OCTOBRE-NOVEMBRE 2014 – BIMESTRIEL – NUMÉRO 16
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LA LONGUE MARCHE DES CHRÉTIENS D’ORIENT
Saint
Louis LE ROI
LE BÂTISSEUR LE CROISÉ
LES DERNIERS JOURS DE ROME
AUX ORIGINES DU CÉLESTE EMPIRE
© EDUARDO DIEGUEZ/PHOTOCALL 3000/SIPA/1406191717.
ÉDITORIAL
© BLANDINE TOP.
Par Michel De Jaeghere
POLITIQUE DE SAINT LOUIS
O
n a trop répété, peut-être, qu’il avait porté jusqu’à l’héroïsme les vertus chrétiennes, malcommodes à qui a la charge, avant tout, de régner. Trop rappelé sa charité envers les pauvres, sa dévotion et sa piété. Son amour de Dieu, sa soumission à la volonté divine, son horreur du péché. Son aspiration irrépressible à la croisade. Son inépuisable générosité. Huit cents ans après la naissance de Saint Louis, et alors que Paris célèbre ce jubilé par une splendide exposition qui le voit revenir entre ses murs, dans le palais de la Cité, les attendus de son procès de canonisation finiraient par nous le rendre inaccessible. Par faire de lui, pour nous, un saint de vitrail, et presque un étranger. Il est bien vrai que les Mamelouks l’avaient eux-mêmes jugé «le plus ferme chrétien qu’on pût trouver ». Mais tel qu’il se révèle à la lecture de Joinville, Saint Louis nous apparaît, aussi, palpitant d’énergie, de vie, d’humanité comme le modèle même du roi chevalier. « Jamais je ne vis un homme en armes aussi beau, écrit le sénéchal dans son récit de la bataille de Mansourah, car il se détachait, depuis la hauteur des épaules, au-dessus de tous ses gens, un heaume doré sur la tête, une épée d’Allemagne à la main. » A Taillebourg, voyant ses troupes menacées par l’Anglais, il s’était jeté dans la mêlée sans aucun égard du danger. A Damiette, il avait mené le débarquement des croisés en conduisant l’assaut avec de l’eau jusqu’aux épaules. A Mansourah, il s’était dégagé des six Sarrasins qui avaient cru pouvoir saisir son cheval par la bride en les mettant en fuite à grands coups d’épée. Il avait ensuite refusé d’abandonner son corps de bataille pendant la retraite à laquelle l’avaient contraint la maladie et la défaite, pour rejoindre ses arrières en galère en toute sûreté. Il s’était au contraire tenu à l’endroit le plus exposé, pour protéger l’arrière-garde de son armée. Il impressionna, prisonnier, ses geôliers, en restant insensible aux menaces de torture ; ses compagnons, en refusant qu’on dupe l’ennemi lors du paiement de la rançon par quoi il avait racheté sa liberté; les barons de Terre sainte, en choisissant de rester en Palestine aussi longtemps que tous les siens n’auraient pas été à leur tour libérés. Ce roi faisait preuve d’une équanimité singulière. Joinville le montre ensevelissant lui-même les cadavres en décomposition des victimes d’une attaque musulmane. Et l’on sait que nourrissant les pauvres, il tenait à leur laver lui-même les pieds.
Ce saint ne manqua pas de fermeté. Il lui arrivait de hausser le ton, et même de s’emporter contre les évêques avides de nourritures terrestres qui prétendaient lui dicter sa politique ; de se montrer intraitable avec des vassaux indisciplinés. Apercevant son frère qui, à peine libéré, avait entrepris de jouer aux dés, il avait jeté à la mer le tapis de jeu et les dés. Saint Louis, à l’occasion, savait rire «d’un rire très clair», dit Joinville. Il lui arriva aussi plus d’une fois de pleurer : à l’annonce de la mort de son frère Robert, comme à celle du massacre des chrétiens devant Saïda. Mais ce qui rend sa figure sans pareille, ce qui lui donne peut-être son plus haut prix dans notre histoire, c’est d’avoir su concilier son aspiration à la sainteté avec les froides nécessités de la souveraineté. De n’avoir jamais perdu de vue le bien commun auquel son devoir d’Etat l’avait voué, quand son âme était comme aspirée par d’autres réalités. Sa royauté vient rappeler à notre siècle, qui l’a trop souvent oublié, que l’essence de la politique, sa raison d’être, c’est d’abord de faire régner la justice et la paix. Il s’y employa par la soumission des superbes, la résolution des conflits, comme par la recherche inlassable de l’équité. Ce roi qui négligeait les atours au point de se vêtir de drap bleu sombre et terne, de cottes en lainage grossier, et ne craignait pas à Vincennes de s’asseoir, à l’occasion, par terre, avait su, plus qu’un autre, faire plier ses seigneurs devant sa majesté. Il s’était imposé aux Lorrains et aux Bourguignons, et jusqu’aux barons anglais, par l’impartialité avec laquelle il avait arbitré leurs querelles ; il régla au mieux de l’intérêt national l’épineux problème du retour du comté de Toulouse dans le giron français. Loin de toute realpolitik étrangère aux notions de droiture et d’impartialité, il porta à sa perfection la vertu de force : celle qui ne sépare pas la grandeur, le prestige, de la recherche de la justice. Rétrocédant au roi d’Angleterre une partie des terres que son grand-père, Philippe Auguste, avait arrachées aux Plantagenêts, en échange de la reconnaissance de la perte de la Normandie, de l’Anjou et du Maine, de la Touraine et du Poitou, ainsi que du lien vassalique qui faisait de lui, en Guyenne, «son homme», il avait expliqué : «La terre que je lui donne, je ne la donne pas comme quelque chose dont je serais tenu envers lui et ses héritiers, mais pour mettre amour entre mes enfants et les siens, qui sont cousins germains.» C’était tout dire de la hauteur de vue d’une politique qui n’avait délaissé un froid réalisme que pour le dominer.
