Recherche alimentation

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RECHERCHE ALIMENTAIRE

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ETIERE

Se nourrir autrement : des solutions pour l'avenir…Cap sur le lac Titicaca. Parlons aujourd'hui de l'exploration de l’alimentation de certaines ethnies andines vivant sur le lac Titicaca. Le Docteur Philippe STEFANINI (anthropobiologiste, chercheur CNRS/ADES) et le Docteur Rafaël PINILLA (médecin, chercheur CREAT) sont partis durant plusieurs semaines pour étudier l’alimentation de certaines ethnies amérindiennes. A leur retour de mission, les résultats sont étonnants. Ils nous en font la synthèse… Explorateur…!... une espèce en voie d’extinction au XXIe siècle ? Sûrement pas. Loin des clichés (au sens propre et figuré) et des références cinématographiques thésaurisées par le grand public, ces chercheurs prouvent que l’exploration n’est pas un vain mot vide de sens. Ils ont en effet mené une mission d’exploration en terres lointaines dont ils sont revenus avec une étude sur l’alimentation singulière de certains peuples andins. Des ethnies principalement localisées dans les régions du Pérou et de la Bolivie. L’originalité des travaux conduits et les films réalisés sur place, feront certainement partie d’un reportage sur TV5 Monde et d’un partenariat avec l’université de Corse. Les deux chercheurs sont en discussion avec cette dernière. Le Docteur Philippe STEFANINI nous narre son aventure scientifique : "Nous sommes partis avec l'objectif d'étudier l’alimentation des peuples insulaires vivants sur l’immense lac Titicaca (d'une superficie d'environ 200 kilomètres de long sur 80 kilomètres de large). L’idée était de s’intéresser à leurs usages alimentaires, aux aliments utilisés, à leurs

qualités nutritionnelles et aux représentations qui en découlent. L’aspect physiologique est venu en second plan dans notre problématique. Cette étude a mis rapidement en exergue une singularité alimentaire végétarienne liée à la consommation journalière de plantes sauvages endémiques, d’algues et à une agriculture basée sur des amendements aquatiques spécifiques. Nous avons également analysé les conséquences de ce type de régime sur la santé des indigènes. Cela nous semblait d’autant plus pertinent que les pays développés sont aujourd’hui à la recherche de modes d’alimentation en adéquation avec une agriculture durable. De ce fait, nous pensons que pour les occidentaux, ce type d’alimentation adaptative et raisonnée semble être exemplaire, surtout dans un monde, où les scandales alimentaires, agricoles, pharmaceutiques et médicaux se succèdent. Avec, il faut bien l’avouer, une agriculture qui s’interroge de plus en plus sur ses impacts sur l’environnement et la santé des hommes.


Notre étude fait partie des démarches scientifiques internationales en quête de solutions nouvelles, plus durables, aux services des peuples et de la planète. Les résultats de notre mission ont permis de mettre en lumière des aliments nouveaux et une alimentation végétarienne atypique. Les Taquiliens vivant sur une île à 4000 mètres d’altitude ont fait l’objet de notre part d’une recherche plus poussée, car ce peuple d’agriculteurs insulaires est principalement végétarien et puise ses ressources protéiniques principalement dans une algue filamenteuse (cheveux d’une divinité vivant dans le lac) qu’ils font sécher au soleil et qu’ils réduisent en poudre afin quelle soit utilisable tout au long de l’année. Nous avons appris auprès d’eux qu’ils avaient dû affiner, par nécessité depuis des siècles, un mode d’alimentation approprié à leurs besoins, à leur santé et à celle de leur terre, qu’ils vénèrent par le biais d’une déesse prénommée « Pachamama ».

Ces pionniers de l’écologie adaptative se confortent dans leurs croyances et leurs rituels syncrétiques (ndlr : la réunion de différentes cultures, cultes, religions, modes de vie…) à travers des traits sociaux bien établis. Pour ces insulaires, leurs aliments sont plus qu’une simple source d’énergie nutritive, ils sont indispensables à leur santé et à leur perception du monde. Leur alimentation semble avant tout refléter la base de leur croyance. Cette dernière est indissociable de leur terre-mère qui est sacralisé par le don rituel et traditionnel d’aliments. Leurs habitudes alimentaires jouent donc un rôle déterminant dans la socialisation de cette ethnie, mais aussi dans la prise de conscience de leur corps et de leur esprit ainsi que dans l’acquisition de savoirs ancestraux. Au cours du temps, ils se sont adaptés à leur milieu et l’ont optimisé. Ils se nourrissent de leur cueillette sur terre et dans le lac et de leur production agricole sans intrants chimiques (ndlr : les "intrants" sont en fait des produits apportés aux terres et aux cultures comme les engrais, les amendements, bref, des apports de produits non existants in-situ). Leur alimentation est dominée par des variétés acclimatées, comme le maïs,

le quinoa et de nombreux tubercules. Ils élèvent des animaux (cochons d’inde, moutons, lapins des Andes) uniquement utilisés pour les sacrifices rituels sauf pour le lait de brebis qui est utilisé pour faire du fromage. Les bovins très rares sont utilisés pour les travaux des champs et pour leur laitage. Par ailleurs, la pêche représente une faible partie de leur activité en raison d'une ressource insuffisante dans le lac. En revanche, le ramassage des algues principalement la « llaska » à la saison des pluies et une activité ancestrale et fondamentale. Et enfin, la cueillette des plantes sauvages et couramment adoptées tout au long de l’année par les insulaires ce qui représente un aspect similaire au fameux régime crétois. Plus précisément, nous avons remarqué que leurs associations alimentaires étaient pertinentes par la diversité végétale de leurs ressources protéiniques qui accompagne leur fromage de brebis non pasteurisé. Les sucres complets, les graisses insaturées et les aliments riches en fer sont très présents dans leur bol alimentaire quotidien. Celui-ci est également enrichi par une flopée de plantes sauvages endémiques chargées d’enzymes, de vitamines, d’oligo-éléments, d’antioxydants exceptionnels provenant de plusieurs rhizomes et d’algues filamenteuses. Leur adaptation physiologique, morphologique à l’altitude et leur régime très équilibré leur permettent d’atteindre majoritairement des âges avancés surtout à cette altitude en étant pratiquement indemnes de maladies cardiovasculaires et du cholestérol. De plus, aucun cas d’obésité n’a été observé sur l’ensemble du groupes cible. Il est à remarquer que tout ce qui relève de la culture endémique parle aux peuples insulaires qui ont eux même exercé un protectionnisme de leur savoir et une adaptation forte à leur milieu. Il y a certainement des comparaisons riches d’enseignement à faire car nous aurions peut-être tout intérêt à puiser dans ces savoirs alimentaires provenant d’ethnies amérindiennes vivant au fin fond de l’Altiplano. Nous voulions voir quelle était leur force. Nous avons découvert plus encore…".


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