The FIFA Weekly Edition #15

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N O 15, 31 JANVIER 2014

ÉDITION FR ANÇAISE

Fédération Internationale de Football Association – depuis 1904

BECKENBAUER L’ITALIE NE SERA PAS CHAMPIONNE DU MONDE AUSTRALIE L’EUPHORIE DE LA COUPE DU MONDE SEPP BLATTER C’EST LE BRÉSIL QUI PORTE LA RESPONSABILITÉ

Le Professeur

Mario Zagallo W W W.FIFA.COM/ THEWEEKLY


DANS CE NUMÉRO

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Mario Zagallo – le Professeur de football Il a été joueur, il a été entraîneur et, dans les deux cas, il a connu le succès. Mario Zagallo fait partie des figures marquantes de l’histoire du football mondial. Joueur, il a joui des plus grandes libertés ; entraîneur, il s’est surpris lui-même. “Je n’aurais jamais cru devenir un leader”, confie-t-il dans un entretien exclusif. Tout cela ne l’a pas empêché de remporter quatre couronnes mondiales. “Il a définitivement marqué l’histoire”, déclare Ronaldo à son sujet.

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L a Colombie à l’agonie Touché au genou, Radamel Falcao restera éloigné des terrains pendant cinq mois. La participation de l’attaquant monégasque à la Coupe du Monde est donc compromise. Pendant ce temps, le tournoi d’ouverture de la Categoría Primera A débute en Colombie.

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“L’Olympiakos sur le toit de l’Olympe” La Superleague grecque traverse une série de crises, ce qui n’empêche pas l’Olympiakos de dominer la compétition de la tête et des épaules. En Ligue des Champions, les “Thrylos” affronteront Manchester United en huitième de finale.

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Beckenbauer – entretien avec le Kaiser Franz Beckenbauer a marqué l’histoire du football allemand en devenant champion du monde en tant que joueur, puis en tant que sélectionneur. L’ancien libéro voit le Brésil, l’Argentine, l’Allemagne et l’Espagne favoris de la prochaine Coupe du Monde.

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Amérique du Sud 10 membres www.conmebol.com

Radamel Falcao Rétabli à temps pour la Coupe du Monde ?

“ Top 11” : destinations de charme Dans le football moderne, les stades à l’aura mythique se font de plus en plus rares. Dans son Top 11 de la semaine, “The FIFA Weekly” vous propose de redécouvrir ces enceintes au charme unique en Uruguay, en Grèce et en Finlande. Un circuit pour les nostalgiques.

Deux millions d’Australiens jouent au football À quatre mois de Brésil 2014, l’équipe nationale apparaît divisée. Ça n’inquiète pas outre mesure les Australiens. Depuis 2006, le football connaît une popularité croissante sur le cinquième continent.

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S tades au Brésil : le Président Blatter prend position Malgré les retards sur les chantiers brésiliens, le Président de la FIFA reste optimiste.

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L e rythme de la Ligue des Champions “The Sound of Football” : Le chanteur et musicien Pat Thomas a su capter l’énergie et le dynamisme de ses idoles comme aucun autre artiste. Au rythme de ses mélodies endiablées, l’Asante Kotoko a remporté la Ligue des Champions d’Afrique.

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R obert Pirès : son centre le plus important Le milieu de terrain français a connu un instant de grâce à la 103ème minute de la finale de l’Euro 2000. Son centre de la gauche a directement trouvé David Trezeguet, qui ne s’est pas fait prier pour inscrire le but de la victoire. Grâce à ce “but en or”, la France est devenue championne d’Europe.

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Amérique du Nord et centrale 35 membres www.concacaf.com

Mario Zagallo a remporté quatre titres mondiaux

Coupe du Monde Féminine U-17 de la FIFA Du 15 mars au 4 avril 2014, Costa Rica

T H E F I FA W E E K LY

Tournoi Juniors FIFA/Blue Stars Du 28 au 29 mai 2014, Zurich


L A SEMAINE DANS LE MONDE DU FOOTBALL

Europe 53 membres www.uefa.com

Afrique 54 membres www.cafonline.com

Asie 46 membres www.the-afc.com

Océanie 11 membres www.oceaniafootball.com

Franz Beckenbauer L’interview

O NR. 15,31 31.JANVIER JANUAR2014 2014 N 15,

DEUTSCHE ÉDITION FRAUSGABE ANÇAISE

Fédération 1904 FédérationInternationale InternationalededeFootball FootballAssociation Association– –depuis Seit 1904

BECKENBAUER BECKENBAUER L’ITALIE NE SERA ITALIEN WIRD NICHT PAS CHAMPIONNE WELTMEISTER DU MONDE AUSTRALIEN AUSTRALIE DIE GROSSE L’EUPHORIE DE LA WM-EUPHORIE COUPE DU MONDE SEPP SEPP BLATTER BLATTER C’EST LE BRÉSIL BRASILIEN STEHT IN PORTE LA DERQUI VERANTWORTUNG RESPONSABILITÉ

Le DerProfesseur Professor

Mario Zagallo W W W.FIFA.COM/ THEWEEKLY

Mario Zagallo La photo de couverture montre le “Professeur” en juin 1970. Zagallo pose avec décontraction, en t-shirt blanc, après un entraînement au Mexique. Quelques jours plus tard, il remportera avec le Brésil sa troisième couronne mondiale.

Kostas Mitroglou La star de l'Olympiakos Le Pirée

Getty Images

Ange Postecoglou Le sélectionneur de l’Australie a un défi à relever

Coupe du Monde de la FIFA Du 12 juin au 13 juillet 2014, Brésil

Coupe du Monde Féminine U-20 de la FIFA Du 5 au 24 août 2014, Canada

T H E F I FA W E E K LY

Tournoi de Football des J.O. de la Jeunesse Du 15 au 27 août 2014, Nankin

Coupe du Monde des Clubs de la FIFA Du 10 au 20 décembre 2014, Maroc

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À DÉCOUVERT

Mário Zagallo a été champion du monde en tant que joueur, sélectionneur et adjoint. “Il a définitivement marqué l’histoire”, dit de lui Ronaldo.

Le professeur Thomas Renggli

Ricardo Moraes/Reuters

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aracanã, Rio de Janeiro, 16 juillet 1950. Coupe du Monde au pays du football roi. Rencontre décisive entre le Brésil et l’Uruguay. Officiellement, 173 850 spectateurs emplissent les travées du stade le plus imposant de la planète. Selon les sources, ils sont même 199 854, voire 203 851. Le scénario de la journée est écrit d’avance, avec bien plus de précision que ces quelques statistiques, et le tapis rouge est déroulé sous les pieds des Brésiliens qui vont remporter, c’est certain, leur première couronne mondiale. Jules Rimet, le président de la FIFA, a préparé un discours en portugais. La presse sacre la Seleçao avant même le coup d’envoi. Le déjeuner de l’équipe doit être interrompu à deux reprises car des hommes politiques adressent leurs félicitations aux joueurs. Chacun d’entre eux se voit en outre remettre une montre g ravée de l’inscription “Aux champions du ­ monde” en guise de cadeau. Las, rien ne se passe comme prévu. Au lieu d’une épopée héroïque, c’est le désormais ­célèbre Maracanaço, le “choc du Maracanã”, qui s’écrit sous les yeux d’un pays ayant toutes les difficultés du monde à réaliser qu’il vient de s’incliner 2:1. Dans les tribunes, un jeune homme de 18 ans

nommé Mário Jorge Lobo Zagallo suit avec ­passion le déroulement du match. Membre de l’armée, il a aidé à la construction de la nouvelle enceinte et a pu bénéficier d’un billet à tarif réduit. La grande fête promise n’a malheureusement jamais lieu. Le rêve se transforme en cauchemar pour le Brésil. Zagallo s’en souvient encore comme si c’était hier : “200 000 spectateurs agitaient joyeusement leurs mouchoirs. À la fin, ils ne nous ont servis qu’à sécher nos larmes. Tout le pays pleurait.” Pelé se remémore cet évènement en des termes quasiment identiques : “C’est la première fois que j’ai vu mon père pleurer. Je me suis promis de faire mieux, un jour, que les sélectionnés de l’époque.” Pelé fait effectivement mieux. Zagallo aussi. Les deux hommes remportent ensemble trois Coupes du Monde avec l’équipe auriverde. Le premier est un buteur et un meneur de jeu hors pair, tandis que le second se mue en équipier modèle en 1958 et 1962, puis en sélectionneur en 1970. Si le trophée Jules Rimet devient la propriété exclusive de la Fédération brésilienne en 1970, après la conquête du troisième titre, les deux compères n’y sont bien sûr pas étrangers. Zagallo, respectueusement surnommé le ­P rofesseur par ses hommes, est le tout premier entraîneur à devenir champion du monde après l’avoir déjà été en tant que joueur. T H E F I FA W E E K LY

Vingt-quatre ans plus tard, Zagallo touche également le nouveau trophée, la Coupe du Monde de la FIFA. Adjoint de Carlos Alberto ­Parreira, il décroche en effet une quatrième couronne aux États-Unis. Parreira voit cependant en lui bien plus qu’un simple assistant : “Sa présence sur le banc était un signe de notre force et donnait de la confiance aux joueurs. Son surnom de Professeur n’est pas un hasard. Zagallo était le trait d’union idéal entre le glorieux passé et le futur.” Le jeune Ronaldo, étoile montante du Brésil en 1994, est du même avis : “Zagallo était l’un des plus grands joueurs de son époque. Avec ses quatre titres de champion du monde, il a ­définitivement marqué l’histoire.” Mais quel titre revêt le plus de valeur ? Et quelle est la meilleure équipe brésilienne de tous les temps ? Zagallo tranche pour nous : “La sélection qui a gagné le premier titre en 1958 et celle qui a remporté le tournoi en 1970.” Il a été à chaque fois un personnage-clé, dans deux rôles différents. Ce simple fait est la preuve ­irréfutable que sans un véritable professeur, le football brésilien n’aurait pas pu exploiter pleinement son talent ni reléguer le Maracanaço aux oubliettes. Å

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MARIO JORGE LOBO Z AGALLO

Popperfoto/Getty Images

Le goût de la victoire Mario Zagallo, sélectionneur de l’équipe brésilienne championne du monde en 1970.

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T H E F I FA W E E K LY


MARIO JORGE LOBO Z AGALLO

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“ E N’AURAIS JAMAIS CRU DEVENIR UN LEADER”

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n l’espace de 40 ans, la Formiguinha (“petite fourmi”) est devenue un Velho Lobo (“vieux loup”). Dans l’intervalle, Mario Jorge Lobo Zagallo a conquis le monde. Aujourd’hui, sa carrière est indissociable de l’avènement de la sélection brésilienne. Il ne viendrait à l’idée de personne de mentionner les plus grands moments de la Seleção en Coupe du Monde sans parler de ce vieil homme de 82 ans, originaire de Maceio (capitale de l’État d’Alagoas) et aussi connu pour sa rudesse que pour sa superstition. Durant sa carrière de joueur, Zagallo a reçu le surnom de Formiguinha. À l’époque, les observateurs appréciaient son sens du collectif et son abnégation sur le terrain. Ces qualités lui ont valu de participer aux deux premiers sacres mondiaux du Brésil, en 1958 et 1962, en qualité de milieu gauche. T H E F I FA W E E K LY

Après des années d’expérience sur les bancs de touche, l’ancien international est devenu le Velho Lobo. En tant que sélectionneur, il a offert au Brésil sa troisième Coupe du Monde en 1970. Il a également mené son pays en finale de France 1998 et à la quatrième place de RFA 1974. Véritable meneur d’hommes, Zagallo distribuait aussi bien les critiques que les compliments, toujours dans l’intérêt supérieur du collectif.