CONSEIL SCIENTIFIQUE. Président : Jean Tulard, de l’Institut. Membres : Jean-Pierre Babelon, de l’Institut ; Marie-Françoise Baslez, professeur
d’histoire ancienne à l’université de Paris-IV Sorbonne ; Simone Bertière, historienne, maître de conférences honoraire à l’université de Bordeaux-III et à l’ENS Sèvres ; Jean-Paul Bled, professeur émérite (histoire contemporaine) à l’université de Paris-IV Sorbonne ; Jacques-Olivier Boudon, professeur d’histoire contemporaine à l’université de Paris-IV Sorbonne ; Maurizio De Luca, ancien directeur du Laboratoire de restauration des musées du Vatican ; Eric Mension-Rigau, professeur d’histoire sociale et culturelle à l’université de Paris-IV Sorbonne ; Arnold Nesselrath, professeur d’histoire de l’art à l’université Humboldt de Berlin, délégué pour les départements scientifiques et les laboratoires des musées du Vatican ; Dimitrios Pandermalis, professeur émérite d’archéologie à l’université Aristote de Thessalonique, président du musée de l’Acropole d’Athènes ; Jean-Christian Petitfils, historien, docteur d’Etat en sciences politiques ; Jean-Robert Pitte, de l’Institut, ancien président de l’université de Paris-IV Sorbonne, délégué à l’information et à l’orientation auprès du Premier ministre ; Giandomenico Romanelli, professeur d’histoire de l’art à l’université Ca’ Foscari de Venise, ancien directeur du palais des Doges ; Jean Sévillia, journaliste et historien.
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© YVES GELLIE/PICTURETANK. © AKG-IMAGES. © COLL. PH. DOUBLET/ADOC-PHOTOS.
ACTUALITÉ DE L’HISTOIRE
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LA LONGUE HISTOIRE DES CHRÉTIENS D’ORIENT
LES PERSÉCUTIONS DONT ILS FONT L’OBJET DE LA PART DE L’ÉTAT ISLAMIQUE LES ONT TRAGIQUEMENT TIRÉS DE L’OUBLI. DEPUIS DEUX MILLE ANS, LES CHRÉTIENS D’ORIENT DÉROULENT UNE HISTOIRE COMPLEXE ET ATTACHANTE.
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LES DERNIERS JOURS DE ROME
ENTRE ENQUÊTE HISTORIQUE ET RÉCIT FOISONNANT, MICHEL DE JAEGHERE ÉCLAIRE DANS LES DERNIERS JOURS CE QUE FUT RÉELLEMENT LA CHUTE DE ROME.
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LE SIÈGE DE SÉBASTOPOL
SON NOM RÉSONNE ENCORE ICI ET LÀ DANS LES RUES DE PARIS. IL Y A CENT SOIXANTE ANS, LE SIÈGE DE SÉBASTOPOL MARQUAIT LE POINT D’ORGUE DE LA PREMIÈRE GUERRE DE CRIMÉE.
ET AUSSI
FOUCHÉ,
PROFESSION PARJURE
LA CRITIQUE
EUTHANAZIE
LA VERTU DU CARDINAL CÔTÉ LIVRES LE GRAND ARSENAL DE ROME EXPOSITIONS LE FOU D’HISTOIRE LE BANQUET, PASSION FRANÇAISE
© JEAN-CLAUDE ROCA/NATIVE/FRANCE 3.
DE LA RAISON PURE
© AKG-IMAGES. © PATRICK DALLANEGRA. © RMN-GRAND PALAIS (MUSÉE DU LOUVRE)/MARTINE BECK-COPPOLA/SERVICE PRESSE.
EN COUVERTURE
48 S
AINT LOUIS, LA CROIX ET LA COURONNE
COMMENT ÊTRE ROI ET SAINT ? À L’ORIGINE DE L’ACTION ROYALE DE LOUIS IX, ON TROUVE UNE EXIGENCE DE SAINTETÉ UNIQUE EN SON GENRE.
