTI

RD

PANIQUE TOUS COURTS

À

AVANT-PREMIÈRE JEUNE PUBLIC

AN

S

4 courts films d’animation pour retrouver les nouvelles aventures d’Indien et Cowboy, les deux célèbres héros de la série d’animation belge, Panique au village : - La Rentrée des classes ; - Le Bruit du gris ; - Laurent, le neveu de Cheval ; - Janine et Steven en vacances. Indien et Cowboy sont sur le départ pour une magnifique croisière sur un paquebot de luxe, mais ils se sont emmêlés les pinceaux. Ils ont complètement oublié qu’aujourd’hui, c’est la rentrée des classes ! Adieu les îles exotiques, nos amis se retrouvent désespérés sur les bancs de l’école à subir la monotonie des cours. À partir de jouets en plastique animés dans un décor de carton-pâte, les deux réalisateurs belges ont conçu une célèbre série de courts métrages couronnés de récompenses. Toute la prouesse des films, dont les jouets n’ont aucune expression, repose sur la montée en puissance de situations de plus en plus farfelues et un excellent casting de voix (Benoît Poelvoorde ou Bouli Lanners). Chaque épisode met en scène CowBoy, Indien et Cheval, colocataires d’une maison de village. Et quand la réalité explose dans ce monde rural, les univers sont absurdes, insolents, insoupçonnables. Un régal ! (catalogue Mon premier festival, 2016)


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SÉANCES SPÉCIALES

AVANT-PREMIÈRE

AL MA’ WAL KHODRA WAL WAJH AL HASSAN

Yousry NASRALLAH

FICTION / 2016 / ÉGYPTE / 1H55 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION L aili ELOUI, Menna SHALABY, Bassem SAMRA , Ahmad DAOUD, Alaa ZENHOM SCÉNARIO Yousry NASRALLAH IMAGE S amir BAHSAN SON Ibrahim DESSOUKY DÉCORS Yasser AL HUSSEINY MUSIQUE Wael ALAA MONTAGE M ona RABI PRODUCTION El Sobky Film pour Cinema Production DISTRIBUTION Pyramide

Yehia, chef cuisinier, dirige avec ses deux fils Refaat et Galal une société de traiteur spécialisée dans les réceptions. Lors d’un mariage, au cours duquel se dévoileront des amours secrètes, un riche homme d’affaires et son épouse proposent de racheter leur commerce. Devant le refus de Yehia, la proposition tourne à la menace… Alors qu’on subit cette avalanche de mauvaises nouvelles permanentes, de gens qui nous répètent que les temps sont durs, comme si on ne le savait pas, j’ai pensé que c’était le moment de faire un film pour dire ce que j’aime dans la vie. En l’occurrence, des choses de base, celles-là mêmes qui ont poussé les Egyptiens à sortir dans la rue en janvier 2011 : le pain, la dignité et la liberté. Le film part de cet élan-là, comme quand, en pleine épidémie de peste, circulaient les histoires du Décameron. Il y a des moments où les gens doivent se raconter des histoires pour se souvenir de la vie, et résister à la mort. (…) Le Ruisseau, le pré vert et le doux visage : les trois éléments ensemble forment une image codifiée du paradis dans la poésie arabe… Le film est un hymne au plaisir : un peuple qui ne sait pas jouir, aimer la beauté et baiser, n’est pas un peuple. Yousry Nasrallah (Dossier de presse du film, 2016)


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AVANT-PREMIÈRE

LA VENGERESSE REVENGANCE

BILL PLYMPTON JIM LUJAN FICTION / 2016 / ÉTATS-UNIS / 1H11 / COUL. / VOSTF A VEC LES VOIX DE Charley ROSSMAN, Robert LUJAN, Jim LUJAN SCÉNARIO Jim LUJAN ANIMATION B ill PLYMPTON SON Weston FONGER, Ken MORA MUSIQUE Jim LUJAN MONTAGE S am WELCH DISTRIBUTION ED Distribution

Une adolescente se venge du gang de motards et de Deathface, ancien catcheur devenu sénateur, qui lui ont fait du mal. Chargé de retrouver la jeune fille, le malchanceux chasseur de primes Rod Rosse se retrouve pris au cœur de ce chaos… Intégralement scénarisé par Jim Lujan, qui fait également la voix de pas moins de neuf personnages différents et compose une partie de la musique, réalisé et animé par Bill Plympton et monté par les deux artistes, La Vengeresse est un thriller/road movie fortement influencé par le cinéma de Quentin Tarantino et des frères Coen, parfaitement cohérent, dans le ton comme le style, avec l’œuvre de Plympton, tout en étant bien plus bavard et plus élaboré dans son scénario à tiroirs délirant. Une ancienne star du catch schwarzeneggesque devenue sénateur, un chasseur de primes, des fanatiques religieux, une femme fatale et bien d’autres se télescopent tout au long des 1h10 de film, prétexte à un certain nombre de séquences génialement saugrenues, où l’on verra par exemple le héros virevolter dans les bras d’un travesti poilu. (…) Brassant les images de l’imaginaire américain, Plympton et Lujan nous offrent un film à l’humour débridé et cinglant épinglant les travers de l’oncle Sam, parfois scato (comme souvent chez Plympton), définitivement irrévérencieux. Cécile Desbrun (Culturellementvotre.fr, 2016)


SÉANCES SPÉCIALES

CINÉ-CONCERT

PA RTI R DE

À

50

ANS Dès ses débuts, le cinéma d’animation s’inspire du cinéma traditionnel en parodiant les « grands » genres établis des Studios (le péplum, le western, la romance…) ou en citant ses motifs les plus populaires (Charlie Chaplin par exemple). D’Oswald le lapin (l’ancêtre de Mickey) à Félix le chat, les films présentés ici montrent comment les grands pionniers de l’animation (Disney, Fleischer, Lantz, etc.) ont mis en scène leurs petits personnages fétiches pour converser avec le cinéma traditionnel. Ciné-concert avec le Conservatoire du pays de Montbéliard et les classes d’improvisation de Lorenzo Bianchi (IRCAM, Prix Sacem 2006), la classe de Jazz de Patrice Thomas, la classe de composition de Giacomo Platini et la classe de musique pour Multimédia (Université Département PSM) de Daniele Segre Amar.

RÉEL + FICTION : OUIJA BOARD (DAVE & MAX FLEISCHER, 1917, 6’45) CONTE : CINDERELLA (WALTER LANTZ, 1925, 8'41) CAPE & ÉPÉE : KNIGHT OUT (PAUL TERRY, 1926, 4'36) GUERRE : GREAT GUNS (WALT DISNEY / 1927 / 6'20) FANTASTIQUE : FELIX THE CAT IN SURE LOCKED HOLMES (PAT SULLIVAN, 1928, 7'28) LES INTERPRÈTES : Sylvain BALLANDRAS, Claude WIMMER (Guitare) William BESSERER (Saxophone Alto) Françoise CHAMBEFORT (Composition électroacoustique) Clément GÉRARD (Composition électroacoustique) Justine JOUFFROY (Électronique) Jean-Marc MAILLARD (Saxophone Baryton) Benjamin MARIE (Basse électrique) XIAO (Flûte chinoise) Yao XI (Électronique)


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MASTERCLASS

ÉCRIRE LA MUSIQUE D’UN FILM » AVEC les réalisateurs HAMÉ et EKOUÉ et les compositeurs Jérémie MONDON (Demon) AYÉLÉ et Laurent GRIFFON (Pepper Island) et modérée par Emmanuel Abela La Master-class est suivie de la projection du film Les Derniers Parisiens d’Hamé et Ekoué (2016, 1h46) en avant-première. cf p.45

HAMÉ ET EKOUÉ

sont les leaders du mythique groupe de rap français La Rumeur. Ils se sont rencontrés à l’Université en 1994 et ont évolué dans le même quartier : Pigalle. En 2007, Hamé part à New York pour étudier à la Tish School of the Arts. Il revient en France et tourne son premier court-métrage Ce chemin devant moi, présenté à Cannes. En 2011, il coréalise avec Ekoué trois épisodes d’une série sur le milieu du rap : De l’encre, produite par Canal +. Ils créent leur société de production « La Rumeur filme » et réalisent leur premier long-métrage, Les Derniers Parisiens (2016). Hamé était Parrain du jury Eurocks One+One à Entrevues en 2015.

DEMON

(Jérémie Mondon) est DJ et compositeur. Voir la biographie en p. 53

PEPPER ISLAND

AVEC LE SOUTIEN DE LA SACEM

est un groupe de musique Afro Pop Soul formé à Paris en 2007, par Ayélé (chanteuse et musicienne) ainsi que Laurent Griffon (musicien et compositeur), longtemps compagnon de route d’Amadou et Mariam. Après deux albums, Popular (2010) et Motor Love (2014), qui furent suivis d’une série de concerts partout en France avec de nombreuses premières parties dont celles du groupe La Rumeur. Ils collaborent à nouveau avec Hamé et Ékoué en composant cette fois-ci la musique de leur film, Les Derniers Parisiens


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SÉANCES SPÉCIALES

PARCOURS JEUNES TALENTS

PARCOURS JEUNES TALENTS Le Parcours Jeunes Talents est une nouvelle initiative destinée aux aspirants cinéastes de BourgogneFranche-Comté, de moins de 30 ans, ayant réalisé déjà un court-métrage et avec un nouveau projet de court en développement. 5 jeunes talents sont retenus puis accompagnés dans un parcours de formation pendant et après le festival. Le Parcours Jeunes Talents se décline en 3 volets : - Une projection publique puis un temps d’échange entre réalisateurs et spectateurs - Un parcours de formation durant le festival : Rencontre avec des professionnels Master classes et ateliers Participation à un comité de lecture fictif d’un scénario de court métrage soutenu par Talents en Court. - Résidence d’écriture pour le cinéaste lauréat Un jury examinera les films et les projets proposés et l’un des jeunes talents remportera une résidence d’écriture au Gray Art Motel pour développer son prochain court-métrage. Les projets sélectionnés : - Félicien Ménégon, Nidicole (10min) - Juliette Marrécau, Au pays des aveugles les borgnes sont rois (7min) - Théophile Leylavergne, Une Histoire des archéologues (23min) - Marion Berry, Franck (19min) - Marie Depoorter, Ce que je veux (6min)

Le Parcours a été développé par le festival, en partenariat avec l’Association des Producteurs Audiovisuels Rhin-Rhône (APARR), « Talents en court » du Centre National du Cinéma et de l’image animée et la résidence d’artistes Gray Art Motel. TALENTS EN COURT DU CNC vise à favoriser une plus grande diversité dans le secteur du courtmétrage en tâchant de répondre au besoin d’accompagnement et de connexion professionnelle de porteurs de projets de films au potentiel artistique mais éloignés du réseau professionnel pour des raisons sociales et géographiques. L’ASSOCIATION DES PROFESSIONNELS DE L’AUDIOVISUEL RHIN-RHÔNE, a pour objectif de fédérer les professionnels du cinéma de la manière la plus large possible, œuvrant ainsi de manière globale au dynamisme de la filière audiovisuelle et cinématographique de la Bourgogne-Franche-Comté LE GRAY ART MOTEL est une résidence pluridisciplinaire. En se positionnant sur l’audiovisuel, les arts visuels et vivants, ainsi que la musique, le GAM souhaite permettre aux résidents de bénéficier d’une transversalité. La partie audiovisuelle du GAM est pilotée depuis sa création par The Wild Room, association d’aide à la création audiovisuelle.


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AFTERS À LA POUDRIÈRE

LES AFTERS À LA POUDRIÈRE  Les thématiques d’Entrevues se déclinent aussi la nuit, avec les soirées à la Poudrière, la scène des musiques actuelles de Belfort.

DEMON

(DJ SET) Demon rencontre un énorme succès en 2000 avec son single You Are My High, qui symbolise l’apogée de la « French Touch ». Il écrit et produit pour la scène électronique française (des remixes pour Daft Punk, M. Oizo ou Étienne de Crécy), mais aussi des rappeurs comme 113, La Rumeur ou Booba. En 2010, Demon écrit et produit la bande originale du téléfilm De l’encre réalisé par Hamé et Ekoué du groupe La Rumeur. Il collabore de nouveau avec eux pour leur premier long-métrage pour le cinéma : Les Derniers Parisiens.

remakes

FÉROCES

(CONCERT) Un extrait de "Même ça tu n’as pas le courage", l’un des morceaux de Juliette, 1er EP de Féroces sorti en mai 2016, illustre la bande annonce d’Entrevues cette année. Derrière le groupe Féroces, se cachent des têtes connues de la scène rock de Besançon : Sebastien Descamps (basse et clavier) a joué dans Stellardrive et Aside From a Day, François Schauber (batterie) a officié dans Traders et Jérôme Josselin (guitare) dans Gantz, Hiro et You Witches. Chaque morceau est un petit récit sur fond de samples de films classiques du cinéma français. Autant de clins d’œil pour les mélomanes cinéphiles qui reconnaitront les voix de Nastassja Kinski, Anna Karina, Michel Piccoli ou Jean-Hugues Anglade.

remakes

DUDY

(DJ SET) Titulaire d’un doctorat en alchimie musicale, Dudy s’est fait la main depuis plusieurs années en mélangeant les styles et les tubes afin d’obtenir une mention très bien ! Electro, Bass Music, Hip-hop, Mash-Up, Scratches sur des vidéos qui répondent en temps réel, le live est multi-sensoriel, une immersion 90’s à la sauce d’aujourd’hui !

cinéma et histoire : Soirée Les Filles des sixties

TATA WELLENE

(DJ SET)

Même si l’histoire à la fâcheuse tendance de ne retenir que les artistes masculins, elles sont pourtant nombreuses à avoir fait danser tous les garçons et les filles des 60’s. Aujourd’hui, après le boom des yéyés en France, on se souvient de Françoise Hardy, Sylvie Vartan ou France Gall mais il existe de nombreux autres artistes et de véritables pépites musicales… C’est ce que Tata Wellene, depuis ses platines, prouvera au cours de cette soirée. C’est le moment de sortir vos tenues vintages, le parquet de la Poudrière risque de s’enflammer !


la fabbrica :

melvil poupaud, double je


LA VILLE DES PIRATES DE RAOUL RUIZ LA FILLE DE QUINZE ANS DE JACQUES DOILLON CONTE D’ÉTÉ D’ÉRIC ROHMER GÉNÉALOGIES D’UN CRIME DE RAOUL RUIZ COMBAT D’AMOUR EN SONGE DE RAOUL RUIZ SHIMKENT HÔTEL DE CHARLES DE MEAUX ÉROS THERAPIE DE DANIÈLE DUBROUX LAURENCE ANYWAYS DE XAVIER DOLAN FOU D’AMOUR DE PHILIPPE RAMOS VICTORIA DE JUSTINE TRIET LES RENCONTRES FABBRICA CINÉMA PERMANENT, MELVIL POUPAUD : #1 MELVIL JOUE #2 DOUBLE JE #3 LA FABRIQUE DE L’ACTEUR CARTE BLANCHE D’ACTEURS : CHIARA MASTROIANNI JEAN-PIERRE LÉAUD MATHIEU AMALRIC JACK NICHOLSON

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LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD, DOUBLE JE

Projet :

Melvil Poupaud

La règle est connue, elle ne recherche pas d’exception : les acteurs sont de grands narcissiques. Et ce n’est pas Melvil Poupaud, acteur séducteur, qui nous contredira. La question de l’acteur moderne, ce n’est surtout pas de casser ce rapport à soi mêlé de séduction. L’acteur moderne peut modifier radicalement plein de choses dans son jeu (à commencer par le rapport entre lui et le personnage, ou entre lui et le spectateur) mais il ne faut pas demander la lune : non, jamais l’acteur moderne ne touchera à ce complexe de narcisse. Car sans lui, pas d’acteur, pas d’énergie d’acteur, pas de moteur d’acteur. Il faut une blessure, intime, secrète, non résolue, pour qu’une fille ou un garçon trouve sa consolation uniquement en montant sur une scène, et obtienne un espoir de réconciliation avec soi en devenant momentanément un(e) autre. Miroir, mon beau miroir… On connaît la chanson. La question de l’acteur moderne, ce n’est donc pas d’effacer son narcissisme, mais de se demander quoi faire avec. Quoi tricoter. Pour lui comme pour les autres. Et à quelle distance. Sous combien de couches. Et surtout avec quelle jouissance. À ce titre, le cas Melvil Poupaud est unique et passionnant. Unique car Melvil joue au cinéma depuis qu’il est enfant (10 ans, par là). Il a été un gosse aventurier, un adolescent romantique, un post-adolescent à la fois sarcastique et séducteur, hanté, romantique mais quand même pas assez pour ne pas en sourire, et il est aujourd’hui un cas troublant d’adulte (il va avoir 43 ans) qui continue de porter sur ses traits, dans sa silhouette, les traces d’une flamme adulescente.


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Sa filmographie est une sorte de journal intime détourné, étalé sur plus de trente ans, où on le voit, amusé, prendre ses rôles pour des informations sur sa vie, comme si ses personnages en savaient drôlement long sur lui — on confirme, les personnages ne vous tombent jamais par hasard, comme ça, sans crier gare. Ils vous attendent au coin d’une rue. Les personnages sont de drôles de types. On demande toujours aux acteurs comment ils font pour « sortir » d’un rôle. C’est même devenu une question un peu fainéante quand nous, journalistes, nous cherchons à lancer une conversation à peu de frais sur un film et son interprète : « Et alors, Melvil Poupaud, ce rôle de psychopathe, pas trop difficile de rentrer à l’hôtel le soir, entre deux journées de tournage et de vous retrouver : enfin vous-même ? » On ne demande jamais aux acteurs s’ils prennent leurs personnages en otage pendant des mois après le tournage, alors que le film est fini et que chacun est rentré à la maison. S’ils n’ont pas envie que celui-là, le personnage, à qui ils ont volé la carapace durant des semaines ne soit pas encore, et à leur demande appuyée, cramponné à eux pour longtemps — parce qu’ils en ont besoin, parce que vivre sans l’aide de ce personnage en attendant le suivant n’est tout simplement désormais plus possible. C’est cela le dernier tabou que l’on n’ose pas demander aux acteurs : quels sont ceux de vos personnages qui ont pris votre place durablement dans votre vie de tous les jours ? Quels sont ceux que vous gardez de force avec vous, par nécessité d’être ? Il y a quelques années de cela (2011), Melvil Poupaud a publié un très beau livre intime, une sorte d’autoportrait, de long poème, de scrapbook et de cahier de notes qu’il avait intitulé : Quel est Mon noM ? Non, non, ne partez pas, ce n’était pas du tout un titre prétentieux et pédant. C’était même le seul titre sincère : d’une certaine façon ça disait « et malgré tout ça, je crois que je m’appelle encore Melvil Poupaud – mais là, à l’heure où je vous parle, je n’en suis pas sûr moi-même ». Melvil a porté tellement de noms d’emprunt durant toutes ces années. Il a grandi sous nos yeux (comme dans l’album de Lou Reed, Growing Up In Public) en mentant sur son identité. Dès qu’une vacance scolaire pointait son nez, ce grand joueur de Raoul Ruiz empruntait Melvil (à sa mère, à son frère, à Melvil lui-même) et lui demandait de résoudre des énigmes étranges avec des pirates, des espaces obliques, des lumières baroques. Ces films de Ruiz, La Ville des Pirates, L’île au trésor, L’Éveillé du Pont de l’Alma, n’étaient pas des succès planétaires (ils sortaient dans trois ou quatre salles à Paris et les Cahiers du cinéma ou Libération posaient un genou à terre, pour signifier leur admiration infinie). C’est important, car Melvil Poupaud n’a pas grandi avec une vision de l’acteur qui est celle des enfants qui, pour une pub, une série télé ou un film qui cartonnera au box office (où ils joueront le faire-valoir insupportable d’un acteur comique venu de la télé), pensent, le temps que ça dure, qu’ils sont des demi-dieux en culottes courtes. Je ne lui ai jamais demandé, mais j’imagine que Melvil, quand il revenait à l’école, racontait qu’il était parti au Portugal faire du cinéma et que ses camarades n’entendaient pas parler du film à la télévision (qui a toujours ignoré, cette idiote, les films du grand Raoul), ses copains de classe devaient se dire que Melvil, le pauvre, devait avoir bien des problèmes pour rester enfermé tout l’été sans qu’on le voit et raconter pareilles sornettes — l’enfance est suspicieuse. Je suis surtout persuadé que la confidentialité joueuse et merveilleuse des films de Ruiz, tournés comme en contrebande, a induit en Melvil une belle idée, (je dis ça encore sans savoir, mais je la devine, depuis des années que nous parlons de cinéma – dès qu’on se voit, ça n’y coupe pas) que le cinéma c’est pour lui autre chose : c’est la vie à coté de la vie, c’est la vie rêvée, c’est peut-être même la vie première.


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LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD

C’est un domaine parallèle, fantastique, on y meurt, on y fait l’amour, on y vole, on y ment, on écorche les âmes, on sauve la veuve, on sauve l’orphelin, on voit la Chine, on voit le Liban, on ne dort jamais, on meurt plein de fois, on se fait larguer, on visite les siècles qui ont passé et qui ne reviendront plus. On se voit, oh, tel qu’on voudrait être – et tout ça, finalement, mérite qu’on demande à ce monde-là, le monde des images, une sorte d’asile poétique dans lequel on met beaucoup de ses propres demandes, beaucoup des questions de sa vie, pour qu’en retour, dans la vraie vie, sa vie de Melvil, il puisse, en quelques circonstances, piquer là un sourire, là un regard sombre, là une idée, là une agilité, qu’avait bien voulu lui prêter pour quelques jours un de ses personnages. C'est pourquoi Melvil n’a jamais arrêté de tourner, de travailler, véritable corpscinéma, nourri au cinéma, avançant en cinéma, faisant les poches à ses doubles, et s’est mis à faire des films lui-même. Une fois encore plus comme un projet global (titre de travail : Melvil Poupaud), plus comme des petites installations, des petits films de vacances ou d’aventures, des films d’été, des films qui ne cherchaient pas à s’imposer dans la course aux entrées. Ce sont des petites vidéos, des modules, des facéties, des respirations, dans lesquelles il se demande, mais sans souffrance, dans l’euphorie du jeu, ce que c’est que ces deux vies qu’il enjambe depuis tant d’années et ce qu’elles lui ont laissé comme séquelles (voyez Rémi, voyez Melvil – vous saisirez là encore, son narcissisme et le rire sur son narcissisme). Je crois que parfois le cinéma le laisse un peu perdu mais qu’il ne lui en veut pas. Le cinéma lui a tant appris. Je ne savais pas que Melvil Poupaud avait durant une année tourné un journal intime avec son ordinateur, se filmant face à son écran à une époque (2009/2010) où il venait à la fois de terminer un film de François Ozon (Le Refuge), enchaînait sans crier gare avec une adaptation des Faux-monnayeurs d’André Gide, sous la direction de Benoît Jacquot, pour lequel il devient plus gidien que Gide lui-même (et que raconte les Faux-Monnayeurs sinon les limites du roman à reproduire le monde réel), à force de chercher ce que cache le sourire de Gide sur une de ses photographies les plus illustres. À cette époque, il s’apprêtait à tourner dans l’Autre Monde, le beau film de Gilles Marchand dans lequel il joue un garçon qui perd le contrôle de sa vie et la laisse à son avatar dans Second Life. Bon, il se trouve que cet avatar est un psychopathe — ce sont des choses qui arrivent — d’une certaine façon, c’est géopolitiquement la situation poétique même de Melvil : le cinéma est son Second Life étendu dans lequel son narcissisme est resculpté pour devenir la surface infinie d’un long roman d’apprentissage. Ce journal de l’année 2009, Melvil l’a finalement appelé Journal des faux-monnayeurs. Ce qui est rigoureusement exact. C’est le journal de ce film-là, mais c’est surtout la leçon à tirer de ces deux ou trois saisons à le voir chaque soir confier à son ordinateur ses doutes ou son envie de devenir un autre, ou le travail qu’il consacre à devenir un autre, à force de détails, de simples et décisifs détails : les acteurs, quand ils sont bons, fabriquent de la fausse monnaie. Melvil est un bon faussaire, et même un extraordinaire faussaire (il est bon dans la comédie — et c’est une chose qui ne ment pas). On a toujours l’impression qu’il y a de lui dans le rôle. Il a presque réussi à nous faire croire qu’il était déjà tous ces garçons là, dans sa vie intérieure, et qu’il lui suffit de prêter un peu de sa vie en plus de sa silhouette (gracile) à des créatures de scénario pour qu’elles deviennent fascinantes, drôles, élégantes, sardoniques, vives, agiles, félines — toutes les qualités que l’on prête à Melvil, qui est effectivement un chic type avec qui on ne s’ennuie pas (sauf si on déteste Bob Dylan sur lequel il fait une fixette).


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La vérité, c’est que Melvil Poupaud, l’être humain Melvil Poupaud, est aussi paumé que nous devant cette improvisation cruelle et infinie qu’est la vie, mais il a l’avantage d’avoir en mémoire assez de vies vécues : si on les totalisait il faudrait une vingtaine de chats pour les épuiser, sur lesquelles s’appuyer. La vérité, c’est que Melvil Poupaud s’intéresse de près, comme un savant avec son microscope, à cet état de double hypnotique que l’on appelle l’acteur. Et qu’il commence à en savoir beaucoup sur la question. Beaucoup plus que nous. Il semblerait que ces histoires de vies que l’on emboîte comme des poupées russes l’intéressent comme œuvre contemporaine. Et malgré tout, il lui arrive plus de trouver dans sa vie de Melvil des moments qui sont comme du cinéma. Je vous rassure, je n’irai pas dévoiler son intimité (ça ne se fait pas) mais je me permets juste de rapporter ici une scène qu’il raconte dans ce fameux film inédit, ce fameux Journal des faux-monnayeurs, que Belfort présente en exclusivité galactique, dans laquelle il raconte un souvenir, un souvenir beau comme une scène de film. C’est à Locarno, un des plus sublimes festivals au monde, qui a lieu en Suisse, en bord de Lac, en plein mois d’août. Melvil est encore un enfant et il vient présenter un film de Raoul Ruiz. Il se trouve durant le festival un copain de jeu : un autre gosse, de quarante ans passés, qui est aussi le plus grand critique de cinéma de tous les temps : c’est Serge Daney. Chaque jour, ils se retrouvent à la piscine de l’hôtel pour battre un record. Celui des deux nageurs les plus lents du monde. À force d’une lenteur acharnée, ils vont atteindre l’immobilité. Et tout un festival, avec ses producteurs, ses cinéastes, ses starlettes, ses jeunes premiers, de regarder chaque jour durant ces deux-là, rester des heures dans l’eau du bassin sans jamais faire un geste, et se demander ce qu’ils fabriquent. Morale de tout cela — très simple : on ne joue sa vie que si on conspire un peu contre le reste du monde. Et on ne joue bien que si on fabrique un peu de fausse monnaie, qui ne vaut rien sur le marché de la vérité (encombrante, toujours, la vérité) mais qui offre toutes les illusions sur le marché des puissances du faux. Bref, on n’est acteur que quand on est amoureux de son ordre jeu. Et qu’on s’en amuse, aussi. Ce dernier terme — le jeu — entendez-le comme la part d’enfance qui occupe les après-midis estivales de tous les gamins du monde, quels qu’ils soient et d’où qu’ils viennent (« Qu’est-ce que tu fais ? Des jeux »). On ne sait pas pourquoi, il vient un âge, chiant comme la pluie, où on joue moins, où ça ne joue plus. Sauf pour certains qui ont reçu d’un don divin l’autorisation de prolonger indéfiniment cette envie de jouer, même en hiver, même plus âgés, parce qu’à force de jouer à celui qui resterait le plus longtemps dans le grand bain, ils ont décidé de ne plus jamais le quitter. La vie est mieux quand elle est jouée.

PHILIPPE AZOURY

Philippe Azoury est rédacteur en chef Culture au magazine Grazia et a été critique de cinéma pour Libération, Les Inrockuptibles, ou encore les Cahiers du cinéma. Il est l’auteur avec Jean-Marc Lalanne de Fantômas, style moderne (2002, Yellow Now) et de Jean Cocteau et le cinéma : Désordres (2003, Cahiers du cinéma – Centre Georges Pompidou) et a publié aux éditions Capricci des ouvrages sur les cinéastes Werner Schroeter (2010), Adolfo Arrietta (2011), Philippe Garrel (2013), Marguerite Duras (ouvrage collectif, 2014) et plus récemment Jim Jarmusch (2016), à paraître.


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LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD, DOUBLE JE

LA VILLE DES PIRATES RAOUL RUIZ FICTION / 1983 / FRANCE, PORTUGAL / 1H51 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION A nne ALVARO, Hugues QUESTER, Melvil POUPAUD, André ENGEL, Duarte de ALMEIDA SCÉNARIO Raoul RUIZ IMAGE A cácio de ALMEIDA SON Vasco PIMENTEL, Joaquim PINTO MUSIQUE Jorge ARRIAGADA DÉCORS Maria José BRANCO MONTAGE Valeria SARMIENTO PRODUCTION L es Films du Passage, Metro Filmes

Malo, un enfant mystérieux, fait irruption dans la vie d’une servante, Isidore, et lui demande de devenir sa fiancée. Il apparaît, disparaît et attire cette jeune femme dans son jeu. Son innocence s’estompe au fur et à mesure des meurtres qu’il perpétue. Le premier rôle de Melvil Poupaud. Au début des années 1980, ma mère s’est occupée, en tant qu’attachée de presse, de son film Le Territoire. J’avais dix ans, et je l’ai accompagnée à une émission avec Ruiz ; il m’a repéré, a demandé à ma mère s’il pouvait m’« emprunter » pendant les trois semaines de Pâques pour un film. Ma mère avait confiance en lui ; pour moi, un départ au Portugal avec une équipe de tournage, c’était des vacances un peu particulières. Je ne connaissais rien au cinéma et cela m’a amusé. En fait, il n’y avait pas de scénario, et Ruiz me racontait l’histoire approximativement : une fois, il me disait que j’étais Pinocchio, une autre fois, le capitaine Crochet… Il mélangeait tout dans ma tête pour me faire rire et pour que j’arrive sur le tournage un peu ahuri. Il a utilisé mon côté naïf, tout en me donnant un rôle très pervers pour un petit garçon.  Melvil Poupaud (Positif, Mars 1997)


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LA FILLE DE 15 ANS JACQUES DOILLON FICTION / 1988 / FRANCE / 1H24 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION J udith GODRÈCHE, Melvil POUPAUD, Jacques DOILLON, Tina SPORTOLARO SCÉNARIO Jacques DOILLON, Jean-François GOYET, Arlette LANGMANN IMAGE C aroline CHAMPETIER SON Jean-Claude LAUREUX, Dominique HENNEQUIN MUSIQUE Robert SCHUMANN MONTAGE C atherine QUESEMAND PRODUCTION L ola Films, Odessa Films

Juliette a 15 ans et elle est amoureuse de Thomas. Après une longue absence, Willy, le père de Thomas, veut emmener son fils en vacances à Ibiza. Pour Thomas, pas question de partir sans Juliette. Mais son père ne se révèle pas indifférent à la jeune fille… Avec ce rôle, Melvil Poupaud est nommé aux Césars du meilleur espoir masculin. En 1989, alors que je n’avais pas tourné avec Ruiz depuis un certain temps, c’est Judith Godrèche (elle m’avait vu dans un film de lui) qui m’a présenté à Jacques Doillon avec qui elle préparait La Fille de 15 ans. Dans la mesure où jusqu’alors j’avais toujours joué naturellement, l’expérience m’a paru bizarre, mais cela m’a amusé de passer des essais en vidéo, d’avoir une partenaire, un dialogue très clair et qui pour une fois n’était pas de l’anglais ruizien. Lorsque Doillon m’a fait lire le scénario, je me suis aperçu (même s’il s’agissait d’un adolescent dans lequel j’aurais très bien pu me reconnaître) que j’avais tout à faire : un rôle à tenir, des sentiments à transmettre avec le texte de quelqu’un d’autre… Et, à la différence de Ruiz, Doillon faisait beaucoup de prises, des plans assez longs et surtout fondés sur le jeu entre les gens. C’est sur ce tournage-là que j’ai vraiment compris ce que jouer la comédie signifiait. Melvil Poupaud (Positif, Mars 1997)


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LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD, DOUBLE JE

CONTE D’ÉTÉ ERIC ROHMER FICTION / 1996 / FRANCE / 1H53 / COUL. / VFSTA INTERPRÉTATION M elvil POUPAUD, Amanda LANGLET, Aurelia NOLIN, Gwenaëlle SIMON SCÉNARIO Eric ROHMER IMAGE D iane BARATIER SON Pascal RIBIER MONTAGE M ary STEPHEN PRODUCTION L es Films du Losange

Pendant les vacances d’été, Gaspard se rend à Dinard pensant y retrouver son amie Léna, qui ne vient pas. Il fait alors la rencontre de Margot, une étudiante qui travaille comme serveuse, puis de Solène, une jeune femme décidée à le séduire. Mais Léna arrive enfin. Gaspard devra faire un choix. Nous n’avons pratiquement pas parlé du personnage ni du scénario, ni des personnages féminins. Ce qu’il m’avait dit de Gaspard me suffisait. C’était assez clair : il m’avait décrit Gaspard comme un personnage timide et renfermé qui, dès qu’il a l’occasion de parler de lui, se relâche et devient très bavard. Dès lors qu’il se sent en confiance, par exemple avec Margot, il a envie de parler de lui, de s’exprimer. (…) Je n’ai pas été une source d’inspiration pour lui. C’est plutôt moi qui me suis inspiré de sa personnalité, en le regardant beaucoup. A priori, comme spectateur des films de Rohmer, je ne me sentais proche ni des acteurs, ni des personnages. J’avais donc de l’appréhension et puis je me suis rendu compte, après avoir lu les dialogues, que le principal n’était pas d’être juste, mais de se laisser aller au film, de s’y donner. Sur le tournage, il a toujours l’air de s’occuper d’autre chose que des acteurs, peut-être par pudeur. Gaspard est un personnage inspiré par le hasard, qui n’a pas envie de décider. Et puis, il choisit la musique, c’est ça le choix décisif. Melvil Poupaud (Cahiers du cinéma, Juin 1996)


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GÉNÉALOGIE D'UN CRIME RAOUL RUIZ FICTION / 1996 / FRANCE, PORTUGAL / 1H54 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION C atherine DENEUVE, Michel PICCOLI, Melvil POUPAUD, Andrzej SEWERYN, Bernadette LAFONT SCÉNARIO Pascal BONITZER, Raoul RUIZ IMAGE S tefan IVANOV SON Henri MAÏKOFF MUSIQUE Jorge ARRIAGADA DÉCORS Luc CHALON, Solange ZEITOUN MONTAGE Valeria SARMIENTO PRODUCTION G émini Films, Madragoa Filmes VERSION RESTAURÉE