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MARIO JORGE LOBO Z AGALLO

Mario Zagallo, quel rôle vous a posé le plus de problèmes dans votre carrière, notamment avec l’équipe du Brésil, joueur ou entraîneur ? Mario Zagallo : Il est toujours plus agréable de se retrouver sur le terrain, car les responsabilités qui pèsent sur le sélectionneur sont autrement plus compliquées. Il faut toujours avoir une idée derrière la tête lorsque l’on demande à un joueur d’occuper un poste en particulier. On doit également savoir se concentrer sur certains individus ou sur le groupe à l’entraînement. Il est aussi essentiel de faire preuve d’autorité de temps à autres. Jouer est toujours plus plaisant, mais les footballeurs ont également leur lot de problèmes à résoudre. Au final, ce sont eux qui remportent les matches. Un entraîneur doit garder la tête froide pour prendre les bonnes décisions à chaque 8

instant, effectuer les bons changements ou passer un savon à un joueur qui le mérite. Ce n’est pas facile. Si je devais choisir, je crois que je prendrais les deux car, au bout du compte, j’ai connu de grands succès dans ces deux rôles.

Pouvez-vous nous donner un exemple ? Nous étions menés face à l’Uruguay en 1970 [en demi-finale de la Coupe du Monde au Mexique, ndlr]. Nos adversaires ont ouvert le score après 19 minutes de jeu. Avant le match, il y avait un journaliste dans notre hôtel qui n’arrêtait pas de parler de la défaite du Brésil [contre l’Uruguay] dans le dernier match de la Coupe du Monde 1950. Ça nous a beaucoup gênés. Il perturbait notre concentration. Heureusement, nous avons égalisé trois minutes avant la T H E F I FA W E E K LY

“J’ai donné aux joueurs la confiance nécessaire pour faire ce dont ils étaient parfaitement capables.”

Paris Match/Getty Images

Retour au Brésil après la Coupe du Monde 1958 en Suède Mario Zagallo (en bas à dr.) avec le trophée Jules Rimet.


MARIO JORGE LOBO Z AGALLO

Popperfoto/Getty Images

Deuxième titre mondial Mario Zagallo a du mal à y croire (1962).

pause. Pendant la mi-temps, je n’ai pas dit un mot concernant la tactique. Je me suis énervé et j’ai même dit quelques obscénités. J’ai dit à mes joueurs que nous étions face à une équipe largement à notre portée. Je leur ai demandé d’oublier 1950 et de se reprendre, parce que je savais que nous allions gagner. Je leur ai fait comprendre que nous étions les plus forts. Tout ce que nous avions à faire, c’était de retrouver notre jeu. Nous ne pouvions pas perdre contre une telle équipe. Ils sont rentrés sur le terrain et nous avons gagné 3:1. J’ai dissipé l’aura de l’Uruguay et le Brésil est redevenu le Brésil.

Mais vous aviez parfois recours à des moyens tactiques pour gagner. J’ai vécu mes plus belles heures de sélectionneur au Mexique, quand nous avons offert au Brésil sa troisième couronne mondiale. Lorsque nous avions quitté le pays, nous étions présentés comme des ringards car nous évoluions toujours en 4-2-4. Quand j’étais joueur, nous avions gagné la Coupe du Monde 1958 en utilisant un 4-3-3, mais je souhaitais rendre mon équipe plus compacte. Nous avons commencé à défendre dès la moitié de terrain adverse. Le seul joueur que nous ne marquions pas, c’était le gardien de but… Nous avons ainsi pu former un bloc solide. Nos adversaires n’avaient pas d’espace. Ce principe établi, je me suis penché sur les caractéristiques de mes joueurs et sur leur état de forme. Le marquage de zone fonctionnait T H E F I FA W E E K LY

bien quand nous n’avions pas le ballon et, en attaque, nous disposions de sept joueurs à vocation offensive. Carlos Alberto Torres, Gerson, Clodoaldo, Rivellino, Tostao, Pelé et Jairzinho étaient tous concernés par ces phases de jeu. Derrière, nous gardions trois joueurs.

La Coupe du Monde 1958 reste le temps fort de votre carrière. En tant que footballeur, j’ai sans doute connu mon heure de gloire en finale de la Coupe du Monde 1958, contre la Suède. J’étais plus habitué à délivrer des passes décisives qu’à marquer moi-même. Pourtant, j’ai inscrit notre quatrième but [le Brésil s’était imposé 5:2], ce qui nous a permis de nous mettre à l’abri. J’ai aussi donné une passe décisive à Pelé sur l’un de ses [deux] buts. C’était magique. 9


MARIO JORGE LOBO Z AGALLO

Dîner au camp d’entraînement lors de la Coupe du Monde 1962 Zagallo (2ème en partant de g.) semble confiant à l’approche des prochains matches.

C’est Geraldo José de Almeida, un commentateur de Sao Paulo, qui me l’avait donné. Il criait sans arrêt : “Formiguinha ! Formiguinha s’avance balle au pied”. Je me comparais souvent à un sprinteur, pour plaisanter. En ce temps-là, personne ne faisait ce que je faisais. C’est alors que Vicente Feola [le sélectionneur brésilien en 1958] a commencé à vouloir réduire les espaces dès que son équipe perdait le ballon, pour mieux contre-attaquer. Nous sommes passés du 4-2-4 au 4-3-3, avec Garrincha, Pelé et Vava en pointe. Je jouais sur la gauche et je défendais beaucoup quand nous n’avions pas le ballon. Dès que nous l’avions récupéré, je devais remonter le couloir gauche. Mon rôle était donc double. Ce changement de stratégie a 10

donné d’excellents résultats. C’est ainsi que le Brésil a remporté la Coupe du Monde en 1958 et en 1962. Nous avons gagné ces deux tournois avec la même équipe et la même stratégie.

tions : “Reviens ! Fais ci, ne fais pas ça !” Parfois, il faut marquer les esprits. J’étais vraiment doué pour ça. Pourtant, je n’aurais jamais cru devenir un leader. Mais il arrive qu’on soit obligé de montrer la voie et de prendre les choses en main.

Quelles sont les qualités requises pour bien connaître ses joueurs ?

Dites-nous en plus…

Il faut savoir s’y prendre. Dans certains cas, il faut se mettre à leur niveau : les entraîneurs ne doivent pas toujours être distants. Il n’y a aucun mal à discuter avec eux. Je l’ai souvent fait et mon autorité n’en a jamais pâti. Cela dit, c’est bien gentil de plaisanter ensemble, mais lorsqu’il faut se mettre au travail, les choses ne sont plus les mêmes. Il faut tout changer, même votre façon de parler. Sur le banc, je ne pouvais pas me contenter de répéter sans arrêt les mêmes instruc-

Le match entre le Brésil et les Pays-Bas [en demi-finale de la Coupe du Monde 1998 en France] est un bon exemple. Nous nous sommes quittés sur un score de parité [1:1, après prolongation]. Avant les tirs au but, je suis allé parler à chacun de mes joueurs. Je ne savais pas que j’étais filmé. Je l’ai découvert plus tard, quand feu mon épouse m’en a parlé. Après la finale contre la France, je suis rentré chez moi. J’avais toujours cette défaite

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Popperfoto/Getty Images

On vous appelait Formiguinha à l’époque. D’où vous vient ce surnom ?


MARIO JORGE LOBO Z AGALLO

Duel au sommet Pelé (à g., Santos) et Mario Zagallo (Botafogo) lors d’un match de championnat (1959).

Popperfoto/Getty Images

3:0 en travers de la gorge. Pourtant, elle m’a dit que j’étais à l’origine du moment le plus fort de ce tournoi. Tout le monde se souvenait de cette scène au cours de laquelle j’avais regardé mes joueurs dans les yeux, en leur disant que nous allions battre les Pays-Bas. C’est ça, être entraîneur : il y a un temps pour parler durement et un temps pour être proche de ses joueurs. Je leur ai donné la confiance nécessaire pour faire ce dont ils étaient parfaitement capables. Et ça a marché ! Å

“Il faut savoir s’y prendre avec les joueurs. Dans certains cas, il faut se mettre à leur niveau.”

Propos recueillis par Bernardo Besouchet et Marcio Macculloch

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MARIO JORGE LOBO Z AGALLO

“Le seul joueur que nous ne marquions pas, c’était le gardien de but.”

Sven Simon/Imago

Aucune raison de s’inquiéter L’entraîneur Mario Zagallo emmène le Brésil jusqu’au titre mondial au Mexique en 1970.

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MARIO JORGE LOBO Z AGALLO

Victoire contre les Allemands Zagallo (à d.), sélectionneur des Brésiliens, enregistre un succès 1:0 à l’extérieur.

Sven Simon/Imago

Un père et un professeur Les lecteurs qui se sont déjà aventurés dans le merveilleux roman de Salman Rushdie Les enfants de minuit se souviendront peutêtre d’un personnage secondaire nommé ­“ professeur Zagallo”, également connu comme “crazy Zagallo”. J’ignore si Rushdie est fan de football ou s’il s’agit d’une coïncidence fortuite (Zagallo est un patronyme d’origine libanaise), mais j’ai toujours voulu voir dans ce personnage au sang bouillonnant un hommage au talent footballistique de Mario Zagallo. Le Velho Lobo (“vieux loup”) a été à la fois un professeur pour ses joueurs de l’équipe du Brésil et l’homme de l’ombre dont toutes les vedettes ont besoin pour briller. Certes, le grand Pelé est le seul joueur à avoir remporté trois Coupes du Monde avec son pays, mais Zagallo se place juste derrière, avec deux Coupes du Monde en tant que joueur, une en tant que sélectionneur et une quatrième en tant qu’adjoint de Parreira. Pour qu’un attaquant puisse tenter sa chance, il faut qu’un joueur ait précédemment fait un centre ou une passe. Rien ne résume aussi bien le rôle joué par Zagallo lors des deux finales qu’il a remportées avec le Brésil. À Stockholm, en 1958, il a marqué et offert à Pelé son deuxième but. À Santiago, en 1962, il s’est sacrifié en reculant d’un cran, adoptant des fonctions plus défensives qui ont stabilisé l’équipe.

