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PLUS DE 15 BIÈRES MAISON

LE PETIT TRAITÉ DE LA

BIÈRE MAISON

PLUS DE 75 RECETTES À BASE DE BIÈRE


Je dédie cet ouvrage à Alain Turpault, brasseur tardivement révélé, pour notre plus grand plaisir…

Attention, l’abus d’alcool est dangereux pour la santé.

© 2017, Éditions Rustica, Paris Dépôt légal : juin 2017 www.rustica.fr


Caroline GuĂŠzille

Photographies de Carine Zurbach


Sommaire Tout savoir sur la bière .......7 Petite histoire de la bière..........................9 Tableau nutritionnel de la bière................. 16 Avant de se lancer.................................. 19

Les 4 bases de la bière ......23 L’eau......................................................24 Le malt..................................................27 Le houblon............................................34 La levure et la fermentation....................38 Les différents types de bières..................43 Comment ça marche ?............................45 Le lexique du brasseur............................46

Les 6 étapes de la fabrication de la bière ..................................49 Première étape : le concassage................50 Deuxième étape : l’empâtage..................52 Troisième étape : le filtrage......................54 Quatrième étape : le houblonnage..........55 Cinquième étape : le levurage.................58 La fermentation.....................................63 Les problèmes de fermentation...............68 Sixième étape : l’embouteillage...............71 La conservation après embouteillage..................................... 75 Les problèmes à l’ouverture des bouteilles..................................... 76 Les kits tout prêts...................................77 Pack débutant........................................78

Le tour des recettes ............... 81 Comment déchiffrer une recette ? ..........82 Exemple : bière belge ambrée..............83 4 / Sommaire

Recettes classiques.................................84 Bière Indian Pale Ale...........................85 Bière ambrée......................................85 Bière Dark Lager.................................86 Bière Stout.........................................86 Bière noire..........................................87 Bière triple rousse...............................87 Bière Bitter ambrée.............................88 Bière blanche......................................89 Bière type trappiste............................89 Recettes aromatisées..............................90 Bière blanche aux framboises..............91 Bière ambrée à la griotte.....................91 Bière anis et coriandre........................92 Bière Ale anglaise caramélisée.............92 Bière au poivre du Sichuan..................93 Pas à pas : on se lance ! Recette de bière Pale Ale.....................94 Une autre recette pas à pas Recette de la bière brune aromatisée aux baies roses et aux zestes d’orange....................... 100 Brasser avec un kit............................... 105 Fabriquer une cuve et un serpentin de refroidissement............................ 108 Anecdotes liées à la bière.......................111

Quelques recettes pure bière................................. 113 Le confit de bière.................................. 114 Confit de bière rousse aux dattes....... 115 Confit de bière blanche   aux pétales de roses...................... 116 Confit de bière blonde   aux éclats de pistaches...................117 Confit de bière brune aux miettes   de marrons glacés......................... 118 Les glaces à la bière.............................. 120


Recette de base................................ 121 Glace à la bière blonde et au foie gras............................... 122 Glace au parmesan........................... 123 Les sorbets à la bière............................ 124 Recette de base................................ 125 Sorbet à la bière brune, au café   et au chocolat............................... 126 La bière de poule.................................. 127 Recette traditionnelle....................... 127 La bière préférée des sorciers............ 128 Parfait glacé à la bière...................... 129 Les bavarois de bière aux fruits............. 130 Bavarois de bière aux myrtilles.......... 131 Les crèmes de bière.............................. 132 Crème de bière au caramel................ 132 Crème de bière au chocolat............... 133 Crème de bière au pralin................... 134 Crème de bière au café...................... 134 Les marinades à la bière....................... 135 Marinade du trappeur...................... 136 Marinade océane.............................. 136 Marinade orientale........................... 137 Marinade sylvestre............................ 137 Les vinaigrettes à la bière...................... 138 Vinaigrette Pompadour..................... 139 Vinaigrette Folle............................... 139 Vinaigrette Dorée............................. 140 Vinaigrette Marie des Isles................ 140 La mayonnaise à la bière....................... 141 Recette de base................................ 141 Les sauces à la bière............................. 142 Sauce Mousseronne.......................... 142 Sauce bière/myrtille.......................... 143 Sauce Manouche.............................. 143