Une éminente psychanalyste pour enfants étudie l’évolution du comportement de René, son neveu, convaincue des penchants criminels du jeune garçon. Quelques années plus tard, il l’assassine. Solange, une avocate spécialisée dans les causes désespérées se passionne pour l’affaire. C’était un film avec plus de budget et des acteurs connus, ce qui imposait un tournage plus construit, moins aléatoire. Il y avait un matériau de base pour travailler, on ne tournait pas au jour le jour : c’était plus conventionnel dans la fabrication. Avoir des scénarios bien ficelés n’était pas ce qui intéressait le plus Raoul [Ruiz] dans le cinéma. Il aimait donc beaucoup avoir des scénaristes qui en maîtrisaient la technique comme Pascal Bonitzer [co-scénariste de Généalogie d’un crime]. Pour le jeu de l’acteur, tout comme Rohmer, il entretenait une certaine pudeur. Il ne voulait surtout pas entrer dans les mécanismes psychologiques du personnage et ne souhaitait pas donner d’indications précises. Je pense qu’il voulait plutôt distraire les comédiens : « Là dans cette scène, tu vas plutôt aller de tel endroit à tel endroit et jouer, en même temps que tu parles, avec tel objet ». Il aimait beaucoup filmer les objets, qui étaient une grande source d’inspiration pour sa mise en scène. Il aimait cette notion de diversion et que les acteurs soient, tout comme les spectateurs, perdus. Melvil Poupaud (entretien pour Entrevues, 2016)


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LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD, DOUBLE JE

COMBAT D'AMOUR EN SONGE RAOUL RUIZ FICTION / 2000 / FRANCE, PORTUGAL / 2H02 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION M elvil POUPAUD, Elsa ZYLBERSTEIN, Lambert WILSON, Christian VADIM, Diogo DÓRIA SCÉNARIO Raoul RUIZ IMAGE A cácio de ALMEIDA SON Pierre-Yves LAVOUÉ, Georges-Henri MAUCHANT, Gérard ROUSSEAU MUSIQUE Jorge ARRIAGADA DÉCORS Isabel BRANCO MONTAGE Valeria SARMIENTO PRODUCTION P aulo BRANCO

Pions d’une partie mystique où s’affrontent le Bien et le Mal, légende et réalité, libre arbitre et destin, les personnages changent d’époque et d’identité, incarnant tour à tour des pirates, un étudiant en théologie, des amoureux éperdus, une exotique sultane, un voleur de trésors et des religieuses prêtes à tout pour sauver leur couvent… J’adore Combat d’amour en songe, qui représente la liberté totale. Là où je pense que les jeunes peuvent revenir à Raoul, c’est à travers l’histoire de sa conception et de sa production. À savoir qu’un jour quelqu’un décide de faire un film à partir d’un théorème mathématique qui remonte au Moyen-Age, d’une démonstration métaphysique de Raymond Lulle sur les combinatoires, soutenu en cela par un producteur, Paulo Branco, une espèce de frondeur, de pirate, quelqu’un qui a permis à des gens comme Raoul de faire des films à partir d’idée aussi folles et aussi peu actuelles et qui à une certaine époque a été un des grands auteurs de la production cinématographique. Quelqu’un qui marche quand Raoul lui dit : « Moi, je veux un mois de tournage, à Fincra au Portugal, avec des acteurs et un scénario que j’écrirai au jour le jour en fonction de ce théorème mathématique ». C’est là aussi, je pense, un aspect du travail de Raoul qui a pu attirer des artistes que j’ai connus à une époque : cette idée qu’on pouvait se servir du cinéma pour faire une aventure.  Melvil Poupaud (Sicilia Queer film festival, 2015)


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SHIMKENT HOTEL CHARLES DE MEAUX FICTION / 2001 / FRANCE, ROYAUME-UNI / 1H30 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION R omain DURIS, Caroline DUCEY, Melvil POUPAUD, Yann COLLETTE, Thibault de MONTALEMBERT SCÉNARIO Charles de MEAUX SON Jean-Christophe JULÉ MONTAGE C harles de MEAUX, Pierre MIKAÏLOFF, Vladimir KAROEV MONTAGE Guillaume LEDU PRODUCTION Anna Sanders Films, Donaldson Polakoff Productions

Dans un hôtel d’Asie centrale, un jeune homme, Alex, tente de retrouver la mémoire et de faire face au chaos qui agite le pays. Il est entouré d’un responsable des services secrets français et d’un médecin neurologue. Progressivement, des bribes de son passé refont surface… Dans le cinéma de Charles de Meaux, l’aventure est plus importante que le résultat ; c’est le processus qui compte, pas de faire un film calibré. Il fallait que le projet du film soit un fantasme, une aventure, un risque pris sur la vie et Charles est extrême dans ce genre de risque… Shimkent en est le sommet : pas d’équipe technique, un scénario abstrait, il était seul à la caméra et prenait le son. Nous, les acteurs, étions censés jouer dans un contexte réel : les autres autour de nous n’étaient pas au courant qu’on jouait la comédie. Il y avait donc cette espèce de hiatus entre la réalité et le cinéma. Ce sont des questions qui m’ont passionnées à l’époque. Charles avait une esthétique en tête : il tournait avec une bêta analogique qu’il avait bricolée luimême ainsi qu’un système de prise de son intégré à la caméra, avec des micros d’ambiance faits pour enregistrer des orchestres symphoniques. Les dialogues étaient noyés dans l’ambiance des sons de l’usine ou de la steppe. Le film est à cette image, il donne cette impression de ne pas savoir où l’on est, ni de comprendre tous les tenants et aboutissants de l’histoire. Melvil Poupaud (entretien pour Entrevues, 2016)


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LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD, DOUBLE JE

EROS THERAPIE DANIÈLE DUBROUX FICTION / 2002 / FRANCE / 1H48/ COUL. / VFSTA INTERPRÉTATION C atherine FROT, Isabelle CARRÉ, François BERLÉAND, Melvil POUPAUD, Julie DEPARDIEU SCÉNARIO Danièle DUBROUX, Pascal RICHOU IMAGE J ean-Marc FABRE SON François MAUREL, Pierre CHOUKROUN, Dominique GABORIEAU, Julien CLOQUET MUSIQUE Reno ISAAC DÉCORS Valérie SARADJIAN MONTAGE A naïs ENSCHAIAN, Danièle DUBROUX, Pascal RICHOU PRODUCTION Maïa Films

Agnès, une femme de bonne famille, se met en ménage avec Catherine, une jeune critique de cinéma, reléguant Adam, son mari, au garage. Tandis qu’Adam se fait passer pour amnésique, espérant reconquérir sa femme, un jeune homme, employé d’une mystérieuse maison close, tombe sous le charme de la jeune critique. J’ai toujours énormément admiré Danièle Dubroux, qui a une place à part dans le cinéma d’auteur français des années 1990 et qui réalise de vraies comédies presque burlesques. Elle a un don pour cerner la folie des personnages et la rendre comique, sans être glauque ni dramatique. Quand tu passes du temps avec Dubroux, tu vois le monde à travers sa grille de lecture et tu décèles les gens borderline, les moments où cela peut dégénérer, les instants d’hystérie… Elle a su exploiter et mettre en scène ces moments où les gens ne se contrôlent plus et sont hors de la réalité. Elle réécrivait beaucoup le scénario au jour le jour, quand elle sentait qu’un truc ne marchait pas, elle allait dans un coin et réécrivait une scène qui pouvait changer toute la suite du scénario, ce qui pouvait être déstabilisant pour les comédiens. Elle prenait beaucoup de risque. C’est vraiment une frondeuse, elle n’a peur de rien. Melvil Poupaud (entretien pour Entrevues, 2016)


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LAURENCE ANYWAYS XAVIER DOLAN FICTION / 2011 / CANADA, FRANCE / 2H48 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION M elvil POUPAUD, Suzanne CLÉMENT, Nathalie BAYE, Monia CHOKRI SCÉNARIO Xavier DOLAN IMAGE Yves BELANGER SON François GRENON, Olivier GOINARD MUSIQUE NOIA DÉCORS Anne PRITCHARD MONTAGE Xavier DOLAN PRODUCTION L yla Films, MK2 Productions

Montréal, années 1990. Alors qu’il fête son 30e anniversaire, Laurence annonce à sa petite amie, Fred, son désir de devenir une femme. Envers et contre tous, ils vont affronter les préjugés de leur entourage et de la société qu’ils dérangent. Le couple survivra-t-il à cette métamorphose ? Xavier Dolan était directif et savait exactement ce qu’il voulait. C’est très déstabilisant au début car il n’arrête pas de parler pendant les prises. Il fait ça avec tous les comédiens. Il est très bon acteur ; il est habité par ses personnages et il est capable de les jouer tous. Donc il te reprend quand tu joues, car il les a en tête et il veut que ce soit proche. Il fait son cinéma d’une façon plus américaine que française. Les émotions sont moins à fleur de peau et authentiques, contrairement au cinéma français de Pialat ou Doillon où l’on capte l’intensité d’une émotion. Dolan fonctionne plutôt par punchlines, sur la précision : « Mets ton visage ici, balance ta phrase là ». Cela construit quelque chose plus esthétique qu’émotionnel. La vraie question du métier d’acteur est de savoir qui à l’arrivée est responsable du personnage ? À quel point l’acteur a pu s’approprier le rôle et en être l’auteur ? Dans le cas de Dolan, c’est clairement lui l’auteur, mais il s’est parfois laissé surprendre par la façon dont j’interprétais le personnage. Il a dû faire avec. Melvil Poupaud (entretien pour Entrevues, 2016)


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LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD, DOUBLE JE

FOU D'AMOUR PHILIPPE RAMOS FICTION / 2015 / FRANCE / 1H47 / COUL. / VFSTA INTERPRÉTATION M elvil POUPAUD, Dominique BLANC, Diane ROUXEL, Lise LAMÉTRIE, Jean-François STÉVENIN SCÉNARIO, IMAGE, DÉCORS, MONTAGE Philippe RAMOS MUSIQUE Pierre-Stéphane MEUGÉ PRODUCTION Alfama Films Productions, Rhône-Alpes Cinéma

1959. Coupable d’un double meurtre, un homme est guillotiné. Au fond du panier qui vient de l’accueillir, la tête du mort raconte : tout allait si bien ! Curé admiré, magnifique amant, son paradis terrestre ne semblait pas avoir de fin. Dans ce film, la gageure était de passer d’un ton sarcastique, humoristique et grandiloquent à un ton beaucoup plus sombre. J’ai aimé me confronter à une certaine tradition française, notamment avec le texte de la voix off, très « Sacha Guitry » : le bon mot, une certaine saveur de la langue… C’est le côté emphatique et intellectuel de Renoir, Depardieu ou Amalric… Ce n’est pas du tout mon univers, mais c’est très intéressant à étudier en tant que comédien. Il fallait réussir à basculer d’une tonalité à une autre dans le film, malgré cette voix off, et la schizophrénie du personnage me plaisait beaucoup. Philippe Ramos a un goût de l’artisanat très rohmérien, il est méticuleux et très précis dans le choix de ses décors et ses costumes. Il s’entraînait déjà à réaliser des films lui-même en Super 8 quand il avait 14 ans. Tout était très traditionnel dans le tournage, mais avec une véritable précision concernant la mise en scène et le cadre. Melvil Poupaud (entretien pour Entrevues, 2016)


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VICTORIA JUSTINE TRIET FICTION / 2016 / FRANCE / 1H35 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION V irginie EFIRA, Vincent LACOSTE, Melvil POUPAUD, Laurent POITRENAUX, Laure CALAMY SCÉNARIO Justine TRIET IMAGE S imon BEAUFILS SON Julien SICART, Olivier TOUCHE, Simon APOSTOLOU DÉCORS Olivier MEIDINGER MONTAGE Laurent SÉNÉCHAL PRODUCTION Ecce Films

Victoria Spick, avocate pénaliste en plein néant sentimental, débarque à un mariage où elle retrouve son ami Vincent, et Sam, un ex-dealer qu’elle a sorti d’affaire. Le lendemain, Vincent est accusé de tentative de meurtre par sa compagne. Victoria accepte à contrecœur de défendre Vincent tandis qu’elle embauche Sam comme jeune homme au pair. Avec Victoria, pour être drôle, il fallait être prêt à refaire 100 fois la même chose. C’est Jerry Lewis qui a inventé le combo [le retour image d’une caméra] : il passait des heures à regarder les prises pour choisir la bonne. C’est une question de timing : un moment ça marche, un moment ça ne marche pas. Justine [Triet] était capable, d’une prise à l’autre, de changer l’intention des personnages. Elle voulait essayer plusieurs options de jeu et changeait parfois les dialogues au dernier moment. Avec Cynthia, la coach, elles veulent casser le texte et le côté systématique des acteurs afin de trouver des accidents, des défauts, des trucs vivants. Justine a beaucoup d’énergie, son esprit fuse et est parfois très contradictoire : elle veut reproduire ça dans ses films. Donc les acteurs doivent être dans un état de nervosité comme dans la vie, dans ces moments où l’on parle trop vite et où l’on se reprend : le côté vibrant et naturel de la vie. Il y avait un côté tâtonnant et une profusion de prises, jusqu’à que les acteurs soient paumés. C’est là que Justine capturait des moments, à notre insu.  Melvil Poupaud (entretien pour Entrevues, 2016)


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LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD, DOUBLE JE

LES RENCONTRES FABBRICA »

La Fabbrica invite le comédien-cinéaste-musicien Melvil Poupaud. À travers une sélection de ses films comme acteur et comme cinéaste — dont deux inédits —, une « carte blanche d’acteurs », et trois temps de rencontres « Fabbrica », Melvil Poupaud et ses complices nous entrainent au cœur du métier de comédien.

FABBRICA 1 : JOUER LA COMÉDIE

AVEC CHIARA MASTROIANNI

Chiara Mastroianni est actrice et chanteuse. Très jeune, elle fréquente les plateaux de tournage avec son père, Marcello Mastroianni et sa mère, Catherine Deneuve. Après son entrée à l’université en DEUG d’italien, elle est convaincue par son ami Melvil Poupaud de devenir comédienne. Elle a travaillé avec André Techiné, Christophe Honoré, Manoel de Oliveira… Chiara et Melvil ont joué ensemble à plusieurs reprises, notamment dans Trois vies et une seule mort de Raoul Ruiz et Le Journal du Séducteur en 1996 de Danièle Dubroux, L’Heure zéro de Pascal Thomas en 2007, Un conte de Noël d’Arnaud Despleschin en 2008…

FABBRICA 2 : L'ACTEUR ET LE CINÉASTE

AVEC CHARLES DE MEAUX

Charles de Meaux est un réalisateur et artiste contemporain. Il montre principalement ses œuvres et ses films dans des musées et institutions : au New Media Museum de Busan, au Musée Guggenheim de New York, au Centre Pompidou à Paris… Il a fondé en 1997 la société de production Anna Sanders Films avec 5 collaborateurs, dont Pierre Huyghe et Philippe Parreno. Il a ainsi coproduit tous les films d’Apichatpong Weerasethakul. Melvil Poupaud a joué dans son film Shimkent Hôtel en 2003 ainsi que dans The Lady in the Portrait, son prochain film qui sortira en salle en 2017.

FABBRICA 3 : DIRIGER, RÉPÉTER

AVEC CYNTHIA ARRA

Directrice de casting, collaboratrice à la direction d'acteur et réalisatrice de documentaire, Cynthia Arra s'est formée à l'ENSBA, puis au CLCF comme Assistante-Réalisatrice. En 2007, elle coréalise le documentaire long-métrage L’Ordre des mots avec Mélissa Arra, et se spécialise parallèlement dans le casting et la direction d'acteur en collaborant avec de nombreux réalisateurs comme Claire Burger, Houda Benyamina, Hélier Cisterne, Arthur Harari et dernièrement Justine Triet sur Victoria.


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CINÉMA PERMANENT, MELVIL POUPAUD

#1 MELVIL JOUE FILMS DE MELVIL POUPAUD DURÉE TOTALE 1H21 QUI ES-TU JOHNNY MAC ? (1984, 5’) Un détective privé et un tueur à gage (tous deux âgés de 11 ans et interprétés par la même personne) s’affrontent dans un bar. 3 JOURS… (1988, 15’) Un adolescent de 15 ans se retrouve coincé à la campagne pendant trois jours. RÉMI (2001, 24’) Un jeune peintre s’invite chez des amis en vacances à la campagne. Parodie irrévérencieuse et délicate du cinéma de Rohmer. PRONOBIS (2003, 37’) Un jeune homme est confronté à ses clones, qui prennent petit à petit le pouvoir sur lui.

Un mini « cinéma permanent » d’une dizaine de places installé dans le cinéma Pathé joue les films de Melvil Poupaud 24h/24. Dès l’âge de 11 ans, Melvil Poupaud commence à tourner ses propres films. Entre faux remakes et vrais journaux intimes, le cinéma se mêle de sa vie. Muni d’une caméra domestique, Melvil construit sa cartographie sentimentale et cinématographique. Il scrute et remodèle son quotidien — celui de tout un chacun : un questionnement sans fin sur le travail, les sentiments, le sens — en une représentation burlesque où le metteur en scène se regarde avec étonnement et tendresse en personnage cruellement malmené par la fortune.


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LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD, DOUBLE JE

CINÉMA PERMANENT, MELVIL POUPAUD

#2 DOUBLE JE FICTION / 2006 / FRANCE / 1H07 / COUL. / VOF MELVIL DE MELVIL POUPAUD Présenté à la Quinzaine des réalisateurs, Melvil explore à travers trois aventures ("Le Fils", "Le Recours", "Le Cinéma") le fantastique et le quotidien, le romanesque et l’intime.

Melvil est vraiment dans la lignée des courts-métrages que j’ai faits quand j’étais plus jeune. Il naît de la même frustration et de la même envie. Pour le tournage du film de François Ozon, Le Temps qui reste, j’avais passé toute une semaine en Bretagne. On ne pouvait pas tourner parce qu’on attendait qu’il y ait du soleil sur la plage pour tourner la fin. J’avais apporté une caméra et dans ma chambre, en attendant qu’on puisse tourner, j’ai décidé de me lancer dans un film. C’est toujours très stimulant pour moi de me retrouver seul à élaborer l’idée d’un film dans une chambre d’hôtel, en milieu confiné, et d’imaginer pouvoir le faire alors qu’il n’y a aucun moyen, aucune perspective. C’est comme un Big Bang intime. On se dit qu’à partir de là, il va y avoir un monde, un film qui va se créer. Melvil Poupaud (catalogue du Sicilia Queer film festival, 2015)


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CINÉMA PERMANENT, MELVIL POUPAUD

#3 LA FABRIQUE DE L’ACTEUR DURÉE TOTALE 1H12 HOLLYWOOD (2006, 12’) À l’aide d’une méthode audio, Melvil travaille son anglais en vue de son prochain rôle dans un grand film hollywoodien. LE JOURNAL DES FAUX MONNAYEURS (2009, 1H) Entre février et mai 2009, Melvil entre dans la peau de l’oncle Edouard pour l’adaptation des Faux monnayeurs par Benoît Jacquot. Entre carnet de travail et journal intime, le faux rencontre le vrai, ou vice versa. FILMS INÉDITS DE MELVIL POUPAUD

André Gide a écrit un journal pendant l’écriture de son roman Les Faux Monnayeurs. J’avais envie de faire pareil et je n’avais jamais fait de journal pendant un tournage qui ne soit pas de la fiction, mais qui parle du travail d’acteur. Je n’avais plus de caméra à l’époque et je me filmais avec mon ordinateur. C’était encore l’idée de capturer un moment, d’avoir un journal intime pendant un tournage. J’ai été capturé par des gens et des caméras depuis tout petit, et avec mes films, j’ai voulu savoir dans quel contexte, sous quel angle et jusqu’à quel point je pouvais me capturer moi-même. Me réapproprier cette capture. Je passe beaucoup de temps au montage pour faire en sorte que cette auto-fiction ne soit pas insupportable ou complaisante. Dans un bon film, tu dois être en attente du plan d’après. Comme dans un film de Ruiz, tu as envie de rester car tu veux voir le prochain plan. C’est ce que j’essaye de faire. Melvil Poupaud (entretien pour Entrevues, 2016)


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LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD, DOUBLE JE

CARTE BLANCHE D’ACTEURS : CHIARA MASTROIANNI

NON MA FILLE TU N’IRAS PAS DANSER CHRISTOPHE HONORÉ FICTION / 2009 / FRANCE / 1H45 / COUL. / VFSTA INTERPRÉTATION C hiara MASTROIANNI, Marina FOÏS, Marie-Christine BARRAULT, Jean-Marc BARRE, Louis GARREL SCÉNARIO Christophe HONORÉ, Geneviève BRISAC IMAGE L aurent BRUNET SON Guillaume LE BRAZ MUSIQUE Alex BEAUPAIN MONTAGE Chantal HYMANS PRODUCTION W hy Not Productions

Depuis qu’elle s’est séparée de Nigel, Léna traverse la vie comme elle peut avec ses deux enfants, Anton et Augustine. Elle part avec eux passer quelques jours de vacances chez ses parents en Bretagne, et y retrouve son frère, sa sœur et leurs compagnons respectifs. Difficile de faire l’apologie de Chiara tant elle est l’actrice/acteur dont je me sens le plus proche. Sa façon de voir et d’exercer son métier me correspond à 100%. À ceci près qu’elle porte en plus l’un des plus grands héritage du Cinéma avec un humour et une élégance sans égal. Melvil Poupaud


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CARTE BLANCHE D'ACTEURS : JEAN-PIERRE LÉAUD

LA MORT DE LOUIS XIV ALBERT SERRA FICTION / 2016 / FRANCE, ESPAGNE / 1H55 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION Jean-Pierre LÉAUD, Patrick D’ASSUMÇAO, Marc SUSINI, Irène SILVAGNI, Bernard BELIN SCÉNARIO Albert SERRA, Thierry LOUNAS IMAGE Jonathan RICQUEBOURG SON Jordi RIBAS, Anne DUPOUY DÉCORS Marc VERDAGUER MONTAGE Ariadna RIBAS, Artur TORT, Albert SERRA PRODUCTION Capricci Films, Bobi Lux, Andergraun Films

Août 1715. À son retour de promenade, Louis XIV ressent une vive douleur à la jambe. Les jours suivants, le Roi poursuit ses obligations, mais la fièvre le gagne. Il se nourrit peu et s’affaiblit de plus en plus. C’est le début de la lente agonie du plus grand Roi de France, entouré de ses fidèles et de ses médecins. Léaud est l’un des premiers acteurs à m’avoir marqué comme spectateur au même titre que Marlon Brando, Alain Delon ou Charlie Chaplin. Son regard, sa diction, son tempérament… Il est plus qu’un acteur, un mythe — l’un des rares issus du cinéma français. Jean-Pierre est aussi un modèle poétique et politique : non pas en marge de l’industrie, plutôt au-dessus. Melvil Poupaud


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LA FABBRICA : MELVIL POUPAUD, DOUBLE JE

CARTE BLANCHE D'ACTEURS : MATHIEU AMALRIC

UN HOMME, UN VRAI JEAN-MARIE LARRIEU ARNAUD LARRIEU FICTION / 2002 / FRANCE / 2H01 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION M athieu AMALRIC, Hélène FILLIÈRES, Pierre PELLET SCÉNARIO Jean-Marie LARRIEU, Arnaud LARRIEU, Sophie FILLIÈRES IMAGE C hristophe BEAUCARNE SON Olivier MAUVEZIN MUSIQUE Philippe KATERINE MONTAGE Annette DUTERTRE PRODUCTION L es Films Pelléas

Boris et Marilyne se rencontrent à une soirée et tombent fous amoureux. Cinq ans plus tard, en vacances aux Baléares avec leurs enfants, Marilyne fait une fugue amoureuse et disparaît. Elle réapparaît, cinq ans plus tard, au fin fond des Pyrénées. Venue avec un groupe d’Américaines, elle se rend compte que le guide qui les accompagne n’est autre que Boris. Comme Léaud, Mathieu a développé un style reconnaissable par les spectateurs du monde entier. Dès ses débuts, chez Desplechin et Dubroux, j’ai aimé son agilité à passer d’un registre à un autre, mais il m’a vraiment impressionné sur le tournage d’Un conte de Noël où j’ai pu expérimenter sa profonde compréhension des personnages et des situations. Melvil Poupaud


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CARTE BLANCHE D'ACTEURS : JACK NICHOLSON

CINQ PIÈCES FACILES FIVE EASY PIECES

BOB RAFELSON FICTION / 1970 / ÉTATS-UNIS / 1H36/ COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION J ack NICHOLSON, Karen BLACK, Billy GREEN BUSH, Fannie FLAGG, Sally STRUTHERS SCÉNARIO Adrien JOYCE, Bob RAFELSON IMAGE L ászló KOVÁCS SON Charles T. KNIGHT MUSIQUE Pearl KAUFMAN, Frédéric CHOPIN, Jean-Sébastien BACH, Wolfgang Amadeus MOZART Toby RAFELSON MONTAGE Christopher HOLMES, Gerald SHEPARD, Peter DENENBERG, Harold HAZEN PRODUCTION BBS Productions

Bobby Dupea est lassé par sa vie. Pianiste virtuose, issu d’une famille bourgeoise, il a tout plaqué pour travailler comme ouvrier sur une plateforme pétrolière et vit avec Rayette, une jeune femme avec qui il s’ennuie. Apprenant que son père est malade, il se décide à retourner chez lui et prend la route avec Rayette… L’un des films emblématiques du Nouvel Hollywood. Jack Nicholson me fait rire et il me fait peur. J’aime les risques qu’il prend et les limites sur lesquelles il joue. Il a toujours gardé avec ses personnages, et le cinéma en général, la bonne distance, celle du jeu. C’est surtout l’un des rares acteurs à avoir imposé une vision du monde — presque une éthique — à travers les rôles qu’il s’est choisi. Melvil Poupaud



DOUBLE FEATURE SERGE BOZON : TIP TOP DE SERGE BOZON P. 84 PENN AND TELLER GET KILLED D’ARTHUR PENN P. 85 DOUBLE FEATURE QUENTIN DUPIEUX : STEAK DE QUENTIN DUPIEUX S.O.B. DE BLAKE EDWARDS

P. 86 P. 87

DOUBLE FEATURE JEAN-CHRISTOPHE MEURISSE : APNÉE DE JEAN-CHRISTOPHE MEURISSE P. 88 CHANSONS DU DEUXIÈME ÉTAGE DE ROY ANDERSSON P. 89 DOUBLE FEATURE EMMANUEL MOURET : FAIS-MOI PLAISIR ! D’EMMANUEL MOURET MICKI ET MAUDE DE BLAKE EDWARDS

P.90 P. 91

DOUBLE FEATURE ANTONIN PERETJATKO : LA LOI DE LA JUNGLE D’ANTONIN PERETJATKO P. 92 CARTOONS DE TEX  AVERY P. 93 DOUBLE FEATURE THOMAS SALVADOR : DE SORTIE DE THOMAS SALVADOR RIEN QUE POUR VOS CHEVEUX DE DENNIS DUGAN

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DOUBLE FEATURE : LE NOUVEAU BURLESQUE FRANÇAIS

à la conquête d'un nouveau

territoire comique

- Tu sais que tu en raté un paquet de trucs, toi en sept ans ! Il y a un nouvel humour aujourd’hui. - Il va falloir que je m’adapte. Je suis encore dans l’ancien humour, mais il là faut que je reprenne le dessus. (Dialogues de retrouvailles entre Blaise (Eric) et Georges (Ramzy) dans Steak de Quentin Dupieux). Un spectateur qui se serait désintéressé de la comédie française depuis plusieurs années aurait-il lui aussi « raté un paquet de trucs » ? En découvrant tout à trac les films de Quentin Dupieux, Serge Bozon, Antonin Peretjatko, Jean-Christophe Meurisse, Thomas Salvador ou Emmanuel Mouret, risquerait-il d’être désarçonné par ce « nouvel humour » ? Peut-être lui faudrait-il un petit temps d’adaptation, mais auquel succèderait alors la joie de découvrir une autre et vaste étendue comique qu’on n’espérait plus sous nos latitudes. Difficile de donner une origine exacte à ce que vit, depuis maintenant plusieurs années, une partie du (plutôt jeune) cinéma français contemporain : un vrai moment burlesque. Point de film ou de cinéaste « déclencheur », encore moins d’école ou de mouvement. Mais le fait est là. Une constellation de films, de cinéastes et d’acteurs s’est progressivement constituée et a redonné d’inédites couleurs à la « comédie à la française ». De-ci, de-là, on repère certains noms de producteurs (Emmanuel Chaumet pour Ecce Films ; David Thion et Philippe Martin pour les films Pelléas) ou d’acteurs (Vincent Macaigne, Vimala Pons, Laetitia Dosch) qui circulent de film en film, tout en constatant que le mouvement n’est pas réductible à un petit groupe et que les films gardent leurs indépendances respectives. Et l’échantillon des six films que nous présentons aurait pu être élargi du côté du moyen-métrage (les deux comédies de Yann Le Quellec, la première musicale — Je sens le beat qui monte en moi — la seconde cycliste – La Quepa sur la Vilni avec Bernard Hinault au casting), ou même aller vers un cinéma plus « mainstream » (Neuf Mois Ferme d’Albert Dupontel, Les Beaux Gosses de Riad Sattouf) ou la série télé (les trois heures et demie de P’tit Quinquin de Bruno Dumont ou les deux saisons de Platane d’Éric Judor).

échapper aux moules

Pas d’appellation en commun pour cette informelle galaxie, mais au fond, une même revendication partagée : la conviction qu’un autre rire est possible dans la comédie à la française. Et même plusieurs autres rires, tant ces films jouent sur des ressorts comiques variés et assez différenciés. C’est un premier paradoxe. Chacun de ces films a pu apparaître comme un « ovni », une exception, un surgissement dans le calme paysage du cinéma français, et pourtant ces œuvres viennent aussi de loin. Elles témoignent d’un parcours de longue haleine, et sont signées de cinéastes qui ont déjà connu une première carrière dans le court-métrage (Antonin Peretjatko, Thomas


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Salvador, Benoît Forgeard), la critique (Serge Bozon) ou vers d’autres horizons artistiques : la bande dessinée pour Riad Sattouf, le théâtre pour Jean-Christophe Meurisse ou la musique électro pour Quentin Dupieux (sous le nom de Mr Oizo). Cette « vie d’avant », c’est évidemment le creuset dans lequel ont été mûris le propos et l’originalité de chacun des longs-métrages qui portent aussi en eux les traces des luttes que les auteurs ont dû mener pour convaincre qu’ils pouvaient « passer au long ». Car évidemment, proposer un nouveau modèle de comédie ne va pas toujours sans scepticisme du côté des décideurs, à la fois parce qu’il est difficile de mettre le comique « sur papier » et aussi parce qu’il faut convaincre que les qualités de vitesse et de gags, qui s’accommodent bien du sprint du court-métrage, restent intactes dans la course de fond du long-métrage. Le meilleur moyen de convaincre de sa pertinence, c’est finalement de tracer son propre chemin. Et c’est ce qu’a opéré ce nouveau burlesque : définir, à lui seul, une troisième voie qui se tient à distance des deux modèles qui jusque-là préexistaient dans la comédie bien de chez nous. Le premier modèle, c’est la « comédie commerciale » basée souvent sur un simple pitch, le martèlement de gros gimmicks et la présence de stars du genre, venues dans les années 1970 du café-théâtre (le Splendid), aujourd’hui de la télé (le fabuleux destin de Brice de Nice, passé du sketch de Graines de Star sur M6 au blockbuster à 4,3 millions d’entrées). Le deuxième modèle se veut plus noble. C’est celui de la « comédie de mœurs douce-amère » essentiellement basée sur les dialogues, et revendiquant une justesse d’observation et même une finesse psychologique. Un type de comédie, dont Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri ont été à un moment les fers de lance, qui pourrait être une recherche de transposition hexagonale du modèle « woody-allenien ». Il est à noter que les plus gros succès comiques du cinéma français (des Bronzés à Intouchables en passant par les Ch’tis) travaillent finalement à un mélange de ces deux modèles : de la rigolade à gros effets certes, mais mâtinée d’un souci de vraisemblance sociologique. Esquiver ces deux modèles, c’est se retrouver dans un ailleurs assez paradoxal, certes issu du cinéma d’auteur, mais qui ne cherche pas toujours la nuance. Ce nouveau burlesque est l’ennemi de la fantaisie, du saupoudrage soi-disant poétique du quotidien. Au contraire, il redécouvre les vertus d’un comique parfois agressif, primaire, brutal, rentre-dedans. La distorsion, l’exagération voire la colère y apparaissent comme des vertus, non comme des fautes de goût. On pourrait trouver de possibles pères putatifs à cette génération : aussi bien le burlesque aérien et satirique de Pierre Richard (moquant la pub et l’argent dans Le Distrait et Le Jouet) que les détonations surréalistes des derniers Buñuel, la férocité farcesque d’un Jean-Pierre Mocky ou le minimalisme pataphysique de Luc Moullet. S’il faut parler de génération, on doit aussi parler de ce qui n’appartient qu’à elle : un mélange inédit — et dont les proportions changent de film en film — de poésie et d’énervement. Ce comique-là ne rechigne pas à recourir aux trognes, à la surenchère, voire à flirter avec la vulgarité, mais une vulgarité qui a plus à voir avec la bacchanale d’un burlesque primitif et de l’expressivité brute des corps, qu’avec un cynisme rigolard bien dans l’air du temps.

Bigger than life

À cette aune, ce cinéma remet au premier plan, les infinies possibilités du corps comique, outil narratif et formel que le cinéma français avait paru oublier depuis les grandes heures de Louis de Funès et Pierre Richard. À vrai dire, cela faisait longtemps qu’on n’avait jamais vu autant de gestes inédits. Les éructations provocatrices de François Damiens entraînant dès la première scène de Tip Top une bagarre — mêlée de rugby dans un café arabe ; le gymkhana tout en moiteur de Vincent Macaigne et de Vimala Pons — véritable Calamity Jane des tropiques — dans La Loi de la jungle ou les épures acrobatiques, qu’il invente sa propre danse d’appartement dans De Sortie


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DOUBLE FEATURE : LE NOUVEAU BURLESQUE FRANÇAIS

ou d’improbables poursuites natatoires en grands lacs dans Vincent n’a pas d’écailles. Cette soif pour la gestuelle débridée va jusqu’aux débordements gore potaches des joyeuses mutilations de Neuf Mois Ferme ou aux irrépressibles démangeaisons chorégraphiques de Je sens le beat qui monte en moi. Surtout, elle ne s’effraie pas de malmener physiquement des acteurs connus : voir la bagarre amoureuse entre Isabelle Huppert et Samy Naceri dans Tip Top, ou encore plus perturbant, Éric Judor s’assénant des « auto-opérations » de chirurgie esthétique à coups d’agrafeuse sur le visage. Ces films-là vont donc bien au-delà du simple comique d’observation, de la notation ou de l’épinglage des petits travers. Ils ne s’interdisent pas d’aberrants postulats de fiction : des trentenaires accros à la chirurgie esthétique continuent à jouer à « t’es pas de ma bande » comme s’ils n’avaient pas quitté la cour du collège (Steak), un pneu devient serial-killer (Rubber), un stagiaire du Ministère de la Norme est dépêché en Guyane pour y surveiller le chantier d’une piste de ski artificielle (La Loi de la jungle). Des postulats qui font un sort au quotidien, mais qui ne s’interdisent pas non plus le « bigger than life » : un jeune homme tendre et maladroit tombe amoureux de la fille du Président de la République et perturbe une réception à l’Élysée (Fais-moi plaisir), un autre jeune homme se voit doté de pouvoirs de super-héros dès lors que son corps est mouillé (Vincent n’a pas d’écailles). Des postulats qui visent même à reconsidérer les rapports sentimentaux en y injectant une dose d’esprit libertaire : deux hommes et une femme, tous les trois en robe de mariée, rentrent avec fracas dans le bureau du maire pour officialiser leur union à trois (Apnée), deux inspectrices mènent une enquête en se laissant aller à leurs pulsions voyeuristes et/ou sado-maso (Tip Top), une juge célibataire psychorigide découvre qu’elle est enceinte d’un tueur psychopathe (Neuf Mois Ferme). Rien de vraisemblable donc, a priori, dans ce vaste éventail de situations comiques. Et en même temps, la largeur de cet éventail permet aussi à chacun de s’y retrouver, tant il englobe toutes les humeurs et tous les tons du rire. Entre le sentimentalisme d’un Emmanuel Mouret qui aime à se dépeindre en amoureux d’une charmante gaucherie et la méchanceté affichée d’Albert Dupontel, il y en a pour tous les tempéraments.

