Lesedi #16 (français)

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Lettre d’information Institut Français d’Afrique du Sud - Recherche

|03| Dossier BRICS |03| Le 5 Forum Académique des BRICS : vers une vision de long terme et de partenariat avec l'Afrique ? - Carolina Milhorance de Castro |11| De l'importance d'une banque BRICS - Christopher Wood |12| Une nouvelle trilogie ? BRICS, infrastructures et développement sur le con nent africain - Agathe Maupin

|20| Actualités Affecta on à l'IFAS de Guillaume Porraz Boursiers longue durée à l’IFAS : projets de recherche

|24| Conférences & seminaires The Arts and Cra s of Literacy – Manuscript Cultures in Muslim Sub-Saharan Africa Conférence sur les élec ons générales en Afrique du Sud Symposium de clôture du programme XenafPol Book History Seminars Global History Workshop FISH - French Ins tute Seminars in Humani es

Photo: GCIS

|27| Publications Les Voyages de l'écrit. Culture écrite et expansion européenne à l'époque moderne : essais sur la Compagnie Hollandaise des Indes Orientales - Adrien Delmas Sounding the Cape. Music, Iden ty and Poli cs in South Africa - Denis-Constant Mar n

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http://www.ifas.org.za/research http://ifas.hypotheses.org/ http://halshs.archives-ouvertes.fr/IFAS http://www.facebook.com/IFASResearch http://www.youtube.com/user/IFASresearch http://www.flickr.com/photos/IFASResearch

L'Institut Français d'Afrique du Sud, créé en 1995 à Johannesburg, dépend du Ministère des Affaires Étrangères. Sa mission est d'assurer la présence culturelle française en Afrique du Sud, et de stimuler et soutenir les travaux universitaires et scientifiques français sur l'Afrique du Sud et l'Afrique australe l'IFAS-Recherche (UMIFRE 25) est une Unité mixte de recherche CNRSMAEE, et fait partie de l’USR 3336 « Afrique au sud du Sahara ». Sous l'autorité de son conseil scientifique, l'IFAS-Recherche participe à l'élaboration et la direction de programmes de recherche dans les différentes disciplines des sciences sociales et humaines, en partenariat avec des institutions universitaires ou d'autres organismes de recherche. L'Institut offre une plate-forme logistique aux étudiants, stagiaires et chercheurs de passage, aide à la publication des résultats de recherche et organise des colloques et conférences.

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Adrien Delmas - Directeur Scientifique Guillaume Porraz - Chargé de Recherches, CNRS Laurent Chauvet - Traducteur Werner Prinsloo - Graphisme, Site Web, Gestion Informatique Victor Magnani - Chargé de projet Recherche / Communication Dostin Lakika - Secrétaire à la Recherche

Lesedi: terme sesotho qui signifie « connaissance » Les opinions et points de vues exprimés ici relèvent de la seule responsabilité de leurs auteurs.

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dossier BRICS ème

Le 5 Forum Académique des BRICS : vers une vision de long terme et de partenariat avec l'Afrique ?

Carolina Milhorance de Castro Doctorante en Science Poli que à l'Université de Brasilia et au CIRAD. Ses recherches portent sur les coopéra ons Brésil-Afrique et trilatérales dans le secteur rural. Elle a obtenu une maîtrise en affaires interna onales (développement durable) de Sciences Po Paris, après avoir obtenu deux licences, une en rela ons interna onales à la PUC-Rio, et une autre en biologie / écologie à l'Université fédérale de Rio de Janeiro (UFRJ). Elle a connu des expériences professionnelles auprès de l'Organisa on de coopéra on et de développement économiques (OCDE), l'Ins tut du développement durable et des rela ons interna onales (IDDRI), la Fonda on Oswaldo Cruz (FIOCRUZ), et le Fonds brésilien pour la biodiversité (FUNBIO).

L'affirma on d'un groupe d'économies émergentes est l'un des phénomènes les plus marquants de l'histoire économique récente. La créa on de «clubs diploma ques» entre les États comme les BRICS caractérise les évolu ons actuelles de la sphère poli que interna onale. Ce groupe cons tue un forum de pays industrialisés, de taille importante et à croissance rapide, ayant une influence significa ve sur les ques ons régionales et mondiales. Ils ont assumé une présence ac ve dans plusieurs contextes mul latéraux visant à promouvoir des changements norma fs et opéra onnels . Cet effort est le résultat de concerta ons ini ées lors des sommets annuels des chefs d'Etat. Le terme B R I Cs a été inventé en 2001 par l'économiste en chef de Goldman Sachs, dans un document in tulé “Building Be er Global Economic BRICs”. Il incluait alors le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine car l'Afrique du Sud n'a rejoint le groupe qu'en 2011. Le concept de « l'émergence » a été essen ellement considéré comme un phénomène axé sur le marché qui reflète de profonds changements dans la structure de l'économie mondiale ainsi que le choix de la « bonne » poli que économique. Il est considéré comme un phénomène m u l d i m e n s i o n n e l , l e p ro d u i t d ' é l é m e nt s économiques, socio-poli ques et iden taires . La permanence du groupe a légi mé a posteriori sa cohérence conceptuelle .

Le cinquième Sommet des BRICS s'est tenu les 26 et 27 Mars 2013 à Durban, en Afrique du Sud. La rencontre qui a réuni les chefs d'Etats des pays émergents (le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud) avait lieu pour la première fois sur le sol africain. Les leaders exprimaient leurs avis autour du thème « BRICS et Afrique - Partenariat pour le développement, l'intégra on et l'industrialisa on ». L'ordre du jour affichait des objec fs ambi eux : la promo on du développement et la réforme des ins tu ons mul latérales. La déclara on finale de eThekwini a réaffirmé le compromis du groupe avec la promo on du droit interna onal et du mul latéralisme, ainsi que de la stabilité mondiale, le développement et la coopéra on, fondés sur une approche inclusive. Le Sommet a réuni les leaders des pays qui représentent près de 40% de la popula on mondiale, près de 30% de la surface des terres et qui produisent actuellement une par e du PIB mondial (PPP) qui a augmenté de 16% en 2000 à près de 25% en 2010 . Au cours du Sommet, l'une des principales discussions a concerné le lancement officiel des négocia ons pour la créa on d'une banque de développement, afin de financer des infrastructures et l'industrialisa on dans les BRICS et dans d'autres pays en développement, en par culier sur le con nent africain. Ce e banque servira d'ins tu on financière partageant la façon dont les pays émergents considèrent le développement, mais ne

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sera pas vraiment un contrepoids à la Banque mondiale et au FMI. Les dirigeants ont également décidé de cons tuer un filet de sécurité financière en créant un Fonds de réserve (Con ngent Reserve Arrangement - CRA) entre les pays BRICS, des né à an ciper les pressions sur les liquidités à court terme et de renforcer la stabilité financière. Ce fonds d'urgence, avec une dota on ini ale de 100 milliards de dollars, comme convenu par les États membres, n'a pas été détaillé davantage. En outre, ils ont signé des accords de coopéra on, y compris l'Accord mul latéral sur la coopéra on et le co-financement pour le développement durable, et l'Accord mul latéral sur le cofinancement d'infrastructures en Afrique. A ce e occasion, le nouveau président chinois, XI Jinping, a par cipé à Durban à sa première grande réunion mul latérale avant d'entamer une longue tournée africaine. D'autres pays africains s'y sont également rendus, notamment lors du Dialogue entre les dirigeants des BRICS et d'Afrique, le 27 mars. Parmi les par cipants invités à ce Dialogue, on peut citer les présidents de l'Union Africaine (UA), de la Commission de l'UA, du NEPAD et des leaders représentant les Communautés économiques régionales. Ces réunions concré saient une voie de discussion entre les membres des BRICS et d'autres Etats en développement, ainsi que des organisa ons régionales. Elles ont été précédées des forums entrepreneuriale et académique où, selon la diploma e brésilienne, sont créées les condi ons pour la coopéra on et les affaires. Des résultats concrets sont issus de ces arènes, comme la créa on d'un Conseil entrepreneurial des BRICS et d'un Conseil de Think Tanks. Ces réunions, notamment le Forum académique, visaient à formuler des recommanda ons et une vision à long terme pour le sommet des chefs d'Etat.

Que disent les universitaires ? Le Forum Académique des BRICS accueilli par la Durban University of Technology ( D U T ), le Department of Higher Educa on and Training (DHET), le Department of Interna onal Rela ons and Coopera on (DIRCO), et le Higher Educa on South Africa (HESA), envisageait d'approfondir l'interac on dans les milieux de la recherche et de formuler des recommanda ons à présenter aux dirigeants lors du

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sommet du 26-27 mars 2013. Les par cipants étaient regroupés dans des think tanks liés aux gouvernements des cinq pays et impliqués dans la formula on de poli ques publiques. Un nombre plus restreint d'organisa ons de la société civile et d'autres ins tu ons de recherche ont intégré les déléga ons non-officielles des pays. Ce dernier a également bénéficié de la présence solennelle des ministres sud-africains des Affaires étrangères, Mme Maite Nkoana-Mashabane, et de l'Educa on supérieure, Dr B. E. Nzimande. Les débats étaient organisés en sessions plénières suivies de discussions parallèles abordant cinq théma ques : le rôle des BRICS dans l'économie mondiale, la réforme des ins tu ons de gouvernance globale, la coopéra on avec l'Afrique, l'éduca on et la recherche pour l'industrialisa on des économies, ainsi que la théma que de la paix et de la sécurité. La déclara on finale – lue par le Dr Siphamandla Zondi, directeur de l'Ins tute for Global Dialogue, et signée par les chefs de chaque déléga on – n'a pas été rédigée sans difficulté, ce qui a démontré les différences de perspec ves des déléga ons présentes. Ce e déclara on s pule que le forum a matérialisé les aspira ons des pays à consolider les partenariats des uns avec les autres, mais aussi avec les marchés émergents et des pays en voie de développement, afin de renforcer les trajectoires de développement, promouvoir l'intégra on et l'industrialisa on. Les recommanda ons, également partagées entre les théma ques retenues, comprennent : 1 - Les BRICS et l ’économie globale: Les BRICS pourraient faciliter la coopéra on dans le domaine du commerce, en par culier pour les biens et les services. Ils devraient entreprendre des discussions sur la faisabilité de l'implanta on d'accords commerciaux préféren els entre eux ainsi que renforcer la coopéra on financière en établissant une banque du développement des BRICS et en créant des mécanismes pour gérer la vola lité du marché monétaire global. 2 - La réforme des ins tu ons de gouvernance globale: Les objec fs du groupe sont la réforme des ins tu ons mul latérales globales, en tentant notamment de les rendre plus démocra ques,

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dossier BRICS

3 - La coopéra on avec l ’Afrique: Les BRICS devraient reconnaître la valeur de la diversité et des expériences présentes dans les histoires respec ves, de leur propre pays et des pays africains. Ceci inclurait la poursuite d'une coopéra on approfondie avec l'Union africaine, prenant en compte les priorités africaines, en par culier l'intégra on régionale. 4 - La forma on, la recherche et le développent de compétences pour l ’élabora on d'économies industrialisées: Les BRICS devraient intensifier leur sou en à la collabora on académique. Ceci inclut la valorisa on des langues locales et des pra ques culturelles. Les BRICS pourraient envisager la créa on d'une agence indépendante de nota on des écoles et des universités dans leurs pays. Le Forum propose en outre l'établissement d'une banque de données primaires sur les cinq pays, ainsi qu'une plateforme numérique comprenant des informa ons détaillées sur les chercheurs et les ins tu ons travaillant sur des ques ons rela ves aux BRICS. 5 - Paix et sécurité : Les BRICS devraient con nuer de promouvoir la centralité des Na ons Unies, et être plus ac fs dans la promo on de solu ons pacifiques en cas de conflits.