Soufflé bière et maroilles   et sa sauce Léontine...................... 150 Sauce Léontine bière/caramel............ 151 Confit d’oignons à la bière................ 153 Poissons et fruits de mer : Clafoutis de fruits de mer.................. 154 Timbale océane................................ 155 Quenelles de brochet à la bière......... 156 Quiche au crabe............................... 158 Huîtres chaudes au sabayon.............. 159 Truites pochées à la Flamande.......... 161 Moules houblonnes.......................... 162 Viandes : Rôti de porc Flamentin..................... 164 Andouillettes à la bière   et à la moutarde en grains............. 165 Poule au pot à la bière...................... 167 Ragôut irlandais............................... 168 Carbonnade à la bière........................ 169 Lapin sauce serpolette...................... 170 Filet mignon des moines................... 173 Accompagnements et légumes : Spätzles flamands............................. 174 Polenta à la bière............................... 175 Riz pilaf du brasseur......................... 176 Gratin de pommes de terre à la bière.178 Fondue de poireaux à la bière............ 179 Desserts : Crêpes à la bière............................... 180 Clafoutis de reines-claudes   à la bière....................................... 181 La crème brûlée à la bière................. 183 Beignets légers.................................. 184 Gaufres lilloises................................ 185 Gâteau aérien au citron.................... 186 Tarte belge....................................... 187

Les recettes incontournables à la bière ................................... 145

Index................................................... 188

Entrées : Le pâté lorrain.................................. 146 Velouté d’endives à la bière............... 147 Gésiers confits façon brasseur........... 148 Sommaire / 5



Tout savoir sur la BIÈRE Bières d’hier, bières d’aujourd’hui... Bien que cela semble incroyable, cette boisson ne s’est guère transformée au fil des siècles. Les ingrédients d’origine ainsi que la technique de sa maturation restent immuables, conférant à ce breuvage une note d’immortalité. La bière était au départ une base alimentaire permettant aux travailleurs de force de tenir, et sa fabrication était largement réservée aux femmes. C’est ce savoir-faire accessible à toutes et à tous, que nous allons vous expliquer au fil des pages de cet ouvrage.


8 / Introduction


Petite histoire de la bière Les civilisations se définissent en partie par leur alimentation, les moyens de conservation et de cuisson employés témoignant généralement d’un savoirfaire élaboré. Curieusement, la bière échappe un peu à cette évaluation car sa recette, même si elle varie selon les régions en fonction des céréales ou des fruits de base, est immuable. Certes, quelques ajouts aromatiques ou antiseptiques apparaissent ça et là, mais les grandes lignes de la recette restent les mêmes, presque intouchables.

Le « pain liquide » Boisson née il y a plusieurs millénaires, la bière est au départ un concept, celui du « pain liquide », c’est-à-dire l’aliment de base par excellence. Sans doute créé par hasard sous l’effet de la fermentation des céréales dans l’eau, ce breuvage sans cesse amélioré a accompagné l’Homme tout au long de son évolution. Les anecdotes fourmillent, prouvant l’importance de cette boisson passée lentement du brassage familial ou artisanal à la fabrication industrielle. Des tablettes sumériennes datant de plus de 8 000 ans avant Jésus-Christ immorta­lisaient déjà dans l’argile la préparation d’une bière sucrée au miel ou aux dattes pilées. Pour certains historiens, la sédentarisation des nomades a débuté afin de cultiver les céréales indispensables à cette réalisation. À cette époque, la bière est consommée quotidiennement et par toutes les strates de la société sans distinction. Nommée sikaru en Mésopotamie, cette boisson émigre en Égypte avant de traverser la Méditerranée  :  les Espagnols l’appellent ceria et l’adorent, contrairement aux Grecs et aux Romains qui lui préfèrent le vin. Nos ancêtres les Gaulois adoptent à leur tour très vite cette cervisia symbolisant la générosité de Cérès, déesse des moissons, et créent des tonneaux

PETITE LÉGENDE Il existe diverses légendes expliquant la naissance de la bière. Pour les Égyptiens, le dieu Osiris aurait oublié de consommer un mélange d’eau du Nil et d’orge pilée. Sous l’effet de la fermentation naturelle, le vin d’orge ou vin de Péluse (ancienne appellation de la ville de Port-Saïd) ou encore zhytum était né. Les prêtresses sacrées furent ensuite chargées de servir aux dieux des coupelles de bière, et les humains se mirent à raffoler de ce remède miracle considéré comme la panacée universelle. Sur un papyrus datant de 4 000 ans avant Jésus-Christ, un texte vante déjà les bienfaits d’une bière locale !

On ne plaisante pas avec la bière ! Toujours en Égypte ancienne, où la bière est une institution, les mauvais brasseurs proposant une bière trop insipide étaient tout simplement condamnés à être noyés dedans. Quant à ceux qui vendaient de la bière frelatée, ils devaient la boire jusqu’à en mourir ! Petite histoire de la bière / 9


en bois afin de conserver et d’affiner leur cervoise. Cette potion, magique, était aromatisée selon l’imagination du druide du village. La bière de base devait donc être une source nutritive permettant à toute heure d’ingurgiter les calories indispensables à une journée de labeur. Cela explique sans doute pourquoi les Égyptiens bâtisseurs de pyramides étaient payés en litres de bière !