Crispations et utopies

Ce comique accueille aussi bien les hargneux et les rêveurs, les flegmatiques comme les nerveux. Malgré toutes leurs différences, ceux-ci partagent une sorte de cause commune : faire un sort à la crispation ambiante. Quand le comique agit dialectiquement : il va chercher les points les plus crispés de la société pour les déverrouiller, et y faire advenir de la détente, de l’élan, du ressort. Dans l’histoire du cinéma français, ce comique-là est peut-être le premier qui s’autorise à mettre frontalement en scène le dérèglement des lieux de pouvoir : la mise en pièces de la centralisation jacobine via un détour guyanais (La Loi de la jungle), une réception guindée à l’Élysée qui part en vrille (Fais-moi plaisir) ou toujours à l’Élysée, mais cette fois, dans les sous-sols, un séminaire de com’ politique pris au piège de sa propre novlangue (Gaz de France de Benoît Forgeard, un film tout en bugs volontaires, donc « bugger than life »). Mais ces points de crispation peuvent être plus diffus, tout en parvenant à faire sentir un parfum de société plus incommodant, comme la France post mariage/manif-pour-tous d’Apnée, ou celle de Tip Top encore marquée par les reliquats des non-dits de la guerre d’Algérie. Précisément, le traitement de ces questions aigües passe aussi par la voie de l’utopie : le couple à trois d’Apnée, la généralisation des couples franco-arabes dans Tip Top. Mais le mot d’utopie appliqué à ce cinéma est lui-même ambigu, car


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étymologiquement l’utopie, c’est « en aucun lieu ». Or ces films-là sont remplis de lieux. À cette aune, le cinéaste le plus utopique est Quentin Dupieux, puisqu’il situe tous ses films dans un paysage d’Amérique générique et sans ancrage. Un mixte de banlieue pavillonnaire et de grands espaces, figée dans la tête du spectateur à coups de westerns et de séries télé. Dupieux s’appuie ainsi sur un esperanto de l’espace et de l’imaginaire, pour affirmer que le « nouvel humour » est, par essence, délocalisé. En regard des autres films, cette affirmation est battue en brèche, tant le comique est à chaque fois relié à l’arpentage d’une géographie (le Paris nocturne et onirique de Fais-moi plaisir, les lacs et rivières de Vincent n’a pas d’écailles), et même d’une France qu’on va aller explorer jusque dans ses recoins les plus excentrés et excentriques (un village corse abandonné dont on remet les clefs au trouple d’Apnée, la Guyane cartoonesque de La Loi de la jungle). Ces comédies sont aussi des roadmovies démangés par deux envies simultanées : aussi bien le désir d’aller voir ailleurs que de finalement bien connaître ce à quoi on veut échapper. Pour moquer la France, encore faut-il bien savoir la reconnaître (au sens d’une reconnaissance de territoire). C’est en voyant ces films que l’on se rend compte à quel point le cinéma français, souvent ancré dans les villes ou les intérieurs, avait tout autant perdu le sens de la topographie que celui de l’humour. À cet égard, les premières éclaircies étaient déjà venues au début des années 2000 avec l’émergence d’un cinéma paysager du sudouest (Alain Guiraudie et les frères Larrieu) qui sans toujours proposer de véritables comédies, ménagent des constants moments de loufoquerie dans leur cinéma. Mais ce cinéma est à lui-même son propre territoire esthétique, un territoire mouvant qui a fait bouger les curseurs d’appréciation et surtout complètement réorienté certaines carrières. Pour Eric et Ramzy, il y a incontestablement un avant et un après leur rencontre avec Quentin Dupieux. De même, Sandrine Kiberlain s’est définitivement affirmée ces dernières années comme une grande actrice comique. Suivant une toute autre trajectoire, Bruno Dumont est passé sans coup férir du « jansénisme post-bressonien » au burlesque brutaliste de P’tit Quinquin et Ma Loute. On a vite fait d’employer le terme « décalé » pour évoquer ce cinéma. Au contraire, il est l’un des plus « calés » qu’il soit. Pas si déconnectés que ça, ces filmslà sont peut-être ceux qui parlent le mieux de la France d’aujourd’hui. Et là encore, il faut peut-être prendre les étiquettes à rebrousse-poil. Dès les premières minutes de Rubber, Quentin Dupieux a fourni une sorte de mode d’emploi à ce cinéma : celui du « no reason », une version agressive du non-sens anglo-saxon, sur le mode : « ne cherchez pas, il n’y a rien à comprendre, si ça vous fait rire, tant mieux, mais vous n’êtes pas obligés non plus ». L’absurde est une inspiration en soi. Il y avait déjà du « nouvel humour » au théâtre il y a 60 ans, et les dialogues de Steak ne dépareraient pas chez Ionesco. Mais il peut aussi dépasser son statut de mode d’emploi pour spectateurs désorientés, et permettre de redonner — ou d’inventer — un sens drolatique à un monde qui a perdu la boule. Invoquer l’absurde n’est pas de pur arbitraire ou pour le simple plaisir d’inventer de nouvelles règles, mais une façon de soigner le mal par le mal. Si notre monde ne tourne plus rond, retournons-le encore davantage. S’il prend des allures de farce ou de mauvaise blague, eh bien, opposons-lui des farces encore plus corrosives. Si cette comédie demeure un fidèle baromètre inversé de l’état d’aberration de notre société, elle a encore de beaux jours devant elle.

JOACHIM LEPASTIER

Joachim Lepastier est critique aux Cahiers du Cinéma depuis 2009. Il est également intervenant dans les lycées pour le programme Lycéens au Cinéma, enseigne à l’IESA (école des métiers de la culture) et a donné plusieurs conférences ou animé des ateliers sur les rapports entre architecture et cinéma.


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LE NOUVEAU BURLESQUE FRANÇAIS

DOUBLE FEATURE : SERGE BOZON

TIP TOP SERGE BOZON FICTION / 2012 / FRANCE, BELGIQUE, LUXEMBOURG / 1H46 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION Isabelle HUPPERT, Sandrine KIBERLAIN, François DAMIENS, Karole ROCHER, Aymen SAÏDI SCÉNARIO Serge BOZON, Odile BARSKI, Axelle ROPERT IMAGE C éline BOZON SON Laurent GABIOT, Valène LEROY, Angelo Dos SANTOS MUSIQUE Roland WILTGEN DÉCORS Régine CONSTANT MONTAGE François QUIQUERÉ PRODUCTION Les Films Pelléas

Deux inspectrices de la police des polices, Esther Lafarge et Sally Marinelli, sont chargées d’enquêter sur la mort d’un indic d’origine algérienne dans un commissariat de province. Épaulées par le grotesque capitaine Robert Mendès, elles ne sont elles-mêmes pas sans mystère. L’une tape, l’autre mate…  Si le récit obéit à une logique aléatoire, le film tient par une certaine folie de ses acteurs, mais une folie logique. Chacun des trois personnages principaux évolue dans un registre qu’on lui connaît déjà : Isabelle Huppert, la psychorigide aux gestes quasi robotiques, Sandrine Kiberlain, la godiche lunaire ayant toujours un temps de retard, et François Damiens, le chien lâché dans un jeu de quilles, dégoupillant sans cesse la grenade de la bêtise satisfaite. Mais on avait rarement vu ces trois registres chacun à un tel degré d’absurde et donnant ainsi naissance à d’étonnantes caricatures poétiques, que les acteurs réinvestissent avec une joie non feinte. Le plaisir de Tip Top tient essentiellement dans ce déraillement du jeu, fait d’accélérations abruptes de certains dialogues (le même effet qu’un 33 tours qu’on s’amuserait à passer en 45), et de toute une gamme de dérèglements aussi bien corporels (la déjà fameuse scène d’amour-pugilat entre Isabelle Huppert et Samy Naceri) que linguistiques. Joachim Lepastier (Cahiers du cinéma, Septembre 2013)


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DOUBLE FEATURE : SERGE BOZON

PENN AND TELLER GET KILLED ARTHUR PENN FICTION / 1989 / ÉTATS-UNIS / 1H29 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION P enn JILLETTE, TELLER, Caitlin CLARKE, David Patrick KELLY, Leonardo CIMINO SCÉNARIO Penn JILLETTE, TELLER IMAGE Jan WEINCKE MUSIQUE Paul CHIHARA MONTAGE J effrey WOLF PRODUCTION Lorimar Film Entertainment INÉDIT EN FRANCE

Penn et Teller sont deux magiciens excentriques et provocateurs connus pour leur humour corrosif et leurs tours de magie sanglants. Un jour, Penn annonce à la télévision qu’il souhaiterait que quelqu’un tente de l’assassiner… Le dernier film du réalisateur de Bonnie and Clyde, comédie noire inédite en France. Le comique est le genre le plus difficile, c’est connu. Entre autres pour une raison méconnue : l’instabilité temporelle face aux gags. Pour partir d’un exemple concret, le mien, et me limiter à des comédies canoniques, disons The Party [Blake Edwards, 1968] ou Bring it up baby [L’Impossible Monsieur Bébé, Howard Hawks, 1938], parfois je trouve les films hilarants, parfois je les trouve théoriques. Dans le premier cas, je rigole presque tout le temps. Dans le second cas, je rigole peu, me sens souvent gêné et trouve la construction trop abstraite. Cela dépend des visions. Je n’ai jamais compris d’où vient mon instabilité, que j’imagine partagée par plein de spectateurs. Alors j’ai choisi un film dont cette instabilité est le sujet. Je ne garantis donc pas le rire constant, mais juste le passage constant entre rire instinctif et gêne théorique. Serge Bozon


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LE NOUVEAU BURLESQUE FRANÇAIS

DOUBLE FEATURE : QUENTIN DUPIEUX

STEAK QUENTIN DUPIEUX FICTION / 2007 / FRANCE, CANADA / 1H20 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION É ric JUDOR, Ramzy BÉDIA, Jonathan LAMBERT, Vincent BELORGEY (alias KAVINSKY), Sébastien AKCHOTÉ (alias SEBASTIAN), Laurent NICOLAS, Sébastien TELLIER SCÉNARIO Quentin DUPIEUX IMAGE R iego Van WERSCH SON Olivier SCHWOB, Dominique VIEILLARD MUSIQUE Mr. Oizo, Sebastien TELLIER, SebastiAn DÉCORS Martin TESSIER MONTAGE Isabelle MALENFANT PRODUCTION La Petite Reine, 4 Mecs en Baskets Production, 4 Mecs à Lunettes Production

2016. Après sept ans passés en hôpital psychiatrique, Blaise retrouve George, son ami d’enfance. Mais celuici a bien changé, il s’est fait refaire le visage pour intégrer la bande de petits caïds la plus populaire de la ville, les Chivers. Et le retour de Blaise risque de tout compromettre… Le deuxième long métrage de Mr Oizo, auteur du tube Flat Beat, avec le duo Éric et Ramzy. Ce serait ça, le nouvel humour : sérieux en tout jusqu’au malaise. L’organique malaxé par une chirurgie esthétique omniprésente, les personnages pris dans de petites boucles (Jonathan Lambert, parfaite petite boule de nerfs, éparpille trois fois de suite des boules de billard), la mécanique dégénérée (la voiture d’Éric avançant par bonds) : tout va de travers tandis que la mise en scène reste imperturbable de majesté. Un jeu débile à base de calcul mental et de coups de batte dans le bide, pratiqué par les Chivers, est filmé avec le plus grand sérieux et une lumière sublime. Ce sens de l’échantillonnage et de la répétition vient peutêtre d’une pratique musicale : Dupieux est musicien, et sous le nom de Mr Oizo il compose avec Sébastien Tellier une B.O. de boucles aussi simples que précises. (…) Si bien que la musique fait gag : faites écouter trois secondes un morceau, arrêtez, tournez-vous vers votre ami : « Alors, t’en penses quoi ? ». Et tout au long du film ce hit est répété en boucle sur l’autoradio, quelques secondes seulement, le temps de couper le moteur. S. Delorme et J-P. Tessé (Cahiers du cinéma, 2007)


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DOUBLE FEATURE : QUENTIN DUPIEUX

S.O.B. BLAKE EDWARDS FICTION / 1981 / ÉTATS-UNIS / 2H02 / COUL./ VOSTF INTERPRÉTATION R ichard MULLIGAN, Julie ANDREWS, William HOLDEN, Marisa BERENSON, Larry HAGMAN SCÉNARIO Blake EDWARDS IMAGE H arry STRADLING JR. SON Don SHARPLESS MUSIQUE Henry MANCINI DÉCORS Rodger MAUS MONTAGE Ralph E. WINTERS PRODUCTION Artista Management, Geoffrey Productions, Lorimar Film Entertainment

Le dernier film du célèbre cinéaste Felix Farmer est un échec retentissant. Accablé par la critique, abattu par le départ de sa femme, Farmer sombre dans la déprime. Afin de sauver son film, il décide d’en tourner une version érotique. Blake Edwards convoque une galerie de personnages reflétant chacun sa propre perception viciée de ce qu’est devenu Hollywood. Edwards, alors un des derniers représentants et successeur de la comédie classique américaine (on sent encore et toujours l’influence de Wilder, de Lubitsch et de Keaton), se projette en partie dans la folie de ce réalisateur à bout de nerfs. La facette méta-cinématographique de S.O.B. est à ce titre la plus réussie et parvient à imbriquer une réalité grinçante dans un délire ironique qui frôle parfois le masochisme pur. En effet, Edwards lui-même connut avec Darling Lili un insuccès tel qu’il le contraignit à reprendre à contrecœur les rênes de La Panthère Rose. Pour appuyer le ludisme et la férocité de sa démarche, il entraîne avec lui son épouse Julie Andrews, dont l’image doucereuse est encore très liée à son rôle de Mary Poppins et de Maria Von Trapp (La Mélodie du bonheur) ainsi qu’à son époque (les 60’s). Julien Dumeige (Ilétaitunefoislecinéma.com)


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DOUBLE FEATURE : JEAN-CHRISTOPHE MEURISSE

APNÉE JEAN-CHRISTOPHE MEURISSE FICTION / 2016 / FRANCE / 1H29 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION C éline FUHRER, Thomas SCIMECA, Maxence TUAL, Thomas DE POURQUERY, Olivier SALADIN SCÉNARIO Jean-Christophe MEURISSE IMAGE J avier RUIZ GOMEZ SON Colin FAVRE-BULLE DÉCORS Sven KUFFER, Hervé REDOULES MONTAGE Carole LE PAGE PRODUCTION ECCE FILMS

Céline, Thomas et Maxence marchent toujours par trois. Ils veulent se marier, une maison, un travail, des enfants sages… mais ils sont insoumis et inadaptés à la furieuse réalité économique et administrative du monde moderne. Ils traversent la France, en quête de nouveaux repères, de rencontres et d’instants de bonheur éphémère. J’ai tenté une forme de psychanalyse « électrochoc », avec férocité et drôlerie. Mais plus qu’un portrait de la France, Apnée est une errance, un voyage. (…) Il y a, j’espère, quelque chose du « miroir » dans Apnée. Le rire est souvent synonyme d’abêtissement, alors que c’est une vraie force pulsionnelle d’intelligence, la rencontre entre le conscient et l’inconscient. Pour Apnée, nous avons voulu conserver une forme de premier degré, ne pas nous vautrer dans l’ironie. Quand les trois personnages principaux visitent un appartement de 18m2 au loyer de 1200€, ce n’est pas une extrapolation, c’est la réalité ! Il y a, d’après moi, une différence entre le cynisme et la moquerie. Avec les Chiens de Navarre, ma compagnie de théâtre, nous avons toujours voulu raconter des choses tristes, révoltantes ou injustes, par le biais du rire. Jean-Christophe Meurisse (Dossier de presse du film, 2016)


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DOUBLE FEATURE : JEAN-CHRISTOPHE MEURISSE

CHANSONS DU DEUXIÈME ÉTAGE SANGER FRAN ANDRA VANINGEN

ROY ANDERSSON

FICTION / 1999 / SUÈDE, FRANCE, ALLEMAGNE / 1H38 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION L ars NORDH, Stefan LARSSON, Torbjörn FAHLSTRÖM, Sten ANDERSSON, Lucio VUCINO SCÉNARIO Roy ANDERSSON IMAGE I stvan BORBAS, Jesper KLEVENAS SON Jan ALVERMARK, Owe SVENSSON MUSIQUE Benny ANDERSSON PRODUCTION R oy ANDERSSON Filmproduktion AB

Dans une grande ville, une série d’événements étranges, parfois cruels, s’enchainent sans relation apparente : un immigré est tabassé en pleine rue sous le regard des passants ; un homme fraîchement licencié s’accroche aux pieds de son ancien patron et un homme épuisé par la vie met le feu à son magasin pour toucher l’argent de l’assurance… Chansons du deuxième étage est aussi drôle, fou que pathétique et mélancolique. Roy Andersson est l’un des rares réalisateurs qui me fait passer par toutes sortes de rires et de pleurs pendant ses films (enfantin, méchant, émotif, de résistance…). On comprend mieux avec lui l’expression « pleurer de rire ». Avec une construction d’images hors du commun ; aucun mouvement de caméra, premier plan et arrière plan souvent immobiles, Roy Andersson a une manière unique à lui d’élaborer ses images picturales. Chansons du deuxième étage est un conte pré-apocalyptique burlesquodépressif où le passé et le présent se confondent, où les morts et les vivants se mêlent. Son humour acide, glaçant, lui permet de ne jamais tomber dans la démonstration ou la moralité et amène bien au contraire un souffle lyrique, une terrible humanité contre toute attente. L’absurdité est partout chez Roy Andersson, comme inséparable à la nature humaine. Il me fascine autant qu’il me fait rire. Jean-Christophe Meurisse


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DOUBLE FEATURE : EMMANUEL MOURET

FAIS-MOI PLAISIR ! EMMANUEL MOURET FICTION / 2008 / FRANCE / 1H30 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION E mmanuel MOURET, Judith GODRÈCHE, Déborah FRANÇOIS, Frédérique BEL, Dany BRILLANT SCÉNARIO Emmanuel MOURET IMAGE L aurent DESMET SON Maxime GAVAUDAN, Mélissa PETITJEAN DÉCORS David FAIVRE MONTAGE M artial SALOMON PRODUCTION M oby Dick Films, Les Films Pelléas

Une jeune femme, persuadée que son compagnon fantasme sur une autre, lui propose d’avoir une aventure avec cette dernière, pensant ainsi sauver son couple. Le jeune homme se rend donc chez celle qu’il vient de rencontrer, ignorant qu’il s’agit de la fille du Président de la République… Mouret est une sorte de contorsionniste des relations amoureuses, un dialecticien du couple, un talmudiste du désir, toujours prêt à échafauder les hypothèses les plus inhabituelles pour les mettre à l’épreuve du réel. Son but : créer une utopie du Tendre, où les couples pourraient se faire, se défaire, se recomposer, au gré des envies de chacun, sans drame ni hystérie. Évidemment, de la théorie à la pratique, ça fonctionne rarement, et dans le cas de Fais-moi plaisir ! (titre lacanien en diable), notre gentleman lunaire se retrouve plongé dans une odyssée nocturne à la Eyes Wide Shut mâtinée de La Party où il croisera rien de moins que la fille du président de la République. À l’habituelle dialectique mouretienne du discours amoureux s’adjoint ici une dimension burlesque plus prononcée et très réussie. (…) Sous la surface drolatique, Mouret pose pudiquement quelques questions plus lourdes sur le couple, la fidélité, le désir, l’éternelle tension entre les multiples appels des sens et la patiente construction d’une relation solide. Serge Kaganski (Les Inrockuptibles, Juin 2009)


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DOUBLE FEATURE : EMMANUEL MOURET

MICKI ET MAUDE MICKI & MAUDE

BLAKE EDWARDS FICTION / 1984 / ÉTATS-UNIS / 1H57 / COUL./ VOSTF INTERPRÉTATION D udley MOORE, Ann REINKING, Amy IRVING, Richard MULLIGAN, George GAYNES SCÉNARIO Jonathan REYNOLDS IMAGE H arry Stradling JR. SON Jerry JOST MUSIQUE Lee HOLDRIDGE DÉCORS Stuart A. Reiss MONTAGE Ralph E. WINTERS PRODUCTION C olumbia Pictures, Delphi III Productions

Journaliste vedette, Rob Salinger désire depuis longtemps devenir père, contrairement à son épouse qui préfère favoriser sa carrière professionnelle. Il rencontre une pétillante jeune femme qui devient sa maîtresse et tombe enceinte. Alors qu’il s’apprête à demander le divorce, sa femme lui annonce aussi sa grossesse. Micki et Maude n’est pas un des films les plus connus de Blake Edwards, je l’ai découvert assez tardivement et il provoqua en moi un choc si important qu’il retentit encore aujourd’hui. Un peu comme l’avait été Sérénade à trois de Lubistch bien des années auparavant. Ils ont en commun la critique de l’exclusivité amoureuse et la célébration de l’élasticité du cœur. Si un grand nombre de films autour du couple se sont amusés et interrogés sur ce qui fondait une union amoureuse, peu ont donné une telle réponse. Communément, lorsqu’un personnage balance amoureusement entre deux personnes, il y a une bonne réponse et une mauvaise. Ici rien de tout ça. Il y a bien une évidence (Blake Edwards filme l’intimité amoureuse d’une façon si savoureuse!), mais cette évidence est faite de deux évidences. Cela est si contraire à nos habitudes que nous nous retrouvons face à un drame comme à une incroyable comédie. Le burlesque côtoie les larmes tandis que notre esprit ne peut s’empêcher de se questionner sur nos usages amoureux. Emmanuel Mouret


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DOUBLE FEATURE : ANTONIN PERETJATKO

LA LOI DE LA JUNGLE ANTONIN PERETJATKO FICTION / 2016 / FRANCE / 1H39 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION V incent MACAIGNE, Vimala PONS, Pascal LÉGITIMUS, Mathieu AMALRIC Jean-Luc BIDEAU. SCÉNARIO Antonin PERETJATKO, Frédéric CIRIEZ,Maud AMELINE IMAGE S imon ROCA DÉCORS Yann MEGARD, Serge FERNANDEZ MONTAGE Antonin PERETJATKO, Xavier SIRVEN PRODUCTION Rectangles Productions, France 3 Cinema, Orange Studio, Scope Pictures, IMAV Editions

Marc Châtaigne, stagiaire au Ministère de la Norme, est envoyé en Guyane pour la mise aux normes européennes du chantier GUYANEIGE : première piste de ski indoor d’Amazonie, destinée à relancer le tourisme en Guyane. De mésaventure en mésaventure, on lui affuble un coéquipier. Pas de chance c’est une pinup. Pire : elle a du caractère Je ne fais pas du cinéma réaliste, mais ça ne m’empêche pas de parler du monde aujourd’hui. C’est souvent de là que viennent les quiproquos par rapport à la comédie ou au burlesque : on croit parfois que parce que ce n’est pas réaliste, il n’y a pas d’idées ou de point de vue sur le monde. Ce qui m’intéresse, c’est d’utiliser l’humour comme une loupe, un filtre grossissant de la réalité. (…) Le film a une cadence particulière, on est autour de 22 ou 22,5 images/seconde. Ça donne des voix un peu plus aigües, une légère accélération assez comique. En général, dans les films burlesques, de Chaplin à Tati ou Jerry Lewis, le personnage principal a toujours une démarche très particulière. J’avais envie de changer un peu la démarche des comédiens par cette accélération. Antonin Peretjatko (Dossier de presse du film, 2016)


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DOUBLE FEATURE : ANTONIN PERETJATKO

CARTOONS : TEX AVERY TEX AVERY ANIMATION / 1949-1955 / ÉTATS-UNIS / 1H10 / COUL. / VOSTF LE PETIT CHAPERON CHAUFFÉ À BLANC (RED HOT RIDING HOOD), 1943 CASSE-NOISETTES ET SES COPAINS (SCREWBALL SQUIRREL), 1944 DROOPY SHÉRIF (DEPUTY DROOPY), 1955 DROOPY À LA CONQUÊTE DE L’OUEST (DRAG-A-LONG DROOPY), 1954 ROCK-A-BYE BEAR, 1952 LES MÉTAMORPHOSES DE CENDRILLON (SWING SHIFT CINDERELLA), 1945 LE COUP DU LAPIN (DOGGONE TIRED), 1949 CHUT… (SH-H-H-H-H-H), 1955 LES DEUX CHAPERONS ROUGES (LITTLE RURAL RIDING HOOD), 1949

Un programme de 9 films d’animation, composé par Antonin Peretjatko, du génie du cartoon, Tex Avery, entre 1943 et 1955. Tex Avery : un dictionnaire du gag Plus que tout autre film burlesque, un film de Tex Avery est une mise en image de la caricature de nos émotions, sans limite de faisabilité grâce au dessin. Les protagonistes animaux permettent d’exagérer les ressorts du comportement humain pour notre plus grande joie d’identification (on ne s’y reconnaît pas mais on y reconnaît son voisin). J’ai choisi ces films parce qu’ils sont l’élaboration d’une grammaire du gag. Le choix s’est orienté sur les variations d’un même gag qu’on use jusqu’à la corde, poussant le comique de répétition au delà de toute limite dans un rythme effréné. On dit souvent que la situation est grave mais pas désespérée, chez Tex Avery elle est désespérée mais pas grave du tout. En effet le scénario relève généralement de la tentative désespérée : de ne pas faire de bruit, deséduire une pin-up, de manger, etc ? Ces films sont une ode au refus de la gravité. Antonin Peretjatko


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LE NOUVEAU BURLESQUE FRANÇAIS

DOUBLE FEATURE : THOMAS SALVADOR

DE SORTIE THOMAS SALVADOR FICTION / 2005 / FRANCE / 17 MIN. / COUL. / SD INTERPRÉTATION T homas SALVADOR IMAGE E mmanuelle LE FUR SON Cédric DELOCHE DÉCORS Éric LASCOMBES DE LAROUSSILHE MONTAGE Agnès BRÜCKERT PRODUCTION L es Films Hatari

Un jeune homme se prépare puis sort pour un rendezvous. De nuit, il rentre chez lui. Le quatrième courtmétrage du réalisateur de Vincent n’a pas d’écailles. Thomas Salvador joue dans ses films. Il met son grand corps fin, un peu raide, un peu gauche, et sa gestuelle d’une précision confondante, au cœur de sa mise en scène. Héritier des maîtres burlesques Chaplin, Keaton ou Tati, il est aussi économe et flou, dans ses films, sur le plan de la parole, du récit, ou du sens, que dispendieux et précis sur ceux du son, des idées, du cadre. (…) Aux histoires linéaires, il préfère des successions d’actions chorégraphiées dans lesquelles l’absurde et le détournement nourrissent des gags à combustion lente délicatement subversifs. Ce qui parle, c’est le rapport du corps et des objets à l’espace et au temps, ce sont les contrastes d’échelle, les compressions et décompressions de durée, les transformations inopinées qui distordent des enchaînements faussement répétitifs. La poésie naît de la pure grammaire du cinéma. Isabelle Regnier (Le Monde, Février 2015)


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DOUBLE FEATURE : THOMAS SALVADOR

RIEN QUE POUR VOS CHEVEUX YOU DON’T MESS WITH THE ZOHAN

DENNIS DUGAN

FICTION / 2007 / ÉTATS-UNIS / 1H53 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION A dam SANDLER, John TURTURRO, Emmanuelle CHRIQUI, Nick SWARDSON, Lainie KAZAN SCÉNARIO Judd APATOW, Robert SMIGEL, Adam SANDLER IMAGE M ichael BARRETT MUSIQUE Rupert GREGSON-WILLIAMS DÉCORS Perry Andelin BLAKE MONTAGE Tom COSTAIN PRODUCTION H appy Madison Pictures, Relativity Media

Zohan, un agent d’élite du Mossad et star vénérée dans son pays, a un secret : il rêve de devenir coiffeur en Amérique. Au cours d’un duel contre Fantôme, terroriste palestinien et ennemi juré, il se fait passer pour mort et s’envole pour New York, bien décidé à refaire sa vie et poursuivre son rêve. Une comédie hilarante avec le génial Adam Sandler. Je me souviens d’avoir ri aux éclats en découvrant ce film, que son pitch improbable et je ne sais quel instinct m’avaient poussé à aller voir. Le film cultive l’excès, la provocation, et se plaît à jouer avec le mauvais goût, le tout sur fond de conflit israélopalestinien, rien de moins que ça… Il réussit cependant le pari d’être aussi fou et débridé que cohérent et précis dans sa mise en scène (ses séquences d’actions notamment). Les gags, les paroxysmes (aussi délirants soient-ils) sont d’autant plus drôles qu’ils nourrissent toujours (ou presque…) l’intrigue et les personnages. Adam Sandler, entre candeur, bêtise et surpuissance, est explosif dans son incarnation de Zohan. Son engagement dans le rôle (tel le Will Ferrel des grands jours) est aussi touchant que réjouissant. Un film joyeusement régressif, très inventif et exigeant ! thomas salvador


LA TRANSVERSALE

remakes ARROSEUR ET ARROSÉ [I, II, III] DES FRÈRES LUMIÈRE

P.102

SAUVÉE PAR ROVER DE LEWIS FITZHAMON

P.103

LE FANTÔME DE L’OPÉRA DE RUPERT JULIAN P.104 PHANTOM OF THE PARADISE DE BRIAN DE PALMA P.106 LA CHIENNE DE JEAN RENOIR LA RUE ROUGE DE FRITZ LANG

P.107 P.108

FRANKENSTEIN DE JAMES WHALE FRANKENSTEIN JUNIOR DE MEL BROOKS

P.109 P.110

HISTOIRE D’HERBES FLOTTANTES DE Y. OZU HERBES FLOTTANTES DE YASUJIRO OZU

P.111 P.112

PIÈGES DE ROBERT SIODMAK DES FILLES DISPARAISSENT DE DOUGLAS SIRK

P.113 P.114

LA GRANDE ÉVASION DE RAOUL WALSH LA FILLE DU DÉSERT DE RAOUL WALSH

P.115 P.116

LA FÉLINE DE JACQUES TOURNEUR LA FÉLINE DE PAUL SCHRADER

P.117 P.118

L’IMPOSSIBLE AMOUR DE VINCENT SHERMAN RICHES ET CÉLÈBRES DE GEORGE CUKOR

P.119 P.120

FENÊTRE SUR COUR D’ALFRED HITCHCOCK BODY DOUBLE DE BRIAN DE PALMA

P.121 P.122


TOUT CE QUE LE CIEL PERMET DE DOUGLAS SIRK TOUS LES AUTRES S’APPELLENT ALI DE RAINER WERNER FASSBINDER

P.123

LA MOUCHE NOIRE DE KURT NEUMANN LA MOUCHE DE DAVID CRONENBERG

P.125 P.126

À BOUT DE SOUFFLE DE JEAN-LUC GODARD NUMÉRO DEUX DE JEAN-LUC GODARD ET ANNE-MARIE MIÉVILLE

P.127

LA SOURCE D’INGMAR BERGMAN LA DERNIÈRE MAISON SUR LA GAUCHE DE WES CRAVEN

P.128

P.124

P.128

P.129

LA ROSIÈRE DE PESSAC DE JEAN EUSTACHE P.130 LA ROSIÈRE DE PESSAC 1979 DE JEAN EUSTACHE P.131 COFFY, LA PANTHÈRE NOIRE DE HARLEM DE JACK HILL JACKIE BROWN DE QUENTIN TARANTINO

P.132 P.133

CINÉ-CONFÉRENCE DE MATHIEU MACHERET

P.101

CARTE BLANCHE AU CENTRE POMPIDOU : CINÉ-CONFÉRENCE DE PHILIPPE-ALAIN MICHAUD

P.134

SÉANCE CLIPS PAR JOACHIM LEPASTIER

P.136

CARTE BLANCHE À L’ESPACE MULTIMÉDIA GANTNER : PASSAGE À L’ACTE DE MARTIN ARNOLD P.135


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

LE REMAKE : TOUT EST À REFAIRE Sous sa dénomination assez fruste, le terme de « remake » (de l’anglais « refaire ») recouvre un usage très identifié, pour ainsi dire familier, et pourtant assez peu théorisé, du champ cinématographique. Depuis L’Arroseur arrosé (1895), tourné plusieurs fois par les frères Lumière, ou les différents plagiats du Voyage dans la Lune (1902) de Georges Méliès, le cinéma n’a jamais cessé de recommencer les mêmes films comme on reprend les mêmes standards, ou comme l’on remet d’anciens sujets au goût du jour. À priori, rien ne semble distinguer la pratique du remake d’une dialectique propre à l’histoire de l’art, à savoir celle de l’emprunt et de l’apport : comme on le sait, le théâtre de Racine vient de celui d’Euripide, les Fables de La Fontaine de celles d’Ésope, Don Quichotte des romans de chevalerie, l’architecture classique de l’Antiquité, le hip-hop du jazz, et ainsi de suite. Tout n’est qu’un grand recyclage de récits et de formes, et l’art en lui-même, y compris dans son rapport premier à la nature, pourrait très bien ne consister qu’en cette simple devise : « refaire, mais autrement ». Cependant, le remake a ceci de particulier qu’il met à jour une dualité constitutive du cinéma, échappant de ce fait au strict domaine de l’art. En effet, le remake répond en premier lieu à la part industrielle du cinéma. Si l’on a pu, par exemple, qualifier Hollywood en son âge d’or d’« industrie du prototype », c’est parce que l’organisation rationnelle des studios intégrait le fait que chaque film devait, pour ne pas lasser le public, être à la fois reconnaissable et unique, et donc la production participer d’une double logique sérielle et innovante. Cependant, un délai informel au-delà duquel ce même public, dont la nature est de changer, oublie les films vus, donne blanc-seing à l’industrie pour les refaire tels quels. On comprend donc l’intérêt commercial, souvent mercantile, du remake, estimant que les films sont périssables et qu’il faut les « lifter » régulièrement pour les rendre visibles aux nouvelles générations de spectateurs. Dans cette optique, le remake n’est rien d’autre qu’une forme de duplicata, rhabillé par les conventions esthétiques de l’époque qui le voit naître. Mais l’envie de refaire un film n’est heureusement pas du seul fait de l’industrie, un cinéaste pouvant trouver dans ce projet une façon d’exprimer son admiration pour une œuvre ou de la contester, comme de perfectionner ou d’actualiser l’une des siennes. Le remake peut alors prendre la forme d’un hommage ou d’un défi,


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mais répond dès lors à une logique filiale, qui l’inscrit ipso facto dans une histoire des formes — contrairement à la simple « mise à jour » industrielle. Duplication ou perpétuation, la vérité du remake n’est bien sûr jamais aussi tranchée et nage souvent quelque part entre ces trop évidentes lignes de flottaison. Comment définir plus précisément le remake ? Car les termes de copie ou d’adaptation ne suffisent pas à rendre compte de sa propre réalité, ni de l’effet qu’il suscite. Posons-le le plus simplement du monde : le remake se distingue des autres films en ceci qu’il n’est pas issu d’un texte original, ni d’une quelconque idée de sujet, mais bien d’un film préexistant. Ou, pour le dire autrement : le seul texte du remake, c’est la forme même du film dont il tire son origine. La notion de remake établit d’emblée une interdépendance organique entre deux films : il faut que l’un soit, en quelque sorte, sorti de la matière même de l’autre. Par exemple, les Madame Bovary de Jean Renoir et de Vincente Minnelli, n’entrent pas dans la catégorie du remake, car ils ne sont que les adaptations successives du même roman de Gustave Flaubert, et n’entretiennent pas entre eux de lien organique. En revanche, le Frankenstein Junior (1974) de Mel Brooks, de par sa photographie et sa structure, sort directement de la cuisse filmique du Frankenstein de James Whale (1931), et entretient avec lui une plus grande proximité qu’avec le roman de Mary Shelley. On le voit bien, le remake est affaire de glissements esthétiques d’un film à l’autre. Il a pour insigne avantage d’écarter la primauté du sujet — car deux films qui partagent le même sujet ne sont pas pour autant des remakes, et inversement — pour mettre l’accent sur la pure mise en scène, considérée sous l’angle de la variation. Ainsi, son champ constitue un excellent poste duquel observer l’évolution des formes, des esthétiques, des représentations à travers l’histoire du cinéma, comme la variété de celles-ci d’un pays ou d’un continent à l’autre. Le remake est un formidable outil de comparaison et de mesure différentielle. Une fois ces définitions esquissées, il faut bien reconnaître que le remake est une notion glissante, instable, aux frontières poreuses, et qu’il en existe presque autant de cas que d’occurrences. De fait, nous avons moins retenu ses exemples canoniques, parmi les plus visités, tels que les Ben Hur ou les Scarface, que certaines de ses aventures les plus stimulantes, secrètes ou inattendues, de celles qui proposaient en tout cas les plus frappants écarts ou les variations les plus dynamiques. De par sa dualité propre, la question du remake révèle en premier lieu les grandes ruptures sur lesquelles s’est construite l’histoire du cinéma hollywoodien, dont l’imposant système reste sans doute celui qui s’est montré le plus enclin au recyclage. Entre la splendeur visuelle du Fantôme de l’opéra de Rupert Julian (1925) et sa reformulation hybride par Brian de Palma dans Phantom of the Paradise (1974), se joue, par exemple, bien plus que le hiatus du muet au parlant : entre la majesté expressionniste du premier et le barnum électro-rock du second, un même sens tragique de la marginalité (celle de leurs deux héros défigurés) reste intacte, toujours palpable malgré les progrès de l’ironie et du maniérisme. L’interprétation hallucinée de Lon Chaney, acteur du muet à l’incroyable présence tellurique, se reflète comme outrée dans l’agitation forcenée des petits pantins de l’industrie musicale, dont De Palma croque le grotesque et l’ignominie. En revanche, entre La Féline (1942) de Jacques Tourneur, sommet du cinéma fantastique, et sa refonte par Paul Schrader quarante ans plus tard (1982), c’est la permissivité progressive des images, et l’obsolescence des interdits, qui se donne à comprendre. Le premier, tout de suggestion, jouait des ombres et du hors-champ pour désigner la sexualité coupable de son héroïne, tandis que le second, de plainpied dans l’ère Reagan, montre la violence plein cadre, ainsi que la sensualité conquérante d’une troublante Nastassja Kinski, à travers une palette de couleurs fauves et enfiévrées, qui ont succédé aux subtiles partitions métaphysiques du noir & blanc.