Zagallo aura été, pour ainsi dire, le George Harrison de cette attaque magique dont tout le monde se souvient : Vavá, Didí, Pelé, Garrincha et Zagallo. À l’époque, on disait qu’il fallait l’énoncer comme si on chantait un rock : Be bop a lula, dou wap bam boum ! Carlos Alberto Parreira a dit de Zagallo qu’il était “un visionnaire”. Tostao l’a qualifié, quant à lui, “d’innovateur”. Tous les footballeurs qui l’ont connu évoquent leur ami avec respect et admiration. Zagallo est une légende du football brésilien qui résume parfaitement l’évolution du football moderne. Joueur intuitif, rapide et génial, il est progressivement devenu plus stratège, a cherché à comprendre la psychologie du footballeur professionnel mais sans jamais ­oublier les relations affectives. Zagallo était un père et un professeur, mais il avait aussi des côtés obscurs. Il était notamment obsédé par le chiffre 13. Il s’est marié un 13 et a remporté sa première Coupe du Monde en 58 (5+8=13). Sur ses vêtements, il y a toujours un 13 quelque part et il habite au 13ème étage d’un immeuble. Au mois d’août dernier, Zagallo a eu 82 ans, mais son esprit et son énergie restent ceux d’un gamin de 13 ans. Choisi par la Fédération brésilienne pour être l’un des ambassadeurs de la Coupe du Monde, avec Marta, Bebeto, ­Amarildo, Carlos Alberto et Ronaldo, Zagallo T H E F I FA W E E K LY

SUC C È S M A JEURS EN TAN T QUE JOUEUR Champion du monde : 1958, 1962 Champion de l’État de Rio de Janeiro : 1953, 1954, 1955 avec Flamengo ; 1961, 1962 avec Botafogo EN TAN T QU’EN T R AÎNEUR Champion du monde : 1970, 1994 (adjoint) Copa América : 1997 Coupe des Confédérations : 1997 Taça Brasil : 1968 Champion de l’État de Rio de Janeiro : 1967, 1968, 1972, 2001 (avec dif férents clubs)

va voyager aux quatre coins du monde pour parler de la compétition et de son équipe du Brésil, pour évoquer ses souvenirs et s’adonner à des pronostics. C’est que le Velho Lobo respire le football. Å

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LE S CHAMPIONN AT S À L A LOUPE

VU DES TRIBUNES

Categoría Primera A

Cinq mois sans Falcao JordÍ Punti est écrivain et auteur de nombreux articles sur le football dans les médias

opération à Porto, le corps médical a évalué à 50 % ses chances d’être sur pied pour Brésil 2014. Et encore, il s’agit d’un diagnostic optimiste pour une blessure de ce type. Le président de la République de Colombie Juan Manuel Santos a même appelé le joueur depuis le forum de Davos, en Suisse, pour l’encourager et l’assurer du soutien de tout le peuple cafetero.

espagnols.

Les cinq mois qui nous séparent du coup d’envoi de la Coupe du Monde vont être irrespirables pour les Colombiens, au chevet de la vedette de leur équipe nationale, Radamel Falcao. La grave lésion du ligament croisé dont a été victime l’attaquant monégasque le 22 janvier en Coupe de France a mis tout le pays en état d’alerte. Après son 14

Falcao incarne aujourd’hui l’âme d’une sélection colombienne que l’on n’avait pas vue aussi combattive et talentueuse depuis de nombreuses années. Les brillantes qualifications pour Brésil 2014, qui ont vu Falcao inscrire un tiers des buts de son équipe, ont permis de sortir d’un tunnel sans fin. En effet, la Colombie n’avait pas fréquenté l’épreuve reine depuis France 1998, édition T H E F I FA W E E K LY

où elle alignait l’équipe à la fois rebelle et attachante des Rincón, Asprilla et autres Valderrama. Le sélectionneur actuel, l’Argentin José Pékerman, s’appuie sur un groupe de joueurs évoluant très majoritairement en Europe. Pourtant, il a su trouver une alchimie qui confère une véritable identité de jeu à cette équipe, dans laquelle les individualités sont mises au service du collectif. Comme l’a déclaré le profesor Francisco Maturana, emblématique sélectionneur cafetero, “Pékerman a mis fin au régionalisme”. Dans le même temps, l’ancien coach albiceleste a su faire appel à l’expérience et il a convié l’une des grandes personnalités du football colombien, Faryd Mondragón. À 43 ans, le gardien participera à sa troisième Coupe du Monde.

Valery Hache/AFP

Courage, le “Tigre” ! Les joueurs de l’AS Monaco soutiennent leur coéquipier blessé, l’attaquant colombien Radamel Falcao.


La blessure de Falcao a ouvert un nouveau débat chez les supporters : qui le remplacera s’il n’est pas remis à temps ? Pékerman a l’embarras du choix. De par leurs trajectoires respectives, Jackson Martínez (FC Porto) et Carlos Bacca (Séville FC) s’imposent comme des solutions logiques, même si Teófilo Gutiérrez (River Plate) a affiché une belle complicité avec le Tigre. Et n’oublions pas Adrián Ramos (Hertha Berlin). À 28 ans, il n’a encore jamais connu les honneurs de la sélection, mais il a prouvé ses qualités de buteur en Bundesliga. De même, le technicien argentin devra se pencher sur les options que lui offre le football local. C’est justement ce week-end qu’a débuté le Championnat d’Ouverture 2014. Pour cette nouvelle saison, de nombreux clubs se sont renforcés, surtout dans l’optique de la Copa Libertadores. Tenant du titre, le Club Atlético Nacional (Medellín) a réussi ses débuts en signant une nette victoire. L’Independiente Santa Fe a fait de même, lui qui a effectué un profond remaniement à l’intersaison. Les clés de la défense ont été confiées à des jeunes issus de la formation et le club a enregistré le retour de deux vedettes : Wilder Medina et Jonathan Copete. Parmi les candidats au titre, citons également Millonarios (Bogotá), qui possède en l’Espagnol Juanma Lillo un nouvel entraîneur prônant un football à la fois efficace et spectaculaire. Son équipe aura pour figure de proue l’attaquant Dayro Moreno, meilleur buteur en 2013 et déjà auteur d’un doublé ce week-end face à Envigado. Ressemblance physique mise à part, Moreno pourrait d’ailleurs constituer une bonne solution pour occuper le poste laissé vacant par Falcao. Cela fait plusieurs décennies que le football colombien alimente les meilleurs championnats du monde, sans pour autant que l’expérience de sa légion étrangère bénéficie à son équipe nationale. Aujourd’hui, pour la première fois depuis bien longtemps, ces hommes suscitent un engouement réel. Dans ce contexte, le Championnat d’Ouverture fait donc figure d’apéritif avant une Coupe du Monde brésilienne où nous espérons voir Radamel Falcao faire trembler les filets. Å

“Le seul danger pour l’Olympiakos, c’est lui-même”

Superleague de Grèce

Olympiakos, le Crésus grec Perikles Monioudis est rédacteur pour The FIFA Weekly.

Cette saison encore, l'Olympiakos Le Pirée est la référence ultime en Grèce. Après 21 journées, le club du port d'Athènes est toujours invaincu et affiche 59 points au compteur, loin devant le PAOK Salonique entraîné par le Néerlandais Huub Stevens (48 points) et l'Atromitos Athènes (40 points). Il serait cependant erroné de parler en Grèce d'un championnat à deux vitesses, comme on qualifie parfois la Primera División espagnole. Car si le Real Madrid et le FC Barcelone sont depuis longtemps inaccessibles – bien que l'Atlético Madrid tente actuellement de rebattre les cartes –, l'Olympiakos est tout simplement la seule grande institution hellène encore debout. De nombreux clubs ont été victimes de la crise financière et de l'économie en berne, à l'image, récemment, de l'historique AEK Athènes, tombé en troisième division. Les matches arrangés, les sommes démesurées investies dans les effectifs et les présidents de clubs attirés par l'argent facile ont fait le reste. T H E F I FA W E E K LY

En raison de tous ces déboires, le classement de Superleague, le plus haut échelon du football grec, ressemble aujourd'hui à celui d'une troisième division améliorée. De petits clubs dont les matches à domicile se jouent généralement devant quelques centaines de spectateurs seulement se sont invités chez les “grands” et y font mieux que de la figuration. Ils rivalisent avec ce qu'il faut bien appeler les "équipes de jeunes" de clubs autrefois solidement installés, à l'image de l'OFI Crète (8ème du classement), du Panionios Athènes (11ème), du PAS Giannina (13ème) ou encore de l'Aris Salonique (18ème). Ces derniers n'ont d'ailleurs été autorisés à débuter la saison qu'à la condition de ne pas recruter plus de trois joueurs de plus de 24 ans. Au moins ont-ils eu le droit de participer. L'Olympiakos Le Pirée, le nouveau Crésus grec, peut se permettre de voir un peu plus loin et vise pour la saison prochaine une nouvelle qualification en Ligue des Champions. En attendant, il va accueillir le 25 février prochain un Manchester United en plein doute dans le cadre des huitièmes de finale aller de la compétition. L'an passé, Le Pirée s'était assuré dès le 3 mars le titre de champion, le 40ème de son histoire. Dans la situation actuelle, il apparaît évident que le seul danger pour l'Olympiakos, c'est lui-même. Il n'appartient qu'au club de ne pas reproduire les mêmes erreurs que l'AEK Athènes il y a peu. Å 15



Bundesliga

Désolation à Hambourg Sven Goldmann est spécialiste du football au quotidien Tagesspiegel de Berlin.

La fatigue s’empare de la Bundesliga après la trêve hivernale. La saison a repris comme elle s’était arrêtée. Le Bayern Munich a de nouveau gagné, 2:0 contre le Borussia Mönchengladbach, l’un de ses poursuivants au classement. Mais plus personne ne croit à une véritable poursuite en Bundesliga. L’équipe de Wolfsbourg, qui a été largement renforcée, a perdu à domicile contre Hanovre, Leverkusen s’est incliné à l’extérieur contre Fribourg, Dortmund a une nouvelle fois fait match nul, 2:2 contre Augsbourg.

Stuart Franklin/Bongarts/Getty Images

La seule équipe qui peut encore constituer un danger pour le Bayern, c’est le Bayern lui-même. Par exemple lorsque surviennent des problèmes de luxe entre ces joueurs de luxe évoluant dans un cadre luxueux. En ce moment, l’attaquant Mario Mandzukic, au sommet de son art la saison dernière, est vexé, car l’année prochaine, il subira la concurrence d’un autre attaquant à succès provenant de Dortmund, Robert Lewandowski. Apparemment, Mandzukic s’est senti tellement offensé par la nouvelle qu’il a prolongé sa trêve hivernale à l’entraînement. L’entraîneur Pep Guardiola ne l’a donc pas retenu pour le déplacement à Mönchengladbach.

“Je pense que moi aussi, je serais rentré chez moi. En fait, je trouve le public plutôt gentil.”

l’échelle mondiale. Lorsque Franz Beckenbauer est rentré de son exil new yorkais en 1980, il a préféré Hambourg à son Bayern. En 1983, le HSV a remporté la Coupe des clubs champions. Aujourd’hui, le seul domaine dans lequel excelle Hambourg est celui des dépenses. Le club a accumulé 100 millions d’euros de dette ces dernières années en tentant de recoller au peloton de tête, mais rien ne s’est passé comme prévu. “Je dois réparer les erreurs qui ont été commises ici ces quatre ou cinq dernières années, de folles années”, a déclaré l’ancien joueur bavarois Oliver Kreuzer, directeur sportif du club cette saison.

société de capitaux. À Hambourg, c’est la base, composée de 70 000 membres, qui dirige. Les choses risquent de changer. Sous le signe de la crise, une très large majorité de l’assemblée générale s’est prononcée en faveur d’une réorganisation de la section professionnelle. Le vote final aura lieu l’été prochain. Et personne ne veut croire que le HSV ne jouera plus en Bundesliga à ce moment-là. La reprise du championnat sème pourtant le doute. “Nous nous sommes préparés pendant trois semaines pour ce match”, a expliqué l’entraîneur Van Marwijk. “Quand on perd ensuite 0:3, on sait ce qu’il reste à faire. Moi je le sais et j’espère que les joueurs le savent aussi.” Å

Contrairement à ses concurrents de Munich, Dortmund ou Leverkusen, le HSV n’a pas filialisé sa section professionnelle dans une

Il semblerait que le Hambourg SV soit également touché par ces problèmes de luxe et d’ennui. Il fut un temps où le HSV était l’un des meilleurs clubs allemands, mais après sa honteuse défaite 0:3 à domicile contre Schalke 04, il pointe à la 16ème place du classement et n’est donc plus très loin de la relégation. Les supporters frigorifiés ont fait ce qu’ils font rarement : ils ont quitté le stade en nombre bien avant le coup de sifflet final. “Maintenant, qu’il n’y ait pas un joueur qui vienne me dire qu’il a un problème avec les spectateurs”, a lancé l’entraîneur néerlandais de Hambourg, Bert van Marwijk. “Je pense que moi aussi, je serais rentré chez moi. En fait, je trouve le public plutôt gentil.” Le HSV n’est pas n’importe quel club. Il est le seul à ne pas avoir quitté l’élite allemande une seule fois depuis 50 ans. Hambourg est une grosse écurie et a même été une référence à

Le HSV sous pression Le gardien de Hambourg Jaroslav Drobny en pleine action. T H E F I FA W E E K LY

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Position

Carrière de joueur

Principaux titres

Franz Beckenbauer

Libéro

Date et lieu de naissance

Bayern Munich

Bayern Munich, New York Cosmos, Hambourg SV

11 septembre 1945, Munich

427 matches, 60 buts (1964 – 1977)

Double champion du monde, champion d’Europe, triple vainqueur de la Coupe des clubs champions européens, dix fois champion d’Allemagne

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Carrière d’entraîneur Allemagne, Olympique Marseille, Bayern Munich

T H E F I FA W E E K LY

Martin Schoeller/August

Nom


L’ I N T E R V I E W

“L’Allemagne doit faire preuve de davantage de persévérance” Franz Beckenbauer reste la figure majeure du football allemand. En tant que capitaine puis comme sélectionneur, il a conduit la Mannschaft jusqu'à la consécration mondiale. Aujourd’hui âgé de 68 ans, il reproche à l’équipe de son pays sa frilosité et explique pourquoi l’Italie ne sera pas sacrée au Brésil. Franz Beckenbauer, selon vous, qui décrochera le titre de champion du monde en juillet prochain?