Des préoccupa ons communes de sécurité comme l'eau, l'alimenta on, l'environnement, la santé et la prépara on aux désastres doivent con nuer d'être un point focal. Les BRICS devraient aussi promouvoir l'usage pacifique de l'espace et u liser leur puissance rela ve dans les situa ons de postconflit, sous l'égide des DURBANSOUTH AFRICA Na ons Unies. Cependant, les par cipants n'ont pas évoqué certaines ques ons polémiques telles que la situa on en Syrie.

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représenta ves et responsables. Ainsi, les B R I C S pourraient s ' e ffo r c e r d e f a i r e entendre leur voix et promouvoir la rep résenta o n d es économies émergentes et des pays en voie de développement dans d e s f o r u m s mul latéraux. Les B R I C S devraient explorer ac vement des partenariats i n n o va n t s e t complémentaires pour u n d éve l o p p e m e nt équitable et durable. Enfin, la créa on d'un Forum parlementaire pourrait intensifier l'interac on poli que.

Concrètement, la réunion des Think Tanks, qui s'est tenue les 8 et 9 Mars 2013, a contribué à l'établissement d'un Conseil de Think Tanks des BRICS avec le but d'avancer la coopéra on dans la recherche, le partage de connaissances, la forma on ainsi que le conseil poli que. Ce Conseil, composé des ins tu ons leaders des déléga ons, sera en charge de l'organisa on des prochains forums académiques. Les fonc ons et modalités addi onnelles de coopéra on seront élaborées lors d'une réunion qui se endra en Octobre 2013. A l'excep on de la Fonda on Observer Research (ORF) en Inde, toutes les ins tu ons qui composent ce Conseil sont liées directement ou indirectement aux gouvernements des Etats : l'Ins tut de recherche économique appliquée (IPEA, Brésil) ; le Comité na onal de recherche sur les BRICS (BRICS/NRC, Russie) ; le Centre chinois pour les études interna onales contemporaines (CCCWS, Chine) ; et le Conseil de recherche en sciences humaines (HSRC, Afrique du Sud). Plutôt un club qu'un forum, la rencontre académique est parvenue à me re d'accord les différents représentants sur des projets communs, notamment en ce qui concerne l'objec f de réforme des ins tu ons mul latérales et financières, sur l'intérêt à promouvoir davantage les interac ons et à approfondir les connaissances entre les pays. En effet, un partage plus efficace d'informa ons dans le

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groupe est vu comme un premier pas dans la possibilité de formula ons de stratégies communes. Réformer les ins tu ons de Bre on Woods (la Banque mondiale, le FMI et la Sociéte financière interna onale) est considérée comme l'une des priorités du groupe. L'Organisa on mondiale du commerce (OMC) est également mise à l'écart des préoccupa ons des pays émergents . Dans la Déclara on de Delhi, le vœu d'une architecture financière interna onale plus représenta ve avait déjà été formulé. Dans ce contexte, le sou en manifesté par les BRICS et les pays africains à l'élec on du diplomate brésilien Roberto Azevêdo à la tête de l'organisa on peut être considéré comme un résultat posi f de ces réunions et coali ons. Enfin, la rela on des BRICS avec l'Afrique, source d'une grande couverture média que et de divergences d'opinions en termes de contribu on pour l'actuelle transforma on sociale et économique du con nent, pose une série de ques ons qui seront abordées dans les par es suivantes.

Les BRICS et l'Afrique Les termes du débat L'intérêt commun quant à un approfondissement de l'engagement et de la coopéra on avec d'autres pays du monde émergent et en développement, ainsi qu'avec les organisa ons interna onales et régionales, était prévu dans la Déclara on de Sanya (2012) et a été évoqué lors de toutes les réunions, y compris lors du sommet des chefs d'Etats . L'organisa on du dialogue entre les dirigeants africains et les BRICS, sous le thème « Débloquer le poten el de l'Afrique » a renforcé ces discours. A ce e occasion, le président chinois Xi Jinping a affirmé que le système de gouvernance globale faiblirait sans la par cipa on de l'Afrique. Ces déclara ons et ini a ves de réunions ont été comparées par les médias avec la « ruée vers l'Afrique », lorsque les Européens ont colonisé le con nent à la fin du XIXe siècle . L'assaut sur les ma ères premières et l'accaparement des terres faisaient par es des ques ons fréquemment posées lors de la couverture du Sommet de Durban . Certains auteurs a rent l'a en on sur l'idée que la

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demande croissante de ma ères premières, y compris alimentaires, des pays émergents exerce un effet de « retour des techniques » au profit du secteur ren er. Néanmoins, on ne se fait guère d’illusions sur un possible traitement néocolonial de l'Afrique, étant donné le contexte économique actuel avec les prix élevés des ma ères premières et un marché africain en plein essor . La présence chinoise est la plus controversée, en par culier dans les médias, car la coopéra on chinoise et ses pra ques d'inves ssements en Afrique ne sont pas considérées – par certains auteurs et dirigeants – comme conformes aux normes interna onales de la transparence et de la bonne gouvernance . Au point que la représentante du think tank China Centre for Contemporary World Studies a considéré qu'il existait une sorte de « sinophobie ». Néanmoins, ces ques ons n'ont pas ou n'ont été que superficiellement traitées lors du forum académique. D'autres ques ons comme les modèles de développement adoptés n'ont pas non plus été abordées. Les sessions plénières et parallèles se sont limitées à une présenta on des principales lignes d'ac on de chaque pays dans le cadre de leur coopéra on avec l'Afrique, en soulignant les aspects communs entre eux, comme les rela ons historiques et la coopéra on horizontale, mais pas nécessairement les lignes d'ac ons conjointes des BRICS envers l'Afrique. Des divergences ont été mises en avant lors d'une interven on provocatrice d'un représentant de la déléga on brésilienne qui ques onnait les raisons de cet intérêt soudain des BRICS pour l'Afrique. Cependant ni les défis, ni les cri ques de ce e rela on n'ont été approfondis. Ils ont d'ailleurs été étouffés par les déclara ons poli ques, selon lesquelles les cri ques contre le groupe des BRICS manquent d'apprécia on sur l'importance de la m u l p o l a r i té p o u r le b o n fo n c o n n em e nt géopoli que du système interna onal. Dans le domaine de la coopéra on des BRICS avec les pays africains, le groupe n'a toujours pas ce que l'on pourrait appeler une poli que africaine. Le principal point d'accord entre les déléga ons porte sur la priorité de considérer l'Afrique comme un con nent, même si ses voix et ses caractéris ques sont assez diverses. Il s'agit ainsi de soutenir le processus

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dossier BRICS

d'intégra on régionale notamment à travers l'Union Africaine. En conséquence, ce e ins tu on est considérée comme l'un des plus importants interlocuteurs des BRICS sur le con nent africain.

Les convergences d'un groupe hétérogène Les déléga ons académiques ainsi que celles des chefs d'Etat des BRICS étaient d'accord pour appuyer, dans le cadre du NEPAD, l'industrialisa on des pays africains à travers la promo on des inves ssements, le partage de connaissances, le renforcement des capacités et la diversifica on des importa ons. Les déléga ons académiques suggèrent également la promo on du développement des infrastructures en Afrique avec des bénéfices mutuels pour les BRICS et les pays africains, à travers n o ta m m e nt d e s arrangements financiers préféren els. En donnant la priorité aux infrastructures, les efforts déjà réalisés par l'Union Africaine ont été reconnus, par exemple dans les cas du Programme pour le développement des infrastructures en Afrique (PIDA), le Plan d'ac on du N E PA D (2010-2015), l'Ini a ve présiden elle pour les infrastructures du NEPAD (PICI), ainsi que les Master plans de développement régional des infrastructures . La possible créa on d'une banque des BRICS aura dans cet aspect un rôle important, apportant du financement et des prêts concessionnels vers les déficits de financement des infrastructures . Le rôle de l'Union africaine est également reconnu dans le domaine de la paix et de la sécurité régionale. Cet importance donné à l'agenda du NEPAD était également le résultat des efforts sud-africains de se placer en tant qu'intermediaire des BRICS avec le con nent africain.

Il semble que ce programme soit principalement axé sur la réforme des ins tu ons financières interna onales, plutôt que sur la défini on d'un p a ra d i g m e co m m u n d e co o p é ra o n e t d e développement des BRICS en direc on du con nent africain. En dépit des accords de circonstance lors de la réunion de Busan sur l'efficacité de l'aide (Novembre 2011), nous ne trouvons pas d'ac on commune des BRICS dans ce domaine. Le Partenariat Mondial pour une Coopéra on Efficace au service du Développement – incluant à la fois les coopéra ons Nord-Sud et Sud-Sud – avait été considéré comme le principal résultat de ce Forum. Mais jusqu'à présent, les puissances émergentes ont été peu impliquées dans les négocia ons, les BRICS étant apparemment plus intéressés par le G20 comme forum de discussion

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sur le développement ⁺ . Cependant, les cinq pays émergents promeuvent des points similaires dans cet agenda : Ÿ Les principes de la Coopéra on Sud-Sud qui défendent les no ons de “partenariats” pour le développement et l’appren ssage au lieu de “dona ons” ; les bénéfices mutuels au détriment des condi onnalités poli ques. Ÿ L'importance des échanges commerciaux et

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des inves ssements directs étrangers comme éléments légi mes du développement. Le partage d'expériences en poli ques publiques avec les pays à bas revenus dans des domaines divers, qui vont de la santé à l'agriculture.

Le discours poli que s'efforce de jus fier le rassemblement, qui selon la ministre NkoanaMashabane, se compose d'un premier bloc d'histoire commune de lu e contre la colonisa on et le sousdéveloppement selon « l'esprit de Bandung » ; d'un second bloc de défis communs contre les inégalités, la pauvreté et le chômage ; et d'un troisième bloc dirigé par des intérêts par culiers et qui travaille pour un vrai partenariat avec l'Afrique . L'esprit de Bandung a été plusieurs fois évoqué dans les discours pendant les différentes interven ons du Forum, même si ce e iden té n'inclut pas la Russie. L'argument de Bandung présente le groupe comme produit de la guerre froide, avec l'idée poli que propre aux situa ons de sous-développement : des projets de développement a achés avant tout à sor r de la pauvreté, de la précarité et de la vulnérabilité, à surmonter l'héritage du colonialisme, à desserrer ou à briser les contraintes imposées par le système poli que interna onal, par ses ins tu ons et, plus encore, par le capitalisme mondial. Néanmoins, selon Andrew Hurrel , l'histoire du groupe ne se réduit pas à celle de la guerre froide. La no on de Sud reste u le pour appréhender la spécificité des iden tés (aussi diverses soient-elles) des grands pays émergents, qui naviguent et se posi onnent au sein de l'ordre capitaliste tel qu'il est – à la fois libéral et structuré par l'État – tout en acceptant l'essen el des postulats et des valeurs de cet ordre mondial. « Nord » et « Sud » coexistent sur un même territoire des pays émergents, et la recombinaison d'idées et de poli ques publiques anciennes et nouvelles empêche ces pays de se laisser purement et simplement absorber dans une version élargie du Grand Occident libéral.

