The FIFA Weekly Edition #13

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N° 13, 17 JANVIER 2014

ÉDITION FR ANÇAISE

Fédération Internationale de Football Association – depuis 1904

BLATTER “LE BOYCOTT N'EST PAS LA BONNE RÉPONSE”

HITZFELD PRÊT POUR UN DERNIER GRAND MOMENT

SEEDORF NOUVEL ESPOIR POUR MILAN

Cristiano Ronaldo

Et maintenant ?

W W W.FIFA.COM/ THEWEEKLY


DANS CE NUMÉRO

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Ronaldo et le Ballon d’Or Cristiano Ronaldo dos Santos Aveiro, véritable machine à buts d’une fiabilité à toute épreuve sur le terrain, a dévoilé son côté humain sur la scène du Palais des Congrès de Zurich. Le Ballon d’Or a ainsi réussi quelque chose dont les adversaires de Ronaldo rêvaient ces derniers mois : il l’a décontenancé, laissé sans voix et lui arraché des larmes. Et maintenant ? The FIFA Weekly dresse le portrait d’un footballeur pratiquement inaccessible.

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Les meilleurs numéros dix Pelé, Maradona ou Baggio ? Notre rubrique le Top 11 vous présente les meilleurs numéros dix de l’histoire.

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Sepp Blatter : “Le boycott n’est pas la bonne réponse” En marge des enjeux sportifs, les Jeux Olympiques d’hiver de Sotchi suscitent de nombreux débats. Plusieurs hommes politiques ont brandi la menace d’un boycott. Pour le Président de la FIFA, cette réponse n’est pas la bonne.

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L’Angleterre revoit sa copie Jusqu’à présent, l’Angleterre s’était toujours distinguée par ses grandes ambitions à l’approche de la Coupe du Monde. Aujourd’hui, les Anglais ont adopté une attitude beaucoup plus modeste, le sélectionneur Roy Hodgson en tête.

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D estins croisés à Milan et Londres Confronté à une situation sportive alarmante, l’AC Milan a réagi en confiant le poste d’entraîneur au Néerlandais Clarence Seedorf. En Angleterre, un club résiste à la tendance actuelle : Arsène Wenger est présent sur le banc de touche d’Arsenal depuis 17 ans.

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Amérique du Nord et centrale 35 membres www.concacaf.com

Paul Gascoigne Fausses notes devant le micro

Ottmar Hitzfeld – l’interview Il compte deux Ligues des Champions et sept titres de champion d’Allemagne à son palmarès. Il figure parmi les entraîneurs les plus titrés du football allemand. Dans un entretien accordé à The FIFA Weekly, le sélectionneur se penche sur son passé… et se tourne vers l’avenir. C rime musical Tous les footballeurs ne sont pas faits pour chanter. Cette remarque vaut (notamment) pour Paul Gascoigne. Malgré son immense talent balle au pied, l’ancien international anglais se révèle moins brillant quand on le place devant un micro.

Amérique du Sud 10 membres www.conmebol.com

Roy Hodgson L’Angleterre à l’école de la modestie

Arbitres CONCACAF

Arbitres CONMEBOL

Joel Antonio Aguilar Chicas (SLV) Mark W Geiger (USA) Marc Antonio Rodriguez Moreno (MEX)

Enrique Roberto Osses Zencovich (CHI) Nestor Fabian Pitana (ARG) Wilmar Alexander Roldan Perez (COL) Sandro Meira Ricci (BRA) Carlos Alfredo Vera Rodriguez (ECU)

D e la défense à l’expertise financière Éloigné des terrains pendant neuf mois, l’ancien défenseur de Tottenham Ramon Vega a dû réfléchir à son avenir. Que faire après le football ? Quelques années plus tard, le Suisse s’est lancé avec bonheur dans la gestion de patrimoine.

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L A SEMAINE DANS LE MONDE DU FOOTBALL

Europe 53 membres www.uefa.com

Afrique 54 membres www.cafonline.com

Asie 46 membres www.the-afc.com

Océanie 11 membres www.oceaniafootball.com

Arsène Wenger Incontournable depuis 17 ans sur le banc d’Arsenal Ramon Vega Une fracture de la cheville a marqué un tournant dans sa vie N° 13, 17 JANVIER 2014

ÉDITION FR ANÇAISE

Fédération Internationale de Football Association – depuis 1904

BLATTER “LE BOYCOTT N'EST PAS LA BONNE RÉPONSE”

HITZFELD PRÊT POUR UN DERNIER GRAND MOMENT

SEEDORF NOUVEL ESPOIR POUR MILAN

Cristiano Ronaldo

Et maintenant ?

Sepp Blatter Contre le boycott des événements sportifs

W W W.FIFA.COM/ THEWEEKLY

Et maintenant ? Lundi dernier, Cristiano Ronaldo a été sacré joueur de l’année. Poursuivra-t-il sur le chemin de la consécration l’été prochain au Brésil avec l’équipe du Portugal ? La photo de couverture montre Ronaldo avant la remise du prix à Zurich.

Ottmar Hitzfeld L’interview

Cover: Alexander Hassenstein Inhalt: Getty Images

Clarence Seedorf commence une carrière d’entraîneur à Milan

Arbitres UEFA

Arbitres CAF

Arbitres AFC

Arbitre OFC

Felix Brych (GER) Cüneyt Cakir (TUR) Jonas Eriksson (SWE) Bjorn Kuipers (NED) Milorad Mazic (SRB) Pedro Oliveira Aleves Garcia (POR) Nicola Rizzoli (ITA) Carlos Velasco Carballo (ESP) Howard Melton Webb (ENG) Svein Oddvar Moen (NOR)

Noumandiez Desire Doue (CIV) Bakary Papa Gassama (GAM) Djamel Haimoudi (ALG)

Ravshan Irmatov (UZB) Yuichi Nishimura (JPN) Nawaf Abdulla Ghayyath Shukralla (BHR) Benjamin Jon Williams (AUS)

Peter O’Leary (NZL)

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À DÉCOUVERT

Inestimable !

Cristiano Junior, le fils de Ronaldo, écarquille les yeux comme s’il venait de recevoir son cadeau d’anniversaire.

Alexander Hassenstein

Thomas Renggli Selon le proverbe, tout ce qui brille n’est pas or. Le FIFA Ballon d’Or est constitué d’un alliage de cuivre (doré). Mais sa valeur dépasse celle de l’or. La réaction de Cristiano Ronaldo lundi dernier donne une idée de la dimension émotionnelle du prix, même pour un joueur qui gagne 17 millions d’euros par saison avec son club et en perçoit 6 autres uniquement grâce à son sponsor. Cristiano Ronaldo dos Santos Aveiro, véritable machine à buts d’une fiabilité à toute épreuve sur le terrain, a dévoilé son côté ­humain sur la scène du Palais des Congrès de Zurich. Un ramasse-poussière en cuivre brillant a ainsi réussi quelque chose dont les adversaires de Ronaldo rêvaient ces derniers mois : il l’a décontenancé et l’a laissé sans voix. La vague d’émotions qui a envahi le virtuose portugais s’explique peut-être par les antécédents du Ballon d’Or. Ronaldo est resté dans l’ombre de Lionel Messi pendant quatre ans. Il est venu trois fois à Zurich pour terminer deuxième.

Alors que Ribéry et Messi sont restés i­mpassibles à l’annonce du verdict, les médias ont réagi au sacre du Portugais avec un mélange de stupéfaction et d’incrédulité. En Allemagne, on a pris ombrage de la troisième place du Français du Bayern, tandis qu’en Argentine et en Catalogne, l’attaquant du Barça a été élevé au rang de martyr. De nombreux experts y ont été de leur critique, ignorant au passage que le Ballon d’Or est élu par un jury indépendant. Les vives discussions au sujet de la remise de la récompense individuelle la plus importante du football s’expliquent par son prestige et son aura financière. La remise de la récompense la plus convoitée de la planète football n’avait jamais suscité un tel engouement médiatique : le Gala a été retransmis en direct dans 180 pays. Parallèlement, la cérémonie a suscité un nombre de commentaires record sur Twitter et Facebook. Le Ballon d’Or justifie tous les superlatifs. Depuis lundi, le Real Madrid peut se targuer de compter dans ses rangs le meilleur joueur du monde et plus uniquement l’ennemi juré de Barcelone. Par ailleurs, lors de ses prochaines T H E F I FA W E E K LY

négociations, Ronaldo pourra avancer le fait qu’il est officiellement le numéro 1, ce qui pourrait lui rapporter l’un ou l’autre million supplémentaire. Dans cinq mois au Brésil, le Portugais devra à nouveau prouver qu’il est bien, sans conteste, le numéro un mondial. Å

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CRISTIANO RONALDO

RECONNAISSANCE Le meilleur a gagné. Durant la cérémonie du Ballon d’Or, Cristiano Ronaldo a tout de même été vaincu… par ses ­émotions. L’attaquant portugais serait-il devenu plus tendre ? Bien au contraire. Perikles Monioudis se penche sur le cas du Madrilène.

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Fabrice Cottrini / AFP

CRISTIANO RONALDO

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CRISTIANO RONALDO

La rapidité des sprints et des enchaînements de Ronaldo est de celles dont on fait les légendes.

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auréat du Ballon d’Or, Ronaldo est bien le meilleur joueur de l’année écoulée. Ce constat laisse peu de place à l’argumentation, car le joueur du Real Madrid a été élu par un jury composé des capitaines et des sélectionneurs de toutes les équipes nationales, ainsi que de journalistes spécialisés. On imagine mal quelqu’un contester les choix d’un tel panel. En recevant son prix le 13 janvier dernier à Zurich, le Portugais n’a pu retenir ses larmes. Tous ses sacrifices ont soudain pris leur sens : les heures supplémentaires passées à l’entraînement, une vie entière passée à ­ ­atteindre une forme de perfection physique… tout ce qui a contribué à faire de lui une ­“machine à jouer au football”, comme certains l’ont surnommé. Dans la salle et aux quatre coins du monde, l’émotion de Ronaldo en a surpris plus d’un. Il faut dire que ce dernier ne nous avait pas habitués à de telles effusions. Buteur patenté et icône d’un football résolument tourné vers l’offensive, le natif de l’île de Madère a laissé tomber le masque. Ce joueur, dont la souplesse et le dynamisme sur le terrain n’ont d’égale que la brutalité de ses gestes et de ses mimiques, n’est donc pas dépourvu de sentiments. Certains avaient perdu tout espoir. Pour autant, a-t-on assisté à la naissance d’un 8

nouveau Cristiano Ronaldo ? Le meilleur footballeur de la planète est-il sorti de sa tour d’ivoire pour recevoir la bénédiction de ses contemporains ? Ronaldo va-t-il enfin cesser de diviser pour rassembler ? Mieux vaut sans doute ne pas trop y compter. Ronaldo est un pur-sang indomptable. Sa rage de vaincre est un modèle qui transcende largement les frontières du football. Nous pouvons nous estimer heureux d’être les témoins de ses actions fabuleuses. Elles resteront dans l’histoire comme une forme de perfection individuelle. L’œuvre et la personnalité des grands génies sont indissociables et Ronaldo est de ceux-là : il ne joue ni comme Pelé, ni comme Eusébio. Ronaldo est Ronaldo, il ne ressemble à aucun autre. Quelques larmes versées un soir d’élection n’y changeront rien.