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L’ART POLITIQUE D’UN ROI
PAIX, UNITÉ ET CONCORDE : C’EST VERS CET IDÉAL QUE
TENDIT TOUT LE PROGRAMME POLITIQUE DE SAINT LOUIS.
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E SAINT MÈNE LA DANSE
DE LA REINE BLANCHE AU PAPE INNOCENT IV, DU FIDÈLE JOINVILLE AU SULTAN BAYBARS,
ILS ONT ÉTÉ DES TÉMOINS ESSENTIELS DE SON RÈGNE.
Saint
Louis
Le roi-Le croisé-Le bâtisseur bâtisseur-Le croisé
© BRITISH LIBRARY BOARD/LEEMAGE.
ET AUSSI
SI JE T’OUBLIE, JÉRUSALEM HEUREUX COMME SAINT LOUIS À PARIS SAINT THOMAS D’AQUIN, UN DOMINICAIN À PARIS ENTRE CIEL ET TERRE LE SIÈCLE DE SAINT LOUIS LIBRAIRIE ROYALE
© LEMAIRE STEPHANE/HEMIS.FR. © COLLECTION JEAN VIGNE/KHARBINE TAPABOR. © ART EXHIBITIONS CHINA/MUSÉE DE XUZHOU.
L’ESPRIT DES LIEUX
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LUANG PRABANG
L’ENVERS
DU PARADIS
CAPITALE HISTORIQUE DU LAOS, CLASSÉE À L’UNESCO, LUANG PRABANG SEMBLE
UN MIRAGE NÉ DE LA JUNGLE ET DE L’EAU. DES MENACES PLANENT POURTANT SUR SON AVENIR. ENQUÊTE.
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SAINTE-VICTOIRE
LA MONTAGNE MAGIQUE SES PENTES ONT GARDÉ
LE SOUVENIR DES PÈLERINAGES QU’Y FAISAIT MARGUERITE DE PROVENCE. À SAINTE-VICTOIRE, L’HISTOIRE FAIT PARTIE DU DÉCOR.
118 A
UX ORIGINES DU CÉLESTE EMPIRE
PENDANT QUATRE SIÈCLES, LES HAN ONT UNIFIÉ LA CHINE. LE MUSÉE GUIMET FAIT REVIVRE LEUR HISTOIRE.
ET AUSSI
LE NOUVEAU
MURANO DU MÉTAL DERRIÈRE SES MURS DU XVIIIE SIÈCLE, LA VIEILLE DAME DU QUAI CONTI A FAIT PEAU NEUVE. ANTRE
SECRET DE LA FABRICATION DES MÉDAILLES, LA MONNAIE DE PARIS PRÉPARE SA RÉOUVERTURE AU PUBLIC.
À
L’A F F I C H E Par Gérard-François Dumont
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histoire des chrétiens d’Orient
Les persécutions de l’Etat islamique mettent en lumière l’histoire immémoriale des chrétiens d’Orient, entre singularité et complexité.
I
l y eut le carnage perpétré par un groupe d’al-Qaida dans la cathédrale syriaque catholique de Bagdad la veille de la Toussaint 2010 puis, deux mois plus tard, l’attentat suicide du 31 décembre qui tua vingt-trois chrétiens coptes dans l’église des Deux-Saints à Alexandrie. Le lendemain, le pape Benoît XVI constatait à bon droit dans son message pour la Journée mondiale de la paix que les chrétiens étaient «à l’heure actuelle le groupe religieux
en butte au plus grand nombre de persécutions à cause de leur foi ». Il y eut encore, le jour de Noël 2013, les deux attentats à la bombe contre des groupes chrétiens de la capitale irakienne et leur tragique bilan de plus de cinquante morts. Mais il a fallu l’émergence de l’Etat islamique (EI) et sa litanie de massacres pour que le reste du monde semble réaliser la gravité sans précédent qui caractérise aujourd’hui la condition des chrétiens au Proche-Orient.
© VIANNEY LE CAER/SIPA/1408132006. © J.B. RUSSELL/COSMOS.
ACTUALITÉ DE L’HISTOIRE
La longue
En Syrie, où ils représentaient, en 2012, près de 10 % de la population, une religieuse, sœur Raghida al-Khoury, a raconté, en avril 2014 sur Radio Vatican, la crucifixion par un groupe de djihadistes de deux chrétiens qui refusaient de se convertir à l’islam à Maaloula. De son côté, l’Observatoire syrien des droits de l’homme a cité le cas de huit rebelles musulmans crucifiés en juin par leurs coreligionnaires à Deir Hafer, dans la province d’Alep, car jugés trop « mous » aux yeux des ultras. En Irak, l’offensive menée au mois de juin par l’Etat islamique a frappé l’Occident d’hébétude. Le 18 juillet, un communiqué des djihadistes aux habitants de Mossoul, la deuxième ville du pays, annonçait sans ambages : «Nous leur proposons trois choix : l’islam, la dhimma (protection contre paiement d’un impôt) et, s’ils refusent ces deux choix, il ne reste que le glaive. » Sur les portes des chrétiens, les mêmes ont tracé la lettre N, la première du mot arabe «nazaréen» SANS PATRIE Ci-contre : des réfugiés chrétiens à Erbil, capitale de la région autonome du Kurdistan (Irak), en août 2014. Page de droite : l’église Saint-Georges à Ankawa, quartier chrétien dans la banlieue d’Erbil.