Quelle vision de long terme ? Malgré la défini on d'une iden té partagée et la formula on de quelques objec fs communs, les rela ons économiques et poli ques entre les BRICS

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sont discon nues. Par exemple, en dépit de l'importance chinoise dans le commerce intra-bloc, l e s a u t re s p ay s ré a l i s e n t p e u d ' é c h a n g e s commerciaux entre eux : ils entre ennent davantage de rela ons commerciales avec les pays du con nent africain. Les entreprises chinoises, notamment dans l'extrac on minière et aurifère et dans le domaine des télécommunica ons, sont des concurrents redoutables pour les Sud-Africains . La Russie est au sein des BRICS l'acteur le plus atypique vu qu'il ne s'agit pas d'un émergent à proprement parler mais d'une ancienne superpuissance désireuse de regagner une par e du statut poli que perdu. Le pays voit dans son statut de membre permanent du Conseil de sécurité un de ses principaux atouts, tandis que sur le plan économique et démographique sa posi on demeure beaucoup plus faible . Ces pays possèdent des visions divergentes en ce qui concerne le rôle du groupe dans le système interna onal. En outre, les membres des BRICS font face à des défis intérieurs importants en termes d ' i n é ga l i té s s o c i a l e s et d e ra l e n s s e m e nt économique, de ques ons poli ques et de problèmes environnementaux . Ainsi, la vision de long-terme des think tanks ent à l'idée qu'en dépit des divergences entre les membres du groupe, toute priorité définie en commun sera plus naturellement poursuivie si les BRICS me ent en place un cadre cohérent et durable d'engagement con nu. Dans un même temps, les mécanismes de formula on poli que devraient être dynamiques et inclusifs, la flexibilité ins tu onnelle étant l'idée centrale des BRICS. Dans ce contexte, le rôle des ins tu ons de recherche et des think tanks pivots est considéré comme crucial. L'intérêt de transformer les B R I C S dans un mécanisme formel d'interac on stratégique ne devrait pas forcer un processus ar ficiel d'expansion et d'ins tu onnalisa on. La priorité, pour une par e des universitaires, devrait être la mise en place d'une base opéra onnelle solide pour l'associa on entre ses membres. Cela inclut les ins tu ons de partage d'expériences et de connaissances, la mise en place de banques de données et de programmes de forma on conjoints, la créa on de nouveaux canaux de communica on et de plateformes académiques et de la société civile. En d'autres termes, des pays extrêmement hétérogènes en fonc on de leurs visions, intérêts, caractéris ques internes et inser on

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dossier BRICS

interna onale, formant un bloc de pouvoir, cherchent à se cons tuer en tant que groupe à travers l'approfondissement des échanges. Ce rassemblement de puissances très souvent concurrentes est ainsi animé par l'objec f de réformer le système interna onal visant à davantage de par cipa on de leur part.

Conclusion Les pays émergents, qui ont gagné en cohérence en raison de leur rôle croissant dans l'économie mondiale, en par culier en termes de changements axés sur les marchés, assument également une iden té historique de périphérie du monde occidental, faisant face aux problèmes de la pauvreté, de l'inégalité et de la vulnérabilité. Ces pays veulent un statut, la reconnaissance et les moyens d'influer sur le système interna onal en travaillant avec des groupes ou alliances et / ou par l'intermédiaire des ins tu ons mul latérales. Le rassemblement BRICS est le résultat de ce e logique, en étant devenu non seulement un groupement économique mais un groupe de pouvoir ayant l'inten on d'influencer et de réformer l'architecture interna onale. Dans le cadre de son interac on avec l'Afrique, ce bloc de pouvoir commence à en récolter les fruits : le plus récent exemple est sans doute l'élec on du brésilien Roberto Azevedo à la tête de l'Organisa on mondiale du commerce (même si Azevedo n'était pas le

candidat du groupe en début des négocia ons). Cependant, à la différence de l'IBSA, un groupe un peu plus homogène et qui a déjà été capable de me re en œuvre un plus grand nombre d'ini a ves concrètes, les BRICS sont plutôt d'accord sur quelques lignes directrices de coopéra on sud-sud et sur la contribu on au processus d'intégra on régionale africaine. En outre, cela impliquerait deux puissances majeures comme la Chine et la Russie dans la configura on du système interna onal. Même si le processus de négocia on en cours demeure imprécis et vague, ce dernier élément pourrait être avancé dans le cadre de la mise en œuvre du projet de la banque de développement qui est considéré comme un moyen de faire avancer l'ins tu onnalisa on des BRICS sous une logique fonc onnelle. Pour le moment, les efforts sont concentrés sur l'approfondissement des interac ons et des connaissances entre les différents pays composant le groupe des B R I C S. Le Forum académique a ini é sa session de clôture avec une déclara on du chef de la déléga on russe, Dr Vyacheslay Nikonov, qui résume le statut du groupe : « BRICS is now a reality, not a virtuality. We become more and more real ». Les perspec ves de coordina ons poli ques et économiques sont en construc on et prêchent jusqu'à présent pour la flexibilité et l'autonomie de chaque pays, avançant uniquement sur les ques ons relevant d'une base fonc onnelle et sur lesquelles il y a accord.

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pacifique/ar cle/2013/03/29/chinafrique-les-ques ons-qui-derangent_3150304_3216.html, 20/05/2013 Boillot Jean-Joseph, « La montée de la « Chindiafrique » et le pionnier du développement A. O. Hirschman », Revue Tiers Monde, 2011/4 n°208, p. 121-138. DOI : 10.3917/rtm.208.0121 Lafargue François, « L'Afrique du Sud et la Chine » Un mariage de raison ?, Afrique contemporaine, 2012/2 n° 242, p. 11-28 Voir à ce sujet l'ar cle d'Agathe Maupin dans ce même numéro. Voir encadré. Eyben, R., Savage, L., 2013. Emerging and Submerging Powers: Imagined Geographies in the New Development Partnership at the Busan Fourth High Level Forum. Journal of Development Studies 49, 457–469. In the case of the IBSA Forum, more concrete mechanisms have already been implemented, such as the IBSA Trust Fund and the Project Allevia on of Poverty and Hunger. Il fait référence à la conférence qui s'est tenue dans la ville du même nom en 1955, qui a été à l'origine du mouvement du Tiers Monde (pays non alignés). Cela n'a jamais reposé sur des caractéris ques économiques communes, mais était plutôt un projet poli que fondé sur une expérience partagée de la marginalisa on. SAFPI, 2013, BRICS Academic Forum: speech by SA Foreign Minister, h p://www.safpi.org/news/ar cle/2013/brics-academic-forum-speech-sa-foreign-minister, 20/05/2013 Hurrel, 2012, Récits d'émergence : la fin du Tiers Monde ?, Cri que interna onale 2012/3 (N° 56) Lafargue François, « L'Afrique du Sud et la Chine » Un mariage de raison ?, Afrique contemporaine, 2012/2 n° 242, p. 11-28. Laïdi Zaki, « Les BRICS : un cartel d'ambi ons souverainistes », Le Débat, 2011/5 n° 167, p. 50-59. Vieira de Jesus, 2013, Os principais pontos na agenda da Cúpula de Durban, B R I C S Policy Center, h p://www.bricspolicycenter.org/homolog/arquivos/Cupuladedurban.pdf, 20/05/2013

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dossier BRICS

De l'importance d'une banque BRICS Lors du sommet des BRICS qui s'est tenu à Durban en mars 2013, l'annonce de la créa on d'une Banque de développement BRICS (BDB), visant à « mobiliser des ressources pour les projets d'infrastructures et de développement durable au sein des BRICS et autres économies émergentes », a suscité l'intérêt. Une banque BRICS perme rait d'offrir d'autres sources de capital pour le développement aidant à surmonter le déficit en ma ère d'infrastructures qui subsiste encore au sein des pays en développement, et des BRICS eux-mêmes. Mais plus encore, une telle banque perme rait aux BRICS d'établir un certain niveau d'ins tu onnalisa on. Jusqu'ici le groupe est principalement resté informel, organisant des sommets annuels, mais sans aucune capacité ins tu onnelle indépendante des cinq États membres. De ce fait, il manque au groupe un mécanisme indépendant à travers lequel ses membres pourraient transformer leurs déclara ons annuelles en actes concrets, ce qui perme rait d'éviter que les sommets ne soient qu'une rencontre où l'on y parle affaires ou, au mieux, un forum à collabora on limitée entre les cinq membres, et n'ayant qu'une faible chance de se dis nguer comme nouvel acteur mondial. Tout comme la Banque Mondiale et le FMI offrent au G20 la capacité de tourner leurs débats en ac ons, une banque BRICS pourrait offrir à ses cinq membres un moyen d'ac on similaire. D'autres mo va ons suscitent également un vif débat, celles-ci viseraient à contester l'ordre économique mondial dominant, en offrant une alterna ve aux ins tu ons de Bre on Woods et en contestant le statut du Dollar américain comme principale monnaie de réserve mondiale – une offre et une remise en cause qui semblent peu probables. Alors que l'ampleur de la BDB reste incertaine, il est probable que ce e banque soit financée à hauteur de 50 milliards de dollars de capital lors de son lancement, en plus de prêts financés par l'exploita on du marché interna onal des capitaux. Bien que considérable, une telle somme resterait tout de même très éloignée de la somme qui serait nécessaire à l'établissement d'une banque alterna ve, et ne pourrait qu'être complémentaire aux ins tu ons financières interna onales comme la Banque Mondiale. Il est possible que la BDB représente un défi pour les normes courantes de prêt, et notamment les principes de la condi onnalité. Cela ne veut pas dire que les prêts BRICS seraient sans condi on, mais il est possible que leurs condi ons soient plus fermement ancrées dans les par cularités des projets de développement concernés, évitant ainsi des exigences de gouvernance. Alors que ces préoccupa ons autour de prêts moins responsables pourraient être soulevées, il reste encore des mo va ons suffisamment importantes pour se conformer aux normes de prêt interna onales, afin de s'assurer l'accès aux fonds en provenance d'ins tu ons telles que la Banque Mondiale. Ces mo va ons constantes ainsi qu'une banque BRICS qui ne peut pas remplacer en èrement le rôle que jouent ces ins tu ons, signifient que tout changement de norme sera probablement de faible impact, ne servant qu'à augmenter la pression concurren elle sur les normes actuelles. Les discussions concernant le fait que la banque perme rait de faciliter un changement dans les opéra ons de change interna onales, et qu'elle contribuerait à la consécra on du statut du Renminbi chinois comme monnaie de réserve mondiale, sont également exagérées. La puissance économique chinoise rend probable le fait que le Yuan gagnera à l'avenir un statut de monnaie de réserve, mais de tels changements sont généralement lents. En effet, le Japon est resté la deuxième économie mondiale pendant plus de 40 ans, et pourtant le Yen joue encore aujourd'hui un rôle rela vement mineur dans les réserves interna onales de monnaies. Même les ambi ons de la Chine restent modestes, en ce qui concerne leurs objec fs à court terme quant à l'assurance d'un rôle plus important du Yuan dans le panier des monnaies qui sont à la base des Droits de rage spéciaux du FMI. À ce stade, l'u lisa on de monnaies BRICS représenterait un geste symbolique fort, mais pour la plupart des transac ons cela en viendrait encore à conver r ces fonds en dollars américains ou en Droits de rage spéciaux du FMI. Si une monnaie BRICS devait devenir une monnaie de réserve reconnue, la BDB s'en servirait certainement. Mais pour l'instant, il est plus probable que les BRICS se cantonneront dans l'u lisa on d'une norme interna onale reconnue.