Nouveau départ Pourtant, quelque chose d’extraordinaire s’est produit lundi dernier à Zurich. Ronaldo n’a ­certainement pas changé ; en revanche, il a peut-être étoffé son répertoire. Bousculant le protocole, Cristiano Junior est monté sur scène pour sauter dans les bras de son père, un père souvent absent mais omniprésent dans les médias. Ce geste touchant et humain a été ­ ­rendu possible par le fait que l’international portugais s’est rendu en Suisse accompagné de son enfant. Il l’a emmené pour venir chercher son Ballon d’Or. Autrefois, une telle idée ne lui serait sans doute pas venue à l’esprit. Sa mère Maria Dolores, qui participe à l’éducation de son petit-fils, et ses sœurs Liliana Cátia (chanteuse connue au Portugal sous le nom de Ronalda) et Elma avaient fait le déplacement.

“L’œuvre et la personnalité des grands génies sont indissociables et Ronaldo est de ceux-là : il ne joue ni comme Pelé, ni comme Eusébio. Ronaldo est Ronaldo, il ne ressemble à aucun autre.”

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CRISTIANO RONALDO

Album de famille Cristiano Ronaldo durant ses jeunes années, à Andorinha.

Affaire de famille Dolores, la mère de Ronaldo, et ses filles Elma (à g.) et Cátia posent avec le Ballon d’Or . T H E F I FA W E E K LY

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Getty Images, Keystone

CRISTIANO RONALDO

Plus haut que tout le monde Ronaldo s’élève à l’occasion d’un match de Coupe d’Espagne contre Osasuna, le 9 janvier 2014 . 10

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CRISTIANO RONALDO

Nom : Cristiano Ronaldo Date et lieu de naissance : 5 février 1985, Funchal, île de Madère (Portugal) Carrière : Andorinha (de 1993 à 1995), Nacional Funchal (de 1995 à 1997), Sporting Lisbonne (de 1997 à 2003), Manchester United (de 2003 à 2009), Real Madrid (depuis 2009) Carrière internationale : 109 sélections (47 buts) Principaux titres : 3 titres de champion d’Angleterre (entre 2007 et 2009), un titre de champion d’Espagne (2012), une Ligue des Champions (2008). Joueur Mondial de la FIFA en 2008, lauréat du FIFA Ballon d’Or en 2013

Sur scène, leurs larmes se sont mêlées. Ces femmes connaissent l’athlète mieux que quiconque. Sans doute savent-elles que l’intéressé aurait mal vécu un nouveau triomphe de son grand rival Lionel Messi. La mère de Ronaldo était visiblement soulagée à l’issue de la cérémonie. Entre deux félicitations, elle a pris le temps de commander cinq exemplaires de l’édition spéciale de The FIFA Weekly imprimé sur place et montrant son fils avec le Ballon d’Or. Sa sœur a demandé cinq autres exemplaires, “pour la maison, au Portugal”. Ronaldo a jeté un rapide coup d’œil à la couverture, avant de s’éclipser. Il est vrai qu’il n’est jamais très agréable d’être le témoin de ses propres émotions en public. Père et fils À la mort de son père en 2005, Ronaldo avait 20 ans. Il s’était déjà fait un nom du côté de Manchester et était devenu le fils adoptif de l’austère Écossais Sir Alex Ferguson. Enfant, il a dû apprendre à partager le peu d’amour d’un père alcoolique avec trois frères et sœurs plus âgés. Le seul bien qu’il lui ait véritablement transmis reste son nom, qu’il doit à l’ancien président américain Ronald Reagan. Avant de se lancer la politique, celui-ci avait fait une carrière d’acteur, notamment dans des westerns. Le choix de son père en dit long sur lui-même. Incapable de lutter contre ses

propres démons, peut-être espérait-il que son fils serait grand, fort et courageux. Comment un enfant peut-il gérer le poids de telles attentes ? Sans attendre la force, les centimètres ou le courage, il devance l’appel du destin et se conduit comme un homme… ou du moins comme ce qu’on attend d’un homme. Dans ­l’imagerie populaire du machisme, qui trouve ses racines dans une certaine culture ­latino-américaine, l’homme doit se désintéresser de ses enfants et de son ménage. Il délègue l’éducation à la femme. On peut pourtant se demander comment un enfant peut devenir un homme, s’il n’a aucun modèle auquel se référer. Ronaldo représente peut-être l’image la plus évidente de la virilité, comme une caricature. Certains voient pourtant en lui quelque chose de totalement différent, en observant sa manière de tirer les coups francs : une précision presque scientifique. Le Portugais ne laisse rien au hasard, il fait analyser ses courses et sa technique de frappe par des ­appareils de haute technologie et étudie attentivement les résultats. Aucun autre footballeur ne déploie de tels moyens pour soutenir sa progression. Tout ce qu’il fait est dicté par son ambition et le football ne fait évidemment pas exception à la règle. Il n’est certes pas le seul à agir de la sorte, mais les autres sont loin ­d’atteindre son niveau. Il n’est pas permis de dire que les gestes de T H E F I FA W E E K LY

Ronaldo sont antipathiques ou ne lui correspondent pas vraiment, mais peu importe. On lui passe tout, car il est le meilleur. Peut-être ne reverrons-nous jamais son pareil. Et c’est pour cette raison que, nous aussi, nous devrions lui sauter dans les bras, comme des enfants sur une scène. Å

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Alexander Hassenstein / Getty Images

CRISTIANO RONALDO

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CRISTIANO RONALDO

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The best footballer of 2035

was born today. But where?

The FIFA Ballon d’Or is the highest accolade any footballer can hope to receive, a prize to which players all over the world aspire. FIFA takes great pride in being able to offer guidance to thousands of young players around the world through its grassroots programmes. FIFA promotes football skills, equality and fair play and helps to develop the football stars of tomorrow. www.FIFA.com


TRIBUNE

L E T O P 11 D E L A S E M A I N E

Les numéros 10 les plus célèbres de l'histoire

Maradona et le numéro 12 Thomas Renggli

C

'est bien connu, tout était mieux avant. Sur les terrains de football, l'ordre régnait autrefois en maître. Cette remarque vaut tout particulièrement pour les numéros des joueurs. Le chiffre sur le maillot indiquait la position sur la pelouse : 1 gardien, 2 arrière droit, 3 arrière gauche, 5 stoppeur ou libéro, 4 et 6 les deux latéraux, 7 ailier droit, 8 milieu axial droit, 9 avantcentre, 10 milieu axial gauche et enfin 11 ailier gauche. Les numéros 12, 13 et 14 étaient réservés aux remplaçants. Cette tradition trouve ses origines dans l'esprit ordonné des Anglais. Les joueurs ont porté un numéro dans le dos pour la première fois à l'occasion de la finale de la FA Cup 1933. L'équipe d'Everton disposait des numéros 1 à 11, celle de Manchester City des numéros 12 à 22. Six ans plus tard, tous les clubs anglais se sont mis d'accord sur une numérotation allant de 1 à 11. Mais un jour, un certain Johann Cruyff a semé le chaos dans cette belle organisation. La légende néerlandaise a fait ses premiers pas avec l'équipe première de l'Ajax Amsterdam en 1964, à l'âge de 17 ans et avec un maillot arborant le 14, logiquement dévolu au remplaçant qu'il était alors. Jusqu'à sa retraite, ce numéro lui est cependant demeuré indissociable, que ce soit à l'Ajax, à Barcelone, en équipe nationale ou même lors de ses quelques apparitions dans le championnat professionnel américain. Jürgen Klinsmann était lui aussi un grand sentimental : il a fêté sa première sélection avec la Mannschaft vêtu du maillot 18, un numéro dont il n'a plus voulu se séparer. Si la FIFA tolère de telles extravagances, elle recommande néanmoins le schéma traditionnel, de 1 à 11. Depuis 2008, les seuls numéros autorisés lors des tournois internationaux sont ceux

allant de 1 à 23, faisant fi des superstitions éventuelles des acteurs. Le football se démarque ici notamment de la Formule 1, où le 13 n'est plus attribué à aucun pilote depuis 37 ans. Certaines équipes font parfois preuve de fantaisie. Ainsi, lors de la Coupe du Monde 1982 en Espagne, l'Argentine s'en est tenue à l'ordre alphabétique. Selon cette logique, Diego Armando Maradona aurait dû recevoir le 12. Il s'y est opposé férocement et a fini par obtenir gain de cause auprès de son sélectionneur, César Luis Menotti. Osvaldo César Ardiles, l'autre meneur de jeu argentin, a hérité du numéro 1 en raison de son nom de famille. Le gardien Ubaldo Matildo Fillol portait quant à lui le… 7. Le traitement de faveur réservé à Maradona nous vient tout droit du Brésil. La mode du numéro 10 a en effet été lancée par un certain Edson Arantes do Nascimento, plus connu sous le nom de Pelé. À ses débuts, il réalisait ses prouesses sous le numéro 8. La meilleure note dans les écoles brésiliennes étant le 10, le FC Santos a cependant accordé à Pelé le numéro 10. Loin désormais de toute considération scolaire, ce mythe s'est propagé à travers toute la planète. Les meilleurs élèves obtiennent un 20 en France, un 1 en Allemagne et un A en Angleterre. Mais sur un terrain de foot, c'est le 10 que tout le monde veut. Å

La rubrique hebdomadaire de la rédaction de The FIFA Weekly T H E F I FA W E E K LY

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Pelé. Le triple champion du monde et Joueur mondial du 20ème siècle est quasiment la personnification du numéro 10.

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Diego Maradona. L'Argentin avait de l'or dans les pieds, mais il a aussi marqué grâce à la “Main de Dieu”.

3

Zinédine Zidane. Avec son jeu exceptionnel, il a mené l'équipe de France au sommet en 1998 (Coupe du Monde) et en 2000 (Euro).

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Ferenc Puskás. Le cœur de l'équipe des Magyars Magiques. Le Hongrois était redouté pour ses frappes précises et puissantes du pied gauche.

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Michel Platini. Une légende en France. Élu meilleur Bianconero de l'histoire par la Juventus Turin.

6

Roberto Rivelino. Les Brésiliens le vénèrent. Il a remporté la Coupe du Monde 1970 au Mexique avec la Seleção.

7

Lionel Messi. Impossible de ne pas citer le quadruple Ballon d'Or. Le numéro 10 du FC Barcelone et de l'équipe d'Argentine fait rêver les fans du monde entier.

8

Lothar Matthäus. “Mister Coupe du Monde” pourrait-on l'appeler : il a disputé cinq fois l'épreuve suprême. Le joueur allemand le plus capé de l'histoire a remporté le titre mondial en 1990 en Italie.

9

Roberto Baggio. Il Divino Codino est considéré comme l'un des meilleurs joueurs offensifs des années 90. Il compte 452 matches et 205 buts inscrits en Serie A à son actif.

10

Gheorghe Hagi. Sans doute le plus grand joueur de l'histoire du football roumain. Il a porté le numéro 10 dans tous les clubs où il a évolué, sauf au FC Barcelone.