L’Allemagne n’est pourtant pas réputée pour être un pays complexé...

Beckenbauer : Les équipes sud-américaines ont de très grandes chances de réussir. Le Brésil et l’Argentine font figure de favoris. Mais l’Espagne et l’Allemagne sont elles aussi en pleine forme et peuvent espérer aller chercher le titre.

Vous avez raison. Mais il faut faire attention à ne pas tomber dans un cercle vicieux.

Et l’Italie? Non. L’Italie ne sera pas championne du monde cette année.

Pourquoi ? Ne faut-il pas justement se méfier des Italiens quand personne ne s’attend à les voir gagner ? Il ne faut jamais sous-estimer l’Italie, vous avez raison. Leur titre de 2006 était tout à fait mérité. Mais quand je regarde la sélection de Cesare Prandelli d’un peu plus près, j’estime que ses joueurs n’ont pas la qualité suffisante pour espérer décrocher une couronne mondiale.

Le dernier triomphe allemand lors d’une Coupe du Monde remonte à vingt-quatre ans déjà. Vous étiez alors assis sur le banc de touche, en tant qu’entraîneur. C’est vrai que ça remonte à bien longtemps. Depuis, l’Allemagne est passée tout près du titre à plusieurs reprises, elle a livré de belles prestations lors des tournois, mais au final, il a toujours manqué quelque chose.

Comment expliquez-vous ce manque de réussite ? L’Allemagne n’a pas fait preuve de suffisamment de persévérance. Bien sûr, la volonté était là. Mais pour décrocher un titre de cette importance, il faut se battre jusqu’au bout. Au cours des dix ou quinze dernières années, l’équipe allemande n’en a pas été capable. Aller jusqu’en demi-finale est une performance tout à fait honorable, je ne dis pas le contraire. Mais c’est précisément ce genre d’attitude qui vous empêche d’atteindre les objectifs suprêmes. Une certaine frilosité semble s’être installée dans les esprits.

Le Groupe G, avec le Ghana, le Portugal et les États-Unis, sera loin d’être un parcours de santé. Ce groupe s’annonce passionnant. L’Allemagne reste favorite et se qualifiera sans trop de difficulté. Derrière, il y a de fortes chances pour que les Portugais atteignent eux aussi les huitièmes de finale. Cette équipe est très forte et elle compte dans ses rangs un footballeur hors du commun. Au Brésil, Cristiano Ronaldo va vouloir montrer ce dont il est capable, on peut donc s’attendre à des matches spectaculaires. Quant au Ghana et aux États-Unis, je pense qu’ils se disputeront les troisième et quatrième places de ce Groupe G.

Jürgen Klinsmann se retrouvera face à son ancien adjoint, Joachim Löw. Dans quelle mesure ce contexte particulier peut-il influencer la psychologie des entraîneurs ? Je ne vois pas là de problème particulier. Klinsmann et Löw sont des amis de longue date. Ils mettront seulement leur amitié de côté pendant 90 minutes pour se concentrer sur la partie.

On raconte qu’à l’époque de leur collaboration, Joachim Löw était déjà le patron. Pouvez-vous confirmer ? Non, c’est faux. Le sélectionneur, c’était Klinsmann, même si dans l’ombre, Löw faisait du très bon travail. Ils formaient une équipe parfaite, ils se complétaient à merveille. Pendant cette période, Joachim Löw n’a jamais essayé de se mettre en avant, c’est une preuve de sa loyauté.

De nombreuses équipes disposent aujourd’hui d’un encadrement important composé d’assistants, de diététiciens, de kinésithérapeutes ou encore de psychologues. Quel regard portez-­ vous sur le football moderne? T H E F I FA W E E K LY

Je trouve ça positif. Le football vit avec son temps, c’est une évolution que l’on retrouve également dans d’autres domaines. Ce sport est devenu une science. Quand je repense à l’époque où nous jouions ! [Rires] On mangeait ce que la terre voulait bien nous donner. Et on s’entraînait jusqu’à tomber d’épuisement. Avec le recul, c’était complètement ridicule. Au contraire, il vaut mieux accorder au corps un peu de repos avant un match important.

Le football de haut niveau n’est-il pas en train de perdre de son charme ? L’année dernière, le Bayern a disputé pas moins de quatre compétitions différentes. Oui, c’est beaucoup trop, vous avez raison. À l’époque où je jouais, il arrivait de temps à autre que nous ayons une semaine éprouvante parce qu’on disputait un match amical ou un tournoi de seconde zone. Aujourd’hui, les rencontres de haut niveau s’enchaînent. Les joueurs sont trop sollicités et les spectateurs aussi.

Le Bayern est actuellement dans une forme olympique. Est-il meilleur que par le passé ? Disons que c’est la première fois qu’il y a autant de joueurs talentueux dans l’équipe. Le Bayern ne possède pas seulement 12 ou 13 bons éléments, il en a 22 ou 23. Le niveau est très homogène. Même les matches de l’équipe réserve sont très intéressants à regarder.

Que pensez-vous du travail de Pep Guardiola ? C’est un entraîneur formidable. Son palmarès parle pour lui. Mais si Guardiola est autant apprécié dans les rangs du Bayern, c’est aussi grâce à son tempérament ouvert et chaleureux. Il incarne l’entraîneur de demain. Å Propos recueillis par Alan Schweingruber

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LE MIROIR DU TEMPS

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Hambourg, Allemagne

1979 Permanente. 750 kilomètres séparent Munich et Hambourg. Pourtant, Paul Breitner (Bayern) et Kevin Keegan (HSV) vont manifestement chez le même coiffeur. On les voit ici discuter avant le coup d’envoi d’un match de championnat. Parlent-ils de football ou d’un soin capillaire à essayer à la mi-temps ? Keegan égalisera (1:1) pour le compte du HSV, d’ores et déjà assuré de gagner le titre, mais c’est le Bayern qui remportera le match 2:1.

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LE MIROIR DU TEMPS

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Mbombela, Afrique du Sud

Lutz Bongarts/Getty Images, Manus van Dyk/Getty Images

2013 Dreadlocks décolorées. Duel aérien entre Aristide Bancé (Burkina Faso) et Isaac Vorsah (Ghana) en demi-finale de la Coupe d’Afrique des Nations 2013. Le Burkina Faso s’imposera aux tirs au but. Bancé fait trembler les filets, Vorsah rate son tir au but. Le duel de la plus belle coiffure, lui, s’achève sur un score nul.

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TRIBUNE

L E T O P 11 D E L A S E M A I N E

11 adresses mythiques

Des chutes de neige et 1600 revolvers Alan Schweingruber

D

ans Les Lumières de la Ville, un film ­magnifique de Charlie Chaplin, un vagabond obtient les bonnes grâces d’un ­m illionnaire et, introduit chez ce dernier, découvre la vie de luxe. Ceux qui connaissent Chaplin et ses rôles savent qu’à partir de ce simple synopsis, il peut créer un film extraordinaire. Le plus savoureux (ou peutêtre le plus tragique) dans cette histoire, c’est que le riche ne reconnaît son nouvel ami que quand il est ivre. Charlot ne peut savourer l’opulence et le faste que par petites bouchées. Quel rapport y a-t-il avec le football ? Aucun. Mais cela nous rappelle que dans certaines zones de notre cerveau, de petites portes s’ouvrent quand on se retrouve dans des situations qui se répètent. La petite porte de la Coupe du Monde est déjà entrouverte. Il va falloir attendre encore 18 ­ ­semaines et quelques jours – en fonction de la date à laquelle vous lisez notre magazine – avant le début des 32 journées les plus belles de l’année. Quelles sont les images que vous associez à la Coupe du Monde ? L’irrésistible raid en solitaire de Diego Maradona en 1986 ? Le désormais ­légendaire coup de tête de Zinédine Zidane vingt ans plus tard ? Ou peut-être un fan anglais qui, n’ayant pas trouvé le chemin des toilettes, s’est soudain retrouvé face à Joe Cole nu dans les ­vestiaires ? Chaque génération a sa Coupe du Monde. Les tournois les plus marquants sont ceux qu’une personne vit entre dix et vingt-cinq ans. Les idoles sont encore des idoles. Le temps ne joue aucun rôle. Le reste, ce sont les autocollants Panini qui s’en chargent. Nous suivons donc avec passion quatre éditions de la compétition reine, tout au plus. Il est d’autant plus ­important de faire revivre régulièrement les vieilles images, même les plus anciennes. À la

manière d’une “carte postale”. Avec nostalgie. À la jeune génération des lecteurs de The FIFA Weekly : vous devriez donc lire la suite de l’article. Il fut un temps où s’écrivaient des histoires fabuleuses. En voici une qui figure peutêtre parmi les meilleures (ce jugement est forcément subjectif). En 1930, quand les arbitres portaient encore des casquettes et des cravates, la première Coupe du Monde faillit être annulée. On ne trouvait pas de pays hôte pour la compétition. Lorsque l’Uruguay se proposa, douze nations firent le voyage (en bateau pour de nombreuses équipes) avec tout leur matériel jusqu’à Montevideo, où il neigeait fort. Il régnait un froid glacial. Jusque-là, rien d’anormal : dans le sud aussi, il faut s’attendre à de violentes offensives de l’hiver. L’arbitre John Langenus, venu de Belgique, fut à l’origine de l’un des moments les plus mémorables du tournoi en dehors des terrains. Avant la finale, il fit subir aux 60 000 spectateurs une fouille corporelle. Si lors de l’édition 1990 en Italie, même des pièces de cinq francs suisses n’ont pas pu entrer dans les stades, en 1930, on se concentra sur les objets vraiment encombrants. Mille six cents revolvers furent rassemblés lors de ces fouilles. Six mois plus tard, la première des Lumières de la Ville avait lieu à Los Angeles. Le film dure 87 minutes, en comptant le happy end. Si Chaplin avait été fan de football, il aurait peutêtre rallongé la bande de trois minutes... Mais même dans sa longueur originale, le film permet de passer une excellente soirée. Si le merveilleux mélange de rire et de larmes, de tragédie et de bonheur qu’il propose vous dit quelque chose, ce n’est pas un hasard : comme je vous le disais, la petite porte de la Coupe du Monde est déjà entrouverte. Å La rubrique hebdomadaire de la rédaction de The FIFA Weekly T H E F I FA W E E K LY

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Estadio Centenario, Montevideo. Construit pour la Coupe du Monde 1930, ce stade est à ce jour le seul à avoir été classé monument historique du football mondial par la FIFA.