D’innombrables recettes autour du globe Il est fascinant de noter que de nombreuses régions du monde ont développé, depuis l’aube de l’humanité, une bière qui leur est propre à base de céréales locales : millet, épeautre, blé, avoine, orge, riz, seigle, etc. Dans les pays au climat chaud, on con­ somme traditionnellement des bières de dattes, de bananes, d’ananas, de fruits à

10 / Tout savoir sur la bière

Le thym L’ajout de thym dans la bière remonte à fort longtemps et cor­respond autant au besoin de con­ser­ vation qu’à celui de relever son goût. pain mais aussi de racines (ignames, manioc, gingembre…). Selon les zones géographiques, de nombreuses herbes aromatiques furent ajoutées (genièvre, laurier, thym, roma­ rin, hysope, serpolet, etc.), donnant des breuvages personnalisés dont les recettes se transmettaient oralement, de femmes en femmes. En effet, le brassage était à l’époque réservé à la gent féminine. Il existait même dans chaque maison ou ferme un lieu de brassage familial. Ce breuvage est étroitement associé à la figure féminine puisqu’il symbolise la fécondité et est même censé faciliter les montées de lait ! Des bières spécifiques étaient d’ailleurs brassées à la seule intention des nourrices qui en consommaient entre 4 et 5 litres par jour !


La bière, une affaire d’Église Hildegarde de Bingen avait noté dès 1180 que les amateurs de bière échappaient à certaines maladies. Saint Louis, désireux de transformer en panacée ce liquide qui échappe à l’époque à toute logique concernant sa fermentation, permet donc aux femmes par décret, en 1268, de brasser leur propre bière dans le but de passer au travers des inévitables épidémies. Mais celles-ci seront écartées de cette activité par Charlemagne qui la confiera aux moines, sous prétexte d’atteindre une bière de qualité constante mais surtout de financer l’entretien des édifices. Les particuliers souhaitant continuer à brasser pour leur propre consommation durent verser un impôt, le droit de gruyt,

aux religieux. Le gruyt est en fait un mélange d’aromates préparé à l’époque par les apothicaires. La bière, considérée comme de l’eau améliorée, est ainsi sacralisée dans le seul but de créer une nouvelle taxe. Certains moines peu sourcilleux n’hésiteront pas à servir aux

À savoir La preuve que la bière est aussi vieille que le monde ? Enki, dieu sumérien de l’agriculture et des récoltes, arrivé selon les fameuses tablettes d’autres galaxies dans le but de créer Adam et Ève en Mésopotamie, est luimême père de Ninkasi, déesse de la bière. Cette boisson serait-elle donc d’origine extraterrestre ? Petite histoire de la bière / 11


voyageurs de la bière à l’écorce de chêne, ou encore à tenter de soutirer des recettes secrètes lors de confessions ! Au même moment, nos amies anglosaxonnes accrochent la pancarte Ale House au-dessus de leur porte, indiquant ainsi aux pèlerins qu’ils peuvent s’arrêter pour une pause bière. Ces pancartes évolueront en Public House, avant de prendre l’appellation abrégée actuelle de Pub.

L’arrivée du houblon Lors de leurs invasions, les Vikings ont apporté avec eux cette plante qui s’est disséminée dans les campagnes : le houblon prolifère comme du chiendent. Les brasseurs amateurs prennent peu à peu l’habitude de délaisser leurs plantes habituelles à son profit. Mais c’est pendant la Renaissance que les choses évoluent réellement. Les moines généralisent son utilisation réputée apporter la fameuse et indispensable amertume. Jean sans Peur, grand amateur de bière, leur impose d’ailleurs l’usage exclusif du houblon, du malt, de la levure et de l’eau. Le statut des moines brasseurs devient officiel par le code édicté par Charles XIII en 1489, qui détermine une réglementation et

À savoir C’est au XV e siècle que saint Arnoud, évêque de Soissons, réalise que les buveurs de bière échappent davantage au choléra que les buveurs d’eau. Pour en convaincre ses fidè­ les, il trempa sa crosse dans une cuve de brassage, devenant ainsi le saint patron des maîtres-brasseurs.

12 / Tout savoir sur la bière

À noter Le mot bière provient du latin bibere qui signifie boire. Dans de nombreuses contrées, il était préférable de consommer cette boisson assimilée au pain plutôt que l’eau, jugée insipide et sans valeur nutritionnelle. Aujourd’hui, l’eau est dans certains pays plus chère que la bière. des prix stricts. La cervoise devient ainsi la bière ; cette appellation justifiant également l’apparition de certaines nouvelles taxes. Le fait qu’elle soit réalisée par des religieux lui confère en outre un aspect médicinal.