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Mario Kempes. Meilleur buteur et pièce maîtresse de l'équipe d'Argentine championne du monde en 1978. El Matador a planté de nombreuses banderilles. Vous avez d'autres noms à ajouter à la liste ? Écrivez-nous : feedback-TheWeekly@fifa.org 15


LE DÉBAT

Les boycotts n’apportent rien

Violation des droits de l’homme, discrimination à l’égard des minorités : les Jeux Olympiques de Sotchi sont sous le feu des critiques. Pour autant, dans de telles situations, il est rare qu’un boycott ait des répercussions positives. Alan Schweingruber Charles Cunningham Boycott était loin d’être ce qu’on pourrait appeler quelqu’un de gentil. Cet influent propriétaire terrien sans scrupule avait dans toute l’Irlande la réputation d’exploiter les gens. Les paysans qui travaillaient pour lui finirent un jour par en avoir assez. Ils se liguèrent contre Boycott et refusèrent de lui verser leur fermage. Cette révolte suscita l’admiration de leurs compatriotes, qui furent de plus en plus nombreux à refuser de travailler avec cet homme d’affaires aigri. Même les chemins de fer décidèrent de ne plus transporter son bétail. L’homme fut ainsi “boycotté” (le mot apparut pour la première fois dans les pages du London Times) et se vit contraint de quitter son pays. C’était en 1880. Aujourd’hui, le boycott est bien souvent un acte de désespoir, les gens y ont recours quand ils ne voient plus d’autre manière de se faire en16

tendre. Les grandes manifestations sportives semblent constituer le contexte idéal pour ce type d’action. Le monde entier est impatient de voir les plus grands sportifs s’affronter dans le cadre de compétitions passionnantes. Pour un idéologue défenseur de la “bonne cause”, c’est le moment parfait pour espérer mettre des problèmes sur le devant de la scène. Mais les boycotts, ou les menaces de boycott, permettent-ils d’atteindre le résultat escompté ? Le sport n’a-t-il pas pour mission de bâtir des passerelles plutôt que d’ériger des murs ? Les protagonistes au cœur de la révolte n’en profitent-ils pas surtout pour attirer l’attention sur leur propre personne ?

vernements, en dépit de leurs efforts, n’ont pas réussi à conquérir. Les associations de défense des droits de l’homme comme Amnesty International ou Human Rights Watch, elles, se tiennent souvent à distance des appels au boycott. En 2008, le Dalaï-lama, le chef spirituel du Tibet, s’est déclaré en faveur des Jeux Olympiques de Pékin. Il est également intéressant de se pencher sur le regard que d’anciens hommes politiques portent sur les boycotts auxquels ils ont pris part. Pendant la Guerre froide, l’ancien Chancelier ­Helmut Schmidt, l’une des plus grandes personnalités allemandes, a subi la pression des ÉtatsUnis. En 1980, il reçoit en effet un appel du Président Jimmy Carter. Peu de temps après, la RFA décide de ne pas participer aux Jeux Olympiques de Moscou. “Nous ne pouvions pas nous permettre d’entrer en conflit avec l’Amérique”, déclare par la suite Schmidt au cours d’une interview avec l’hebdomadaire Die Zeit. “Mais ce boycott n’a servi à rien. Je trouve que le sport ­international devrait se tenir à l’écart de toute ­influence politique.” Å

“Le boycott de 1980 n’a servi à rien” Se servir du sport comme moyen de pression est un acte d’impuissance. Dans le fond, l’individu ou le parti qui a recours à cette forme de communication espère obtenir ce que des pays et leurs gou-

Les débats de The FIFA Weekly Qu’est-ce qui vous interpelle ? De quels sujets aimeriez-vous discuter ? Envoyez vos propositions à : feedback-TheWeekly@fifa.org.

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Ekaterina Chesnokova / Ria Novosti / Keystone

Sprint final Derniers préparatifs dans la ville russe de Sotchi avant l’ouverture des Jeux Olympiques, le 7 février prochain.


LE DÉBAT

Ceux qui vont aller à Sotchi et faire comme si tout allait bien se feront du tort à eux-mêmes. Les Jeux Olympiques seront à coup sûr parfaitement bien organisés et présenteront la Russie sous son meilleur jour. Mais cela ne changera rien aux problèmes de fond : en Russie, les droits de l'homme sont bafoués. Brecht Vifhuisen, Utrecht (Pays-Bas)

Ce n'est pas comme ça que les choses fonctionnent. Un boycott n'apporte jamais le résultat escompté. Au lieu de bouder une manifestation, il serait plus intéressant d'aller exprimer son opinion sur place. De toute façon, généralement, l'absence d'une personne ou d'une équipe n'a aucun impact. Dès que les Jeux démarrent, les discussions politiques qui les précédaient sont oubliées. Cela montre à quel point toutes ces actions sont dénuées de sens. Farid Fathallah, Gizeh (Égypte)

“Le boycott, c'est une méthode de la guerre froide. Malgré tout, je considère que c'est aujourd'hui un moyen efficace de protester. Certains États ne changent d'attitude que sous la pression.” Ana Letschov, Sofia (Bulgarie)

Il semble évident que dans différents pays qui sont les futurs organisateurs de grands événements sportifs, les droits de l'homme tels qu'on les entend en Europe de l'ouest ne sont pas respectés. Beaucoup de ces nations organisatrices sont des pays en développement ou des pays émergents, sur le plan économique comme sur le plan social. Il faudra des décennies de lutte pour acquérir et développer des droits pour leurs citoyens, comme il a fallu des siècles en Europe. Malgré tout, il est important et juste de pointer du doigt la situation. Le processus doit être accéléré. Un boycott de la part de politiciens de premier plan peut donc constituer un petit pas vers une amélioration du respect des droits de l'homme dans les pays concernés. Fabio Lenzlinger, Saint-Gall (Suisse)

Boycotter les grands événements sportifs n'a aucun sens, selon moi. Seuls le dialogue et la communication peuvent faire bouger les choses. La situation actuelle en Ukraine en est un bon exemple. La politique de propagande y est pratiquée (dans les deux camps)

LE BILLET DU PRÉSIDENT

comme à l'époque de l'Union soviétique. Si les pays occidentaux s'en détournent et si les hommes politiques ferment les yeux, jamais rien ne changera. Olga Zueva, Kiev (Ukraine)

Le boycott américain des Jeux Olympiques d'été de 1980 à Moscou n'a été qu'une tempête dans un verre d'eau, tout comme le boycott soviétique des Jeux de Los Angeles quatre ans après. L'Union soviétique s'est dissolue d'elle-même quelques années plus tard. Nils Olofsson, Göteborg (Suède)

“Une tempête dans un ­verre d'eau.” L'impuissance n'est jamais un sentiment agréable. Encore moins quand personne ne vous écoute. À mon avis, il y a certains ­t hèmes actuels pour lesquels il n'y a pas d'autre choix que de se faire entendre par un boycott. Je pense par exemple à la situation du Tibet, qui lutte contre l'oppression chinoise depuis des décennies. Le fait que ce pays se soit révolté contre l'attribution des Jeux Olympiques de 2008 à Pékin est on ne peut plus compréhensible. Les Tibétains veulent et doivent continuer à envoyer régulièrement des signaux forts. Lena Müller, Francfort (Allemagne)

Pour moi, un boycott est un aveu d'impuissance politique. Ceux qui refusent de participer n'aident en rien à la résolution des problèmes. Dans le cas de la Russie, il serait important que l'Occident contribue par une politique active à ce que la situation dans ce pays évolue. Horst Mayer, Berlin (Allemagne)

Le boycott n’est pas la bonne réponse 2014 va être une année festive pour le sport, avec la Coupe du Monde de football au Brésil l’été prochain et les Jeux Olympiques d’hiver à Sotchi dès le mois de février. Ces deux manifestations ont un point commun : elles servent de plateformes de discussion politique. Dans le cas des Jeux Olympiques d’hiver, cela aboutit à des menaces de boycott. Pourtant, un boycott ne fera pas avancer les choses. Au contraire, il pourrait être interprété comme un refus de la possibilité de dialoguer, comme par exemple lors des Jeux Olympiques de 1980 à Moscou ou de 1984 à Los Angeles. En tant que membre du CIO, je vais me rendre à Sotchi et assister aux Jeux sur place. Personnellement, je me réjouis de suivre les prestations des sportifs suisses, notamment de nos skieurs, du sauteur à ski Simon Ammann et de l’équipe nationale de hockey sur glace. Je suis aussi curieux de savoir comment la compétition sera organisée et se déroulera. D’autant plus que le stade dans lequel aura lieu la cérémonie d’ouverture de ces Jeux Olympiques d’hiver, le 7 février, sera aussi l’un des sites de la Coupe du monde de football 2018. Ce grand événement est à mes yeux l’occasion idéale de dialoguer et d’établir des contacts. Parmi les sujets qui seront évoqués figureront quelques points désagréables. Car pour la FIFA, la lutte contre la discrimination ne se limite pas à la campagne anti-racisme. Toute forme de marginalisation doit être combattue. Ceux qui veulent boycotter les Jeux Olympiques de Sotchi baissent les bras face à cette affaire sérieuse. Or ceux qui fuient devant un problème ne contribuent en rien à sa résolution. Rien que pour cette raison, il est important que je fasse le déplacement en Russie.

“Un boycott peut être un pas vers une amélioration.” Votre Sepp Blatter T H E F I FA W E E K LY

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E N R O U T E P O U R L E B R É S I L : P L U S Q U E 21 S E M A I N E S

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L’Angleterre à l’école de la modestie Championne du monde en 1966, l’Angleterre a pris l’habitude de nourrir de grandes ambitions à l’approche de la Coupe du Monde. Aujourd’hui, le rêve a laissé place au réalisme. David Winner

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Michael Regan - The FA/The FA via Getty Images

près le piteux match nul et vierge concédé à l’Algérie au premier tour du Mondial 2010, une plaisanterie au goût amer a commencé à faire le tour des pubs. “Je n’arrive pas à croire que nous n’ayons pas réussi à battre une équipe aussi minable … Nous aurions dû gagner facilement. J’ai vraiment honte d’être algérien !” Ce bon mot, qui mêle l’autodérision au mépris qu’éprouvent instinctivement de nombreux supporters pour les formations moins huppées, en dit long sur le sentiment d’anxiété de toute une nation. L’Angleterre a inventé le football. Elle était autrefois à la tête d’un empire sur lequel le soleil ne se couchait jamais. Pour ces raisons, elle s’imagine que son équipe fait toujours figure de poids lourd sur la scène internationale. La dichotomie entre cette folie des grandeurs et la réalité sportive a suscité des réactions imprévisibles. L’Angleterre aborde souvent les phases finales sur un petit nuage, persuadée que le trophée est à portée de main. Une fois leur équipe éliminée en huitièmes ou en quarts de finale les supporters et les médias laissent libre cours à leur colère. L’échec est révélateur d’un “déclin” national et, très vite, chacun cherche un bouc émissaire responsable de la dernière “contre-performance” en date. Parfois, il s’agit d’un arbitre ou d’un adverse “malhonnête”. Le reste du temps, un joueur de premier plan ou le sélectionneur est sacrifié sur l’autel de la vanité nationale. “Tu nous as coûté la Coupe du Monde” Cette chasse aux sorcières n’est pas toujours reluisante. Après l’échec de l’Angleterre en 1998, David Beckham s’était retrouvé pendu, par l’intermédiaire d’un mannequin à son effigie. Le gardien remplaçant Peter Bonetti (dit Le Chat) est resté à jamais comme le responsable de l’élimination anglaise en 1970. Pendant toute sa carrière, il a dû endurer un chant créé spécialement à son intention : “Tu nous as coûté la Coupe du Monde.” Depuis sa première participation en 1950, l’Angleterre n’a remporté la Coupe du Monde qu’une fois (en 1966). Elle n’a atteint les demi-

finales qu’en une seule autre occasion. Elle compte par ailleurs six défaites en quarts de finale et deux échecs en phase de groupes. Par trois fois, elle n’a même pas réussi à se qualifier pour la phase finale. L’Angleterre est un pays riche, qui possède une grande tradition de football. Pour cette raison, l’équipe nationale se maintient régulièrement dans le Top 10. Elle remporte la plupart de ses matches, mais s’incline souvent face aux meilleurs. Ceci s’explique par le fait que la plupart des footballeurs anglais proviennent d’une classe ouvrière en voie d’extinction. Comme l’ont prouvé les Jeux Olympiques, la Grande-Bretagne reste une référence en matière sportive. Cependant, la majorité des jeunes athlètes talentueux délaissent le ballon rond. Cure de réalisme L’an passé, Greg Dyke a mis en place une commission pour tenter de trouver une parade à ce problème. En découvrant les noms de ses adversaires à l’issue du tirage au sort de la Coupe du Monde en décembre, le président de la Football Association n’a eu d’autre réaction que de mimer le geste de se trancher la gorge.