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

De même, de L’Impossible amour (1943) de Vincent Sherman, à Riches et célèbres (1981) de George Cukor, on remarque l’explicitation du référent sexuel et l’abandon de la rhétorique allusive qui faisait corps avec le classicisme. Dans cette histoire d’amitié rivale entre deux écrivaines, c’est surtout la notion de personnage qui évolue : encore taillés, dans le premier, dans les oppositions franches et les stéréotypes puissants de l’âge classique, leur relation devient, dans le second, plus complexe, moins immédiatement lisible, car ciselée dans les nuances d’affects contradictoires. Un gain de précision qui compense la perte d’innocence. Autre exemple : avec La Mouche (1986), David Cronenberg parvient à transcender en tout point La Mouche noire (1958) de Kurt Neumann, une date dans l’histoire de la science-fiction, mais quelque peu engoncé dans les conventions de son époque. Le cinéaste canadien les fait voler en éclats et donne au récit une puissance de figuration extraordinaire, de par son obsession pour les mutations organiques, mais aussi grâce aux avancées des effets spéciaux et de l’animatronique. Cette histoire du cinéma américain aboutit, comme on a pu le constater, à une décomposition-recomposition de ses motifs mythiques dans un grand mélange d’images remixées. Alfred Hitchcock a, en quelque sorte, inauguré le mouvement dans ses films des années 1950, en fétichisant à l’extrême les procédures du classicisme. Quand Brian De Palma réinvestit, trente ans plus tard, les œuvres du maître, c’est pour mieux en révéler le fonds de perversion et de névroses sexuelles. Son formidable Body Double (1984) emprunte le motif voyeuriste de Fenêtre sur cour (1954) pour le tremper dans l’imagerie pornographique triomphante qui infiltre alors jusqu’aux moindre recoins d’Hollywood (les vidéo-clips façon MTV ou les séries-Z horrifiques). De Palma voit juste : dans la voie qui a conduit les images américaine d’un puritanisme non-dupe au porno-libéralisme, Hitchcock reste le principal relais. Dix ans plus tard, Quentin Tarantino mettra un dernier coup de vis à ce grand mélange imagier, en réinvestissant les marges des cinématographies populaires pour les mettre au diapason d’une jouissance emphatique. Son Jackie Brown (1997) ne se contente pas de rendre hommage à la blaxploitation des années 1970 : il « exagère » et déploie l’un de ses plus fameux exemplaires — Coffy, la panthère noire de Harlem (1973) — , dont il récupère l’extraordinaire interprète Pam Grier, comme pour lui donner une seconde vie, amplifiée par les moyens et la conscience du cinéma contemporain. Le cinéma américain ne suffirait pas à lui seul à circonscrire la question du remake, s’il n’était aussi considéré dans ses échanges avec l’étranger. Hollywood, nourri par les flux migratoires d’artistes et de techniciens venus d’Europe et d’ailleurs, s’est toujours montré attentif aux grands succès des cinématographies étrangères, pour mieux les reproduire à domicile. Par exemple, quand Fritz Lang tourne, avec La Rue rouge (1945), le remake américain de La Chienne (1931) de Jean Renoir, le crime passionnel dont il est question n’a plus du tout le même sens. Chez Renoir, c’est la ronde cruelle des désirs et intérêts qui conduit presque incidemment au meurtre, tandis que chez Lang, l’acte criminel procède d’une mécanique sociale si implacable qu’elle rejoint les forces antiques du destin. Pièges de Robert Siodmak (1939) et Des filles disparaissent de Douglas Sirk (1947) tracent, quant à eux, le cheminement typique de ce que fut l’émigration vers l’Ouest des talents allemands : le premier marque la fin de l’escale française de Robert Siodmak avant de rejoindre les ÉtatsUnis, et préfigure, en quelque sorte, le film de serial-killer. Son remake américain, par un autre émigré allemand, conserve le pittoresque de l’original en le déportant à Londres, mais s’avère plus farfelu, de par l’incohérence d’un récit mi-gothique micomique, qui sert surtout de prétexte au cinéaste pour s’essayer à ses fameux plans tortueux ou striés de reflets.


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La traversée de l’Atlantique ne s’est cependant pas déroulée en sens unique. Si la modernité européenne s’est en partie fondée sur le rejet d’Hollywood, elle n’en a pas moins intégré l’influence des grands films américains. Fassbinder, par exemple, s’est réclamé des mélodrames de Douglas Sirk et a réinterprété leur distanciation latente — le fait qu’ils tenaient toujours un double discours sous le vernis hollywoodien — à l’aune de l’héritage brechtien. Tous les autres s’appellent Ali (1974) transpose Tout ce que le ciel permet (1955), de l’Amérique pavillonnaire à l’Allemagne de la reconstruction, soit d’un miracle économique à l’autre, la même lutte des classes transparaissant sous les amours non conformes qu’ils mettent chaque fois en scène. Puis, la modernité est revenue en Amérique sous différentes formes, dont le cinéma des marges ne fut pas l’une des moins surprenantes. Avec La Dernière Maison sur la gauche (1972), Wes Craven bricole une bande horrifique en reprenant l’argument de La Source d’Ingmar Bergman (1960). Convertissant son budget famélique en un rendu simili-documentaire, le cinéaste provoque le malaise par d’incessantes ruptures de ton, qui font se côtoyer la dérision, le grotesque et la terreur froide. Reste tout de même à évoquer le cas épineux et passionnant de l’« auto-remake », qui réunit des cinéastes de toutes provenances ayant un jour souhaité recommencer l’un de leurs propres films. Quand, par exemple, un géant comme Raoul Walsh refait High Sierra (La Grande évasion, 1940) sous le titre de Colorado Territory (La Fille du désert, 1949), c’est moins par souci de variation que pour rhabiller le récit du genre qui lui convient le mieux. Le premier, en effet, est un film noir qui bascule à un moment dans un cadre de western, tandis que le second y appartient complètement. Walsh s’extirpe de l’ancrage urbain et contemporain, pour insuffler plus d’unité et de plénitude à l’action. Le caractère hybride de High Sierra se résout alors dans une pure directivité, Colorado Territory filant comme une flèche vers son terme. En revanche, Herbes flottantes (1959) du japonais Yasujiro Ozu, est une répétition presque à l’identique de son Histoire d’herbes flottantes (1934). Toutefois, en vingt-cinq ans, le style du maître a changé : il est passé du noir & blanc à la couleur, et la truculence des années 30 a cédé le pas à un ascétisme et une réserve beaucoup plus résignés, laissant le temps faire son œuvre dans les rapports complexes qui lient ses personnages de comédiens. Le cinéaste français Jean Eustache, quant à lui, nous a livré un cas unique de « remake documentaire » : dans ses deux Rosière de Pessac (1968, 1979), il filme à près de dix ans de distance le même rituel villageois, et enregistre dans l’intervalle le profil mouvant du temps historique français. Enfin, le cas le plus spectaculaire de la programmation revient sans doute à Jean-Luc Godard qui, à l’invitation du producteur Georges de Beauregard, devait tourner en 1975 un remake de l’emblématiqwue À bout de souffle (1960), fleuron de la Nouvelle Vague. Le résultat, intitulé Numéro Deux, retranscrit le quotidien d’un jeune couple à travers les configurations intrusives du medium vidéo, et a tout de la commande détournée. Celle-ci exigerait presque qu’on invente pour elle une catégorie impossible du remake : celui qui n’aurait rien à voir avec l’original. Au-delà de la plaisanterie, une telle catégorie aurait au moins l’avantage de nous rappeler que le remake n’est parfois pas autre chose qu’un engin subjectif et ludique, nous permettant de circuler librement dans l’histoire du cinéma, et d’assembler selon des filiations réelles ou imaginaires des séries de films aimés

MATHIEU MACHERET

Diplômé de l’ENS Louis-Lumière, Mathieu Macheret est critique au Monde et enseigne le cinéma au Centre Sèvres. Il a également écrit pour les Cahiers du cinéma et Trafic.

Mathieu macheret animera une conférence autour du remake.


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

ARROSEUR ET ARROSÉ [I, II, III] LES FRÈRES LUMIÈRE FILM LUMIÈRE N°99,1 - ARROSEUR ET ARROSÉ [I] ANNÉE DE PRODUCTION 1895 OPÉRATEUR LOUIS LUMIÈRE LIEU FRANCE, LYON, MONPLAISIR, JARDIN MAISON LUMIÈRE FILM LUMIÈRE N°99,2 - ARROSEUR ET ARROSÉ [II] ANNÉE DE PRODUCTION 1897 OPÉRATEUR INCONNU LIEU FRANCE, LYON, MONPLAISIR FILM LUMIÈRE N°99,3 - ARROSEUR ET ARROSÉ [III] ANNÉE DE PRODUCTION 1897 OPÉRATEUR INCONNU LIEU FRANCE, LYON, MONPLAISIR

© Institut Lumière

Un enfant s’amuse à mettre son pied sur le tuyau d’arrosage d’un jardinier pour l’asperger. Le succès du « premier gag de l’histoire du cinéma » est tel qu’il donne lieu aux premiers remakes (Georges Méliès, Alice Guy, James Bamforth) dont les auto-remakes de Louis Lumière, célèbres « vues comiques » que l’Histoire retiendra sous le titre « L’Arroseur arrosé ». Les trois vues sont présentées l’une à la suite de l’autre dans ce programme. Les titres ont plusieurs variantes mais ne désignent pas nécessairement des versions différentes. Ainsi, durant les projections de démonstration de 1895, et avant la Première commerciale du 28 décembre, la première version de 1895 est désignée successivement sous ces titres : Le jardinier (le 10 juin 1895 à Lyon, le 11 juillet à Paris et le 10 novembre à Bruxelles) ; L’arroseur et le gavroche (le 12 novembre à Bruxelles) ; Le Cantonnier (le 11 décembre à Grenoble) et à nouveau Le Jardinier (sur l’affiche du programme du 28 décembre à Paris). Même lorsque le premier catalogue de vente paraîtra en 1897 — en donnant un titre et un numéro aux films — cela n’empêche pas l’usage de titres alternatifs dans les compte rendus de projection ou les programmes (soit parus dans la presse, soit ceux affichés devant les salles). Jean-Marc Lamotte (Institut Lumière)


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SAUVÉE PAR ROVER (VERSIONS 1+3) RESCUED BY ROVER

LEWIN FITZHAMON FICTION / 1905 / ROYAUME-UNI / 5 MIN. / N&B / MUET INTERPRÉTATION May CLARK, Cecil MILTON HEPWORTH, Mrs HEPWORTH, Barbara HEPWORTH, BLAIR SCÉNARIO Margaret HEPWORTH IMAGE Cecil HEPWORTH, Lewin FITZHAMON PRODUCTION Hepworth Manufacturing Compagny

Ancêtre de Lassie, Rover, chien fidèle, sauve le bébé de la famille. Les versions 1 et 3 sont présentées ici simultanément en split screen. Le film a connu un tel succès — plus de 400 copies ont été commandées — que la Hepworth Manufacturing Company a été obligée de produire deux remakes planpar-plan pour compenser l’usure des deux premiers négatifs. (…) Il semblerait que ce film ait influencé le grand pionnier américain D. W. Griffith, dont le travail les années suivantes, a été élaboré à partir des innovations présentes dans Rescued by Rover, notamment si l’on considère l’invention du montage parallèle qui permet de présenter divers éléments d’une intrigue se déroulant au même moment. En outre, le langage filmique établi par le film de Fitzhamon demeure largement celui que nous trouvons encore en usage aujourd’hui. Michael Brooke (BFI.uk)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

LA FANTÔME DE L’OPÉRA THE PHANTOM OF THE OPERA

RUPERT JULIAN

FICTION / 1925 / ÉTATS-UNIS / 1H33 / N&B / MUET INTERPRÉTATION Lon CHANEY, Mary PHILBIN, Norman KERRY SCÉNARIO Elliot J. CLAWSON, Bernard MCCONVILLE, Frank M. MCCORMACK, Raymond L. SCHROCK, Jasper SPEARING et Richard WALLACE d’après le « Le Fantôme de l’Opéra » de Gaston LEROUX IMAGE M ilton BRIDENBECKER, Virgil MILLER et Charles VAN ENGER MUSIQUE Gustav HINRICHS et Sam PERRY DÉCORS Ben Carré MONTAGE E dward CURTISS, Maurice PIVAR, Gilmore WALKER PRODUCTION Universal

VERSION RESTAURÉE

Un être au visage masqué, à moitié fou, hante les coulisses de l’Opéra de Paris. Amoureux de Christine, une jeune cantatrice, il manigance pour qu’elle obtienne le premier rôle dans Faust. L’un des premiers films d’épouvante produit par le Studio Universal avec Lon Chaney, surnommé « l’homme aux mille visages ». C’est ici le triomphe du roman populaire illustré par le cinéma, lequel trouve dans cette illustration une de ses vocations les plus durables et les moins sujettes à caution. L’intrigue, qui ressemble dans cette version à une sorte de variation sur le thème de « La Belle et la Bête », enchaîne sur un rythme assez rapide une suite presque ininterrompue de morceaux de bravoure (la chute du lustre, la descente sous l’Opéra, le Fantôme démasqué, le bal masqué, etc.) qui se déroulent dans un climat original d’angoisse et de terreur qu’on ressentira aujourd’hui au second degré, car il a déjà accompli son œuvre, c’est-à-dire donné aux personnages et surtout au Fantôme une valeur mythique. Jacques Lourcelles (Dictionnaire du cinéma, ed. Robert Laffont, 1992)


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PHANTOM OF THE PARADISE BRIAN DE PALMA FICTION / 1974 / ÉTATS-UNIS / 1H32 / COUL / VOSTF INTERPRÉTATION P aul WILLIAMS, William FINLEY, Jessica HARPER, George MEMMOLI, Gerrit GRAHAM SCÉNARIO Brian De PALMA IMAGE L arry PIZER MUSIQUE Paul WILLIAMS MONTAGE P aul HIRSCH PRODUCTION H arbor Productions, 20th Century Fox

VERSION RESTAURÉE

Winslow Leach, jeune compositeur inconnu, tente désespérément de faire connaître l’opéra qu’il a composé. Le riche producteur Swan, cherche un nouveau talent pour l’ouverture de son club, le Paradise. Il vole la partition de Leach et le fait enfermer pour trafic de drogue. Brisé, défiguré, Leach parvient à s’évader et revient hanter le Paradise… Culte. Par le truchement d’une mécanique parfaite, le film progresse avec un rythme formidable, un véritable savoir-faire narratif : des éléments de récit en apparence outranciers et patauds happent en fait l’auditoire, l’emprisonnant dans un récit passionné. Parce qu’il n’énonce pas ses rouages artistiques comme des procédés autosuffisants — il serait facile de se contenter de caractériser le film comme le croisement de la comédie musicale façon Broadway et du fantastique gothique, de le réduire à cette dimension superficielle —, Phantom of the Paradise garde son identité propre. Les split-screens virtuoses, les citations multiples, la direction artistique formidable : rien de tout ça ne prend le pas sur la nécessaire homogénéité du film. Versant pop décadente de la critique acerbe de George Romero sur les dérives de la forme cinématographique, Phantom of the Paradise annonce clairement : tout est entertainment – le film lui-même plus que tout. Vincent Avenel (Critikat, février 2014)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

LA CHIENNE JEAN RENOIR FICTION / 1931 / FRANCE / 1H40 / N&B / VOF INTERPRÉTATION M ichel SIMON, Janie MARÈSE, Magdeleine BÉRUBET, Georges FLAMANT, Roger GAILLARD SCÉNARIO Jean RENOIR, André GIRARD, d’après le roman « La Chienne » de Georges de LA FOUCHARDIÈRE et André MOUEZY-EON IMAGE T heodor SPARKUHL SON Marcel COURMES, Joseph DE BRETAGNE MUSIQUE Eugénie BUFFET, Enrico TOSELLI DÉCORS Gabriel SCOGNAMILLO MONTAGE Denise BATCHEFF, Jean RENOIR, Marguerite RENOIR PRODUCTION L es Établissements Braunberger-Richebé

VERSION RESTAURÉE

Dans un Montmartre bohème et populaire, Maurice Legrand s’ennuie entre son travail de caissier et sa triste vie conjugale avec une femme grincheuse et avare. Pour se distraire, il peint tous les dimanches. Il rencontre la jeune et blonde Lulu et tombe amoureux, tandis qu’elle le voit comme un pigeon à plumer. Les femmes, chez Renoir, ne sont chiennes en rien. Chattes plutôt que lionnes (exception : « la » Magnani du Carrosse). Naturellement perverses quand cela se trouve (et c’est souvent), elles reflètent la nature même de Renoir, dans la mesure où mensonge et séduction se répondent en partenaires privilégiés, laissant courir leur venin dans les nervures des films. Regardées avec amour, quelque fois jusqu’au respect, caressées par la lumière et la caméra, étoiles dans le ciel de lit d’un homme qui les vénère autant qu’il les désire, et aussi stars offertes sur l’écran par le cinéaste, elles justifieraient à elles seules cette inconditionnalité dont peut bénéficier Renoir. Affichant leur innocence dans des sourires désarmants, portant haut leur amour de la vie, réfutant par la tendresse leurs positions de victimes, s’ouvrant à l’homme pour mieux le posséder, corolles offertes au souffle de l’histoire, elles sont à la fois émotion de l’instant et mystère de l’éternité. Paul Vecchiali (Cahiers du cinéma, Juillet-Aout 1994)


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LA RUE ROUGE SCARLET STREET

FRITZ LANG

FICTION / 1945 / ÉTATS-UNIS / 1H42 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION E dward G. ROBINSON, Joan BENNETT, Dan DURYEA, Margaret LINDSAY, Rosalind IVAN SCÉNARIO Dudley NICHOLS, d’après le roman « La Chienne » de Georges DE LA FOUCHARDIÈRE et André MOUEZY-EON IMAGE M ilton R. KRASNER SON Bernard B. BROWN, Glenn E. ANDERSON MUSIQUE Hans J. SALTER DÉCORS Russell A. GAUSMAN, Carl LAWRENCE MONTAGE Arthur HILTON PRODUCTION Diana Productions, a Fritz Lang Production

Petit caissier sans histoires, Christopher Cross rencontre Kitty dans une rue de Greenwich Village. Elle le prend pour un riche artiste, lui qui n’est qu’un peintre amateur. Motivée par Johnny, son amant, Kitty décide de lui soutirer de l’argent. Le scénario original de La Chienne ne pouvait que séduire Fritz Lang qui, arrivé aux États-Unis en fuyant le nazisme, était devenu l’un des maîtres du film noir hollywoodien. Les archétypes du tragique trio amoureux sont posés dès le départ : Kitty, la femme fatale habillée de noir au sourire hypocrite et carnassier ; Chris Cross, la stupide mais consentante victime d’une machination à l’issue presque prévisible ; et Johnny, le maquereau insensible et violent, dont l’immoralité n’est dictée que par l’appât de l’argent. La Rue rouge présente une vision très noire de l’humanité, où chaque personnage tombe toujours plus bas dans la vilenie, entraînant les autres dans son sillon. La morale, très langienne, résulte dans une conclusion pour le moins pessimiste : chacun mérite à des degrés différents le malheur que le sort finit par lui réserver, la dissimulation avérée étant punie de mort ou de culpabilité éternelle. Ophélie Wiel (Critikat, Mai 2014)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

FRANKENSTEIN JAMES WHALE FICTION / 1931 / ÉTATS-UNIS / 1H10 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION B oris KARLOFF, Colin CLIVE, Mae CLARKE, John BOLES, Frederick KERR SCÉNARIO Garrett FORT, Francis EDWARD FARAGOH, d’après le roman de Mary SHELLEY IMAGE A rthur EDESON SON C. Roy HUNTER, William HEDGCOCK DÉCORS Herman ROSSE MONTAGE C larence KOLSTER, Maurice PIVAR PRODUCTION Universal Pictures

Henry Frankenstein est un jeune scientifique qui rêve de créer artificiellement un être humain. Aidé de son assistant, Fritz, ils façonnent un corps à partir de morceaux de cadavres. Fritz lui fournit par erreur le cerveau d’un assassin. La créature va échapper à leur contrôle. Si le maquillage éternellement reconnaissable dû à Jack Pierce a traversé un siècle de cinéma sans prendre une ride, redécouvrir Frankenstein aujourd’hui permet de se rendre compte à quel point, par l’utilisation qu’il a fait de ses références — et de celle de son prédécesseur au fauteuil de réalisateur Robert Florey — le réalisateur James Whale a profondément codifié l’univers du fantastique à venir. (…) Surprenante version, non seulement par ses infidélités par rapport au mythe qui s’est créé a posteriori, par la brièveté du récit (un peu plus d’une heure dix minutes), mais surtout parce qu’elle fait la part belle, non pas à la seule créature, mais aussi au docteur créateur, et à la dualité entre les deux. Campé par Colin Clive, un acteur alcoolique (il mourut d’ailleurs six ans après le film, d’une pneumonie causée par cet alcoolisme) et aux humeurs réputées pour leur instabilité, le docteur Frankenstein est un être tourmenté, mégalomane, mais qui fait montre à l’égard de sa création d’une attention toute en ambiguïté. Vincent Avenel (Critikat, Juin 2008)


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FRANKENSTEIN JUNIOR YOUNG FRANKENSTEIN

MEL BROOKS

FICTION / 1974 / ÉTATS-UNIS / 1H46/ N&B / VOSTF INTERPRÉTATION G ene WILDER, Peter BOYLE, Marty FELDMAN, Gene HACKMAN, Madeline KAHN SCÉNARIO Gene WILDER, Mel BROOKS, d’après le roman de Mary SHELLEY IMAGE G erald HIRSCHFELD SON Don HALL, Gene S. CANTAMESSA MUSIQUE John MORRIS, Irving BERLIN DÉCORS Dale HENNESY, Bob De VESTEL MONTAGE J ohn C. HOWARD PRODUCTION M ichael GRUSKOFF

Peu fier de son ascendance, le Docteur Frederick Frankenstein accepte de retourner sur les terres de ses ancêtres. Là-bas, rattrapé par la folie familiale, il décide de créer à son tour un être à partir de cadavres. Parodie hilarante avec l’un des grands complices de Mel Brooks, l’acteur et génie comique Gene Wilder. Brooks et Wilder auraient facilement pu alimenter une parodie efficace. Mais ce n’est pas le propos ici : nous sommes en plein hommage. Et l’œuvre est belle. Considérant avec tendresse les effets de manche du cinéma d’épouvante de James Whale, Brooks reprend à la lettre certains gimmicks, les poussant parfois à outrance (le « Frau Blücher » toujours suivi du hennissement paniqué des chevaux), mais jamais jusqu’au ridicule. C’est ainsi que les plus belles scènes du diptyque de James Whale trouvent facilement leur place au milieu des gags scabreux (et ma foi passablement hilarants) : le monstre et la petite fille (une scène disparue de la version originale de 1931), l’aveugle, la coiffure magnifique d’Elsa Lanchester dans La Fiancée… Le style musical, la typographie du titre, le style de la mise en scène : tout concourt dans Frankenstein Junior à montrer que Brooks et Wilder, en s’effaçant considérablement derrière le mythe, sont parvenus à créer un film hybride, souvent irrésistiblement drôle, toujours éminemment beau, nostalgique et attendrissant. Vincent Avenel (Critikat, Septembre 2011)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

HISTOIRE D’HERBES FLOTTANTES UKIGUSA MONOGATARI

YASUJIRÔ OZU

FICTION / 1934 / JAPON / 1H29 / N&B / MUET STF INTERPRÉTATION T akeshi SAKAMOTO, Choko IIDA, Hideo MITSUI, Rieko YAGUMO, Yoshiko TSUBOUCHI SCÉNARIO Tadao IKEDA IMAGE H ideo MOHARA DÉCORS Yakichi OTANI, Tamizo KADOTA, Shintarô MISHIMA, Yoshio HINO MONTAGE Hideo MOHARA PRODUCTION Shochiku COMPANY

Une troupe d’acteurs ambulants arrive dans une petite ville de province. Le directeur de la troupe y retrouve une ancienne maîtresse avec qui il a eu un fils, qu’il n’a jamais connu. Il se alors fait passer pour son oncle. Mais sa compagne actuelle, jalouse, découvre son secret… Je vous parle des plus beaux films du monde. Je vous parle de ce que je considère comme le paradis perdu du cinéma. (…) Les films d’Ozu parlent du long déclin de la famille japonaise, et par-là même, du déclin d’une identité nationale. Ils le font, sans dénoncer ni mépriser le progrès et l’apparition de la culture occidentale ou américaine, mais plutôt en déplorant avec une nostalgie distanciée la perte qui a eu lieu simultanément. Aussi japonais soient-ils, ces films peuvent prétendre à une compréhension universelle. Vous pouvez y reconnaître toutes les familles de tous les pays du monde ainsi que vos propres parents, vos frères et sœurs et vous-même. Pour moi le cinéma ne fut jamais auparavant et plus jamais depuis si proche de sa propre essence, de sa beauté ultime et de sa détermination même : de donner une image utile et vraie du XXe siècle. Wim Wenders (commentaire du film Tokyo Ga)


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HERBES FLOTTANTES UKIGUSA

YASUJIRÔ OZU FICTION / 1959 / JAPON / 1H59 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION G anjirô NAKAMURA, Machiko KYÔ, Ayako WAKAO, Hiroshi KAWAGUCHI, Haruko SUGIMURA SCÉNARIO Yasujiro OZU, Kogo NODA IMAGE K azuo MIYAGAWA SON Takeo SUDA MUSIQUE Kojun SAITÔ DÉCORS Tomoo SHIMOGAWARA MONTAGE Toyo SUZUKI PRODUCTION D aiei Motion Picture Company

Ozu a fait de nombreux remakes de ses propres films. Celui-ci en est un des exemples les plus importants. Il réalise une seconde version de son film, sonore et en couleur, 25 années plus tard. Présenté en copie 35 mm très rare. Depuis qu’Ozu est passé à la couleur l’année précédente, il n’a cessé de réaliser des sortes de remakes de ses propres films, de reprendre des histoires ou arguments déjà traités. (…) Dans Herbes flottantes (le nom que les japonais donnent à ces petites pièces de Kabuki sans importance), beaucoup de séquences sont reprises à l’identique du film muet mais l’intrigue est transposée à l’époque contemporaine du tournage (alors que le réalisateur avait pensé tout d’abord la faire se dérouler à l’ère Meiji) et se révèle moins elliptique et moins dramatisée, même si plus amère. Outre le fait qu’il ait été tourné pour un autre studio que la Shochiku, ce deuxième film en couleur nous dépayse des autres opus d’Ozu par le fait que le cinéaste, quasiment sédentarisé à Tokyo depuis de longues années pour s’y faire dérouler ses innombrables histoires, décide de se "changer les idées" et d’aller en villégiature dans un petit village au bord de la mer au sud du Japon, pour y décrire non plus des familles de la middle class japonaise mais des comédiens et villageois sans le sou. Erick Maurel (Dvdclassik.fr, Octobre 2007)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

PIÈGES ROBERT SIODMAK FICTION / 1939 / FRANCE / 1H51 / N&B / VOF INTERPRÉTATION M aurice CHEVALIER, Marie DÉA, Pierre RENOIR, André BRUNOT, Erich VON STROHEIM SCÉNARIO Jacques COMPANEEZ, Ernest NEUVILLE IMAGE M ichel KELBER, Jacques MERCANTON, Marcel FRADÉTAL SON Pierre CALVET MUSIQUE Michel LÉVINE DÉCORS Georges WAKHEVITCH, Maurice COLASSON MONTAGE Yvonne MARTIN PRODUCTION Speva Films

Onze jeunes danseuses sont assassinées. L’amie de l’une d’elles servira d’appât en répondant à toutes les petites annonces passées dans les journaux. Thriller prémonitoire du cycle noir des années 1940. Pièges se présente comme un film à épisodes dont l’extrême hybridité est due autant à la mode du film à sketches dans le cinéma français de la fin des années 1930 qu’au caractère très international du film, que la presse française d’extrême droite n’a pas manqué de dénoncer : l’équipe comprend, outre Siodmak et Erich von Stroheim (dans le rôle de Pears, le couturier fou), le chef opérateur américain Ted Pahle, le décorateur d’origine russe Georges Wakhevich, les scénaristes Ernst Neubach (Neuville au générique) d’origine allemande et Jacques Companeez d’origine russe, une pléiade d’acteurs français (Maurice Chevalier, Marie Déa, Pierre Renoir, Jacques Varennes, etc.). Pièges présente de très nombreuses ruptures de ton, alternant des scènes très noires avec des scènes de comédie. Pour schématiser, le film alterne des scène diurnes, à l’atmosphère comique ou légère avec des scènes nocturnes, à l’éclairage fortement contrasté, où Adrienne se trouve confrontée à des hommes inquiétants et perturbés. Raphaelle Moine (Remakes : les films français à Hollywood, ed. CNRS, Paris 2007)


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DES FILLES DISPARAISSENT LURED

DOUGLAS SIRK FICTION / 1946 / ÉTATS-UNIS / 1H42 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION G eorge SANDERS, Lucille BALL, Charles COBURN, Boris KARLOFF, Cedric HARDWICKE SCÉNARIO Leo ROSTEN, d’après le scénario de « Pièges » IMAGE William H. DANIELS SON Joseph I. Kane, John R. Carter MUSIQUE Michel Michelet DÉCORS Nicolai Remisoff MONTAGE James E. Newcom, John M. Foley PRODUCTION United Artists

Douglas Sirk, le maître du mélodrame hollywoodien s’essaie pour la première fois au genre policier en reprenant à la fois le thème et la musique de Pièges de Robert Siodmak, tourné à Paris quelques années plus tôt, en transposant l’histoire à Londres. Le quatrième film américain (1946) de Detlef Sierck, antinazi émigré devenu Douglas Sirk, reprend le scénario de Pièges, tourné en France, en 1939, par Robert Siodmak. Mais c’est à Londres, au début du siècle, que Lucille Ball, dans le rôle tenu par Marie Déa, aide la police à retrouver la trace de filles disparues pour avoir répondu à une annonce de journal, et à démasquer un assassin. Climat de film noir, traversée de milieux louches, ambiguïté des comportements, intrusion du mélodrame dans une intrigue criminelle. Déjà dirigé deux fois par Douglas Sirk, George Sanders, élégant, raffiné, surpasse, et de loin, Maurice Chevalier, tandis que Boris Karloff remplace l’obsédé qu’était Eric von Stroheim. Très étonnant et pratiquement inconnu, c’est bien le film à ne pas manquer. Jacques Siclier (Le Monde, Avril 1986)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

LA GRANDE ÉVASION HIGH SIERRA

RAOUL WALSH FICTION / 1941 / ÉTATS-UNIS / 1H40 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION I da LUPINO, Humphrey BOGART, Alan CURTIS, Arthur KENNEDY, Joan LESLIE SCÉNARIO John HUSTON, W.R. BURNETT IMAGE Tony GAUDIO SON Dolph THOMAS MUSIQUE Adolph DEUTSCH MONTAGE Jack KILLIFER PRODUCTION Warner Bros.

Roy Earle, braqueur de banque, est libéré de prison. En quête de rédemption, il accepte un dernier gros coup pour assurer ses vieux jours et part en Californie rejoindre ses complices qu’il aura du mal à souder. Mais en chemin, il tombe amoureux de la fille d’un couple de fermiers… Le premier grand rôle d’Humphrey Bogart. High Sierra est passionnant comme amorce du grand retour de Walsh et par les efforts du réalisateur, partiellement couronnés de succès, pour transformer le personnage de Roy Earle en héros walshien à part entière et pour donner à l’ensemble du film une dimension cosmique, essentielle à son œuvre. À travers Roy Earle, Walsh tente de faire le portrait d’un personnage dominé par un besoin éperdu et presque obsessionnel de liberté. Sa nature et son caractère le poussent hors de la ville, hors de la société (et donc hors du film noir), trois domaines qui rétrécissent son expérience et l’asphyxient. Il ne peut être à l’aise qu’aux abords des sommets, dans les grands espaces, dans les solitudes de l’illimité vers lesquels le pousse, même quand il est trop tard, son instinct animal. Les hauteurs de la Sierra Nevada sont en quelque sorte le cimetière des éléphants de ce personnage, trop à l’étroit dans la société, dans le rôle — et l’étiquette — qu’elle lui a collés sur le dos. Jacques Lourcelles (Dictionnaire du cinéma, ed. Robert Laffont, 1992)


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LA FILLE DU DÉSERT COLORADO TERRITORY

RAOUL WALSH

FICTION / 1949 / ÉTATS-UNIS / 1H34 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION D orothy MALONE, Joel MCCREA, Virginia MAYO, Henry HULL, John ARCHER SCÉNARIO John TWIST, Edmund H. NORTH, d’après le film « High Sierra » IMAGE S id HICKOX SON Leslie G. HEWITT MUSIQUE David BUTTOLPH DÉCORS Fred M. MACLEAN MONTAGE Owen MARKS PRODUCTION W arner Bros.