– soit «chrétien», selon le Coran –, comme une invitation au pillage. Le 7 août, la chute de Qaraqosh, la plus grande ville chrétienne d’Irak, a jeté 100 000 personnes sur les routes, tandis que les églises étaient dépouillées de leurs croix et 1 500 manuscrits brûlés. Entre-temps, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, s’était enhardi à dénoncer un « crime contre l’humanité ». Violemment mise en cause par les persécutions de l’Etat islamique, la présence chrétienne en Mésopotamie – cette région du Moyen-Orient qui s’étend pratiquement du fond du golfe Persique au golfe d’Alexandrette (aujourd’hui Iskenderun) – apparaît souvent comme une bizarrerie aux yeux des Occidentaux, tant leur imaginaire associe le Proche-Orient à l’islam. Pourtant, « c’est à Antioche que, pour la première fois, le nom de chrétiens fut donné aux disciples (de Jésus) », précisent les Actes des Apôtres. L’analyse des sources historiques concorde pour souligner que cette évangélisation du Ier siècle fut l’œuvre de saint Thomas. Aujourd’hui minoritaires, les chrétiens actuels d’Irak et de Syrie ne sont rien de moins que les descendants de cette chrétienté apostolique, la toute première de l’histoire. Ils y restèrent longtemps – dans des pays qui étaient avant tout les leurs – majoritaires.
Evangélisation précoce
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Compte tenu de l’importance de cette ville dans l’Empire romain, la fondation de l’Eglise d’Antioche avait été déterminante pour l’évangélisation de la Mésopotamie. Si son port est alors tourné vers l’Occident, Antioche est aussi un point de départ pour aller porter la parole de Jésus dans son vaste arrière-pays, peuplé notamment d’Araméens et d’Assyriens. On en trouve un écho dans la liste cartographique établie par saint Luc dans son récit de la Pentecôte dans les Actes des Apôtres : «Parthes, Mèdes et Elamites, habitants de Mésopotamie (…), nous les entendons annoncer dans nos langues les merveilles de Dieu.» Un texte qui permet de réaliser combien la lumière de l’apôtre Paul, tourné vers l’Occident, et les aléas de l’histoire ont souvent fait oublier aux Européens la précocité de l’évangélisation de l’Orient.
© DEAGOSTINI/LEEMAGE.
ACTUALITÉ DE L’HISTOIRE 10
SCHISME Ci-dessus : le concile de Chalcédoine convoqué par l'empereur byzantin Marcien en 451, manuscrit latin, XIe-XIIe siècles (Cité du Vatican, Biblioteca Apostolica Vaticana). Il condamna le monophysisme, qui ne reconnaissait au Christ que la seule nature divine, et eut notamment pour conséquence la naissance de l’Eglise syriaque orthodoxe. Au cours des premiers siècles, le christianisme se diffuse en Mésopotamie au sein d’un Empire romain qui tente de s’y opposer, jusqu’au fameux édit de Milan, publié par Constantin en 313. Le Ve siècle marqua ensuite le temps des divisions, liées à des désaccords théologiques. Il reste difficile de juger si elles renforcèrent la présence chrétienne dans ces régions sous l’effet d’une émulation entre les Eglises ou si elles affaiblirent au contraire la chrétienté mésopotamienne à la veille des vicissitudes qui allaient, aux siècles suivants, marquer son histoire. En 431, Nestorius et Cyrille d’Alexandrie s’opposent ainsi au sujet de l’union dans le Christ des deux natures, divine et humaine. Distinguant l’une et l’autre dans sa personne, Nestorius conteste que la Vierge puisse être considérée comme «Mère de Dieu». Les Eglises d’Orient qui lui emboîtent le pas se détachent dès lors de Rome, qui les tient pour hérétiques. L’actuelle Eglise assyrienne d’Orient est l’héritière de cette
branche nestorienne. Vingt ans plus tard, en 451, le concile de Chalcédoine condamne les monophysites, qui, par réaction outrée à l’arianisme (dont les adeptes professaient que le Christ n’était qu’un homme, une créature que Dieu avait élevée à lui en considération de sa perfection), ne reconnaissent au Christ que la seule nature divine. Les catholiques d’Orient qui refusent cette condamnation forment alors une Eglise chrétienne autonome, dénommée jacobite ou, de nos jours, syriaque orthodoxe. Durant le même Ve siècle, de nouvelles divisions se font jour au sein de la communauté chrétienne. Elles préparent les futures différences religieuses dans les territoires de Mésopotamie. Héritière de la grande civilisation égyptienne, l’Eglise d’Alexandrie finit par s’affranchir de l’autorité de Byzance. Elle donnera naissance à l’Eglise copte. Son implantation en Mésopotamie s’explique surtout par l’éphémère République arabe unie qui a lié l’Egypte et la Syrie de 1958 à
1961, et par l’immigration de nombreux Egyptiens en Irak avant l’invasion du Koweït par Saddam Hussein, en 1990. Sa présence est devenue actuellement marginale. En 491, c’est au tour des Arméniens de s’opposer aux conclusions du concile de Chalcédoine et de former une autre Eglise chrétienne séparée, appelée arménienne orthodoxe. Les troubles de l’histoire, et particulièrement le génocide arménien de 1915, conduiront certains de ses fidèles à l’exode. Ils expliquent la présence en Mésopotamie de communautés relevant de l’Eglise arménienne orthodoxe ou de l’Eglise arménienne catholique, qui regroupe les chrétiens restés fidèles à Rome. Une autre division tient au fameux «schisme d’Orient» de 1054, qui donna naissance à l’orthodoxie. C’est à elle que remonte l’Eglise grecque orthodoxe de rite byzantin, toujours active en Mésopotamie.
