water governance actors in southern africa
Accéder à l’eau de la Sabie river au cœur d’une aire protégée Un fragile équilibre entre garantie des droits des riverains et limitation de leurs mouvements
Nicolas Verhaeghe Nicolas Verhaeghe est doctorant en géographie à l’université Paris-Nanterre au sein du laboratoire Mosaïques – UMR LAVUE 7218. Depuis 2017, il y mène ses recherches autour des stratégies des usagers pour l’accès aux ressources de la rivière Sabie (Afrique du Sud). Ses travaux sont encadrés par le professeur David Blanchon (géographe à l’université de Tucson) et Magalie Bourblanc (politiste au CIRAD).
Résumé A partir d’extraits de visites de terrain et d’entretiens issus de deux périodes de recherches doctorales, cet article propose d’observer les macro et micro-dynamiques de l’accès à l’eau de la Sabie river dans un espace où la rivière constitue la frontière entre une aire protégée, le Kruger National Park, et les zones habitées et cultivées d’un ancien bantoustan. Depuis les deux rives sud-africaines de la rivière, l’article se place du point de vue des différents usagers (gestionnaires de l’aire protégée, ministère en charge de l’agriculture, cultivateurs et habitants riverains) pour saisir leurs intérêts et le fonctionnement de l’accès physique à la rivière pour les habitants et cultivateurs. Comme nous le montrerons, un élément déterminant de l’accès à l’eau est l’installation d’une clôture vétérinaire sur les berges de la rive nord de la Sabie qui enferme de fait le cours d’eau au sein de l’aire protégée. Si son objectif premier vise à limiter la propagation d’épizooties, elle permet également de filtrer et de contrôler l’accès au territoire du parc pour les populations riveraines en le limitant à une cinquantaine de portes piétonnes (pedestrian gates). Ces portes d’accès installées au sein de la clôture permettent aux riverains d’accéder à la rivière pour leurs besoins spécifiques (souvent l'irrigation) et de garantir l’usage de leurs droits d’eau. Si le système de création et de maintenance des portes autorise une certaine souplesse, et une assistance fréquente du gouvernement aux agriculteurs, il semble paradoxalement renforcer la fragilité de l’accès à l’eau. Avec l’explosion du braconnage, les enjeux de contrôle du risque sanitaire par la limitation des mouvements des populations et des troupeaux domestiques se combinent en effet aux enjeux liés au contrôle du territoire de l’aire protégée par ses services de sécurité. En découle un risque de limitation de l’accès à l’eau, qui entre en contradiction avec l’objectif d’ouverture vers les communautés voisines, promu récemment par les gestionnaires de l’aire protégée. Mots-clés : accès à l’eau ; droits d’eau ; conservation ; irrigation ; aires protégées ; cours d’eau
Lesedi #22 | Carnets de terrain | IFAS-Recherche | Octobre 2020
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