Raoul Walsh transpose le polar High Sierra sous forme de western dans le territoire sauvage du Colorado. J’ai souvent travaillé avec Virginia Mayo, et elle avait un rôle extraordinaire dans Colorado Territory… Les scènes d’amour qu’elle avait avec Joel McCrea donnaient l’impression que ces moments de bonheur allaient vite se briser. Oui, une menace était là, derrière, comme si quelque chose allait exploser, une sorte de « suspense », en somme. Cela, j’essaie toujours de le mettre dans mes films. Car, vous comprenez, il arrive quelque fois que les histoires aient un si faible intérêt… Il vous faut créer quelque chose comme un « suspense ». Comme si quelque chose d’indéterminé, d’inconnu, de menaçant allait se produire… Mais, pour Colorado Territory, j’aimais beaucoup l’histoire. C’est d’ailleurs un remake de High Sierra. J’avais donc l’intention de donner au film une dimension fantastique : quand j’introduis une scène de « fantastique » dans un de mes films, mon but est très simple : c’est, en quelque sorte, pour éloigner le spectateur de l’histoire pendant quelques instants, pour la lui faire oublier, afin de mieux l’y ramener ensuite : pour provoquer chez le spectateur un nouvel intérêt, une réaction. Raoul Walsh (Cahiers du cinéma, Avril 1964)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

LA FÉLINE CAT PEOPLE

JACQUES TOURNEUR FICTION / 1942 / ÉTATS-UNIS / 1H13 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION S imone SIMON, Kent SMITH, Tom CONWAY, Jane RANDOLPH, Jack HOLT SCÉNARIO DeWitt BODEEN IMAGE N icholas MUSURACA SON John CASS MUSIQUE Roy WEBB DÉCORS Darrell SILVERA, Al FIELDS MONTAGE Mark ROBSON PRODUCTION RKO Radio Pictures

New York. Irena, une charmante modéliste épouse Olivier, un architecte rencontré devant la cage de la panthère du zoo de Central Park. Son comportement devient vite troublant, elle se refuse à son époux, convaincue que sa jouissance pourrait la transformer en panthère… Film essentiel, non seulement dans la carrière de ses deux principaux artisans (le producteur Val Lewton et le réalisateur Jacques Tourneur), dans l’histoire du genre fantastique, mais aussi et surtout dans l’évolution du cinéma tout entier (…). Avec ce film, le fantastique — qui ne sera plus jamais pareil — découvre qu’il peut tirer son efficacité maximum de la litote, qu’il peut inventer de nouveaux moyens d’empoigner le spectateur en s’adressant à son imagination. La richesse du travail sur la lumière notamment contribuera à intérioriser le contenu du film dans les personnages et à provoquer une identification plus subtile et plus poussée du spectateur avec les personnages. C’est là que se situe, avec pudeur, la révolution radicale du film. On peut la résumer d’un mot : c’est la révolution de l’intimisme. JACQUES LOURCELLES (Dictionnaire du cinéma, ed. Robert Laffont, 1992)


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LA FÉLINE CAT PEOPLE

PAUL SCHRADER FICTION / 1981 / ÉTATS-UNIS / 1H58 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION N astassja KINSKI, Malcolm MCDOWELL, John HEARD, Annette O’TOOLE, Ruby DEE SCÉNARIO Alan ORMSBY IMAGE J ohn BAILEY, Paul VOM BRACK SON Chris MCLAUGHLIN MUSIQUE Giorgio MORODER DÉCORS Bruce WEINTRAUB MONTAGE Jacqueline CAMBAS, Ned HUMPHREYS, Jere HUGGINS PRODUCTION R KO Radio Pictures, Universal Pictures

Irena retrouve à la Nouvelle-Orléans son frère Paul, dont elle a été séparée depuis l’enfance. Il lui parle d’un étrange héritage familial et affirme qu’ils sont faits l’un pour l’autre. Effrayée, elle rejette ses avances. Paul disparaît et les jours suivant, une mystérieuse panthère tue une prostituée dans une maison close. On reprocha à Schrader de profaner le film de Jacques Tourneur, dont l’art reposait presqu’entièrement sur la suggestion, et laissait volontairement planer le doute sur la malédiction qui planait autour de son héroïne. Il se justifia en prétextant que son film n’était pas à proprement parler un remake, et qu’il n’aurait pas du porter le même titre que la version originale de 1942. Ce supposé blasphème tient à la nature explicite de La Féline, qui mêle érotisme trouble, violence gore, prothèses et maquillages qui permettent d’exhiber (brièvement) des transformations à vue. (…) L’histoire de cette secte millénaire adepte de la bestialité offre à Schrader le prétexte de parler de Eros et Thanatos, de virginité, d’inceste et de relations sadomasochistes. Schrader opte pour une approche mythologique de la sexualité et de la part animale, sous influence jungienne. Il s’éloigne du réalisme de ses premiers films pour une stylisation extrême de tous les éléments dramatiques et esthétiques, ce qui confère à La Féline un univers visuel absolument fascinant. Olivier Père (Arte.fr, Juin 2016)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

L’IMPOSSIBLE AMOUR OLD ACQUAINTANCE

VINCENT SHERMAN FICTION / 1943 / ÉTATS-UNIS / 1H40 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION B ette DAVIS, Miriam HOPKINS, Gig YOUNG, John LODER, Dolores MORAN SCÉNARIO John Van DRUTEN, Lenore COFFEE, Edmund GOULDING, d’après la pièce « Old Acquaintance » de John VAN DRUTEN IMAGE S ol POLITO SON Robert B. LEE MUSIQUE Franz WAXMAN DÉCORS Fred M. MACLEAN MONTAGE Terry MORSE PRODUCTION W arner Bros., First National Pictures

À l’invitation de Millie Drake, son amie d’enfance, Kit Marlowe, romancière confirmée, revient dans sa ville natale. Elle va pousser Millie à publier son propre livre, qui devient un best seller. Aveuglée par son succès, Millie ne se rend pas compte que son mari Preston se détache d’elle… Ineptie ou pas, l’affrontement de ces deux femmes est un pur régal. Tout le film est centré sur leurs rencontres, leurs disputes, leurs séparations… Il s’agit vraiment d’un numéro d’actrices où Bette Davis a le beau rôle, celui de la femme mûre et intelligente. Comme à son habitude elle est d’une justesse de ton, d’une vérité rare. On comprend aisément que Kit soit l’héroïne la plus proche de sa personnalité. Alors que Miriam Hopkins avait d’emblée été choisie, le rôle de Kit restait à distribuer. Margaret Sullavan, Janet Gaynor et Constance Bennett avaient été pressenties. Bette a finalement obtenu le rôle. Isabelle Champion (Bette Davis, ed. Pierre Lherminier, Paris 1986)


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RICHES ET CÉLÈBRES RICH AND FAMOUS

GEORGE CUKOR FICTION / 1981 / ÉTATS-UNIS / 1H57 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION J acqueline BISSET, Candice BERGEN, David SELBY, Hart BOCHNER, Steven HILL SCÉNARIO Gerald AYRES, d’après la pièce « Old Acquaintance » de John VAN DRUTEN IMAGE Don PETERMAN, Peter ECO MONTAGE Georges DELERUE DÉCORS Don REMACLE MONTAGE John F. BURNETT PRODUCTION Metro-Goldwyn-Mayer

VERSION RESTAURÉE

Deux amies d’université, Liz et Merry, se retrouvent dix ans plus tard. Liz est devenue une romancière célèbre mais peine à terminer son deuxième roman. Elle aide Merry à faire publier son premier livre, qui devient un best seller. Entre les deux femmes : Doug, le mari de Merry dont Liz était amoureuse dix ans plus tôt. Le dernier film de George Cukor. En 1981, Cukor donne son ultime leçon de direction d’acteur avec Riches et célèbres, le remake du sousestimé film de Vincent Sherman, datant de 1943. En quarante ans, le changement majeur entre les deux versions ne se situe pas tant au niveau du scénario que d’une conception du casting entièrement différente. (…) Cukor évite le procédé classique des Studios hollywoodiens consistant à faire correspondre la figure publique d’une actrice avec la personnalité du rôle qu’elle incarne. Au contraire, il inverse ce rapport afin de créer une autre dynamique. Candice Bergen, une actrice qui incarne la sophistication, la modernité et un charme naturel, campe le rôle grotesque de Merry Blake, joué précédemment par Miriam Hopkins. Alors que Bisset endosse le rôle de Bette Davis avec un style de jeu naturaliste plein d’aisance, Bergen ne pouvait pas emprunter cette direction sans affadir aussi bien son personnage que son jeu. Au lieu de rechercher la spontanéité, elle travaille un sens de l’imposture merveilleux à regarder. Matias Pineiro (Film Comment, Jan.-Fév. 2016)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

FENÊTRE SUR COUR REAR WINDOW

ALFRED HITCHCOCK FICTION / 1953 / ÉTATS-UNIS / 1H52 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION J ames STEWART, Grace KELLY, Wendell COREY, Thelma RITTER, Raymond BURR SCÉNARIO John Michael HAYES, Alfred HITCHCOCK d’après une nouvelle de Cornell WOOLRICH IMAGE R obert BURKS SON John COPE, Harry LINDGREN MUSIQUE Franz WAXMAN DÉCORS Sam COMER, Ray MOYER MONTAGE George TOMASINI PRODUCTION P aramount Pictures, Patron Inc.

Immobilisé chez lui par un plâtre à la jambe, un reporter photographe tue le temps en observant au téléobjectif ses voisins d’en face. Il acquiert peu à peu la certitude que l’un deux a tué sa femme… « L’un des films les plus expérimentaux et les plus parfaits du maître du suspense. » J. Lourcelles La situation de base où se trouve le héros — immobilité, voyeurisme, attente passionnée et passive — et le fait que, sauf à un seul moment, la caméra adopte constamment son point de vue, permettent de voir dans le film une métaphore du cinéma en général et de la relation du spectateur à l’écran. Ce n’est là qu’une des multiples significations d’une œuvre particulièrement riche. Fenêtre sur cour dispense, sur le plan dramatique et visuel, un plaisir, analogue à celui qu’offre sur le plan intellectuel un système ou un traité de philosophie bien conçu. Le monde y est découpé en tranches, en parcelles de réalité et de sens, délimitées en l’occurrence par l’espace géométrique des fenêtres qu’observe le héros-voyeur. Par son intermédiaire, Hitchcock donne à voir, avec une ironie grinçante et pessimiste, avec aussi une virtuosité qu’il faut bien qualifier de géniale, une succession d’aspects de la vie à deux. Jacques Lourcelles (Dictionnaire des films, ed. Robert Laffont, 1992)


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BODY DOUBLE BRIAN DE PALMA FICTION / 1984 / ÉTATS-UNIS / 1H54 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION C raig WASSON, Melanie GRIFFITH, Gregg HENRY, Deborah SHELTON, Guy BOYD SCÉNARIO Robert J. AVRECH, Brian De PALMA IMAGE S tephen H. BURUM SON James TANNENBAUM MUSIQUE Pino DONAGGIO DÉCORS Ida RANDOM, William ELLIOTT, Charles BUTCHER, CLOUDIA MONTAGE Jerry GREENBERG, Bill PANKOW PRODUCTION Columbia Pictures, Delphi II Productions

Jack Scully, un acteur de seconde zone au chômage, souffrant de claustrophobie, occupe pendant quelque temps l’appartement d’un ami. Profitant de la vue panoramique, il observe sa charmante voisine se livrer à des jeux érotiques. À force de l’épier, il assiste un jour à l’assassinat de la jeune femme… Body Double se situe très précisément au carrefour de thématiques éminemment « depalmaiennes » : la claustrophobie, la frustration sexuelle, le voyeurisme, la manipulation, l’illusion de l’image, et la dualité inhérente à toute chose ou à tout être. Des préoccupations largement partagées avec Alfred Hitchcock, et il est manifeste que Body Double s’offre d’emblée comme le rejeton pop et bariolé de Fenêtre sur cour et de Sueurs froides. Au premier, il emprunte la question centrale du voyeurisme, avec ce héros qui observe son voisinage et se laisse gagner par une forme de dépendance à une image qui nourrit son imaginaire fantasmatique. Du second, il s’approprie l’idée du mal intérieur (le vertige vs la claustrophobie) — au passage révélateur donc d’une forme de frustration ou d’incapacité sexuelle — qui ne pourra être surmonté que par un trauma majeur, mais aussi et surtout le motif de la femme duale, soumise à un danger indéfini tandis qu’elle est filée par un personnage fasciné qui ne parviendra pas à la sauver. Antoine Royer (Dvdclassik.com, Décembre 2015)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

TOUT CE QUE LE CIEL PERMET ALL THAT HEAVEN ALLOWS

DOUGLAS SIRK

FICTION / 1955 / ÉTATS-UNIS / 1H29 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION J ane WYMAN, Rock HUDSON, Agnes MOOREHEAD, Virginia GREY, Conrad NAGEL SCÉNARIO Peg FENWICK, d’après l’œuvre de Edna L. LEE et Harry LEE IMAGE R ussell METTY SON Leslie I. CAREY, Joe LAPIS MUSIQUE Frank SKINNER DÉCORS Russell A. GAUSMAN, Julia HERON MONTAGE Frank GROSS PRODUCTION Universal International Pictures

Une riche veuve esseulée, menant une vie paisible et monotone, tombe amoureuse de son jardinier, un homme séduisant mais plus jeune qu’elle. Cette relation est vite perçue comme scandaleuse et provoque la colère et les railleries de son entourage. À voir le film, la petite ville américaine est le dernier endroit où je voudrais aller. Puis il arrive ceci : Jane dit à un moment à Rock qu’elle va maintenant le quitter à cause de ses imbéciles d’enfants, etc. Rock ne se défend pas beaucoup, il a la nature, lui ! Et Jane est assise là, le soir de Noël, les enfants vont la quitter et lui ont offert un appareil de télévision. Alors, on craque dans le cinéma. Alors, on comprend quelque chose au monde et à ce qu’il vous fait. Puis plus tard Jane revient vers Rock parce qu’elle a les maux de tête que nous avons tous quand nous baisons trop rarement. Mais maintenant qu’elle est là, ce n’est pas un happy end, bien que tous deux soient ensemble. Qui se complique pareillement la vie ne pourra pas être heureux plus tard. Il fait des films sur ce genre de chose, Douglas Sirk. Les hommes ne peuvent pas être seuls, et pas non plus ensemble. Ils sont très désespérés, ces films. (…) C’est tout à fait simple et beau. Et tout le monde pige. Rainer Werner Fassbinder (Les Films libèrent la tête, 1984)


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TOUS LES AUTRES S’APPELLENT ALI ANGST ESSEN SEELE AUF

RAINER WERNER FASSBINDER FICTION / RFA / 1973 / 1H33 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION B rigitte MIRA, El Hedi BEN SALEM, Barbara VALENTIN, Irm HERMANN, Rainer WERNER FASSBINDER SCÉNARIO Rainer WERNER FASSBINDER IMAGE J ürgen JÜRGES SON Fritz MÜLLER-SCHERZ DÉCORS Rainer WERNER FASSBINDER MONTAGE Thea EYMÈSZ PRODUCTION Tango-Film

Allemagne, années 1970. Emmi, une veuve d’une soixantaine d’années rencontre Ali, un immigré marocain plus jeune qu’elle. Ils tombent amoureux et se marient mais se retrouvent confronter à l’intolérance et au racisme de leur entourage. Lorsqu’il découvre, en 1971, l’œuvre de Douglas Sirk, cinéaste émigré à Hollywood, dont les mélodrames mettent en scène les classes moyennes du Midwest américain, Fassbinder entreprend un cycle de films autour de l’impossibilité de trouver l’amour et le bonheur au sein d’une famille bourgeoise. Transposé à la situation allemande, la formule sirkienne fonctionne extrêmement bien et elle a produit certains des ses films les plus connus. (…) Fassbinder a construit cette histoire avec la clarté d’une fable et la puissance émotionnelle d’une tragédie. L’intrigue ressemble à celle du film de Douglas Sirk, Tout ce que le ciel permet (1955), dans lequel Jane Wyman et Rock Hudson incarnent un couple dont l’amour heurte à la barrière de l’âge et aux frontières de classe. En choisissant une comédienne d’un certain âge et un Marocain, Fassbinder a aiguisé le conflit et il plonge d’emblée le spectateur dans le malaise en présentant un couple qui brise tant de tabous. Tous les autres s’appellent Ali a été un succès international et il a été perçu comme un film clé du Nouveau Cinéma allemand. Thomas Elsaesser (R.W. Fassinder, un cinéaste d’Allemagne, ed. Centre Pompidou, 2005)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

LA MOUCHE NOIRE THE FLY

KURT NEUMANN FICTION / 1958 / ÉTATS-UNIS / 1H34 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION A l HEDISON, Patricia OWENS, Vincent PRICE, Herbert MARSHALL, Kathleen FREEMAN SCÉNARIO James CLAVELL, Kathleen FAGAN, d’après une nouvelle de George LANGELAAN IMAGE K arl STRUSS SON Eugene GROSSMAN, Harry M. LEONARD MUSIQUE Paul SAWTELL DÉCORS Walter M. SCOTT, Eli BENNECHE PRODUCTION Twentieth Century Fox

Un savant travaille sur une machine permettant de téléporter de la matière. Au cours d’une expérience dont il est le cobaye, il est victime d’un terrible accident. Une mouche est entrée avec lui dans l’appareil, il se retrouve avec une tête et une patte de mouche. Il demande à sa femme de l’aider à retrouver la mouche pour tenter de renverser le processus. La Mouche noire est célèbre aujourd’hui pour avoir engendré le magnifique remake de 1986 signé David Cronenberg. Mais le film original ne manque pas de qualités et constitue lui aussi, par ses audaces et ses innovations, un jalon important dans le cinéma fantastique et de science-fiction. (…) Bénéficiant d’un budget confortable et d’excellents quoique discrets effets spéciaux, tourné en Cinémascope couleur, La Mouche noire est encore capable d’effrayer les spectateurs les plus blasés, par la cruauté de son histoire et quelques scènes-chocs, comme la vision de la mouche à tête humaine captive d’une toile d’araignée. En revanche, le scénariste n’a pas osé aller jusqu’au bout de l’horreur en préférant à une narration subjective un récit en flash-back raconté par l’épouse du savant. Le véritable héros du film n’est pas l’homme-mouche mais son frère incrédule, interprété par un ténor du macabre, Vincent Price, pour une fois dans un rôle « normal ». Olivier Père (Les Inrockuptibles, Août 2006)


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LA MOUCHE THE FLY

DAVID CRONENBERG FICTION / 1986 / ÉTATS-UNIS / 1H36 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION J eff GOLDBLUM, Geena DAVIS, John GETZ, Joy BOUSHEL, George CHUVALO SCÉNARIO David CRONENBERG, Charles EDWARD POGUE, d’après George LANGELAAN IMAGE M ark IRWIN SON Bryan DAY, Michael LACROIX MUSIQUE Howard SHORE DÉCORS Carol SPIER, Elinor ROSE GALBRAITH MONTAGE Ronald SANDERS PRODUCTION B rooksfilms

Un jeune et brillant biologiste travaille sur la première machine permettant de téléporter de la matière. Ses recherches sont suivies par une journaliste qui devient sa petite amie. Après des essais peu convaincants, il entreprend de se téléporter lui-même sans s’apercevoir qu’une mouche s’est introduite avec lui dans l’appareil. La Mouche est un film de commande hollywoodien, le remake d’une production des années 1950. Pourtant David Cronenberg a su en faire une œuvre personnelle, devenue l’une des références majeures du cinéma de genre. (…) De la réécriture du scénario au design des machines de téléportation, du choix des acteurs à la création des étapes de la métamorphose, le cinéaste a su orchestrer une partition horrifique subtile et impressionnante. La force du film tient à la simplicité du récit, en forme de huis clos tragique. Mais il ne cesse de se stratifier, de s’hybrider, livrant le spectateur à un entre-deux des émotions digne des plus grandes fictions romantiques : au grotesque du corps maltraité, emporté par la maladie, à l’ironie du sort pas plus grosse qu’un diptère, répond l’apocalypse intime. L’histoire d’amour survit au désastre et transfigure une fiction courue d’avance : quand la chair se fait passion, le film de monstre émeut sans rien céder de sa noirceur. Guy Astic (catalogue Lycéens au cinéma, Septembre 2010)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

À BOUT DE SOUFFLE JEAN-LUC GODARD FICTION / 1959 / FRANCE / 1H30 / N&B / VOF INTERPRÉTATION J ean-Paul BELMONDO, Jean SEBERG, Henri-Jacques HUET, Daniel BOULANGER, Roger HANIN SCÉNARIO Jean-Luc GODARD, d’après un sujet de François TRUFFAUT IMAGE R aoul COUTARD SON Jacques MAUMONT MUSIQUE Martial SOLAL, Wolfgang Amadeus MOZART MONTAGE Cécile DECUGIS PRODUCTION S NC - Société Nouvelle de Cinématographie, Imperia Films

À Marseille, Michel Poicard, un jeune voyou, vole une voiture et tue un policier. Il rejoint Paris et retrouve une jeune Américaine, Patricia Franchini, dont il tombe amoureux. Mais il doit à nouveau s’enfuir car il est recherché par la police… Le premier rôle de Belmondo et le film fondateur de la Nouvelle Vague. C’est une œuvre de rupture, à plusieurs titres, un pivot entre un avant et un après. Godard y formule un certain nombre de propositions esthétiques et théoriques décisives, qu’il développera dans la suite de son œuvre. (…) Pour autant, À bout de souffle n’est pas un film sérieux. Michel Poiccard est un héros contemporain, de son temps, mais en aucun cas le porte-parole de la modernité, lui qui ne se soucie de rien, pas même d’aller en prison. Il n’est pas nécessaire, pour aimer À bout de souffle, de choisir entre ses expérimentations novatrices, ses audaces narratives et formelles, et sa drôlerie, sa fantaisie, la séduction inouïe qu’il diffuse. Le film est tout l’un et tout l’autre, et c’est pourquoi il a pris une importance telle. Son ambition ellemême est ambivalente : À bout de souffle fut imaginé à la fois comme petit exercice de style autour du polar et comme plan d’attaque contre le cinéma installé, avec l’idée de briser des normes gravées dans le marbre. Il tient donc sa puissance de cette formule qui allie plaisanteries faciles et programme esthétique pour un art nouveau, trivialité et une rénovation esthétique. Jean-Philippe Tessé (Lycéens au cinéma, manque date)


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NUMÉRO DEUX JEAN-LUC GODARD ANNE-MARIE MIÉVILLE FICTION / 1975 / FRANCE / 1H28 / COUL. / VOF INTERPRÉTATION Sandrine BATTISTELLA, Pierre OUDREY, Alexandre RIGNAULT, Rachel STEFANOPOLI SCÉNARIO Jean-Luc GODARD, Anne-Marie MIÉVILLE IMAGE William LUBTCHANSKY SON Jean-Pierre RUH MUSIQUE Léo FERRÉ MONTAGE Jean-Luc GODARD PRODUCTION B ela Productions, SNC, Sonimage

En 1974, le producteur Georges de Beauregard propose à Godard de tourner un remake d’À bout de souffle avec un budget identique. Il accepte et tourne ce film à la fois documentaire et expérimental, présentant, sous forme de tableaux, la vie d’une famille de la classe moyenne de Grenoble, dont le quotidien est enregistré par des caméras placées dans leur appartement. Le film s’appelle d’abord À bout de souffle numéro deux, puis Numéro deux (À bout de souffle), finalement Numéro deux, et le cinéaste précise assez vite dans un entretien qu’il « ne fait pas un remake » mais « pose une réflexion sur la base d’À bout de souffle ». (…) Godard s’émancipe bientôt de la commande initiale. On ne trouve pas de trace d’À bout de souffle dans Numéro deux — un film que Godard juge désormais sévèrement : « Je m’aperçois aujourd’hui qu’ À bout de souffle est un film fasciste, mais c’est un film qui pour moi sortait du fascisme, puisque j’avais rompu avec ma famille. » On y voit surtout la traduction visuelle d’une volonté de nouveau départ, aussi bien dans l’existence que dans le cinéma. Numéro deux est une « deuxième chance » : Godard recommence tout, à 45 ans, dans une nouvelle ville, avec d’autres collaborateurs, en changeant aussi bien sa manière que sa technique. Antoine de Baecque (Godard, ed. Grasset, 2010)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

LA SOURCE JUNGFRUKÄLLAN

INGMAR BERGMAN FICTION / 1960 / SUÈDE / 1H28 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION M ax von SYDOW, Birgitta VALBERG, Birgitta PETTERSSON, Gunnel LINDBLOM, Axel DÜBERG SCÉNARIO Ulla ISAKSSON d’après la légende « La Fille de Töre à Vange » IMAGE S ven NYKVIST SON Aaby WEDIN, Staffan DALIN MONTAGE E rik NORDGREN DÉCORS P.A. LUNDGREN MONTAGE Oscar ROSANDER PRODUCTION AB Svensk Filmindustri

XIVe siècle en Suède. Deux bergers, accompagnés d’un enfant, violent et assassinent une jeune fille. Les meurtriers s’enfuient et trouvent refuge chez des fermiers. Ils ignorent qu’il s’agit de la famille de l'adolescente qu’ils ont sauvagement tuée… La Source (Jungfrukällan, 1960) s’inspire d’une ballade suédoise du XIVe siècle, La Fille de Töre à Vänge. C’est une allégorie cruelle sur le péché et le crime, imprégnée d’un message théologique sur le salut, bien en phase avec les obsessions religieuses de Bergman, et les questions intellectuelles qu’elles soulèvent, à cette époque de sa vie. La Source marque également le début de la collaboration entre Bergman et son directeur de la photographie Sven Nykvist. Comme dans Le Septième Sceau, autre incursion médiévale de Bergman, le film montre une humanité en proie à la peur de Dieu dans un monde cruel, sombre et violent. Olivier Père (Arte.fr, Mars 2014)


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LA DERNIÈRE MAISON SUR LA GAUCHE THE LAST HOUSE ON THE LEFT

WES CRAVEN

FICTION / 1972 / ÉTATS-UNIS / 1H31 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION S andra CASSELL, Lucy GRANTHAM, David Alexander HESS, Fred J. LINCOLN, Jeramie RAIN SCÉNARIO Wes CRAVEN IMAGE V ictor HURWITZ SON Gary LEIBMAN MUSIQUE David Alexander HESS MONTAGE Wes CRAVEN PRODUCTION Sean S. Cunningham Films, Lobster Enterprises

Pour fêter ses 17 ans, Mari, accompagnée d’une amie, décide de se procurer de la marijuana auprès d’un jeune dealer, sans se douter que ce dernier fait partie d’une bande de sadiques meurtriers. Les jeunes femmes sont enlevées, séquestrées et bientôt torturées à mort par la bande d’assassins. Le premier film du réalisateur de Scream. C’est en 1972 qu’il produit et réalise, avec une bande d’amis, dont Sean Cunningham, futur créateur de la série Vendredi 13, l’éprouvant La Dernière Maison sur la gauche, inspiré du film d’Ingmar Bergman La Source. C’est l’époque des films d’exploitation à petit budget et le relâchement de la censure semble ouvrir la voie à l’expression des fantasmes les plus terrifiants. (…) Entre underground et série B, intuition sombre et géniale, le récit de ce viol, minutieusement décrit, de deux jeunes filles, suivi de la vengeance brutale des parents de l’une d’entre elles, va frontalement marquer la fin d’un moment euphorique. La Love Generation a cédé la place aux crimes sanglants de la tribu Manson. L’Amérique bascule dans le doute et l’angoisse. En décrivant une famille modèle américaine s’enfonçant dans la vengeance la plus cruelle, Craven met au centre, dès ce premier opus, ce qui va nourrir son œuvre suivante : la description du système familial désormais déréglé, proche de la barbarie. Jean-François Rauger (La Cinémathèque française, Juin 2016)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

LA ROSIÈRE DE PESSAC JEAN EUSTACHE DOC. / 1968 / FRANCE / 55 MIN. / N&B / VOF SCÉNARIO Jean EUSTACHE, Françoise LEBRUN IMAGE P hilippe THÉAUDIÈRE SON Jean-Pierre RUH, Alain SEMPÉ MONTAGE J ean EUSTACHE PRODUCTION O .R.T.F., Les Films Luc Moullet

Chaque année à Pessac, et ce depuis 1896, a lieu la cérémonie de l’élection de la rosière, récompensant une jeune fille vertueuse de la ville. Au printemps 1968, la 72e rosière est sur le point d’être nommée, trois jeunes filles sont proposées… Le premier documentaire du réalisateur de La Maman et la Putain. Quand j’ai tourné La Rosière de Pessac en 1968 c’était avec une certaine inconscience : on partait à l’aventure, on ne savait pas ce qu’on allait filmer, on était purs et naifs. Je suis né à Pessac, mais j’ai quitté la ville tout enfant et je n’avais jamais assisté à une fête de la Rosière. J’ai découvert mon film au montage et ça a été une découverte heureuse : j’ai découvert que, fiction ou réalité, le travail de montage est le même, et c’est ce qui m’a passionné. On ne peut pas reconstituer la réalité, puisqu’on n’a pas tout filmé : il y a des trous, ne serait-ce que parce qu’il faut recharger la caméra. Alors j’ai pris comme réalité le matériel enregistré et non pas l’événement dont j’avais été témoin, ce qui veut dire que ma fiction état contenue dans le matériel filmé et qu’il fallait l’organiser. C’était passionnant, je découvrais mon cinéma. Jean Eustache (Cahiers du cinéma, Décembre 1979)


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LA ROSIÈRE DE PESSAC 1979 JEAN EUSTACHE DOC. / 1979 / FRANCE / 1H07 / COUL. / VOF IMAGE R obert ALAZRAKI, Jean-Yves COIC, Armand MARCO, Philippe THÉAUDIÈRE SON Gérard BARA, Bruno CHARIER, Gérard de LAGARDE, Georges PRAT, Dominique HENNEQUIN MONTAGE J ean EUSTACHE, Chantale COLOMER PRODUCTION Médiane Films, INA, ZDF

Après avoir réalisé un premier film sur l’élection de la rosière de Pessac en 1968, Jean Eustache filme la même cérémonie, selon le même dispositif, dix ans plus tard. Il y a un an et demi, lors d’une rétrospective de mes films, j’ai eu l’occasion de revoir La Rosière. J’ai bien regardé le film, je l’avais un peu oublié, et l’envie m’est venue de le refaire, exactement de la même façon, en filmant la même chose, avec cette idée donc que si on filme la même cérémonie, qui se déroule sous tous les régimes, sous toutes les Républiques, on peut filmer le temps qui passe, l’évolution et transformation d’une société à l’intérieur d’une certaine permanence, celle d’un lieu et celle d’une tradition. C’est l’idée de temps qui m’intéresse. (…) Il s’agissait donc de refaire le même film. C’était d’autant plus téméraire que le premier était réussi, qu’il y avait eu une bonne carrière. Ce succès était dû à une sorte de malentendu, ou plutôt à un heureux concours de circonstances où je n’avais aucune part : la personnalité éminemment cinématographique, spectaculaire et filmable, du maire et le fait qu’entre le mois d’avril où a lieu l’élection de la Rosière et le mois de juin où à lieu la fête, il s’était produit mai 68. Jean Eustache (Cahiers du cinéma, Décembre 1979)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

COFFY, LA PANTHÈRE NOIRE DE HARLEM COFFY

JACK HILL FICTION / 1973 / ÉTATS-UNIS / 1H31 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION Pam GRIER, Booker BRADSHAW, Robert DOQUI, William ELLIOTT, Allan ARBUS SCÉNARIO Jack HILL IMAGE P aul LOHMANN MUSIQUE Roy AYERS DÉCORS Perry FERGUSON II MONTAGE Chuck MCCLELLAND PRODUCTION American International Pictures

Pour venger la mort de sa sœur décédée d’une overdose, Coffy, une jeune infirmière noire, entreprend d’assassiner méthodiquement tous les revendeurs de drogue et ceux qui les protègent. C’était l’explosion de la culture black, avec le psychédélisme, la religion, le rock, la liberté sexuelle. Les Blancs accédaient en masse à la culture black par l’intermédiaire de la musique et du cinéma. Dans Coffy et Foxy Brown, j’ai apporté la texture noire aux personnages. J’ai rencontré des prostituées et des drogués pour définir et enrichir mes personnages, j’ai fait des recherches, enquêté sur le terrain. Etre acteur, c’est aussi avoir le courage de fréquenter pour un rôle des lieux que l’on n’a pas forcément envie de connaître. Coffy était un personnage ancré dans un contexte social défini, tandis que Foxy inventait un personnage féminin qui était l’équivalent des séducteurs macho à la Burt Reynolds, avec de l’humour et de l’assurance. (…) La blaxploitation créait des exemples pour les Noirs. Je suis devenue une icône. On voulait créer des figures mythologiques, servir et aider la communauté noire, montrer sa force. Je n’avais rien calculé, mais ces films sont devenus les documents d’une époque. Les jeunes réalisateurs américains sont influencés aujourd’hui par ces films. Pam Grier (Les Inrockuptibles, Avril 1998)


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JACKIE BROWN QUENTIN TARANTINO FICTION / 1997 / ÉTATS-UNIS / 2H40 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION Pam GRIER, Samuel L. JACKSON, Robert FORSTER, Bridget FONDA, Michael KEATON SCÉNARIO Quentin TARANTINO, d’après une œuvre de Elmore LEONARD IMAGE G uillermo NAVARRO MUSIQUE Joseph Julián GONZÁLEZ DÉCORS Daniel BRADFORD MONTAGE Sally MENKE PRODUCTION A Band Apart, Miramax International

Jackie Brown est hôtesse de l’air et fait passer de l’argent dans ses bagages pour Ordell, un trafiquant d’armes notoire. Elle est arrêtée un jour par deux agents qui souhaitent coincer le malfrat. Lorsqu’Ordell l’apprend, il envoie Max la liquider. Mais Jackie a un plan pour sauver sa peau. «Brown. Jackie Brown », les premiers mots prononcés par Pam Grier résonnent comme un code confidentiel, dont on devinera facilement les chiffres. Brown comme Foxy Brown, la fameuse superwoman, justicière du ghetto, interprétée par Pam Grier en 1974. Jackie Brown est à la blaxploitation ce que Chinatown de Roman Polanski était au film noir. Un hommage, un essai pervers qui convoque des formes surannées, obsolètes, à seule fin de souligner l’impossibilité de leur résurrection. Sauf que le regard de Tarantino sur la blaxploitation est fondamentalement moderne. Il ne s’agit pas pour lui de malaxer le genre dans tous les sens, mais de le découper en rondelles, d’en obtenir la formule de composition, de disséquer le mythe, de chercher à savoir ce qui se cache derrière la façade d’Ordell Robbie ou de Jackie Brown. Samuel Blumenfeld (Le Monde, Avril 1998)


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

CARTE BLANCHE À LA COLLECTION FILM DU CENTRE POMPIDOU

CINÉ-CONFÉRENCE DE PHILIPPE-ALAIN MICHAUD

LA REPRISE. HISTOIRE DU CINÉMA ET RÉPÉTITION. Coïncidant avec l’avènement de l’industrie culturelle, le cinéma aura été, dès ses origines, le mode d’expression dominant d’une époque gouvernée par les lois de la reproduction jusqu’à devenir son idéal esthétique. Car la reproduction ne constitue pas seulement le mécanisme implicite de la diffusion des films, elle en conditionne aussi l’essence. Dans les premiers temps du cinéma, la notion d’original n’a d’ailleurs pas de signification : on ne conservait pas les négatifs souvent abîmés par les tirages et plutôt que de réaliser de nouveaux films, on retournait les sujets. Le statut même de l’auteur n’est au cinéma que d’apparition tardive : il naît, en pleine expansion commerciale, lorsque l’industrie cinématographique cherchera dans des formes culturelles plus éprouvées (peinture, littérature, musique…), des éléments de légitimation. Le remake repose apparemment sur un mécanisme économique de pérénisation des formules au-delà de la péremption des œuvres en fonction de l’engouement du public (bis repetita placent), mais il fait aussi jouer des ressorts plus profonds : l’histoire du cinéma, au fil de ses mises à jour successives, devient l’histoire introspective de son propre réexamen et se constitue en totalité close faite de la somme de toutes ses répétitions, partielles ou littérales. Si la reprise est le ressort fondamental et comme la nervure de l’histoire du cinéma, le domaine expérimental, dévolu à l’élucidation des propriétés formelles du medium cinématographique et à l’exploration des propriétés plastiques du matériau visuel, devait être le lieu naturel de sa problématisation. Philippe-Alain Michaud Conversateur chargé de la collection FILM du Musée National d’Art Moderne, Centre Pompidou


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CARTE BLANCHE À L'ESPACE GANTNER

PASSAGE À L’ACTE MARTIN ARNOLD FICTION / 1993 / AUTRICHE / N&B / 12 MIN. INSTALLATION EN BOUCLE DANS LE HALL DU CINÉMA Martin Arnold est une figure phare du cinéma autrichien et expérimental, présent dans le fonds de l’Espace multimédia gantner. Avec Passage à l’Acte (16 mm, 1993) il travaille à partir de found footage (Du Silence et des Ombres (To kill a mockingbird) Robert Mulligan, 1962), ici la scène du petit déjeuner d’une famille américaine des années 1930, qu’il étire dans le temps par la répétition de gestes choisis, créant ainsi un troublant remake d’un film classique, d’une scène banale du quotidien et nous en livrant une autre interprétation. La bande-son subit aussi ces modifications, conférant à la scène une dimension presqu’effrayante. Au-delà de la découverte de ce film pour certains festivaliers, présenter ce film, en boucle sous forme d’installation, est une invitation à basculer dans un autre espace-temps, de pouvoir à l’envie, répéter, expérimenter ce film, jusqu’à, pourquoi pas l’épuisement du spectateur…

L’Espace multimedia gantner est l’antenne multi- média et art contemporain de la Médiathèque Départementale. Centre d’art conventionné par le ministère depuis 2012, il possède également une collection d’art numérique et une collection documentaire spécialisée (art-société-technologie).