L’émergence de l’islam
En dépit de ces séparations, la Mésopotamie abritera au cours des six premiers siècles une chrétienté vivante. En 622, l’apparition de l’islam bouleverse la donne. Rapidement, la nouvelle religion lance ses adeptes dans une politique de conquête. Dès 635, ils prennent Damas avec l’armée mise sur pied l’année précédente. Victorieux sur terre et sur mer des Empires byzantin et perse, le calife Omar (634644), deuxième successeur de Mahomet, achève la conquête de la Mésopotamie. Malgré la rupture provoquée par la question successorale, qui voit naître le chiisme autour des partisans d’Ali, le gouverneur de Syrie Muawiya fonde ensuite à Damas la dynastie des Omeyyades et agrandit considérablement l’aire musulmane. Confrontés à l’expansion de l’islam, que deviennent les chrétiens de Mésopotamie? Au nord-ouest, une petite partie d’entre eux continuent de bénéficier de l’environnement politique de l’Empire romain d’Orient. Ailleurs, la chrétienté locale subsiste, tout en voyant son poids s’affaiblir. Certains califes réalisent en effet qu’ils ont besoin de collaborateurs, dans un Etat
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MINORITAIRES L’exode continu des chrétiens les a fait passer du statut de minorités significatives à une présence de plus en plus infime dans les pays du Moyen-Orient. métiers ou d’améliorer ses conditions de vie entraîne aussi de nombreuses conversions à l’islam. Aussi, la souveraineté musulmane sur la Mésopotamie y affaiblit-elle progressivement la présence chrétienne.
Renouer avec Rome
Après la conquête de la région par les Turcs seldjoukides et son inclusion dans l’Empire ottoman, créé en 1299 et devenu un califat en 1517, les chrétiens continuent
à se voir imposer un statut inférieur. Mais les chefs de l’Empire ottoman, qui privilégient les musulmans sunnites, sont souvent conscients de la diversité humaine et religieuse des territoires qu’ils dominent. Leur immense empire a peu à craindre de chrétiens désormais minoritaires et dont les divisions n’ont cessé de se multiplier. Au XVIe siècle, Rome entreprend cependant de nombreuses démarches pour conjurer les effets des séparations de
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où les chrétiens demeurent nombreux. Ils maintiennent donc en place des chrétiens qui ont servi dans l’administration byzantine, du percepteur d’impôts au secrétaire de chancellerie, ou confient à d’autres des fonctions qui permettent aux chrétiens de mettre leurs compétences à leur service. Occasionnellement, les divisions religieuses permettent des rapprochements inattendus. Ainsi, des chrétiens jacobites de Syrie et des coptes d’Egypte, persécutés par Byzance pour leur opposition au concile de Chalcédoine, accueillent-ils les musulmans d’abord favorablement. Au XIIe siècle, le patriarche jacobite Michel le Syrien écrit encore : « Ce ne fut pas un léger avantage pour nous que d’être affranchis de la méchanceté des Romains et de leur haine cruelle envers nous. » Si les califes n’obligent pas systématiquement à la conversion, ils acceptent l’existence de chrétiens (et de juifs) selon les règles de la dhimmitude. Ce statut fait du chrétien un sujet inférieur. S’il ne doit pas, en théorie, subir de persécution, il connaît de fortes discriminations. Il doit acquitter la jiziah, impôt de capitation attaché au statut de dhimmi. Ce statut, fait de servitude et d’humiliation, corsète la vie quotidienne, d’autant que le chrétien est tenu, en principe, à certains signes visibles de soumission aux musulmans, pouvant aller jusqu’à l’interdiction d’exercer certains emplois de l’administration, voire tous, celle de porter des armes, de construire ou de réparer des lieux de culte sans autorisation, le cantonnement à certains quartiers, l’obligation de marcher rapidement et les yeux baissés, voire celle de coudre des pièces de couleur distinctives sur ses vêtements. Lorsqu’un chrétien connaît une certaine réussite, les vexations peuvent être accentuées, la discrimination institutionnelle devenant alors persécution. Certains chrétiens préfèrent accepter la dhimmitude plutôt que renoncer à leur foi. Mais avec le temps, dans un contexte d’insurmontable inégalité puisque le statut de dhimmi implique des restrictions religieuses, sociales, politiques, économiques et militaires, le souhait d’exercer certains
ACTUALITÉ DE L’HISTOIRE © IDÉ. © BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE.