L’Angleterre affrontera donc l’Italie, l’Uruguay et le Costa Rica. Désormais, le réalisme semble de mise. Les journalistes et les supporters posent toujours la question rituelle : “L’Angleterre va-telle gagner la Coupe ?” Mais les réponses sont plus modérées. Paul Scholes estime, par exemple, que les Three Lions n’ont “aucune chance”. Les spécialistes constatent que les joueurs de haut niveau se font de plus en plus rares en Angleterre. Ils en concluent que l’équipe aura sans doute du mal à atteindre les huitièmes de finale. Roy Hodgson a organisé une série de matches amicaux contre le Pérou, l’Équateur et le Honduras. Il emmènera son groupe à Miami pour le préparer à la chaleur torride qui règne à Manaus. En attendant d’entrer dans le vif du sujet, il fait profil bas. Alors que ses prédécesseurs parlaient de victoire, Hodgson évoque les difficultés à venir. “C’est un groupe très relevé. Nous allons avoir bien du mal à briller face à de tels adversaires.” Contrairement à ce que l’on pourrait penser, cette modestie inhabituelle est peut-être un bon présage. Les internationaux anglais ont souvent souffert de la pression. Sven-Göran Eriksson, vétéran des éditions 2002 et 2006, a souvent évoqué un “maillot lourd à porter”. En 2010, le gardien Robert Green a semblé paralysé par la peur avant l’entrée en lice de l’Angleterre contre les ÉtatsUnis. Également présent sur le terrain ce jour-là, Jamie Carragher estime que l’Angleterre devrait s’imprégner du rôle d’outsider : “Nous serions portés par l’image de la petite équipe qui cherche à déstabiliser l’ordre établi.” Pour la première fois de son histoire, l’Angleterre apprend la modestie. Voilà une qualité digne d’éloges. Å

En tournée d’inspection avant la Coupe du Monde 2014 Le sélectionneur Roy Hodgson à Rio. T H E F I FA W E E K LY

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LE MIROIR DU TEMPS

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Portsmouth, Angleterre

Maroquinerie. En 1952, Bill Wright, responsable du matériel de Portsmouth, se lance à la recherche de la bonne paire de chaussures. Dans les années 50, les équipementiers lancent les premières chaussures à crampons interchangeables. En finale de la Coupe du Monde 1954, la RFA est la première à les utiliser, avec le succès que l’on sait. Sur le terrain détrempé du stade Wankdorf de Berne, ces nouvelles chaussures contribuent à assurer la stabilité des Allemands de Sepp Herberger. Battue pour la première fois en 51 matches, l’incroyable équipe de Hongrie voit le sol se dérober sous ses pieds et le trophée suprême lui échapper.

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Popperfoto / Getty Images

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LE MIROIR DU TEMPS

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Santa Fe, Argentine

Eitan Abramovich / AFP

2011 Haute technologie. Les chaussures de football modernes existent dans tous les coloris et certaines sont même fabriquées en matériaux synthétiques. Les fabricants promettent monts et merveilles : des zones spéciales pour un meilleur toucher de balle ou une plus grande efficacité, des modèles adaptés à chaque type de joueur … On ignore si ce membre de l’encadrement de l’équipe d’Uruguay avait conscience des responsabilités qui pesaient sur lui, avant le quart de finale de la Copa America 2011 contre l’Argentine. Quoi qu’il en soit, les chaussures ont rempli leur mission : l’Uruguay s’est imposé 6:5 aux tirs au but.

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LE S CHAMPIONN AT S À L A LOUPE

VU DES TRIBUNES Barça – Atlético : l’opposition de styles Jordí Punti est écrivain et auteur de nombreux articles sur le football dans les médias espagnols.

L’hiver est une saison ennuyeuse en Espagne. Le ciel est gris, le froid se fait sentir mais sans plus. C’est le temps des excès. C’est peut-être pour cette raison que personne ne tient cas du campeón de invierno (NDT : champion d’hiver, appelé champion d’automne en France). Personne, sauf le champion lui-même, bien entendu. Cette saison, c’est au FC Barcelone que revient ce titre purement honorifique, même si l’Atlético de Madrid mériterait sûrement sa part du gâteau. Les deux clubs présentent le même nombre de points (50) et la même confiance en leur football. Le Barça ne doit son trône qu’à deux buts supplémentaires sur son solde offensif. Cette égalité quasi-parfaite a pu se vérifier lors du match de samedi dernier à Manzanares, qui s’est soldé par un nul 0:0. Il s’agissait de la troisième confrontation de la saison entre Colchoneros et Blaugranas, les deux premières étant intervenues dans le cadre de la Supercoupe. Encore une fois, les deux équipes se sont quittées dos à dos. Contrairement à ce que laisse à penser son score vierge, la rencontre a été électrique et

passionnante entre deux équipes qui se sont répondues au coup pour coup. Au final, la défense et la maîtrise ont pris le meilleur sur la créativité des attaquants. Les deux entraîneurs argentins, Diego Simeone et Gerardo Martino, ont transformé cette soirée en une opposition de styles. L’Atlético a misé sur son habituelle intensité défensive ; le Barça a répondu par sa maîtrise de la circulation de balle et ses combinaisons. Chaque fois que les Rojiblancos ont essayé d’accélérer le rythme et de confisquer les commandes aux Catalans, ces derniers ont soigneusement récité leur poésie, hymne à la patience par lequel le ballon se déplace davantage que les joueurs. Malgré leur excellente prestation, les créateurs de l’Atlético, tels que Diego Costa, Koke ou Arda Turan, ont rarement inquiété Valdés. Dans le camp barcelonais, on s’interrogera sur les choix du Tata dans sa composition d’équipe. Le technicien argentin a surpris en laissant ses deux vedettes, Messi et Neymar, sur le banc. À la place, il a aligné le trident offensif Cesc – Alexis – Pedro, privilégiant la confiance par rapport au génie. On ne saura jamais si Messi et Neymar auraient été capables de déchirer la toile tissée par l’Atlético en première période. Après le repos, Messi a remplacé Iniesta, blessé. Le Barça y a perdu en maîtrise ce qu’il a gagné en imprévisibilité. D’ailleurs, la plus grosse occasion de la rencontre est à mettre au crédit de l’Argentin, qui a contraint Courtois à un superbe arrêt. Cette année 2014 footballistique a débuté avec le retour de Messi. Une grande nouvelle pour

Lionel Messi (au centre) est de retour sur les terrains ici face à Miranda (à d.) et Mendes de l’Atlético Madrid. 22

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le Barça et les amoureux du ballon rond. Écarté pendant deux mois par une blessure, Leo était réapparu il y a quelques jours en Copa del Rey contre Getafe. En vingt minutes, il avait inscrit un doublé. Sur le second, il a réalisé l’un de ces slaloms explosifs dont il a le secret, signant ainsi son retour aux affaires. Lors de la conférence de presse qui a suivi le match de Liga entre le Barça et l’Atlético, Simeone a été interrogé sur la différence entre les deux équipes. “La différence, c’est 400 millions de budget.” Cette réponse est aussi exacte – l’Atlético a de fait vaincu des clubs présentant un budget inférieur – que démagogique. À la fin de la phase retour, nous saurons vraiment quelle est la différence entre les deux clubs et à qui elle profite. Le retour de Messi et la progression de Neymar dans le jeu pourraient bien marquer un tournant. Si le Barça présente une composition différente à chaque match, l’encadrement madrilène fait confiance à un noyau de 14 joueurs qui ne varie pratiquement pas. El Cholo donne la priorité à un groupe resserré, à tel point qu’il vient d’envoyer le jeune Baptistao en prêt au Betis Séville. Reste à savoir si les cadres auront les ressources physiques suffisantes pour être à la hauteur lorsqu’il s’agira de concilier les enjeux de la Liga avec les rencontres décisives en Ligue des Champions et en Copa. Si cette égalité quasi-parfaite persiste jusqu’à la fin de la saison, le Camp Nou sera le théâtre d’une dernière journée explosive qui verra le Barça et l’Atlético se disputer le titre. Si le Real Madrid ne vient pas mettre tout le monde d’accord bien entendu … Même s’il a réalisé un match discret, le club merengue s’est imposé 1:0 dimanche face à l’Espanyol. Il a ainsi engrangé trois points qui en pèsent quatre puisque son retard face au tandem de tête n’est plus que de trois longueurs. À la mi-saison, le suspense reste intact. Å

Gonzalo Arroyo Moreno/Getty Image

Primera División


Berlusconi, qui n’a jamais porté Allegri dans son cœur. Le choix s’est finalement porté sur Seedorf. Celui-ci débutera sur le banc milanais dès dimanche, lors du match contre Vérone, et se verra adjoindre deux anciens Milanais à partir du mois de juin : Stam et Crespo. Quand on pense que le déplacement en Émilie-Romagne devait être une fête pour Milan, qui voulait lancer sa nouvelle recrue japonaise, Keisuke Honda … Les dizaines de journalistes nippons qui se sont déplacés pour l’occasion n’ont finalement eu d’yeux que pour Domenico Berardi, 19 ans, auteur des quatre buts de Sassuolo. C’est la première fois que l’AC Milan encaisse quatre réalisations d’un même joueur au cours d’un match. Et seul Silvio Piola (champion du monde en 1938, 274 buts en Serie A) a inscrit un quadruplé plus jeune.

Le Néerlandais Seedorf s’est vu confier la difficile mission de rendre le sourire aux supporters de l’AC Milan.

Serie A

Seedorf, Stam et Crespo Luigi Garlando est journaliste à la Gazzetta dello Sport et il écrit des livres pour enfants.

