The Mill. Cadaqués Landscape. Temporary Exhibition at Gala Dalí Castle in Púbol.

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Montse Aguer, Directrice des musées Dalí / Carme Ruiz, Curatrice en Chef, Fundació Gala-Salvador Dalí

Montse Aguer, Director of the Dalí Museums / Carme Ruiz, Senior Curator, Fundació Gala-Salvador Dalí

c. 1923 / Détrempe et huile sur carton / 75 x 97 cm / Nº cat. 119

c. 1923 / Tempera and oil on cardboard / 75 x 97 cm / Cat. No. 119

LE MOULIN. PAYSAGE DE CADAQUÉS

Cette huile sur carton, qui rejoint aujourd’hui l’important fonds de la Fundació Gala-Salvador Dalí des œuvres de la première période, provient d’une collection particulière et n’avait, jusqu’à ce jour, été montrée qu’en de rares occasions. Le moulin. Paysage de Cadaqués nous parle d’un Dalí en plein apprentissage, âgé d’environ 19 ans, qui se livre à des expériences et cherche son propre style.1 Tout le monde sait que Dalí éprouvait un amour inconditionnel, presque obsessionnel, pour le paysage qui était le sien. C’est là qu’il vécut, peignit et développa sa réflexion théorique. Josep Pla, comme lui originaire de l’Empordà, le rappelle : « La découverte du paysage de l’Alt Empordà, qui a été, est et restera l’obsession de sa vie. [...] Il le promène à travers le monde avec une persistance inépuisable, parce qu’il le porte gravé dans sa mémoire, avec une précision presque douloureuse – délicieuse – et obsédante »2. Nombreux sont les peintres, comme Caspar David Friedrich ou Paul Cézanne, qui furent puissamment attachés à un paysage et Salvador Dalí est sans doute l’un des artistes les plus emblématiques de cette passion. À Cadaqués, grâce à la famille Pichot, Dalí découvrit l’œuvre d’autres artistes qui, eux aussi, s’étaient laissés séduire par ce décor, comme Eliseu Meifrèn, Ramon Pichot ou Sigfried Bürmann. C’est également dans cette famille qu’il dut entendre parler des séjours de Ramon Martí Alsina, Joan Roig i Soler, Miquel Utrillo, Santiago Rusiñol et Ramon Casas. Tous ces artistes furent profondément marqués par ce paysage et peignirent des marines et des vues de Cadaqués qui, alliées à la nature elle-même, exercèrent vraisemblablement une influence sur les premières toiles de Dalí.

TEMPORARY EXHIBITION

Salvador Dalí en peignant Port Alguer, c. 1923

15.03 - 02.06.2019

CASTELL GALA DALÍ DE PÚBOL

Le moulin. Paysage de Cadaqués illustrait un article de Joan Subias, historien de l’art et ami du peintre, paru dans la revue Alfar3. Le texte était précédé d’une citation d’Henri Matisse : « Je n’ai jamais évité l’influence des autres. (…) J’aurais considéré cela comme une lâcheté et un manque de sincérité vis-à-vis de moi-même. Je crois que la personnalité de l’artiste se développe, s’affirme par les luttes qu’elle a à subir. (…) Si le combat lui est fatal, c’est que tel devait être son sort ». L’opportunité de la citation est claire : le jeune Dalí, alors en plein apprentissage, explorait sans délai différents mouvements artistiques, et il avait commencé avant même d’entamer ses études à Madrid en 1922.