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l’Antiquité tardive. Mais ses propositions de réconciliation ne parviennent à convaincre qu’une partie des fidèles de chaque Eglise. De nouvelles divisions apparaissent dès lors entre les Eglises chrétiennes qui restent séparées de Rome et celles qui acceptent de se rallier à l’Eglise catholique romaine à condition de pouvoir conserver leurs traditions liturgiques. Les premiers à se placer à nouveau sous l’autorité spirituelle du Saint-Siège sont ceux de l’Eglise assyrienne d’Orient (nestorienne), qui fondent, en 1552, l’Eglise chaldéenne. C’est à cette Eglise catholique de rite oriental que les deux tiers des chrétiens de Mésopotamie appartiennent aujourd’hui. L’Eglise assyrienne d’Orient conserve toutefois des fidèles et donc son autonomie, ce qui élargit encore la palette des Eglises chrétiennes locales. Un scénario semblable se répète un siècle plus tard avec d’autres Eglises chrétiennes. De leur côté, ceux qui choisissent de suivre le rite latin créent une petite Eglise catholique propre. Le schéma des nestoriens se renouvelle par la suite avec d’autres Eglises. Au XVIIe siècle, des membres de l’Eglise syriaque orthodoxe, dite jacobite, souhaitent leur rattachement à l’Eglise catholique romaine. Mais par fidélité à leur histoire et à leur tradition, ils n’envisagent pas de se fondre dans une Eglise catholique unique en rejoignant celle qu’ont formée les Chaldéens. Ils composent alors une Eglise syriaque catholique unie à Rome. En 1709, c’est au tour d’une partie des fidèles de l’Eglise grecque orthodoxe de rite byzantin de souhaiter se rallier à Rome. Ils créent alors une Eglise grecque catholique (ou melkite), tandis que subsiste une Eglise grecque orthodoxe de rite byzantin regroupant ceux qui n’ont pas voulu les rejoindre. En 1740, des Arméniens désireux de se rapprocher de Rome créent une Eglise arménienne catholique. Enfin, en 1742, certains coptes penchent à leur tour en faveur d’un ralliement partiel à Rome : une Eglise copte catholique apparaît alors. Elle ne compte pratiquement plus de fidèles dans la Mésopotamie des années 2010.
SOUMISSION Ci-dessus : des Mongols poursuivant des chrétiens, manuscrits occidentaux, XVe siècle (Paris, BnF).
Des libertés réduites
Au début du XXe siècle, la chute de l’Empire ottoman modifie la situation, en renforçant même la présence chrétienne en Mésopotamie à travers deux vagues migratoires. La première correspond au génocide arménien (également chaldéen et grec pontique) de 1915, dont les rescapés viennent grossir les Eglises arméniennes et chaldéennes en Syrie et en Irak. La seconde, à la cession par la France du sandjak d’Alexandrette à la Turquie en 1939, puis, au fil des décennies suivantes, à la restriction de la liberté religieuse par le gouvernement turc : de nombreux chrétiens
fuient la Turquie, notamment la Cilicie et le Sandjak, vers la Syrie et l’Irak. Après l’indépendance de l’Irak en 1932 et de la Syrie en 1946, la situation des chrétiens évolue de façon contrastée dans chaque pays. En Irak, où ils restent très minoritaires (3,2 % de la population en 1957 face à 95,6 % de musulmans), les chrétiens sont des citoyens aux droits limités, soumis à des vexations qui expliquent des émigrations périodiques. « Le statut de dhimmi (instauré au VIIe siècle) continue à régir la société irakienne », rappelait, en 2007, Mgr Jean-Benjamin Sleiman, archevêque de Bagdad pour les Latins. En 1970, l’Irak, qui se dit république « laïque », inscrit dans sa constitution l’article 4, qui reconnaît l’islam comme religion d’Etat, une disposition inconnue en Syrie. De façon générale, les cultes chrétiens ne bénéficient pas des aides allouées au culte islamique tandis que le droit irakien, puisant nombre de ses dispositions aux sources de la charia, marque nettement des différences religieuses. Ainsi, un chrétien ne peut épouser une musulmane, et une chrétienne, même si elle peut se marier avec un musulman, doit élever ses enfants dans la seule religion de Mahomet.