Ricardo Moraes/REUTERS

La phase aller du championnat d’Italie s’est achevée avec une démonstration de force des trois écuries de tête, qui ont signé la bagatelle de 11 buts. La Juventus en a marqué quatre contre Cagliari ; la Roma, deuxième à huit points, a imité le leader face au Genoa ; et Naples s’est contenté de trois réalisations contre Vérone, la bonne surprise de la Serie A. Entre le trio de tête et le premier poursuivant, la Fiorentina, il y a d’ores et déjà un fossé de cinq points. Autant dire que la Juve, la Roma et Naples semblent disputer leur propre championnat, tandis que les autres équipes luttent pour exister. Certes le Milan AC a fait les gros titres cette semaine mais pour de mauvaises raisons, battu qu’il a été par le modeste promu de

Sassuolo sur le score de 4:3. Cette septième défaite depuis le début du championnat a coûté sa place à Massimiliano Allegri, l’entraîneur titré en 2010/11. Quelques minutes après la fin de la rencontre, Adriano Galliani, historique administrateur délégué du club lombard, reportait au lendemain toute décision concernant l’entraîneur. Au même moment, Barbara Berlusconi, fille du président Silvio et administratrice déléguée elle aussi, s’épanchait face à la presse : “La situation est inacceptable, un changement serait bienvenu”. Ce couac est l’énième épisode d’une guerre froide que Silvio Berlusconi a essayé de résoudre en répartissant les tâches : la gestion du club pour Barbara, les aspects sportifs pour Galliani. Mais la trêve a déjà fait long feu et c’est ensuite sur le nom du successeur d’Allegri qu’ils ont eu du mal à s’entendre. Galliani souhaitait promouvoir Pippo Inzaghi, héroïque buteur d’une période dorée et actuel entraîneur de la réserve, tandis que Barbara penchait pour Clarence Seedorf, autre gloire rossonera, parti en 2012 à Botafogo. Le milieu de terrain néerlandais est en fait, depuis longtemps, le candidat préféré de Silvio T H E F I FA W E E K LY

Auteur de 11 buts depuis le début de la saison, cet avant-centre appartient en fait à la Juventus. Et il pourrait bien devenir l’arme fatale de l’Italie lors de la prochaine Coupe du Monde, à l’instar d’un Paolo Rossi à Argentine 1978. Après la vilaine blessure subie par Giuseppe Rossi, Berardi se positionne bel et bien parmi les candidats potentiels pour épauler Mario Balotelli. Ironie du sort, Allegri fait partie des favoris à la succession de Cesare Prandelli sur le banc italien à la fin de la Coupe du Monde brésilienne. Et il pourrait se voir obligé de convoquer rapidement Berardi, le gamin qui l’a éjecté de l’AC Milan ... Å

“La situation était devenue inacceptable.”

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Premier League

Une nouvelle ère David Winner est un écrivain et journaliste basé à Londres. Sa biblio­graphie dans le football comprend notamment Brilliant Orange et Dennis Bergkamp: Stillness and Speed.

Une réflexion sur le long terme n’est jamais vaine. Au mois d’août, Arsenal a débuté son parcours en championnat à domicile par une cuisante défaite 3:1 contre Aston Villa. À l’époque, les supporters des Gunners s’interrogeaient ouvertement sur les qualités d’Arsène Wenger, à la tête du club depuis 17 ans. Frustrés par une longue traversée du désert de huit ans sans trophée, irrités par l’absence de recrues de premier plan et poussés à bout par deux penalties malheureux et une expulsion discutable, les habitués de l’Emirates ont laissé libre cours à leur colère et abreuvé d’insultes le technicien français. Wenger est pourtant sans aucun doute le plus grand entraîneur de l’histoire d’Arsenal. Il surpasse même Herbert Chapman, qui avait mené le club sur le devant de la scène anglaise dans les années 30. Ces considérations n’ont pas empêché des autocollants réclamant son départ de fleurir un peu partout dans le métro de Londres. Lancée par un groupe baptisé le Black Scarf Movement, cette véritable guerre de positions s’est agrémentée de manifestations et de longs exposés dénonçant une équipe faible et “encombrée de gamins”.

“Arsenal et Wenger misent sur le long terme.” D’anciens joueurs du club n’ont pas hésité à critiquer leur ex-mentor, lui reprochant notamment de se contenter d’une simple qualification pour la Ligue des Champions, saison après saison. Son incapacité à retenir de grands noms comme Samir Nasri et Robin van Persie ou son goût très prononcé pour le recrutement de joueurs d’avenir ont également essuyé le feu des critiques. Dans ce contexte, les dirigeants ont cependant soutenu leur entraîneur. Très vite, l’arrivée de Mesut Özil en provenance du Real Madrid a calmé les contestataires. La suite est en passe d’entrer dans l’histoire. Arsenal pratique aujourd’hui un jeu élégant et imparable qu’on ne lui connaissait plus depuis les départs de Dennis Bergkamp et Thierry Henry. Leur deuxième confrontation face à Aston Villa, cette semaine à Birmingham, s’est soldée par une victoire confortable (2:1). Les Gunners sont de retour en tête d’un classement qu’ils dominent depuis le début de la saison. Les Londoniens vont-ils remporter leur premier titre de champion d’Angleterre depuis dix ans ? Rien n’est moins sûr. Manchester City et Chelsea sont toujours favoris. Ces deux clubs disposent d’un effectif plus riche et mieux fourni. Pourtant, Arsenal continue de faire la course en tête. Özil se montre un peu moins à son avantage depuis quelques semaines, mais Wenger peut toujours compter sur un milieu de terrain redoutablement efficace et sur la défense la plus

solide de Grande-Bretagne. Autrefois raillés, Olivier Giroud, Per Mertesacker et Aaron ­Ramsey alignent les performances remarquables. Il faut dire que Wenger a la réputation d’aider ses joueurs à progresser. La plupart des clubs pratiquent une politique à court terme. Quand les choses se gâtent, ils changent d’entraîneur. Ils recrutent des joueurs connus sans vraiment chercher à les intégrer dans un projet de jeu. Tottenham Hotspur, le grand rival d’Arsenal, incarne parfaitement cette stratégie. Arsenal et Wenger fonctionnent différemment, comme on a pu s’en rendre compte cette saison. Le choix de quitter Highbury pour s’installer à l’Emirates Stadium représentait un risque considérable. Désormais, les Gunners ont davantage de poids sur le plan financier, mais les conséquences de cette décision les ont rendus très vulnérables pendant une décennie, comme un escargot qui déciderait de s’installer dans une nouvelle coquille. Si Arsenal ne s’était pas qualifié pour la Ligue des Champions trois ans de suite, l’avenir du club aurait été sérieusement menacé. Depuis 2004, Wenger a réussi à maintenir son équipe parmi les quatre premiers du classement, en dépit de ressources limitées. Cet exploit est, en soi, aussi impressionnant que les doublés réussis en 1998 et 2003 ou la mise en place des Invincibles en 2003/04, sans doute la meilleure équipe de l’histoire du football anglais.

Laurence Griffiths/Getty Image

L’Alsacien a avancé masqué, avec une grande finesse. Il a prétendu mener cette politique de rigueur pour des raisons de principes, comme pour détourner l’attention des problèmes financiers. Cette stratégie est en train de porter ses fruits. L’Emirates Stadium est presque entièrement remboursé et, désormais, Arsenal est en position de rivaliser avec n’importe qui sur le marché des transferts. Tout indique que le club est à l’aube d’une nouvelle ère. L’an dernier, Wenger m’avait confié qu’il avait, lentement mais sûrement, transformé Arsenal en un bastion du football total néerlandais : “Évidemment, j’avais un plan. Mais je n’allais quand même pas le crier sur tous les toits !”

Arsène Wenger, “l’éternel” entraîneur d’Arsenal, est incontournable depuis 17 ans sur le banc d’Arsenal. T H E F I FA W E E K LY

Son nouvel exploit est un coup de maître. Même s’il ne remporte pas le championnat cette saison, il sera sans doute en mesure de le faire l’année prochaine ou la suivante. Arsenal est de retour parmi les poids lourds. Å 25


Nom : Ottmar Hitzfeld Date et lieu de naissance : 12 janvier 1949, Lörrach (RFA) Carrière de joueur : Lörrach, FC Bâle, VfB Stuttgart, Lugano, Lucerne Carrière d’entraîneur : SC Zoug, Aarau, Grasshopper Club, Borussia Dortmund, Bayern Munich, équipe de Suisse Principaux titres en tant qu’entraîneur :

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Christian Grund / 13 Photo

2 Ligues des Champions, 1 Coupe Intercontinentale, 7 titres de champion d’Allemagne, 2 titres de champion de Suisse, 2 qualifications pour la Coupe du Monde

T H E F I FA W E E K LY


OT TMAR HITZFELD

“Six ans au Bayern valent 20 ans dans n’importe quel autre club” Ottmar Hitzfeld est l’un des entraîneurs les plus titrés au monde. Pour nous, il revient sur son p ­ arcours et sur l’évolution du football, expose ses arguments en faveur de l’arbitrage vidéo et ­explique pourquoi la partition de la Yougoslavie a représenté un tournant capital dans l’histoire du football moderne.

Propos recueillis par Thomas Renggli

Ottmar Hitzfeld, toutes nos félicitations ! La dernière édition du Classement mondial de la FIFA indique que la Suisse se trouve en huitième position, deux places devant le Brésil. Cette situation correspond-elle selon vous à la réalité sportive ? Non. Ce classement n’a pas vocation à traduire une réalité sportive. Il est la résultante d’un système mathématique. En tant que pays hôte de la compétition, le Brésil n’a pas disputé de matches importants depuis longtemps. Il a dû se contenter de rencontres amicales et de la Coupe des Confédérations. Le Brésil est plus fort que la Suisse. Pour autant, notre présence parmi les dix premiers me rend fier. Nous avons travaillé dur pour en arriver là. Nous sommes restés invaincus pendant 14 matches. En outre, mon équipe fait preuve d’une grande constance : nous n’avons perdu qu’une rencontre en 2011, deux en 2012. Nous bénéficions désormais d’un grand respect au niveau international. Nous nous en sommes rendu compte lors du tirage au sort de la Coupe du Monde, en décembre. Notre présence parmi les têtes de série est une bonne nouvelle et représente une formidable publicité pour le football suisse. Avant, les autres nations se moquaient de savoir dans quel groupe la Suisse pouvait tomber. Les choses ont changé. Les gens ne nous voient plus de la même manière.

Tout porte à croire que la concurrence au sein du Top 30 sera de plus en plus vive dans les prochaines années. De “petites” nations comme la Belgique, la Bosnie ou la Suisse

donnent de plus en plus de fil à retordre aux poids lourds…

Les footballeurs balkaniques sont-ils meilleurs que les suisses ?

Le football s’est mondialisé. L’internationalisation du marché des transferts a contribué à accélérer cette tendance. Les meilleurs internationaux de chaque pays sont désormais convoités par de grands clubs étrangers. Dans mon groupe, ils ne sont que dix pourcent à jouer en Suisse. L’expérience internationale des petites nations augmente chaque année. Cette situation encourage une culture de la compétitivité.

Je ne dirais pas ça. Nous avons beaucoup de bons joueurs issus d’autres horizons : Stephan Lichsteiner, Diego Benaglio ou Tranquillo Barnetta. Ces deux derniers sont des Suisses de seconde génération. Sans immigration, la Suisse aurait bien du mal à se qualifier pour une Coupe du Monde.