OPEN FROM 10 AM TO 6 PM Close on Mondays except April, 15th and 22th and May, 6th

INFORMATION Tel. 972 488 655 pubol@fundaciodali.org www.salvador-dali.org

#DalíElmolí1923

Cadaqués, 1923

Dans les toiles peintes entre 1916 et 1926, le caractère coloriste du paysage exprime la beauté d’un environnement naturel ensorcelant. Comme l’expliquait le jeune peintre dans son journal : « J’ai passé un été délicieux, comme toujours, à Cadaqués, village idéal, de rêve. Près de la mer latine, je me

THE MILL. CADAQUÉS LANDSCAPE

This oil painting, which now forms part of the Fundació Gala-Salvador Dalí’s major collection of works from the artist’s first period, was acquired from a private collection, and has previously been shown in public on only a very few occasions. The Mill. Cadaqués Landscape speaks to us of Dalí as an apprentice painter, aged 19 or so, who was experimenting and searching for a style of his own.1

Le torrent de la Jorneta, c. 1923

suis rassasié de lumière et de couleurs. J’ai traversé les journées de canicule à peindre frénétiquement, m’efforçant de traduire l’incomparable beauté de la mer, de la plage ensoleillée »4. Suivant les enseignements de Juan Núñez, son professeur à l’Ecole Municipale de Dessin de Figueres, Dalí ne cesse alors de représenter, dans ses œuvres, tous les espaces cachés de Cadaqués et de ses environs. Peignant d’après nature, Dalí s’est d’abord dirigé vers l’impressionnisme avant d’évoluer vers une certaine forme de pointillisme, le fauvisme, le futurisme, le purisme et le vibrationnisme jusqu’à arriver, en 1923, à un cubisme débutant, probablement pour se démarquer de la peinture de paysage traditionnelle. C’est alors qu’il commence son peindre “son Cadaqués”, dont Le moulin. Paysage de Cadaqués constitue un exemple parfaitement représentatif. Cette œuvre est donc le fruit d’une recherche constante et d’un mélange d’influences artistiques où l’on voit apparaître, dans la superposition d’images traitées dans une palette sobre qui ne sont pas sans rappeler Juan Gris, le cubisme des premières années: « Dans ma chambre je commençai à peindre mes premiers tableaux cubistes, directement et intentionnellement influencés par Juan Gris. Ils étaient presque monochromes. Comme en réaction contre mes périodes coloristes et impressionnistes précédentes, il n’y avait sur ma palette que du blanc, du noir, du terre de sienne et du vert olive »5. Le moulin à vent qui donne son titre au tableau est placé au premier plan, au milieu des terrasses d’oliviers aux feuilles vertes et argent. Le traitement chromatique, notamment les couleurs soutenues, soulignent le dessin des terrasses. Dans l’angle inférieur droit du carton, s’écoule la Jorneta, l’un des cours d’eau qui descend de la montagne pour former la plaine du Llaner. Au fond, on aperçoit le village de Cadaqués avec son église. La lumière est focalisée sur les vagues, le mur blanc d’une maison – référence incontournable à la maison paternelle – et sur une voile latine, image récurrente que l’on retrouve dans d’autres œuvres de cette période. Par ailleurs, on remarquera les deux femmes de la partie gauche qui rappellent celles que l’on peut voir dans d’autres œuvres de la même année – comme s’il s’agissait d’une seule et même femme représentée dans différentes postures et mouvements – comme dans Paysage avec personnages que l’on ne connaît que grâce à une reproduction parue dans une revue, Cadaqués, Le torrent de la Jorneta, Port Alguer ou Cadaqués vu depuis la Tour de les Creus6. De plus, ces personnages féminins affichent des formes rondes et généreuses, caractéristiques du noucentisme catalan, dans la lignée des figures de Joaquim Sunyer, Josep de Togores, Xavier Nogués et, certainement aussi, Picasso. Le moulin. Paysage de Cadaqués fait partie d’une série de peintures qui semblent liées les unes aux autres, comme si l’artiste avait voulu déployer un récit et une vision de Cadaqués depuis différents courants et points de vue ; histoires courtes d’un paysage concentré entre l’île d’Es Cucurucuc et la pointe d’Es Sortell, champ de vision du peintre depuis la maison blanche que la famille possédait sur la plage du Llaner. Le grand sujet de ce tableau, c’est la sensation que lui procure ce paysage depuis tout jeune ; un paysage qu’il n’oublie jamais, même lorsqu’il en est éloigné, qui le définit, qui le structure et à travers lequel, à tout moment, il exprimera ses sentiments et interrogations artistiques.