La croix des moines brasseurs Bien que semblable, il ne s’agit pas de la croix de David ! Elle représente les quatre éléments, la terre, l’air, l’eau et le feu, tous impliqués dans la fabrication de la bière. On peut y ajouter la germination, la saccharification et la fermentation, trois grandes étapes du brassage. Cette croix fleurit rapidement sur les monastères et tavernes offrant de la bière. D’apparence anodine, elle représente en fait une véritable amulette visant à contrecarrer les forces obscures qui pourraient faire tourner la bière ou compromettre sa fabrication.

Bière ou vin ? Peu après le Moyen Âge, les régions en plein développement agricole se scindèrent en deux tendances : bière ou vin. Ces choix ne correspondaient pas forcément à des goûts alimentaires mais répondaient plutôt à des impératifs de culture, le houblon étant une



48 / Introduction


Les 6 étapes de la fabrication de la BIÈRE

Ce chapitre décrit e n détail les 4 éléments indispensables à la réalisation Nousdeavons évoqué les 4 éléments qui constituent la bière. la bière que sont l’eau, Nousleallons à présent passer en revue les 6 étapes de sa fabrimalt, le houblon et la cation : le concassage, l’empâtage, la filtration, le houblonnage, levure. le levurage et l’embouteillage.

Introduction / 49


Première étape : le concassage Le but du concassage est de permettre les réactions diastasiques, c’est-à-dire de modifier l’amidon et les protéines contenus dans chaque grain. Cette étape est évidemment inutile si vous avez acheté un malt déjà concassé chez votre fournisseur.

Il s’agit tout simplement de concasser le malt, c’est-à-dire l’orge (ou toute autre céréale) qui a germé et dont on a supprimé les germes. En effet, il est indispensable que l’amidon présent dans les grains puisse se libérer et se dissoudre dans l’eau. Pour cela, il faut briser l’écorce et éclater le grain. Le malt doit être broyé uniformément, et garder une mouture suffisamment grosse pour être brassé et filtré ; en faire de la farine le rendrait inutilisable. En théorie une mouture de 4 à 5 mm d’épaisseur, soit 3 à 4 morceaux par grain, est parfaite. Toute-

À savoir La floconneuse est un appareil qui écrase les grains de façon régulière entre 2 rouleaux.

fois, vous aurez obligatoirement une partie de poudre, certains grains plus secs que d’autres s’écrasant lors du concassage. Plusieurs possibilités s’offrent à vous pour le concassage :

•  le moulin à céréales : c’est bien entendu

le moyen idéal, mais peu d’entre nous en possèdent dans leur cuisine ! N’hésitez pas à flâner dans les brocantes et autres vide-greniers pour en trouver un. Autre-

Important II faut compter 45 minutes à 1 heure pour réaliser le concassage.

À savoir Il est possible de concasser son malt à l’avance. Dans ce cas, il faut le conserver au sec dans une boîte ou un sachet fermés, le malt craignant énormément l’humidité. 50 / Les 6 étapes de la fabrication de la bière


ment, le site Internet tompress.com vend par correspondance une floconneuse pour une cinquantaine d’euros environ, un bon investissement si vous souhaitez brasser régulièrement ;

•  le mixeur électrique : là encore, cela fonc-

•  le moulin à café : c’est une bonne alterna-

•  le rouleau à pâtisserie : vous pouvez enfer-

tive, mais il faut vraiment veiller à avoir un équilibre entre les grains puisqu’on doit les mouliner par série ;

tionne bien. Je vous conseille toutefois de traiter peu de grains à chaque fois, sinon ceux du dessous seront réduits en poudre et ceux du dessus resteront entiers… mer vos grains dans un torchon et les écraser au rouleau à pâtisserie.

Le concassage / 51


Deuxième étape : l’empâtage Comme le nom de l’étape l’indique, vous allez réaliser une pâte en mélangeant les céréales et l’eau. Par extension, ce terme désigne l’action de chauffer la maische. Son but est de modifier l’amidon en le transformant en sucres simples, digérables par les levures.

Les explications qui suivent sont un peu techniques mais indispensables pour bien comprendre l’importance des températures et de ce qu’elles génèrent. L’empâtage se fait à chaud. Sous l’effet de la chaleur, une réaction chimique s’opère et les enzymes présents dans l’amidon, les enzymes protéiniques, les alpha et les bêta-amylases, agissent et le transforment : c’est le palier de saccharification. Les enzymes protéiniques ne s’activent qu’en­ tre 45 et 55 °C, les bêta-amylases entre 63 et 65 °C et les alpha-amylases entre 70 et 75 °C. Il faut impérativement atteindre et maintenir ces températures. Les enzymes protéiniques vont transformer les protéines complexes du malt en protéines simples et assimilables par les levures : c’est le palier protéinique, également appelé relais d’albumine. Ces protéines serviront de nourriture de base aux levures. Les alpha-amylases transforment l’amidon en dextrine. Ce sucre non fermentescible donnera son corps à la bière. Les bêta-amylases, elles, transforment l’amidon en maltose et dextrose, deux sucres fermentescibles qui deviendront de l’alcool sous l’effet de la fermentation. Il existe deux techniques pour opérer cette transformation, l’allemande dite du monopalier et la belge dite des multipaliers : 52 / Les 6 étapes de la fabrication de la bière