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LA TRANSVERSALE : REMAKES

SÉANCE CLIPS

CINÉ-CONFÉRENCE DE JOACHIM LEPASTIER

CLIP ET CINÉMA, PAS DE DEUX. Le vidéoclip et le cinéma forment-ils un vieux couple ? On a pu dire, au moment de l’explosion du clip dans les années 1980, que celui-ci nourrissait un complexe vis-à-vis du cinéma et cherchait à atteindre son prestige à coups de gros budgets, de tournages en 35 mm, de formes scénarisées et de clins d’œils plus ou moins voyants à certains films cultes. Mais on a pu dire aussi que le cinéma de la même époque cherchait à se rajeunir en se « clipisant », en multipliant dans le cours du film, des moments purement musicaux servis par une nouvelle dynamique du montage. Entre les deux médiums s’établit un rapport ambivalent, fait d’emprunts et d’imprégnation réciproques, mais qui n’aura cessé de créer une dynamique productive. Le recours à l’hommage, voire au pastiche dépasse la simple citation pour aboutir à un vrai processus de création. Il n’y a qu’à voir, par exemple, comment John Landis révolutionne l’approche des effets spéciaux en deux clips pour Michael Jackson qui avait admiré son Loup Garou de Londres. Ou comment les clips de Michel Gondry développent sans mimétisme des figures formelles héritées de Méliès et Godard. Ou encore comment Gus van Sant utilise le clip comme « chambre d’essai » pour des longs-métrages à venir. Cet aller-retour entre ces deux formats n’est d’ailleurs pas qu’une affaire de cinéastes. Il concerne aussi les acteurs, parmi les plus singuliers du cinéma contemporain (Christopher Walken, Greta Gerwig, Denis Lavant, Elle Fanning) qui explorent, par le biais de la musique, d’autres modes d’incarnation. Ces formes et réinterprétations qui passent ainsi entre clip et cinéma dessinent aussi, sur un mode ludique, une petite histoire de la mutation des images animées de ces trente dernières années. Joachim Lepastier

Joachim Lepastier est critique aux Cahiers du Cinéma depuis 2009. Il est également intervenant dans les lycées pour le programme Lycéens au Cinéma, enseigne à l’IESA (école des métiers de la culture) et a donné plusieurs conférences ou animé des ateliers sur les rapports entre architecture et cinéma.


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PREMIÈRES ÉPREUVES :

Satyajit Ray


CHARULATA LA DÉESSE LA GRANDE VILLE DES JOURS ET DES NUITS DANS LA FORÊT L'ADVERSAIRE TONNERRES LOINTAINS LES JOUEURS D’ÉCHECS LA MAISON ET LE MONDE

P.145 P.146 P.147 P.148 P.149 P.150 P.151 P.152


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PREMIÈRES ÉPREUVES : SATYAJIT RAY

PREMIÈRES ÉPREUVES

Satyajit Ray

Chaque année, Entrevues propose une programmation pour accompagner le film au programme du Baccalauréat des lycées en option cinéma-audiovisuel. Des lycéens de toute la France viennent à Belfort suivre cette proposition pédagogique ouverte à tous. Cette année, le film au programme est Charulata de Satyajit Ray (1964). Autour de ce film, l’un des chefs d’œuvre du cinéaste, Entrevues se propose de revenir sur le parcours du cinéaste bengali, à partir d’une sélection de huit films reflétant l’ensemble de sa carrière cinématographique, tout en privilégiant des films rares. Au-delà de Charulata, la rétrospective s’articule autour de l’un des thèmes majeurs de l’œuvre de Satyajit Ray : la construction de l’Inde moderne, à travers son histoire sociale et politique. Deux interventions sont également proposées aux lycéens. Eva Markovits animera un atelier sur l’œuvre du cinéaste « Satyajit Ray, artiste protéiforme ». Hélène Kessous, interviendra plus particulièrement sur « Charulata, portrait d’une femme bengali ? »

HÉLÈNE KESSOUS

Hélène Kessous est doctorante en anthropologie culturelle du monde indien à l’EHESS. Elle s’intéresse aux représentations identitaires dans les images cinématographiques et publicitaires. Après avoir fait ses armes dans différents festivals (Cannes, Lumière, FICA), elle a organisé de nombreux événements autour du cinéma indien. En 2015, elle fonde avec Némésis Srour, Contre-courants, une plateforme dédiée à la promotion et la diffusion du Cinéma d’Asie du Sud.

EVA MARKOVITS

Eva Markovits est programmatrice (La Cinémathèque française, Festival d’Amiens, Festival de Brive, Centre Pompidou). Elle a travaillé sur la rétrospective Ritwik Ghatak à La Cinémathèque française, en 2011, ainsi que sur la rétrospective Guru Dutt pour le Festival d’Amiens en 2012, et a co-programmé, en 2016, un panorama du moyen métrage indien contemporain pour le Festival de Brive. Elle est rédactrice pour Critikat.


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On reproche souvent à la France, d’avoir mis du temps à suivre assidûment l’œuvre de Satyajit Ray. Son premier passage à Cannes en 1956 est suivi par une longue période de disette, et c’est à travers les festivals de Venise et Berlin que l’œuvre du cinéaste indien s’impose en Europe. Mais à l’aube des années 1980, la France rattrape son retard, pour vouer depuis lors un amour fidèle à ce cinéaste si particulier. Cette programmation réunit sept films autour de Charulata (Ours d’argent à Berlin en 1965). Très différents les uns des autres, ils permettent de voir toute l’étendue de cette œuvre cinématographique dans son hétérogénéité thématique mais aussi esthétique. L’œuvre de Ray est avant tout profondément humaine, il s’interroge sur l’intimité du couple, la place des femmes dans la société indienne, l’amour, le mariage et même la masculinité. Bien sûr, il explore des thèmes plus larges tels que les relations entre l’Orient et l’Occident, la tradition et la modernité, ou encore les rapports de classes. Artiste souverain dont la simple évocation suffit à symboliser le cinéma d’auteur indien, il s’évertue, dans la majorité de ses films, à filmer l’Inde sans exotisme et sans complaisance. La principale préoccupation de Ray en tant que cinéaste est de s’engager dans une histoire, lui donner, selon ses mots, une « cohérence organique », et pour cela l’histoire doit se nourrir d’observations minutieuses et détaillées du genre humain, elle doit se nourrir de ces détails qui construisent les relations qui se tissent entre les êtres d’un milieu donné, dans un espace établi, et dans une temporalité définie. Cette « cohérence organique » doit également se nourrir de ce qui se passe sur le plateau. Et aux critiques qui trouvent son cinéma lent, Ray répond qu’il ne peut faire autrement que filmer l’entièreté d’une action, qu’il faut aller jusqu’au bout d’un geste, d’un regard : il filme jusqu’à ce que la scène cesse d’être expressive et ne coupe pas ce que d’aucuns pourraient considérer comme inessentiel. Par ailleurs, pour que ces histoires vaillent la peine d’être racontées cinématographiquement, Ray évite les situations classiques, les clichés, et plonge le spectateur dans un monde qu’il compose en images et en musique.


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PREMIÈRES ÉPREUVES : SATYAJIT RAY

Réalisé en 1964, Charulata offre un précipité des personnages masculins et féminins qui peuplent l’univers du cinéma de Ray. Le monde de Charulata n’est pas bien grand. Elle passe le plus clair de son temps sur son lit, à jouer aux cartes, à rêver, à lire ou à broder. Elle déambule seule dans la grande et luxueuse demeure victorienne qu’elle tient de main de maître et qui la tient à l’écart du monde. Curieuse et mutine, pour s’évader, elle épie la rue depuis ses fenêtres et lit avec avidité les histoires de Bankim, pionnier de la renaissance littéraire bengalie et maître incontesté de la romance historique. Admirablement interprétée par Madhabi Mukherjee, actrice emblématique du cinéma bengali, « Charu », comme on l’appelle dans l’intimité, est l’archétype de la femme parfaite de la bourgeoisie indienne et bengalie. Éduquée, discrète et pondérée, elle a le teint clair : garant de sa beauté, il l’est aussi de sa vertu et de sa moralité. Hérité de la tradition hindoue, ce modèle féminin prend source et vie dans l’image de la déesse Lakshmi — figure de l’épouse humble et docile — elle est la pativratâ, la gardienne du foyer domestique, la garante de la pureté du lignage. À l’exception des personnages féminins de Des jours et des nuits dans la forêt, les personnages que Ray met en scène dans la sélection qui vous est présentée ici sont toujours l’expression de cette vision traditionnelle et idéalisée de la femme indienne. Qu’est-ce qui fait alors la modernité de ce cinéaste ? Charulata, Doyamoye (La Déesse, 1960), Bimala (La Maison et le monde, 1984), Arati (La Grande ville, 1963), sont des pativratâ. Mais au lieu de les laisser se complaire dans leurs intérieurs, Ray, essaie de les libérer. Toutes ont un chemin unique à parcourir. Nous assistons à leur transformation, et chacune de leurs histoires nous offre le récit de leur quête émancipatrice et existentielle. La libération n’est pas sans dommage, les mondes auxquels elles accèdent ne sont pas sans épines : le sentiment nationaliste, la passion amoureuse, le plaisir de l’indépendance, l’étourdissement du pouvoir, la valorisation de soi, sont autant de mondes extérieurs qui leur étaient jusque là méconnus. Satyajit Ray serait-il un cinéaste féministe ? Sans pouvoir aller jusque-là, il faut lui reconnaître le grand soin avec lequel il construit des personnages féminins toujours très nuancés et qui lui permettent d’introduire de nombreux questionnements sur la société indienne. Dans L’Adversaire, premier volet de la trilogie sur Calcutta, Ray met en scène Siddharta, un jeune homme de classe moyenne, incapable de trouver sa place dans la société depuis la mort brutale de son père, arrêté en plein essor alors qu’il allait devenir médecin. Perdu, Siddharta l’est aussi au sein de sa propre famille. Entre un frère cadet aux aspirations révolutionnaires marquées qui s’accordent avec l’air du temps, et une sœur carriériste qui se fiche de la bienséance que la société attend d’elle et du qu’en-dira-t-on. Cette sœur si affirmée lui fera dire qu’« aujourd’hui le sexe faible est le sexe fort ». Siddhartha ne peut pas remplir son rôle de chef de famille, surtout tant qu’il est sans emploi. Personnage silencieux, replié sur lui-même, comme contrit par une faute qu’il aurait commise, les rêves fantasmagoriques filmés en négatifs et les flash-backs décalés voire agressifs de son passé d’étudiant en médecine, ponctuent le film. Drame psychologique, ici encore nous suivons un personnage en construction, à la recherche de lui-même ; à la différence près que la société ne lui correspond pas, que Calcutta n’est plus ce qu’elle était. Cruauté de la ville, du monde moderne, le constat est amer, et pour trouver la quiétude il faut alors s’éloigner de la ville et de ce système perverti et pernicieux. C’est lorsqu’il s’éloigne de son domaine de prédilection, la classe supérieure bengalie, que Ray est le moins percutant dans l’élaboration de ses personnages. Ananga, femme du seul brahmane du village dans Tonnerres lointains, est lisse de perfection.


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Si le film explore avec force et brio la vie de ce village du Bengale qui glisse lentement vers une famine de grande ampleur, une répercussion des actions de la Seconde Guerre mondiale dans la région sud-asiatique, Ray tombe dans la fascination de l’Inde rurale : personnages stéréotypés, et vie villageoise idéalisée. L’époux de Charulata, Bhupati, est tout aussi archétypal. Anglophone, idéaliste mais pas romantique, fortement politisé, il agit avant tout pour le bien de son pays en dédiant sa vie au journal politique qu’il a créé. Si le couple est sans enfant, nous sommes en Inde, et la famille n’est pas pour autant absente de la maisonnée. Le schéma classique de la joint family n’est pas respecté ici, mais Bhupati, en parfait chef de famille, réunit sous son toit son beau-frère, qui a pour mission de l’assister et l’aider dans la gestion du journal, Manda, la femme de ce dernier, et enfin Amal, un jeune cousin, passionné et romantique, animé par l’envie d’écrire de la poésie. Au moyen d’une démonstration quasi philosophique, Ray explore la notion de désir, ce sentiment personnel puissant, difficilement exprimable, voire incommunicable, ce sentiment violent, qui enivre et déstabilise la raison. On voit Charulata tiraillée entre les deux hommes : son désir pour Amal, et son amour dévotionnel pour Bhupati son mari. Les personnages féminins sont ambivalents et portent en eux cette dualité passion / raison. Plus monolithiques, les personnages masculins sont soit l’un soit l’autre, et pour exprimer cette dualité chez les hommes, Ray aura de préférence recours à deux personnages différents : Bhupati et Amal illustrent parfaitement cette opposition. D’un côté, les tenants de la raison, d’un sentiment maîtrisé et de la retenue, et de l’autre, ceux de la passion, les romantiques idéalistes. Impliqués dans la construction d’une Inde éclairée et moderne, dignes héritiers des courants de pensée bengalis de la seconde moitié du 19e siècle, les maris, les hommes raisonnables, font de leurs femmes un projet politique. Et avec toute leur raison et toute leur modernité ils aspirent à les libérer des chaînes de la maison pour mettre fin à la tradition du purdah 1, et pour qu’enfin elles accèdent au monde. Car sans cela, comment construire une Inde moderne ? Malgré leurs bonnes intentions, ils ne parviennent pas à libérer leur femme. Charulata a besoin d’Amal et non de Bhupati pour exister pleinement. La connivence et la sensation d’égalité qui lient les deux personnages encouragent les sentiments amoureux et Charulata prend goût à être pleinement elle-même aux côtés d’Amal, mais il est trop faible pour porter le poids de cette transformation. Loué pour la justesse des émotions qu’il dépeint, Ray ne tombe pas dans la facilité des happy endings, aucune de ses héroïnes n’accède à cette libération tant attendue. Sharmila Tagore, que l’on retrouve notamment ici dans Des jours et des nuits dans la forêt, dira en parlant des films de Ray que « Les femmes font preuve d’une grande force morale, et que les hommes sont comme des enfants sans défense » 2. Cela est particulièrement vrai dans ce film où quatre jeunes citadins de Calcutta décident d’aller s’encanailler dans les régions tribales proches du Bengale, dans l’État du Bihar. Si la structure narrative du film nous est familière aujourd’hui, ce buddy movie avant l’heure, qui oscille entre la comédie et la critique, avait particulièrement dérouté le public indien. Ashim, riche et imbu de lui même, Sanjay, appliqué, studieux et réservé, Hari, sportif stupide, et Shekar le parvenu au physique ingrat, s’évadent de Calcutta pour se ressourcer, revenir à une vie plus simple, prendre le temps, échapper un peu à

1. Purdah ou Pardaa : (littéralement « rideau ») désigne une pratique sociale et religieuse, empêchant les hommes de voir les femmes. La tradition se pratique dans le sous-continent indien aussi bien dans les communautés hindoues que musulmanes. Cette tradition est d’ailleurs discutée et remise en question en tant que phénomène hindou dans La Maison et le monde. 2. Commentaire de Sharmila Tagore dans l’introduction au film Des jours et des nuits dans la forêt lors d’une de ses diffusions sur Channel 4, chaine de télévision britannique.


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PREMIÈRES ÉPREUVES : SATYAJIT RAY

la pression de la modernité et, être pour quelques jours, une meilleure version d’euxmêmes. Le ton est léger, mais la critique de Ray se met très vite en place et démasque ces personnages qui, sous des traits affables, sont lâches, égoïstes, incapables de dépasser leurs idées reçues, et pensent que tout peut s’acheter par l’argent dans ces régions reculées. Ray nous montre la dure réalité des rapports de classes mais aussi de castes. Perdus, hors de la ville et de ses conventions sociales, les quatre amis ne savent finalement rien faire d’autre que boire. Plus à l’aise en portant le masque de la société, ils passent du temps avec une famille (composée d’une jeune veuve et de son fils, d’une jeune et belle célibataire, et d’un vieux père protecteur, mais libéral) de Calcutta en vacances dans la région. Immatures, maladroits, mal à l’aise face à ces femmes accomplies, ils sont devant elles comme des enfants qui attendent d’être pris en charge. Si encore une fois la justesse de Ray est éclatante dans sa manière de dépeindre la bourgeoisie bengalie dans la contemporanéité de 1969, on ne pourra que regretter la lourdeur de la représentation des femmes tribales. Duli, interprétée par l’impeccable et très respectable Simi Garewal, qui se demandait elle-même comment elle allait pouvoir devenir si rude et grossière pour le film, ne convainc pas. Ray projette sur ce personnage tous les fantasmes, tous les poncifs et les lieux communs qui caractérisent les femmes tribales. Alors qu’il fallait quatre heures de préparation et de maquillage pour transformer cette beauté punjabi en noiraude, Duli incarne le parfait opposé de la pativrâta au teint clair, sa vulgarité et sa lascivité n’ont d’égales que la profondeur de la couleur sombre de sa peau. À son grand regret, Ray se décrit comme trop indien pour être compris dans toute sa subtilité par un spectateur occidental, et trop occidental dans sa narration pour être entendu par un spectateur lambda en Inde. Formidable témoin de son temps, mais aussi conteur d’une culture et d’un pays, il met en scène toute la complexité d’une Inde alors en quête d’identité. Si le cinéaste dépasse largement les frontières de son pays grâce à un sens esthétique remarquable, et sans remettre en question l’universalité des sentiments humains, nous ne devons pas oublier que les histoires qu’il nous raconte sont profondément indiennes. Et, durant toute sa carrière, il s’efforcera de répondre à ces questions qui le hantent : « Qu’en est-il de notre propre cinéma ? Où est notre style national ? Où est l’inspiration qui nous amènera à transformer la matière de notre vie en matière de cinéma ? » 3 Satyajit Ray voulait proposer une alternative cinématographique existentielle au cinéma de Bombay, la diversité de son œuvre, la longévité avec laquelle elle séduit encore le public et les critiques nous montrent qu’à n’en pas douter, il est parvenu à offrir au monde et à l’Inde cette alternative.

HÉLÈNE KESSOUS 3. J’aurais voulu pouvoir vous les montrer : conférences, notes de festivals, dessins, Satyajit Ray, G3J éditeur.


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CHARULATA CHARULATA

SATYAJIT RAY FICTION / 1964 / INDE / 1H55 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION S oumitra CHATTERJEE, Madhabi MUKHERJEE, Shailen MUKHERJEE, Shyamal GHOSHAL SCÉNARIO Satyajit RAY, d’après la nouvelle "Nastanirh" de Rabindranath TAGORE IMAGE S ubrata MITRA SON Nripen PAUL, Atul CHATTERJEE, Sujit SARKAR MUSIQUE Satyajit RAY DÉCORS Bansi CHANDRAGUPTA MONTAGE D ulal DUTTA PRODUCTION R .D. Bansal Productions

VERSION RESTAURÉE

Calcutta, 1880. Charulata, une jeune bourgeoise délaissée par son époux, directeur d’un journal politique, se prend d’affection pour Amal, un cousin, qui l’aide à développer ses dons littéraires. Un magnifique portrait de femme, l’un des chefs d’œuvres de Satyajit Ray. Ours d’argent au Festival de Berlin 1965. Film immense, que Ray, dit-on, considère comme son meilleur : ce portrait délicat d’une femme à l’obstination angélique est aussi — et indissociablement — une œuvre de réflexion sur la renaissance, à la fin du siècle dernier au Bengale, d’une culture ancienne et d’un sentiment national que l’« anglicisation » des mœurs dans la bonne société avait occultés. Éveil d’une conscience et naissance d’une nation liés dans la transparence paisible d’un récit qui ne craint pas de donner « aux bons sentiments » toute leur place : on sait dès les premières images du film où, des fenêtres mi-closes d’un fort douillet et riche appartement, une jeune femme regarde le spectacle d’une rue tout en contrastes, que le « dehors » de la réalité sociale et le « dedans » des sentiments, seront pris par ce romancier de l’image qu’est Satyajit Ray comme une seule et même « pâte historique » à travailler. Georges Sadoul (Dictionnaire des films, ed. du Seuil, Paris 1990)


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PREMIÈRES ÉPREUVES : SATYAJIT RAY

LA DÉESSE DEVI

SATYAJIT RAY FICTION / 1960 / INDE / 1H33 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION C hhabi BISWAS, Soumitra CHATTERJEE, Purnendu MUKHERJEE, Sharmila TAGORE, Karuna BANERJEE SCÉNARIO Satyajit RAY, d’après la nouvelle de Prabhat Kumar MUKHERJEE IMAGE S ubrata MITRA SON Durgadas MITRA MUSIQUE Ustad ALI AKBAR KHAN DÉCORS R. R. SINDE MONTAGE D ulal DUTTA

Bengale, XIXe siècle. Après un rêve, un seigneur est convaincu que sa belle-fille n’est autre que la réincarnation de la déesse Kali, à qui il voue un culte démesuré. La jeune femme est alors contrainte à une vie religieuse et installée dans le temple familial, malgré la résistance de son époux. La Déesse est un film rare dans l’œuvre de Ray parce qu’il part du postulat suivant : qu’un acteur en sait plus sur le personnage qu’il interprète que le metteur en scène. À partir de là, le tournage devient une expérience de plus où le metteur en scène, au fil du jeu de l’acteur, navigue à vue. Tout dans le jeu de Sharmila Tagore, absolument sublime, indique qu’elle a une idée de son personnage et que cette idée, qui lui appartient en propre, échappe à Ray et que, dès lors, tout sera mis en place, dans l’acte même du filmage, pour en saisir les multiples accents. Comment filmer la pensée d’un acteur au moment où il touche à la vérité fluctuante et contradictoire de son personnage ? La déesse, objet fuyant du désir des deux hommes, c’est aussi, sous l’impulsion du regard de Ray, ce personnage de femme insaisissable, objet fuyant du désir d’une actrice. Il n’y a pas au cinéma d’entreprise plus risquée et plus belle.» Charles Tesson (Cahiers du cinéma, Octobre 1984)


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LA GRANDE VILLE MAHANAGAR

SATYAJIT RAY FICTION / 1963 / INDE / 12H11 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION Madhabi MUKHERJEE, Anil CHATTERJEE, Haren CHATTERJEE, Sefalika DEVI, Haradhan BANERJEE, Vicky REDWOOD SCÉNARIO Satyajit RAY, d’après une nouvelle de Narendranath MITRA IMAGE S ubrata MITRA MUSIQUE Satyajit RAY DÉCORS Bansi CHANDRAGUPTA MONTAGE D ulal DUTTA PRODUCTION R.D.Bansal Productions VERSION RESTAURÉE

Calcutta. L’émancipation d’une jeune femme au foyer, Arati, qui décide de travailler pour aider son époux à subvenir aux besoins de leur famille. Mais sa famille aura du mal à accepter cette nouvelle situation. Le premier film contemporain de Satyajit Ray. Ours d’argent au festival de Berlin en 1964. Tous comptaient bien que ce premier film de Satyajit Ray « sur » une mégalopole indienne renouvelle l’exploit artistique de Pather Panchali [La Complainte du sentier] : faire revivre un monde à l’écran et en dénoncer la dureté. Or La Grande Ville est au fond un film intimiste, son enjeu est surtout dans l’espace clos d’une maison où tout converge et où le film résout sa crise. Par un admirable travail de décor et de cadre qui démultiplie les lieux, les ouvertures de cet intérieur sont flottantes, indécises, elles agissent comme les multiples revirements auxquels les circonstances conduisent les personnages, à l’image aussi des lumières, qui passent du jour solaire et blanc aux clairs obscurs, aux jeux d’ombres et de reflets où se cache peut-être la « vérité ». Ou, pourquoi pas, la « réalité »… Rien n’est plus sûr et vrai dans la grande ville moderne, où les rôles de chacun se perdent dans des postures, des mensonges et des craintes qui sont les seules façons d’exister. Max Robin (Critikat, Décembre 2014)


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PREMIÈRES ÉPREUVES : SATYAJIT RAY

DES JOURS ET DES NUITS DANS LA FORÊT ARANYER DIN RATRI

SATYAJIT RAY

FICTION / 1969 / INDE / 1H55 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION S oumitra CHATTERJEE, Subhendu CHATTERJEE,Samit BHANJA, Robi GHOSH, Pahadi SANYAL SCÉNARIO Satyajit RAY, d’après le roman de Sunil Ganguli IMAGE P urnendu BOSE, Soumendu ROY SON Sujit SARKAR MUSIQUE Satyajit RAY DÉCORS Ashoke BOSE, MONTAGE Dulal DUTTA PRODUCTION P riya Films

Quatre amis quittent Calcutta en voiture pour quelques jours de repos à la campagne et s’installent dans un bungalow non loin d’une forêt. Très vite, ils rencontrent de séduisantes jeunes bourgeoises en villégiature. Entre jeux de sociétés et jeux de séduction, ce voyage les révèlera à eux-mêmes. La fluidité du récit de l’installation de ces quatre compères, de leurs péripéties avec le gardien qu’ils soudoient pour pouvoir se faire héberger dans une maison forestière, la légèreté de ton avec laquelle le film évoque leurs bouderies et leurs petits conflits de voisinage viennent encore nous troubler un peu plus tant l’amplitude des oppositions semble réduite, tant la gaieté domine dans cette évocation de la rencontre entre rats des villes et rats des champs avec pour scène ce décor si simple, si beau de la forêt. La sobriété du découpage annonce déjà celle tout aussi épurée des derniers films de Ray. L’objectivisation constante du point de vue, sans renoncer au savant travail d’épinglage des contrastes, oppositions, désirs, lâchetés et autres petites obscénités de comportement que ce genre de rencontre entre deux mondes engendre inévitablement, atteint ici une telle subtilité, refusant tous les sentiers dramatiques convenus, que Ray nous surprend un peu plus encore par son minimalisme. Frédéric Sabouraud (Cahiers du cinéma, Avril 1993)


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L’ADVERSAIRE PRATIDWANDI

SATYAJIT RAY FICTION / 1970 / INDE / 1H50 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION D hritiman CHATTERJEE, Indira DEVI, Debraj ROY, Krishna BOSE, Kalyan CHOWDURY SCÉNARIO Satyajit RAY, d’après le roman de Sunil GANGULI IMAGE S oumendu ROY, Purnendu BOSE SON J.D. IRANI, Durgadas MITRA MUSIQUE Satyajit RAY DÉCORS Bansi CHANDRAGUPTA MONTAGE D ulal DUTTA PRODUCTION Priya Films

Dans un Calcutta secoué par une agitation politique et sociale intense, un jeune étudiant en médecine est contraint à abandonner ses études pour chercher du travail, suite à la mort brutale de son père. Pour ceux qui doutent encore que le cinéma soit affaire de regard subjectif porté sur le monde et donc de mise en scène, L’Adversaire sera une révélation. On passe du singulier au collectif, de l’infime mouvement individuel à la contemplation surplombante de la ville immense : le sens dramatique de l’espace de Ray s’y déploie avec une suprême élégance. À travers le microcosme d’une communauté ordinaire, Ray filme la réalité de Calcutta : fourmilière de l’absurde, de la débrouille et de la dislocation. Mais contrairement à la fluidité d’autres films du cinéaste, la structure est ici singulièrement bouleversée. Des flashes-back intègrent le film, épousent les flux intérieurs des personnages. Nostalgie rentrée et obsession prégnante. Mais jamais d’ostentation ou de grandiloquence, plutôt une pénétration pudique dans les méandres de l’intériorité ; une pure suspension quelque part entre le réel et les voies sinueuses de l’imaginaire. (Les Inrockuptibles)


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PREMIÈRES ÉPREUVES : SATYAJIT RAY

TONNERRES LOINTAINS ASHANI SANKET

SATYAJIT RAY FICTION / 1973 / INDE / 1H41 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION S oumitra CHATTERJEE, Babita, RAMESH MUKHERJEE, Chitra BANERJEE, Gobinda CHAKRABORTI SCÉNARIO Satyajit RAY et Bibhutibhushan BANDOPADHYAY IMAGE S oumendu ROY SON J.D. IRANI, Durgadas MITRA DÉCORS Ashoke BOSE MONTAGE S atyajit RAY, Dulal DUTTA PRODUCTION Balaka Movies

1942. Un jeune couple issu de la caste brahmane s’installe dans un petit village du Bengale. Au loin, la guerre gronde et entraine progressivement une pénurie de riz. Les liens sociaux s’altèrent et les brahmanes sont alors exposés à la violence des villageois… Ours d’Or au Festival de Berlin en 1973. Ce qui surprend immédiatement, dans Tonnerres lointains, c’est la manière unique de Ray d’être à la fois le plus raffiné des stylistes et le plus brutal des documentaristes. Il commence par nous éblouir de paysages plus beaux les uns que les autres, d’herbes d’un vert fabuleux ployant sous le vent, de chants d’oiseaux à n’en plus finir, tandis qu’un quatuor mioccidental mi-arabisant, installe un climat de fragilité et de nostalgie. (…) Que le monde ne soit jamais d’un seul tenant, qu’il y ait un pile et face au bonheur semble être l’idée-force de cette fable : l’apparition, au début de l’histoire, d’un jeune homme, très beau de loin, mais monstrueusement défiguré de près (la moitié de son visage n’est que bouffissures et chairs à vif) nous apprend d’emblée à nous méfier des apparences : derrière les plus jolies scènes (batifolages des copines qui vont cueillir des herbes ou déterrer des ignames), se cache un désespoir sans issue : la famine, la maladie, la mort sont le seul dénouement possible. Louis Skorecki (Libération, Décembre 1985)


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LES JOUEURS D’ÉCHECS SHATRANJ KE KHILARI

SATYAJIT RAY

FICTION / 1976 / INDE / 1H53 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION S anjeev KUMAR, Saeed JAFFREY, Amjad KHAN, Richard ATTENBOROUGH, Shabana AZMI SCÉNARIO Satyajit RAY, d’après une nouvelle de Munshi Premchand IMAGE S oumendu ROY SON Narinder SINGH MUSIQUE Satyajit RAY, Reba MUHURI, Birju MAHARAJ DÉCORS Bansi CHANDRAGUPTA MONTAGE D ulal DUTTA PRODUCTION D evki Chitra Productions

Inde, 1850. Au royaume d’Oudh, deux nobles passent leur temps à jouer à d’interminables parties d’échecs sans s’apercevoir que la puissante armée de la Compagnie des Indes est en marche pour renverser le roi et annexer le royaume. L’unique film de Satyajit Ray tourné en langue hindi. Le lien qui se tisse entre les deux récits est une même tragédie du regard : le roi qui devrait voir aussi loin que les limites de son royaume et qui ne voit pas plus grand que l’enceinte de son palais, de sa jouissance (l’Art : poésie, chant, danse), et les joueurs qui ne veulent rien voir hors du cadre de leur échiquier. Satyajit Ray cherche moins les équivalences secrètes qu’il n’essaie de prendre le spectateur à contre-pied. Là où il attend un affrontement violent (la colonisation), il aura droit à du jeu, du rituel poli auquel le roi se livre de bonne grâce (d’autant plus touchant que, perdu dans la tour d’ivoire de ses passions, il n’en comprend pas les règles) et là où il attend du jeu (les échecs), il aura droit finalement à un affrontement violent, arme au poing, écho direct de ces combats de coqs et de béliers dont les joueurs sont témoins. Charles Tesson (Cahiers du cinéma, Octobre 1983)


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PREMIÈRES ÉPREUVES : SATYAJIT RAY

LA MAISON ET LE MONDE GHARE BAIRE

SATYAJIT RAY FICTION / 1984 / INDE / 2H20 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION S oumitra CHATTERJEE, Victor BANERJEE, Swatilekha CHATTERJEE, Gopa AICH, Jennifer KAPOOR SCÉNARIO Satyajit RAY, d’après l’œuvre de Rabindranath Tagore IMAGE S oumendu ROY SON Robin SEN GUPTA, Jyoti CHATTERJEE, Anup MUKHERJEE MUSIQUE Satyajit RAY DÉCORS Ashoke BOSE MONTAGE D ulal DUTTA PRODUCTION N FDC - National Film Development Corporation of India

1905, au moment de la partition du Bengale qui divise hindous et musulmans. Un couple de la bourgeoisie éclairée Nikhil et Bimala accueille sous leur toit Sandip, un ami leader politique et fervent nationaliste. Par ses idées et son charisme, il réussit à séduire Bimala. Fidèle à l’intériorité de l’œuvre de Tagore, Satyajit Ray refuse le cinéma de la séduction. Plan après plan, jusqu’à l’intolérable, la caméra filme des visages, des corps, des gestes ; Nikhil, contradictoire, silencieux, plein de souffrance, connaissait déjà sa destinée ; Sandip, l’homme en fuite, Amoulaya, le possédé. Le visage de Bimala, son regard qui cherche à comprendre le monde, l’interrogation devant le miroir, sa main crispée sur l’épaule de Sandip, son vertige devant l’accomplissement du destin. Ce que nous montre Satyajit Ray, ce n’est pas une aventure politique, ni même une idée philosophique du monde. C’est plus simplement la passion : passion de Bimala pour un homme qui éblouit. Passion surhumaine de Nikhil pour sa femme, passion d’Amoulaya pour sa patrie. La passion est la seule vérité, la seule réalité, la prise de l’homme sur le monde. Sandip est incapable de s’oublier, d’aimer un autre que lui-même, et c’est pour cela qu’il ne peut être un héros ni un véritable libérateur. L’argent, la corruption, l’envie mais surtout la vanité font de lui un destructeur. Lorsqu’elle comprend cela, Bimala découvre en même temps l’amour mais il est déjà trop tard pour sauver sa maison. J.-M.G Le Clézio (Le Nouvel Observateur, Juin 1984)


CROC BLANC

d’Alexandre 153 Espigares

© Superprod - Bidibul Productions - Big Beach

Long-métrage produit par Superprod et Bidibul Productions

ZONE BLANCHE de Thierry Poiraud et de Julien Despaux © Ego Productions - Jean-Philippe Baltel

Série produite par Ego Productions

JE LES AIME TOUS de Guillaume Kozakiewiez

© 48es Rugissants - Corinne Masiero

Court-métrage produit par Les 48es Rugissants productions

GRAND EST

TERRE DE TOURNAGES écriture tutorat résidences développement production accueil de tournages diffusion grandest.fr • rubrique Aides > Culture strasbourg.eu/films


CINÉMA ET HISTOIRE :

ceci est mon corps


LA BRIQUE ET LE MIROIR D’EBRAHIM GOLESTAN P.159 KLUTE DE ALAN J. PAKULA P.160 LUCÍA D’HUMBERTO SOLÁS P.161 L’UNE CHANTE, L’AUTRE PAS D’AGNÈS VARDA P.162 MASO ET MISO VONT EN BATEAU DE NADJA RINGART, CAROLE ROUSSOPOULOS, DELPHINE SEYRIG ET IOANA WIEDER P.163 S.C.U.M MANIFESTO DE CAROLE ROUSSOPOULOS ET DELPHINE SEYRIG P.163 REGARDE, ELLE A LES YEUX GRAND OUVERTS DE YANN LE MASSON ET LE COLLECTIF DE FEMMES DU MLAC P.164 LES VIES DE THÉRÈSE DE SEBASTIEN LIFSHITZ P.165 SAUTE MA VILLE DE CHANTAL AKERMAN P.165 CARTE BLANCHE À LA CINÉMATHÈQUE FRANÇAISE P.166


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CINÉMA ET HISTOIRE : CECI EST MON CORPS

Ceci est mon corps  La libération du corps féminin  dans les années 1960 et 1970

Liberté, égalité, sexualités ! À l’occasion des 60 ans du Planning familial, des historiens explorent la libération du corps féminin dans les années 1960 et 1970, de l’Iran à Cuba en passant par la France ou les États-Unis. Chaque année, les Rencontres Cinéma et Histoire proposent un regard croisé, artistique et scientifique sur le septième art. Une temporalité originale dans le festival, afin de prendre le temps de réfléchir sur le cinéma comme objet d’histoire et miroir social. Des films choisis à la fois pour leur valeur esthétique et l’importance des enjeux historiques qu’ils évoquent sont présentés par des spécialistes de la question, historiens ou critiques.