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Boleyn Ground, Londres. Plus connu sous le nom d’Upton Park, ce lieu incontournable illustre à merveille l’ambiance légendaire des stades britanniques.

3

Stade de la Grünwalder Strasse, Munich. En 1966, le TSV 1860 Munich y a décroché son premier – et à ce jour dernier – titre de champion d’Allemagne. Il accueille aujourd’hui les matches amateurs des Lions du TSV et du Bayern.

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De Kuip, Rotterdam. Inaugurée en 1937, cette arène est le décor rêvé pour accueillir les rencontres entre Feyenoord Rotterdam et l’Ajax Amsterdam, l’un des duels légendaires du football néerlandais.

5

Stadio San Paolo, Naples. Troisième stade d’Italie de par sa taille. C’est ici que Maradona a réalisé certains de ses exploits. Aujourd’hui encore, l’ambiance y est épous­ touflante.

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Stade Apostolos Nikolaïdis, Athènes. Communément appelé Leoforos, il accueille les matches à domicile du Panathinaïkos, encouragé par les supporters du groupe Gate 13.

7

Brügglifeld, Aarau. Une pelouse, une tribune en bois et des places debout : retour aux sources dans ce stade dont le club évolue pourtant en première division suisse.

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Rewirpowerstadion, Bochum. Tribunes au ras du terrain et enceinte entièrement couverte. Tous les ingrédients sont réunis pour garantir une ambiance bouillonnante !

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Celtic Park, Glasgow. Inauguré en 1892 et transformé à de nombreuses reprises, le stade écossais n’a rien perdu de son charme d’origine.

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Stade Mestalla, Valence. “Que bote Mestalla” (“Vibre, Mestalla, vibre”) : l’un des chants des supporters du FC Valence, qui ont déjà fait frémir plus d’un adversaire.

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Stade Lahden, Lahti. Vue imprenable sur le célèbre tremplin de saut à ski de Salpausselkä. Les joueurs finlandais, eux, ne sont malheureusement pas toujours dans une forme olympique.

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AUS TR ALIE

Le plan d’action australien 24

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Photograph by Levon Biss with support from Umbro/RPM

“Australian way of life.” Pour un Australien, les ingrédients d’une journée parfaite sont le soleil, la mer et, de plus en plus souvent, le football. Tant mieux, car ce sont les conditions dont les fans bénéficieront dans le camp des “Socceroos” au Brésil.


AUS TR ALIE

“Nous voulons que notre pays soit fier de nous.”

Un nouvel entraîneur, une équipe divisée et un groupe difficile : l’Australie a du souci à se faire pour la Coupe du Monde. L’enthousiasme règne néanmoins sur le cinquième continent.

Ange Postecoglou, entraîneur

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Alan Schweingruber

l est possible d’analyser la mentalité aus­ tralienne de plusieurs façons. Par ex­ emple en s’installant avec un Australien dans un pub et en laissant son charisme agir. On peut aussi passer en revue la journée du 7 décembre 2013. Moins de 24 heures après le tirage au sort des groupes dans la station balnéaire brésilienne de Costa do Sauípe, on a annoncé que l’équi­ pe d’Australie s’installerait à Vitória, un lieu de rêve, pour la Coupe du Monde. “Il s’agit d’une ville sûre et accueillante dis­ posant de plages magnifiques”, a déclaré David Gallop, le directeur exécutif de la fédération. “Les supporters australiens qui feront le dépla­ cement vont prendre beaucoup de plaisir à ­accompagner les Socceroos à la Coupe du Monde.” Il n’y aurait rien à ajouter à cette jolie déclarati­ on, si elle ne témoignait pas parfaitement de la mentalité des Australiens. Alors que d’autres nations et dirigeants se plaignent de la chaleur ou critiquent la mobilité, la fédération australienne

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AUS TR ALIE

Le capitaine Neill va-t-il être éjecté de l’équipe ? S’ils affichent une telle décontraction, c’est parce que les Socceroos ont besoin de leur dose d’insouciance pour garder leur équilibre. Trois qualifications de suite pour le grand rendez-vous mondial, cela relève de l’exploit pour eux. Mais depuis quelques mois, l’équipe du nouvel entraîneur Ange Postecoglou est partagée. D’un côté, il y a l’ancienne génération autour du capitaine Lucas Neill. De l’autre, il y a les jeunes recrues à qui l’avenir appartient. Après les deux défaites en matches amicaux contre le Brésil et la France (0:6 à chaque fois), Neil, 35 ans, a critiqué l’apport des jeunes. À présent, c’est lui qui est en mauvaise posture. Soit il perdra son brassard de capitaine, soit il ne sera même pas sélectionné. En effet, il est actuellement sans club et manque de temps de jeu. Postecoglou devrait se décider rapidement. Les prestations médiocres ne constituent cependant qu’une partie du problème. Ce qui a également dû perturber Neill à l’automne

­ ernier, c’est l’attitude cavalière de la fédérad tion après le deuxième revers 0:6. Alors que les joueurs étaient encore sous la douche, le sélectionneur allemand Holger Osieck a appris, dans les vestiaires, qu’il était limogé. Il n’y a pas que la manière de procéder qui a surpris. Osieck était quand même celui qui avait rendu possible cette quatrième participation de l’Australie à la Coupe du Monde. La compétition au Brésil aurait été sa première participation à l’épreuve suprême en tant qu’entraîneur principal. En 1990, en Italie, il assistait Franz Beckenbauer. Low y, l’homme organisé Le principal responsable de ce licenciement est Frank Lowy. L’homme de 83 ans préside la fédération depuis 2003 et comte parmi les

Le président Frank Lowy a la réputation d’être scrupuleux lorsqu’il mène à bien ses plans. D’ailleurs, ces derniers sont généralement judicieux.

Tout sauf un sport marginal Depuis 2006, le football a la cote en Australie. Le cinquième continent compte déjà 1,96 millions de footballeurs. 26

hommes les plus riches d’Australie. Outre sa grande fortune, Lowy possède aussi quatre yachts et lorsqu’il s’ennuie, il arrive qu’il entame un tour du monde. Il l’a déjà fait quatre fois dans sa vie. L’homme a la réputation d’être scrupuleux lorsqu’il mène à bien ses plans. D’ailleurs, ces derniers sont généralement loin d’être mauvais. Depuis qu’il est président, Lowy a changé beaucoup de choses dans le football australien. En 2006, l’Australie a intégré la confédération asiatique. Cette decision a marqué un tournant car, depuis, elle ne dispute plus sa qualification pour la Coupe du Monde contre des équipes “exotiques” comme les Tonga ou les Samoa, mais a l’occasion d’affronter des adversaires plus forts. D’une part, les Australiens évitent ainsi la difficile relégation avec les équi-

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Ange Postecoglou Le nouvel entraîneur des “Socceroos” doit faire en sorte que son équipe se rassemble.

Matt King / Getty Images, Mark Metcalfe / Getty Images

fournit à ses fans des informations sur le lieu et le logement : soleil, fête, mer à votre disposition ; veuillez réserver vos billets. Vitória, située dans une baie au nord de Rio de Janeiro, n’accueillera pas la moindre rencontre.


AUS TR ALIE

Fédération australienne de football Surnom “Socceroos” Adhésion à la FIFA 1963 Classement FIFA 56ème (571 points) Premier match international Nouvelle-Zélande – Australie 3:1 17 juin 1922 à Dunedin, Nouvelle-Zélande Plus large victoire Australie – Samoa américaines 31:0 11 avril 2001 à Coffs Harbour, Australie Plus large défaite Australie – Union d’Afrique du Sud 0:8 17 septembre 1955 à Adélaïde, Australie

Rolls Press / Popperfoto / Getty Images

Expérience en Coupe du Monde En 1974, l’Australie a d’abord été battue par la RDA, puis par la RFA (photo).

pes sud-américaines. D’autre part, ils sont sûrs d’affronter des formations d’un niveau respectable. Avec la création de l’A-League, composée de neuf équipes australiennes et du club néo-zélandais de Wellington Phoenix, la fédération est par ailleurs parvenue à rendre le football plus attractif. Depuis 2013, les matches de championnat sont diffusés gratuitement à la télévision. Les équipes de jeunes connaissent une énorme affluence. “Les adaptations de ces dix dernières années ont largement fait progresser notre football”, a déclaré le sélectionneur Ange Postecoglou. La FIFA soutient le développement avec son programme Grassroots, grâce auquel de jeunes Aborigènes ont l’occasion de découvrir le football à Melbourne et à Alice Springs. 3,1 millions de fans de football Évidemment, une telle évolution positive attire aussi les traditionalistes. Trois sports différents dominent depuis une éternité sur l’île aux 23 millions d’habitants : le cricket – le sport populaire –, ainsi que le rugby et le football australien ( footy). Personne ne peut passer à côté de ce trio géant. Certains pensent aussi que le foot-

ball est un sport de mollassons. Récemment, le quotidien The Sidney Morning Harald a publié un article intéressant. Il était titré "Le football se rapproche des sports les plus populaires d’Australie". Voici ce sur quoi il se basait : selon plusieurs enquêtes, 1,96 million de personnes pratiquent actuellement le football en Australie et près de la moitié est affiliée. Le journal a également indiqué dans son article que le cinquième continent comptait 3,1 millions de personnes intéressées par le football. Le rugby ne compte pour le moment que 470 000 affiliés, dont 52 000 adultes. Coupe du Monde 1974 : un laitier dans l’équipe À une époque, les Australiens ne connaissaient réellement que le cricket et le rugby. Ainsi, lorsque les Socceroos ont participé pour la première fois à la Coupe du Monde de football, en 1974, personne n’a prêté attention au tournoi et la fédération avait à peine assez d’argent pour financer le voyage jusqu’à Berlin. La plupart des joueurs étaient employés quelque part et ont dû prendre congé. Cette équipe hétéroclite composée T H E F I FA W E E K LY

d’amateurs a pourtant fait fureur. Mis à part un serrurier, un peintre et un vendeur, c’est surtout le laitier Manfred Schäfer qui a acquis de la notoriété en Allemagne. Grâce à son travail, qui lui faisait parcourir chaque jour 30 kilomètres à pied, il a impressionné par son physique hors du commun, même par rapport au football allemand très combattif de l’époque. Par ailleurs, en tant qu’émigrant originaire de Brême, il bénéficiait d’un statut spécial aux yeux du public, qu’il a dû abandonner une fois rentré chez lui. Quarante ans plus tard, les Socceroos des temps modernes peuvent se targuer d’attirer davantage l’attention. Postecoglou en est également conscient : “Nous voulons que notre pays soit fier de nous. Notre groupe comptant l’Espagne, le Chili et les Pays-Bas est difficile, mais nous pouvons battre chacun de ces adversaires. Je souhaite surtout que nous prenions un bon départ dans la compétition.” L’Australie jouera son premier match le 13 juin à Cuiabá contre le Chili. Cette ville se trouve à 2100 kilomètres du camp australien de Vitória... Easy going. Restez détendus, réservez vos billets. Å 27


LE DÉBAT

“Les meilleurs Jeux de tous les temps”

Gros plan L’Arena da Baixada, dans la ville de Curitiba, n’est pas encore terminée, un prêt d’urgence doit permette d’accélérer l’avancée des travaux.