Christopher Wood

est chercheur en diploma e économique au sein du South African Ins tute of Interna onal Affairs, et est spécialiste des ques ons financières rela ves aux BRICS.

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Une nouvelle trilogie ? BRICS, infrastructures et développement sur le continent africain

Agathe Maupin Agathe Maupin occupe un poste de chercheur au South African Institute of International Affairs (SAIIA) à Johannesburg et est également chercheur associé au laboratoire Les Afriques dans le Monde (LAM) à Bordeaux. Elle a realisé une thèse, soutenue en 2010, sur les politiques de gestion de l'eau dans les bassins transfrontaliers de l'Afrique australe.

La place croissante du Brésil, de la Russie, de l'Inde, de la Chine et de l'Afrique du Sud sur la scène africaine présente de nouvelles opportunités de développement pour le con nent, en par culier en ce qui concerne ses infrastructures. Privilégiant les inves ssements dans certains domaines plutôt que l'aide publique au développement, les BRICS me ent en place de nouvelles formes de rela on. Lors du dernier sommet des BRICS, ces derniers ont ainsi de nouveau affiché leur sou en au PIDA. Quelles sont les infrastructures privilégiées et, à travers ces dernières, quels intérêts les BRICS défendent-ils sur le con nent africain ?

Introduc on Pourquoi une future banque de développement s'estelle retrouvée au cœur des débats lors du dernier sommet des BRICS, qui s'est déroulé en mars 2013 en Afrique du Sud, dans la ville de Durban ? Les BRICS ont déjà beaucoup inves ces dernières années dans l'améliora on et la mul plica on des infrastructures sur le con nent africain en s'appuyant sur des accords et partenariats bilatéraux essen ellement. Seulement voilà, l'heure de la coopéra on trilatérale et des projets complexes et mul latéraux a sonné. Parce qu'il existe déjà de nombreux accords et projets bilatéraux, ainsi que des ins tu ons régionales, le besoin de cadres généraux, voire de normes, semble

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se faire sen r : la coopéra on trilatérale (voire mul latérale), qui se concentre généralement autour d'un projet, qu'il inclut des infrastructures ou non, pourrait être facilitée par une banque commune aux BRICS. En outre, la Commission de l'Union Africaine, en partenariat avec l'Agence de planifica on et de coordina on du NEPAD (NPCA), la Banque Africaine de Développement et la Commission Economique pour l'Afrique des Na ons-Unies, en proposant un Programme pour le Développement des Infrastructures en Afrique (PIDA), avait certes en tête l'intégra on, le développement et la coopéra on socio-économique du con nent, mais également ses poten els inves sseurs. Le PIDA propose aux par es prenantes africaines un cadre commun d'intégra on pour les infrastructures à développer sur le con nent. Son avant-propos précise ainsi que : « la mise en oeuvre de PIDA exigera de robustes structures de coordina on et la mobilisa on de toutes les sources de financement intéressées, tant publiques que privées. [...] Nous invitons les divers partenaires de développement de l'Afrique et le secteur privé à envisager de soutenir la réalisa on de PIDA » . Des projets prioritaires ont déjà été iden fiés et beaucoup d'entre eux sont maintenant prêts à être financés et mis en œuvre, illustrant par là une opportunité pour les inves ssements des BRICS dans les infrastructures du con nent africain. L'expression de « partenaire de développement » employée par le

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dossier BRICS

rapport PIDA est loin d'être anodine : de l'aide aux partenaires du développement, l'appréhension de ce dernier a évolué depuis quelques années. Les récentes avancées de la créa on d'une agence sud-africaine de partenariat au développement (SADPA) en 2013 poussent à s'interroger : face à l'enjeu mondial qu'est devenu le développement, les BRICS vont-ils s'inspirer de USAID, DFID, EuropeAid, etc. ou esquisser une stratégie commune ? Au sein des BRICS, l'aide ou le partenariat au développement est plus ou moins récent, ciblé, planifié selon plusieurs critères. De surcroît, l'occasion d'inves r dans les infrastructures du con nent africain présentée par le PIDA ne cons tue pas une remise en ques on des stratégies précédentes (bilatérales et dans d'autres secteurs par exemple), mais plutôt une entrée pour un sou en davantage partagé et intégré entre les acteurs du développement du con nent.

Retour sur les débuts des BRICS et du développement : aide ou partenariat ? Constat facile : les BRICS n'ont pas en commun leurs premières formes d'inves ssements dans le développement du con nent africain ! Si la Chine et la Russie ont joué du développement durant la Guerre Froide, le Brésil et l'Inde, ancien pays en développement, aujourd'hui puissances émergentes, sont des inves sseurs plus récents. Quant à l'Afrique du Sud, c'est seulement à par r de la fin de l'apartheid, et donc au début des années 1990, que le pays a pu commencer à inves r officiellement dans le développement du con nent. L'assistance chinoise dans les pays africains existe depuis le début des années 60 : plusieurs secteurs et pays ont bénéficié de ce e aide précoce avec, par exemple, l'envoi d'experts chinois et de financements en Egypte (Canal de Suez), en Guinée (produc on d'allume es et de cigare es), au Mali (canne à sucre et thé), en Tanzanie et Somalie (aide médicale). A par r des années 1990, la Chine a véritablement commencé à inves r sur le con nent, avec aujourd'hui plus de 900 projets de développement d'infrastructures . Les ressources financières chinoises pour l'aide étrangère sont essen ellement de trois sortes : des subven ons, des prêts sans intérêt, et des prêts concessionnels. Les deux

premiers proviennent des finances éta ques, tandis que les prêts concessionnels sont fournis par la Banque Import-Export de Chine. Plusieurs ministères chinois sont impliqués, ceux des Affaires Etrangères, des Sciences et technologie et du Commerce. La coopéra on privilégiée jusque-là par la Chine était davantage bilatérale mais l'ouverture d'un Forum sur la Coopéra on sino-sud-africaine (FOCAC) en 2000 a marqué un tournant dans l'importance croissante du dialogue entre la Chine et l'ensemble du con nent africain. Aujourd'hui premier partenaire commercial de l'Afrique, la Chine a annoncé en juin 2013 le lancement de deux nouveaux fonds d'inves ssements supplémentaires dans le cadre du China-Africa Business Council (CABC) et du Fonds de développement sino-africain (CADFund). Les deux fonds devraient chacun réunir près d'un milliard de dollars et leur objec f serait de s muler les inves ssements des entreprises chinoises (secteurs commercial et minier) en leur fournissant des capitaux. Enfin, la Chine envisage de franchir une étape supplémentaire en délocalisant également des entreprises sur le con nent africain . La Russie a connu plusieurs phases, dans lesquelles les rela ons sino-sovié ques et interna onales durant la Guerre Froide ont joué un rôle, avec l'avant et l'après 1989 et deux crises financières (1998 et 2008), entrecoupées de périodes d'essors récents. Jusqu'au début des années 1990, l'URSS a soutenu plusieurs par s poli ques en lu e, puis leurs régimes (en Ethiopie, au Soudan, en République Démocra que du Congo, au Zimbabwe, au Mozambique, en Angola, en Namibie, sans oublier l'ANC en Afrique du Sud), sans pour autant s'engager sur le plan économique, en-dehors de quelques importa ons (cacao, café, bauxite du Ghana, de Côte d'Ivoire et du Nigeria). Plus récemment, après une décennie 1990-2000 marquée par peu d'échanges (sauf excep on comme en Angola, Namibie et RDC dans le diamant et l'hydroélectricité au début des années 1990), la Russie a réinves sur le con nent : les importa ons russes se concentrent toujours dans certains pays (Algérie, Egypte, Maroc, Guinée, Côte d'Ivoire et Afrique du Sud principalement) et les exporta ons du con nent vers la Russie concernent essen ellement métaux (uranium, fer), fruits et oléagineux, et tabac. Le contexte énergé que mondial actuel pousse aussi

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la Russie vers le poten el africain en ma ère de gaz et de pétrole. Par exemple, plusieurs compagnies russes ont ainsi déjà misé depuis le début des années 2000 sur le con nent africain : Ÿ Lukoil au Ghana et en Côte d'Ivoire en 2010 (900 million de US $ dans la prospec on de pétrole sous-marin) ; Ÿ Gazprom en Algérie en 2006 (dans le cadre d'un contrat de développement et d'annula on de de e) suivi de la construc on du pipeline Nigéria-Algérie (en partenariat avec la compagnie na onale pétrolière nigériane) ; Ÿ Norilsk Nickel, compagnie métallurgique, possède des réserves en Afrique du Sud, au Gabon, en Guinée et au Nigéria ; Ÿ Rosatom est aussi en passe de construire les

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premières usines nucléaires égyp ennes et nigérianes . Suite au sommet du G8 qui s'est tenu à SaintPétersbourg en 2006, la Russie a proposé à travers une note conceptuelle plusieurs éléments pour améliorer son assistance au développement interna onal avec, par exemple, l'annula on des de es des pays africains pour un montant de 20 milliards de dollars[vii]. Une agence du gouvernement russe spécialisée dans la coopéra on, le Rossitrudnichestvo , a été mise en place en 2008 et est pourvue de missions à l'étranger, comme en Ethiopie. La lu e contre les maladies infec euses, contre la "pauvreté énergé que" et le renforcement de l'éduca on font par r des secteurs ciblés par l'aide russe qui opère sous un certain nombre de