Quel rôle joue la formation dans tout ça ? Elle tient une place très importante. La Suisse est connue pour sa capacité à former des footballeurs et des entraîneurs de haut niveau. Les joueurs bénéficient d’un solide bagage technique et tactique. Leur rapport qualité-prix est très intéressant. C’est ce qui explique qu’une trentaine de Suisses évoluent actuellement dans les principaux championnats européens.

Des équipes comme la Suisse et la Belgique bénéficient d’une grande diversité “ethnologique”. Dans ces conditions, peut-on dire que l’éclatement de la Yougoslavie a été le phénomène le plus important au niveau de la compétitivité des sélections européennes, ces 25 dernières années ? Sans aucun doute. La Yougoslavie était connue pour produire de grands joueurs dans tous les sports collectifs. Elle brillait aussi en basket et en handball. Les footballeurs originaires de cette région enrichissent les sélections sur tout le continent. Tout le monde en profite… notamment la Suisse. T H E F I FA W E E K LY

Comment s’explique cette différence de niveau ? Elle vient d’un mélange de talent, de volonté et de diversité. La mentalité y est pour beaucoup. Les parents suisses encouragent leurs enfants à suivre une scolarité classique. Les immigrés, eux, voient le football comme un outil de promotion sociale. Dans une moindre mesure, on observe un phénomène similaire en Allemagne, en France et en Angleterre.

En tant qu’entraîneur, comment concilier ces différentes cultures dans le vestiaire ? Il faut traiter les footballeurs indépendamment de leurs origines. La Suisse s’est ouverte. La différence entre les habitants de l’ouest du pays et les Suisses allemands est à peine perceptible aujourd’hui. Culturellement et intellectuellement, les footballeurs issus de l’immigration nous apportent beaucoup. C’est la raison pour laquelle j’ai fait de Gökhan Inler mon capitaine. Il faut respecter les immigrés. Ils font beaucoup pour le football suisse.

Joueur, vous avez été un attaquant redouté. Vous avez été le meilleur buteur du FC Bâle et vous avez inscrit six buts en un match avec le 27


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OT TMAR HITZFELD

“Beaucoup de c ­ hoses ont ­changé dans le football. Aujourd’hui, les jeunes d’aujourd’hui ont une approche beaucoup plus professionnelle que la nôtre.”

Hitzfeld l’attaquant (ici en 1974 avec Bâle) était habitué à figurer en bonne place dans les classements des buteurs.

hors-jeu. Un entraîneur doit toujours adapter ses idées aux joueurs dont il dispose. La Suisse a la chance de posséder une génération exceptionnelle. C’est ce qui nous permet de proposer un football attrayant.

Hitzfeld l’entraîneur ferait-il confiance à Hitzfeld le joueur ? (rires) Oui, sans aucun doute. Il serait incontournable.

Imago

VfB Stuttgart, un record qui n’a pas encore été battu. Vous avez des conseils spécifiques pour vos attaquants ? Il n’y a pas de solution miracle. Marquer est ce qu’il y a de plus difficile dans le football. Les grands buteurs sont une denrée rare. De grandes nations comme la France ou l’Allemagne le savent bien. Le problème est encore plus compliqué pour la Suisse, qui dispose d’un réservoir de talents limité. Nous sommes toujours en quête de bons attaquants. Heureusement, nous avons de la qualité dans ce secteur, avec des joueurs comme Seferovic, Derdiyok ou Gavranovic. Mais je pense aussi à Alex Frei. C’était un phénomène. Quelle chance pour notre équipe d’avoir pu compter sur lui. Il faudra attendre 20 ou 30 ans avant

de retrouver un joueur comme lui en Suisse. Il marquait pratiquement un but tous les deux matches en sélection.

Vous accordez plus d’importance aux résultats qu’à la manière. Comment l’entraîneur que vous êtes a-t-il pu ainsi s’éloigner du footballeur que vous étiez ? Je ne suis pas d’accord. Un attaquant contribue aux bons résultats de son équipe en marquant des buts. Aucun entraîneur ne peut s’imposer sur la durée en misant uniquement sur le spectacle. Il ne ferait pas long feu. Il faut trouver le juste équilibre. Avec Dortmund et le Bayern, je ne me suis pas contenté d’obtenir des résultats : j’ai aussi proposé du jeu, en m’appuyant sur le pressing et le T H E F I FA W E E K LY

Vous travaillez comme entraîneur depuis 30 ans. Qu’est-ce qui a changé depuis tout ce temps ? Beaucoup de choses. Ainsi va le monde. Au début, le marquage individuel était la norme. J’ai introduit la zone et la défense à quatre en 1983, au SC Zoug puis à Aarau. À l’époque, on avait évoqué un suicide sportif. Pendant longtemps, les clubs allemands ont conservé un libéro. On jouait plus long. Les milieux droits évoluaient à droite, les centraux au centre. Aujourd’hui, les espaces sont resserrés et le jeu court est de rigueur. J’ai toujours demandé à mes équipes de faire bloc et dans ce domaine, on note une très nette évolution. En outre, les jeunes d’aujourd’hui ont une approche beaucoup plus professionnelle que la nôtre. C’est dû aux ordinateurs, à l’omniprésence des médias 29


OT TMAR HITZFELD

“Ma femme s’inquiétait quand Uli Hoeness appelait. J’ai essayé de la rassurer en lui disant que je me contenterais de dépanner le Bayern jusqu’à la fin de la saison.” Champion Hitzfeld sur le toit de l’Europe en 1997, aux côtés de Jürgen Kohler.

et à l’avènement du numérique. Ma génération a été élevée autrement. De mon temps, on devenait adulte à 22 ans ; maintenant, à 16 ans, on n’est déjà plus un enfant.

Arrivez-vous à communiquer avec la nouvelle génération ? Oui. C’est une chance pour moi de travailler avec ces jeunes, de parler avec eux, d’écouter leur façon de parler et de comprendre comment ils fonctionnent. Ça me permet de rester jeune moi-même !

minutes plus tard, nous avions tout perdu. À l’issue de la partie, j’ai tenu le plus long discours de ma carrière. J’ai eu besoin de beaucoup d’énergie pour remettre l’équipe sur les bons rails. Il a fallu analyser nos erreurs mais aussi redonner confiance aux joueurs. Deux ans plus tard, nous avons gagné la Ligue des Champions. Avec le recul, je peux considérer notre défaite de 1999 avec le sourire.

Un entraîneur est toujours soumis aux influences extérieures et notamment aux décisions de l’arbitre. Le FC Bâle en a fait l’expérience lors du match décisif de la phase de groupes de la Ligue des Champions. Le but de Schalke 04 était clairement hors-jeu. C’était une erreur manifeste mais, trois jours plus tard, on ne se souvient que du résultat.

Peut-on perdre la foi dans de telles circonstances ? A-t-on le sentiment de ne rien contrôler depuis la ligne de touche ?

Depuis quelque temps, la question de l’arbitrage vidéo alimente les débats. Quelle est votre opinion sur le sujet ?

Vous n’avez donc jamais vécu de conflit de générations ? Non. Je sais m’adapter et je suis quelqu’un d’empathique. Un entraîneur doit savoir changer son fusil d’épaule. Savoir écouter ses joueurs est aussi important. Je me fie à mon instinct et à mon intuition. De même qu’il existe des mentalités différentes, on se trouve confronté à des façons de penser différentes. Certains joueurs ont besoin d’autorité, d’autres d’une approche plus douce. Il faut freiner certains et encourager d’autres.

La victoire de Dortmund était plus intense. Au Bayern, le niveau d’exigence était plus élevé. Tout le monde en Bavière s’attend à connaître le succès dans les compétitions européennes. Cela crée des obligations. Désormais, le Bayern est une référence au plus haut niveau. C’est la raison pour laquelle Guardiola a signé là-bas et non à Manchester.

Vous avez aussi connu une incroyable défaite en 1999, contre Manchester United… C’est le lot de tous les entraîneurs de gérer des échecs inattendus. À la 90ème minute, nous étions champions d’Europe ; trois 30

Stratège Ottmar Hitzfeld compte deux qualifications pour la phase finale de la Coupe du Monde avec la Suisse. T H E F I FA W E E K LY

Imago, Denis Balibouse / Reuters

Vous êtes l’un des rares entraîneurs à avoir remporté deux fois la Ligue des Champions : avec Dortmund en 1997 et le Bayern en 2001. Ces deux triomphes sont-ils comparables ?


OT TMAR HITZFELD

L’arbitrage vidéo est inévitable. Une étape importante a été franchie avec l’introduction de la technologie sur la ligne de but. Les grands championnats doivent maintenant l’adopter. Quand les conditions seront réunies, l’arbitrage vidéo s’imposera également pour trancher les hors-jeux et peut-être même les situations litigieuses dans la surface de réparation. Je suis très favorable à cette évolution.

Pluie de bière Hitzfeld douché par Luca Toni en 2008.

Le football allemand connaît actuellement une véritable révolution. Il y a quelques années, on ne jurait que par l’effort et l’abnégation ; aujourd’hui, les artistes et les footballeurs de talent sont légions. Comment expliquer cette métamorphose ? Pour comprendre ce qui s’est passé, il faut remonter à l’époque de la création des centres de formation. Il y a eu une volonté réelle d’optimiser l’apprentissage des joueurs et des entraîneurs. Ce processus a débuté suite à l’échec de l’Allemagne à l’Euro 2004 au Portugal. En outre, les équipes de jeunes ont abandonné le marquage de zone pour repasser à l’individuel. L’Allemagne n’a jamais manqué de talent mais les jeunes prodiges bénéficient aujourd’hui de meilleures conditions pour s’exprimer.

Keystone

Vous occupez les fonctions de sélectionneur de l’équipe de Suisse depuis 2008. Ce métier est-il moins stressant que celui d’entraîneur de club ? Il n’y a pas de comparaison. Un entraîneur dispute plus de 60 matches par saison alors que le calendrier d’un sélectionneur ne compte qu’une dizaine de dates. Le sélectionneur est donc confronté à une pression beaucoup plus intense lorsqu’il entre sur le terrain, car il n’aura guère l’occasion de rattraper un mauvais résultat. En revanche, le stress au quotidien est beaucoup moins important. On a plus de temps pour se

reposer. C’est pour cela que j’ai abandonné le métier d’entraîneur. J’avais déjà fait une pause à 55 ans. Six ans au Bayern valent 20 ans dans n’importe quel autre club. Il m’a fallu près de deux ans pour récupérer.

d’augmenter. Je ne pouvais pas rêver meilleures circonstances pour mettre un terme à ma carrière.

Et la Suisse, dans tout ça ?

J’avais le sentiment de m’être ressourcé. La motivation et l’envie de renouer avec la compétition étaient à nouveau là.

Notre premier objectif consiste à nous qualifier pour la seconde phase du tournoi. À partir de là, tout est possible. Néanmoins, il me semble prématuré d’évoquer dès à présent les quarts de finale.

Qu’en pensait votre femme ?

Qui sera le prochain champion du monde ?

Elle s’est inquiétée quand Uli Hoeness m’a appelé. J’ai essayé de la rassurer en lui disant que je me contenterais de dépanner le Bayern jusqu’à la fin de la saison. Finalement, je suis resté un an et demi.