Sarah Steiner Dans six mois débutera la Coupe du Monde 2014. Tout le monde attend cet événement avec impatience, le Brésil est en effet considéré comme LE pays du football et la Seleção fait ­figure de favorite. Mais au milieu de cette effervescence, des voix critiques se font entendre. Selon elles, l’ambiance dans le pays serait tendue, les habitants désapprouveraient la compétition et les travaux auraient pris du retard. Comme l’a souligné le Président Blatter dans son billet paru la semaine dernière, la FIFA ne doit en aucun cas servir de bouc émissaire aux problèmes politiques. Néanmoins, les détracteurs ont raison sur un point : sur les douze 28

stades prévus, cinq sont encore en construction et la ville de São Paulo a été secouée par la mort tragique de deux ouvriers. Mais le Brésil n’est pas un cas isolé. Avant la toute première Coupe du Monde, Uruguay 1930, les stades étaient déjà au cœur des discussions. D’importantes chutes de pluie avaient ralenti les travaux du nouveau Estadio Centenario et le match d’ouverture eut lieu à l’Estadio Pocitos devant 4 444 spectateurs, au lieu des 100 000 initialement prévus. Le Centenario fut inauguré cinq jours après le début du tournoi. La tribune nord n’était pas encore terminée. Pourtant, l’édition 1930 ouvrit la voie au plus prestigieux des tournois de football. Les Jeux Olympiques de Montréal, en 1976, ont connu des problèmes similaires. Des grèves combinées à un hiver particulièrement long ont freiné les travaux et la cérémonie d’ouverture s’est déroulée dans un stade inachevé. En dépit de ces contretemps, tout le monde se souvient de ces Jeux et de l’incroyable performance du gymnaste soviétique Nikolai Andrianov (sept médailles au total). Avant chaque grand événement sportif, les spéculations vont bon train quant à savoir si les installations seront achevées à temps. Les Jeux Olympiques de 2008, la Coupe du Monde 2010, T H E F I FA W E E K LY

l’Euro 2012 – tous ces tournois se sont retrouvés sous le feu des critiques. Et tous ont donné lieu à des épreuves inoubliables. “Les meilleurs Jeux de tous les temps”, avait l’habitude de dire ­Samaranch, l’ancien président du CIO. Il reste 130 jours aux Brésiliens pour terminer les stades. Sur les douze sites, sept sont déjà prêts à l’emploi et les cinq autres sont sur la bonne voie. Seul Curitiba est en retard sur le planning, raison pour laquelle le gouvernement de l’État du Paraná a débloqué un prêt d’urgence de 12 millions d'euros. Les responsables se livrent à une véritable course contre la montre. On peut certes se demander ce qui serait arrivé si ces fonds ­ n'avaient pas été levés à la dernière minute, mais l’histoire a montré que la tendance à la dramatisation était fréquente. Et en fin de compte, les grands tournois ont toujours débuté en temps et en heure. Å

Les débats de The FIFA Weekly Qu’est-ce qui vous interpelle ? De quels sujets aimeriez-vous discuter ? Envoyez vos propositions à : feedback-TheWeekly@fifa.org.

Friedemann Vogel/Getty Images

Les voix critiques à l’égard de la Coupe du Monde brésilienne noircissent le tableau. Mais cette tendance à la dramatisation n’a rien de nouveau.


LE DÉBAT

Ceux qui sont déjà allés au Brésil savent que la ponctualité n’est pas vraiment le fort de la population locale. On ne peut que le regretter. Les footballeurs brésiliens qui viennent jouer en Europe nous le rappellent d’ailleurs fréquemment. Au retour des vacances, les retards à l’entraînement sont nombreux. Pourtant, ils sont presque toujours prêts quand les choses sérieuses commencent. C’est la raison pour laquelle je suis convaincu que les douze stades de la Coupe du Monde seront prêts en temps et en heure.

LE BILLET DU PRÉSIDENT

On n’a pas besoin de douze stades pour organiser 64 matches de Coupe du Monde. Compte tenu du calendrier, six stades suffiraient amplement ; huit, c’est déjà presque trop. Le Brésil disposait de six enceintes pour la Coupe des Confédérations 2013. Sur les cinq nouveaux stades, quatre vont devenir inutiles, puisqu’aucune équipe de première division ne s’y installera. On dirait que tout ça a été conçu par l’Union Européenne. Thomas Berg, Francfort (Allemagne)

Vitaly Timoschuk, Donetsk (Ukraine)

Toute cette incertitude m’agace. J’ai vraiment le sentiment que les Brésiliens se moquent de la FIFA. Ils considèrent quasiment que l’organisation de la Coupe du Monde leur revient de droit et semblent très sûrs de leur fait. Si l’on se souvient de tout le cirque qui a entouré la Coupe des Confédérations, on est en droit de penser que confier la Coupe du Monde à ce pays était une erreur. David Silva-Vasquez, Boston (États-Unis)

“Il s’agit ici de confiance.”

Ne sait-on pas que la situation était tellement compromise en Afrique du Sud que la Coupe du Monde 2010 a failli avoir de nouveau lieu en Allemagne ? Même en Allemagne, on a entendu les discours les plus catastrophistes avant 2006. On se souvient que les inspecteurs des travaux avaient jugé la situation préoccupante sur le plan de la sécurité. À l’approche de grandes compétitions, les moindres petits contretemps prennent des allures de désastres. Je prends les paris que tous les sites seront prêts à temps pour la prochaine Coupe du Monde, comme prévu.

D’après le cahier des charges, les sites de la Coupe du Monde doivent être prêts un an avant le début de la compétition. C’était le cas pour Allemagne 2006 ! Malheureusement, ni l’Afrique du Sud, ni le Brésil n’ont réussi à tenir les délais.”

Jonas Freund, Hanovre (Allemagne)

Simon Jensch, Vienne (Autriche)

La FIFA exige un rapport sur la situation au Qatar Le 12 février 2014, le Comité Suprême pour la Réalisation et l’Héritage (Supreme Committee for Delivery and Legacy) doit remettre à la FIFA un rapport détaillé sur l’amélioration des conditions de travail au Qatar. C’est ce que le Secrétaire Général de la FIFA Jérôme Valcke a fait savoir aux responsables qataris dans une lettre officielle. Ce rapport servira à préparer l’audition devant le Parlement Européen. Le 13 février 2014, Theo Zwanziger représentera en effet la FIFA au cours d’une réunion à Bruxelles autour de ce dossier. La FIFA attend des précisions sur les mesures concrètes qui ont été prises pour l’amélioration des conditions de travail et, plus généralement, des conditions de vie des travailleurs

immigrés depuis la dernière visite du Président Blatter à Doha, laquelle remonte au mois de ­novembre 2013. “Nous sommes actuellement au cœur d’une procédure importante, qui devrait contribuer à améliorer la situation des personnes qui travaillent au Qatar”, a déclaré Zwanziger. Ce processus se poursuivra au-delà du 13 février. En effet, le Comité Exécutif étudiera un rapport qui lui sera présenté lors de sa réunion des 15 et 16 mars. “Il nous faut des règles claires et des mesures de confiance qui nous assurerons que la situation actuelle, qui n’est pas acceptable, s’améliore durablement”, conclut Zwanziger. Å

En 132 jours, on peut changer le monde !

C

es dernières semaines, les médias se sont faits l’écho de doutes sur la fiabilité du Brésil en tant que pays hôte de la Coupe du Monde. La nouvelle du retard pris par les chantiers des stades de Curitiba et de São Paulo (provoqué par l’écroulement d’une grue) a donné du grain à moudre à nos détracteurs. Une fois de plus, la question d’un plan B a été soulevée publiquement. Il s’agit ici d’une question fondamentale, il s’agit de confiance. Si nous avons dit que nous jouerions sur douze sites, nous devons jouer sur douze sites. Toute autre décision serait un constat d’échec – pour le Brésil, mais aussi pour la FIFA. Nous avons déterminé les douze sites le 31 mai 2009, il y a près de cinq ans. Cette période aurait dû suffire pour mettre en place les infrastructures. La FIFA peut signaler les manquements. C’est cependant le Comité organisateur local qui porte ici la responsabilité. Personnellement, je reste serein, car je connais le scénario qui se déroule actuellement au Brésil, j’en ai déjà fait l’expérience. Pratiquement avant chaque Coupe du Monde et avant tous les Jeux Olympiques, il y a eu des retards dans les préparatifs et dans la livraison des infrastructures. En fin de compte, dans la plupart des cas, tout a fonctionné sans difficulté. Les discussions constructives que j’ai menées avec la présidente brésilienne Dilma Rousseff, la semaine dernière à Zurich, m’incitent à l’optimisme. Il reste 132 jours, avant le début de la Coupe du Monde au Brésil : c’est bien assez pour changer le monde. Dans le roman de Jules Verne, Phileas Fogg fait même le tour du monde en quatre-vingts jours. Chers amis du football, je vous le promets : tout ira bien !

Votre Sepp Blatter T H E F I FA W E E K LY

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A FIFA World Cup in Brazil is just like Visa: everyone is welcome.

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LE CL ASSEMENT FIFA Classement Équipe Évolution Points

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 56 58 59 60 61 62 63 63 65 66 67 68 69 69 71 72 73 74 74 76 77

Espagne Allemagne Argentine Colombie Portugal Uruguay Italie Suisse Pays-Bas Brésil

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1507 1318 1251 1200 1172 1132 1120 1113 1106 1102

Belgique Grèce Angleterre États-Unis Chili Croatie Côte d’Ivoire Ukraine Bosnie-et-Herzégovine France Mexique Russie Équateur Ghana Danemark Suède Algérie République tchèque Slovénie Serbie Égypte Costa Rica Roumanie Iran Cap-Vert Panamá Écosse Arménie Venezuela Mali Nigeria Pérou Honduras Tunisie Turquie Hongrie Autriche Japon Islande Cameroun Paraguay Monténégro République de Corée Afrique du Sud Pays de Galles Albanie Australie Burkina Faso Norvège Slovaquie Guinée Libye Israël Émirats arabes unis Ouzbékistan Finlande République d'Irlande Sénégal Bolivie Zambie Togo Jordanie Arabie saoudite Maroc Bulgarie Sierra Leone Pologne

0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 -1 0 0 0 10 -1 -1 -1 4 2 -3 -3 -3 5 -4 -3 -1 4 -2 -2 -1 -1 0 0 0 0 1 8 1 1 2 -5 -5 0 0 -3 0 8 3 -2 0 -3 1 0 1 -7 14 -1 0 -1 -1

1098 1055 1041 1019 1005 971 912 907 899 893 892 870 852 851 831 793 792 766 762 752 748 743 734 727 726 722 717 716 715 703 701 698 692 689 677 668 648 641 624 616 607 594 581 576 574 571 571 566 558 557 555 552 548 548 546 539 528 526 519 519 509 504 487 486 486 464 461