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dossier BRICS

ministères, notamment le ministère des Finances, le ministère des Affaires étrangères, le ministère du Développement économique, le ministère de l'Éduca on et des Sciences, le Ministère de la Santé et enfin, EMERCOM. Bien que la créa on d'une agence de développement (de type RusA I D) ait été officiellement proposée depuis 2007, ce e dernière n'existe toujours pas. La coopéra on économique et technique indienne (ITEC) a été lancée en 1964 comme un programme d'aide faisant par e du Ministère indien des Rela ons Extérieures. Étant essen ellement de nature bilatérale, ITEC a mis l'accent sur le renforcement des capacités, le transfert de technologie et le partage d'expériences. Des années 50 au début des années 90, l'Inde a surtout été un bénéficiaire de l'aide interna onale. Le passage au statut de donneur est rela vement récent, et a été marqué fin 2012 par l'annonce de l'arrêt de l'aide au développement de la Grande-Bretagne à l'Inde. Plus récemment, l'Inde a créé une administra on du partenariat au développement (DPA). Le secteur de l'énergie arrive en tête des projets partenaires de développement conduit par le DPA, et les pays bénéficiaires de ce e dernière décennie ont été principalement le Bhoutan, le Soudan et l'Afghanistan. L'Ethiopie, le Mali et le Ghana font également par e des dix pays « les plus aidés » par l'Inde. L'aide indienne met l'accent sur la coopéra on sud-sud, et favorise aussi les accords bilatéraux. En 2008, un premier Sommet d'un Forum AfriqueInde a été mis en place à New-Delhi (IAFS I), suivi en 2011 d'un second Sommet qui s'est déroulé en Ethiopie sous le patronage de l'Union Africaine (IAFS II). Le PIDA a été évoqué dans le paragraphe du cadre de coopéra on consacré aux infrastructures, à l'énergie et à l'environnement . 19 ins tu ons devraient également être mise en place comme un Ins tut Indo-Africain du Commerce Extérieur (IAIFT) en Ouganda, Informa on et Technologie (IAIIT) au Ghana, spécialisé sur les diamants au Botswana et sur l e s q u e s o n s d ' Ed u ca o n , d e P l a n n i n g et d'Administra on (IAIEPA) au Burundi. L'Inde se posi onne aujourd'hui dans une perspec ve plus large de partenariat des Suds sur les ques ons environnementales, technologiques, etc. dans un cadre intéressé assumé, celui de ses intérêts commerciaux. L'histoire sud-africaine en fait un acteur récent sur la

scène de l'aide au développement. Ce e dernière a sans doute davantage privilégié la coopéra on trilatérale, voire mul latérale depuis le début des années 90. Tout comme l'Inde, l'Afrique du Sud est à la fois bénéficiaire et donneur : la Grande-Bretagne a également annoncé l'arrêt de son aide au développement dans le pays en 2015 et l'Union Européenne reconsidère actuellement son cadre de coopéra on avec l'Afrique du Sud, partenaire stratégique depuis 2007. Les statuts intermédiaires indiens et sud-africains favorisent-ils un cadre coopéra f davantage axé sur le partenariat plutôt que sur l'aide au développement ? Les déclara ons et projets le laissent à penser, dans la mesure où l'accent est mis sur les bénéfices mutuels. Ainsi, les inves ssements sud-africains dans le secteur énergé que, notamment régional, incluent des bénéfices sud-africains comme la garan e d'une source d'approvisionnement énergé que supplémentaire à des tarifs négociés par exemple. L'agence de coopéra on brésilienne (ABC) propose depuis 1987 une aide technique mais pas uniquement : l'assistance brésilienne fonc onne sur un modèle éclaté entre différents secteurs d'interven on technique comprenant également l'aide d'urgence comme à Haï . Le Brésil a ainsi mené plusieurs projets en Afghanistan (aide au recensement de la popula on et aide agricole en 2009), ainsi que dans les pays lusophones africains comme l'Angola, la Guinée Bissau, le Mozambique et dans le secteur de la santé en Afrique du Sud. Le volume de l'aide brésilienne, en avoisinant le milliard de dollars, posi onne aujourd'hui le pays à hauteur de la Chine (plus de 3 milliards) et de l'Inde (environ 2 milliards) en 2011. Tout comme celles de l'Inde et de l'Afrique du Sud, l'exper se et l'assistance brésiliennes sont appréciées car perçues comme adaptées au contexte poli que, économique et socio-environnemental des pays du con nent africain. Egalement à la fois bénéficiaire et donneur, l'éclatement ins tu onnel de la coopéra on brésilienne est néanmoins un frein à son expansion et à sa lisibilité. Ainsi, ABC n'est pas une agence d'aide à proprement parler et dépend du département du Ministère des Affaires Etrangères (connu sous le nom d'Itamaraty) . De plus, de nombreuses compagnies brésiliennes inves ssent sur le con nent, sans pour

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autant être recensées comme aide, assistance ou partenaire de développement. Enfin, le Brésil, tout comme l'Afrique du Sud, favorise aujourd'hui la coopéra on trilatérale, en u lisant sa posi on intermédiaire : par exemple, des projets d'aide au développement sont menés avec le Japon au Mozambique . Les BRICS ont ainsi progressivement mis en œuvre des formes de coopéra on bilatérale, mais aussi mul latérale, qui divergent des modèles d'aide au développement des lendemains de la seconde guerre mondiale. IBSA et BRICS cons tuent des formes de collabora on inter-gouvernementale innovantes dans la mesure où elles ouvrent des espaces de discussion sur les ques ons de gouvernance, de modèles de développement, etc. entre des pays confrontés à un certain nombre de défis communs. Ces formes de collabora on ont pavé le chemin des coopéra ons sud-sud, axées sur des projets d'échange dans le commerce, les inves ssements, l'humanitaire, etc. Néanmoins, la compé on reste de mise, comme le soulignent les débats sur la concurrence entre la Chine et l'Inde, les a ribu ons de marché contestées, ainsi que l'analyse des partenariats entre l'Inde et l'Afrique du Sud par exemple, les deux pays ayant à cœur leurs intérêts commerciaux concurrents sur le con nent africain

Le PIDA : une opportunité à la hauteur des BRICS ? Quelles sont les dynamiques insufflées par les BRICS en ma ère de développement des infrastructures sur le con nent africain ? Au-delà des projets, existe-t-il une réflexion made in BRICS sur le développement ? Les inves ssements des BRICS sur le con nent africain se sont surtout accrus au cours des dix dernières années, pour a eindre presque 350 milliards de dollars par an. Par exemple, les échanges entre la Chine et le con nent sont au moins 20 fois plus importants qu'au début des années 2000. Néanmoins, ces échanges demeurent ciblés : les infrastructures absorbent ainsi une par e importante des fonds. Que ce soit les routes, le rail, les ports, les lignes de transmission, les barrages, les centrales, etc. chacune de ces infrastructures par cipent au développement du con nent et les BRICS ne s'y trompent pas. Leurs financements, prêts, etc. in cluent généralement leu rs exp er ses et

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expériences dans chacun de ces domaines. Les grandes infrastructures hydrauliques n'ont ainsi pas échappé à ces inves ssements et le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud ne ratent aucune occasion : de Merowe au Soudan à Massingir au Mozambique, les exemples ne manquent pas ! L'infrastructure consomme en effet 60 % des 5 milliards de dollars de prêts et dons annuels de la Banque africaine de développement par exemple. Mais le déficit de financement des infrastructures en Afrique demeure massif. La BAD prévoit ainsi de lancer un programme de financement à des na on uniquement des infrastructures : un Fonds Africain pour les Infrastructures (AIF). Ce fonds combinerait les ressources souveraines et non souveraines, na onales comme interna onales, pour collecter les inves ssements adéquats au développement des infrastructures du con nent. Le financement de grands projets d'infrastructure à forte rentabilité en Afrique sur les excédents considérables des BRICS est ainsi fortement d'actualité. De nombreux documents ont déjà mis en avant l'importance des infrastructures dans le développement, comme le Plan d'ac on du G20 pour l'Infrastructure, le Consor um pour les infrastructures en Afrique (ICA), le Fonds fiduciaire Europe-Afrique pour les infrastructures. PIDA synthé se au sein d'un même programme toutes les ini a ves d'infrastructures con nentales existantes ou précédentes comme les plans et cadres du NEPAD et les Schémas directeurs des infrastructures de l'UA. Le Programme d'Ac ons Prioritaires (PAP) du PIDA met en avant une cinquantaine de projets urgents dans les secteurs de l'énergie, des transports, de l'eau et des Technologies de l'Informa on et de la C o m m u n i ca o n ( T I C ) . L e s p ro j et s o nt été sélec onnés d'après trois critères principaux : Ÿ leur admissibilité et intégra on régionale Ÿ leur faisabilité et état de prépara on Ÿ leurs impacts sur le développement. Des obliga ons d'infrastructures, des garan es de prêts, des taxes communautaires régionales font

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dossier BRICS

par e des moyens de financement envisagés par le PIDA. Parmi les projets du PIDA dans le secteur de l'énergie sont clairement privilégiés « les grands projets hydroélectriques et l'interconnexion des systèmes d'échange d'énergie » (CUA, 2012). Les grands barrages Millennium en Ethiopie , Grand Inga en RDC, ainsi que des ouvrages plus modestes comme Lom Pangar au Cameroun font par e des objec fs à moyen terme (2025) et long terme (2040) du PIDA. La Chine et le Brésil sont des inves sseurs i n c o n t o u r n a b l e s d a n s l e s i n f ra s t r u c t u r e s hydrauliques du con nent, avec la présence de la compagnie brésilienne Camargo Correia dans le consor um du barrage de Mphanda Nkuwa au Mozambique (40% de Hidroelectrica de Mphanda Nkuwa), dans le projet de barrage d'Inga III en République Démocra que du Congo, où Sinohydro, compagnie chinoise, pourrait jouer un rôle majeur. Les infrastructures rou ères ne sont pas en reste : par exemple, la compagnie brésilienne Vale a inves dans les routes et lignes de chemin de fer du Mozambique. L'Inde et l'Afrique du Sud sont davantage présents dans les nouvelles technologies de communica on et dans l'agrobusiness, comme en témoignent les ac vités des groupes indien Bhar Airtel au Tchad et sud-africain Vodacom en Afrique australe. Infrastructures et développement con nuent d'être présentés comme un couple nécessaire mais pas suffisant : quels rôles les BRICS ont-ils joué et sont-ils appelés à jouer ? Plusieurs approches cohabitent pour lier infrastructures et développement. Depuis 2011, les infrastructures ont fait l'objet de nouvelles s t r a t é g i e s . Tr è s f o r t e m e n t a s s o c i é e s a u développement, les banques d'aide à ce dernier ont fort à propos mis en commun une approche intégrée reposant sur un partenariat public-privé pour favoriser la solvabilité de ces projets régionaux. Les solu ons décentralisées se mul plient également, notamment les micro-projets, basées sur de pe tes infrastructures, notamment dans les zones rurales ou les pays où un réseau d'électrifica on centrale tarde à être développé.

« Complexe et mul latéral » D'autres éléments témoignent de l'importance

croissante des inves ssements dans les infrastructures sur le con nent africain. Par exemple, l ' A g e n c e d e ga ra n e d e s i nv e s s s e m e n t s mul latéraux (MIGA), un groupe de la Banque Mondiale, concentre la moi é de son ac vité d'assurance entre les divers projets du con nent africain. Les « assurés » de MIGA me ent en œuvre des projets de développement des infrastructures qui correspondent au cahier des charges de la Banque Mondiale : complexe et mul latéral. Complexe, car incluant des objec fs divers, par exemple à la fois la produc on d'hydro-électricité et l'irriga on pour un barrage, ainsi que la reconstruc on post-conflit, etc. La dimension mul latérale requiert l'inclusion d'acteurs de différents pays, et favorise également la coopéra on sud-sud, associant fortement les BRICS, notamment l'Afrique du Sud. En ce qui concerne les infrastructures de produc on d'énergie, MIGA a récemment assuré contre le risque financier souverain de ne pas honorer ses obliga ons les inves ssements de la banque anglaise HSBC en Angola dans le cadre d'un projet de réhabilita on et de développement de la sta on de produc on hydroélectrique de Cambambe sur la rivière Kwanza (d'une capacité à hauteur de 700 M W). Le gouvernement angolais prévoit à terme une augmenta on de sa produc on na onale de 1500 à 5000 MW. Ce projet illustre d'autant plus la présence croissante des BRICS dans le développement des infrastructures en Afrique qu'il inclut l'entreprise de construc on brésilienne Odebrecht comme principal constructeur, ainsi que les allemands Hydro GmBH et KG (groupe Voith) et les espagnols Elecnor pour les équipements mécaniques et électriques. Ce type de projet complexe, c'est-à-dire avec plusieurs objec fs ici, le développement de la produc on hydroélectrique en Angola et l'accéléra on de la reconstruc on post-conflit - et mul latéral, incluant plusieurs entreprises et acteurs interna onaux, est de plus en plus mis en avant par les ins tu ons interna onales comme la Banque Mondiale. Outre les entreprises de construc on, les inves ssements des B R I C S sont également financiers. Ainsi, deux banques chinoise et sudafricaine, respec vement la Banque Commerciale et Industrielle de Chine et CfC Stanbic ont inves en 2012 dans un projet kenyan de produc on d'énergie. La souscrip on d'assurance auprès de MIGA garan t une rupture de contrat. Le projet est bap sé Triumph