Le Brésil, l’Argentine, l’Allemagne ou l’Espagne. L’une de ces quatre équipes triomphera. Je suis curieux de voir si une nation européenne peut s’imposer en Amérique du Sud, ce qui n’est encore jamais arrivé. Å

Pourtant, vous avez repris du service…

La Coupe du Monde au Brésil approche à grands pas. Qu’attendez-vous de ce tournoi ? J’ai hâte d’y être. Cette compétition s’annonce sous les meilleurs auspices. Tous les quatre ans, la popularité, l’écho médiati­ que et l’implication des télévisions ne cessent T H E F I FA W E E K LY

31



LE CL ASSEMENT FIFA Classement Équipe Évolution Points

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 56 58 59 60 61 62 63 63 65 66 67 68 69 69 71 72 73 74 74 76 77

Espagne Allemagne Argentine Colombie Portugal Uruguay Italie Suisse Pays-Bas Brésil

0 0 0 0 0 0 0 0 0 0

1507 1318 1251 1200 1172 1132 1120 1113 1106 1102

Belgique Grèce Angleterre États-Unis Chili Croatie Côte d’Ivoire Ukraine Bosnie-et-Herzégovine France Mexique Russie Équateur Ghana Danemark Suède Algérie République tchèque Slovénie Serbie Égypte Costa Rica Roumanie Iran Cap-Vert Panamá Écosse Arménie Venezuela Mali Nigeria Pérou Honduras Tunisie Turquie Hongrie Autriche Japon Islande Cameroun Paraguay Monténégro République de Corée Afrique du Sud Pays de Galles Albanie Australie Burkina Faso Norvège Slovaquie Guinée Libye Israël Émirats arabes unis Ouzbékistan Finlande République d'Irlande Sénégal Bolivie Zambie Togo Jordanie Arabie saoudite Maroc Bulgarie Sierra Leone Pologne

0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 -1 0 0 0 10 -1 -1 -1 4 2 -3 -3 -3 5 -4 -3 -1 4 -2 -2 -1 -1 0 0 0 0 1 8 1 1 2 -5 -5 0 0 -3 0 8 3 -2 0 -3 1 0 1 -7 14 -1 0 -1 -1

1098 1055 1041 1019 1005 971 912 907 899 893 892 870 852 851 831 793 792 766 762 752 748 743 734 727 726 722 717 716 715 703 701 698 692 689 677 668 648 641 624 616 607 594 581 576 574 571 571 566 558 557 555 552 548 548 546 539 528 526 519 519 509 504 487 486 486 464 461

Rang Août 2013

Sept. 2013

Oct. 2013

Nov. 2013

Déc. 2013

Jan. 2014

1 -41 -83 -125 -167 -209 1ère place

78 79 79 81 81 83 84 85 85 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 97 99 100 101 102 103 104 105 106 107 108 109 110 111 112 113 114 115 116 117 118 119 120 121 122 123 124 125 125 127 128 129 130 130 132 133 134 135 135 137 138 138 138 141 142 143 144

hausse du mois

Trinité-et-Tobago Oman Haïti RD Congo Jamaïque Belarus ARY Macédoine Congo Gabon Ouganda Salvador Angola Irlande du Nord Nouvelle-Zélande RP Chine Estonie Azerbaïdjan Éthiopie Moldavie Botswana Liberia Bénin Cuba Qatar Géorgie Lituanie Niger Zimbabwe Koweït République centrafricaine Guinée équatoriale Kenya Bahreïn Canada Guatemala Tadjikistan République dominicaine Irak Lettonie Malawi Tanzanie Soudan Mozambique Nouvelle-Calédonie Luxembourg Liban Burundi Chypre Namibie Philippines Kazakhstan Myanmar Malte Rwanda Suriname Turkménistan Grenade Syrie RDP Corée Hong Kong Lesotho Gambie Afghanistan Tahiti Palestine Vietnam Antigua-et-Barbuda

T H E F I FA W E E K LY

baisse du mois

0 6 0 1 -1 -2 -1 -1 -8 -1 2 -1 -1 -1 0 1 0 -2 0 0 1 0 0 2 -1 -1 0 2 -1 -1 0 0 0 1 1 1 1 -5 0 -1 2 0 -2 0 1 -2 0 1 0 0 0 1 2 3 1 2 2 -6 3 3 0 -7 2 2 -5 1 1

441 440 440 439 439 431 425 421 421 413 395 384 381 378 376 366 363 361 359 354 354 335 334 333 330 326 318 312 311 310 309 304 299 291 286 285 282 280 272 265 261 258 256 249 243 236 230 229 229 219 216 204 198 198 197 195 194 188 188 185 184 184 184 179 174 166 164

145 146 146 148 149 150 151 152 153 154 155 156 156 156 159 160 161 162 163 164 164 166 167 167 169 170 170 172 172 172 175 176 177 178 179 180 181 182 183 184 185 186 187 187 189 190 190 190 193 194 194 196 196 198 198 200 201 201 203 204 205 206 207 207 207

Mauritanie Sainte-Lucie Kirghizistan Thaïlande Singapour Saint-Kitts-et-Nevis Guyana Belize Laos Malaisie St-Vincent-et-les-Grenadines Liechtenstein Inde Porto Rico Nicaragua São Tomé-et-Principe Indonésie Guam Maldives Tchad Bangladesh Barbade Chinese Taipei Dominique Sri Lanka Aruba Îles Féroé Îles Salomon Népal Pakistan Bermudes Seychelles Maurice Curaçao Vanuatu Yémen Mongolie Fidji Samoa Guinée-Bissau Bahamas Swaziland Madagascar Montserrat Cambodge Brunei Timor oriental Tonga Îles Vierges américaines Îles Caïmans Papouasie-Nouvelle-Guinée Îles Vierges britanniques Samoa américaines Comores Andorre Érythrée Soudan du Sud Macao Somalie Djibouti Îles Cook Anguilla Bhoutan Saint-Marin Îles Turks-et-Caicos

-3 1 1 -2 1 -1 -1 7 -1 0 -2 -2 -2 -2 1 -2 0 -1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 -1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0

161 155 155 153 152 150 149 146 144 143 142 141 141 141 137 126 124 123 120 116 116 101 95 95 90 87 87 86 86 86 83 67 66 65 53 50 49 47 45 42 40 37 33 33 28 26 26 26 23 21 21 18 18 17 17 11 10 10 8 6 5 3 0 0 0

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First Love


Lieu : Oslo, Norvège Date : 12 janvier 2013 Heure : 10h35

Photograph by Levon Biss with support from Umbro/RPM

T H E F I FA W E E K LY

35 35


THE SOUND OF FOOTBALL

L’ O B J E T

Le chanteur de Geordie-Boy Hanspeter Kuenzler

L'album Let's Have a Party contient presque une heure de musique. Mais en réalité, Gascoigne chante à peine dix minutes. Tout le reste est l'œuvre d'invités comme Elvis Presley, qui contribue à une compilation de hits depuis sa tombe. Après avoir fait ses armes à Newcastle, Gazza, alors âgé de 23 ans, avait rejoint les Spurs de Tottenham et s'y était pleinement épanoui. Grâce à ses prestations chargées d'émotions lors de la Coupe du Monde en Italie et à son air narquois, il était devenu un héros national. Let's Have a Party est un exemple typique des dangers qui guettent un footballeur naïf lorsque ses conseillers perdent la tête. ­Apparemment, quelqu'un avait convaincu Gascoigne qu'il avait le potentiel de devenir une star de la chanson. Le footballeur a donc donné des interviews ­sérieuses aux revues musicales 36

comme Melody Maker, Q et Smash Hits, lors desquelles il s'est comparé à de grands noms, ce que lesdits magazines n'ont absolument pas apprécié. Ils ont alors publié des articles peu élogieux. Plus tard, il s'est avéré que la participation du joueur serait limitée au choix de quelques-unes de ses chansons préférées, qui seraient ensuite interprétées par d'autres voix, accompagnées d'un ordinateur. Outre l'extrait d'Elvis, l'album était composé d'un medley de “tubes” de Mozart et de Tchaïkovski en version disco. Gilbert O'Sullivan, auteur de chansons dans les années 70, a en outre chanté dix minutes de ses plus grands titres. Les pauvres auditeurs ont ainsi dû endurer des passages de soul et de motown. Gazza, lui, s'est contenté de hurler “All You Need is Love” et deux raps. Le premier apparaissait dans “Fog on the Tyne (Revisited)”, un subtile hymne pour les amis de Newcastle du

groupe folk-rock Lindisfarne. Avec cette chanson, il a atteint la deuxième place du hit-parade. “Geordie Boys”, la deuxième farce, est parvenue à se classer trente-et-unième, mais l'album n'a même pas accroché le top 100. Smash Hits a qualifié Let’s Have a Party de “33 tours le plus tragique de l’histoire”. C'était la première fois que le héros national faisait face à de telles attaques. Tout un nouveau monde, dont il ne soupçonnait pas l'existence jusque-là, se moquait de lui. Mais pourquoi personne ne l'avait prévenu ? Æ

Gazza and Friends, “Let’s Have a Par ty” (BMG Records) T H E F I FA W E E K LY

Un encart publicitaire paru dans la presse le 13 décembre 1952 prête au célèbre attaquant anglais Stanley Matthews les mots suivants : “Pour une cigarette qui ne gratte pas la gorge, je choisis Craven ‘A’ ”. Sur la photo, Matthews, le visage fier et vêtu du maillot de la sélection nationale, tient une Craven ‘A’ entre les doigts, alors qu’en réalité il est non-fumeur. En 1930, Dixie Dean, la star d’Everton, vante les mérites de la marque bon marché Carreras Clubs. À cette époque, on commence pourtant déjà à faire le lien entre cigarette et cancer. Trois ans plus tôt, en 1927, l’entraîneur d’Arsenal, Herbert Chapman, insiste d’ailleurs déjà pour que le défenseur Eddie Hapgood, à qui il confiera par la suite le brassard de capitaine, déclare sur l’honneur renoncer à l’alcool et à la cigarette, condition sine qua non à la ­signature du contrat. Aujourd’hui, le tabac a disparu des entraînements, l’idée même d’allumer une cigarette est partie en fumée. Pourtant, certains joueurs professionnels sauraient aujourd’hui encore faire bon usage de cet étui à cigarettes des années 1880, de fabrication anglaise. La star ­a nglaise Wayne Rooney a été photographié la cigarette à la bouche à plusieurs occasions, de même que le gardien italien champion du monde Gianluigi Buffon ou le Français ­Zinédine Zidane. Du côté de Manchester City, l’Italien Mario Balotelli fumait entre “cinq et six cigarettes par jour”, explique, agacé, son ancien entraîneur Roberto Mancini. Mais les personnes qui l’ont côtoyé savent que le plus grand des fumeurs reste l’ancien sélectionneur argentin Cesar Luis Menotti, champion du monde en 1978. Il arrivait que la silhouette sur le banc de touche de cet accro à la nicotine disparaisse derrière un nuage de fumée. Menotti aurait sans aucun doute été ravi de se voir offrir un étui à cigarettes orné d’un footballeur pour son anniversaire. Aujourd’hui, ce geste semblerait déplacé aux yeux de la plupart des joueurs professionnels, comme de leur ­entourage. Å

Sion Ap Tomos

Perikles Monioudis


LE TOURNANT

“Mon tacle à Wembley a tout changé” Une fracture de la cheville a mis fin à la carrière de Ramon Vega à Tottenham. Éloigné des terrains, il a dû réfléchir à son avenir. Depuis, le Suisse s’est lancé avec bonheur dans la gestion de patrimoine à Londres.