Les Rencontres sont organisées sous la direction de Marie Frappat et Laurent Heyberger. EN COLLABORATION AVEC LE DÉPARTEMENT DE L’IRCAV DE L’UNIVERSITE PARIS 3 LA SORBONNE-NOUVELLE ET LE LABORATOIRE IRTES-RECITS DE L’UNIVERSITE DE TECHNOLOGIE DE BELFORT-MONTBELIARD.


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Les années 1960 et 1970 sont des années de révolte, où tout devient politique, y compris le corps féminin : années MLF, mais aussi années du Planning familial, de l’éducation sexuelle et de la lutte pour la légalisation de la contraception et de l’avortement, années de libération de la sexualité et de la condition féminine un peu partout dans le monde. Quels regards politiques et artistiques le cinéma porte-il sur ce moment historique si particulier ? 1956 : la gynécologue Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé crée à Paris la Maternité Heureuse qui donne naissance en 1961 au « Planning familial ». Droit à la contraception et à l’avortement, mais aussi éducation sexuelle des jeunes filles sont au programme de ce mouvement qui connaît ses beaux jours dans les années 1960 et 1970. 2016 : le planning fête ses soixante ans. Avec l’obtention du droit de vote en 1945, la légalisation des méthodes contraceptives et de l’interruption volontaire de grossesse constitue sans doute pour la condition des femmes l’une des révolutions les plus importantes du xx e siècle. À la fin des Trente Glorieuses, qui consacrent pourtant le rêve bourgeois de la femme reine du foyer domestique, pilule puis ivg sont légalisées non sans mal dans les principales démocraties occidentales (rfa, usa, France, Royaume-Uni), alors qu’un peu partout dans les anciens pays colonisés, dans l’enthousiasme des indépendances et des révolutions de gauche, émerge une nouvelle condition féminine, des femmes plus indépendantes, plus libres, émancipées. Les années 1960 et 1970 apparaissent d’abord comme un tournant décisif dans la lutte des femmes pour disposer de leurs corps. Women’s Lib et mlf (Mouvement de libération des femmes) expriment leurs revendications de liberté, de diversité et de sororité, tandis que les groupes de prise de conscience qui fleurissent à l’Ouest scandent que « le privé est politique ». Entre réactions religieuses et émancipations féministes alternatives des années 1970, le corps des femmes se fait objet et sujet politique, ce que rappelle le slogan du Planning français : « Liberté, égalité, sexualités ». Le très beau documentaire (2016) que Sébastien Lifshitz consacre à la féministe Thérèse Clerc pourrait résumer le demi-siècle qui vient de s’écouler. Il montre avec tendresse Les Vies de Thérèse, de la sage jeune fille catholique à la mère de famille nombreuse, jusqu’à l’adieu bouleversant de la vieille dame à ses proches, alors que ceux-ci évoquent les souvenirs intimes des années militantes. Les années 1960 et 1970 sont aussi un moment privilégié de prise de parole individuelle et collective visant à déconstruire et reconstruire l’image des femmes. Parmi les plus radicales, Valerie Solanas publie son SCUM Manifesto en 1967, programme anarcho-féministe (il s’agit de décapiter les hommes – Society for Cutting Up Men), bientôt épuisé sous sa forme papier. Le texte est donc porté à l’écran en 1976, dans une lecture mémorable de Delphine Seyrig, devant la caméra de Carole Roussopoulos. Utilisation militante de la vidéo, que Maso et Miso vont en bateau (1976), des mêmes « insoumuses », porte à la perfection : la secrétaire d’État à la condition féminine, Françoise Giroud — et bien d’autres maso/miso — y sont brocardés par un commentaire ironique et mordant de l’émission de Bernard Pivot. La libération de la sexualité féminine se lit dans ces années notamment à travers un nouveau rapport à la maternité, au désir ou à l’absence de désir d’enfant, à une sexualité libérée du poids de la procréation. Regarde, elle a les yeux grand ouverts (1980) constitue un témoignage d’une rare intensité sur les militantes du MLAC (Mouvement pour la liberté de la contraception et de l’avortement) d’Aix-en-Provence. Yann Le Masson filme la vie de l’association, l’invention des nouveaux rapports humains qui se tissent à l’occasion des actes médicaux militants (avortement et accouchement), le procès de 1977 pour exercice illégal de la médecine, qui soulève le problème du savoir et du pouvoir d’un corps médical phallocrate, mais aussi l’après-procès et la remise en question de l’engagement militant.


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CINÉMA ET HISTOIRE : CECI EST MON CORPS

L’une chante, l’autre pas (1976) d’Agnès Varda aborde ces sujets par la fiction. Exercice délicat, car la politique dans une œuvre d’art peut s’apparenter à un coup de pistolet au milieu d’un concert. Mais les craintes stendhaliennes sont ici dépassées : les trajectoires croisées de Pomme et de Suzanne, de 1962 à 1976, permettent à Varda d’offrir une belle chronique de ces deux décennies militantes, scandée par la tonalité d’une voix off qu’on ne peut oublier. Quant au film Lucia, de Humberto Solas (1968), un des chefs-d’œuvre du cinéma cubain, il élargit le champ historique en proposant une grande fresque sur l’évolution de la condition féminine. On y retrouve Lucia et ses amants à trois moments clefs de l’histoire cubaine : la guerre d’indépendance de 1895, la chute de la dictature de Machado en 1932 et enfin l’ère révolutionnaire castriste. Le triptyque virtuose de Solas adopte un style très différent dans ces trois volets, de la photographie et de la bande son très contrastées de 1895, à l’esthétique Nouvelle Vague de la Lucia révolutionnaire. Surtout, dans cette dernière histoire, Solas montre avec élégance le caractère libérateur de l’alphabétisation et le chemin qui reste aux femmes à parcourir dans une société socialiste pour s’émanciper du machisme. Klute (1971), thriller hollywoodien d’Alan J. Pakula, pourrait alors constituer le contrepoint esthétique, idéologique et psychologique de Lucia. Au-delà de l’enquête policière de ce premier volet de la trilogie paranoïde de Pakula (À cause d’un assassinat, 1974 et Les Hommes du président, 1976, voire les plus tardifs Présumé innocent, 1990 et L’Affaire Pélican, 1993), on peut y lire un beau portrait de femme. Jane Fonda y incarne Bree Daniels, call-girl apparemment émancipée qui joue sur les faiblesses et les illusions dominatrices des hommes, mais qui révèle ses failles lors de ses séances de psychanalyse et face au séduisant détective John Klute (Donald Sutherland). Enfin, La Brique et le miroir, de Ebrahim Golestan (1965), constitue l’un des points d’orgue de ce cycle « Cinéma et Histoire ». Œuvre à l’avant-garde du cinéma iranien indépendant, précurseur de la Nouvelle Vague, La Brique et le miroir nous plonge dans une nuit sans fin de Téhéran où Hashem, chauffeur de taxi, cherche à se débarrasser d’un bébé abandonné sur la banquette arrière de sa voiture, tandis que sa compagne, Taji, souhaiterait garder l’enfant. Comme dans Klute, la condition féminine ne constitue pas le cœur du propos de Golestan, mais, au-delà de la question de la maternité non biologique et de la libéralisation sexuelle, ce magnifique film pose plus largement celle de l’engagement amoureux au sein d’une société qui lui impose ses lois. Marie Frappat et Laurent Heyberger

MARIE FRAPPAT

Marie Frappat est chercheuse associée à l’Institut de recherche sur le cinéma et l’audiovisuel (Ircav) de l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3. Ses recherches portent principalement sur les institutions patrimoniales et sur l’histoire de la restauration des films. Elle est également secrétaire générale adjointe de l’Association française de recherche sur l’histoire du cinéma (AFRHC).

LAURENT HEYBERGER

Laurent Heyberger est maitre de conférences en histoire contemporaine à l’université de Technologie de BelfortMontbéliard, laboratoire IRTES-RECITS, Département des Humanités. Il participe à l’organisation des Rencontres Cinéma et Histoire depuis 2008.


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LA BRIQUE ET LE MIROIR KHESHT VA AYENEH

EBRAHIM GOLESTAN FICTION / 1965 / IRAN / 2H05 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION T aji AHMADI, Zackaria HASHEMI, Goli BOZORGMEHR, Parviz FANIZADEH SCÉNARIO Ebrahim GOLESTAN SON Mahmood HANGVAL IMAGE Amir KARARI, Soleiman MINASIAN MONTAGE Ebrahim GOLESTAN PRODUCTION Ebrahim GOLESTAN

Hashem est chauffeur de taxi. Une nuit, après avoir reconduit une jeune femme, il trouve un bébé sur le siège arrière de sa voiture. Taji, la petite amie d’Hashem, voudrait garder l’enfant trouvé alors qu’Hashem voudrait s’en débarrasser au plus vite. Le premier film de l’une des figures majeures de la Nouvelle Vague iranienne. Séance présentée par Asal Bagheri.

Asal Bagheri est docteure en Sémiologie et linguistique. Spécialiste du cinéma iranien, elle est auteure de la thèse Les relations homme/femme dans le cinéma iranien post-révolutionnaire, stratégies des réalisateurs ; analyse sémiologique. Elle a assuré jusqu’à aujourd’hui plusieurs enseignements dans le domaine de la Linguistique, Sémiologie et Communication à la Sorbonne Paris Descartes, Paris Est Créteil, Paris Est Marne La Vallée et Rennes 1. Son livre Sentiment, amour et sexualité. Les dilemmes du cinéma iranien de la République Islamique est en voie de publication chez L’Harmattan dans la collection « Iran en Transition ». Elle est par ailleurs Formatrice FLE auprès des migrants en situation d’handicap au CRP de Beauvoir, mais également au centre de formation CEFIL et à la Mairie de Paris.


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CINÉMA ET HISTOIRE : CECI EST MON CORPS

KLUTE ALAN J. PALUKA FICTION / 1971 / ÉTATS-UNIS / 1H54 / COUL. / VOSTF INTERPRÉTATION D onald SUTHERLAND, Jane FONDA, Charles CIOFFI, Roy SCHEIDER, Dorothy TRISTAN SCÉNARIO Andy LEWIS, Dave LEWIS IMAGE G ordon WILLIS SON Christopher NEWMAN MUSIQUE Michael SMALL DÉCOR J ohn MORTENSEN MONTAGE Carl LERNER PRODUCTION W arner Bros.

John Klute, un détective privé est chargé de retrouver son ami Tom Gruneman, disparu depuis quelques mois. Il se rend à New York pour mener l’enquête et rencontre sa seule piste, Bree Daniels, une call-girl à qui Tom aurait adressé des lettres obscènes. Oscar de la meilleure actrice pour Jane Fonda en 1972. Séance présentée par Adrienne Boutang.

Adrienne Boutang est maître de conférences en cinéma dans le département d’anglais de l’Université de Bourgogne-Franche-Comté. Ses travaux portent principalement sur le cinéma américain contemporain, en particulier la censure et la transgression, et sur les rapports entre cinéma et adolescence, thématique sur laquelle elle a publié un ouvrage Teen Movies, Ed. Vrin, 2012. Elle a récemment co-édité un recueil consacré à Tim Burton (Horreurs Enfantines, Harmattan, 2016).


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LUCíA HUMBERTO SOLÁS FICTION / 1968 / CUBA / 2H40 / N&B / VOSTF INTERPRÉTATION Raquel REVUELTA, Eslinda NÚÑEZ, Adela LEGRÁ, Eduardo MOURE, Ramón BRITO SCÉNARIO Humberto SOLÁS, Julio GARCÍA ESPINOSA, Nélson RODRÍGUEZ IMAGE Jorge HERRERA MUSIQUE Leo BROUWER, Joseíto FERNÁNDEZ, Tony TAÑO MONTAGE Nelson RODRÍGUEZ PRODUCTION ICAIC

Trois destins de femmes, trois « Lucia », à des moments clés des luttes de libération du peuple cubain (1895, 1932 et les années 1960). Le premier long-métrage et l’un des chefs-d’œuvre d’Humberto Solas, figure majeure du cinéma d’Amérique latine. Séance présentée par Olivier Hadouchi

Olivier Hadouchi est l’auteur d’une thèse autour du cinéma et des luttes de libération tricontinentales des années 1960 et 1970, soutenue à Paris 3 sous la direction de Nicole Brenez, et de deux ouvrages : Kinji Fukasaku, un cinéaste critique dans le chaos du XX e siècle et Images of Non-Aligned and Tricontinental Struggles. Il a aussi écrit sur les cinémas du monde arabe, d’Afrique ou d’Amérique latine dans La Furia Umana, Mondes du cinéma, L’ordinaire latino-américain, Third Text ou CinémAction et dans des ouvrages collectifs. Il a présenté et animé de nombreuses séances dans des festivals ou des centres d’art en France et à l’étranger et il a conçu des programmations de films pour le BAL, le Bétonsalon et le festival Bandits-mages.


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CINÉMA ET HISTOIRE : CECI EST MON CORPS

L’UNE CHANTE, L’AUTRE PAS AGNÈS VARDA FICTION / 1976 / FRANCE, BELGIQUE / 2H / COUL. / VOF INTERPRÉTATION V alérie MAIRESSE, Robert DADIÈS, Thérèse LIOTARD, Gisèle HALIMI, Dominique DUCROS SCÉNARIO Agnès VARDA IMAGE C harlie VAN DAMME, Nurith AVIV SON Henri Morelle MUSIQUE François WERTHEIMER DÉCORS Frankie DIAGO MONTAGE Joële VAN EFFENTERRE PRODUCTION Ciné Tamaris, SFP, INA, Contrechamp, Paradise Films

Entre 1962 et 1976, l’amitié de deux femmes permet de faire la chronique du féminisme et des droits des femmes. Pomme, 17 ans, et Suzanne, 22 ans, se rencontrent lorsque Pomme aide Suzanne dans sa démarche pour avorter de son troisième enfant. Elles perdent contact et se retrouvent dix ans plus tard au cours d’une manifestation féministe. Séance présentée par Florence Rochefort.

Florence Rochefort, historienne, chercheuse au CNRS est spécialiste d’histoire des féminismes. Elle co-dirige la revue CLIO Femmes, Genre, Histoire et a présidé pendant 6 ans l’Institut Emilie du Châtelet pour la diffusion des études de genre. Elle a co-dirigé notamment l’ouvrage Qu’est ce que le genre? (Petite collection Payot, 2014).


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NADJA RINGART, CAROLE ROUSSOPOULOS DELPHINE SEYRIG, IOANA WIEDER

CAROLE ROUSSOPOULOS DELPHINE SEYRIG

DOC. / 1975 / FRANCE / 55 MIN. / N&B / VOF

DOC. / 1976 / FRANCE / N&B / 27 MIN. / VOF

AVEC Bernard PIVOT, Françoise GIROUD, Louis FÉRAUD, José ARTUR

AVEC Delphine SEYRIG et Carole ROUSSOPOULOS

PRODUCTION Les Muses s’amusent SCÉNARIO MONTAGE Collectif Les Insoumuses`L’année

Une lecture mise en scène par Delphine Seyrig d’extraits du pamphlet féministe, S.C.U.M. Manifesto (Society for Cutting Up Men) de Valerie Solanas, édité en 1967 et introuvable en France à l’époque.

1975 est déclarée « année de la femme ». À cette occasion, Bernard Pivot invite à la télévision Françoise Giroud, alors Secrétaire d’état à la condition féminine. En réponse face aux propos tenus, un groupe de femmes vidéastes détourne l’émission avec humour et provocation.

Séance présentée par Hélène Fleckinger

Maîtresse de conférences à l’Université Paris 8, Hélène Fleckinger est l’auteure d’une thèse sur les relations entre cinéma, vidéo et féminisme (France, 19681981), à paraître aux Presses Universitaires de Rennes. Coordinatrice d’un numéro de La Revue Documentaires sur « Mai 68 : tactiques politiques et esthétiques du documentaire » (n°22-23, 2010, avec David Faroult) et du livre-DVD Carole Roussopoulos : Caméra militante. Luttes de libération des années 70(Genève, MétisPresses, 2010), elle co-dirige avec Alain Carou (BnF) un séminaire et un carnet de recherche sur la « vidéo des premiers temps ». Conceptrice, avec Nadja Ringart, de la plateforme « Bobines féministes », Hélène Fleckinger s’engage aujourd’hui dans des projets numériques de recherche autour de fonds audiovisuels méconnus.


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CINÉMA ET HISTOIRE : CECI EST MON CORPS

DOC. / 1980 / FRANCE / 77 MIN. / COUL. / VOF

De 1975 à 1980, l’histoire d’un groupe de femmes du M.L.A.C. (association féministe fondée en 1973, luttant pour le droit à l’avortement et la contraception) d’Aixen-Provence, qui, entourées de leurs proches, pratiquent accouchements et avortements en collectif. Six d’entre elles seront jugées en 1977 pour avortements illégaux.

IMAGE Y ann Le Masson

Séance présentée par Martin Goutte.

YANN LE MASSON LE COLLECTIF DE FEMMES DU MLAC

Martin Goutte est maître de conférences en études cinématographiques à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 et membre de l’Institut de Recherche sur le Cinéma et l’Audiovisuel (IRCAV). Dans le prolongement d’une thèse sur « Le témoignage documentaire dans Shoah de Claude Lanzmann » (Lyon 2, 2008), ses recherches portent d’une part sur l’histoire et l’esthétique du cinéma documentaire, et d’autre part sur les représentations audiovisuelles de l’histoire. Il a notamment codirigé avec Jacques Gerstenkorn l’ouvrage Cinémas en campagne. De la chronique électorale à la fiction politique (Fage, 2012).


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LES VIES DE THÉRÈSE SÉBASTIEN LIFSHITZ DOC. / 2016 / FRANCE / 55 MIN. / COUL. / VFSTA AVEC Thérèse CLERC IMAGE P aul GUILHAUME SON Yolande DECARSIN, Clément LAFORCE MONTAGE P auline GAILLARD PRODUCTION Agat Films amp; Cie / Ex Nihilo

Thérèse Clerc est l’une des grandes figures du féminisme militant. Atteinte d’une maladie incurable, elle décide de jeter un dernier regard tendre et lucide sur ce que fut sa vie, ses combats et ses amours. Au début, je ne savais pas très bien quel film je voulais faire, étant données les circonstances, et cette demande complètement inattendue, m’a beaucoup déconcerté. Mais je ne pouvais pas refuser. La demande de Thérèse était si forte, et ça faisait tellement sens pour elle. Je sentais aussi que c’était quelque chose qui pourrait lui donner comme une sorte de béquille pour vivre ce dernier moment. Et surtout, ça produisait un geste politique pour elle : continuer à militer et à utiliser son corps, sa vie pour produire un message et une parole active sur des questions qui lui étaient très importantes, c’est-à-dire la mort, le grand âge, la place des femmes, la sexualité… Sébastien Lifshitz (Grand Ecart, Mai 2016)

SAUTE MA VILLE

PRÉCÉDÉ DE DE CHANTAL AKERMAN FICTION / 1968 / BELGIQUE / N&B / 13 MIN. Une jeune femme rentre chez elle, s’enferme dans la cuisine, agit de façon de plus en plus incohérente jusqu’à faire sauter l’appartement. Le tout premier court-métrage de Chantal Akerman qu'elle interprète et réalise en 1968, alors qu'elle n'a que dix-huit ans.


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CINÉMA ET HISTOIRE : CECI EST MON CORPS

CARTE BLANCHE À LA CINÉMATHÈQUE FRANÇAISE

CARTE BLANCHE À LA CINÉMATHÈQUE FRANÇAISE PORTRAITS DE FEMMES

Dans les années 1960 et 1970, des femmes ont choisi d’agir pour s’émanciper de l’autorité masculine, et lutter pour l’autorisation de la pilule contraceptive, la dépénalisation et la légalisation de l’IVG. Ce mouvement s’inscrit aussi dans les manifestations artistiques, notamment le cinéma. Dans Elles, quatre ans après l’indépendance de l’Algérie, Ahmed Lallem interroge des lycéennes sur leurs difficultés et leurs attentes. Les perspectives encore fragiles sont compensées par une volonté d’émancipation, le souhait de construire une société équitable et une foi en l’avenir. En 1996, Ahmed Lallem retrouvera quelques-unes de ces femmes dans Algériennes, 30 ans après. Le constat est, hélas, à la désillusion. La même année 1966, Jean Rouch dresse, telle une étude ethnographique, le portrait désenchanté d’une jeunesse parisienne bourgeoise, égarée et soumise à la société de consommation. Les Veuves de quinze ans est l’épisode français de La Fleur de l’âge, film qui comporte trois autres parties (italienne, japonaise et canadienne). Il sera interdit aux mineurs

de moins de 18 ans en raison de « la détresse et du désespoir qui s’en dégagent ». En 1972, l’année qui suit la parution du « manifeste des 343 » et précède de trois ans l’adoption de la loi Veil, Jacques Kebadian et le Collectif Eugène Varlin signent Albertine, le souvenir parfumé de Marie-Rose. Interprété, entre autres, par Franssou Prenant, le film montre une jeunesse qui s’insurge contre toute forme d’autorité, revendique ses désirs et réclame le droit à l’avortement pour les mineurs. En réponse à la question : « qu’est-ce qu’être une femme ? », Agnès Varda choisit, en 1975 dans Réponses de femmes, de parler du corps et du sexe, plutôt que de la condition. Tout en dénonçant les ambivalences imposées par la société, la réalisatrice réconcilie les femmes avec leur corps. Ces quatre courts-métrages tracent un chemin possible à travers les questionnements et les luttes qui ont marqué ces années, et qui, pour certains, demeurent d’actualité. Samantha Leroy, La Cinémathèque française


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ELLES

LES VEUVES DE QUINZE ANS

AHMED LALLEM

JEAN ROUCH

ALGÉRIE / 1966 / N&B / SONORE / 22 MIN / DCP

FRANCE / 1966 / N&B / SONORE / 25 MIN / VERSION RESTAURÉE

Au lendemain de l’indépendance, des lycéennes algériennes s’expriment sur leur vie, leurs attentes, sur les difficultés qu’elles rencontrent dans leur désir d’émancipation. Elles projettent leur espérance dans l’avenir démocratique de leur pays.

La vie de deux jeunes filles du 16e qui, entre famille et copains, cherchent le bonheur et l’amour. Présenté comme un essai sur les adolescentes de Paris, ce film stigmatise l’insouciance et la futilité de la jeunesse bourgeoise des années 60. Restauré par l’Agence du court métrage, en collaboration avec Les Films du Jeudi et Les Films de la Pléiade, avec le soutien du CNC.

JACQUES KEBADIAN COLLECTIF EUGÈNE VARLIN

RÉPONSES DE FEMMES AGNÈS VARDA FRANCE / 1975 / COUL. / SONORE / 8 MIN / VERSION RESTAURÉE

FRANCE / 1972 / COUL. / SONORE / 25 MIN / COPIE NEUVE / 35 MM Albertine est une adolescente en rébellion contre l’école, la famille et la religion. Film-manifeste de l’insurrection d’une jeunesse qui revendique le droit à une sexualité sans entraves et le droit à l’avortement pour les mineures. Copie tirée par la Cinémathèque française en 2014 à partir du négatif.

1975 : Année de la Femme. Antenne 2 demande à sept femmes cinéastes de répondre en sept minutes à la question « Qu’est-ce qu’être femme ? ». Agnès Varda a répondu par un ciné-tract. Des femmes avec leur tête de femme parlent de sexe, de désir, de pub et d’enfants (en avoir ou pas). Restauré par Ciné-Tamaris.



DRÔLES DE CRÉATURES ALADIN ET LA LAMPE MERVEILLEUSE DE JEAN IMAGE ROBOTS DE CHRIS WEDGE KING KONG DE MERIAN C. COOPER ET ERNEST B. SCHOEDSACK E.T. L’EXTRA-TERRESTRE DE STEVEN SPIELBERG CINÉ-CONCERT : « CENDRILLON, FÉLIX, OSWALD ET LES AUTRES » PANIQUE TOUS COURTS DE VINCENT PATAR ET STÉPHANE AUBIER

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170 ENTREVUES JUNIOR

ACTIONS PÉDAGOGIQUES SÉANCES SCOLAIRES Chaque année, les publics scolaires sont à l’honneur. Des séances spéciales « à la carte » sont proposées aux élèves des écoles maternelles, élémentaires, des collèges et des lycées. ATELIER DE LA CINÉMATHÈQUE FRANÇAISE : “GRAND OU PETIT ?” À PARTIR DU CE2 Pour les écoles élémentaires, un atelier est proposé et encadré par des intervenants du service pédagogique de La Cinémathèque française. Grand… ou petit ? Cette question a donné lieu aux contes les plus extravagants (qu’on pense aux géants, aux lutins, aux titans, aux sept nains, aux bons génies dans les bouteilles). Comment s’en étonner, puisqu’elle nous concerne tous, « petits » et « grands », parce que nous avons tous fait l’expérience de nous sentir « plus petits » ou « plus grands » en fonction des personnes avec qui nous nous trouvions ou du lieu que nous occupions. Cette question touche aussi aux racines mêmes du cinéma. D’où l’intérêt d’explorer l’un et l’autre, et l’un par l’autre. EN INTRODUCTION AUX ATELIERS, UNE SÉANCE AUTOUR DE KING KONG DE ERNEST B.SCHOEDSACK, MERIAN C.COOPER (1933) SERA PROPOSÉE AUX ÉLÈVES. PREMIÈRES ÉPREUVES (VOIR P.134) Pour les classes de Terminale option cinémaaudiovisuel, un programme spécifique intitulé « Premières Épreuves » est proposé afin d’approfondir l’étude du film programmé au baccalauréat. Plus de détails en page 141

DRÔLES DE BOBINES : CRÉATURES EN FOLIE : MONSTRES, GÉNIES, ROBOTS, EXTRA-TERRESTRES… CINÉ-CONCERT

Cendrillon, Félix, Oswald et les autres AVEC LES CLASSES DU CONSERVATOIRE DU PAYS DE MONTBÉLIARD Plus de détails sur le ciné-concert en page 50 AVANT-PREMIÈRE

PANIQUE TOUS COURTS VINCENT PATAR ET STÉPHANE AUBIER / 2001-2015 / 45 MIN. Plus de détails sur le film en page 47


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À

ANIMATION / 2013 / POLOGNE, ROYAUME-UNI, ISRAEL, CANADA, RUSSIE, ALLEMAGNE, BULGARIE / 37 MIN / COUL. / VF 7 courts métrages d’animation pour découvrir de drôles de créatures !

DES ELEPHANTS PAS COMME LES AUTRES D’ALINA MALISZEWSKA (POLOGNE, 1960, 11 MIN) Un éléphant rayé se sent bien seul dans la jungle au milieu d’éléphants de même couleur. DIP DAP ET LE PETIT FANTOME DE STEVEN ROBERTS (ROYAUME-UNI, 2011, 3 MIN) Dip Dap trouve un nouvel ami : un fantôme qui a peur de tout. Comment faire pour l’aider ? L’ÉLEPHANTE QUI NE VOULAIT PLUS RESSEMBLER À UN ÉLÉPHANT DE MILENA KLEBANOV (ISRAEL, 2006, 6 MIN) Madame Éléphant est affublée d’un long nez, de grandes oreilles et d’un crâne chauve. Elle opte pour une solution radicale, mais est-ce bien la bonne ? L’OCTOGONE QUI N’ÉTAIT NI ROND NI CARRÉ DE TAYLOR ANNISETTE (CANADA, 2011, 3 MIN) Un petit octogone va à l’école où il n’y a que des cercles et des carrés. Comment s’intégrer ?

PA RTI R DE

DRÔLES DE CRÉATURES

ANS

LE CHIEN QUI ÉTAIT AUSSI UN CHAT DE SIRI MELCHIOR (ROYAUME-UNI, 2002, 3 MIN) Un chien a un chat en lui-même. Les deux n’arrivent pas à s’entendre, ils veulent toujours aller dans des directions différentes. Le conflit ne peut plus durer. LE PETIT SQUELETTE DE ANTON DYAKOV (RUSSIE, 2012, 6 MIN) Kostya est un gentil petit squelette. Il se dirige vers un avenir inconnu qu’il espère brillant. Nous sommes les témoins de ses aventures dans une ville moderne. LE CHIEN QUI ÉTAIT COPAIN AVEC SA QUEUE DE MILEN VITANOV (ALLEMAGNE/BULGARIE, 2007, 5 MIN) Tous les chiens courent après leur propre queue. Un jour, un chien réussit à attraper la sienne. Sa vie en est changée puisqu’il trouve là son meilleur ami.


172 ENTREVUES JUNIOR

JEAN IMAGE ANIMATION / 1969 / FRANCE / 1H11 / COUL. / VF VERSION RESTAURÉE

ANS

ÀP

Le Magicien d’Afrique n’a qu’une idée en tête : s’emparer de la lampe merveilleuse. Mais seule une main innocente d’enfant peut approcher ce trésor. Se faisant passer pour l’oncle d’Aladin, un garçon pauvre vivant seul avec sa mère, il réussit à le convaincre de le suivre dans sa quête… Adapté de multiples fois au cinéma, la légende d’Aladin trouve avec Jean Image, un continuateur des plus précieux : parfois très libre dans son adaptation des Mille et Une Nuits, le réalisateur transmet pourtant un émerveillement réel. Certainement parce que son univers visuel et narratif foisonnant, inventif et tourbillonnant résonne comme une alliance parfaite entre la vision orientaliste occidentale du conte, et la lettre du texte original. Vincent Avenel (Critikat, février 2011) + CINÉ-GOÛTER

Robots CHRIS WEDGE ANIMATION / 2005 / ÉTATS-UNIS / 1H26 / COUL. / VF

PA RTI R

DE

et la Lampe merveilleuse

A RT I R

DE

Aladin

À

SÉANCE ROBOTS

SÉANCE GÉNIES

ANS

Dans un monde peuplé entièrement de robots, le jeune Rodney quitte sa petite ville pour tenter sa chance à Robot Ville et rencontrer Bigweld, l’inventeur et bienfaiteur de tous les robots. Mais de nombreuses surprises l’attendent… Les studios d’animation hollywoodiens sont-ils en passe de devenir le nouveau foyer de la contestation sociale américaine ? Apres Monstres & Cie, diatribe enlevée contre les multinationales par les studios Disney-Pixar, Chris Wedge (l’auteur oscarisé de l’inénarrable L’Âge de glace) remet le couvert avec Robots. Une merveille d’animation produite par la XXth Century fox, portée par un scénario solide, crépitant d’humour, un graphisme rétro et une bande son alternant mélopées de Barry White et B.O. de Rocky III. De quoi captiver les plus petits tout en divertissant les plus grands. Yasmine Youssi (Les Échos, avril 2005) + SUIVI D’UNE BOUM DÉGUISÉS EN ROBOTS, MONSTRES… + CONCOURS DE DESSINS DE ROBOTS


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SÉANCE MONSTRES

ANS

Si la vogue des effets spéciaux réalisés numériquement sert de ravalement de façade à des films anciens, il en va autrement pour King Kong. Il résiste admirablement pour la simple raison (seul le temps écoulé donne consistance à cette réalité) qu’on ne peut pas séparer le personnage de Kong de la technique qui l’a produit. Les deux sont liés, à jamais. Car, à la différence de Dracula ou de Frankenstein, précédés de leur modèle littéraire, Kong est une créature dont l’existence doit tout aux possibilités du cinéma. Ce qui fait de King Kong le premier mythe cinématographique, et le seul à ce jour. (Catalogue École au cinéma) + CINÉ-GOÛTER

STEVEN SPIELBERG FICTION / 1981 / ÉTATS-UNIS / 1H50 / COUL. / VF

À

ÀP

Une équipe de tournage arrive sur une île reculée, où vit une créature légendaire et vénérée, appelée King Kong. Après avoir enlevé l’une des actrices du film dans sa jungle, King Kong est capturé et ramené à New York. Là-bas, il s’échappe et sème la terreur dans la ville.