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et consiste en la construc on d'une sta on de produc on thermique fonc onnant au pétrole (83MW). L'usine sera située à Kitengela, près de la rivière Athi, à environ 25 kilomètres de Nairobi. Triumph s'engage également à conclure un contrat d'achat d'électricité de 20 ans avec la Kenya Power and Ligh ng Company (KPLC). Les objec fs de ce projet sont d'augmenter la produc on énergé que du Kenya et, d'après MIGA, de diversifier ce e dernière qui s'appuie sur l'hydroélectricité, menacée par les sécheresses…ainsi que de faciliter la coopéra on sud-sud. Enfin, KPLC s'est engagé à faciliter l'émergence de trois IPP, des producteurs d'énergie indépendants (Gulf Power, Thika Power et Triumph Power) dans le cadre d'un programme plus large d'introduc on de ces IPP mené par la Banque Mondiale au Kenya. L'Afrique du Sud a déjà bien entamé ce processus d'inves ssements dans les infrastructures, notamment dans son propre secteur énergé que, ainsi qu'à l'échelle régionale. D'autres projets aujourd'hui achevés peuvent ainsi être cités, comme le premier projet de MIGA au Swaziland : MIGA a émis des garan es contre les risques financiers, de guerre et trouble civil de 69,4 millions de dollars à la compagnie d'électricité de la République d'Afrique du Sud (Eskom) pour couvrir ses propres garan es de prêt à la Banque européenne d'inves ssement (BEI) e t à l a B a n q u e j a p o n a i s e d e c o o p é ra o n interna onale pour leurs inves ssements dans Motraco-Mozambique Transmission Company SARL (Motraco) qui comprenait la construc on et inclut aujourd'hui l'exploita on de lignes de transport d'électricité reliant l'Afrique du Sud, le Swaziland et le Mozambique, associant les fournisseurs publics d'électricité de ces trois pays, Eskom pour l'Afrique du Sud, Electricidade de Moçambique (EdM) et le Swaziland Electricity Board (SEB). Un dernier exemple déjà men onné, cité comme cas d'école de partenariat trilatéral voir mul latéral autour des grandes infrastructures hydrauliques, est celui de Grand Inga en République Démocra que du Congo, dont les travaux (qui commenceront par Inga I I I ) devraient débuter en 2015. En sus de l'inves ssement poten el de plusieurs compagnies, l'accord des ministères de l'énergie sud-africain et congolais sur les échanges énergé ques entre les deux Etats, ainsi que le renforcement du rôle de la France (projet Grand Inga soumis et discuté à Paris) en

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font effec vement un modèle de complexité et de mul latéralité.

Conclusion : Les BRICS ont bien de nombreuses cartes à jouer au poker du développement Une place prépondérante est maintenant accordée aux BRICS dans de nombreux domaines sur l'agenda mondial. Ce 5ème sommet des BRICS a contribué à entériner l'associa on de l'Afrique du Sud en décembre 2010 - et à souligner l'enthousiasme sudafricain, lié en par e aux possibilités de renforcement des intérêts du pays - ainsi que la place croissante accordée au con nent africain dans le calendrier des puissances émergentes. Pourtant, d'autres configura ons existent, comme les IBSA, une associa on diploma que composée par l'Inde, le Brésil et l'Afrique du Sud depuis 2003, déjà dotée d'une banque d'aide au développement et à la démocra e. Ce e coali on des grandes démocra es émergentes du Sud repose sur des valeurs communes et ar cule ses réflexions autour des ques ons interna onales, de la réforme du FMI et de la Banque mondiale, en passant par les changements clima ques à travers des groupes de travail. Le fonds de développement IBSA, capitalisé par les trois pays, sou ent aujourd'hui plus d'une dizaine de projets sur l e s t ro i s co n n e nt s . L a f u t u re b a n q u e d e développement BRICS, censée différer de celle des IBSA en termes de portée administra ve et d'échelle, est mo vée par une volonté similaire de mobiliser les ressources des pays émergents, qui a déjà donné lieu au fonds de développement I B S A . Le rôle d'incubateur des IBSA d'une part sur la coopéra on des pays émergents et d'autre part dans l'u lisa on de ce rôle aux bénéfices de leurs citoyens n'a ainsi pas été négligeable . La rela on entre démocra e et développement devrait précisément se situer au cœur des réflexions en amont des projets d'infrastructures. Dans un monde qui oscille entre (mul )polarités et où les ques ons de gouvernance l'emportent souvent sur la durabilité, est-il encore possible de réfléchir avant d'inves r, afin d’établir au lieu de se contenter de construire?

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dossier BRICS

CUA (2012), Programme pour le Développement des Infrastructures en Afrique (PIDA), Interconnecter, Intégrer et Transformer un con nent, CUA, NEPAD, BAfD, CEA, extrait de l'avant-propos. China's Foreign Aid and Aid to Africa: overview, Li Xiaoyun, College of Humani es and Development, China Agricultural University, Beijing, 2008. h p://www.oecd.org/dataoecd/27/7/40378067.pdf D'après le China Daily : h p://www.chinadaily.com.cn/cndy/2013-06/13/content_16612923.htm AfDB (2011), Russia's economic engagement with Africa, Africa Economic Brief, vol.2, n°7 D'après le site de Rosatom : h p://www.rosatom.ru/en/presscentre/nuclear_industry/18a661004f5e053689e2fd7ea2a04c6d h p://www.rosatom.ru/en/presscentre/Announcements/b08c7c004b7dd59cb851ff487a5dcd55 Concept on Russia's Par cipa on in Interna onal Development Assistance (2007), disponible en ligne : h p://www.minfin.ru/common/img/uploaded/library/2007/06/concept_eng.pdf L'annula on concerne notamment les de es contractées auprès de l'ancienne Union sovié que dans le cadre de l'Ini a ve des pays pauvres très ende és, ainsi que celles en cours de négocia ons avec le Bénin, la Guinée, la Zambie, Madagascar, le Mozambique, la Tanzanie et l'Éthiopie. Federal Agency for the Commonwealth of Independent States, Compatriots Living Abroad and Interna onal Humanitarian Coopera on D'après les documents du second forum : h p://www.indiaafricasummit.nic.in/sta cfile/framework-fr.pdf Cabral, L. et J. Weinstock (2010), « Brazil, an emerging aid player? », Briefing Paper, n°64, Overseas Development Ins tute, Londres Lors d'une conférence en Afrique du Sud quelques jours avant la tenue du TICAD V (la 5ème Conférence Interna onal de Tokyo sur le Développement en Afrique en juin 2013) la coopéra on trilatérale, impliquant le Japon, le Brésil et le Mozambique dans les secteurs agricole et de la santé, a été évoquée comme un succès. Sidiropoulos, E. (2011), « India and South Africa as Partners for Development in Africa? », Briefing Paper, Asia Programme and Africa Programme, Chatham House, The Royal ins tute of Interna onal Affairs, ASP/AFP BP 2011/01 Ce barrage d'une future capacité totale de 5250 MW est un véritable brûlot entre l'Egypte et l'Ethiopie dans le cadre du récent accord d'Entebbe sur le partage du bassin du Nil. D'après Chris Alden (2013) pour Jeune Afrique Economie : h p://economie.jeuneafrique.com/tribune/408-tribune-interna onal/16230-les-ibsa-dans-un-monde-de-brics.html

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actualités Affectation à l'Institut français d'Afrique du Sud de Guillaume Porraz, Chargé de Recherches, CNRS

L'Ifas se félicite de l'affecta on de Guillaume Porraz, chargé de Recherche (CR2) à l'Ins tut français d'Afrique du Sud. En accord avec son UMR actuelle (UMR 7041, ArScAn-AnTET), sa demande de mobilité s'inscrit dans la volonté de mener à bien un projet archéologique ambi eux et porteur d'un rapprochement scien fique prome eur entre la France et l'Afrique du Sud. Le patrimoine archéologique de l'Afrique du Sud est devenu l'objet de toutes les a en ons ces dernières années, notamment pour sa voca on à répondre aux ques ons d'évolu on des sociétés humaines sur de très longues périodes. Les ins tu ons universitaires sud-africaines, en par culier à la suite à la transi on démocra que du début des années 90, ont parfaitement réussi à trouver leur place au sein de ces chan ers scien fiques d'envergure qui a rent des chercheurs du monde en er. Le projet scien fique de Guillaume Porraz s'inscrit au cœur de ces ques ons par l'étude des transforma ons techniques et culturelles à l'œuvre entre 200 000 et 50 000 (middle stone age). Ce projet s'est construit depuis 2006 dans une rela on privilégiée avec les plus importants archéologues sud-africains présents dans les U n i v e r s i t é s d e C a p e To w n ( d é p a r t e m e n t d'archéologie) et du Witwatersrand (Ins tute for Human Evolu on). Il s'appuie sur des fouilles menées dans la région du Western Cape et souhaite les me re au regard de celles à l'est de l'Afrique du Sud (Kwazulu Natal et le Mpumalanga). Dans un tel cadre, son affecta on à Johannesburg présente de véritables atouts pour l'Ins tut français d'Afrique du Sud. Elle donnera une autre dimension à l'une des compétences scien fiques de notre Ins tut, compétence récente et ini ée avec les mises à disposi ons successives de Messieurs FrançoisXavier Fauvelle (2003-2006) et Jean-Loïc Le Quellec (2006-2009). La qualité de ses recherches et de ses publica ons lui assurent une reconnaissance déjà acquise auprès de nos partenaires et ne pourra que renforcer nos liens avec les Universités du

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Witwatersrand et du Cap qui sont nos principaux interlocuteurs scien fiques. Mieux que quiconque, il pourra par ciper à l'encadrement de jeunes chercheurs en archéologie que ce soit ceux, nombreux, que nous accueillons à l'Ifas, ou ceux des universités sud-africaines. Lors des nombreux événements scien fiques d'envergure d'ores et déjà programmés pour les années à venir, il perme ra la présence du monde universitaire français. Enfin, le projet scien fique de Guillaume Porraz porte une dimension régionale à laquelle nous sommes très sensibles. Par le travail de prospec on qu'il entend mener en Afrique australe dans les années à venir, il ouvrira non seulement de nouveaux chan ers archéologiques mais aussi de nouveaux partenariats ins tu onnels.