•  la

première, très simple, consiste à atteindre la température de 68 °C et de la maintenir durant 1 h : c’est le principe de l’infusion. Elle permet aux deux enzymes d’agir ensemble. Au bout d’une heure, il faut passer à 77 ou 78 °C pendant 10 mi­ nutes. Le but est de tuer les enzymes afin qu’ils cessent leur action, on appelle ça le mash out.

•  la

seconde se compose de plusieurs paliers : un premier entre 63 et 65 °C durant 30 min, puis un second entre 68 et 75 °C les 30 min suivantes. On finit aussi à 78 °C (mash out) pour encore 10 min : c’est le principe de la décoction. Elle joue sur les effets de chaque enzyme et permet d’optimiser la mutation de l’amidon en sucres.

À noter Plus il y a de malt par rapport au volume d’eau, plus la bière sera alcoolisée.

À noter On nomme maische, maîsche ou encore maïsche l’eau mélangée au malt concassé. Ce liquide devient le moût après le filtrage tandis que les résidus de celui-ci sont les drêches.


Test de l’amidon Afin de savoir si votre amidon s’est entièrement transformé en sucres, il existe un test simple. Prélevez une cuillerée à soupe de maische et mélangez-la avec quelques gouttes d’iode. Si cela vire au rouge, c’est parfait, si cela devient bleu-violet, c’est qu’il reste de l’amidon. Poursuivez votre saccharification en réitérant le test. La teinture d’iode se trouve en pharmacie pour un prix modique de 2 euros la fiole, de quoi tester toute une vie de brassins !

IMPORTANT Il est impératif de vous munir d’un thermomètre de cuisine pour gérer minutieusement la chaleur. Comptez 2 heures pour cette étape d’empâtage, les changements de température prennent du temps. Veillez à tourner régulièrement votre maische sinon les grains accrocheront dans le fond et risqueront de caraméliser.

Je vous conseille de vous en tenir à la première technique pour débuter.

Le ratio d’empâtage Il s’agit du volume d’eau par rapport au volume de malt. On part généralement sur un ratio de 2,5 à 3,5 l d’eau par kilogramme de malt pour une bière blonde et de 2 l d’eau par kilogramme de malt pour une bière brune. Sachez que vous utiliserez plus d’eau qu’il ne vous restera de liquide. Un peu moins d’1/3 va se perdre dans l’évaporation et durant le filtrage. On compte 10 % d’évaporation par heure et une perte de liquide équivalente au poids des drêches retenues lors du filtrage.

L’empâtage / 53



Le TOUR des RECETTES Ce chapitre décrit e n Les bières ne se limitent pas à des bocks bien frais, faits pour détail les 4 éléments indis­ étancher petites et grandes soifs, elles se prêtent également à pensables à la réali­ sation bien des recettes, déclinées en délices sucrés, fruités, épicés… de la bière que sont l’eau, N’hésitez pas à innover, voire à créer vos propres bières. le malt, le houblon et la levure.


Recettes classiques Les recettes qui suivent sont les plus courantes et vont vous familiariser avec les différents malts. Vous allez vite vous familiariser avec les malts en constatant que ce sont souvent les mêmes accords qui reviennent. Il en est de même pour les houblons, les variétés East Kent Gol­ ding, Hallertau Perle et Saaz étant les plus récurrentes. Lorsque le temps en bouteille est stipulé, c’est qu’il faut boire la bière au terme de cette durée !

84 / Le tour des recettes

Important Sauf précision « en cônes », le hou­ blon utilisé doit être conditionné en pellets.


Bière Indian Pale Ale

Bière ambrée

C’était la bière traditionnelle des An­ glais vivant en Inde au XVIII e siècle. Dans certains endroits, cette boisson symbolise encore la colonisation.

Délicatement caramélisée, son petit goût si particulier la rend incontour­ nable...