Abbie Trayler-Smith/Panos

T

out se déroulait parfaitement bien. J’avais 28 ans – le meilleur âge pour un footballeur – et je jouais en équipe de Suisse, j’avais en poche un bon contrat avec Tottenham et j’étais sur le point de disputer la finale de la Coupe de la Ligue anglaise. Je me sentais bien à Londres. Qui sait comment ma vie aurait évolué si, cet après-midi de 1999, le jour de la finale contre Leicester City, les choses s’étaient passées autrement ? À un moment, Emile Heskey s’est échappé seul vers le but. Il avait éliminé mon collègue Sol Campell et je savais que si nous ne voulions pas perdre cette rencontre, je devais le stopper à tout prix. Je me suis lancé à sa poursuite. Je me suis approché d’Heskey, j’ai essayé d’attendre le bon moment, cette fraction de seconde décisive, et je l’ai taclé. Dans les tribunes, l’explosion de joie des fans de Tottenham ne s’est pas fait attendre. Nous avons finalement gagné 1:0. Mon tacle glissé a eu l’effet escompté à Wembley, mas j’ai subi le revers de la médaille. Je me suis cassé la cheville en réalisant cette action, comme l’ont révélé ensuite des examens passés en Suisse. Le pronostic des médecins était pessimiste : neuf mois loin des terrains. Je ne peux pas dire que le monde se soit écroulé autour de moi. Mais passer les trois quarts d’une année sans jouer au football et au lieu de ça, aller pendant des semaines, voire des mois, chez le kinésithérapeute et au centre de remise en forme… il y a des perspectives plus réjouissantes pour un sportif de haut niveau. Un programme strict de rééducation a ­occupé mes journées et c’était bien ainsi. Mais

Nom: Ramon Vega Date et lieu de naissance: 14 juin 1971, Olten (Suisse) Position: Défenseur Carrière: Grasshopper Club, Cagliari, Tottenham Hotspur, Celtic Glasgow, Watford, Créteil Équipe nationale: 23 sélections avec la Suisse

le soir, j’étais seul dans mon appartement londonien et j’ai commencé à m’interroger sur mon avenir. Et si cette blessure mettait un terme à ma carrière ? Que faire ensuite ? Rester dans le monde du football ? Devenir entraîneur ? Envisager une reconversion ? Neuf mois, c’est long, suffisamment pour réfléchir sérieusement à toutes ces questions. Certains auraient désespéré et tourné en rond. Moi, j’ai essayé de poser dans ma tête les bases de mon avenir. Deux ans plus tard, je jouais à Watford. J’ai commencé à réaliser mon projet en démarrant une formation d’expert financier : les cours le matin, l’entraînement l’après-midi. Je connaissais déjà ce secteur pour avoir effectué par le passé un apprentissage commercial dans une banque suisse. Ça me plaisait. À tel point qu’à 32 ans, j’ai décidé d’arrêter le football. J’ai eu l’opportunité d’intégrer une société d’investissement. Puis, T H E F I FA W E E K LY

plus tard, j’ai fondé ma propre entreprise de ­ estion de patrimoine. Aujourd’hui, j’ai dix emg ployés. Il y a eu une période où j’en avais assez du football. Je ne suivais même plus les matches à la télévision, je préférais me consacrer pleinement à mon entreprise. À présent, je retourne dans les stades. Si l’occasion se présente pour moi d’aller assister à une rencontre à Wembley, je me souviendrai avec bonheur de ce jour de 1999 : de la finale de la Coupe de la Ligue, du triomphe avec Tottenham… et du tacle qui a changé ma vie. Å Propos recueillis par Alan Schweingruber

Dans la rubrique “Le Tournant”, de grands noms du football reviennent sur les moments qui ont marqué leur vie. 37


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COUPE MYSTÈRE DE L A FIFA

The FIFA Weekly Revue hebdomadaire publiée par la Fédération Internationale de Football Association (FIFA)

Des finales hivernales et une débâcle contre le Luxembourg vous permettront peut-être de gagner des billets pour la finale de la Coupe du Monde 2014 à Rio !

Site Internet : www.FIFA.com/TheWeekly Éditeur : FIFA, FIFA-Strasse 20, Case postale, CH-8044 Zurich Tél. : +41-(0)43-222 7777 Fax : +41-(0)43-222 7878

Notre photo montre le match de qualification pour la Coupe du Monde États-Unis – Costa Rica. Combien de finales de la Coupe du Monde ont eu lieu durant l'hiver calendaire ?

1

Président : Joseph S. Blatter

R 1 B 3

Secrétaire Général : Jérôme Valcke

M 2 F 4

Directeur de la Communication et des Affaires publiques : Walter De Gregorio Rédacteur en chef : Thomas Renggli

2

Conception artistique : Markus Nowak

Toujours présent en tournoi préliminaire depuis 1934 sans jamais gagner, ou presque : contre qui le Luxembourg a-t-il remporté un match de qualification pour la Coupe du Monde ? O

Y

Rédaction : Perikles Monioudis (rédacteur en chef adjoint), Alan Schweingruber, Sarah Steiner Collaborateurs réguliers : Jordi Punti (Barcelone), David Winner (Londres), Hanspeter Kuenzler (Londres), Roland Zorn (Francfort), Sven Goldmann (Berlin), Sérgio Xavier Filho (São Paulo), Luigi Garlando (Milan); Andreas Wilhelm Service photo : Peggy Knotz

L

3

Production : Hans-Peter Frei (directeur), Richie Krönert, Marianne Bolliger-Crittin, Mirijam Ziegler, Susanne Egli, Peter Utz

Ont collaboré à la rédaction de ce numéro : Honey Thaljieh, Graziella Waldvogel Secrétaire de rédaction : Loraine Mcdouall

Gündogan a tiré un penalty face à Neuer en finale de la Ligue des Champions. À combien de mètres le point de penalty se trouvait-il de la ligne de but ? A  10 U  13

Correction : Nena Morf 4

R

O 12 Y 14

Quelle équipe n'a encaissé aucun but adverse pendant une Coupe du Monde, à l'exception de la finale ? M  Brésil en 1994

S  Hongrie en 1954

T  Pays-Bas en 1974

K  Italie en 1934

Traduction : Sportstranslations.com Responsables de projet : Bernd Fisa, Christian Schaub

Solution de l’énigme de la semaine précédente : COPA (explications détaillées sur FIFA.com/theweekly).

Impression : Zofinger Tagblatt AG www.ztonline.ch Contact : feedback-TheWeekly@fifa.org La reproduction des photos et des articles, y compris sous forme d’extraits, est interdite, sauf accord de la rédaction et sous réserve de la mention “© The FIFA Weekly, 2014”. La rédaction n’a aucune obligation de publier des textes ou des photos non sollicités. Le logo FIFA est une marque déposée. Produit et imprimé en Suisse.

Inspiration et application : cus

Faites-nous parvenir vos réponses le 22 janvier 2014 au plus tard à feedback-TheWeekly@fifa.org. Les concurrents qui auront correctement répondu à toutes les questions jusqu’au 11 juin 2014 participeront à un tirage au sort pour tenter de remporter deux billets pour la finale de la Coupe du Monde, qui aura lieu le 13 juillet 2014. Avant de participer, nous vous inviter à consulter les conditions générales, ainsi que le règlement du concours. Vous trouverez toutes les informations utiles à cette adresse : fr.fifa.com/aboutfifa/organisation/the-fifa-weekly/rules.pdf T H E F I FA W E E K LY

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DEM ANDE Z À L A F IFA !

Les heureux vainqueurs de la Coupe Mystère de la FIFA

Quel a été le match le plus spectaculaire de l’histoire de la Coupe du Monde ? Luziana Alvares, Bilbao

EFFICACITÉ

De Mérida (Venezuela) à Zurich : Néreida del Carmen Cordoba Burbano et son compagnon José Beluardi Sanchez Gil dans le bureau de Sepp Blatter. En marge du voyage en Suisse et de la visite des locaux de la FIFA, les heureux vainqueurs du concours ont également remporté une invitation pour le Gala FIFA Ballon d’Or. “En tant que passionnée de football, cette rencontre avec Sepp Blatter restera comme l’un des plus grands moments de ma vie”, a déclaré Néreida.

Faut-il sanctionner les simulateurs d’une “exclusion temporaire” ?

288 135 euros, c’est le prix à l’unité des 59 buts de Cristiano Ronaldo pour le Real Madrid en 2013, pour un salaire annuel de 17 millions d’euros. De ce point de vue, le nouveau Ballon d’Or présente le meilleur rapport des trois nominés, devant Lionel Messi (410 256 euros

82+18

R É S U LTAT S D E L A S E M A I N E D E R N I È R E :

NO

OUI

18%

82%

4

IRONIE DU SORT

buts ont été inscrits en 32 minutes par Domenico Berardi dimanche, à l’occasion de la défaite 4:3 de l’AC Milan face à Sassuolo. Le club d’Emilie-Romagne a d’autant plus de mérite qu’il était mené 2:0 après 19 minutes de jeu. Le jeune Italien de 19 ans est par ailleurs le premier joueur à inscrire quatre buts face aux Rossoneri

LE NOUVE AU MAGA ZINE DE FOOTBALL The FIFA Weekly paraît tous les vendredis en version papier et électronique (www.Fifa.com/TheWeekly). En plus de proposer des informations sur les plus grandes stars et les plus beaux buts, le magazine ouvre le jeu vers les lecteurs. Envoyez vos réactions à : feedback-TheWeekly@fifa.org

COUP DOUBLE

59

en Serie A. Dans

secondes, c’est tout le temps qu’il

la foulée, les

a fallu à Arsenal pour inscrire les

dirigeants milanais

deux buts de la victoire sur Aston

ont remercié Massimi-

Villa lundi soir. Jack Wilshere (en

liano Allegri, l’homme

photo) et Olivier Giroud ont trouvé le chemin des

qui avait mené Sassuolo parmi l’élite en 2008.

filets aux 34ème et 35ème minutes pour donner la victoire aux Gunners. Les Londoniens pointent de

par but) et Franck Ribéry

nouveau en tête du classement, avec une longueur

(718 750 euros).

d’avance sur Manchester City et deux sur Chelsea.

40

T H E F I FA W E E K LY

Kurt Schorrer / foto-net, Getty Images

Réponse de Thomas Renggli, rédacteur en chef : Si l’on s’en tient au nombre de buts et aux circonstances, le quart de finale de l’édition 1954 entre la Suisse et l’Autriche (5:7) figure certainement en bonne place. La rencontre a été surnommée le Coup de chaud de Lausanne. Malgré une chaleur caniculaire (près de 40°), la Suisse a rapidement pris l’avantage, pour mener 3:0. Les Autrichiens ont répondu du tac au tac, en marquant à cinq reprises en huit minutes. Victime d’une insolation, le portier autrichien Kurt Schmid a dû quitter ses partenaires sans pouvoir être remplacé, conformément au règlement de l’époque. Dans les dernières minutes, le Suisse Roger Bocquet s’est lui aussi écroulé. On a appris par la suite qu’il souffrait d’une tumeur cérébrale. Avec 12 réalisations, cette rencontre reste la plus prolifique de l’histoire de la Coupe du Monde.


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