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actualités

Boursiers longue durée à l’IFAS : projets de recherche Daria Tren ni SOAS / IFAS Remembering, forge ng the civil war: state memorialisa on, witchcra northern Mozambique Mon projet postdoctoral de six mois à l'IFAS va interroger la manière dont on se souvient, ou on oublie, la violence poli que de la guerre civile dans le nord du Mozambique. Comment sont transmis les souvenirs de la guerre civile ? Quel usage fait-on de ces images du passé ? Voici quelques-unes des ques ons auxquelles mes recherches tenteront de répondre. Au Mozambique, les souvenirs de la guerre civile sont aujourd'hui condamnés à un oubli total à la fois dans le discours public et dans l e s m é m o i re s d i s c u r s i v e s quo diennes. L'imposi on de l'oubli, organisée par le par au pouvoir, le FRELIMO, se réalise dans un contexte de transi on importante pour le Mozambique qui était l'un des pays les plus pauvres du monde et qui est aujourd'hui l'une des économies les plus dynamiques en Afrique. Ce e croissance économique, alimentée par les récentes découvertes de ressources minérales, a renforcé la détermina on du par au pouvoir à promouvoir la centralisa on poli que, la stabilité sociale et la cohésion na onale. Dans le cadre de ce processus, le FRELIMO a été rela vement efficace dans le contrôle de l'histoire récente du pays et, en par culier, pour taire le débat sur la guerre civile. Cependant, ce e planifica on éta que de l'oubli n'est pas en accord avec la mémoire locale. En m'appuyant sur la li érature de l'anthropologie de la mémoire, qui a largement pris en compte les différences et les tensions entre le mémorialisme d'Etat et les souvenirs populaires, je vais tenter d'explorer la façon dont les espaces alterna fs de mémoire contestent ce e stratégie planificatrice de l'oubli.

and the poli cal imagina on in

Ce projet vise à développer l'un des principaux résultats de ma thèse de doctorat sur le rôle et l'importance de la guérison spirituelle dans la ville de Nampula, au nord du Mozambique, où a émergé un espace alterna f de mémoire. Oubliée comme « Histoire » et absente dans les pra ques de la mémoire discursive, la guerre civile est réapparue dans l'in mité des maisons des guérisseurs spirituels, au cours de divina ons et de séances de guérison. Les souvenirs de la guerre civile font violemment irrup on dans la façon dont les guérisseurs et leurs pa ents imaginent une guerre de sorcellerie s'emparant de leur vie dans les quar ers. En plus d'une contribu on à l'étude de la mémoire et de la violence dans le domaine de l'anthropologie, ce projet vise à proposer une meilleure compréhension du contexte socio-poli que actuel au Mozambique. Faisant suite aux débats au sein de l'anthropologie de la mémoire dans le contexte postcolonial, je cherche enfin à faire la lumière sur la façon dont le passé ou sa néga on aide à résoudre le présent. Dans ce cas, je vais me concentrer sur la façon dont les souvenirs de la guerre civile peuvent devenir un puissant instrument de cri que envers l'Etat et ses promesses non tenues. La sorcellerie et la guérison comme lieux de mémoire, d'une part, et le silence de l'Etat, d'autre part, cons tuent les deux faces d'une même médaille. Tous deux parlent d'un présent caractérisé par la montée des inégalités sociales, économiques, les conflits et les tensions poten elles. En outre, les images du passé et les lu es à travers l'histoire con nuent à être véhiculées dans la région pour établir la puissance ou le manque de puissance. Au cours des six mois de bourse postdoctorale, je vais par ciper à la vie de l'Ins tut. Je vais également procéder à une étude de terrain dans les quar ers de la ville de Nampula, la troisième plus grande ville du Mozambique, où la majorité de la popula on a fui durant les années de guerre civile. En plus de l'u lisa on de mes données antérieures, je procéderai à des entre ens avec les guérisseurs et ferai de l'observa on par cipante avec un certain nombre de guérisseurs au cours de leur divina on et séances de guérison.

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Marina Redondo, Laboratoire TRACES – UMR 5608 Université de Toulouse II - Le Mirail / IFAS L'émergence des technologies lamellaires dans la préhistoire sud-africaine : le statut du Robberg et ses industries lithiques. La fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle voient s'affranchir les archéologues sud-africains des cadres chronoculturels européens, créant à leur t o u r, l e u r p r o p r e chronologie de la préhistoire établie sur des critères technologiques. Influencés par l'Abbé Breuil, ses voyages en Afrique australe et ses travaux, ainsi que par les bases méthodologiques des chronologies préhistoriques européennes, certains archéologues sud-africains, notamment Goodwin et Van Riet Lowe, me ent en place l'actuelle chronologie tripar te de la préhistoire sur le con nent : le Early Stone Age (ESA), le Middle Stone Age (MSA) et le Late Stone Age (LSA) (Goodwin 1925). Caractérisé par l'émergence des technologies lamellaires dans ce e par e du monde, le début du Late Stone Age marque un tournant vis-à-vis des périodes précédentes. Toutefois, il existe très peu de données rela ves à cet important changement technologique dans la mesure où les recherches actuelles sont focalisées depuis une décennie sur l'émergence de la modernité comportementale et culturelle apparentée au Middle Stone Age (Mc Brearty & Brooks, 2001). De fait, le faible inves ssement en termes de recherches quant à ce e période engendre un manque de données conséquent ne nous perme ant pas d'appréhender les raisons de l'émergence de ces technologies lamellaires dans la préhistoire sud-africaine et leurs implica ons concernant d'autres changements contemporains importants (Redondo 2012). Dans l'op que d'appréhender ce phénomène, notre approche a pour objec f de mener une étude approfondie sur le technocomplexe Robberg caractérisé par des industries lithiques de type lamellaire.

Interprété comme le premier technocomplexe du Late Stone Age avant la découverte des premières expressions d'un Early Late Stone Age (ELSA), le Robberg est, aujourd'hui, le premier technocomplexe du Late Stone Age à être caractérisé et défini par des industries lithiques de type lamellaire. Celles-ci sont marquées par la présence de nucléus à lamelles, de lamelles standardisées u lisées brutes et de quelques ou ls tels que des gra oirs, racloirs, pièces à dos. Ce e période semble donc marquer l'émergence des technologies lamellaires au cœur de la préhistoire sud-africaine, phénomène incontournable dans d'autres contextes, à l'instar du Paléolithique supérieur en Europe ou au Moyen-Orient, réclamant aussi une a en on par culière dans ce e par e du globe. Afin d'appréhender ces changements technologiques, notre étude se base sur une réévalua on de séries archéologiques du Robberg. Avec l'autorisa on du Professeur Lyn Wadley (GAES, University of the Witwatersrand), nous avons pu commencer à réétudier les niveaux Robberg du site clé de Rose Co age Cave (Free State, Afrique du Sud). Les premières innova ons technologiques, telles qu'elles sont décrites par les époux Deacon (1999), semblent apparaître en Afrique subsaharienne au cours du Middle Stone Age. Elles sont toutes considérées comme des phénomènes importants caractéris ques de la modernité culturelle et comportementale a estant de l'an cipa on des besoins des groupes humains préhistoriques. Ces changements technologiques ont permis le développement de l'armement grâce à la produc on de pe ts supports aux dimensions standardisées u lisés comme projec les. Récemment, la découverte de microlithes portant des résidus de mas c et de colle sur le site de Border Cave semble poten ellement indiquer l'u lisa on de l'arc et de flèches en Afrique australe dès le Early Late Stone Age (ELSA), compte tenu des dates associées à ce e découverte (Villa et al. 2012). Que dire à propos du Robberg ? Contrairement à la

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actualités

défini on du technocomplexe, plus de 250 lamelles sont retouchées dans un des niveaux Robberg de Rose Co age Cave. Nous nous interrogeons donc sur les critères propres de la défini on du technocomplexe. De plus, ce e découverte remet en

cause le statut du Robberg au sein de la Préhistoire sud-africaine, ainsi que la significa on des lamelles retouchées dans l'armement et leurs implica ons en termes de changements technologiques et d'innova ons techniques.

Charlo e Grabli Forma on doctorale - « Histoire et civilisa ons » - EHESS L'unité des cultures urbaines dans l'Afrique colonisée. Histoire des pra ques musicales et fes ves à brazzaville, léopoldville et johannesburg des années 1930 à 1960 La majorité des études traitant du panafricanisme portent sur les cadres légi mes du« poli que », sur les ins tu ons et les discours ayant cherché à promouvoir ce e idéologie. Leurs recherches se bornent souvent au cadre étroit des par s et des ac ons menées par les figures poli ques et intellectuelles tout en postulant une rela on immédiate existant entre les aspira ons populaires et celles des élites africaines. L'ensemble de ces travaux passent sous silence l'existence d'un panafricanisme logé au cœur des cultures poli ques populaires dont les développements témoignent pourtant de la complexité des modes de percevoir, de penser et de construire l'unité africaine. A l'opposé de ce vide historiographique, nombre d'analyses constatent l'importance et la diversité des détours empruntés par le langage informel au sein de la sphère publique ; l'anthropologue Denis-Constant Mar n invite ainsi à chercher le « poli que » sous le foisonnement des expressions culturelles, « là où les Africains ont appris à exprimer leurs réac ons ». Dans ce e perspec ve, nous envisagerons les musiques, les danses et les fêtes animant les villes noires de l'Afrique colonisée comme les vecteurs populaires privilégiés du panafricanisme. Aussi, nous nous proposons de mener ce e étude des cultures urbaines des années 1930 à 1960, à l'aune d'un quo dien suscep ble d'éclairer des dimensions sociales, des aspects culturels et des manifesta ons poli ques encore ignorés. Afin d'interroger l'unité de ces cultures urbaines, il est en conséquence possible de réaliser une analyse transversale, et, ce, sur différentes échelles : la plus restreinte, celle des quar ers noirs de Brazzaville et

de Léopoldville ainsi que celle de Sophiatown, principal centre de l'ac vité culturelle et poli que des Noirs sud-africains ; et, plus précisément, celle des bars, ces « ailleurs sociaux » où s'épanouissent les fes vités. Des années 1930 aux années 1960, les deux régions étudiées ont vu naître les genres musicaux qui ont rayonnés avec le plus d'intensité sur le con nent. Schéma quement : la rumba congolaise dominait la scène musicale de l'ensemble de l'Afrique centrale et d'une par e de l'Afrique de l'Est alors que les variantes du jazz sud-africain (marabi et kwela en par culier) cons tuaient quant à eux les genres les plus populaires de l'Afrique australe. De plus, l'âge d'or de ces cultures musicales correspond à une époque de radicalisa on des mouvements d'émancipa on africains. Analyser la créa vité ar s que des classe populaires est, dans ce contexte, un excellent moyen d'accéder à l'expérience et aux prises de posi on des colonisés qui ne lisent ni n'écrivent sur l'agita on quo dienne de leur ville. Dans les deux Congo, les années 1930 correspondent en effet à une étape décisive de la « marche vers l'indépendance » avec, notamment, le développement du syndicalisme. En Afrique du Sud, la résistance croissante des Blancs à l'urbanisa on noire contraint la société des townships à un quo dien extrêmement pénible ; à ce e époque et ce jusqu'à sa destruc on à la fin des années 1950, la communauté de Sophiatown cons tue le symbole de la lu e pour l'émancipa on culturelle et poli que des Noirs sud-africains. Notre étude s'achève sur les grands événements de 1960 ayant bouleversé les sociétés congolaises et marqué un tournant dans l'histoire des lu es contre le racisme en Afrique du Sud (Indépendances du Congo belge et du MoyenCongo, massacre de Sharpeville)

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conférences & séminaires The Arts and Crafts of Literacy – Manuscript Cultures in Muslim Sub-Saharan Africa 5-6 Septembre 2013 - Université du Cap Une conférence interna onale organisée par: Dr Dmitry BONDAREV (Centre for the Study of Manuscript Cultures, University of Hamburg) Ÿ Dr Andrea BRIGAGLIA (CCI; Department of Religious Studies, UCT) Ÿ Prof Shamil JEPPIE (Tombouctou Manuscripts Project – HUMA, UCT) Ÿ Dr Mauro NOBILI (Post-doctoral Fellow, UCT) Ÿ