Caractéristique : bière de fermentation basse Densité initiale : 1 074 Densité finale : 1 022 Taux d’alcool : 7,4 % Amertume : non renseignée Couleur : non renseignée

Caractéristique : bière de fermentation basse Densité initiale : 1 053 Densité finale : 1 016 Taux d’alcool : 5,4 % Amertume : non renseignée Couleur : non renseignée Ingrédients :

Ingrédients : • Malt Pils 3,5 EBC 7 kg • Malt ambré 60 EBC 60 g • Malt Cara-Red 40 EBC 300 g • Houblon en cônes East Kent Golding 80 g/ébullition 1 h 15. Récupérez les cônes et faites une rapide décoction durant 1 min à la fin • Levure Sabfrew S-33 Eau pour empâtage : 26 l Eau pour rinçage des drêches : 16 l Température d’empâtage : 30 min à 50 °C 1 h à 65 °C 15 min à 67 °C Fermentation primaire : 15 jours à 20 °C Fermentation secondaire : aucune

• Malt Pils 3,5 EBC 5,5 kg • Malt ambré 60 EBC 60,5 kg • Houblon Hallertau Perle 15 g et East Kent Golding 20 g/ébullition 1 h 15

• Houblon East Kent Golding 20 g et Saaz en cônes/ébullition 10 min

• Levure Sabfrew S-33

Eau pour empâtage : 25 l Eau pour rinçage des drêches : 16 l Température d’empâtage : 30 min à 50 °C 1 h 30 à 68 °C Fermentation primaire : 2 semaines à 17-20 °C Fermentation secondaire : aucune Garde : 3 semaines à 6-12 °C

Garde : aucune

Recettes classiques / 85


Une autre recette pas à pas Nous allons maintenant réaliser une bière brune multipaliers, parfumée aux baies roses et aux zestes d’orange. Vous aurez ainsi expérimenté les recettes mono et multipaliers, bases de toute bière, qu’elle soit blanche, blonde, rousse ou brune. Vous serez donc apte à affronter n’importe quelle recette et à vous lancer dans vos propres créations. Ici les doses sont pour un grand brassin de 28 l, mais vous pouvez aussi bien diviser les ingrédients par 2. Souvenez-vous, le brassage reste une donnée de base que vous pouvez toujours adapter selon votre matériel et vos ingrédients.

Recette de la bière brune aromatisée aux baies roses et aux zestes d’orange Caractéristique : bière de fermentation basse Densité initiale : 1 102 Densité finale : 1 020 Taux d’alcool : 10,8 % Amertume : 48 IBU Couleur : 33 EBC

Précision On veut obtenir environ 28 l de bière. Lors des deux premières heures de cuisson (phase empâ­ tage), 5,6 l (2 x 10 %) vont s’évapo­ rer. Lors du filtrage, on perdra en eau le poids des drêches, soit près de 11 kg. Il reste donc 11,4 l. En rin­ çant avec 22 l, on ramène le volume à 33,4 l. L’évaporation lors du hou­ blonnage qui dure ici 1 h 30 sera de l’ordre de 10 %/h soit 5 l : on arrive donc à 28,4 l à terme.

Temps de brassage : 7 h environ Temps de cuisson : • empâtage : 45 min à 53 °C 45 min à 63 °C 1 h 15 à 66-67 °C • houblonnage : 1 h 30 à ébullition Fermentation primaire : 3 jours à 16-18 °C Fermentation secondaire : 20 jours 16 °C Garde : 16 jours à 2-9 °C

100 / Le tour des recettes

Volume de bière souhaité : 28 l Volume du brassin initial : 28,4 l Volume d’eau de rinçage : 22 l Ingrédients : • Malt Pale Bio 5 EBC 9 kg • Malt Cara Belge 30/40 EBC 450 g • Malt Biscuit 50 EBC 1 kg • Malt Cara Spécial B 350 EBC 450 g • Malt torréfié 1 400 EBC 200 g • 1 kg de sucre candi brun/ébullition 15 min • 500 g de sucre blanc/ébullition 15 min


• Baies roses concassées 10 g/ébullition

10 min • Zestes d’orange • Houblon Northen Brewer cônes 100 g/ébullition 1 h 30 • Houblon Fuggles 60 g/ébullition 10 min • Levure sèche Sabfrew T-58 Matériel

• 1 grande marmite d’un volume de 35 l (ou un couscoussier)

• 1 autre grand récipient (seau, marmite) pour le filtrage

• 1 passoire (ou le haut du couscoussier) • 1 torchon propre • 1cuillère en bois • 1 louche • 1 mousseline, un bas ou une chaussette pour les cônes de houblon

• 1 bol • 1 tuyau pour siphonner • 1 thermomètre digital de cuisine • 1 densimètre • 1 produit stérilisant ou désinfectant usuel • 2 cuves (30 l) pour la fermentation, équipées de robinets (seaux alimentaires avec couvercle, touries, dame-jeanne) avec bouchon et barboteur adaptés

1) L’empâtage

(1 h à 78 °C) Faites chauffer 18 l d’eau dans une grande marmite. Vérifiez la température à l’aide du thermomètre. Lorsqu’elle atteint 50 °C, incorporez progressivement vos 5 malts et remuez avec une cuillère en bois : vous obte­ nez la maische. À ce moment, la température redescend. Vous devez la faire remonter à 53 °C et la maintenir ainsi en vérifiant souvent avec le thermomètre. Remuez régulièrement afin que les grains n’attachent pas au fond. Au bout de 45 min, passez à 63 °C pour 45 min, puis enfin à 66-67  °C pendant 1 h 15. À la fin de cette période, faites chauffer 22 l d’eau.