E.T. l’extra-terrestre

PA RTI R DE

MERIAN C. COOPER & ERNEST B. SCHOEDSACK FICTION / 1933 / ÉTATS-UNIS / 1H40 / N&B / VF

DE

KING KONG

SÉANCE EXTRA-TERRESTRES

A RT I R

ANS

Lors d’une mission d’exploration, E.T, un extraterrestre qui n’a pas réussi à regagner sa soucoupe volante avant le décollage, reste seul sur la Terre. Il est recueilli par Eliott, un petit garçon plein de bonne volonté, avec qui il se lie d’amitié. Aidé par sa sœur et son frère, Eliott va tout faire pour garder la présence d’E.T. secrète. Il y a du magicien chez Spielberg. Ne faut-il pas l’être un peu pour transformer en or un vieux rêve d’enfant ? Mais derrière ce magicien se cache un travailleur acharné, un professionnel exigeant, un cinéphile fou de cinéma. S’il est un film où rien n’est laissé au hasard, où tout est conçu, pesé, agencé pour séduire, c’est bien celui-ci. Un scénario écrit sur mesure (par Melissa Mathison), une suite de prouesses techniques (la palme revenant à Carlo Rambaldi, créateur d’E.T.), une mise en images dont le rythme ne faiblit qu’un court instant pendant les scènes d’hôpital, de jeunes comédiens admirablement dirigés, bref une démonstration exemplaire d’efficacité : voilà d’abord ce qui explique le succès d’E.T. Jean de Baroncelli (Le Monde, décembre 1982)


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LES RENCONTRES RÉGIONALES DE LA DIFFUSION DU CINÉMA INDÉPENDANT EN PARTENARIAT AVEC LA RÉGION BOURGOGNE-FRANCHE-COMTÉ, LE CNC, LA DRAC, LE GNCR ET L'ACID

Le festival est un lieu de rencontres privilégiées et un laboratoire de réflexion pour les professionnels impliqués dans le jeune cinéma de recherche. Afin de soutenir la diffusion du cinéma indépendant, Entrevues propose deux journées de prévisionnement et une table ronde avec les exploitants des régions du Grand Est. 10 films sont présentés en avant-première en présence des réalisateurs et des distributeurs, et les projections sont suivies de discussions sur l’accompagnement des films. TABLE RONDE / ANALYSE DU RAPPORT KOPP, LE CINÉMA À L’ÉPREUVE DES PHÉNOMÈNES DE CONCENTRATION : La table ronde réunira cette année L’ACID, le GNCR, distributeurs et exploitants. Hugues Quattrone , délégué général du DIRE (Syndicats des Distributeurs Indépendants Réunis Européens) et Samra Bonvoisin, journaliste, exposeront les analyses du rapport Kopp (Le cinéma à l’épreuve des phénomènes de concentration) et discuteront des propositions pratiques qui en dérivent.

PROGRAMME DES PRÉVISIONNEMENTS : - BRÜDER DER NACHT de Patric CHIHA (2016 / 1h27) DISTRIBUTEUR : Epicentre Films – sortie prévue le 8 février 2017 cf.p.15 - LE CONCOURS DE CLAIRE SIMON (2016 / 1h59) DISTRIBUTEUR : Sophie DULAC – sortie prévue le 15 février 2017 cf.p.44 - DE SAS EN SAS DE RACHIDA BRAKNI (2016 / 1h22) DISTRIBUTEUR : Capricci – sortie prévue le 22 février 2017 cf.p.16 - JOURS DE FRANCE de Jérôme REYBAUD (2016 / 2h17) DISTRIBUTEUR : KMBO – sortie prévue le 15 mars 2017 cf.p.36 - LUMIÈRES D’ÉTÉ de Jean-Gabriel PÉRIOT (2016 / 1h23) DISTRIBUTEUR : Potemkine – sortie prévue en avril 2017 cf.p.37 - LE RUISSEAU, LE PRÉ VERT ET LE DOUX VISAGE de Yousry NASRALLAH (2016 / 1h55) DISTRIBUTEUR : Pyramide – sortie prévue le 21 décembre 2016 cf.p.48 - TOMBÉ DU CIEL de Wissam CHARAF (2016 / 1h10) DISTRIBUTEUR : Epicentre Films – sortie prévue le 15 mars 2017 cf.p.38 - LA VENGERESSE de Bill PLYMPTON et Jim LUJAN (2016 / 1h11) DISTRIBUTEUR : ED Distribution – sortie prévue début 2017 cf.p.49 - COUP DE COEUR ACID : MADAME B, HISTOIRE D’UNE NORD-CORÉENNE de Jero YUN (2016 / 1h11) DISTRIBUTEUR : New Story – sortie prévue le 22 février 2017 cf.p.46 - JEUNE PUBLIC : PANIQUE TOUS COURTS de Vincent PATAR et Stéphane AUBIER (2016 / 45') DISTRIBUTEUR : Gebeka – sortie prévue en février 2017 cf.p.47

ATELIERS APARR

STAGE IMAGES EN BIBLIOTHÈQUES

L’APARR rassemble les professionnels du cinéma et de l'audiovisuel de Bourgogne Franche-Comté. Avec Les Petites Caméras (association d'auteurs réalisateurs), elle coordonne un dispositif d'accompagnement à l'écriture de films. Il sera ponctué lors d'Entrevues par un atelier collectif d'écriture.

15 responsables de collections audiovisuelles en médiathèques suivent ce stage pour découvrir l’actualité de la production cinématographique et rencontrer les réalisateurs invités au festival. En partenariat avec la Médiathèque départementale du Territoire de Belfort.


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RENCONTRES RÉGIONALES DE L’ÉDUCATION ARTISTIQUE AU CINÉMA ORGANISÉES PAR LE PÔLE IMAGE DE FRANCHE-COMTÉ

LES PRATIQUES NUMÉRIQUES COMME OUTILS DE TRANSMISSION

Depuis 10 ans, le Pôle Image de Franche-Comté propose un temps de concertation et de formation à tous les acteurs de l’éducation à l’image en région : les Rencontres régionales du Pôle.

machinimas, organise des projections publiques et des ateliers d’initiation ou de réalisation, visant à démocratiser une pratique qui transforme un objet de consommation de masse en outil de production de sens.

RENCONTRE AVEC MATHIEU TRICLOT

HUMANITÉS NUMÉRIQUES ET ÉDUCATION À L'IMAGE

JEUX VIDÉO VS CINÉMA

Description de l’expérience vidéo-ludique et étude comparée avec le cinéma.

Mathieu Triclot est maître de conférences en philosophie à l’Université de Technologie de Belfort-Montbéliard et gamer invétéré. Ses recherches portent sur la cybernétique et l’histoire du concept d’information. Il est l’auteur de Le Moment cybernétique : La constitution de la notion d’information (2008) et Philosophie des jeux vidéo (2011). RENCONTRE AVEC ISABELLE ARVERS

LE MACHINIMA

Machinima est un film, de fiction ou documentaire, conçu à partir de l’enregistrement de séquences audiovisuelles, produites lors de parties de jeu vidéo.

LES FILMS :

- I IS AN OVER (2012) - FLOATING MOUNTAINS (2015) - HEROIC MAKERS VS HEROIC LAND (2016)

Isabelle Arvers est auteur, critique et commissaire d’exposition indépendante. Son champ d’investigation est l’immatériel, au travers de la relation entre l’Art, les Jeux Vidéo, Internet et les nouvelles formes d’images liées au réseau et à l’imagerie numérique. Considérant le jeu vidéo comme un nouveau langage et un moyen d’expression pour les artistes, elle s’intéresse aux

RENCONTRE AVEC MICHAEL BOURGATTE

PRÉSENTATION DE “LIGNES DE TEMPS” : Ce logiciel met à profit les possibilités d’analyse et de synthèse offertes par le support numérique. Inspirées par les « timelines » ordinairement utilisées sur les bancs de montage numérique, il propose une représentation graphique d’un film, révélant d’emblée, et in extenso, son découpage. Il offre un accès inédit au film, en substituant à la logique du défilement contraint qui constitue l’expérience du spectateur de cinéma, et pour les besoins de l’analyse, la « cartographie » d’un objet temporel. En sélectionnant un segment d’une ligne de temps, nous avons accès directement au plan ou à la séquence correspondante dans le film qui peut être décrite et analysée par des commentaires textuels, audio, vidéo, ou documentée par des images ou des liens Internet.

Michael Bourgatte est maître de conférences à l’Institut Supérieur de Pédagogie et responsable du Learning Lab de l’Institut Catholique de Paris. Engagé dans le mouvement des Humanités numériques, ses recherches portent sur les usages des nouvelles technologies et l’éducation au numérique. Il a codirigé Quelles Humanités numériques pour l’éducation ? (2016), le numéro 46 de la revue Eduquer/Former (2014) et Le cinéma à l’heure du numérique. Pratiques et publics (2012).


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JUNIOR

AIDE À LA POST-PRODUCTION 8E ÉDITION PROJECTIONS RÉSERVÉES AUX PROFESSIONNELS

Le festival propose avec [films en cours] une aide à la post-production pour les 1er, 2e et 3e films internationaux. Cinq projets en fin de montage image sont présentés. Grâce à la participation des sociétés CinéCim, Cosmodigital, Ike No Koi et Polyson, le lauréat bénéficie des prestations techniques suivantes : • conformation et étalonnage pour un montant de 15 000 euros • finitions sonores (montage son / mixage / bruitage...) pour un montant de 10 000 euros • sous-titrage en anglais ou en français • DCP mastering • un directeur de post production offre également ses compétences et assure le lien entre l’équipe du film et les prestataires partenaires pour le bon déroulement des travaux. LE JURY [FILMS EN COURS] EST COMPOSÉ CETTE ANNÉE DE : Arnaud CHELET, co-gérant d’Ike No Koi Anne DELSETH, programmatrice (Quinzaine des réalisateurs, ZIFF, NIFF, CityClubPully) Pierre HUOT, directeur de post-production Nicolas NAEGELEN, gérant de Polyson Philippe PERROT, gérant de Cosmodigital Julien SAMANI, réalisateur Fabián TERUGGI, responsable du développement de CinévidéoCim

Les professionnels ont accès aux films de la compétition internationale sur festivalscope.com. Les projets [films en cours] sont également consultables.

AVANT LA FIN DE L'ÉTÉ MARYAM GOORMAGHTIGH

DOC. / 80 MIN. / FRANCE, SUISSE / 4A4 PRODUCTIONS ET INTERMEZZO FILMS Après cinq ans d'études à Paris, Arash ne s’est pas fait à la vie française et a décidé de retourner vivre en Iran. Espérant secrètement le faire changer d'avis, ses deux amis, Hossein et Nima, le convainquent de faire un dernier voyage à travers la France. Du Nord au Sud, rencontres, discussions et séances de drague se succèdent et offrent à chacun l’occasion de faire le point.

LA LIBERTÉ

GUILLAUME MASSART DOC. / 150 MIN. / FRANCE / TRIPTYQUE FILMS ET FILMS DE FORCE MAJEURE Environ 130 hommes, condamnés majoritairement pour infraction sexuelle intrafamiliale, sont incarcérés dans le Centre de Détention de Casabianda, en Corse. Ils passent les dernières années de leurs longues peines à travailler sur les 1500 hectares de champs bordés de mer de la seule prison dite "ouverte" de France. Devant le jeune homme à la caméra, quelques-uns décident de briser le quatrième mur.


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STRANGE BUT TRUE (EXTRAÑO PERO VERDADERO) MICHEL LIPKES

FICTION / 97 MIN. / MEXIQUE / PELÍCULAS EXTRAÑAS ET AXOLOTE CINE Un camion poubelle sillonne les rues de Mexico. À son bord, quatre personnes : le « Maestro », chef d’équipe sinistre et brutal, un vieil homme muet, et deux gamins, Jonathan et Yesi, qui font tout pour cacher leur histoire d'amour à leur patron. Tous les jours, ils nettoient ensemble les rues de la ville. Jusqu'à ce qu’ils tombent sur un cadavre…

TIGRE

SILVINA SCHINCER, ULISES PORRA GUARDIOLA FICTION / 91 MIN. / ARGENTINE, FRANCE / PUCARA CINE S.R.L ET FILMS DE FORCE MAJEURE Rina, une bourgeoise de 65 ans, retourne dans sa maison de campagne sur le Delta du Tigre, après 15 ans d’absence. Au milieu de la jungle, de l’humidité et des enfants de l’île, femmes et hommes de toutes générations se confrontent.

WALDEN

BOJENA HORACKOVA FICTION / 105 MIN. / FRANCE, LITUANIE / SEDNA FILMS Après vingt-cinq ans d’exil à Paris, Jana revient à Vilnius. Elle veut retrouver le lac que Paulius, son premier amoureux, appelait « Walden ». Chronique élégiaque de la jeunesse lituanienne d’avant la chute du bloc communiste. Entre premiers émois et marché noir, les rêves de liberté s’incarnent à l’Ouest.


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les visages de la compĂŠtition 2

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1 : Adrien Genoudet, 2 : Francisco Lezama, 3 : Damien Manivel, 4 : Agostina Galvez, 5 : William Biagioli, 6 : Jean Breschand, 7 : Florencia Romano, 8 : Léo Richard, 9 : Bradley Liew, 10 : Antonin Ivanidzé, 11 : Lucia Martinez, 12 : Rachida Brakni, 13 : Wissam Charaf, 14 : Jean-Gabriel Périot

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1 : Patrick Chiha, 2 : Pierre Denoits, 3 : Diana Munteanu, 4 : Laura Henno, 5 : Nicolas Zukerfeld et Malena Solarz, 6 : Kiro Russo, 7 : Wang Yichun, 8 : Aliona Zagurovska, 9 : Gabriel Azorin, 10 : Ted Fendt, 11 : Antoine Danis, 12 : Deborah Stratman, 13 : Rémi Gendarme, 14 : Jérôme Reybaud

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L’ÉQUIPE DU FESTIVAL DÉLÉGUÉE GÉNÉRALE LILI HINSTIN SECRÉTAIRE GÉNÉRALE MICHÈLE DEMANGE ADJOINTE À LA DIRECTION ARTISTIQUE ANNA TARASSACHVILI COORDINATION DE LA COMPÉTITION ET DE [FILMS EN COURS] CÉCILE CADOUX SÉLECTION DE LA COMPÉTITION OFFICIELLE LILI HINSTIN, ARNAUD HÉE, ELENA LÓPEZ RIERA, LAURENCE REYMOND CONSEILLER À LA PROGRAMMATION MATHIEU MACHERET RENCONTRES CINÉMA ET HISTOIRE MARIE FRAPPAT, LAURENT HEYBERGER RELATIONS PRESSE CATHERINE GIRAUD COORDINATION PREMIERES ÉPREUVES ISABELLE DUPERRIER, LUCAS TOTEMS ADMINISTRATION NATHALIE JAVELET, THIERRY CUENAT COMMUNICATION ELSA LANÇON CATALOGUE ET SITE INTERNET ANNA TARASSACHVILI COORDINATION DES RENCONTRES PROFESSIONNELLES CHARLOTTE CORCHÈTE CHARGÉE DES PUBLICS SCOLAIRES MEGI KRALJEVIC ACCUEIL INVITÉS MATHILDE LOMBERGER, ADELE MARÉCHAL, LUCIEN PION, FABRICE BELEY, FRÉDÉRIC MACHIN ACCUEIL PUBLIC LAURA LETANG, HÉLÈNE MONNIN, MARIE JELSCH, VINCENT CAPELLI RÉGIE GÉNÉRALE DELPHINE PUDDU, ANNE GUY, JEAN-MARC MONNOT, BLAISE PETREQUIN RESPONSABLE TECHNIQUE ET RÉGIE DES COPIES DUC TRAN RECHERCHE ET DOCUMENTATION CAROLINE MALEVILLE PROJECTIONNISTES THIERRY MONTHEIL, AURELIE AMIEL, SYLVAIN BICH, CLAIRE LIBORIO SOUS-TITRAGE DUNE - STÉPHANE LAMOUROUX, ALEX PICARDEAU VIDEO MICHEL DE HEUS, OLIVIER MICHEL PRISES DE SON DIDIER PHILIBERT CAPTATIONS VIDEO LUCAS TOTEMS BOUTIQUE DU FESTIVAL NATHALIE PASCAL, ERIKA PETRESKI RÉALISATION DE LA BANDE ANNONCE WILLIAM LABOURY MUSIQUE DE LA BANDE ANNONCE FÉROCES MUSIQUE DE LA BANDE ANNONCE JUNIOR JACQUES, PAIN SURPRISES IDENTITÉ VISUELLE THOMAS HUOT-MARCHAND VISUEL 2016 MEGI KRALJEVIC GRAPHISTE CATALOGUE ET PROGRAMME LÉA MARCHET CONCEPTION ET DESIGN DU SITE INTERNET SÉBASTIEN FAUVEAU GRAPHISTES DÉCLINAISON DES SUPPORTS THIERRY CUENAT, MEGI KRALJEVIC VISUELS URBAINS JULIEN DE CASABIANCA (OUTINGS PROJECT) PHOTOGRAPHE VINCENT COURTOIS AVEC GABRIEL ALMEIDA MARIE MICHALIKOVA, NATACHA SCANDELLA, GAËLLE SCHULLER TRADUCTIONS ANGLAIS NAOMI VOGT JOURNAL ET BLOG DU FESTIVAL ELSA LANÇON, THIERRY CUENAT, AVEC LES RÉDACTEURS JOSIANE BATAILLARD, JÉRÔME BAVEREY, NICOLE CORDIER, SYLVIE COURROY, STÉPHANE DESHAYES, FRANÇOIS FREMIOT, CATHERINE MARLE GUYON, MARIE HOLWECK, LUC MAECHEL, MICHELLE MEGY, CHRISTOPHE OTTELLO, GUILLAUME RIETHER, FABIEN VÉLASQUEZ ET LES ÉTUDIANTES DE L’UNIVERSITÉ DE HAUTE ALSACE AURORE CORDONIN, CONSTANCE DE LA CAFFINIÈRE SYLVIE GORAK, EMELINE INVERNIZZI, SARAH LECARPENTIER DARIA PODMARKOVA, MÉLINDA SALERNE LE PETIT JOURNAL MYRIAM HURÉ (EDITIONS CATALPAS) COMITÉ DE SÉLECTION CONCOURS DE DESSIN ENTREVUES JUNIOR : URBAN SKETCHERS

LE FESTIVAL REMERCIE SES PARTENAIRES : La Région Franche-Comté, le Ministère de la Culture et de la communication, le Centre national du cinéma et de l’image animée, la Direction régionale des Affaires culturelles de Franche-Comté, le Conseil départemental du Territoire de Belfort, La Cinémathèque française, Tandem, le cinéma Pathé Belfort, Ciné +, Les Eurockéennes de Belfort, La Sacem, la fondation Gérard Frot-Coutaz sous l’égide la Fondation de France. / PolySon, CinévidéoCim, Ike No Koi, Cosmodigital, Festival Scope, La Poudrière, l’Espace multimédia Gantner, l’UTBM, l’Ambassade de France au Mexique, La Coopération générale des pays andins, l’Institut Camões, le conservatoire de musique et de danse du pays de Montbéliard, l’Ecole d’art Gérard Jacot, Urban Sketchers, le Centre Pompidou, l’ACID, le GNCR, le Pôle image Franche-Comté, l’Aparr, Gray Art Motel, TWR, Renault, Monoprix, Estimprim, Deya, CIE 3 Chênes, la CMCAS, La CCI du Territoire de Belfort, Belfort tourisme , Optymo, Cezam, l’UHA, Carrefour des festivals / France Culture, Télérama, France Bleu Belfort-Montbéliard, Les Cahiers du cinéma, l’Humanité, L’Est républicain, Novo, Flux 4, Diversions, la Septième obsession, Sens critique. LES HÔTELIERS ET RESTAURATEURS : Atria Novotel, Brit Hôtel Belfort Centre, Les Capucins, Kyriad, Best Western, Hôtel Saint-Christophe, Ibis Budget Belfort, Ibis budget Bavilliers, B&B Hôtel, Grand Hôtel du Tonneau d'Or, L’Escale Belfortaine Christophe Para, Valérie Paillier, Cécile Da Col, Blandine Conchy, Guy Hacquard, Marie Chrétien, Anne-Laure Scatton, Josiane Bataillard, Sabine Richard, Claude de Barros, Estelle Rudloff, Carine Joriot / L’Atelier du Tilleul, Culture Food, les caves du Salbert, Courtepaille, Le Bistroquet, La Pampa, Les Abeilles, La Poste, Marcel & Suzon, Le Rond de Serviette, le restaurant Naka Naka, Au bureau, Flam’s, East 231. LES AYANS-DROITS, DISTRIBUTEURS ET CINÉMATHÈQUES : 20th Century Fox, Les Acacias, Agat Films, Agence du court, Alfama, Anna Sanders Films, Artedis, Association Carole Roussopoulos, BFI National Archive, Capricci, Carlotta, Ciné Sorbonne, Ciné Tamaris, La Cinémathèque française, La Cinematek, La Cinémathèque de Toulouse, Diaphana, ED Distribution, Epicentre Films, Films sans frontières, Gaumont, Gebeka Films, KMBO, Jacques Kebadian, Haut et court, Le Pacte, Les Films du jeudi, Les Films du Losange, Institut Lumière, Light Cone, Lobster, New Story, Park Circus, Le Petit bureau, Potemkine, Pyramide, Rezo Films, Shellac, Sophie Dulac, Sony Pictures, Splendor Films, Swashbuckler Films, Tamasa, Théâtre du temple, UCLA Film & Television Archive, Universal Pictures, Warner. LE FESTIVAL REMERCIE TOUS CEUX QUI ONT CONTRIBUÉ À SON ORGANISATION : Emmanuel Abela, Christian Arbez, Ado Arrietta, Philippe Azoury, Asal Bagheri, Gilles Barthélémy, Lorenzo Bianchi, Jean-Marie Boizeau, Agathe Bonitzer, Gabriel Bortzmeyer, Adrienne Boutang, Serge Bozon, Yann Brolli, Enrico Camporesi, Perrine Cartier, Hervé Castéran, Emilie Luciano Castillo, Emilie Cauquy, Guillaume Chauvigné, Arnaud Chelet, Sophie Cheviron, Maria Chiba, Denis Corréard, Guillaume Dampenon Elise Dansette, Michel David, Demon (Jérémie Mondon), Sébastien Descamps, Anais Desrieux, Marie-Pierre Duhamel, Quentin Dupieux, DJ Dudy, DJ Tata Wellene, Ekoué, Bérangère Elie, Barthélémy, Etievant Hélène, Fleckinger, Aurélia Georges, Denis Gil, Martin Goutte, Eline Grignard, Olivier Hadouchi, Théo Hakola, Hamé, Fabienne Hanclot, Mathilde Henrot, Henri Hoyon, Pierre Huot, Jean-Marc Lalanne, Myriam Huré, Jacques, David Jennings, Jérôme Josselin, Murielle Joudet, Isabelle Julien, Lauriane Jussiau, Benoit Keller, Hélène Kessous, Jean-Marc Lamotte, Emeric de Lastens, Quentin Laurent, Agnès Leblanc, Joachim Lepastier, Samantha Leroy, Mélanie Lhuillery, Stéphane Libs, Sébastien Lifshitz, Martine Locatelli, Sacha Marjanovic, Eva Markovits, Jean-Christophe Meurisse, Clémentine Mourão-Ferreira, Emmanuel Mouret, Nicolas Naegelen, Yousry Nasrallah, João Nicolau, Christelle Oscar, Giacomo Platini, Jonathan Pouthier, Pepper Island (Ayélé et Laurent Griffon), Antonin Peretjatko, Valérie Perrin, Philippe Perrot, Samuel Petit, Alessandro Raja, Pauline de Raymond, Etienne Reynard, Florence Rochefort, Jean-Paul Roland, Thomas Salvador, François Schauber, Philippe Schweyer, Niels Schneider, Gabrielle Sebire, Alain Seid, Daniele Segre Amar, Susan Senk, Claire Simon, Boris Spire, Fabián Teruggi, Patrice Thomas, Amandine Thévenin, Isabelle Truchot, Maxence Tual, Kevin Van Der Meiren, Emmanuel Vincenot, Mighty Worms, Bartlomiej Woznica, Philippe Palisser, Bernard Poly et l’équipe du cinéma Pathé. / Les services de la Ville de Belfort et de la Communauté d'agglomération belfortaine, les étudiants en gestion de projet multimédia de l’université de Haute-Alsace, de L’École d’Art Jacot et tous les bénévoles. ET TOUT PARTICULIÈREMENT : Melvil Poupaud, Chiara Mastroianni, Charles de Meaux, Cynthia Arra, Catia Riccaboni, Léo Hinstin, Ebrahim Golestan, Mitra Faharani, Stéphane Lamouroux, Mehran Tamadon, Philippe-Alain Michaud, Gaël Teicher, Yangqiao Lu, Mehdi Benallal, Adrienne Bavière, Raphaël Pillosio et John Awesome.


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La Sacem, partenaire du cinéma, de l’audiovisuel et de la musique à l’image L’action culturelle de la Sacem contribue : Dans le cadre de son action culturelle, au renouvellement des répertoires, elle encourage la création de musique originale, au soutien des ensembles, festivals et résidences… accompagne des créateurs de musique à l’image, àvalorise l’aide à lalaprofessionnalisation des jeunes musique pour l’audiovisuel danscompositeurs. différentes manifestations.


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Conception : région Bourgogne-Franche-Comté, direction des relations avec les citoyens © Vincent Courtois

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La région soutient le festival Entrevues !

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groupement national des cinémas de recherche

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Le GNCR participe aux journées professionnelles organisées par le Festival EntreVues, continuant de s’inscrire dans une réflexion collective avec l’ensemble des acteurs du cinéma indépendant. Comme le Festival EntreVues, le GNCR apporte son soutien à des œuvres issues de cinématographies novatrices et singulières. Ainsi les salles Art et Essai labellisées Recherche et Découverte affirment chaque jour leur engagement pour découvrir, soutenir, et promouvoir ces films et ces auteurs

Depuis 2005, le GNCR est partenaire du Festival EntreVues, avec la présence de l’un de ses adhérents dans le Jury de la compétition internationale. En parrainant le Grand Prix du long métrage de fiction, le GNCR soutient la diffusion du film en salles, en favorisant sa programmation et son accompagnement par la venue du réalisateur ou d’un critique lors de soirées-débats, par l’édition d’un document sur le film à l’attention des spectateurs ou par la réalisation d’un entretien filmé avec le cinéaste : Rencontre(s).

Le GNCR est un réseau de salles de cinéma en France qui s’engage depuis 1991 dans une action au service d’un cinéma d’auteur exigeant et créatif, en collaboration avec les cinéastes, producteurs, distributeurs et institutions culturelles partageant les mêmes enjeux. Depuis sa fondation, le GNCR a soutenu plus de 550 films, longs métrages, moyens métrages et documentaires, français ou étrangers. groupement national des cinémas de recherche 19, rue frédérick lemaître 75020 paris tel : 01 42 82 94 06 ♦ www.gncr.fr ♦ gncr@gncr.fr

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RÉFUGIÉS LA FAILLITE DE L’EUROPE 3’:HIKOSD=\UXWUZ:?k@f@a@c@k"; leurs souffrances.

Il est du devoir des syndicalistes de se battre pour sauver les emplois et le développement économique et social de nos territoires. ANALYSES ET C’est pour avoir accompli leur devoir de syndicalistes que les 8 de REPORTAGES Goodyear viennent d’être condamnés à 24 mois de prisonPAGE dont 64 9 mois ferme... Ce sont les fondements mêmes de notre démocratie qui sont atteints lorque les libertés sont attaquées. (...)

M 00110 - 216 - F: 1,90 E

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Ils se sont cousu les lèvres et bandé les yeux pour

dénoncer cette C’est le cri de colère de jeunes vidéastes sur le Net. Il s’ajoute aux 800 000 pétitionnaires Europe qui ne veut et aux appels syndicaux pour refuser un texte qui dynamite le Code du travail. La CGT lance un appel avec des personnalités ni voir ni:entendre

NUMÉRO SPÉCIAL

du Code du travail

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Fred Dufour/AFP

N° 501 . 3 AU 9 MARS 2016

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L’HUMANITÉ DIMANCHE

8 MARS : À BOSTON, UN ATELIER POUR L’ ÉGALITÉ SALARIALE

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L’HUMANITÉ DIMANCHE

LOI TRAVAIL : DE LA FAC À L’USINE, ILS DISENT NON Le peuple tunisien entretient le souffle de la liberté

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L’HUMANITÉ

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Le journal qui traite de l’actualité internationale du côté des peuples, des solutions de paix, de solidarité et de co-développement.

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Le journal pour une reconquête populaire et citoyenne de la politique, à la disposition des communistes, des progressistes et de la gauche de transformation sociale.

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L’HUMANITÉ DIMANCHE

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Des pages débats, tribunes, histoire, pour comprendre et transformer la société, ouvertes aux intellectuels, chercheurs, syndicalistes et créateurs.

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CREDITS PHOTOGRAPHIQUE Theo Hakola © Renaud Monfourny Aurélia Georges © Gaia Giani Passage à l’acte © Lightcone Arroseur arrosé © Institut Lumière Dj Dudy © Maëva Schamberger Cinderella © Lobster Great Guns © Lobster Ouija Board © Lobster Felix the Cat © Lobster Le Pré, le ruisseau et le doux visage © Pyramide Apnée © Emanuel Rojas Apnée © Shellac De sortie © Thomas Salvador La loi de la jungle © RECTANGLE PRODUCTIONS, FRANCE 3 CINEMA, ORANGE STUDIO, SCOPE PICTURES, IMAV EDITIONS Regarde, elle a les yeux grand ouvert © Yann Le Masson Albertine © Jacques Kebadian Réponses de femmes © Agnès Varda Elles © Ahmed Lallem La Mort de Louis XIV © Albert Serra Victoria © Ecce films Victoria © Audoin Desforges Le Parc © Shellac Couverture du catalogue et affiche : La Rue rouge de Fritz Lang


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INDEX DES FILMS 1, 2, 3 3 jours...

P.71

A A bout de souffle P.126 Adversaire (L’) P.149 Afters à la poudrière P.53 Aladin et la lampe merveilleuse P.172 Albertine, le souvenir parfumé de Marie Rose P.167 Apnée P.88 Arroseur et arrosé [I, II, III] P.102 Athènes Rhapsodie P.14 Avant la fin de l’été P.176 B Belle dormant Body Double Brique et le miroir (La) Brüder der Nacht

P.42 P.121 P.159 P.15

C Carte blanche à La Cinémathèque française P.166 Cartoons : Tex Avery P.93 Certain Women P.43 Chanson du deuxième étage P.89 Charulata P.145 Chienne (La) P.106 Ciné-concert : « Cendrillon, Félix, Oswald et les autres » P.50 Ciné-conférence de Joachim Lepastier P.136 Ciné-conférence de Mathieu Macheret P.101 Ciné-conférence de Philippe-Alain Michaud P.134 Cinq Pièces faciles P.77 Coffy, la panthère noire de Harlem P.132 Combat d’amour en songe P.64 Concours (Le) P.44 Conférence de Mathieu Macheret P.70 Conte d’été P.62 D De sas en sas De sortie Dear Renzo Déesse (La) Des filles disparaissent Des jours et des nuits dans la forêt Désir (Le) Dernière Maison à gauche (La) Derniers Parisiens (Les) Drôles de créatures E El Invierno llega después del otoño Elles Eros Thérapie E.T l’extra-terrestre F Fais moi plaisir ! Fantôme de l’opéra (Le) Féline (La) de Jacques Tourneur Féline (La) de Paul Schrader Fenêtre sur cour

P.16 P.94 P.28 P.146 P.113 P.148 P.29 P.129 P.45 P.171

P.17 P.167 P.66 P.173

P.90 P.104 P.116 P.117 P.120

Fille de 15 ans (La) Fille du désert (La) Fou d’amour Frankenstein Frankenstein Junior

P.61 P.115 P.69 P.108 P.109

G, H Généalogies d’un crime Grande évasion (La) Grande ville (La) Herbes flottantes Histoire d’herbes flottantes Hollywood de Melvil Poupaud (2006, 12’) I, J Impossible amour (L’ ) Jacky Brown Jardinier et le Petit Espiègle (Le) Joueurs d’échecs (Les) Journal des Faux monnayeurs (Le) Jours de France K King Kong Klute Koropa

P.118 P.133 P.70 P.151 P.73 P.36

L Laurence Anyways La Liberté Loi de la Jungle (La) Lucia Lumières d’été

P.173 P.160 P.29

P.67 P.176 P.92 P.161 P.37

M Madame B, histoire d’une Nord-Coréenne Maison (La) Maison et le monde (La) Mañana vendrá la bala Maso et Miso vont en bateau Master-class : écrire la musique d’un film Melvil Micki et Maude Mirador Mort du roi Louis XIV (La) Mouche (La) Mouche noire (La) N, O Noche Polar (La) Non ma fille tu n’iras pas danser Numéro deux O Estacionamento P Panique tous courts Papesse Jeanne (La) Parc (Le) Parcours jeunes talents Passage à l’acte Pastorale Penn and Teller Get Killed Phantom of The Paradise Pièges Pronobis

P.63 P.114 P.147 P.111 P.110 P.73

P.46 P30 P.152 P.30 P.163 P.51 P.72 P.92 P.31 P.75 P.125 P.124

P.18 P.74 P.127 P.31 P.47 P.39 P.19 P.52 P.135 P.32 P.85 P.105 P.112 P.71

Q Qui es-tu Johnny Mac ? Quinzaine claire

P.71 P.20

R Réel parle pour nous (Le) Regarde elle a les yeux grands ouverts Rémi Réponses de femmes Riches et célèbres Rien que pour vos cheveux Robots Rosière de Pessac (La) Rosière de Pessac 1979 (La) Rue rouge (La) Ruisseau, le pré vert et le doux visage (Le)

P.32 P.164 P.71 P.167 P.119 P.95 P.172 P.130 P.131 P.107 P.48

S S.C.U.M Manifesto S.O.B Saute ma ville Sauvée par Rover (versions 1+3) Shimkent Hôtel Short Stay Singing In Graveyards Source (La) Steak Strange But True

P.163 P.87 P.165 P.103 P.65 P.21 P.22 P.128 P.86 P.177

T The Illinois Parables Tigre Tip Top Tombé du ciel Tonnerres lointains Tous les autres s’appellent Ali Tout ce que le ciel permet

P.23 P.177 P.84 P.38 P.150 P.123 P.122

U Un homme, un vrai Une chante, l’autre pas (L’) Une colline

P.76 P.162 P.33

V Vengeresse (La) Veuves de quinze ans (Les) Victoria Viejo Calavera Vies de Thérèse (Les) Ville des pirates (La) Voleur de Lisbonne (Le)

P.49 P.167 P.69 P.24 P.165 P.60 P.33

W Walden What’s In the Darkness

P.177 P.25


200 LE FESTIVAL EST ORGANISé par la ville de belfort et cinémas d’aujourd’hui Adjointe au Maire, chargée de la Communication et des Grands événements : Delphine Mentré Président de Cinémas d’aujourd’hui : Gilles Lévy Déléguée générale : Lili Hinstin Secrétaire générale : Michèle Demange

LE FESTIVAL reÇoit le soutien de

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