Rang Août 2013

Sept. 2013

Oct. 2013

→ http://fr.fifa.com/worldranking/index.html

Nov. 2013

Déc. 2013

Jan. 2014

1 -41 -83 -125 -167 -209 1ère place

78 79 79 81 81 83 84 85 85 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 97 99 100 101 102 103 104 105 106 107 108 109 110 111 112 113 114 115 116 117 118 119 120 121 122 123 124 125 125 127 128 129 130 130 132 133 134 135 135 137 138 138 138 141 142 143 144

hausse du mois

Trinité-et-Tobago Oman Haïti RD Congo Jamaïque Belarus ARY Macédoine Congo Gabon Ouganda Salvador Angola Irlande du Nord Nouvelle-Zélande RP Chine Estonie Azerbaïdjan Éthiopie Moldavie Botswana Liberia Bénin Cuba Qatar Géorgie Lituanie Niger Zimbabwe Koweït République centrafricaine Guinée équatoriale Kenya Bahreïn Canada Guatemala Tadjikistan République dominicaine Irak Lettonie Malawi Tanzanie Soudan Mozambique Nouvelle-Calédonie Luxembourg Liban Burundi Chypre Namibie Philippines Kazakhstan Myanmar Malte Rwanda Suriname Turkménistan Grenade Syrie RDP Corée Hong Kong Lesotho Gambie Afghanistan Tahiti Palestine Vietnam Antigua-et-Barbuda

T H E F I FA W E E K LY

baisse du mois

0 6 0 1 -1 -2 -1 -1 -8 -1 2 -1 -1 -1 0 1 0 -2 0 0 1 0 0 2 -1 -1 0 2 -1 -1 0 0 0 1 1 1 1 -5 0 -1 2 0 -2 0 1 -2 0 1 0 0 0 1 2 3 1 2 2 -6 3 3 0 -7 2 2 -5 1 1

441 440 440 439 439 431 425 421 421 413 395 384 381 378 376 366 363 361 359 354 354 335 334 333 330 326 318 312 311 310 309 304 299 291 286 285 282 280 272 265 261 258 256 249 243 236 230 229 229 219 216 204 198 198 197 195 194 188 188 185 184 184 184 179 174 166 164

145 146 146 148 149 150 151 152 153 154 155 156 156 156 159 160 161 162 163 164 164 166 167 167 169 170 170 172 172 172 175 176 177 178 179 180 181 182 183 184 185 186 187 187 189 190 190 190 193 194 194 196 196 198 198 200 201 201 203 204 205 206 207 207 207

Mauritanie Sainte-Lucie Kirghizistan Thaïlande Singapour Saint-Kitts-et-Nevis Guyana Belize Laos Malaisie St-Vincent-et-les-Grenadines Liechtenstein Inde Porto Rico Nicaragua São Tomé-et-Principe Indonésie Guam Maldives Tchad Bangladesh Barbade Chinese Taipei Dominique Sri Lanka Aruba Îles Féroé Îles Salomon Népal Pakistan Bermudes Seychelles Maurice Curaçao Vanuatu Yémen Mongolie Fidji Samoa Guinée-Bissau Bahamas Swaziland Madagascar Montserrat Cambodge Brunei Timor oriental Tonga Îles Vierges américaines Îles Caïmans Papouasie-Nouvelle-Guinée Îles Vierges britanniques Samoa américaines Comores Andorre Érythrée Soudan du Sud Macao Somalie Djibouti Îles Cook Anguilla Bhoutan Saint-Marin Îles Turks-et-Caicos

-3 1 1 -2 1 -1 -1 7 -1 0 -2 -2 -2 -2 1 -2 0 -1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 -1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0

161 155 155 153 152 150 149 146 144 143 142 141 141 141 137 126 124 123 120 116 116 101 95 95 90 87 87 86 86 86 83 67 66 65 53 50 49 47 45 42 40 37 33 33 28 26 26 26 23 21 21 18 18 17 17 11 10 10 8 6 5 3 0 0 0

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First Love

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T H E F I FA W E E K LY


L i e u : C i t é S o l e i l , P o r t- au - P r i n c e , H a ï t i Date : 4 mars 2013 Heu re : 17 h0 5

Helmut Wachter / 13 Photo

T H E F I FA W E E K LY

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EVERY GASP EVERY SCREAM EVERY ROAR EVERY DIVE EVERY BALL E V E RY PAS S EVERY CHANCE EVERY STRIKE E V E R Y B E AU T I F U L D E TA I L SHALL BE SEEN SHALL BE HEARD S H A L L B E FE LT

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→ http://www.fifa.com/worldcup

À “Campo Bahia”, l’allemand est de mise

Ouvrage allemand Le “Campo Bahia” de l’équipe d’Allemagne commence à prendre forme.

Pendant la Coupe du Monde, l’équipe d’Allemagne prendra des allures de Club Robinson. Pour autant, les responsables de la “Mannschaft” n’entendent pas partir à l’aventure. Sven Goldmann

Q Paulo Whitaker/Reuters

uand les Allemands se lancent à la découverte du monde, ils préfèrent généralement rester sur les sentiers balisés. Le soleil, la plage et les palmiers, c’est bien beau, mais pas question de se passer du confort moderne. C’est la raison pour laquelle les agences de voyages ont i­ nventé les Clubs Robinson : de superbes sites de vacances depuis lesquels les destinations les plus exotiques livrent tous leurs secrets… sans les soucis d’un contact prolongé avec la nature ou des conditions de vie locales. “Campo Bahia” Pour l’équipe d’Allemagne, la Coupe du Monde au Brésil aura donc des faux airs de Club Robinson. La vraie surprise jusqu’à présent, c’est que la préparation de l’équipe nationale se déroule sans

accroc. Cette destination n’était pourtant ni prévue, ni souhaitée. Les Allemands auraient préféré s’établir plus au sud du Brésil, où le climat est plus frais et la mentalité plus proche de ce qu’ils connaissent : dans les États de Santa Catarina ou du Rio Rande do Sul, près de la moitié de la population est d’origine allemande. Au lieu de cela, la Mannschaft a hérité de trois rendez-vous dans la moiteur tropicale de Salvador, Recife et Fortaleza. Comme aucun endroit ne semblait convenir pour que l’Allemagne y prenne ses quartiers, elle a décidé de construire elle-même son camp de base. Le “Campo Bahia” se dressera donc sur une surface de 15 000 mètres carrés quelque part à Bahia, tel une sorte de Club Robinson à l’usage exclusif de l’équipe et de sa délégation.

2006, les joueurs et le sélectionneur allemands étaient installés à Berlin, au milieu de l’agitation. Le soir, ils empruntaient le service de navette pour leurs excursions en centre-ville. Quatre ans plus tard à Johannesburg, ils se sont retranchés derrière les grilles d’un camp de vacances. De toute évidence, ils ont pris goût à la solitude. L’aéroport de la petite ville de Porto Seguro se trouve à une demi-heure du camp de base allemand. De là, l’équipe pourra s’envoler tranquillement pour rejoindre les différents sites sur lesquels elle devra se produire. Détour par le Tyrol Le village allemand de Bahia va constituer la plaque tournant du programme mis au point par les dirigeants allemands pour la Coupe du Monde au Brésil. À l’issue de la saison de Bundesliga, il y aura des matches amicaux contre la Pologne, l’Arménie et le Cameroun, ainsi que le traditionnel stage de préparation dans le sud du Tyrol. Néanmoins, le groupe rejoindra le Brésil une bonne semaine avant le premier match de la phase de groupes, histoire de ­s’acclimater à ce nouvel environnement. Å

Les vertus du calme Les temps changent et les habitudes évoluent. Il y a huit ans, pendant la Coupe du Monde T H E F I FA W E E K LY

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THE SOUND OF FOOTBALL

L’ O B J E T

Perikles Monioudis

Hanspeter Kuenzler Rarement un artiste aura réussi à retranscrire en ­musique les feintes, les tirs et les danses de la victoire de ses idoles footballistiques comme le chanteur ghanéen Pat Thomas et son groupe. Né en 1951, Pat Thomas est originaire de Kumasi, la deuxième ville du Ghana et la capitale de la région Ashanti. Son père était professeur de musique, sa mère était à la tête d’un groupe et son oncle Onyina appartenait dans les années 50 aux grands noms de la scène musicale ghanéenne avec Onyina’s Guitar Band. Le style en vogue au Ghana était alors le highlife, un mélange – qui avait mûri depuis quelques décennies déjà – de rythmes traditionnels, de chants de marins, de musique de fanfare européenne, de rumba congolaise, de soukouss, de jazz et de ska. Lorsqu’à la fin des sixties, les guitares électriques 36

ont commencé à s’y ajouter, Pat avait appris suffisamment d’accords de guitare et de rythmes syncopés de percussions en regardant jouer son oncle pour pouvoir s’affirmer sur la nouvelle scène musicale. En 1973, il a formé son premier groupe, Sweet Beans. Mais c’est dans les années 80 que sa carrière a atteint son point culminant, y compris à l’échelle internationale. C’est en effet durant cette décennie que sont sortis deux de ses meilleurs albums, tous deux dédiés au club de football de sa ville natale, Asante Kotoko. Il faut dire que les Porcs-épics constituaient une bonne source d’inspiration et lui donnaient de nombreuses raisons de faire la fête. Avec 23 couronnes nationales à son actif à ce jour, Asante Kotoko est le club le plus titré du Ghana et son stade peut accueillir pas moins de 43 000 spectateurs. En 1983, Asante Kotoko a non seulement remporté le championnat du Ghana, mais

également la Coupe d’Afrique des Clubs Champions. Pat Thomas a célébré ces événements à travers son mini-album Asante Kotoko, qui mettait particulièrement en valeur toutes ses qualités de musicien : explosions de cuivres funky, groove aérien, riffs de guitare ravageurs et répétitions hypnotiques. La chanson-titre a aussitôt été adoptée pour accompagner l’entrée de l’équipe dans le stade. Elle était en outre régulièrement jouée à la mi-temps. En 1985, Thomas a réitéré son tour de force avec un album célébrant cette fois-ci le 50ème anniversaire du club, Kumasi Asante Kotoko – Golden Jubilee. Les chansons portaient des titres évocateurs : “Kotoko Chairman”, “Kotoko Cup Winners”, “Kumasi Ladies Club” ou encore “The Players Condition”. Pour vous faire une idée, imaginez les Beatles interprétant des hymnes à la gloire de la superbe condition physique des joueurs ou du président de Liverpool ! Æ T H E F I FA W E E K LY

Sion Ap Tomos

Rythmes ravageurs en l’honneur d’Asante Kotoko

Lorsqu’un manque se fait sentir, c’est bon pour les affaires. Vers 1880, les passionnés de football manquaient d’objets de dévotion et d’objets qu’ils pourraient collectionner sans se ruiner. John Alexander Baines, originaire de Bradford en Angleterre, a compris qu’il y avait là quelque chose à exploiter et a créé un marché pour les cartes de football imprimées. Ces cartes affichaient des logos multicolores accompagnés de jolies écritures, des messages inoffensifs comme Now’s your chance, Well shot ou Play up Worcester au-dessus de l’image. Il n’existait pas encore de photos des stars de ce sport encore récent, puisque la photographie elle-même n’en était qu’à ses premiers balbutiements. Vers 1888 apparaît le premier appareil photo à pellicule produit en grande série : le Kodak numéro 1. Néanmoins, les cartes à collectionner du fabricant de jouets Baines seront encore longtemps ornées de portraits dessinés des joueurs. Les images colorées Panini, qui dominent aujourd’hui le marché des cartes de football, voient le jour en 1961. Elles sont autocollantes, alors que les cartes Baines présentent des ­informations sur les clubs au verso. Ce sont des équipes et des joueurs de football italiens de la saison 1961/62 qui figurent sur les premières images Panini. Baines dit avoir imprimé 20 millions de cartes, ce qui est considérable pour l’époque. Cependant, très peu ont été conservées, dont le set de cartes appartenant à la collection de la FIFA. Panini, en revanche, continue de vendre en grande quantité. Pendant la Coupe du Monde 2010, 70 millions de petits paquets de cartes ont été écoulés rien qu’en Allemagne. Ce nombre a même atteint 160 millions lors du grand rendez-vous mondial 2006. John Baines a rapidement conçu des cartes pour d’autres disciplines, comme le cricket ou l’équitation ; il a fini par couvrir tous les sports. Baines n’a pas été le premier à avoir l’idée des cartes à collectionner. Avant lui, dans le ­Nouveau Monde, des éditeurs en proposaient déjà pour le baseball. Mais cela n’enlève rien à son succès. Å


“J’ai eu un trou noir après le but vainqueur”

LE TOURNANT

Le 2 juillet 2000, peu après 22 heures, son exploit est entré dans l’histoire du football français : grâce à son dribble et son centre réussis, Robert Pirès a offert à David Trezeguet le “but en or” en finale de l’Euro.