2) Le filtrage

(10 min environ) Posez la passoire sur un grand récipient pou­ vant contenir 35 l. Recouvrez-la d’un torchon et versez douce­ ment la maische à travers. Vous pouvez le faire avec une louche ou encore une casse­ role de taille moyenne. La drêche reste dans le torchon, formant le gâteau. La maische devient de plus en plus épaisse au fond de la marmite puisque les grains compacts s’y accumulent. Lorsque tout est passé, rincez lentement avec l’eau à 78 °C à l’aide d’une louche. Répartissez-la uniformé­ ment afin que le gâteau soit filtré sur tous ses côtés.

3) Le houblonnage

(1 h 30 à ébullition) Transvasez le liquide qui s’appelle à présent le moût dans la grande marmite et portez-le à ébullition. Dès que celle-ci débute, incorpo­ rez les 100 g de cônes de houblon Northen Brewer enfermés dans une mousseline ou un bas. Très rapidement, la mousse se liquéfie. Poursuivez tranquillement l’ébullition en remuant de temps en temps. Quinze minutes avant la fin, ajoutez le sucre candi brun et le sucre blanc. Cinq minutes après, introduisez les pellets aromatisants Fuggles. Retirez la mousseline contenant les cônes lorsque vous éteignez le feu. À présent, effectuez le whirlpool : à l’aide de la cuillère en bois, opérez un mouvement cir­ culaire dans le brassin en tournant jusqu’à ce que le liquide crée le mouvement de luimême. La force centrifuge va propulser les résidus au centre de la cuve.

4) Le refroidissement

(de 35 min à 1 h) Plusieurs solutions s’offrent à vous : un pas­ sage de la marmite dans la baignoire sur un lit de glaçons avec jet d’eau froide sur les bords ; l’immersion de la marmite dans un Une autre recette pas à pas / 101


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contenant d’eau glacée ; le fameux refroidis­ seur en tubes de cuivre (voir page 57)… Sachez que certains se contentent de fermer la marmite avec un couvercle, créant un vase clos et stérile, et attendent tranquillement que la température chute entre 27 et 30 °C. Mesurez à présent la densité de votre moût en en prélevant une petite dose à l’aide de la louche et en la versant dans l’éprouvette, éventuellement en vous aidant d’un petit entonnoir. Inutile de le désinfecter car vous jetterez ensuite le moût pour ne pas conta­ miner le brassin. Notez soigneusement cette densité qui est censée être proche de 1 102.

Le transfert

Transvasez ensuite votre moût dans une cuve de fermentation en le siphonnant avec le tuyau. Vous pouvez plonger celui-ci 10 min auparavant dans le moût encore bouillant afin de le stériliser. Prenez garde à bien laisser un fond dans la marmite qui vous évite ainsi de transvaser aussi les résidus.

5) Le levurage

Si vous n’employez pas de levain, réhydratez simplement votre levure. Versez-la dans un bol stérilisé et délayez-la dans 10 fois son volume de moût. Celui-ci ne doit pas excéder 30 °C puisqu’il s’agit d’une levure à fermen­ tation haute. Laissez-la reposer 15 min en remuant de temps en temps : elle va former une crème onctueuse. Incorporez-la au moût et remuez avec la cuillère pour bien la répar­ tir. Vous pouvez fermer hermétiquement votre cuve et adapter le barboteur. Gardez-la en fermentation primaire 3 jours à 16-18 °C.

Fermentation secondaire

Au bout de ces 3 jours, transvasez le moût dans la seconde cuve à l’aide du siphon ou du robinet en laissant un fond pour éviter de brasser les résidus. Incorporez le zeste

d’orange et les baies roses dans le moût. Fer­ mez hermétiquement, placez le barboteur et gardez 20 jours à 16 °C.

La garde

Au bout de 20 jours, placez votre cuve dans un endroit où il fait entre 2 et 9 °C pour 16 autres jours. À la fin de cette garde, vous devez vérifier votre densité finale qui doit s’approcher de 1 020. Je vous conseille de la vérifier deux fois à 24 h d’intervalle. Elle doit être stable pour pouvoir être embouteillée, sinon vous risquez l’apparition d’un geyser à l’ouver­ ture des bouteilles.