Le mariage religieux musulman est valide pour l’état civil, alors que le mariage chrétien impose un passage devant l’autorité administrative. La donation d’un chrétien à un musulman est licite, non l’inverse. A partir de 1991, le régime baasiste de Saddam Hussein recule encore davantage sur la laïcité affichée et fait de nouvelles concessions aux autorités de l’islam : une loi interdit ainsi les prénoms chrétiens. Mais après l’intervention américaine contre Saddam Hussein et la chute du régime, en 2003, les persécutions redoublent – attentats meurtriers, assassinats et enlèvements. « La situation des chrétiens d’Irak devenant infernale», témoigne Joseph
L’ŒUVRE D’ORIENT Créée en 1856, l’Œuvre d’Orient est la seule organisation française entièrement dédiée au soutien des chrétiens d’Orient. Elle contribue à leur éducation, à leurs soins et les accompagne spirituellement depuis plus de cent cinquante ans. www.oeuvre-orient.fr
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Une autre raison explique la subsistance du christianisme en Mésopotamie depuis la conquête musulmane et pendant toute la période ottomane. Pour survivre, les Eglises chrétiennes ont souvent joué dans l’histoire le rôle reconnu de médiatrices, par exemple entre sunnites et chiites. En outre, l’absence d’une véritable liberté de culte a contraint les institutions ecclésiales à composer avec les pouvoirs politiques pour préserver l’existence même de leurs communautés. Cette stratégie de compromis, voire de compromission, a porté ses fruits.
© LE CAER/SIPA/1408132006.
ACTUALITÉ DE L’HISTOIRE 14
GÉNOCIDE Ci-dessus et page de droite : victimes d’un redoublement de violences et de persécutions perpétrées par l’Etat islamique depuis juin 2014, ces chrétiens ont fui Mossoul et Qaraqosh pour se réfugier au Kurdistan autonome. Yacoub (auteur de Menaces sur les chrétiens d’Irak, 2003), leur exode s’amplifie, d’où un effondrement de leur nombre, déjà réduit à environ 636 000 en 2005 et désormais estimé à 250 000. Une diminution mise en évidence par l’essor des diasporas chrétiennes d’Irak, apparues par exemple ces dernières années en Suède. La situation des chrétiens en Syrie est toute différente. Des années 1920 aux années 2000, on ne compte guère d’émigration. Leur poids démographique (13 % en 1954) en fait un groupe plus significatif, tandis que les communautés musulmanes stricto sensu forment «seulement» 72 % de la population. La Syrie doit aussi tenir compte d’autres minorités, comme les alaouites (11 % en 1954) et les druzes (3 %), dont le pourcentage reste faible à l’échelle du pays mais qui sont majoritaires dans certaines régions. Par ailleurs, le parti Baas, parti nationaliste arabe fondé avec des chrétiens en 1947, se déploie tout particulièrement en Syrie selon une vision laïque – du moins dans sa forme des années 1950 et 1960 – compte tenu de la variété confessionnelle de la région. En 1970 enfin, après le coup d’Etat du général Hafez el-Assad,
la Syrie se retrouve gouvernée par une armée où, pour des raisons historico-sociales, dominent les alaouites. Assad fonde un régime autoritaire, disposant d’un vaste appareil policier et de renseignement, mais ne s’attaque pas à la diversité religieuse, d’autant que sa confession alaouite est fortement minoritaire. Depuis le début de la guerre civile en Syrie, en 2011, les chrétiens sont aux prises avec des violences aux origines multiples. Ils souffrent en particulier des combats quasi permanents qui se déroulent pour le contrôle de la deuxième ville syrienne, Alep, où ils vivaient nombreux jusque-là. Comme des centaines de milliers de compatriotes, les chrétiens de Syrie se trouvent contraints de fuir. Mais leur présence depuis vingt siècles fait elle-même l’objet de terribles atteintes, certains groupes violents ne songeant qu’à faire table rase du passé chrétien de la région. Avant même l’essor du groupe qui se revendique depuis le 29 juin 2014 comme l’Etat islamique (ex-Etat islamique en Irak et au Levant), nombre de chrétiens de Syrie ont subi des violences s’accompagnant de la destruction volontaire et systématique de leur patrimoine
religieux, y compris les archives millénaires, voire bimillénaires, des églises. Pour la première fois depuis deux mille ans, il n’y a plus de chrétiens dans la deuxième ville d’Irak, Mossoul, depuis l’été 2014. Dans ce contexte, le contraste est flagrant entre les propos compassionnels de certains Occidentaux qui, comme le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, annoncent l’accueil de chrétiens de Mésopotamie en France, et ceux qui, comme plusieurs patriarches chrétiens du Moyen-Orient, souhaitent que des actions décisives soient mises en œuvre pour enrayer la barbarie de l’Etat islamique et permettre aux chrétiens de Mésopotamie de continuer à vivre sur la terre de leurs ancêtres. Mais la réalité est plus terrible encore. Au cœur de l’aggravation des difficultés des chrétiens, on trouve en effet le changement de paradigme à l’œuvre dans tout le Moyen-Orient depuis les dernières décennies : le basculement du panarabisme laïc au panarabisme religieux, tandis que se déploie un djihad de l’épée. ! Professeur à l’université de Paris-IV-Sorbonne, Gérard-François Dumont est géographe, économiste et démographe.