That Dalí had an unconditional, all but obsessive love of his landscape is well known. He lived in it, he theorized in it, he painted in it. As Josep Pla, who was also from the Empordà, wrote: ‘The discovery of the landscape of the Alt Empordà, which has been, is and will be the obsession of his life [...] He carries it through the world with an inexhaustible persistence because he holds it in his memory with an almost painful – and delicious – obsessive precision.’2 There are other painters, such as Caspar David Friedrich or Paul Cezanne, in whom we can recognize this passion, and we could cite many more, but Salvador Dalí is one of the most exemplary instances. It was in Cadaqués, thanks to the Pichot family, that Dalí became acquainted with the work of other artists who had also been seduced by those remarkable surroundings, such as Eliseu Meifrèn, Ramon Pichot and Siegfried Bürmann. In the same way he would also have heard of the sojourns in the little town of Ramon Martí Alsina, Joan Roig i Soler, Miquel Utrillo, Santiago Rusiñol and Ramon Casas, all of whom felt strongly attracted by this area and painted seascapes and views of Cadaqués, which undoubtedly exerted an influence, just as nature did, on Dalí’s first canvases.

Landscape with Figures, c. 1923

The Mill. Cadaqués Landscape appeared in the literary journal Alfar illustrating an article by the art historian Joan Subias, a friend of the painter.3 By way of epigraph the article had a quote from Henri Matisse: ‘I have never avoided the influence of others … I would have considered it cowardice and a lack of sincerity toward myself. I believe that the personality of the artist develops and asserts itself through the struggles it has to undergo … If the fight is fatal, it is a matter of destiny.’ The quote could hardly be more apt. The young Dalí, an apprentice painter, embraced a number of artistic movements in quick succession – and did so even before he began to study art in Madrid in 1922. In Dalí’s canvases from 1916 to 1926, the colourist landscape attempts to capture the beauty of an enchanting natural environment. As the young painter tells us in one of his diary entries: ‘I have spent a delicious (summer), as always, in the ideal dreaming village of Cadaqués. There, beside the Latin sea, I have thirsted for light and colour. I have spent the sweltering summer days frantically painting and striving to translate the incomparable beauty of the sea and the sunny beach.’4 Dalí, following the advice of his teacher at the Municipal School of Drawing in Figueres, Juan Núñez, tirelessly, ceaselessly represented in his works every corner of Cadaqués and its environs. Painting from nature led Dalí to evolve towards Impressionism, taking up certain elements of Pointillism, Fauvism, Futurism, Purism or Vibrationism, to arrive at an incipient Cubism by 1923, when, probably to distance himself from traditional landscape art, he began to paint ‘his’ Cadaqués, with The Mill. Cadaqués Landscape being a representative sample. This picture is, then, the result of constant experimentation and a variety of artistic influences, notable 1 A style that, in 1927, was to take a new turn towards Surrealism.

1 Un style qui, vers 1927, se tournera vers le surréalisme. 2 Traduit de Josep Pla, Homenots. Quarta sèrie. Dans Obra completa, vol. 29, Destino, Barcelone, 1975, p. 173 et 175. 3 J. Subias, “Salvador Dalí”, Alfar, La Coruña, mai 1924, p. 15. Image rights of Salvador Dalí reserved. Fundació Gala-Salvador Dalí, Figueres 2019 © Salvador Dalí. Fundació Gala-Salvador Dalí, Figueres 2019