6) L’embouteillage

Rincez abondamment vos bouteilles et stéri­ lisez-les en les faisant bouillir une dizaine de minutes, ou bien immergez-les dans un bain de désinfectant sans rinçage.

Le sucrage

Il faut sucrer le moût avant d’embouteiller afin que la dernière action des levures génère du gaz carbonique, donc de la mousse. La base est de 5 g/l, soit 75 g. Choisissez l’ingrédient qui vous convient le mieux : sucre blanc, roux, cassonade, ver­ geoise, miel… et faites-le fondre dans 1 l d’eau préalablement bouillie durant une dizaine de minutes pour la stériliser. Laissez refroidir avant d’introduire dans le moût et remuez doucement afin de bien répartir le mélange.

Mise en bouteille

Si vous possédez une tige de remplissage, insérez le côté prévu dans le robinet et faites entrer l’autre extrémité dans chaque bou­ teille. Le liquide s’arrêtera de couler lorsque vous changerez la bouteille, sans ouvrir ni refermer le robinet. Laissez les goulots vides afin de garantir une réserve d’oxygène aux Une autre recette pas à pas / 103


Le confit de bière Souvent assimilé à de la confiture, il s’agit en réalité d’une gelée puisque de la géla­ tine alimentaire entre dans sa composition. Toutes les bières se déclinent en confit, et peuvent agréablement être tartinées en toasts, seules, avec des rillettes, du foie gras, du gibier, du pain, des crêpes, des gaufres… Vous pouvez jouer sur les différentes saveurs des bières, de la plus légère à la plus forte, pour harmoniser ces confits avec les plats qu’ils accompagnent. Les bières blondes donnent au confit un goût de miel, les très brunes, un petit goût de réglisse. L’amertume des bières blanches, contrebalancée par le sucre, offre une saveur intéressante. Quant aux bières rousses, elles donnent des confits subtilement caramélisés. Les recettes suivantes vous présentent des associations surprenantes. Bien entendu,

114 / Quelques recettes pure bière

Attention La bière que l’on fait chauffer et bouil­lir mousse souvent énormément. Prévoyez toujours une marmite plus grande que le volume des ingrédients.

tous les accords sont permis, à vous de trouver les vôtres. Vous pouvez également réaliser ces confits natures, sans rien y ajouter. Toutes ces recettes sont données pour 4 pots de 250 à 300 g. Les mesures peuvent évidemment varier d’une préparation à l’autre.


Confit de bière rousse aux dattes Une saveur caramélisée rehaussée par le goût des dattes : l’accompagnement idéal d’un belle tranche de foie gras !

Temps de préparation : 15 min Temps de cuisson : 30 min

Ingrédients pour 4 pots

• 80 cl de bière rousse • 200 g de dattes dénoyautées • Le jus d’un citron • 300 g de cassonade • 4 feuilles de gélatine ou 2 sachets d’agar-agar

1) Mixez finement au blender les dattes avec un verre de bière (5 cl) prélevé sur les 80 cl. Vous obtenez une pâte épaisse : diluez-la dans le reste de la bière. 2) Mettez le tout à chauffer jusqu’à ébullition dans une grande marmite avec le jus de citron et la cassonade. Remuez régulièrement afin que cela n’attache pas. 3) Trempez les feuilles de gélatine dans de l’eau tiède pour les faire ramollir ou délayez l’agar-agar dans un peu d’eau froide. Incorporez l’un ou l’autre au mélange précédent. 4) Maintenez l’ébullition 20 min en tournant. 5) Stérilisez vos bocaux en les ébouillantant. Remplissez-les et fermez aussitôt. Ce confit se conserve 2 à 3 ans.

Variante Vous pouvez réaliser la même recette avec des abricots secs à la place des dattes.

Le confit de bière / 115


Bières blondes, blanches, brunes ou rousses, apprenez à brasser votre propre breuvage en adoptant ce savoir-faire connu depuis la nuit des temps. Dans ce livre, vous découvrirez également des recettes sucrées et salées gourmandes, réalisées à partir de bière. Bavarois de bière aux fruits rouges, bière de poule ou encore la mythique carbonnade flamande… Par quel mets allez-vous vous laisser tenter ? Toutes les techniques et astuces de base en pas à pas pour brasser, améliorer et cuisiner vos bières ainsi que toutes les recettes pour apprendre, épater et régaler vos proches se trouvent dans cet ouvrage ! Caroline Guézille a déjà écrit plusieurs livres de cuisine pour les éditions Rustica (Le petit traité Rustica des fromages maison, Le petit traité Rustica des produits séchés…) et est reconnue pour son excellente connaissance de la cuisine tradition et de terroir.

www.rustica.fr

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