À LIRE
Frédéric Pichon Analyser les crises internationales sans céder à la dictature de l’émotion, c’est la règle à laquelle s’astreint Frédéric Pichon. Après avoir dressé un tableau complet de la mosaïque des peuples qui résident en Syrie – sunnites, alaouites, chrétiens, Kurdes –, il souligne les chimères du «printemps arabe», les illusions d’un néoconservatisme qui ne dit pas son nom et le refus des Occidentaux de voir combien l’opposition syrienne était gangrenée par le djihadisme. Publié en mai 2014, le livre se clôt par un chapitre intitulé : «De guerre lasse, Assad plutôt que le chaos». Trois mois plus tard, l’Etat islamique d’Irak et du Levant est devenu une réalité, le «Djihadistan», une menace tangible, et les forces laïques d’Assad, les alliés discrets mais objectifs des Etats-Unis et de l’Europe… Un opus visionnaire, à méditer pour mieux comprendre l’Orient compliqué. J-LT
© GAIL ORENSTEIN/NURPHOTO/AFP.
Syrie. Pourquoi l’Occident s’est trompé
Le Vertige divin. Philippe Henne En Syrie, au début du Ve siècle, un moine nommé Siméon, crée une forme nouvelle et extrême d’ascétisme : il installe une plate-forme sur une colonne (stulos, en grec) où il passe le reste de sa vie, une quarantaine d’années, sans s’allonger. Voulait-il se rapprocher du ciel? S’éloigner de la foule qui se rassemblait au pied de la colonne? Très vite, d’autres solitaires, visionnaires, thaumaturges, l’imitent : les stylites. Illustrée des figures les plus éclatantes, voici une excellente présentation de ce phénomène stupéfiant, sans équivalent en Occident, qui se poursuivit en Syrie et en Palestine jusqu’au XIe siècle et qui marqua fortement ses contemporains. J-LV Editions du Cerf, 316 pages, 22 €.
Ferveur des pierres chrétiennes de Syrie
15 Le Trône d’Adoulis
Sébastien de Courtois Menée comme un reportage alerte et stimulant, cette chronique des rencontres de l’auteur avec des chrétiens orientaux est aussi un puissant appel à un Occident à indignation variable. «Les chrétiens d’Orient n’ont pas le vent en poupe, avec leur encens et leurs dialectes antiques, tenus pour réactionnaires dans nos pays, alors qu’ils sont à la pointe du progrès dans les leurs.» A la justesse du constat répond la gravité de la situation : au rythme des massacres, l’Orient sans chrétiens est pour demain. GC
Andrée Claire A lire ce beau texte et à voir ses photographies (de l’Ecole biblique et archéologique française de Jérusalem) des sites les plus célèbres, une certitude vous étreint : il y a des ruines inspirées. Du IVe au VIe siècle, la Syrie, l’une des régions les plus riches de l’Empire romain, se couvre d’un ensemble exceptionnel d’églises et de monastères, témoignages du premier art chrétien. Les premières reprennent tout d’abord le schéma des basiliques païennes, l’adaptent, en même temps qu’elles s’inspirent des monuments à plan central tels les thermes ou les tombeaux. Puis, elles s’émancipent et trouvent leurs caractères originaux. Quant aux seconds, ils gardent une part de mystère et entretiennent le rêve. J-LV
Glen W. Bowersock A travers l’analyse de l’inscription relevée au VIe siècle sur un trône votif d’Adoulis par le marchand chrétien Cosmas Indicopleustès, l’auteur brosse le tableau passionnant des guerres et des luttes religieuses qui agitèrent la région de la mer Rouge juste avant l’apparition de l’islam. Les antagonistes sont le royaume chrétien d’Aksûm, dans l’actuelle Ethiopie, et l’étonnant royaume juif de Himyar, actuel Yémen, peuplé d’Arabes convertis, mais aussi leurs alliés respectifs, l’Empire byzantin et l’Empire perse. Avec la maîtrise dont témoignait déjà son Julien l’Apostat, Glen W. Bowersock éclaire l’histoire juive de la péninsule arabique et, partant, un contexte politico-religieux déterminant pour comprendre l’apparition du nouveau monothéisme prêché par Mahomet. GC
JC Lattès, 235 pages, 17,30 €.
Editions Michel de Maule, 176 pages, 30 €.
Albin Michel, 190 pages, 22,90 €.
Le Rocher, 180 pages, 13,50 €.
Le Nouveau Défi des chrétiens d’Orient