4 Salvador Dalí, Journal d’un génie adolescent, Anatolia/Le Rocher, Monaco, 2000, p. 57.

5 Traduit de Salvador Dalí, The Secret Life of Salvador Dalí, Dial, New York, 1942, p. 160. 6 Ces peintures de 1923 sont : Paysage avec personnages, Localisation inconnue, n° cat. 115 ; Cadaqués, The Dalí Museum, St. Petersburg, Floride, n° cat. 116 ; Le torrent de la Jorneta, Collection privée, n° cat. 117, Port Alguer, Fundació Gala-Salvador Dalí, Figueres, n° cat. 140 et Cadaqués vu depuis la Tour de les Creus, Fundació Gala-Salvador Dalí, Figueres, n° cat. 125.

2 Translated from Josep Pla, Homenots. Quarta sèrie. In Obra completa, vol. 29, Destino, Barcelona, 1975, pp. 173 and 175. 3 Translated from J. Subias, ‘Salvador Dalí’, Alfar, La Coruña, May 1924, p. 15. 4 Translated from Salvador Dalí, Un diari: 1919-1920. Les meves impressions i records íntims. In Obra completa, vol. I, Textos autobiogràfics 1, Destino, Fundació Gala-Salvador Dalí, Barcelona, Figueres, 2003, p. 79.

features being the presence of early Cubism, the superimposition of images and the sobriety of the palette, reminiscent of Juan Gris: ‘In my room I was beginning to paint my first cubist paintings, which were directly and intentionally influenced by Juan Gris. They were almost monochromes. As a reaction against my previous colourist and impressionist periods, the only colours in my palette were white, black, sienna and olive green.’5

View of Cadaqués from the Creus Tower, c. 1923

The windmill that gives the picture its title is in the foreground, standing out against the terraces of olive trees with their green and silver leaves. The chromatic quality of the work, in particular the strong tones, establishes the different levels of the terraces. At the lower right of the cardboard we see the Jorneta stream, one of several seasonal water courses whose torrential descent down the mountainside formed the beach of Es Llaner. In the background, at upper right, is the town centre of Cadaqués with its church. The tonal highlights of the painting are found on the waves, on a house with white walls (an evident reference to Dalí’s father’s house), and on a lateen sail, a recurring image in other works from this time. Our attention is drawn to the women in the lower left foreground, who recall those we see in other works from the same year – essentially always the same female form, depicted in different postures and gestures – such as Landscape with Figures (which we know only from a reproduction in a magazine), Cadaqués, The Jorneta Stream, Port Alguer or View of Cadaqués from the Creus Tower. What is more, these female figures call to mind the archetypal full-figured, rounded women of Catalan Art Nouveau familiar from the work of Joaquim Sunyer, Josep de Togores, Xavier Nogués and surely also of Picasso.

Port Alguer, c. 1923

The Mill. Cadaqués Landscape is part of a series or suite of paintings, which link to each other, as if the artist were setting forth a story and a vision of Cadaqués from different registers and points of view. Brief accounts of a landscape that is concentrated between the islet of Es Cucurucuc and the point of Es Sortell, the radius of the painter’s vision from the family’s white house on Es Llaner beach. The impression that the landscape made on him from a very early age, an impression that he never forgot however much time he was to spend away from it, is the great subject of this painting. A landscape that determined him, configured him and enabled him to express his feelings and his artistic concerns his whole life long. 5 Salvador Dalí, The Secret Life of Salvador Dalí (trans. H. M. Chevalier), Dover Publications, New York, 1993, p. 160. 6 These paintings from 1923 are: Landscape with Figures, location unknown, Cat. No. 115; Cadaqués, The Dalí Museum, St. Petersburg, Florida, Cat. No. 116; The Jorneta Stream, private collection, Cat. No. 117, Port Alguer, Fundació GalaSalvador Dalí, Figueres, Cat. No. 140 and View of Cadaqués from the Creus Tower, Fundació Gala-Salvador Dalí, Figueres, Cat. No. 125.


c. 1923

SALVADOR DALÍ


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