L'Afrique a souffert, et souffre encore, de nombreux stéréotypes académiques. Pendant longtemps, le con nent a été dépossédé de son passé par le postulat selon lequel il n'y avait pas d'histoire en Afrique avant l'arrivée des Européens (Hugh R. Tr e v o r - R o p e r 1 9 6 3 ) . A v e c l a l u e p o u r l'indépendance dans les années 1950 et 1960, les historiens - locaux et étrangers - ont entrepris de rendre à l'Afrique son passé. Cependant, ils l'ont fait en développant une approche qui reposait presque exclusivement sur l'oralité (Vansina 1964). Au cours

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des deux dernières décennies, la (re-) découverte de milliers de manuscrits dans les différentes régions du con nent a contraint les chercheurs à abandonner l'équa on Afrique = oralité et à légi mement a ribuer au con nent l'état d'une civilisa on de l'alphabé sa on écrite. Ce nouvel intérêt est confirmé par des publica ons récentes telles que le travail encyclopédique The Arabic Literature of Africa (John O. Hunwick et al., 1995). Ce e conférence vise à recueillir des contribu ons sur les différentes dimensions du manuscrit, à savoir les matériaux, les technologies, les pra ques et les communautés impliquées dans la produc on, la commercialisa on, la circula on, la préserva on et la consomma on. En faisant cela, la conférence s'inscrit à la suite du projet Tombouctou, qui a déjà construit un réseau étendu de collabora ons sur le con nent et au-delà, ce qui a conduit à des publica ons per nentes comme The meanings of Timbuktu (Shamil Jeppie & Bachir Diagne 2008). L'objet de la conférence sera les manuscrits islamiques produits en Afrique sub-saharienne, soit en arabe ou dans les langues locales écrits en alphabet arabe (Ajami). Avec le terme « islamique », la conférence se réfère aux manuscrits « qui [étaient] le produit d'une tradi on intellectuelle de l'enseignement islamique... Une telle documenta on, il est vrai, n'a pas toujours été liée à des ques ons religieuses. Mais dans la mesure où il a été généralement encadrée par la langue, la perspec ve et le calendrier de l'Islam, ce e connaissance peut être qualifié de nature « islamique » (Lydon 2004) ».

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conférences et séminaires

Conférence sur les élections générales en Afrique du Sud 22 Novembre 2013 - IFRI, Paris L'Ins tut français d'Afrique du Sud en partenariat avec le South African Ins tute of Interna onal Affairs ( S A I I A ) et l ' I n s t u t f ra n ça i s d e s re l a o n s interna onales (Ifri) organise le 22 novembre à Paris une conférence sur les élec ons générales de 2014 en Afrique du Sud. Cet événement entre dans le cadre des saisons croisées France-Afrique du Sud 2012 et 2013. L'année 2014 marquera un tournant pour l'Afrique du Sud, avec l'organisa on des 6èmes élec ons générales depuis la fin de l'apartheid. Après deux décennies de liberté et de démocra e, ce e conférence donnera au public français un aperçu de la situa on économique et poli que de l'Afrique du Sud.

L'objec f de ce e conférence est de rassembler des responsables et des chercheurs des grandes universités et think tanks français et sud-africains afin de proposer un panorama de l'état de l'Afrique du Sud quelques mois avant les élec ons générales. Ce e conférence est également envisagée comme le point de départ d'un partenariat entre SAIIA et l'Ifri qui pourrait déboucher sur de prome eurs projets communs.

Symposium de clôture du programme XenafPol Decembre 2013 - King’s College, Cambridge Le programme de recherche interna onal XenAfPol, qui met l'accent sur les poli ques d'exclusion xénophobe en Afrique s'appuie sur une équipe interdisciplinaire de quatorze chercheurs originaires de France, du Royaume-Uni, du Nigeria, du Kenya, d'Afrique du Sud et de RDC. Il est entré dans sa phase finale et un symposium sera organisé au King's College de Cambridge en décembre 2013. L'objec f est de soume re deux projets de numéros spéciaux à des revues scien fiques, l'un sur les pra ques quo diennes de l'exclusion xénophobe, l'autre sur la fabrique des mobilisa ons xénophobes violentes. L'étude de plusieurs pays africains permet d'observer ces dynamiques car ils combinent, d'une part, une variété de mobilisa on xénophobe et des histoires de contre-mobilisa on et, d'autre part, un ensemble de caractéris ques communes : clivages ethniques hérités du contexte colonial dans diverses sociétés, inégalités de plus en plus aigües, urbanisa on rapide et chômage. S'appuyant sur des recherches

empiriques approfondies menées au cours des trois dernières années dans quatre pays (République démocra que du Congo, le Kenya, le Nigeria et l'Afrique du Sud), l'objec f sera d'offrir une analyse renouvelée des no ons de xénophobie, d'autochtonie et d'appartenance à l'Afrique. Les débats porteront sur la fabrica on quo dienne de différences et de points communs (tels que les techniques u lisées, les répertoires mobilisés et les antécédents historiques). Ils proposeront des réflexions sur la sociologie des autorités qui prétendent avoir une légi mité sur la produc on de la différence au sein d'un espace spécifique, leurs groupes ou individus cibles, et sur les « exclus » afin de savoir s'ils se définissent comme tels et comment ils peuvent accepter, refuser ou se dépar r de la « différence » qui leur est a ribuée. AFRICAN CENTRE for

AC MIGRATION & SOCIETY

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of colonial encounters, with specific reference to Wesleyan and Lutheran publishing on the Transvaal in the 1890s

Book History Seminars Ÿ

Global History Workshop Ÿ

Jeudi 17 octobre, Ins tut Français de Recherche en Afrique, Nairobi, Kenya Carla Bocche & Adrien Delmas Africa and Global History: New Perspec ves

Ÿ

Samedi 31 août, Market Theatre, Johannesburg, dans le cadre du M&G Literary Fes val Archie Dick (UP) & Isabel Hofmeyr (Wits)

Ÿ

5-7 septembre, Université du Cap The Arts and Cra s of Literacy: Manuscript Cultures in Sub-Saharan Africa Conférence Interna onale

Ÿ

Vendredi 20 septembre, Université du Cap, 14.00 Ananya Kabir (King's College London) & Adrien Delmas (IFAS) Philological encounters in the early modern world

Mardi 6 août, History department seminar room (UJ), 15.00 Edward Cavanagh Empire's Companies in Southern Africa: How the Verenigde Oost-Indische Compagnie got its Land

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Mercredi 28 août, Ins tut Français d’Afrique du Sud, 14.00 Charlo e Grabli L'unité des cultures urbaines dans l'Afrique colonisée. Histoire des pra ques musicales et fes ves à Brazzaville, Léopoldville et Johannesburg des années 1930 à 1960

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Mercredi 11 septembre, Ins tut Français d’Afrique du Sud, 14.00 Gabrielle Angey Un réseau turc en Afrique, le mouvement Gülen

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Novembre, Ins tut Français d’Afrique du Sud, Silvia Kamanova Theology of the Afrikaner Reformed Churches, South African Theology and the Phenomenon of the South African Black Theology

Ÿ

Décembre, Ins tut Français d’Afrique du Sud, Daria Tren ni Remembering, forge ng the civil war: state memorialisa on, witchcra and the poli cal imagina on in northern Mozambique

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Mercredi 14 août, Ins tut Français d’Afrique du Sud, 14.00 Mauro Nobili (UCT) Re-discovering the de Gironcourt collec on of West African Arabic manuscripts

Ÿ

Mercredi 2 octobre, Université de Pretoria, 14.00 Beth Leroux (UP) The Cronje Report on Undesirable Literature and its views on crime fic on

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Mercredi 9 octobre, Université de Pretoria, 14.00 Lize Kriel (UP) A cultural produc on of fields? Missionary periodicals and their conflic ng construc ons

FISH - French Ins

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tute Seminars in Humani es


publications Adrien Delmas : Les Voyages de l'écrit. Culture écrite et expansion européenne à l'époque moderne : essais sur la Compagnie Hollandaise des Indes Orientales Plus à son aise, jusqu'à présent, dans le cadre na onal que dans le roulis marin de l'histoire globale, l'histoire du livre a négligé l'un des acteurs fondamentaux de la généralisa on, à l'époque moderne, du recours à l'écrit. Les organisa ons commerciales et coloniales par lesquelles s'opéra le désenclavement planétaire à par r du XVIe siècle, que ce soient l'Estado da Índia portugais, la Carrera de Indias espagnole ou les Compagnies anglaise, hollandaise ou française des Indes, ont pourtant joué un rôle majeur dans la circula on de l'écrit à l'échelle du monde. Faut-il faire du pont des navires et de la cabine du capitaine l'un des lieux, à l'instar de l'État, l'Église et l'Université, où se sont établies nos rela ons modernes à la culture écrite ? Pour me re au jour ce e histoire commune entre l'histoire de la culture écrite et celle de l'expansion européenne, ce livre propose une série d'explora ons autour des pra ques scripturaires de la Verenigde Oos ndische Compagnie (VOC), la Compagnie Hollandaise des Indes Orientales fondée en 1602. Adrien Delmas, Les Voyages de l'écrit. Culture écrite et expansion européenne à l'époque moderne essais sur la Compagnie Hollandaise des Indes Orientales, Honoré Champion, No 8, 2013, 288 p.

Denis-Constant Mar n : Sounding the Cape. Music, Iden ty and Poli cs in South Africa Pendant plusieurs siècles, Le Cap a accueilli une grande variété de genres musicaux qui ont généralement été associés à des groupes de popula ons spécifiques vivant dans et autour de la ville. Les styles musicaux et les genres produits dans la ville du Cap ont donc été a ribués à une « iden té » d'abord et avant tout sociale. Cet ouvrage tente de reme re en ques on la rela on établie entre styles, genres musicaux et iden tés sociales (et pseudo-raciales dans ce cas-ci). Dans Sounding the Cape, Denis-Constant Mar n réécrit et examine à travers le prisme théorique de la créolisa on, l'histoire de la musique au Cap, en déployant des ou ls d'analyse empruntés aux études les plus récentes sur les configura ons iden taires. Il démontre que la créa on musicale dans la ville mère, et en Afrique du Sud, a toujours été nourrie par des contacts, des échanges et des innova ons quels que soient les efforts déployés par les pouvoirs racistes pour séparer et diviser les gens en fonc on de leur origine. Denis-Constant Mar n, Sounding the Cape, Music, Iden ty and Poli cs in South Africa , Stellenbosch, African Minds, 2013, 472 p.

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IFAS - Recherche 62 Juta Street, Braamfontein PO Box 542, Newtown, 2113, Johannesburg Tel.: +27 (0)11 403 0458 Fax.: +27 (0)11 403 0465 Courriel : research@ifas.org.za Pour recevoir des informations de l’IFAS Recherche, veuillez nous envoyer un courriel avec ‘subscribe research’ comme objet.

Vers Empire Rd

De Korte St. Melle St.

De Beer St.

Jan Smuts Ave.

Jorrisen St.

Juta St.

Smit St.

Vers Newtown

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Lesedi #16 | Lettre de de l’information de l’IFAS Recherche | Septembre 2013


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