Nom Robert Pirès Date et lieu de naissance 29 octobre 1973, Reims (France)

J

’ai été sélectionné pour la première fois en équipe de France Espoirs en 1996, pour les Jeux Olympiques d’Atlanta, où le Portugal nous a éliminés en quarts de finale. Ç’a été une première expérience très enrichissante et très importante pour moi. Elle a été suivie de ma première sélection chez les A et même si je n’étais que remplaçant, je savais que le sélectionneur Aimé Jacquet avait confiance en moi. Deux ans plus tard, j’ai fait partie de cette formidable équipe qui est devenue championne du monde sur son propre sol. Contre le Brésil en finale. Même si j’ai suivi le match depuis le banc de touche, ce moment reste indescriptible. Les émotions te submergent, tu ne réalises pas. Il se passe des milliers de choses à la fois, le pays est sens dessus dessous, c’est de la folie pure. Cet évènement a énormément rapproché les joueurs, des liens d’amitié forts ont été créés. Deux ans plus tard, il y a eu l’Euro et donc l’un des moments les plus importants de ma carrière. L’un de ces instants qui te marquent pour le reste de ta vie. Je n’ai pas beaucoup joué pendant le tournoi, mais j’ai pu entrer sur le terrain en finale contre l’Italie. Nous avons égalisé à 1:1 pendant le temps additionnel et arraché les prolongations. À l’époque, il y avait encore le “but en or” et nous savions donc que la prochaine équipe qui inscrirait un but gagnerait le match. À la 103ème minute, j’ai débordé sur la gauche, j’ai vu David Trezeguet dans la surface et j’ai centré. David a repris le ballon de volée et l’a mis au fond des filets. Nous étions

Position Milieu de terrain Clubs Stade de Reims, Metz, Olympique de Marseille, Arsenal, Villareal, Aston Villa Équipe de France 79 sélections, 14 buts

champions d’Europe. Je ne sais plus ce qu’il s’est passé ensuite. J’ai eu un trou noir. J’ai vu les autres courir, je suis allé derrière le but et je suis resté debout, sans bouger. Je ne sais pas pourquoi. L’équipe faisait la fête avec David, bien sûr. Seuls Zidane et Thuram m’ont imité. Ils sont venus me voir pour me féliciter. Après la compétition, j’ai signé à Arsenal. J’avais le choix entre les Anglais et le Real Madrid. Personne n’a compris pourquoi j’avais opté pour Londres. Mais pour moi, c’était la seule bonne décision. À Marseille, j’avais eu des différends avec mon entraîneur et j’avais besoin d’un club stable. Les discussions avec Arsène Wenger m’avaient convaincu que je serais utile à Arsenal. Les six superbes années passées là-bas prouvent que c’était le bon choix. J’ai évolué en tant que joueur, mais aussi en tant qu’homme. Il y a évidemment eu des moments un peu plus difficiles. La finale de la Ligue des Champions 2006, par exemple. Notre T H E F I FA W E E K LY

gardien Jens Lehmann a pris un carton rouge à la 18ème minute pour une faute en position de dernier défenseur et j’ai dû laisser ma place au gardien remplaçant. Ç’a été très dur à vivre. Bien sûr, je m’en suis pris à Lehmann, à Wenger, à l’arbitre, au destin… J’étais extrêmement déçu, je ne pouvais pas y croire. Mais ce qui m’a fait le plus mal, c’est qu’Arsenal perde cette finale. Avec le recul, je n’en veux à personne. Parce que les bons moments vécus avec ce club prennent le dessus. Et puis le football est un sport collectif. Nous g ­ agnons et perdons ensemble. Å Propos recueillis par Sarah Steiner

Dans la rubrique “Le Tournant”, de grands noms du football reviennent sur les moments qui ont marqué leur vie. 37



The FIFA Weekly Revue hebdomadaire publiée par la Fédération Internationale de Football Association (FIFA)

COUPE MYSTÈRE DE L A FIFA

Site Internet : www.FIFA.com/TheWeekly

Le Super Bowl, un jeu de cartes et deux pays qui ne veulent pas s’affronter vous permettront

Éditeur : FIFA, FIFA-Strasse 20, Case postale, CH-8044 Zurich Tél. : +41-(0)43-222 7777 Fax : +41-(0)43-222 7878

peut-être de gagner. Bonne chance !

Qui suis-je ?

1

C Telstar P Pentagon

Président : Joseph S. Blatter

J Willie T Fuleco

Secrétaire Général : Jérôme Valcke Directeur de la Communication et des Affaires publiques : Walter De Gregorio

2

Rédacteur en chef : Thomas Renggli

Ces quatre logos représentent quatre stades qui ont accueilli des finales de Coupes du Monde de football. Lequel a été le dernier à servir de cadre à une finale de la Coupe du Monde masculine ?

Conception artistique : Markus Nowak Rédaction : Perikles Monioudis (rédacteur en chef adjoint), Alan Schweingruber, Sarah Steiner Collaborateurs réguliers : Jordi Punti (Barcelone), David Winner (Londres), Hanspeter Kuenzler (Londres), Roland Zorn (Francfort), Sven Goldmann (Berlin), Sérgio Xavier Filho (São Paulo), Luigi Garlando (Milan) Service photo : Peggy Knotz, Andreas Wilhelm

A

3

Production : Hans-Peter Frei (directeur), Richie Krönert, Marianne Bolliger-Crittin, Mirijam Ziegler, Susanne Egli, Peter Utz

E

I

U

Lesquels de ces pays ne se sont encore jamais affrontés en Coupe du Monde ? I  Angleterre – États-Unis L  Angleterre – Brésil M  Argentine – Italie P  Pays-Bas – France

Correction : Nena Morf Ont collaboré à la rédaction de ce numéro : Marcio Macculoch, Bernardo Besouchet

Partie de cartes autour du trophée de la Coupe du Monde. L’homme au fond à droite est le président d’un pays. Lequel ?

4

E  Brésil P  Italie

Secrétaire de rédaction : Loraine Mcdouall

O Argentine Y Allemagne

Traduction : Sportstranslations.com Responsables de projet : Bernd Fisa, Christian Schaub Impression : Zofinger Tagblatt AG www.ztonline.ch Contact : feedback-TheWeekly@fifa.org La reproduction des photos et des articles, y compris sous forme d’extraits, est interdite, sauf accord de la rédaction et sous réserve de la mention “The FIFA Weekly, © FIFA 2014”. La rédaction n’a aucune obligation de publier des textes ou des photos non sollicités. La FIFA et le logo FIFA sont des marques déposées par la FIFA. Produit et imprimé en Suisse.

Solution de l’énigme de la semaine précédente : SAVE (explications détaillées sur FIFA.com/theweekly). Inspiration et application: cus !

Faites-nous parvenir vos réponses le 5 février 2014 au plus tard à feedback-TheWeekly@fifa.org. Les concurrents qui auront correctement répondu à toutes les questions jusqu’au 11 juin 2014 participeront à un tirage au sort pour tenter de remporter deux billets pour la finale de la Coupe du Monde, qui aura lieu le 13 juillet 2014. Avant de participer, nous vous inviter à consulter les conditions générales, ainsi que le règlement du concours. Vous trouverez toutes les informations utiles à cette adresse : fr.fifa.com/aboutfifa/organisation/the-fifa-weekly/rules.pdf T H E F I FA W E E K LY

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DEM ANDE Z À L A F IFA !

LE SONDAGE DE L A SEMAINE

Carton rouge, penalty, suspension : la triple sanction a-t-elle un sens ? Le nombre de mauvaises décisions prises par les arbitres en matière de hors-jeu est très énervant. Ne pourrions-nous pas tout simplement supprimer cette règle ? David Huber, Zurich (Suisse)

Le gardien de la Juventus Gianluigi Buffon reçoit un carton rouge après une faute sur l’attaquant de la Lazio Miroslav Klose. “Incompréhensible”, selon la presse italienne. Envoyez-nous votre avis à feedback-TheWeekly@fifa.org

R É S U LTAT S D E L A S E M A I N E D E R N I È R E : Quelle est la meilleure chanson de Coupe du Monde de tous les temps ?

L’A P P E L D ’ U R G E N C E

999

est le numéro d’appel d’urgence en Angleterre. Il a été composé la semaine dernière par un supporter de Manchester United. L’homme,

Shakira y Freshlyground “Waka Waka” Ricky Martin “La Copa de la Vida (The Cup of Life)”

21

Anastacia “Boom”

16 10

Il Divo y Toni Braxton “The Time of Our Lives” Stephanie Lawrence “A Special Kind of Hero”

7

Los Ramblers “El Rock del Mundial”

5 9

Autres

LA MEILLEURE COTE

LA MISE EN BOUCHE

2501 10

matches seront disputés par l’équipe de France dans le cadre des qualifications pour l’Euro 2016. Ces résultats ne seront cependant pas comptabilisés pour le tournoi préliminaire.

fois votre mise, voilà ce que

Cette mesure inhabi-

tout à fait sobre,

remporterez si vous pariez

tuelle permet à l’UEFA

souhaitait parler à Sir

sur le succès du Costa Rica

de constituer neuf groupes

apparemment plus

Alex Ferguson. Il est

(en photo, l’attaquant Álvaro

équivalents de six équipes.

vrai que les Red Devils

Saborío) à la Coupe du

En tant que pays organisa-

Monde 2014 et s’il

teur, la France est déjà

sont actuellement au plus mal et qu’un retour de

40

32

triomphe effective-

assurée de jouer la phase

Ferguson, qui a pris sa

ment. La victoire du Honduras est cotée à 2001

finale (en photo, le

retraite au printemps

contre un, tandis qu’à l’autre bout de l’échelle, on

sélectionneur Didier

dernier, pourrait être

retrouve le Brésil (cote de 4:1), l’Argentine (5,5:1) et

Deschamps).

le recours idoine.

l’Allemagne (6,5:1). T H E F I FA W E E K LY

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Réponse de Thomas Renggli, rédacteur en chef : Si l’idée est intéressante, elle n’en demeure pas moins irréalisable. Le milieu du terrain ne servirait plus à grand-chose, un peu comme au handball. Au-delà de cet aspect, il faut également considérer que le hors-jeu est l’une des règles fondamentales de notre sport. Elle est la base de presque toutes les réflexions tactiques. Ses origines remontent à 1848, lorsque le football fut doté d’un premier ensemble de lois du jeu, les Cambridge Rules. L’introduction définitive de la règle souleva d’ailleurs des débats houleux. Le Sheffield FC en particulier, plus vieux club de football de la planète, était contre, craignant de ne plus pouvoir utiliser sa tactique maintes fois éprouvée du kick through.


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